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DROIT COMMERCIAL GENERAL

SUPPORT DE COURS / ANNEE UNIVERSITAIRE 2020-2021

Sous la direction de 

Professeur ALLA Koffi Etienne

Dr. N’GUETTA André Kouamé Guillaume

Docteur en Droit Privé


PLAN DU COURS

INTRODUCTION

1- La notion de droit commercial

2- L’évolution historique du droit commercial

3- Les sources du droit commercial

PREMIERE PARTIE : LE DOMAINE DU DROIT COMMERCIAL

Chapitre 1 : Les actes de commerce

Section 1 : L’identification des actes de commerce

Section 2 : Le régime juridique applicable aux actes de commerce

Chapitre 2 : Les acteurs du droit commercial

Sous-chapitre 1 : Le commerçant

Sous-chapitre 2 : L’entreprenant

Sous-chapitre 3 : Les intermédiaires de commerce

DEUXIEME PARTIE : LES MOYENS DU DROIT COMMERCIAL

Chapitre 1 : le fonds de commerce

Chapitre 2 : Le bail à usage professionnel

Chapitre 3 : La vente commerciale

INTRODUCTION
1. La notion de Droit Commercial

La définition actuelle du droit commercial résulte de la confrontation de deux conceptions de


cette discipline de droit privé : la conception subjective et la conception objective du droit
commercial.

Selon la conception subjective ou personnelle, le droit commercial désigne l’ensemble des


règles applicables aux négociants, marchands, banquiers et courtiers. En clair selon cette
conception, le droit commercial est le droit applicable uniquement aux personnes ayant la
qualité de commerçant. En effet, les tenants de cette conception estiment que la plupart des
actes juridiques accomplis par les commerçants sont exactement les mêmes que ceux posés
dans la vie civile. Par conséquent, s’ils ont la nature d’actes de commerce, cela ne peut être
que du fait de la qualité de leur auteur qui est commerçant 1. Ainsi, cette conception se prévaut
donc de la profession.

Mais, la conception subjective du droit commercial a fait l’objet de critiques. La première


critique se rapporte au fait que la conception subjective exige une détermination précise de
toutes les professions commerciales ou à défaut un classement légal de ces commerçants. Ce
qui n’est pas possible parce que ce classement repose sur des critères imprécis. La seconde
critique est relative au fait que tous les actes accomplis par un commerçant ne se rapportent
pas nécessairement à l’exercice de sa profession. Et inversement, des personnes n’ayant pas la
qualité de commerçant (les non-commerçants) peuvent accomplir des actes qui, par nature ou
par la forme, sont commerciaux.

Ce qui implique l’analyse des activités effectuées par le commerçant pour leur déceler une
nature commerciale. D’où la naissance d’une seconde conception, la conception dite objective
ou réelle. Selon la conception objective ou réelle, le droit commercial est perçu comme
l’ensemble des règles applicables aux opérations commerciales, lesquelles peuvent parfois
être passées par des non-commerçants. En clair, selon cette conception, le droit commercial
serait le droit applicable aux actes de commerce. Cette conception du droit commercial se
prévaut d’une idée simple : compte tenu de l’égalité civile entre tous les citoyens, un Code de
commerce2 a été élaboré pour régir non pas une classe particulière de sujets de droit mais une
catégorie d’actes. C’est la raison pour laquelle ce Code a été qualifié de Code de commerce
et non de Code des commerçants3.

Cependant, la conception objective n’est pas également à l’abri de critiques. En effet, tous les
actes juridiques n’ont pas une nature déterminée par leur forme ou par leur objet. Ainsi, de
nombreux actes sont utilisés aussi bien dans la vie civile que dans le domaine commercial :
transport, vente, dépôt, etc. Pour leur déceler un caractère commercial, il faut alors considérer
1
RIPERT (Georges) et ROBLOT (René) par VOGEL (Louis), Traité de Droit Commercial, Tome 1- Volume 1,
18ème édition, éd. LGDJ, p. 2 § 5 ; GIVERDON, « Le droit commercial, droit des commerçants », JCP, 1949,
1,770.
2
Précisément en 1807
3
RIPERT (Georges) et ROBLOT (René) par VOGEL (Louis), Traité de Droit Commercial, Tome 1- Volume 1,
Op. Cit, p.2 § 6
pour quelle finalité ils sont effectués. Or, pour ce faire, il est nécessaire d’examiner l’activité
économique des cocontractants ; et les actes ne seront commerciaux que s’ils sont accomplis
par des commerçants.

