INTRODUCTION
INTRODUCTION
1. La notion de Droit Commercial
Ce qui implique l’analyse des activités effectuées par le commerçant pour leur déceler une
nature commerciale. D’où la naissance d’une seconde conception, la conception dite objective
ou réelle. Selon la conception objective ou réelle, le droit commercial est perçu comme
l’ensemble des règles applicables aux opérations commerciales, lesquelles peuvent parfois
être passées par des non-commerçants. En clair, selon cette conception, le droit commercial
serait le droit applicable aux actes de commerce. Cette conception du droit commercial se
prévaut d’une idée simple : compte tenu de l’égalité civile entre tous les citoyens, un Code de
commerce2 a été élaboré pour régir non pas une classe particulière de sujets de droit mais une
catégorie d’actes. C’est la raison pour laquelle ce Code a été qualifié de Code de commerce
et non de Code des commerçants3.
Cependant, la conception objective n’est pas également à l’abri de critiques. En effet, tous les
actes juridiques n’ont pas une nature déterminée par leur forme ou par leur objet. Ainsi, de
nombreux actes sont utilisés aussi bien dans la vie civile que dans le domaine commercial :
transport, vente, dépôt, etc. Pour leur déceler un caractère commercial, il faut alors considérer
1
RIPERT (Georges) et ROBLOT (René) par VOGEL (Louis), Traité de Droit Commercial, Tome 1- Volume 1,
18ème édition, éd. LGDJ, p. 2 § 5 ; GIVERDON, « Le droit commercial, droit des commerçants », JCP, 1949,
1,770.
2
Précisément en 1807
3
RIPERT (Georges) et ROBLOT (René) par VOGEL (Louis), Traité de Droit Commercial, Tome 1- Volume 1,
Op. Cit, p.2 § 6
pour quelle finalité ils sont effectués. Or, pour ce faire, il est nécessaire d’examiner l’activité
économique des cocontractants ; et les actes ne seront commerciaux que s’ils sont accomplis
par des commerçants.
Cependant, au fil de son évolution le domaine du droit commercial s’est élargi prenant en
compte plusieurs aspects de l’activité économique. De ce fait, certains auteurs avertis, tel que
le Professeur Yves GUYON, préfèrent le qualificatif de droit des affaires ou de droit de
l’activité économique ou encore de droit de l’entreprise. Ainsi, le droit des affaires est perçu
comme une branche du droit privé qui par dérogation au droit civil règlemente de manière
spécifique la plupart des activités de productions, de distribution et de services. Le droit
commercial général est donc un aspect de ce vaste ensemble que constitue le droit des
affaires.
Ainsi, en l’état actuel des choses, retenons que le droit commercial général peut être
appréhendé comme la branche du droit privé qui étudie les règles applicables aux actes
de commerce, aux commerçants, aux entreprenants ainsi qu’à certaines opérations
juridiques relevant de l’activité commerciale tels que le bail à usage professionnel et la
vente commerciale.
Quoi qu’il en soit, afin de bien percevoir le contenu actuel du droit commercial général, il
convient, d’aborder l’historique et l’évolution de la matière.
De manière générale, le droit commercial tire ses origines de l’antiquité, s’édifie au moyen-
âge avant de connaitre une consécration légale en France grâce à l’adoption du Code de
commerce en 1807.
Ainsi, quatorze (14) Etats africains de la zone franc 4 vont mettre en place une organisation
dont le rôle principal est de secréter et de veiller à l’application d’un nouveau droit des
affaires moderne, simple et adapté à leurs réalités économiques : l’Organisation pour
l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA). Cette organisation dont
l’adhésion est ouverte à tout Etat africain5, compte à jour dix-sept (17) Etats-parties.
L’OHADA est née de la signature d’un Traité le 17 octobre 1993 à Port-Louis en île Maurice.
Ce Traité l’instituant a fait l’objet d’une révision le 17 octobre 2008 à Québec au Canada. Les
raisons essentielles qui sous-tendent l’existence de cette organisation sont au nombre de
deux : pallier l’insécurité juridique et judicaire en vue de servir l’intégration économique et la
croissance.
4
Benin, Burkina Faso, Cameroun, Centrafrique, Comores, Congo (Brazzaville), Cote d’Ivoire, Gabon, Guinée
équatoriale, Mali, Niger, Sénégal, Tchad et le Togo.
