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Anti-inflammatoires non-stéroïdiens

Résumé de la fiche
Les anti-inflammatoires non stéroïdiens sont définis par opposition aux corticoïdes (anti-inflammatoires
stéroïdiens). Les AINS sont des médicaments destinés à prévenir ou à contenir les manifestations inflammatoires.
Ils ont une action uniquement symptomatique en agissant sur la physiopathologie de l’inflammation, sans agir sur
son étiologie qui devra être traitée à part.

C’est une classe pharmacothérapeutique hétérogène très utilisée aussi bien en prescription qu’en automédication
dans des syndromes aigus ou des affections chroniques, notamment rhumatismales.

Tous les AINS possèdent des propriétés communes  : anti-inflammatoires, antalgiques, antipyrétiques et anti-
agrégants plaquettaires (les coxibs ne possèdent pas cette dernière propriété). Par ailleurs, les AINS sont
responsables de très nombreux effets secondaires qui entraînent de nombreux effets indésirables souvent graves.

Item(s) ECN
125 : Arthrose
132 : Thérapeutiques antalgiques, médicamenteuse
192 : Polyarthrite rhumatoïde
193 : Spondylarthrite inflammatoire
194 : Arthropathie microcristalline
326 : Prescription et surveillance des classes de médicaments les plus courantes chez l’adulte et chez l’enfant

Rappel physiopathologique
Les AINS sont tous des inibiteurs de la cyclo-oxygénase (COX).

Il existe deux isoformes de la COX :

-La COX1 constitutive (reins, estomac, vaisseaux, etc.) a un rôle physiologique. Elle permet la synthèse des
prostaglandines (PG) intervenant dans l’estomac (cytoprotection), les reins (maintien du flux sanguin rénal) et la
synthèse du thromboxane A2 plaquettaire (vasoconstriction et agrégation plaquettaire). Son inhibition est donc
responsable des effets indésirables des AINS (toxicité gastrique, diminution du flux sanguin rénal et effet anti-
agrégant plaquettaire).

-La COX2 inductible par des autacoïdes (IL1, TNFα) en cas d’inflammation permet la synthèse des PG intervenant
dans ces réactions. Son inhibition est responsable des effets pharmacodynamiques des AINS (effet anti-
inflammatoire ainsi que les effets analgésiques et antipyrétiques).

Médicaments existants
La famille des AINS comporte de nombreuses substances appartenant à plusieurs familles chimiques, dont le point
commun est d’être des acides faibles.

Dénomination Commune Internationale Famille chimique


Phénylbutazone Pyrazolés
Indométacine Indoliques

Sulindac
Acéclofénac Arylcarboxyliques

Acide tiaprofénique

Alminophène

Diclofénac

Etodolac

Flurbiprofène

Ibuprofène

Kétoprofène

Nabumétone

Naproxène
Acide niflumique Fénamates

Acide méfénamique
Piroxicam Oxicams

Meloxicam

Téloxicam
Nimésulide Sulfonalidine
Célécoxib Inhibiteurs sélectifs de la Cox-2 ou Coxibs

Parécoxib

Mécanismes d’action des différentes molécules


Par leur action inhibitrice de la COX, tous les AINS inhibent la transformation de l’acide arachidonique en
prostaglandines ou thromboxanes. 

Les Coxibs sont des inhibiteurs dits "sélectifs" de la COX2 aux doses usuelles. Ils ont été présentés comme une
nouvelle classe d’AINS  agissant préférentiellement sur la synthèse des prostaglandines lors des phénomènes
inflammatoires, et donc sans effet indésirable gastrique. Or, ils n’ont pas montré d'avantages sur ce plan par rapport
aux autres AINS et leur efficacité n’est pas supérieure à celle des AINS classiques. En revanche, ils exposent à des
effets indésirables cardiovasculaires pouvant être graves (risque d’infarctus du myocarde). L’augmentation de la
fréquence d’infarctus du myocarde et d’AVC a d’ailleurs conduit au retrait mondial en 2004 du rofécoxib.

