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Anesthésie
générale
de l’enfant et
du nouveau-né
Tome II
Ce n’est qu’à partir de la deuxième partie des années 50 que des articles d’anesthésie pédia-
trique apparaissent dans les revues d’anesthésie. Leur nombre va s’accroître considérablement
au cours de la décennie suivante à mesure que les études de la physiologie du nouveau-né, du
nourrisson et du jeune enfant vont mettre en évidence les grandes différences qui existent avec
l’adulte. Le livre de CA Smith, Anesthesia for Infants and Children, a joué dans ce domaine un rôle
primordial et a permis à l’anesthésie pédiatrique de s’imposer comme une spécialité reconnue
par la communauté anesthésique dont la majorité des membres redoutait d’avoir à anesthésier
des nouveau-nés, des nourrissons ou même de jeunes enfants.
La spécialité va se développer d’autant plus vite que la même évolution est observée chez les
chirurgiens qui cherchent à s’attacher les services de ceux qui ont été formés par les quelques
pionniers qui se consacrent exclusivement à l’anesthésie pédiatrique comme Gordon Jackson
Rees et Gordon Bush au Royaume-Uni, Morton Digby Leigh et W. Glover aux Etats-Unis.
Dans les années 80, en Angleterre, un conflit oppose un anesthésiste qui refuse de faire l’anes-
thésie d’un nouveau-né pour la réparation d’une malformation congénitale et un chirurgien qui
tient à faire lui-même l’intervention. Le motif du refus avancé par l’anesthésiste était qu’il n’était
pas capable de faire l’anesthésie, n’ayant pas l’expérience suffisante et que, de surcroît, il en était
de même pour le chirurgien. La réponse conjointe des Sociétés Royales anglaises de chirurgie et
d’anesthésie donna raison à notre collègue anesthésiste britannique qui avait dirigé le nouveau-né
dans un service de chirurgie néonatale.
XI
L’expérience éditoriale se retrouve dans la façon dont est construit ce manuel d’anesthésie pédia-
trique divisé en 10 parties, les deux premières étant consacrées à la physiologie dans son sens
le plus large et à la pharmacologie, connaissances primordiales ; les deux suivantes au matériel
anesthésique et au monitorage puis à la réalisation d’une anesthésie générale chez l’enfant.
Quatre parties sont ensuite consacrées successivement au nouveau-né et ses principales patho-
logies chirurgicales, aux anesthésies en situations particulières, aux terrains particuliers et, enfin,
aux spécificités des spécialités chirurgicales qui sont abordées en fonction de leurs implications
anesthésiques. Les deux dernières parties sont consacrées aux complications opératoires et aux
syndromes pédiatriques rares, les plus courants ayant été abordés dans la partie consacrée aux
terrains particuliers.
Moderne dans sa conception, ce manuel est aussi adapté tant à la pratique du spécialiste qu’à
la formation du futur anesthésiste. C’est un livre de référence que l’on aimera consulter.
Claude Saint-Maurice
Professeur Honoraire à la Faculté Cochin (Paris)
FRSA
XII
Les mêmes principes de rigueur scientifique et d’objectivité dans la description des prises en
charge ont présidé à la rédaction de cette nouvelle édition. Les bases physiologiques sont large-
ment développées mais toujours avec un objectif direct et concret : elles ne sont jamais “gratui-
tes” mais, au contraire, présentées pour leur intérêt pratique, permettant, selon le cas, de mieux
comprendre la physiopathologie de certaines affections, les raisons du choix d’une stratégie
thérapeutique, les avantages ou les risques de techniques particulières, ou encore l’importance
de certaines précautions anesthésiques.
L’anesthésie pédiatrique est l’anesthésie des situations extrêmes. Elle concerne, schématique-
ment, deux populations opposées sur le plan de la morbi-mortalité : d’une part, celle des enfants
en excellente santé, aux organes “sains” et aux possibilités de récupération exceptionnellement
élevées ; d’autre part, celles des patients en situation précaire, soit du fait d’une immaturité
extrême (grande prématurité) soit du fait de pathologies acquises ou constitutionnelles sévères,
souvent génétiquement transmises et qu’une prise en charge insuffisamment précautionneuse
peut décompenser brutalement, parfois de manière irréversible.
XIII
La réalisation de cette édition n’aurait pas été possible sans l’assistance éditoriale sans faille et
le travail admirable de Madame Myriam Malvaut. Qu’elle trouve dans ces lignes l’expression de
notre reconnaissance et de l’admiration que Francis Veyckemans et moi-même lui portons tous
deux. Le succès de la précédente édition lui est en grande partie redevable avec, bien sûr, l’as-
sistance de l’équipe Sauramps Médical et nous espérons que cette seconde édition connaîtra
le même succès.
Dr Bernard Dalens
XIV
Il est rapidement apparu également qu’il n’était plus possible de réaliser cet ouvrage à “quatre
mains” : c’est pourquoi, nous avons fait appel à différents experts (Fannie Clément, Francine le
Houiller, André Saint-Pierre, Gilles Orliaguet, Nathalie Bourdaud et Walid Habre) pour rédiger les
chapitres dans les domaines où leur expertise est largement reconnue et nous les remercions
d’avoir accepté de nous aider.
Pour ma part, cette deuxième édition fut aussi l’occasion d’analyser à nouveau en profondeur
les bases scientifiques de certains concepts qui sont répétés, d’exposé en exposé ou de livre en
livre et, selon les cas, de les mettre en question ou de les confirmer. C’est pour moi une façon de
respecter et poursuivre le travail de nos maîtres. La devise de la Société Canadienne d’Anesthé-
sie convient, me semble-t-il, particulièrement au domaine de l’anesthésie des enfants : science,
vigilance et compassion. Le premier thème est, bien sûr, prépondérant dans cet ouvrage mais
j’espère que le lecteur y retrouvera les deux autres en filigrane.
Ce fut un réel défi de parvenir à rédiger cet ouvrage en respectant les délais que nous nous étions
fixés tout en poursuivant nos activités cliniques, académiques et administratives. La ténacité et
l’amitié de Bernard Dalens ont été un aiguillon efficace, et je l’en remercie. De même, je remercie
mon épouse Françoise et nos enfants, Marie-Ange, Corentine et Bruno pour leur soutien et leur
tendresse. Je dédie tout ce travail à mes petits-enfants, Alice et Alexis, sources inépuisables de
joies et d’émerveillement, ainsi qu’à tous les enfants qui m’ont accordé leur confiance.