5
Art 53 du Traité révisé de l’OHADA
L’OHADA, s’attaque enfin à l’insécurité judicaire d’une part en mettant en place une
juridiction suprême (la Cour Commune de Justice et d’arbitrage dite CCJA) dont la mission
est d’assurer une interprétation commune du corpus législatif de l’OHADA en veillant à
l’application rigoureuse des Actes uniformes. D’autre part, l’OHADA assure la formation des
magistrats ainsi que des autres acteurs de la justice (avocats, huissiers, notaires, etc.) par la
mise en place d’une école appelée l’Ecole Régionale Supérieure de Magistrature (ERSUMA).
Dans les Etats-parties à l’OHADA, le droit commercial repose sur plusieurs sources qui
peuvent être classées en deux catégories : les sources formelles et les sources informelles.
Au niveau des sources formelles, l’on dénombre d’une part les sources internationales et
régionales ainsi que les sources nationales d’autre part.
Ces traités jouent un rôle important dans les échanges ; lesquels échanges de plus en plus
ont donné un caractère régional ou international au droit commercial. A cet effet, on peut
citer le traité instituant l’OHADA (Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du
Droit des Affaires). Ainsi, les traités jouent un rôle important dans les relations entre
commerçants ressortissant de différents Etats. C’est également le cas des traités de
l’UEMOA, de la CEDEAO, ou encore la Convention de Vienne de 198O sur la vente
internationale de marchandises.
Cette terminologie d’Acte uniforme est issue de l’article 5 alinéa 1 du Traité OHADA révisé
le 17 octobre 2008 et désigne les lois uniformes prises pour l’adoption des règles communes
en matière de droit des affaires applicables dans les dix-sept (17) Etats parties. Ainsi, Ces
différents Actes uniformes ont vocation à régir l’ensemble du droit des affaires objet de
l’OHADA. Le dix-sept (17) avril 1997, les trois (03) premiers Actes uniformes, au nombre
desquels figure l’Acte uniforme portant droit commercial général, sont adoptés et entrent en
vigueur le 1er janvier 1998. A ce jour, le corpus législatif comporte dix (10) Actes
uniformes6.Dans le cadre de ce cours, l’Acte uniforme portant droit commercial général
6
- l’Acte Uniforme portant sur le Droit Commercial Général (AUDCG) adopté en 1997 et révisé en 2010 ,
l’Acte Uniforme relatif au Droit des Sociétés Commerciales et du GIE (AUDSCOGIE ou AUSCOGIE ou encore
(AUDCG) du 15 décembre 2010 retiendra principalement notre attention dans la mesure où il
constitue le texte de loi fondamental duquel découlent les règles relatives au droit commercial
général sans préjudice des autres sources de ce droit. L’Acte uniforme portant droit
commercial général du 17 avril 1997 (publié au J.O de l’OHADA du 1 er octobre 1997 et au
J.O n°53 du 22 décembre 1997 de la République de Côte d’Ivoire) est entré en vigueur le 1 er
janvier 1998. Il était applicable jusqu’au 15 décembre 2010 où il a été abrogé et remplacé par
un nouvel Acte uniforme portant droit commercial général adopté à Lomé le 15 décembre
2010 et publié au J.O n°23 de l’OHADA du 15 février 2011. Conformément aux dispositions
de son article 307, le nouvel AUDCG est entré en vigueur 90 jours après sa publication au J.O
de l’OHADA soit le 15 mai 2011.
Par ailleurs, d’autres Actes uniformes seront invoqués dans le cadre de ce cours tels que
l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêt
économique (AUSCGIE) du 30 janvier 2014, l’Acte uniforme portant organisation des sûretés
(AUS) du 15 décembre 2010, ainsi que l’Acte uniforme relatif au droit comptable et à
l’information financière (AUDCIF) du 26 janvier 2017.
En vertu de l’article 10 du Traité OHADA, les Actes uniformes ont abrogé toutes les
dispositions (de droit interne) des différents Etats parties antérieurement applicables en
matière commerciale. Cependant, ils laissent subsister les dispositions internes qui ne leur
sont pas contraires.
