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LE CARNET DE BORD COMME OUTIL D’AUTO-EVALUATION ET DE

REGULATION EN COURS DE FORMATION

Amaury DAELE

Facultés Univ. N-D de la Paix - Département Education et Technologie - Cellule


d’Ingénierie Pédagogique - Rue de Bruxelles, 61, 5000 - NAMUR - Belgique -
Tél. : ++ 32 81 72 50 70 - Fax : ++ 32 81 72 50 64 - amaury.daele@fundp.ac.be

Mots-clés : carnet de bord, performances complexes, apprentissage collaboratif,


évaluation, TIC

Problématique

L’utilisation que nous avons proposée d’un carnet de bord s’inscrit dans le cadre de plusieurs
problématiques de plus en plus prégnantes dans l’enseignement supérieur, et plus
particulièrement dans la formation initiale des enseignants :

! l’évaluation de performances complexes (De Bal, De Landsheere et Beckers, 1976 ;


Daele, 1998), visant à répondre aux questions « pourquoi et comment évaluer les
performances des étudiants relevant de processus complexes de pensée et d’action (la
communication, la collaboration, l’analyse de son apprentissage, la réflexion…) ». Cette
question est importante car elle renvoie directement à la problématique de la validité de
l’évaluation : que mesure-t-on et est-on bien sûr de mesurer ce que l’on veut mesurer ? Si
par exemple on considère que dans les qualités d’un enseignant doivent intervenir des
compétences comme la collaboration avec les collègues, la réflexion sur ses propres
pratiques ou la créativité, il faudrait pouvoir les détecter et les développer chez les
étudiants futurs enseignants et s’en donner les moyens. Bien souvent pourtant,
l’évaluation des étudiants portent sur des performances simples, plus directement
observables et déconnectées de la réalité du métier d’enseignant alors qu’il serait plus
formatif pour les étudiants de focaliser leur évaluation sur leurs processus
d’apprentissages tout au long de leur formation. Des auteurs comme Macdowell (1996) ou
Birenbaum (1996) proposent d’ailleurs de délaisser pour certains objectifs d’apprentissage
l’approche psychométrique (ou quantitative) pour une approche qualitative, formative et
« en contexte ».

! la réflexion des étudiants futurs enseignants sur leurs propres processus


d’apprentissage (Grimmett et Erickson, 1988 ; Clift, Houston et Pugach, 1990 ; Zeichner,
1994) qui insiste sur la richesse formative des processus de réflexion suscités chez les
étudiants. Les processus de réflexion peuvent notamment être encouragés chez les
étudiants dans une formation proposant des activités d’interaction avec les pairs et
suscitant la réflexion et l’appropriation de connaissances construites en groupe ou
proposées par des experts (Charlier, Daele et Deschryver, 1998). Au sein d’une telle
formation, de nombreuses performances complexes sont demandées aux étudiants
(collaboration, réflexion, construction et partage de connaissances…) et un outil
d’évaluation qui tiendrait compte de cette complexité peut aider les étudiants à réfléchir et
à réguler leurs actions en cours d’apprentissage.

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! les changements de rôle des enseignants qu’implique l’intégration des Technologies de
l’Information et de la Communication (TIC) dans leurs pratiques (Dowling, 1998 ; Hall,
1998 ; Vizcarro et Lewis, 1999) qui pointent le fait que l’usage des TIC favorise entre
autres le travail en petits groupes et entraîne chez les enseignants l’adoption d’un rôle de
« tuteur » accompagnant les groupes plutôt que de transmetteur de connaissances. En tant
que « tuteur », l’enseignant est amené à remplir des rôles non plus seulement d’expert
dans une matière mais aussi de conseiller au cours des activités d’apprentissage,
d’accompagnateur des étudiants individuellement, de facilitateur par rapport aux
processus d’apprentissage, il est amené également à susciter la réflexion et à réguler le
dispositif d’apprentissage. Il doit donc être capable d’analyser une situation
d’apprentissage et de proposer aux étudiants des soutiens (techniques ou humains) durant
leurs processus d’apprentissage. Dans un contexte aussi complexe, il est important que
l’enseignant se dote d’outils d’évaluation des étudiants qui prennent en compte le plus
grand nombre possible de compétences mises en œuvre par les étudiants.