Enfin, en inhibant préférentiellement la COX2, les Coxibs ne diminuent pas la production de thromboxane. Ils n’ont
donc pas d’effet anti-agrégant plaquettaire.

Effets utiles en clinique


Certains AINS sont commercialisés à faibles doses pour leur effet antalgique et antipyrétique, leur effet anti-
inflammatoire n’apparaissant qu’à des doses plus élevées.

Molécules Indications
AINS utilisés comme antalgiques-antipyrétiques : Traitement symptomatique des affections
douloureuses et/ou fébriles
Ibuprofène, kétoprofène, diclofénac, naproxène,
acide méfénamique Traitement symptomatique des dysménorrhées
essentielles.
Traitement symptomatique au long cours des
rhumatismes inflammatoires chroniques et de
Classe des arylcarboxyliques (diclofénac, certaines arthroses douloureuses et invalidantes.
kétoprofène…)
Traitement symptomatique de courte durée de
Classe des fénamates (acide niflumique) poussées aiguës des rhumatismes abarticulaires,
Classe des oxicams (piroxicam, meloxicam, arthroses, arthrite, lombalgies.
ténoxicam) Douleurs post-opératoires, crises de coliques
Classe des indoliques (indométacine, sulindac) néphrétiques, traumatologie, traitement adjuvant
des manifestations inflammatoires en
stomatologie ou chirurgie dentaire ou ORL.
Traitement symptomatique au long cours de la
spondylarthrite ankylosante.
Phénylbutazone Traitement de courte durée (moins de 7 jours) des
poussées aiguës de rhumatismes abarticulaires,
goutte et radiculalgie sévère.
Traitement symptomatique des arthroses
Nimésulide
douloureuses et invalidantes.
Traitement symptomatique des douleurs de
Célécoxib
l’arthrose et de la polyarthrite rhumatoïde.
Traitement à court terme des douleurs post-
Parécoxib
opératoires.

Pharmacodynamie des effets utiles en clinique


L’effet anti-inflammatoire, l’effet antalgique et l’effet antipyrétique résultent de l’inhibition de la formation des
prostaglandines :

-Effet anti-inflammatoire : atténuation des phénomènes inflammatoires impliquant les prostaglandines


(vasodilatation, œdème, douleur) sans effet sur les processus entraînant des lésions tissulaires chroniques.

-Effet antalgique : atténuation des douleurs d’origine périphérique.

-Effet antipyrétique : diminution de la fièvre et retour à la normale de la température corporelle par abaissement du
seuil du thermostat hypothalamique.

L’importance respective de ces trois effets varie avec les produits.

L’effet anti-agrégant plaquettaire résulte de l’inhibition de la formation de thromboxane. Les Coxibs sont dénués
d’effet antiplaquettaire à dose usuelle.

Posologie
Les AINS doivent toujours être prescrits et utilisés à dose minimale efficace (pour l’indication concernée) et
pendant la durée la plus courte possible.

La poursuite du traitement ne se justifie pas en dehors des manifestations symptomatiques d’arthrose ou de


maladie inflammatoire chronique.

Le choix d’un AINS doit tenir compte de son profil de sécurité par rapport aux facteurs de risques individuels du
patient. Le risque digestif (ulcère, perforation, hémorragie) augmente avec la dose, au cours de la première semaine
de traitement, en cas d’antécédent d’hémorragie/perforation et en cas d’association à un autre AINS, à une
corticothérapie, aux anticoagulants ou aux ISRS. Il varie également selon le type d’AINS. A la dose utilisée dans les
maladies inflammatoires, le risque le plus faible est observé avec l’ibuprofène puis le diclofénac, l’indométacine, le
naproxène et le piroxicam. La prise des AINS se fera au cours des repas pour limiter leur toxicité digestive.

Caractéristiques pharmacocinétiques utiles en clinique


Molécule Absorption Distribution Métabolisme Elimination
Résorption digestive Bonne diffusion dans la Métabolisme Elimination essentiellement
rapide plupart des tissus et hépatique intense urinaire sous forme de
fluides de l’organisme (90%) métabolites
Bonne biodisponibilité
AINS (diffusion facilitée dans
(70 à 80%)
les tissus inflam-matoires)

Forte liaison aux protéines


plasmatiques (60 à 99%)

Source de la variabilité de la réponse


-Interactions médicamenteuses :

Les AINS entraînent une diminution de l’excrétion rénale de très nombreux médicaments, avec parfois des
conséquences cliniques graves lors d’une altération de la fonction rénale même de faible amplitude.