Francis Veyckemans
XV
Anesthésie générale
de l’enfant
Jeûne préopératoire 31
Cette évaluation repose sur une anamnèse, un examen clinique et, le cas échéant, des examens
paracliniques choisis en fonction de ces données et de la lourdeur de l’intervention prévue.
Anamnèse
1) L’enfant a-t-il saigné plus de 24 heures ou nécessité une transfusion sanguine après un traumatisme
ou un acte chirurgical mineur ?
2) L’enfant a-t-il saigné plus de 12 heures après la section du cordon ombilical ou à la chute de celui-ci ?
3) L’enfant a-t-il saigné dans la nuit ou au bout de 24 heures après une extraction dentaire ?
4) L’enfant a-t-il présenté une ou plusieurs hématuries spontanées ?
5) Mêmes questions que précédemment mais concernant la fratrie et les parents
6) L’enfant présente-t-il fréquemment des ecchymoses sans cause apparente ?
7) L’enfant a-t-il présenté des épistaxis ayant nécessité un traitement par un ORL ?
8) L’enfant a-t-il saigné plus de 15 min après une ponction veineuse ?
9) L’enfant a-t-il tendance au saignement “continu” ?
Tableau 01-1: Interrogatoire à la recherche d’un trouble de l’hémostase chez l’enfant
Les patients sujets au mal des transports ou à des vomissements acétonémiques du jeûne
sont davantage exposés à des vomissements postopératoires : une prophylaxie est à envisager.
Cette enquête anamnestique sera suivie d’un examen clinique complet précisant notamment les
éléments listés dans le tableau 01-2.
Références
[1] Maxwell LG — Age-associated issues in preoperative evaluation, testing, and planning: pediatrics. Anesthesiol Clin
North America 2004; 22:27-43.
[2] von Ungern-Sternberg B, Boda K, Chambers NA, Rebmann C, Johnson C, Sly PD, Habre W. — Risk assessment for
respiratory complications in paediatric anaesthesia: a prospective cohort study. The Lancet 2010; 376:773-83.
[3] Drongowski RA, Lee D, Reynolds OI, Malviya S, Harmon CM, Geiger J, Lelli JL, Coran AG. — Increased respiratory
symptoms following surgery in children exposed to environmental tobacco smoke. Pediatr Anesth 2003; 13:304-10.
[4] O’Rourke JM, Kalish LA, McDaniel S, Lyons B. — The effects of exposure to environmental tobacco smoke on pulmo-
nary function in children undergoing anesthesia for minor surgery. Pediatr Anesth 2006; 16:560-7.
[5] Crowe S, Lyons B. — Herbal medicine use by children presenting for ambulatory anesthesia and surgery. Pediatr Anesth
2004; 14:914-9.
[6] Siebert JN, Posfay-Barbe KM, Habre W, Siegrist CA. — Influence of anesthesia on immune responses and its effect on
vaccination in children: review of evidence. Pediatr Anesth 2007; 17:410-20.
[7] Uezono S, Holzman RS, Goto T et al. — Prediction of difficult airway in school-aged patients with microtia. Pediatr
Anesth 2001; 11: 409-13.
[8] Veyckemans F. — Child obesity and anaesthetic morbidity. Curr Opin Anaesthesiol 2008; 21:308-12.
Enfant adopté
Le cas des enfants adoptés est particulier en ce sens qu’on ne connaît généralement pas
l’anamnèse familiale et néonatale. L’examen clinique doit être particulièrement minutieux et cer-
tains examens complémentaires doivent être demandés s’ils ne l’ont pas été lors des formalités
d’adoption : enzymes hépatiques, sérologie infectieuse, test de falciformation, électrophorèse
de l’hémoglobine, etc.
Généralités
Lorsque l’enfant présente une pathologie significative, la première étape consiste à vérifier que
le bilan diagnostique et évolutif est complet et à prendre contact avec le médecin habituel (pé-
diatre ou autre spécialiste) de l’enfant [9]. Si ce bilan est incomplet ou ancien, il faut prescrire
des examens complémentaires appropriés et demander des avis spécialisés en repoussant la
date de toute intervention non urgente jusqu’à ce que l’on dispose de l’ensemble des résultats :
cette attitude est la seule qui permette d’évaluer le risque et de choisir la meilleure stratégie
anesthésique.
L’existence d’une affection évolutive aiguë pose toujours un dilemme : quel est le risque de l’anes-
thésie par rapport au bénéfice escompté de l’intervention ? Ce rapport risque/bénéfice varie en
fonction de l’affection aiguë (gros rhume vs pneumonie), du caractère électif (cure de hernie) ou
urgent (drainage d’abcès) de l’intervention prévue, de son caractère diagnostique ou curatif et,
enfin, de l’expérience de l’anesthésiste. Les aspects anesthésiques d’une infection aiguë des
voies aériennes supérieures sont décrits dans le Tome 3, chapitre 6.
La présence d’une malformation congénitale doit en faire rechercher d’autres, en particulier dans
les tissus et organes de développement embryologique concomitant : lésions cardiaques et/ou
rénales en cas de fente labio-palatine, anomalies urinaires en présence d’un hypospadias, ano-
malies vertébrales, cardiaques et trachéales en cas d’imperforation anale, etc.
La découverte d’un souffle cardiaque méconnu impose une consultation de cardiologie pédia-
trique pour définir s’il s’agit d’un souffle fonctionnel, lié à la croissance, ou d’une pathologie car-
diaque. Cliniquement, un souffle fonctionnel est en général systolique (sauf le “hum veineux” au
niveau du cou), doux (pas de thrill), localisé (sauf le souffle de sténose pulmonaire fonctionnelle
du nourrisson de moins de 6 mois) et n’est accompagné d’aucune limitation à l’effort. La prise
en charge d’un enfant présentant une anomalie cardiaque implique de comprendre les consé-
quences physiopathologiques de cette anomalie et d’en intégrer la prise en charge dans le plan
d’anesthésie (voir Tome 3, chapitre 14).
L’existence d’une respiration nocturne bruyante, d’un sommeil agité et d’une somnolence diurne
doit faire suspecter des apnées obstructives ou une hypoventilation obstructive du sommeil (1
à 3 % des enfants). Seuls 10 % des enfants ronfleurs souffrent de ronflement primaire (qui n’a
pas de conséquences morbides) mais la majorité des enfants souffrant d’apnées obstructives
du sommeil ronflent [10]. Il n’y a pas actuellement de consensus sur la nécessité de réaliser une
polysomnographie chez l’enfant par ailleurs en bonne santé dont l’anamnèse suggère la présence
d’un syndrome d’apnée obstructive du sommeil (SAOS).