La technique du carnet de bord

Pour répondre à ces différentes problématiques, la technique du carnet de bord semble bien
adaptée. Rendue célèbre en ethnologie par Malinowski (1985), elle est, selon Mucchielli
(1996), particulièrement bien adaptée pour collecter des informations sur les contextes
institutionnels des sujets ou sur leurs sentiments personnels tout au long d’une formation. Le
carnet de bord constitue en outre un précieux outil de formation, particulièrement pour des
adultes. L’écriture est un acte plus privé que le discours et permet à certaines personnes de se
désinhiber par rapport à l’expression de sentiments (Daele, 1998). Ensuite, cela constitue un
excellent aide-mémoire pour se rappeler les faits saillants d’une formation ou d’un projet.
Enfin, le carnet de bord permet de conduire une réflexion critique, de donner du sens à ses
actions en les intégrant dans un contexte temporel et en articulant « ce qui a déjà été
accompli » avec « ce qui reste à accomplir ».

C’est au cours d’un projet européen de formation d’enseignants que nous avons pu mettre en
œuvre cet outil. Après avoir décrit brièvement le contexte de formation et le type de carnet de
bord que nous avons proposé aux étudiants, nous analyserons les apprentissages qu’ils ont pu
réaliser durant l’expérience. Nous évaluerons aussi l’usage qui a été fait de l’outil et nous
discuterons du soutien qu’il peut apporter à l’apprentissage des étudiants et au travail des
tuteurs dans un contexte de formation à distance.

Contexte

Depuis trois ans, le projet LEARN-NETT1 (SOCRATES-CE) prépare de futurs enseignants


issus de neuf universités européennes à intégrer l’usage des Technologies de l’Information et
de la Communication (TIC) dans leurs pratiques d’enseignement en leur permettant de vivre
1
LEARN-NETT associe des chercheurs et enseignants belges de l'ULG, l'UCL, l'ULB, l'UMH, des FUNDP et
de l’EAD (Charlier, B., Daele, A., Donnay, J., Lebrun, M., Docq, F., d'Hautcourt, F., Lusalusa, S., Denis, B.,
Peeters, R., Depover, C., Deschryver, N., Pirlet, M., Rouard, A.) ainsi que des partenaires européens (Université
de Lancaster, Saunders, M., Folley, M. - Université de Barcelone, Quintana, J., Serrat, N., Willem, C. -
Université de Genève, Peraya, D., Joye, F. - Centre Gate CNRS de Lyon, Bonamy, J., Zeiliger, R. - Ecole de
Commerce de Lyon, Esnault, L.). Coordonné par le Département Education et Technologie des FUNDP
(Bernadette Charlier), ce projet est soutenu par l'Enseignement à Distance de la Communauté Française de
Belgique (EAD) et par le programme SOCRATES.

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une expérience d’apprentissage collaboratif à distance au cours de laquelle, par groupes de
quatre ou cinq étudiants, ils élaborent leurs propres projets d’usage des TIC avec l’aide d’un
tuteur. Un campus virtuel (http://tecfa.unige.ch/proj/learnett) sert de plate-forme commune de
communication et de collaboration en proposant divers outils intégrés : forums, superviseur
des tâches de collaboration, carnet de bord, espace de communication synchrone (MOO)…

Pour les étudiants, quatre objectifs pédagogiques sont poursuivis : apprendre à utiliser les
outils techniques offerts par Internet (Web, courrier électronique, IRC…), apprendre à
communiquer et à collaborer à distance en utilisant les technologies, apprendre à utiliser ces
technologies dans leur future fonction d’enseignant, apprendre à réfléchir sur leurs propres
processus d’apprentissage pour ensuite pouvoir les réguler.

Méthodologie

Dans le projet LEARN-NETT, le carnet de bord, présenté aux étudiants et aux tuteurs sous la
forme d’un formulaire électronique, invite ceux-ci à répondre régulièrement (environ chaque
semaine) à une série de questions portant sur leur satisfaction dans le travail, sur les
apprentissages réalisés, sur l’évolution du travail de groupe, sur les difficultés rencontrées
dans la communication et la collaboration… Pour les étudiants, les objectifs sont de
comprendre leur processus d’apprentissage en s’auto-évaluant régulièrement, de préparer un
travail individuel de réflexion demandé à la fin de l’expérience et de prendre des notes sur
l’évolution de leur travail en vue de le réguler. Pour les tuteurs, les carnets de bord des
étudiants de leur groupe constituent un précieux outil de régulation leur permettant
d’intervenir rapidement en cas de difficulté.