Interaction médicamenteuse Mécanisme et conséquences de l’interaction


AINS entre-eux Augmentation du risque digestif et hémorragique
AVK Déplacement des AVK de leur site d’action. Augmentation du
risque hémorragique
Héparines Déplacement des héparines de leur site d’action. Augmentation
du risque hémorragique
Anti-agrégants plaquettaires Déplacement des AAG de leur site d’action. Augmentation du
risque hémorragique
Diurétiques, IEC Diminution de la filtration glomérulaire par diminution de la
synthèse des prostaglandines rénales. Risque d’IRA en cas de
déshydratation
Metformine Risque d’acidose lactique par diminution de l’élimination rénale de
la metformine
Lithium Augmentation de la lithiémie par diminution de son élimination
rénale. Risque de surdosage
Méthotrexate Augmentation de la toxicité hématologique du MTX
par diminution de son élimination rénale et déplacement de ses
sites de liaisons aux protéines plasmatiques. Risque de
surdosage
Sulfamides hypoglycémiants Risque d’hypoglycémie par déplacements de leurs sites de liaison
plasmatiques par les AINS
Ciclosporine, Tacrolimus Addition des effets néphrotoxiques
Béta-bloquants Réduction de l’effet anti-hypertenseur par inhibition des
prostaglandines vasodilatatrices par les AINS

-Réponses des populations physiologiques particulières :

-Femme enceinte et allaitante : utilisation contre-indiquée à partir du 6ème mois. Toxicité de classe concernant tous
les inhibiteurs de synthèse de prostaglandines : risques d’atteinte fonctionnelle rénale et d’atteinte
cardiopulmonaire. Lors de l’accouchement, il y a un risque d’allongement du temps de saignement pour la mère et
l’enfant.

Les AINS passent dans le lait maternel. Par mesure de précaution, il convient d’éviter de les administrer chez la
femme qui allaite

-Sujet âgé : les sujets âgés présentent un risque accru d’effets indésirables aux AINS en particulier d’hémorragie
gastro-intestinale et de perforations pouvant être fatales. Cependant, il n’y a pas lieu de réduire la posologie chez le
sujet âgé.

-Réponses des populations pathologiques particulières :

-Insuffisance rénale sévère : les AINS sont contre-indiqués en cas d’insuffisance rénale sévère.
Les AINS, en inhibant l’action vasodilatatrice des prostaglandines rénales, sont susceptibles de provoquer une
insuffisance rénale fonctionnelle par diminution de la filtration glomérulaire. Cet effet-indésirable est dose
dépendant.

-Insuffisance hépatique sévère : les AINS sont contre-indiqués en cas d’insuffisance hépatique sévère.

Situations à risque ou déconseillées


Contre-indications :

Allergie aux AINS ou à l’aspirine

Ulcère gastro-duodénal en évolution

Insuffisances hépatiques ou rénales sévères

Antécédents récents de rectites ou rectorragies (pour les suppositoires)

Grossesse (au premier trimestre et formellement au 3ème trimestre) et allaitement

Enfants < 15 ans sauf mention

Lupus érythémateux disséminé

Affections cardiaques et vasculaires (célécoxib et parécoxib)

HTA non contrôlée (phénylbutazone)

Hémopathies, atteintes des lignées sanguines (phénylbutazone)

Précautions d’emploi
Arrêt immédiat en cas de réaction allergique (crise d’asthme) ou autres troubles graves.

Utiliser avec prudence les AINS en cas de déshydratation, HTA, antécédents d’ulcère, hernie hiatale ou hémorragie
digestive, insuffisance cardiaque, hépatique ou rénale, chez le sujet âgé et chez les conducteurs et utilisateurs de
machines.