La Constitution
AUSCOM) adopte en 1997 et révisé en 2014 ; l’Acte Uniforme portant organisation des Sûretés (AUS) adopté
en 1997 et révisé en 2010 ; l’Acte Uniforme portant Organisation des Procédures Simplifiées de Recouvrement
et des Voies d’Exécution (AUPSRVE) adopté en 1998; l’Acte Uniforme portant organisation des Procédures
Collectives d’Apurement du Passif (AUPCAP) adopté en 1998 ;l’Acte Uniforme relatif au Droit de l’Arbitrage
(AUA) adopté 1999 ; l’Acte Uniforme portant Organisation et Harmonisation de la Comptabilité des Entreprises
(AUDCIF) adopté en 2000 et révisé le 26 janvier 2017 ; l’Acte Uniforme relatif aux Contrats de Transport de
Marchandises par Route (AUCTMR) adopté en 2003 ;l’Acte uniforme relatif au Droit des Sociétés Coopératives
(AUSCOOP) adopté en 2010 ; l’Acte uniforme relatif à la médiation (AM) adopté le 23 novembre 2017.
Il s’agit des lois relatives au droit commercial non contraires aux Actes uniformes.
Relativement à l’application de ces dispositions, la République de Côte d’Ivoire a demandé à
la CCJA ce qu’il fallait entendre par la notion de « loi contraire ».
Dans le cadre de l’Acte uniforme sur le droit des sociétés commerciales et du groupement
d’intérêt économique, les formules « lois contraires » et dispositions contraires
indifféremment employés sont absolument équivalentes.7 »
Malheureusement cet avis de la CCJA qui était censé élucider la notion, n’a pas atteint son
objectif en raison de son imprécision. De ce fait, il convient de dire que, par principe, le droit
commercial antérieur est abrogé par les Actes uniformes. Autrement dit, il sied d’affirmer que
la règlementation antérieure ayant le même objet qu’un Acte uniforme disparait sauf cas de
renvoi exprès à la loi nationale ou encore si une disposition de cette réglementation régit une
matière non régie par un Acte uniforme. Par exemple, aux termes de l’article 140 de l’Acte
uniforme portant droit commercial général applicable depuis le 15 mai 2011 :« le locataire-
gérant, est tenu d’indiquer en tête de ses bons de commande, factures et autres documents
à caractère financier ou commercial avec son numéro d’immatriculation au RCCM, sa
qualité de locataire –gérant du fonds.
Dans ce cas de renvoi, on a recours aux peines prévues par la loi n°722-513 du 27 juillet 1972
relative à la location-gérance du fonds de commerce, pourtant abrogée.
Quant aux textes partiellement contraires aux dits Actes uniformes, toutes leurs dispositions
partielles non contraires au dit Actes demeurent applicables.
Ces sources ont pour but de préciser les conditions d’application de la loi. Elles ont un rôle
plus important en droit commercial contrairement au droit civil où leur rôle est plus effacé du
fait que les principes sont plus affirmés en droit civil. Il s’agit essentiellement des arrêtés
ministériels, des réponses ministérielles, des circulaires. Il faut remarquer que ces sources sont
presque inexistantes en droit ivoirien à cause de l’évolution trop lent de notre droit.
Le droit civil
7
Avis de la CCJA n°001/2001/EP du 30 avril 2001, www.ohada.com, Ohadata J-02-04.
Dans les systèmes juridiques de tradition juridique française, tel que le nôtre, le droit civil
constitue le droit commun qui régit les relations de droit privé ; c’est lui qui édicte les
principes généraux qui président aux relations entre individus et qui détermine le statut
juridique des personnes.
Ainsi, pour bien comprendre les règles de droit commercial, il faut s’inspirer des principes
généraux du droit civil et notamment des règles relatives aux obligations en général. En effet,
en matière de conclusion des conventions, les commerçants doivent respecter les règles
relatives à la capacité, au consentement, à la licéité et aux bonnes mœurs. Ils doivent exécuter
leurs obligations sous peine d’engager leur responsabilité ; laquelle est soumise aux règles de
droit commun de la responsabilité contractuelle ou délictuelle.
Les usages
Ce sont des pratiques liées à la vie des commerçants qui en raison de leur permanence et de
leur application régulière, prennent la valeur de règles de droit. Autrement dit, il s’agit de
comportements professionnels constants, notoires et généralement anciens. Ils constituent une
source importante du droit commercial car à l’origine, le droit commercial était un droit
coutumier. Et pendant longtemps, il a gardé ce caractère parce qu’il n’était pas codifié et
même après sa codification le droit commercial a gardé une place importante pour les usages.