Lors de la première année du projet LEARN-NETT (1997-1998), nous avions réalisé une
première analyse de l’utilisation du carnet de bord en lien avec les apprentissages des
étudiants (Daele, 1998). Nous mentionnions entre autres que les étudiants et les tuteurs
avaient apprécié le fait que le carnet de bord les aidait à faire le point sur leurs apprentissages,
à garder une trace de ce qui avait été réalisé et à pouvoir, à la fin de l’expérience, avoir une
vue d’ensemble du travail accompli. L’outil aidait les étudiants à « révéler » leurs
apprentissages complexes à eux-mêmes et à leur professeur via leur rapport de réflexion.
Nous pointions cependant plusieurs limites à l’outil, notamment son aspect trop « lourd » aux
yeux de certains étudiants : le fait de devoir répondre chaque semaine à une série de questions
prenait un certain temps.

Les questions de recherche posées par rapport à l’utilisation de ce carnet de bord, en lien avec
les problématiques évoquées plus haut, sont de deux types :
! dans quelle mesure le carnet de bord soutient-il la réflexion individuelle et l’auto-
évaluation chez les étudiants ? Comment ces performances complexes sont-elles mises en
évidence grâce à l’utilisation d’un outil d’évaluation « en contexte » ? Le carnet de bord
constitue-t-il un bon « révélateur » des apprentissages des étudiants ? Pour ce faire, nous
analysons en parallèle l’usage de ce carnet de bord et les réflexions individuelles des
étudiants d’un groupe de travail en fin de projet en nous focalisant sur leurs
apprentissages.
! dans quelle mesure le carnet de bord aide-t-il le tuteur à réguler le travail du groupe dont il
a la charge ? Nous analysons pour ce faire le carnet de bord du tuteur de ce groupe lui-
même et les décisions qu’il a prise.

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Le groupe de travail qui sera analysé ici était composé de 5 étudiants (3 de l’Université de
Genève, Suisse et 2 de l’Université de Liège, Belgique). Le tuteur était situé dans une autre
université belge. Le projet des étudiants était de comprendre la motivation de quelques
instituteurs à utiliser les TIC dans leur classe. Des enseignants suisses et belges ont été
interrogés au moyen d’un questionnaire commun et les étudiants ont synthétisé leurs réponses
en les comparant d’un pays à l’autre. Ils ont également pu discuter et réfléchir ensemble sur
l’introduction des technologies à l’école primaire.

Résultats

Un premier constat s’est imposé d’emblée : les étudiants du groupe observé, malgré les
demandes du tuteur, ont peu utilisé le carnet de bord tout au long du projet (3 mois). Ils l’ont
utilisé une ou deux fois maximum. Ce constat avait déjà été réalisé par Daele (1998) mais
dans une moindre mesure. La première année du projet LEARN-NETT, les étudiants
remplissaient leur carnet de bord sur papier et les rendaient à leur tuteur directement par e-
mail. Il était fortement intégré dans le scénario pédagogique puisque les étudiants étaient
invités à le remplir chaque semaine. Cette année, le carnet de bord était un formulaire on-line
accessible depuis le campus virtuel et les étudiants étaient invités à le remplir quand ils le
désiraient, ceci dans le but d’alléger son utilisation et de préserver l’aspect « en contexte » de
l’auto-évaluation. Ce choix n’a pas été judicieux semble-t-il ; une étudiante mentionne
d’ailleurs à ce propos dans son rapport de réflexion :
« […] par contre le carnet de bord et les autres outils mis à disposition ont été
un peu laissés de côté…je n’ai pas encore pris le temps d’aller voir ce que les
autres avaient réalisé… » (Catherine).