Les enfants atteints d’affections malignes peuvent nécessiter diverses interventions médico-chi-
rurgicales : biopsie, pose d’accès veineux central, exérèse chirurgicale d’une lésion tumorale,
radiothérapie. Si la présence d’une masse médiastinale est suspectée (biopsie de ganglion, bilan
initial de leucose), il faut demander une radiographie du thorax et, si nécessaire, un scanner tho-
racique. Même plusieurs mois ou années après leur guérison, ces patients peuvent présenter un
risque anesthésique plus élevé que dans la population normale.
Les enfants traités par anthracyclines (adriamycine, daunorubicine, doxorubine) et/ou par irra-
diation médiastinale sont exposés à des risques de troubles du rythme et de décompensation
cardiaque (cardiomyopathie dilatée avec atrophie des fibres myocardiques) tout au long de leur
vie. Ces risques sont majorés par les effets hémodynamiques des agents anesthésiques même si
la fonction cardiaque au repos est normale [11] : un contrôle de l’ECG et une échocardiographie
(ou un examen isotopique de la fonction cardiaque) sont nécessaires, même en cas de guérison
complète du cancer. D’autres organes (poumons, reins, etc.) peuvent présenter des séquelles
des traitements subis : il est important de savoir quels traitements ont été administrés et quelles
en ont été les complications pour adapter le plan de l’anesthésie en conséquence [12].
D’autre part, les enfants soumis récemment à des chimiothérapies anticancéreuses, surtout celles
comportant du cisplatine ou de la vincristine, présentent un risque accru de lésions neurologiques
liées à une compression nerveuse ou à une ALR [13]. Lorsque ces enfants doivent subir une in-
tervention chirurgicale majeure, source de douleurs postopératoires importantes, parfois difficiles
à traiter par les morphiniques parentéraux, il convient d’évaluer au cas par cas, en concertation
avec l’enfant, sa famille et l’oncologue pédiatrique, les bénéfices escomptés et les risques réels
en fonction de l’état clinique et psychologique du patient ainsi que de son espérance de vie.
Myopathie
En prévision d’une intervention importante, il est recommandé de faire pratiquer des examens
complémentaires orientés en fonction de l’intervention et mais aussi de ses suites prévisibles de
manière à disposer d’éléments de référence pour juger de l’évolution périopératoire de l’enfant
(Tableau 01-3).
Références
[9] Ferrari LR. — Preoperative evaluation of pediatric surgical patients with multisystem considerations. Anesth Analg 2004;
99:1058-69.
[10] Schwengel DA, Sterni LM, Tunkel DE, Heitmiller ES. — Perioperative management of children with obstructive sleep
apnea. Anesth Analg 2009; 109:60-75.
[11] Huettemann E, Junker T, Chatzinikolaou KP et al. — The influence of anthracycline therapy on cardiac function during
anesthesia. Anesth Analg 2004; 98:941-7.
[12] Latham G, Greenberg R. — Anesthetic considerations for the pediatric oncology patient: part 3 : pain, cognitive dys-
function and preoperative evaluation. Pediatr Anesth, 2010; 20: 479-89.
[13] Hebl JR, Horlocker TT, Pritchard DJ. — Diffuse brachial plexopathy after interscalene blockade in a patient receiving
cisplatin chemotherapy: the pharmacologic double crush syndrome. Anesth Analg 2001; 92:249-51.
Examens complémentaires
Bilan de coagulation
Une anamnèse positive d’antécédents hémorragiques est 12,5 fois plus prédictive de la survenue
de complications hémorragiques que les tests de laboratoire [14] même si une étude multicentri-
que réalisée en 1996 par l’ADARPEF chez 1479 enfants se présentant pour une amygdalectomie
a montré que l’interrogatoire ne permet pas de prédire un bilan de coagulation anormal ni la
survenue d’une hémorragie postopératoire [15].
L’anamnèse hémorragique étant peu fiable avant l’âge de la marche, il reste habituel, avant l’âge
de 2-3 ans, de rechercher des troubles de l’hémostase par la biologie (INR, TCA et dosage du
fibrinogène), notamment avant une anesthésie locorégionale ou une chirurgie potentiellement hé-
morragique. Il faut cependant garder à l’esprit que ces tests de dépistage n’évaluent que la cas-
cade de la coagulation et sont insensibles aux troubles de l’hémostase primaire (thrombopathie,
ou déficit en facteur Willebrand sauf s’il est associé à un déficit en facteur VIII) et de la fibrinolyse.
En cas d’anamnèse positive, un bilan d’hémostase complet doit être réalisé en collaboration avec
le laboratoire d’hémostase (voir Tome 3, chapitre 18) ; il comprend une évaluation :
• de l’hémostase primaire : numération plaquettaire, PFA-100, tests d’agrégation plaquettaire ;
• de hémostase secondaire : INR, TCA et fibrinogène et si nécessaire dosage des facteurs
de coagulation ;
• de la fibrinolyse : temps de lyse des euglobulines, dosage des D-dimères ;
• et, éventuellement, un thromboélastogramme (ROTEM).
Chez le nourrisson ou l’enfant porteur d’une malformation cardiaque cyanogène de type “ventri-
cule unique”, il peut exister un déficit en certains facteurs procoagulants (protéine C, antithrom-
bine III) qui les prédispose à des complications thromboemboliques [16].
Lorsqu’une malformation veineuse de grande taille doit être opérée, le bilan de l’hémostase doit
être complet car une consommation locale de facteurs de coagulation (mesure des D-dimères)
et/ou une fibrinolyse, jusque là compensées, peuvent brusquement se décompenser en pério-
pératoire. Si c’est le cas, une prophylaxie préopératoire par héparine de bas poids moléculaire
à une posologie correspondant à la moitié du traitement d’une thrombose veineuse est recom-
mandée [17].
Dosage de l’hémoglobine
Électrocardiogramme
L’ECG a peu d’indications chez l’enfant et il n’est utile que dans les conditions suivantes :
• antécédents de chutes inexpliquées ou de perte de conscience de cause indéterminée
(risque de syndrome de Wolf-Parkinson-White, de syndrome de QT long…) ;
Les enfants multiopérés (surtout durant la première année de vie), ceux atteints de spina bifida
ou présentant un terrain atopique ont un risque accru d’allergie au latex qu’il faut rechercher à
l’anamnèse. Au moindre doute, il faut demander des examens complémentaires de confirmation
du diagnostic (RAST, tests cutanés).