Ainsi, puisqu’aucune des deux conceptions n’est totalement satisfaisante, la doctrine a


proposé une définition du droit commercial inspirée de la prise en compte de ces deux
conceptions. De la sorte, le droit commercial a été appréhendé comme une branche du droit
privé qui étudie les règles applicables aux actes de commerce et aux commerçants.

Cependant, au fil de son évolution le domaine du droit commercial s’est élargi prenant en
compte plusieurs aspects de l’activité économique. De ce fait, certains auteurs avertis, tel que
le Professeur Yves GUYON, préfèrent le qualificatif de droit des affaires ou de droit de
l’activité économique ou encore de droit de l’entreprise. Ainsi, le droit des affaires est perçu
comme une branche du droit privé qui par dérogation au droit civil règlemente de manière
spécifique la plupart des activités de productions, de distribution et de services. Le droit
commercial général est donc un aspect de ce vaste ensemble que constitue le droit des
affaires.

Ainsi, en l’état actuel des choses, retenons que le droit commercial général peut être
appréhendé comme la branche du droit privé qui étudie les règles applicables aux actes
de commerce, aux commerçants, aux entreprenants ainsi qu’à certaines opérations
juridiques relevant de l’activité commerciale tels que le bail à usage professionnel et la
vente commerciale.

Quoi qu’il en soit, afin de bien percevoir le contenu actuel du droit commercial général, il
convient, d’aborder l’historique et l’évolution de la matière.

2. L’évolution historique du droit commercial

De manière générale, le droit commercial tire ses origines de l’antiquité, s’édifie au moyen-
âge avant de connaitre une consécration légale en France grâce à l’adoption du Code de
commerce en 1807.

Pendant l’antiquité, le droit commercial a pris naissance dans l’avènement de techniques de


droit maritime et de droit bancaire développées par les Phéniciens et les Babyloniens. Par
ailleurs, le droit commercial fait largement appel à la théorie générale des obligations élaborée
par les Romains.

L’originalité du droit commercial s’est seulement affirmée au moyen-âge. En effet, la plupart


des institutions commerciales modernes (banques, sociétés, lettre de change, faillite) trouvent
leur origine dans les règles et pratiques qui étaient suivies au moyen-âge dans les grandes
cités maritimes surtout celles de l’Italie à partir du XIe siècle. Ainsi, pendant cette période, le
jus mercatorum (droit commercial) était caractérisé par une dimension internationale.

Mais avec l’avènement de l’époque contemporaine, le caractère international du droit


commercial s’est estompé quelque peu. L’émergence des Etats occidentaux y a contribué
énormément. En effet, chacun de ces Etats s’est doté de son propre droit commercial. Cela
s’est traduit en France par la proclamation des principes de liberté, notamment la liberté du
commerce et de l’industrie ainsi que l’adoption d’un Code de commerce en 1807. Il faut
préciser que le plus grand défaut de ce Code a été de reproduire servilement le droit du passé,
alors que déjà en 1807, on pouvait prévoir la véritable révolution qui allait se produire dans
l’industrie et le commerce. Ainsi, le Code de commerce ne contenait aucune règle sur des
institutions importantes tels que le fonds de commerce, les sociétés par actions, les sociétés à
responsabilité limitées, les valeurs mobilières, l’organisation des bourses et des banques, la
propriété industrielle, qui avaient pourtant pris dans la pratique une dimension considérable.

Dans le contexte africain en général et ivoirien en particulier, il convient de rappeler que


jusqu’en 1993, le droit commercial applicable, comme dans les différents Etats anciennement
colonisés par la France, était le droit hérité de la colonisation. Ainsi, les textes de lois
applicables en la matière étaient le Code civil de 1804, le Code de commerce de 1807, les lois
régissant les sociétés commerciales notamment celles de 1867 pour les sociétés par actions et
de 1925 pour les sociétés à responsabilité limitée. Or, comme le souligne le Professeur
Jacqueline LOHOUES-OBLE, ces règles héritées de la colonisation étaient « vétustes,
désuètes et inadaptées à la situation actuelle ». La réforme s’imposait absolument.

Ainsi, quatorze (14) Etats africains de la zone franc 4 vont mettre en place une organisation
dont le rôle principal est de secréter et de veiller à l’application d’un nouveau droit des
affaires moderne, simple et adapté à leurs réalités économiques : l’Organisation pour
l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA). Cette organisation dont
l’adhésion est ouverte à tout Etat africain5, compte à jour dix-sept (17) Etats-parties.