Néanmoins, en tant que « révélateur » d’apprentissages relevant de processus complexes de


pensée chez les étudiants, le carnet de bord semble jouer un rôle important. Daele (1998)
mentionnait lors de la première année du projet que les étudiants montraient au travers de leur
carnet de bord la maîtrise de compétences de haut niveau telles que la meilleure connaissance
de son propre processus d’apprentissage, les stratégies personnelles pour fonctionner en
groupe (régulation des conflits, distribution des tâches, négociation…) ou le transfert des
compétences apprises dans un autre domaine, notamment celui de l’enseignement. De telles
compétences apparaissent à nouveau dans les carnets de bord et les rapports de réflexion de
cette année :
« Je me rends compte que j'aurais tendance à aller beaucoup plus à fond que
ce qui est apparemment souhaité. J'y passe trop de temps parfois... pour rien
semble-t-il, mais cela me sera utile pour d'autres travaux dans d'autres
cours. » (Catherine, à propos de la construction du questionnaire pour les
enseignants).
« Ce n’est que beaucoup plus tard que j’ai saisi l’importance du processus
collaboratif : je pensais au départ que ça allait de soi – « un coup de fil c’est si
facile », que pour collaborer, il suffisait… de collaborer, et que la distance ne
posait en fin de compte que peu de problèmes, […]. En fait, le gros défi de la
collaboration à distance, et de l’utilisation des TIC’s en général, c’est le
discernement. Il faut être capable d’utiliser les bons outils à bon escient. En ce
qui me concerne, cette expérience m’a permis d’élargir, tout en la précisant,
mes conceptions sur les usages possibles des TIC’s dans un contexte scolaire
ou périscolaire. » (Jean-Christophe, à propos du processus global de

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collaboration et des transferts possibles de ses apprentissages vers un autre
contexte).
« Une chose encore importante pour la réussite d’un tel projet est de déléguer
au maximum les tâches. Chacun doit savoir exactement ce qu’il a à faire pour
ne pas refaire tous la même chose inutilement et perdre ainsi un temps
précieux. » (Sarah, à propos des stratégies de collaboration).

Par rapport à la problématique de l’évaluation de performances complexes, il est intéressant


de constater que les étudiants reprennent leurs réflexions écrites pendant le projet pour rédiger
leur rapport final qui lui, est évalué académiquement par le professeur. L’outil proposé semble
donc remplir son rôle d’aide à l’auto-évaluation des apprentissages. Certains professeurs, lors
d’une interview en fin de projet, expliquent d’ailleurs qu’ils constatent chez leurs étudiants
non seulement une meilleure auto-analyse des apprentissages mais aussi un meilleur transfert
de ces apprentissages vers d’autres domaines (Charlier, Bonamy et Saunders, 1999).

En ce qui concerne l’utilisation des carnets de bord des étudiants pour la régulation du projet
de collaboration, le tuteur les a lu régulièrement et, dans un message aux étudiants au milieu
du projet, les utilise pour recentrer le groupe sur ses objectifs et réorganiser la collaboration :
« Par rapport à tout ça, je me fais plusieurs réflexions en lisant vos carnets de
bord. Je me permets de les faire ici parce que je me dis que ça peut être utile...
! Vous semblez assez satisfaits dans l'ensemble du travail du groupe.
! Je crois qu'on souffre tous (et le travail aussi!) de l'impossibilité que nous
avons de nous rencontrer tous ensemble... Je dépense beaucoup d'énergie
et d'attention à m'assurer que tous les messages sont arrivés chez tout le
monde.
! Par rapport au problème que vous soulignez à propos de la clarté du but
du travail et du produit attendu, je me dis que c'est un peu de ma faute,
j'aurais certainement dû faire plus attention à ce que ce soit clair pour tout
le monde. D'un autre côté, je me dis qu'une discussion synchrone aurait pu
aider à préciser tout ça... mais bon, rien n'est foutu, j'espère que mon mail
précédent aidait à clarifier notre travail. »

Par ailleurs, les questions que le tuteur est amené à se poser régulièrement l’aident à avoir une
vue d’ensemble de la collaboration qui est en train de s’effectuer dans son groupe, à
comprendre les dysfonctionnements éventuels et à agir le cas échéant. Par exemple, au milieu
du projet, à la question « Quelles difficultés, quels problèmes avez-vous rencontrés ? », il
répond :
« Les étudiants de Genève se sont montrés inquiets d'avoir des précisions
quant au but du travail. Ceci intervient en fait après une semaine de
« flottement » où il y a eu très peu d'échanges. »
Suite à cette constatation, il a envoyé le message repris ci-dessus et a pu repréciser pour les
étudiants du groupe les tenants et aboutissants du travail.