Certes, il ne s’agit pas de règles issues de textes de loi. Mais, ils n’en sont pas moins
obligatoires. Cela s’explique par le fait que les dispositions légales ne pouvant pas prévoir
tous les comportements notamment en matière contractuelle Ainsi, les usages tiennent une
place importante en droit commercial car ils interviennent pour pallier les insuffisances des
différentes règlementations. La loi, elle-même, renvoie aux usages ; Ainsi, aux termes de
l’article 1873 du code civil « les dispositions relatives aux sociétés de commerce ne
s’appliquent que dans les points qui n’ont rien de contraire aux lois et usages du
commerce ».
Il existe deux catégories d’usages : les usages de fait qualifiés également d’usages
conventionnels et les usages de droit qualifiés aussi de coutume.
Les usages de fait ou les usages conventionnels sont des pratiques restreintes à un nombre
limité ou à un petit nombre de commerçants qui se conforment toujours à la même manière
d’agir lorsque les circonstances sont identiques8.
8
En droit français, les usages conventionnels sont connus également sous la dénomination d’usages
professionnels. Pour faciliter la preuve de leur existence, ils sont rédigés par des organismes professionnels
(Chambre de commerce ou syndicat). A défaut, l’existence de l’usage peut être établi grâce à un parère, c’est –à
–dire un certificat délivré par des Chambres de commerce ou syndicats attestant de l’existence de l’usage
Quant aux usages de droit ou coutume, ils renvoient également à des pratiques ou des
manières de procéder mais qui cette fois, s’imposent dans les rapports entre commerçants
comme des règles ou des normes objectives.
La différence entre ces deux usages peut s’effectuer suivant quatre (04) critères : leur portée
(ou domaine d’application), leur valeur juridique, la preuve de leur existence et la
sanction de leur méconnaissance ou de leur ignorance par le juge du fond.
Tandis que les usages conventionnels ont une portée limitée car ne s’appliquant qu’à un
cercle restreint de commerçants (par exemple, les commerçants exerçant dans le domaine de
la vente de tissus), les usages de droit ont une portée élargie puisqu’ils s’appliquent à tous
les commerçants sans distinction de leur secteur d’activités. Toutefois, en aucun cas, ils ne
sont opposables à de simples consommateurs.
Du point de vue de leur valeur juridique, il faut retenir que les usages conventionnels ont une
valeur supplétive ; c’est-à-dire que leur application ou leur mise à l’écart dépend de la
volonté des parties contractantes. Toutefois, dans le silence du contrat, il convient de
présumer que ceux qui avaient la possibilité de les écarter et qui ne l’ont pas fait, ont souhaité
que ces usages s’appliquent dans leur relation contractuelle. L’article 1160 du Code civil
confirme cette présomption lorsqu’il dispose qu’« on doit suppléer dans le contrat des
clauses y sont d’usage, quoiqu’elles n’y soient pas exprimées ».
Les choses se compliquent lorsque l’une des parties n’est pas commerçante. Dans ce cas, on
décide que le commerçant ne peut pas imposer au non commerçant un usage conventionnel
qui lui est défavorable. Il faut de sa part une acceptation expresse de l’usage. C’est la même
solution qui s’applique dans un litige qui oppose un commerçant à un autre commerçant dans
une branche différente.
Quant aux usages de droit, ils ont une valeur impérative en ce qu’ils s’appliquent aux
relations entre commerçants en l’absence d’expression de leur volonté de ne pas voir ces
usages leur être appliqués. Autrement dit, aucun consentement exprès ou tacite des
intéressés n’est nécessaire pour leur application. Ils ont force de lois supplétives ; ce qui
signifie qu’ils ont force de loi et lorsqu’il n’existe pas une volonté contraire des parties.