L’OHADA est née de la signature d’un Traité le 17 octobre 1993 à Port-Louis en île Maurice.
Ce Traité l’instituant a fait l’objet d’une révision le 17 octobre 2008 à Québec au Canada. Les
raisons essentielles qui sous-tendent l’existence de cette organisation sont au nombre de
deux : pallier l’insécurité juridique et judicaire en vue de servir l’intégration économique et la
croissance.

L’insécurité juridique se résume à la vétusté des textes de lois en matière commerciale.


L’OHADA a pour mission d’éradiquer cette insécurité juridique en adoptant un ensemble de
règles communes, modernes, simples et adaptées à la situation économique de ses Etats
parties. Pour ce faire, un domaine non exhaustif du droit des affaires à harmoniser a été prévu
par l’article 2 du Traité précité. En effet, selon ce texte «  pour l’application du présent
Traité , entrent dans le domaine du droit des affaires, l’ensemble des règles relatives au
droit des sociétés et au statut juridique des commerçants , au recouvrement des créances,
aux sûretés, et aux voies d’exécution, au régime de redressement des entreprises et de la
liquidation judiciaire, au droit de l’arbitrage, au droit du travail, au droit comptable, un
droit de la vente et des transports, et toute autre matière que le Conseil des Ministres
déciderait , à l’unanimité d’y inclure , conformément à l’objet du présent Traité ».

4
Benin, Burkina Faso, Cameroun, Centrafrique, Comores, Congo (Brazzaville), Cote d’Ivoire, Gabon, Guinée
équatoriale, Mali, Niger, Sénégal, Tchad et le Togo.
5
Art 53 du Traité révisé de l’OHADA
L’OHADA, s’attaque enfin à l’insécurité judicaire d’une part en mettant en place une
juridiction suprême (la Cour Commune de Justice et d’arbitrage dite CCJA) dont la mission
est d’assurer une interprétation commune du corpus législatif de l’OHADA en veillant à
l’application rigoureuse des Actes uniformes. D’autre part, l’OHADA assure la formation des
magistrats ainsi que des autres acteurs de la justice (avocats, huissiers, notaires, etc.) par la
mise en place d’une école appelée l’Ecole Régionale Supérieure de Magistrature (ERSUMA).

Quelles sont les sources du droit commercial général ?

3. Les sources du droit commercial

Dans les Etats-parties à l’OHADA, le droit commercial repose sur plusieurs sources qui
peuvent être classées en deux catégories : les sources formelles et les sources informelles.

a. Les sources formelles

Au niveau des sources formelles, l’on dénombre d’une part les sources internationales et
régionales ainsi que les sources nationales d’autre part.

 Les sources régionales et internationales

 Les traités régionaux ou internationaux 

Ces traités jouent un rôle important dans les échanges ; lesquels échanges de plus en plus
ont donné un caractère régional ou international au droit commercial. A cet effet, on peut
citer le traité instituant l’OHADA (Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du
Droit des Affaires). Ainsi, les traités jouent un rôle important dans les relations entre
commerçants ressortissant de différents Etats. C’est également le cas des traités de
l’UEMOA, de la CEDEAO, ou encore la Convention de Vienne de 198O sur la vente
internationale de marchandises.

En application du traité de l’OHADA, un certain nombre de textes de lois appelés Actes


uniformes, sont adoptés : il s’agit de la deuxième source régionale du droit commercial.