Même si l’usage du carnet de bord semble à certains moments prendre trop de temps, est
ressenti comme impersonnel et ne doit être rempli que de façon facultative, les étudiants et le
tuteur de ce groupe de travail l’ont utilisé avec profit pour la régulation du travail.
Individuellement, les étudiants ont aussi eu l’occasion de réfléchir en cours de projet à leurs
stratégies d’apprentissage et à leur fonctionnement au sein d’un groupe travaillant en
collaboration.

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Discussion

L’utilisation du carnet de bord, facultative pour les étudiants, semble effectivement les aider à
se construire une réflexion non seulement à propos de leur processus d’apprentissage mais
aussi à propos du contexte de formation dans lequel ils ont été plongés. Les questions posées
dans le carnet les aide à structurer cette réflexion et à la maintenir active tout au long du
projet. De leur côté, les tuteurs, en lisant régulièrement les carnets de bord de leurs étudiants,
collectent des informations individuelles à propos de chaque étudiant dont ils n’auraient pas
pu disposer autrement. Ces informations leur permettent de tenir compte des contextes
individuels dans leur tâche d’organisation et de régulation du travail de groupe.

Par ailleurs, le carnet de bord constitue un outil essentiel pour les professeurs dans
l’évaluation de compétences de haut niveau chez leurs étudiants : communication,
collaboration, réflexion personnelle.

Cependant plusieurs questions restent en suspens par rapport à la mise en œuvre concrète d’un
carnet de bord. Tout d’abord, il apparaît comme fondamental que son utilisation soit bien
intégrée dans un scénario pédagogique cohérent avec les objectifs pédagogiques de départ.
Les étudiants doivent être clairement informés des raisons de l’utiliser (pourquoi ?), de la
façon de l’utiliser (comment ?) et des moments où il faudra l’utiliser (quand ?). En outre,
l’utilisation qui sera faite de leurs écrits devrait être clairement indiquée au départ (pour qui ?
pour quoi ?). Dans le projet LEARN-NETT, le fait de savoir que les tuteurs et les professeurs
pouvaient lire les carnets de bord a fait craindre à certains étudiants d’être « observés » et
« contrôlés » à leur insu, ce qui n’était pas du tout le but de départ.

Par ailleurs, pour que le carnet de bord ait du sens aux yeux des étudiants, le tuteur devrait s’y
référer régulièrement en cours de travail et s’y référer pour prendre des décisions. Dans
LEARN-NETT pourtant, le fait que le carnet de bord soit à la fois outil d’auto-évaluation et
outil de régulation pouvait prêter à confusion pour les étudiants ; un autre outil, le
superviseur, disponible également dans le campus virtuel permettait aux étudiants de rédiger
de brefs rapports sur l’état d’avancement du travail et de communiquer directement à ce sujet
avec le tuteur.

Une autre problématique liée à l’usage d’un carnet de bord et plus particulièrement à l’acte
d’écrire a également émergé. L’écriture est un acte privé mais la plupart du temps, il se fait
pour communiquer et donc, le message émis a un sens social et culturel dont il faut tenir
compte en tant que formateur : la discrétion et le respect sont importants. Il faut également
tenir compte du média utilisé : la disposition d’esprit de la personne qui écrit avec un stylo sur
une feuille de papier (acte très personnel, voire intime) est différente de celle de la personne
qui remplit un formulaire sur le web (action très rapide liée au coût de la communication
téléphonique).

Toutes ces problématiques globales et ces questions concrètes en pédagogie sont à prendre en
compte pour que la technique du carnet de bord soit un outil réellement au service de
l’évaluation des étudiants et de leur encadrement par les enseignants.

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Références

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boîte noire. In Guir, R. TIC et formation des enseignants. Bruxelles, De Boeck (à paraître).
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! Daele, A. (1998). Carnet de bord et portfolio en apprentissage collaboratif à distance. Mémoire
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Université de Liège, FAPSE. http://www.det.fundp.ac.be/~ada/memoire/.
! De Bal, R., De Landsheere, G. et Paquay-Beckers, J. (1976). Construire des échelles d’évaluation
descriptives. Bruxelles, Pédagogie et Recherche n°6.
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Davies, G. (Ed.). Teleteaching ’98. Distance Learning, Training and Education. Proceedings of
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