Aussi, faut-il préciser que les usages de droit permettent quelque fois de déroger à des
dispositions même impératives du droit civil. Par exemple, contrairement aux dispositions de
concerné. cf. BERT (Daniel) et PLANCKEEL (Frédéric), Cours de Droit commercial et des Affaires, collection
Amphi LMD, France septembre 2015, édition 2015-2016, éd. Gualino Lextensoéditions, p.31
l’article 1202 alinéa 1 du Code civil qui dispose que « la solidarité9 ne se présume point ; il
faut qu’elle soit expressément stipulée », la solidarité se présume en matière commerciale en
vertu d’un usage de droit consacré par des arrêts de la Cour de cassation française en date du
20 octobre 1920 et du 18 juillet 1929 10rappelé par un arrêt de la Cour d’appel d’Abidjan du 6
mars 200511. Il en est de même des règles de mise en demeure. En matière civile, la mise en
demeure doit se faire grâce à l’accomplissement de l’une des formalités prescrites par l’article
1139 du Code civil. Cependant, en matière commerciale, un usage de droit fermement établi
permet de faire une mise en demeure par tous les moyens (téléphone, télétex, fax, sms, etc.).
Néanmoins, il faut préciser que les usages de droit ou de fait, pures habitudes entre les
commerçants qui par l’effet du temps s’imposent comme des règles à suivre, ne peuvent
déroger à une loi commerciale ayant un caractère impératif12.
La preuve de l’existence d’un usage conventionnel doit être établi ou rapportée par celui qui
l’invoque au cours d’un procès alors que l’usage de droit n’a pas être prouvé par celui qui
l’invoque ; le juge est censé le connaître comme il est censé maîtriser la loi.
A l’issue du procès, si le juge du fond (juge de première instance ou d’appel) ignore dans sa
décision l’usage conventionnel estimant ainsi ne pas être convaincu de son existence en dépit
de la preuve rapportée par la partie qui l’a invoqué, ce dernier ne pourra pas former un
pourvoi en cassation près la Cour Suprême pour obtenir cassation de cette décision. Il en est
autrement de l’usage de droit dont la méconnaissance par les juges de fond peut donner lieu à
un pourvoi qui pourrait aboutir à la cassation de la décision des juges du fond.
La jurisprudence
De façon générale, la jurisprudence est perçue comme la solution suggérée par un ensemble
des décisions suffisamment concordantes rendues par les juridictions sur une question de
droit13. En droit commercial, la jurisprudence renvoie d’abord à l’ensemble des décisions
rendues par les tribunaux, les Cours d’appel et la Cour de commune de justice et d’arbitrage
(CCJA) ; ensuite aux sentences arbitrales rendues par la Cour d’Arbitrage de Côte d’Ivoire
(CACI) et la CCJA ; enfin aux avis rendus par la CCJA lorsqu’elle est consultée pour
l’interprétation et l’application du Traité OHADA, ses règlements d’application et les Actes
uniformes.
Au niveau des tribunaux, il faut préciser qu’en droit ivoirien, les décisions en matière
commerciale étaient en général rendues par les tribunaux de première instance ou leurs
9
C’est la situation juridique de plusieurs débiteurs qui sont tenus à l’égard d’un même créancier (solidarité
passive) ou de plusieurs créanciers qui ont le même débiteur (solidarité active)
10
Req. 20 octobre 1920, aff. Robin c./ Serenon, S. 1922. 1. 201, note j. Hamel ; Civ. 18 juillet 1929, aff.
Délicourt c./ Martinot et autres , D.H. 1929.556.
11
C.A.A. 6 mai 2005, in Repertoire quinquenal OHADA 2006-2010, T.2, p.11
12
Civ 3ème, 7 juillet 1975, aff. Mathieu c./ Epoux Donadieu et autres, D.1975, IR 194, Bull. civ. III , n°238,
p.181
13
GUILLIEN (R), VINCENT (J), Lexique des termes juridiques, éditions DALLOZ, 14ème édition, mai
2003.p.343
sections détachées statuant en matière commerciale. Désormais, cette compétence est dévolue
à des juridictions spéciales : les tribunaux de commerce institués par la Décision 001/PR du
11 janvier 2012 portant création, organisation et fonctionnement des tribunaux de commerce.
Mais cette décision a été remplacée par la loi organique n°2014-424 du 1 er juillet 2014 portant
création, organisation et fonctionnement des juridictions de commerce14 modifiée
successivement par les lois organiques n° 2016-11 du 13 janvier 201615 et n°2016-1110 du 8
décembre 2016.
L’article 2 alinéa 1er de la loi organique relative aux juridictions de commerce dispose que
« Les juridictions de commerce sont des juridictions spéciales de premier et second degré ».
En clair, ce texte signifie que des juridictions spéciales devraient être créées pour trancher les
litiges en matière commerciale en première instance et en appel.