 Les Actes uniformes de l’OHADA

Cette terminologie d’Acte uniforme est issue de l’article 5 alinéa 1 du Traité OHADA révisé
le 17 octobre 2008 et désigne les lois uniformes prises pour l’adoption des règles communes
en matière de droit des affaires applicables dans les dix-sept (17) Etats parties. Ainsi, Ces
différents Actes uniformes ont vocation à régir l’ensemble du droit des affaires objet de
l’OHADA. Le dix-sept (17) avril 1997, les trois (03) premiers Actes uniformes, au nombre
desquels figure l’Acte uniforme portant droit commercial général, sont adoptés et entrent en
vigueur le 1er janvier 1998. A ce jour, le corpus législatif comporte dix (10) Actes
uniformes6.Dans le cadre de ce cours, l’Acte uniforme portant droit commercial général
6
- l’Acte Uniforme portant sur le Droit Commercial Général (AUDCG) adopté en 1997 et révisé en 2010 ,
l’Acte Uniforme relatif au Droit des Sociétés Commerciales et du GIE (AUDSCOGIE ou AUSCOGIE ou encore
(AUDCG) du 15 décembre 2010 retiendra principalement notre attention dans la mesure où il
constitue le texte de loi fondamental duquel découlent les règles relatives au droit commercial
général sans préjudice des autres sources de ce droit. L’Acte uniforme portant droit
commercial général du 17 avril 1997 (publié au J.O de l’OHADA du 1 er octobre 1997 et au
J.O n°53 du 22 décembre 1997 de la République de Côte d’Ivoire) est entré en vigueur le 1 er
janvier 1998. Il était applicable jusqu’au 15 décembre 2010 où il a été abrogé et remplacé par
un nouvel Acte uniforme portant droit commercial général adopté à Lomé le 15 décembre
2010 et publié au J.O n°23 de l’OHADA du 15 février 2011. Conformément aux dispositions
de son article 307, le nouvel AUDCG est entré en vigueur 90 jours après sa publication au J.O
de l’OHADA soit le 15 mai 2011.

Par ailleurs, d’autres Actes uniformes seront invoqués dans le cadre de ce cours tels que
l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêt
économique (AUSCGIE) du 30 janvier 2014, l’Acte uniforme portant organisation des sûretés
(AUS) du 15 décembre 2010, ainsi que l’Acte uniforme relatif au droit comptable et à
l’information financière (AUDCIF) du 26 janvier 2017.

En vertu de l’article 10 du Traité OHADA, les Actes uniformes ont abrogé toutes les
dispositions (de droit interne) des différents Etats parties antérieurement applicables en
matière commerciale. Cependant, ils laissent subsister les dispositions internes qui ne leur
sont pas contraires.

 Les sources nationales

 La Constitution 

Elle établit les principes fondamentaux de l’activité économique (art.4 de la constitution


ivoirienne du 8 novembre 2016 : le principe d’égalité des citoyens ; art.11 de la
constitution ivoirienne du 8 novembre 2016 : le droit à la propriété privée ; art.12 de la
constitution ivoirienne du 8 novembre 2016 : la liberté d’entreprendre, etc.)

 Les lois nationales non contraires aux Actes uniformes 

AUSCOM) adopte en 1997 et révisé en 2014 ; l’Acte Uniforme portant organisation des Sûretés (AUS) adopté
en 1997 et révisé en 2010 ; l’Acte Uniforme portant Organisation des Procédures Simplifiées de Recouvrement
et des Voies d’Exécution (AUPSRVE) adopté en 1998; l’Acte Uniforme portant organisation des Procédures
Collectives d’Apurement du Passif (AUPCAP) adopté en 1998 ;l’Acte Uniforme relatif au Droit de l’Arbitrage
(AUA) adopté 1999 ; l’Acte Uniforme portant Organisation et Harmonisation de la Comptabilité des Entreprises
(AUDCIF) adopté en 2000 et révisé le 26 janvier 2017 ; l’Acte Uniforme relatif aux Contrats de Transport de
Marchandises par Route (AUCTMR) adopté en 2003 ;l’Acte uniforme relatif au Droit des Sociétés Coopératives
(AUSCOOP) adopté en 2010 ; l’Acte uniforme relatif à la médiation (AM) adopté le 23 novembre 2017.
Il s’agit des lois relatives au droit commercial non contraires aux Actes uniformes.
Relativement à l’application de ces dispositions, la République de Côte d’Ivoire a demandé à
la CCJA ce qu’il fallait entendre par la notion de « loi contraire ».

A cette question, la CCJA a donné l’avis suivant : « l’appréciation du caractère contraire


d’une loi étant tributaire de la contexture des cas d’espèce, il s’ensuit qu’une loi contraire
peut s’entendre aussi bien d’une loi ou d’un règlement de droit interne ayant le même objet
qu’un Acte uniforme et dont toutes les dispositions sont contraires à l’une des dispositions
ou quelques-unes de celles-ci sont contraires. Dans ce dernier cas, les dispositions non
contraires à celles de l’Acte uniforme demeurent applicables.