Même si aucun signe d’allergie n’est retrouvé, les patients multiopérés doivent être considérés
comme à très haut risque et pris en charge dans un environnement strictement sans latex (pre-
mier cas de la journée dans la salle d’opération, éviction de tout matériel contenant du latex :
gants, sondes, champs, mais aussi garrots, flacons de médicaments et lignes de perfusion/
transfusion avec site d’injection contenant du latex, etc.) (voir Tome 3, chapitre 15).
Il est également important de s’assurer de l’absence d’allergie à des antibiotiques, cause crois-
sante de réactions anaphylactiques périopératoires depuis que la prévention primaire et secon-
daire de l’allergie au latex a été instaurée dans de nombreux hôpitaux. Il est cependant souvent
difficile de différencier sur base de la seule anamnèse une intolérance à un antibiotique (problèmes
digestifs) d’une allergie vraie (éruption cutanée, œdème de Quincke).
Chez l’enfant de poids inférieur à 20 kg, la quantité de sang prélevé ne doit pas dépasser
12 mL/kg avec une compensation isovolémique (cristalloïdes et/ou colloïdes) et un contrôle de
Cette technique ne peut être proposée que lorsque les abords veineux l’autorisent. Une prémé-
dication est nécessaire pour assurer le calme de l’enfant qui redoute toute ponction veineuse
malgré l’application de crème analgésique. L’échec du prélèvement doit être envisagé. Enfin, le
coût de l’hospitalisation de jour et la disponibilité limitée des parents sont des inconvénients dont
il faut tenir compte.
Références
[14] Hermans C, Deneys V. — La juste prescription des examens préopératoires d’hémostase chez l’enfant. Percentile
2007; 12:49-52.
[15] Gabriel P, Ecoffey C, Mazoit X. — Relationship between clinical history, coagulation tests, and perioperative bleeding
during tonsillectomies in pediatrics. J. Clin. Anesth 2000; 12:288-91.
[16] Odegard KC, McGowan FX, DiNardo JA et al. — Coagulation abnormalities in patients with single ventricle physiology
precede the Fontan procedure. J Thorac Cardiovasc Surg 2002; 123:459-65.
[17] Hermans C, Dessomme B, Lambert C, Deneys V. — Malformations veineuses et coagulopathie. Ann Chir Plast Esthét
2006; 51:388-93.
[18] Mayer MN., de Montalembert M., Audat F., Brusset MC., Houfani B, Merckx J, Barrier G, Gazengel C. — Autologous
blood donation for elective surgery in children weighing 8-25 kg. Vox Sang 1996; 70:224-8.
Lorsque l’intervention doit être réalisée en urgence, la cotation ASA est suivie de la lettre “U” pour “urgence”.
Tableau 01-4 : Classification du risque anesthésique selon le score de l’American Society of Anesthesiologists (ASA)
Médecine allopathique
Il n’existe aucune donnée dans la littérature à propos de l’arrêt ou de la poursuite d’un traitement
médical avant une anesthésie chez l’enfant. On peut cependant raisonnablement appliquer le
même principe que chez l’adulte, à savoir : poursuivre tout traitement nécessaire jusqu’au jour
de l’anesthésie [21].
Pour ce qui concerne la corticothérapie, très peu de données spécifiquement pédiatriques ont
été publiées.
• Pour les patients qui reçoivent une corticothérapie au long cours (immunosuppression, par
exemple), il a été démontré, chez l’adulte, qu’il n’est pas nécessaire d’augmenter la dose de
cortisone (de façon à administrer une dose dite “de stress”) pourvu qu’ils reçoivent leur dose
quotidienne le jour de l’intervention : la fonction surrénalienne résiduelle suffit en général à as-
surer une augmentation de la sécrétion endogène de cortisol même si des tests préopératoi-
res à l’ACTH sont négatifs. Il convient cependant de rester prudent et d’être prêt à administrer
une dose d’hydrocortisone en cas d’hypotension ne répondant pas au remplissage vasculaire
et de veiller à assurer un apport suffisant d’une solution glucosée en postopératoire.
• Pour les patients qui reçoivent quotidiennement des doses physiologiques de cortisone (com-
me en cas d’hyperplasie congénitale des surrénales ou de panhypopituitarisme, par exem-
ple), des doses supplémentaires d’hydrocortisone doivent être administrées en périopératoire
(chez l’adulte : 50 mg/8 heures pendant 48 à 72 heures en cas de chirurgie majeure) [22].
Chez l’enfant, on administre l’hydrocortisone à la dose de 1 à 2 mg/kg (ou 50-100 mg/m2),
répétée toutes les 6 heures jusqu’à la reprise de l’alimentation et du traitement habituel.
Pour ce qui concerne la prévention ou le traitement d’une maladie thromboembolique (rare chez
l’enfant), l’utilisation des héparines à bas poids moléculaire entraîne les mêmes précautions en
termes d’intervalle de temps entre la dernière injection et la pose ou le retrait d’un cathéter veineux
central ou d’un bloc neuraxial que chez l’adulte [25] (voir Tome 3 chapitre 18).
Références
[21] Baillard C. — Conduite à tenir concernant le traitement médicamenteux des patients adressés pour chirurgie program-
mée. Ann Fr Anesth Réanim 2005; 24:1360-74.
[22] Marik PE, Varon J. — Requirement of perioperative stress doses of corticosteroids : a systematic review of the literature.
Arch Surg 2008; 143:1222-6.
[23] Todd GRG, Acerini CL, Ross-Russell et al. — Survey of adrenal crisis associated with inhaled corticosteroids in the
United Kingdom. Arch Dis Child 2002; 87:457-61.
[24] Finken MJJ, Mul D. — Cushing’s syndrome and adrenal insufficiency after intradermal triamcilonone acetonide for
keloid scars. Eur J Pediatr 2010; 169:1147-9.
[25] Jooste EH, Chalifoux T, Broadman LM. — A perioperative strategy for the placement of a thoracic epidural catheter in
a pediatric patient on high-dose enoxaprin (letter)..Pediatr Anesth 2007; 17:907-9.
Médecine homéopathique
Phytothérapie
La phytothérapie (par exemple : valériane, millepertuis, échinacée, ephedra sinica) est souvent
considérée à tort comme inoffensive. Les thés et plantes contiennent cependant des principes
actifs dont le dosage est en général peu précis et qui peuvent interférer avec certaines fonctions
(hémostase) ou avec le métabolisme en provoquant l’induction ou l’inhibition d’isoformes du
cytochrome P450. Afin d’éviter toute interférence, et en l’absence de données objectives, il est
conseillé d’interrompre une phytothérapie une semaine avant une anesthésie [26, 27].