La prescription d’un antisécrétoire (Inhibiteurs de la pompe à protons ou IPP) en association aux AINS se justifie
dans des situations de risque clairement identifiées :

-sujets > 65 ans ;

-antécédent d’ulcère gastrique ou duodénal compliqué ou non compliqué ; 

-association à un antiagrégant  plaquettaire, notamment l’aspirine à faible dose et le clopidogrel, et/ou les
corticoïdes et/ou un anticoagulant (tout en rappelant que ces associations doivent de principe être évitées) ;

Les IPP seront utilisés à demi-dose (sauf oméprazole pleine dose), il n’y a pas de bénéfice clinique supplémentaire
à prescrire une pleine dose.

Effets indésirables
-Aux doses thérapeutiques :

Les effets indésirables des AINS sont nombreux, très fréquents parfois graves voire mortels. Etant donné leur très
grande utilisation, notamment en France, les AINS font partis des médicaments les plus dangereux. Il convient de
mettre en garde le patient contre les risques d’automédication.

Molécules Nature de l’effet indésirable gravité Estimation de la


fréquence

 
AINS Epigastralgies, Nausées, gastralgies, modérée Fréquent
vomissements, diarrhée,
 
hémorragie digestive occulte, ulcère Potentiellement Exceptionnelle
gastro-duodénal, perforation digestive grave
rétention hydrosodée, hyperkaliémie, Potentiellement Très rare
IRA, oligurie, syndrome néphrotique, grave
élévation
prurit, éruptions cutanés, urticaire Peu grave Fréquent
Crise d’asthme, œdème de Quincke Potentiellement Rare
voire choc anaphylactique, grave
Arrêt immédiat du
traitement
syndrome de Lyell ou de Stevens- Potentiellement Exceptionnelle
Johnson grave
Arrêt immédiat du
traitement
vertiges, céphalées, troubles visuels Peu grave Peu fréquent
bénins, somnolence, acouphènes,
asthénie, insomnie
Elévation des transaminases Réversible Exceptionnelle
hépatites Potentiellement Rare
grave
Leucopénie, thrombopénie, Potentiellement Rare
agranulocytose grave
Arrêt immédiat du
traitement
Cystite médicamenteuse Potentiellement Peu fréquent
grave
Célécoxib Infarctus du myocarde Potentiellement Peu fréquent
grave

-Intoxication aiguë et surdosage :  

Symptômes de l’intoxication : Somnolence, vertiges, désorientation, brûlures de l’estomac, nausées, vomissements,


convulsions surtout chez l’enfant en bas âge. Un surdosage sévère peut conduire à une hypertension, une
insuffisance rénale aiguë, une atteinte hépatique, une détresse respiratoire, un coma, des convulsions et un
collapsus cardiovasculaire avec arrêt cardiaque.

Signes biologiques : Altération des fonctions rénales et hépatiques, hypoprothrombinémie, acidose métabolique.

Conduite à tenir : Pas d’antidote spécifique, transfert immédiat en milieu hospitalier ; évacuation rapide du produit
ingéré par lavage gastrique ; charbon activé pour diminuer l’absorption du médicament et traitement
symptomatique avec surveillance des fonctions rénales et hépatiques.

Surveillance des effets


-Effets indésirables :

Au cours  d’un traitement prolongé, il est recommandé de contrôler la numération et la formule sanguine, les
fonctions hépatiques et rénales, notamment chez les patients présentant des facteurs de risques  : sujets âgés,
hypovolémie quelque soit la cause, insuffisance rénale chronique, insuffisance cardiaque, syndrome néphrotique,
néphropathie lupique et cirrhose hépatique décompensée.

Une surveillance de la kaliémie est recommandée en cas de diabète ou en cas de traitement concomitant avec des
médicaments hyperkaliémants.

Chez les patients prenant un traitement anti-coagulant, il convient de surveiller particulièrement l’apparition d’une
symptomatologie digestive. En cas d’hémorragie gastro-intestinale, interrompre le traitement.

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31 mai 2017 Posté dans: Antalgiques non opiacés (/medicaments/par-specialites/category/antalgiques-non-
opiaces)

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