Ainsi, désormais les contestations relatives aux actes de commerce accomplis par les
commerçants à l’occasion de leur commerce et l’ensemble de leurs contestations
commerciales comportant même un objet civil relèvent de la compétence des juridictions de
commerce sous réserve du respect d’une tentative de règlement amiable obligatoire16.
Par ailleurs, il faut préciser que l’article 10 de la loi organique n°2016-1110 du 8 décembre
2016 portant création, organisation et fonctionnement des juridictions de commerce, dispose
que : « les Tribunaux de commerce statuent :
- En premier ressort sur toutes les demandes dont l’intérêt du litige est supérieur à
vingt-cinq millions de francs ou est indéterminée ;
- En premier et dernier ressort sur toutes les demandes dont l’intérêt du litige
n’excèdent pas vingt-cinq millions de francs. »
Ainsi, le tribunal de commerce d’Abidjan statue en premier ressort lorsque l’intérêt du litige
est supérieur à vingt-cinq millions de francs ou est indéterminé 17; ce qui implique qu’en cas
de contestation, ces décisions peuvent faire l’objet d’un appel près la Cour d’Appel de
14
Journal officiel de la république de Côte d’Ivoire (JORCI) n °11 du 15 juillet 2014. Cf.
http://www.ccesp.ci/ccesp2/img_articles/loi_%20juridictions_de_commerce.PDF
15
JORCI n°5 du 26février2016.cf. http://www.tribunalcommerceabidjan.org/documents/publications/JO0002.pdf
16
Contrairement aux tribunaux de commerce ivoiriens, il semble que la procédure suivie devant les tribunaux de
commerce français n’impose pas de tentative de règlement amiable préalable à la phase contentieuse. cf. Cf.
article L.721-1 et suivant du Code de commerce français
commerce d’Abidjan. Par ailleurs, si l’arrêt de la Cour d’Appel de commerce d’Abidjan n’est
pas accepté par toutes les parties au litige, elles peuvent former un pourvoi en cassation près
la CCJA.
Par contre, lorsque l’intérêt du litige n’excède pas vingt-cinq millions de francs, le tribunal de
commerce d’Abidjan statue en premier ressort et en dernier ressort 18. Dans ce cas, toute
contestation relative à la décision rendue ne peut faire l’objet que d’un pourvoi en cassation
près la CCJA.
Quant à la CCJA, elle constitue l’organe suprême des Etats parties à l’OHADA qui assure une
interprétation commune des textes de l’OHADA (Traité, Règlements d’application et les
Actes uniformes) face aux éventuelles contradictions des juridictions de fond des différents
Etats parties. Elle assume ainsi trois (03) fonctions essentielles : judiciaire (en rendant des
Arrêts), arbitrale (en rendant des Sentences arbitrales) et consultative (en rendant des
Avis)19.
La Doctrine
A ce propos, soulignons les analyses pertinentes d’un auteur qui estime qu’avec les Actes
uniformes, le rôle de la doctrine sera renforcé car, plus que par le passé, elle doit veiller à
discerner et à analyser toutes les dispositions nouvelles pour permettre, à travers sa
contribution d’asseoir un droit commercial cohérent dans son application. La doctrine
française pourra également servir de référence puisque les Actes uniformes de l’OHADA sont
largement inspirés des dispositions déjà en vigueur en France22.
17
Cf. article 10 de loi organique n°2016-1110 du 8 décembre 2016 portant création, organisation et
fonctionnement des juridictions de commerce
18
Article 10 précité
19
Cf. articles 7, 13 et 14 du Traité OHADA révisé
20
CORNU (Gérard), Vocabulaire juridique, France 2010, éd. Presse Universitaires Françaises (PUF), p.324
21
En ce sens, AKUETE (Pedro Santos) et TOE (Jean Yado), Droit Commercial Général, Editons Bruylant,
2002 ; FIENI (Pacôme), « Droit commercial général dans l'espace OHADA : étude comparative de l'ancien et
du nouvel Acte uniforme », extrait de Actualités juridique Edition économique n°3/2012, p.22,
http://www.ohada.com/doctrine/ohadata/D-13-34.html; BITSAMANA (H.), Dictionnaire de droit OHADA,
Brazzaville, éditions IPC.
22
BEIRA (Ehi Marc), Droit commercial : Droit commercial général et Droit des sociétés commerciales,
Abidjan, édition 2016, éditions ABC, 2013, p. 25