Dans le cadre de l’Acte uniforme sur le droit des sociétés commerciales et du groupement
d’intérêt économique, les formules « lois contraires  » et dispositions contraires
indifféremment employés sont absolument équivalentes.7 »

Malheureusement cet avis de la CCJA qui était censé élucider la notion, n’a pas atteint son
objectif en raison de son imprécision. De ce fait, il convient de dire que, par principe, le droit
commercial antérieur est abrogé par les Actes uniformes. Autrement dit, il sied d’affirmer que
la règlementation antérieure ayant le même objet qu’un Acte uniforme disparait sauf cas de
renvoi exprès à la loi nationale ou encore si une disposition de cette réglementation régit une
matière non régie par un Acte uniforme. Par exemple, aux termes de l’article 140 de l’Acte
uniforme portant droit commercial général applicable depuis le 15 mai 2011 :« le locataire-
gérant, est tenu d’indiquer en tête de ses bons de commande, factures et autres documents
à caractère financier ou commercial avec son numéro d’immatriculation au RCCM, sa
qualité de locataire –gérant du fonds.

Toute infraction à cette disposition est punie par la loi nationale ».

Dans ce cas de renvoi, on a recours aux peines prévues par la loi n°722-513 du 27 juillet 1972
relative à la location-gérance du fonds de commerce, pourtant abrogée.

Quant aux textes partiellement contraires aux dits Actes uniformes, toutes leurs dispositions
partielles non contraires au dit Actes demeurent applicables.

 Les décrets et arrêtés

Ces sources ont pour but de préciser les conditions d’application de la loi. Elles ont un rôle
plus important en droit commercial contrairement au droit civil où leur rôle est plus effacé du
fait que les principes sont plus affirmés en droit civil. Il s’agit essentiellement des arrêtés
ministériels, des réponses ministérielles, des circulaires. Il faut remarquer que ces sources sont
presque inexistantes en droit ivoirien à cause de l’évolution trop lent de notre droit.

 Le droit civil 

7
Avis de la CCJA n°001/2001/EP du 30 avril 2001, www.ohada.com, Ohadata J-02-04.
Dans les systèmes juridiques de tradition juridique française, tel que le nôtre, le droit civil
constitue le droit commun qui régit les relations de droit privé ; c’est lui qui édicte les
principes généraux qui président aux relations entre individus et qui détermine le statut
juridique des personnes.

Ainsi, pour bien comprendre les règles de droit commercial, il faut s’inspirer des principes
généraux du droit civil et notamment des règles relatives aux obligations en général. En effet,
en matière de conclusion des conventions, les commerçants doivent respecter les règles
relatives à la capacité, au consentement, à la licéité et aux bonnes mœurs. Ils doivent exécuter
leurs obligations sous peine d’engager leur responsabilité ; laquelle est soumise aux règles de
droit commun de la responsabilité contractuelle ou délictuelle.

b.Les sources informelles

Les sources informelles du droit commercial se résument aux usages, à la jurisprudence et à la


doctrine.

 Les usages

Ce sont des pratiques liées à la vie des commerçants qui en raison de leur permanence et de
leur application régulière, prennent la valeur de règles de droit. Autrement dit, il s’agit de
comportements professionnels constants, notoires et généralement anciens. Ils constituent une
source importante du droit commercial car à l’origine, le droit commercial était un droit
coutumier. Et pendant longtemps, il a gardé ce caractère parce qu’il n’était pas codifié et
même après sa codification le droit commercial a gardé une place importante pour les usages.

Certes, il ne s’agit pas de règles issues de textes de loi. Mais, ils n’en sont pas moins
obligatoires. Cela s’explique par le fait que les dispositions légales ne pouvant pas prévoir
tous les comportements notamment en matière contractuelle Ainsi, les usages tiennent une
place importante en droit commercial car ils interviennent pour pallier les insuffisances des
différentes règlementations. La loi, elle-même, renvoie aux usages ; Ainsi, aux termes de
l’article 1873 du code civil « les dispositions relatives aux sociétés de commerce ne
s’appliquent que dans les points qui n’ont rien de contraire aux lois et usages du
commerce  ».

Il existe deux catégories d’usages : les usages de fait qualifiés également d’usages
conventionnels et les usages de droit qualifiés aussi de coutume.

Les usages de fait ou les usages conventionnels sont des pratiques restreintes à un nombre
limité ou à un petit nombre de commerçants qui se conforment toujours à la même manière
d’agir lorsque les circonstances sont identiques8.
8
En droit français, les usages conventionnels sont connus également sous la dénomination d’usages
professionnels. Pour faciliter la preuve de leur existence, ils sont rédigés par des organismes professionnels
(Chambre de commerce ou syndicat). A défaut, l’existence de l’usage peut être établi grâce à un parère, c’est –à
–dire un certificat délivré par des Chambres de commerce ou syndicats attestant de l’existence de l’usage
Quant aux usages de droit ou coutume, ils renvoient également à des pratiques ou des
manières de procéder mais qui cette fois, s’imposent dans les rapports entre commerçants
comme des règles ou des normes objectives.