Références
[26] de Montblanc J, Bonnet F. — Médecines douces et anesthésie : interférences possibles. Le Praticien en Anesthésie-
Réanimation 2001; 5:92-6.
[27] Baillard C. — Conduite à tenir concernant le traitement médicamenteux des patients adressés pour chirurgie program-
mée. Ann Fr Anesth Réanim 2005; 24:1360-74.
Les particularités psychologiques de l’enfant demandent une prise en charge adaptée à chaque
période de la vie lorsqu’on envisage une intervention chirurgicale. Les peurs des enfants en
relation avec une hospitalisation pour une intervention chirurgicale sont différentes de celles des
adultes. Ces craintes sont le reflet des périodes psychologiques successives qui accompagnent
l’avancement en âge (voir Tome 1, chapitre 2).
Avant l’âge de 1 an, l’enfant est dans la période de l’alternative entre confiance et méfiance. Il
est complètement dépendant des autres. La confiance est établie par des relations sécurisantes
et chaleureuses ; à l’inverse, la méfiance est le résultat de relations froides, indifférentes voire
rejetantes. Le petit nourrisson a peur des mouvements brusques, des bruits violents et des lu-
mières puissantes. Il redoute la douleur et les situations étranges. Le nourrisson ne comprenant
pas l’acte chirurgical, aucune préparation n’est possible ; par contre, les parents ont besoin d’une
information sur le déroulement et sur les résultats attendus de la chirurgie, ne serait-ce que parce
que la peur et l’inquiétude des parents sont transmissibles aux enfants.
Entre 1 et 3 ans, l’enfant est dans la période de l’alternative entre l’autonomie et la honte ou le
doute. Il devient autonome au sein d’un environnement sécurisé par les parents. C’est la période
d’apparition de l’estime de soi et de l’acquisition de l’activité cognitive. Les parents aident à
l’autonomie par leurs encouragements à de nouvelles découvertes. A l’inverse, la surprotection
peut rendre l’enfant timide et l’amener à douter de lui. Les enfants ont des “pensées magiques” ;
ils sont égocentriques et croient que leurs souhaits peuvent se réaliser. Comme les plus jeunes,
ils redoutent la douleur et les situations étranges.
Entre 3 et 5 ans (période préscolaire), l’enfant entre dans la période de l’alternative entre initia-
tive et culpabilité. Il passe de l’autonomie à la prise d’initiatives, il apprend à se fixer un but et à
l’atteindre. Il utilise son imagination. Le “feed-back” qu’il reçoit en retour à ses prises d’initiatives
est important. S’il est l’objet de critiques ou si on le décourage, il peut associer un sentiment de
culpabilité à l’initiative prise.
L’enfant d’âge préscolaire reste égocentrique, il est convaincu d’avoir raison et ne peut admettre
un autre point de vue. A cet âge les enfants répètent et utilisent des mots qu’ils ne compren-
nent pas ou auxquels ils attribuent un autre sens. Les mots favoris à cet âge sont : comment et
pourquoi. Il est souhaitable de leur laisser une maîtrise de la situation chaque fois que cela est
possible. À la peur de la séparation s’ajoute, à cet âge, la peur de l’abandon et l’hospitalisation
peut être interprétée comme une punition.
Entre 6 et 12 ans (période scolaire), l’enfant découvre l’alternative entre le travail, la responsabilité
et l’infériorité. L’enfant élargit son environnement hors du cercle familial : des adultes autres que
ses parents (professeurs) prennent de l’importance. Les efforts, et pas seulement la réussite,
doivent être valorisés, car dans le cas contraire l’enfant va développer un sentiment d’infériorité.
L’enfant d’âge scolaire veut apprendre, il croit en des règles et a besoin d’organisation. Aux peurs
précédentes s’ajoutent celle de l’échec scolaire, celle de ne pas répondre aux attentes des autres
et enfin apparaît la peur de l’amputation, de la castration et celle de la mort. Ces enfants ont
besoin d’explications détaillées et il faut les faire participer aux décisions. L’anesthésie peut être
redoutée en raison de la perte de contrôle mais, plus grave, elle peut être assimilée à la mort.
L’adolescence est la période de l’alternative entre l’identité et la confusion des rôles. C’est la
période de l’interaction avec ses pairs, de la transition vers l’âge adulte, des modifications physio-
logiques (tempête hormonale) et physiques. C’est aussi l’âge de la création de l’identité sexuelle.
Les peurs de cette période sont celles d’être différent voire mutilé, de perdre son indépendance
et son identité, d’être isolé et de mourir. Les explications sur les soins sont indispensables et il
faut obtenir l’adhésion de l’adolescent sans mettre pour autant les parents à l’écart. Cette pé-
riode est aussi celle des conflits dans le milieu des études, de la famille, des amis et des amours.
L’adolescent qui n’arrive pas à développer son identité va souffrir d’une confusion des rôles et ne
pourra répondre à la question de savoir qui il est et où il va.
Plusieurs études ont analysé le niveau d’anxiété des enfants en préopératoire : il en ressort
qu’environ 50 % des enfants présentent un niveau d’anxiété excessif. Le jeune âge, plusieurs
admissions précédentes à l’hôpital et des parents anxieux sont des facteurs de risque significatifs
mais il reste difficile de déterminer à l’avance quels enfants seront très anxieux [30, 31].
Le respect des recommandations suivantes permet de réduire cette anxiété et ses effets néfastes :
• éviter, quand c’est possible, les indications d’actes de chirurgie réglée dans la tranche d’âge
“difficile”, c’est-à-dire entre 6 mois et 4 ans ;
• privilégier la chirurgie ambulatoire ou, au moins, limiter la durée d’hospitalisation ;
• en cas de chirurgie ambulatoire, éviter un délai d’attente prolongé entre l’admission à l’hôpital
et l’induction de l’anesthésie ;
• éviter qu’il y ait trop de monde et du bruit lors de l’induction de l’anesthésie ;
• libéraliser largement les horaires de visite ;
• veiller à assurer une excellente analgésie postopératoire ;
• administrer une prémédication sédative si l’enfant paraît très anxieux.
La présence d’un parent lors de l’induction de l’anesthésie permet d’éviter les cris et les pleurs
au moment de la séparation à l’entrée du bloc opératoire mais ne garantit pas une meilleure
collaboration de l’enfant au moment de l’induction [32, 33]. Les enfants qui bénéficient le plus de
la présence d’un parent sont :
• les enfants de 6 mois à 6-7 ans, surtout si le parent accompagnant est calme, confiant et
bien préparé [34] ;
• les enfants souffrant de pathologies chroniques avec interventions itératives ;
• et les enfants handicapés ; les parents peuvent être aussi une source précieuse d’information
sur la signification des attitudes de l’enfant et son positionnement.
Même si la majorité des parents souhaitent accompagner leur enfant quand on le leur propose, il
est essentiel de bien les préparer, sinon l’expérience peut s’avérer très angoissante pour eux.
La décision doit être prise au cas par cas en fonction des besoins de l’enfant (multi-opéré,
polyhandicapé), des possibilités logistiques du bloc (tenue spéciale, personne accompagnante
pour la sortie du bloc opératoire), de l’avis de l’anesthésiste, de la couverture des assurances
(assurance couvrant les risques traumatiques et infectieux que le parent pourrait subir ou qu’il
pourrait représenter pour le personnel et les autres patients en salle d’opération) et du respect
de la confidentialité des soins prodigués à d’autres patients.
Références
[32] Messeri A, Caprilli S, Busoni P. — Anaesthesia induction in children: a psychological evaluation of the efficiency of
parents’ presence. Pediatr Anesth 2004; 14:551-6.
[33] Rosenbaum A, Kain ZN, Larsson P, Lonnqvist PA, Wolf AR. — The place of premedication in pediatric practice : pro-
con debate. Pediatr Anesth 2009; 19:817-28.
[34] Kain ZN, Mayes LC, Caldwell-Andrews AA, Saadat H, McClain B, Wang SM. — Predicting which children benefit most
from parental presence during induction of anesthesia. Pediatr Anesth 2006; 16:627-34.
Lors de l’évaluation préopératoire, on n’omettra pas d’exposer clairement aux parents ainsi qu’à
l’enfant la stratégie anesthésique et ses risques (anesthésie générale seule, anesthésie locoré-
gionale ou anesthésies générale et régionale combinées) ni de recueillir leur consentement éclairé
signé. Il est utile (et obligatoire dans certains pays) de remettre à distance de l’intervention un
document d’information descriptif du type de celui de la fiche d’information ADARPEF/SFAR
reproduit par le Tableau 01-5 [35].
Les médecins du service d’anesthésie de l’hôpital (ou de la clinique) .......................................................... vont prendre
en charge votre enfant pour assurer son anesthésie et son réveil. Ce document est destiné à vous informer sur l’anes-
thésie. Nous vous demandons de le lire attentivement afin de pouvoir donner votre consentement à la procédure que le
médecin anesthésiste-réanimateur établira et vous expliquera pour “faire dormir” votre enfant. Vous pourrez poser à ce
médecin toutes les questions relatives à votre information. Pour les questions concernant l’acte qui motive cette anes-
thésie, il appartient au spécialiste (chirurgien, endoscopiste ou autre spécialiste) qui réalisera cet acte d’y répondre.
L’anesthésie générale est un état comparable au sommeil, produit par l’injection de médicaments dans une veine et/
ou la respiration de vapeurs anesthésiques à l’aide d’un masque. Ces médicaments peuvent diminuer ou supprimer la
respiration, ce qui nécessite souvent d’aider la respiration spontanée par une machine (ventilateur).
L’anesthésie locorégionale permet de n’endormir que la partie du corps de l’enfant concernée par l’opération en
bloquant les nerfs de cette région par l’injection, à leur proximité, d’un produit anesthésique local. La rachianesthésie et
l’anesthésie péridurale sont deux modalités particulières d’anesthésie locorégionale. Le produit anesthésique est injecté
à proximité de la moelle épinière et des nerfs qui sortent de celle-ci. L’anesthésie caudale est une anesthésie péridurale
que l’on pratique très fréquemment chez le jeune enfant pour des interventions situées sous l’ombilic.
Chez l’enfant, l’anesthésie locorégionale est le plus souvent réalisée (mais pas obligatoirement) lorsque l’enfant dort. Une
répétition de la ponction peut être nécessaire en cas de difficultés. À cet âge, l’anesthésie générale permet de réaliser
cet acte, de façon indolore, sur un enfant parfaitement immobile. Elle permet d’éviter que l’enfant ne s’inquiète de ce
qui se passe autour de lui.
La consultation d’anesthésie.
Toute anesthésie générale ou locorégionale, réalisée pour un acte non urgent, nécessite une consultation plusieurs jours
à l’avance et une visite pré-anesthésique, la veille ou le jour de l’anesthésie, selon les modalités d’hospitalisation. Cette
consultation doit être réalisée suffisamment à distance de l’intervention pour éventuellement préparer votre enfant, dépis-
ter et réduire tout risque prévisible et diminuer la durée d’hospitalisation. Elle permet au médecin anesthésiste, grâce aux
informations recueillies par l’interrogatoire, la lecture du carnet de santé et l’examen clinique de l’enfant, de choisir le type
d’anesthésie le mieux adapté et de vous informer ainsi que votre enfant sur son déroulement pratique et le traitement de
la douleur postopératoire. Le choix final relève de la décision et de la responsabilité du médecin anesthésiste-réanimateur
qui pratiquera l’anesthésie. Des examens complémentaires (prise de sang, radiographie, consultation cardiologique),
peuvent être prescrits en fonction de l’état de santé de votre enfant, ses antécédents et ses traitements actuels. Ils ne
sont ni obligatoires ni systématiques.
Vous trouverez, joint à ce document, un questionnaire qui vous aidera à ne rien oublier lors de la consultation
d’anesthésie.
L’autre but, plus immédiat, de la préparation psychologique à l’anesthésie est de diminuer l’an-
xiété de l’enfant au moment de l’induction de l’anesthésie. On sait en effet qu’une induction
houleuse, dans un état de détresse psychologique aiguë (cris, agitation, contention forcée…)
s’accompagne d’une plus grande incidence de troubles du comportement durant les semaines
qui suivent [36, 37]. De plus, une telle induction est techniquement plus difficile pour l’équipe
soignante. Comme l’anxiété parentale se transmet à l’enfant, cette préparation doit débuter lors
de la consultation préopératoire par une information honnête et sereine des parents à propos des
risques et des techniques proposées.
Pour être efficace, la préparation à l’anesthésie/chirurgie devrait inclure une information (ce qui va
arriver, ce que le patient va ressentir), l’apprentissage d’une technique simple pour gérer l’anxiété
(jeu, exemple) et devrait avoir lieu moins d’une semaine avant l’intervention pour les enfants de
moins de 6 ans et au moins 5 jours à l’avance pour les enfants plus âgés [38].