La différence entre ces deux usages peut s’effectuer suivant quatre (04) critères : leur portée
(ou domaine d’application), leur valeur juridique, la preuve de leur existence et la
sanction de leur méconnaissance ou de leur ignorance par le juge du fond.

Tandis que les usages conventionnels ont une portée limitée car ne s’appliquant qu’à un
cercle restreint de commerçants (par exemple, les commerçants exerçant dans le domaine de
la vente de tissus), les usages de droit ont une portée élargie puisqu’ils s’appliquent à tous
les commerçants sans distinction de leur secteur d’activités. Toutefois, en aucun cas, ils ne
sont opposables à de simples consommateurs.

Du point de vue de leur valeur juridique, il faut retenir que les usages conventionnels ont une
valeur supplétive ; c’est-à-dire que leur application ou leur mise à l’écart dépend de la
volonté des parties contractantes. Toutefois, dans le silence du contrat, il convient de
présumer que ceux qui avaient la possibilité de les écarter et qui ne l’ont pas fait, ont souhaité
que ces usages s’appliquent dans leur relation contractuelle. L’article 1160 du Code civil
confirme cette présomption lorsqu’il dispose qu’« on doit suppléer dans le contrat des
clauses y sont d’usage, quoiqu’elles n’y soient pas exprimées ».

Les choses se compliquent lorsque l’une des parties n’est pas commerçante. Dans ce cas, on
décide que le commerçant ne peut pas imposer au non commerçant un usage conventionnel
qui lui est défavorable. Il faut de sa part une acceptation expresse de l’usage. C’est la même
solution qui s’applique dans un litige qui oppose un commerçant à un autre commerçant dans
une branche différente.

En présence des dispositions supplétives, on est tenté d’assimiler l’usage conventionnel à la


norme supplétive dans la mesure où dans ces deux cas, la volonté des parties peut intervenir
pour empêcher leur application. En réalité, il existe une grande différence entre les usages
conventionnels et la loi supplétive. Cette différence se situe au niveau de la preuve. En effet,
alors que celui qui se prévaut d’une loi supplétive ne doit pas la prouver, celui qui se prévaut
d’un usage doit en apporter la preuve.

Quant aux usages de droit, ils ont une valeur impérative en ce qu’ils s’appliquent aux
relations entre commerçants en l’absence d’expression de leur volonté de ne pas voir ces
usages leur être appliqués. Autrement dit, aucun consentement exprès ou tacite des
intéressés n’est nécessaire pour leur application. Ils ont force de lois supplétives ; ce qui
signifie qu’ils ont force de loi et lorsqu’il n’existe pas une volonté contraire des parties.

Aussi, faut-il préciser que les usages de droit permettent quelque fois de déroger à des
dispositions même impératives du droit civil. Par exemple, contrairement aux dispositions de
concerné. cf. BERT (Daniel) et PLANCKEEL (Frédéric), Cours de Droit commercial et des Affaires, collection
Amphi LMD, France septembre 2015, édition 2015-2016, éd. Gualino Lextensoéditions, p.31
l’article 1202 alinéa 1 du Code civil qui dispose que « la solidarité9 ne se présume point ; il
faut qu’elle soit expressément stipulée », la solidarité se présume en matière commerciale en
vertu d’un usage de droit consacré par des arrêts de la Cour de cassation française en date du
20 octobre 1920 et du 18 juillet 1929 10rappelé par un arrêt de la Cour d’appel d’Abidjan du 6
mars 200511. Il en est de même des règles de mise en demeure. En matière civile, la mise en
demeure doit se faire grâce à l’accomplissement de l’une des formalités prescrites par l’article
1139 du Code civil. Cependant, en matière commerciale, un usage de droit fermement établi
permet de faire une mise en demeure par tous les moyens (téléphone, télétex, fax, sms, etc.).
Néanmoins, il faut préciser que les usages de droit ou de fait, pures habitudes entre les
commerçants qui par l’effet du temps s’imposent comme des règles à suivre, ne peuvent
déroger à une loi commerciale ayant un caractère impératif12.

La preuve de l’existence d’un usage conventionnel doit être établi ou rapportée par celui qui
l’invoque au cours d’un procès alors que l’usage de droit n’a pas être prouvé par celui qui
l’invoque ; le juge est censé le connaître comme il est censé maîtriser la loi.