Cette préparation nécessite de créer un climat de confiance avec l’enfant et de lui procurer une
information vraie mais adaptée à son niveau de compréhension.
Ainsi, pour l’enfant de plus de 4-5 ans, il est important d’expliquer le rôle de l’anesthésiste (pro-
voquer un sommeil spécial pour permettre l’intervention, mais aussi rester près de lui durant toute
l’intervention) et de le rassurer quant au déroulement du geste (absence de douleur ou de réveil
pendant l’opération). Il est également important d’expliquer ce qui va se passer : ne pas manger
ce matin-là, mettre un pyjama spécial, être conduit en salle d’opération dans un lit qui roule, entrer
dans une pièce où tout le monde est en pyjama de même couleur et où il y a plein d’appareils…,
et se réveiller plus tard dans une grande salle.
C’est l’occasion d’expliquer à l’enfant comment il va être endormi et, s’il est assez grand, de
lui proposer le choix entre le masque (“qui sent un peu mauvais”) et une petite piqûre (“mais tu
ne sentiras rien, on posera une pommade spéciale sur la peau auparavant”). Il est également
important de prévenir l’enfant qu’il aura une perfusion et, le cas échéant, une sonde dans le nez
ou la vessie. Toutes ces informations sont trop souvent encore éludées avant l’intervention, de
peur d’effrayer l’enfant : en fait, au contraire, l’enfant sera moins effrayé s’il reconnaît tout ce qui
lui a été annoncé. Dans ce contexte, un livre qui ré-explique tout cela sous forme d’histoire et qui
peut être lu à la maison avec les parents est d’une aide précieuse (par exemple “Je vais me faire
opérer. Alors, on va t’endormir !” par l’association “Sparadrap”, http://www.sparadrap.org/). Mais
fournir un livre sans accompagnement n’est pas utile.
Références
[35] Orliaguet G, Mayer MN. — Fiche Adarpef/Sfar. Information médicale avant l’anesthésie de votre enfant. Ann Fr Anesth
Reanim 1999; 18:120-1.
[36] McGraw T. — Preparing children for the operating room: psychological issues. Can J Anaesth 1994; 41:1094-103.
[37] Kain ZN, Mayes LC, O’Connor TZ, et al. — Preoperative anxiety in children: predictors and outcome. Arch Pediatr
Adolesc Med 1996; 150:1238-45.
[38] MacLaren J, Kain ZN. — Pediatric preoperative preparation: a call for evidence-based practice. Pediatr Anesth 2007;
17:1019-20.
[39] Cassady JF, Wysocki TT, Miller KM, et al. — Use of a preanesthetic video for facilitation of parental education and
anxiolysis before pediatric ambulatory surgery. Anesth Analg 1999; 88:246-50.
[40] Rosenbaum A, Kain ZN, Larsson P, Lonnqvist PA, Wolf AR. — The place of premedication in pediatric practice : pro-
con debate. Pediatr Anesth 2009; 19:817-28.
Prémédication
Les agents les plus couramment employés en prémédication chez l’enfant sont listés dans le
Tableau 01-6, en rappelant que la voie IM est une voie d’exception chez l’enfant.
L’administration nasale, déplaisante et douloureuse, est utile dans certains cas particuliers.
On dépose à l’aide d’un compte-gouttes 0,2 mg/kg de la solution injectable non diluée que l’on
répartit entre les deux narines. L’effet est très rapide car on évite le premier passage hépatique,
mais cette voie est douloureuse (sensation de brûlure) : elle est donc à éviter chez l’enfant [46]. La
concentration plasmatique maximale est atteinte en moyenne au bout 10 minutes et représente
50 à 60 % des valeurs obtenues après l’injection de la même dose par voie IV.
L’enfant prémédiqué au midazolam doit donc être surveillé jusqu’à sa prise en charge par l’anes-
thésiste : administrer le midazolam dans un local situé à l’entrée du secteur opératoire permet de
répondre aux impératifs de temps et de sécurité. Chez l’enfant traité par des agents inhibant le
cytochrome P450 3A (comme l’érythromycine ou la cimétidine), il faut faire preuve de prudence car
ces substances diminuent le métabolisme du midazolam, avec un risque de sédation excessive
ou prolongée.
Antihistaminiques
Le dichlorhydrate d’hydroxyzine par voie orale (Atarax® sirop) est très populaire en France car
cette molécule combine des effets sédatifs et anticholinergiques. Elle est contre-indiquée en cas
de porphyrie et de glaucome à angle fermé.
Morphiniques
On peut administrer du sufentanil par voie nasale à la dose de 2 µg/kg : l’effet sédatif est rapide
mais le pic de concentration plasmatique survient entre 15 et 30 min après l’administration sous
forme de gouttes nasales [49].
En cas d’anesthésie locorégionale, l’administration préalable de clonidine par voie orale ne mo-
difie pas la réponse à une dose test de lidocaïne adrénalinée à 1/200.000 précédée de 10 µg/kg
d’atropine IV : le passage intravasculaire d’une telle dose test se traduit par une augmentation de
la fréquence cardiaque, de l’amplitude de l’onde T et de la pression artérielle systolique [52].
Par voie nasale, la clonidine à la dose de 2 µg/kg est parfois efficace mais sa résorption est
erratique et non fiable [53].
Malgré ces propriétés intéressantes, la clonidine est cependant peu utilisée en prémédication
chez l’enfant.
Kétamine
L’administration orale de 5-6 mg/kg de kétamine entraîne une sédation dans les 25 minutes qui
suivent sans retarder le réveil [54]. Les réactions dysphoriques semblent rares par cette voie et à
cette dose (5-7 %), mais il est sans doute plus prudent de laisser l’enfant dans un environnement
calme en attendant que s’installe l’effet sédatif. Par prudence, on y associe de l’atropine (20-
40 µg/kg per-os) pour prévenir une salivation excessive qui peut compliquer l’induction ou le réveil
(risque de laryngospasme). L’association de midazolam (0,5 mg/kg) et de kétamine (3 mg/kg) par
voie orale donne d’excellents résultats [55] en 20 à 30 minutes.