A l’issue du procès, si le juge du fond (juge de première instance ou d’appel) ignore dans sa
décision l’usage conventionnel estimant ainsi ne pas être convaincu de son existence en dépit
de la preuve rapportée par la partie qui l’a invoqué, ce dernier ne pourra pas former un
pourvoi en cassation près la Cour Suprême pour obtenir cassation de cette décision. Il en est
autrement de l’usage de droit dont la méconnaissance par les juges de fond peut donner lieu à
un pourvoi qui pourrait aboutir à la cassation de la décision des juges du fond.

 La jurisprudence

De façon générale, la jurisprudence est perçue comme la solution suggérée par un ensemble
des décisions suffisamment concordantes rendues par les juridictions sur une question de
droit13. En droit commercial, la jurisprudence renvoie d’abord à l’ensemble des décisions
rendues par les tribunaux, les Cours d’appel et la Cour de commune de justice et d’arbitrage
(CCJA) ; ensuite aux sentences arbitrales rendues par la Cour d’Arbitrage de Côte d’Ivoire
(CACI) et la CCJA ; enfin aux avis rendus par la CCJA lorsqu’elle est consultée pour
l’interprétation et l’application du Traité OHADA, ses règlements d’application et les Actes
uniformes.

Au niveau des tribunaux, il faut préciser qu’en droit ivoirien, les décisions en matière
commerciale étaient en général rendues par les tribunaux de première instance ou leurs

9
C’est la situation juridique de plusieurs débiteurs qui sont tenus à l’égard d’un même créancier (solidarité
passive) ou de plusieurs créanciers qui ont le même débiteur (solidarité active)
10
Req. 20 octobre 1920, aff. Robin c./ Serenon, S. 1922. 1. 201, note j. Hamel ; Civ. 18 juillet 1929, aff.
Délicourt c./ Martinot et autres , D.H. 1929.556.
11
C.A.A. 6 mai 2005, in Repertoire quinquenal OHADA 2006-2010, T.2, p.11
12
Civ 3ème, 7 juillet 1975, aff. Mathieu c./ Epoux Donadieu et autres, D.1975, IR 194, Bull. civ. III , n°238,
p.181
13
GUILLIEN (R), VINCENT (J), Lexique des termes juridiques, éditions DALLOZ, 14ème édition, mai
2003.p.343
sections détachées statuant en matière commerciale. Désormais, cette compétence est dévolue
à des juridictions spéciales : les tribunaux de commerce institués par la Décision 001/PR du
11 janvier 2012 portant création, organisation et fonctionnement des tribunaux de commerce.
Mais cette décision a été remplacée par la loi organique n°2014-424 du 1 er juillet 2014 portant
création, organisation et fonctionnement des juridictions de commerce14 modifiée
successivement par les lois organiques n° 2016-11 du 13 janvier 201615 et n°2016-1110 du 8
décembre 2016.

L’article 2 alinéa 1er de la loi organique relative aux juridictions de commerce dispose que
« Les juridictions de commerce sont des juridictions spéciales de premier et second degré  ».
En clair, ce texte signifie que des juridictions spéciales devraient être créées pour trancher les
litiges en matière commerciale en première instance et en appel.

Ainsi, désormais les contestations relatives aux actes de commerce accomplis par les
commerçants à l’occasion de leur commerce et l’ensemble de leurs contestations
commerciales comportant même un objet civil relèvent de la compétence des juridictions de
commerce sous réserve du respect d’une tentative de règlement amiable obligatoire16.

Malheureusement, en l’état actuel de l’application de cette loi organique relative aux


juridictions de commerce, seulement le tribunal de commerce d’Abidjan et la Cour d’Appel
de commerce d’Abidjan sont fonctionnels et englobent le ressort territorial des tribunaux de
première instance d’Abidjan-Plateau et de Yopougon. Néanmoins, en dehors du ressort
territorial du tribunal de commerce d’Abidjan et de la Cour d’Appel de commerce d’Abidjan,
les tribunaux de droit commun (tribunaux de première instance et sections détachées)
demeurent compétents pour rendre des décisions en matière commerciale et ce, en dépit de la
création des juridictions de commerce par les textes juridiques.