Atropine
Le consensus est plus difficile à obtenir quand l’urgence est relative : le cas typique est l’enfant
admis au milieu de la nuit avec une fracture non compliquée ou une appendicite aiguë sans si-
gnes péritonéaux. La gestion de telles urgences dépend en fait d’un faisceau d’éléments liés au
patient (jeûne ?), à l’environnement (aide efficace à l’anesthésie ?), à l’anesthésiste (expérience ?
fatigue ?) et à la disponibilité d’une salle d’opération le lendemain matin. De plus, l’évaluation du
degré d’urgence de l’intervention dépend crucialement de la qualité du dialogue entre le chirur-
gien et l’anesthésiste. Chacun a ses arguments et il est important d’arriver au consensus qui est
le meilleur en termes de bénéfices/risques pour l’enfant.
L’idéal est de prévoir ces circonstances et de définir à froid une ligne de conduite de toute
l’équipe ; la pertinence et la sécurité de cette ligne de conduite doit être évaluée régulièrement
dans un processus de qualité des soins.
Les principales causes de report d’une intervention programmée chez l’enfant sont la présence :
• d’une infection des voies aériennes supérieures (voir Tome 3, chapitre 6),
• d’une anémie ou d’une fièvre d’origine indéterminée,
• d’une infection urinaire juste avant une intervention urologique,
• d’une crise d’asthme (voir Tome 3, chapitre 7),
• d’une éruption cutanée : varicelle, rubéole…,
• ou encore l’absence de consultation préopératoire.
Jeûne préopératoire
Les liquides clairs sont rapidement évacués de l’estomac (> 99 % en 2 heures). Plusieurs études
ont montré que la prise de liquides clairs à raison de 1 mL/kg (thé, jus de fruit sans pulpe) jusque
Abords artériels 61
Indications et choix du matériel 61
Abord de l’artère radiale ou ulnaire 62
Abord de l’artère fémorale 63
Abord de l’artère pédieuse 63
Abord de l’artère tibiale postérieure 64
Utilisation de l’échographie pour la ponction artérielle 64
L’échographie a sensiblement modifié les pratiques en matière d’abord veineux central (veines
jugulaire, fémorale et sous-clavière) : son utilisation en toute sécurité nécessite cependant une
formation et un apprentissage spécifiques en commençant sur des modèles inertes (“fantômes”)
pour acquérir la coordination œil-main nécessaire (séminaires et ateliers pratiques). Son utilisation
clinique chez le nouveau-né et le prématuré doit être précédée d’une période d’apprentissage
supervisé sur des adultes et des grands enfants. L’apprentissage du repérage vasculaire et de la
ponction échoguidée des vaisseaux sort du cadre de cet ouvrage : les considérations théoriques
ou basées sur l’expérience clinique des auteurs qui y sont rapportées ne dispensent pas d’un
apprentissage pratique.
Indications
L’abord veineux périphérique est indispensable lors de toute anesthésie. Il est cependant habi-
tuel, en chirurgie programmée chez l’enfant, de faire une induction au masque et de ne mettre
en place la voie veineuse qu’une fois l’enfant endormi mais avant de stimuler les voies aériennes.
Le nouveau-né et le petit nourrisson n’ont pas l’appréhension des aiguilles : l’induction peut se
faire chez eux sans aucun problème par voie intraveineuse (après analgésie cutanée). En cas
d’urgence, chez un patient à l’estomac plein ou hémodynamiquement instable, l’induction anes-
thésique s’effectue toujours par voie intraveineuse.
• soit par un patch de S-Caine® qui est déjà efficace au bout de 20 minutes grâce un proces-
sus de réchauffement incorporé au patch [1].
• le pied : on peut utiliser la veine saphène interne qui est située en avant de la malléole interne
(fig. 02-3), une des veines de la face dorsale du pied ou la veine saphène externe au bord
externe du pied ;
• le cuir chevelu : les veines épicrâniennes du cuir chevelu sont très utilisées dans les services
de néonatologie ; pour améliorer l’exposition de la veine, on peut raser le cuir chevelu sur une
petite surface et s’aider d’une compression digitale en aval ; chaque fois que c’est possible, il
faut privilégier la pose d’un cathéter court (22 ou 24 G). Le reflux de sang est rarement franc
et survient avec retard : il faut savoir l’attendre ; la fixation est difficile mais essentielle ;
A agitation
-- au réveil 283, 543
α1-glycoprotéine -- en SSPI 548
-- acide 321 -- paradoxale 27
-- nouveau-né 348 -- post-anesthésie 273
α-amylase 250 agoniste-antagoniste morphinique 129
α-fœtoprotéine 436, 442 agoniste morphinique pur 129
abdominischisis 414 aide inspiratoire 77, 95
abord veineux AINS, nouveau-né 372
-- central Airtraq 119
-- échoguidage 48 -- tailles 120
-- indications 45
AIVOC 238
-- périphérique 39
-- anesthésie locale 40 -- application à la kétamine 240
-- complications 44 -- application au midazolam 240
-- technique 43 -- modèles d’algorithmes de perfusion 239
accident -- tableau des objectifs de concentration recherchés 239
-- anaphylactique 250 albumine 321
-- vasculaire cérébral 286 Alcock, canal 197
accouchement prématuré 320 alcalose, hypochlorémique 498
acétaminophène, voir paracétamol alcoolisme fœtal 297
acétylcholinestérase 436 Aldrete, score de réveil 289
acétylcystéine, lavement 470 alfentanil 131, 241, 354
acide -- nouveau-né 354, 360
-- ε-aminocaproïque 268 -- posologies 131
-- folique, supplémentation et spina bifida 435 algodystrophie, voir douleur, syndrome douloureux régional
-- tranexamique 268 complexe 144
acidose métabolique 237 alimentation
adénocarcinome 427 -- parentérale au long cours 418
adénotonsillectomie 99 -- postopératoire 290
ADH, sécrétion inappropriée, voir SIADH allergie au latex 15, 428, 436, 534
adoption, enfant adopté 26 alopécie cicatricielle 222
adjuvant (ou additif) alprostadil 267
-- anesthésie épidurale 154 ALR, voir anesthésie locorégionale 141
-- rachianesthésie 166 altitude, haute 74
adrénaline (épinéphrine) 265 améthocaïne 39
adriamycine 12 Ametop® 39
aéroportie 479 aminocaproïque, acide α- 268
aérosol adrénaliné 545 aminostéroïde 215, 217
affection maligne, bilan préopératoire 12 amnésie 27
aganglionose colique, voir Hirschsprung ampoule de Vater 462
âge amputation 20
-- gestationnel 344 Amyand, hernie 506
-- post-conceptionnel 8, 344 amylase α 250
agénésie amylasémie 251
-- du coccyx 433 amylopectine 250
-- sacrée totale 433 amyotrophie spinale infantile 402