Par ailleurs, il faut préciser que l’article 10 de la loi organique n°2016-1110 du 8 décembre
2016 portant création, organisation et fonctionnement des juridictions de commerce, dispose
que : « les Tribunaux de commerce statuent :

- En premier ressort sur toutes les demandes dont l’intérêt du litige est supérieur à
vingt-cinq millions de francs ou est indéterminée ;
- En premier et dernier ressort sur toutes les demandes dont l’intérêt du litige
n’excèdent pas vingt-cinq millions de francs. »

Ainsi, le tribunal de commerce d’Abidjan statue en premier ressort lorsque l’intérêt du litige
est supérieur à vingt-cinq millions de francs ou est indéterminé 17; ce qui implique qu’en cas
de contestation, ces décisions peuvent faire l’objet d’un appel près la Cour d’Appel de
14
Journal officiel de la république de Côte d’Ivoire (JORCI) n °11 du 15 juillet 2014. Cf.
http://www.ccesp.ci/ccesp2/img_articles/loi_%20juridictions_de_commerce.PDF
15
JORCI n°5 du 26février2016.cf. http://www.tribunalcommerceabidjan.org/documents/publications/JO0002.pdf
16
Contrairement aux tribunaux de commerce ivoiriens, il semble que la procédure suivie devant les tribunaux de
commerce français n’impose pas de tentative de règlement amiable préalable à la phase contentieuse. cf. Cf.
article L.721-1 et suivant du Code de commerce français
commerce d’Abidjan. Par ailleurs, si l’arrêt de la Cour d’Appel de commerce d’Abidjan n’est
pas accepté par toutes les parties au litige, elles peuvent former un pourvoi en cassation près
la CCJA.

Par contre, lorsque l’intérêt du litige n’excède pas vingt-cinq millions de francs, le tribunal de
commerce d’Abidjan statue en premier ressort et en dernier ressort 18. Dans ce cas, toute
contestation relative à la décision rendue ne peut faire l’objet que d’un pourvoi en cassation
près la CCJA.

Quant à la CCJA, elle constitue l’organe suprême des Etats parties à l’OHADA qui assure une
interprétation commune des textes de l’OHADA (Traité, Règlements d’application et les
Actes uniformes) face aux éventuelles contradictions des juridictions de fond des différents
Etats parties. Elle assume ainsi trois (03) fonctions essentielles : judiciaire (en rendant des
Arrêts), arbitrale (en rendant des Sentences arbitrales) et consultative (en rendant des
Avis)19.

 La Doctrine

La Doctrine est généralement appréhendée comme l’ensemble des opinions communément


professées par ceux qui enseignent le Droit, ou même ceux qui sans enseigner, écrivent sur le
Droit20. A l’instar des autres spécialisations du droit, la doctrine joue un rôle déterminant
dans la compréhension et l’évolution du droit OHADA21.

A ce propos, soulignons les analyses pertinentes d’un auteur qui estime qu’avec les Actes
uniformes, le rôle de la doctrine sera renforcé car, plus que par le passé, elle doit veiller à
discerner et à analyser toutes les dispositions nouvelles pour permettre, à travers sa
contribution d’asseoir un droit commercial cohérent dans son application. La doctrine
française pourra également servir de référence puisque les Actes uniformes de l’OHADA sont
largement inspirés des dispositions déjà en vigueur en France22.

Le cadre de réflexion étant posé, il convient d’aborder concrètement l’analyse du droit


commercial en mettant en lumière d’une part le domaine du droit commercial (première
partie) et d’autre part, en analysant les moyens du droit commercial (deuxième partie).

17
Cf. article 10 de loi organique n°2016-1110 du 8 décembre 2016 portant création, organisation et
fonctionnement des juridictions de commerce
18
Article 10 précité
19
Cf. articles 7, 13 et 14 du Traité OHADA révisé
20
CORNU (Gérard), Vocabulaire juridique, France 2010, éd. Presse Universitaires Françaises (PUF), p.324
21
En ce sens, AKUETE (Pedro Santos) et TOE (Jean Yado), Droit Commercial Général, Editons Bruylant,
2002 ; FIENI (Pacôme), « Droit commercial général dans l'espace OHADA : étude comparative de l'ancien et
du nouvel Acte uniforme », extrait de Actualités juridique Edition économique n°3/2012, p.22,
http://www.ohada.com/doctrine/ohadata/D-13-34.html; BITSAMANA (H.), Dictionnaire de droit OHADA,
Brazzaville, éditions IPC.
22
BEIRA (Ehi Marc), Droit commercial : Droit commercial général et Droit des sociétés commerciales,
Abidjan, édition 2016, éditions ABC, 2013, p. 25

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