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BRENDA JOYCE
Résumé :
Prologue
Derbyshire, 1820
Il cracha un autre jet de tabac, cette fois sur les pieds nus et
sales du garçon.
Raiza avait-elle accepté que le fait qu'il élève leur fils soit
pour le mieux ? En tant qu'Anglais, un monde d'opportunités lui
serait ouvert. Et il avait droit à son domaine, à son titre et à tous
les privilèges qui allaient avec.
— Ariella de Warenne !
Elle ajouta:
Ariella hésita.
Ariella rechigna.
Dianna l'interrompit.
Ariella se rebiffa.
— Père est tellement entiché de toi qu'il n'y voit pas clair. Il
y a des ragots, tu sais, concernant le fait que tu résides à
Londres sans ta famille.
Dianna gémit.
— Je vois ton avenir, à présent — tu vas épouser quelque
légiste radical-socialiste !
— Non.
Dianna maugréa :
Ariella sourit.
Ariella l'étreignit.
Choqué que son père soit mort sans qu'il ait pu lui dire
adieu, il était allé directement de sa tombe à son bureau.
— Milord? Sir?
— Vraiment?
L'homme rit.
Emilian s'avança.
— Attendez!
— Na za!
Dianna pâlit.
Mais son frère cadet dévisagea Ariella d'un air choqué. Puis
il se tourna vers Cliff et dit :
Cliff vint se placer près d'elle et posa une main sur son
épaule avant de répondre sur un ton plaisant :
— Les expériences d'Owen m'ont impressionné. Je soutiens
la théorie de consolidation des intérêts de la main-d'œuvre.
Elle mit les mains sur ses hanches, mais sourit suavement.
— Les gadjos!
Ariella sentit ses yeux fixés sur elle ; elle releva les paupières
et croisa son regard une deuxième fois.
Cliff s'empourpra.
Cliff s'avança.
Ariella trembla.
Ariella ne pouvait pas croire que son père lance une telle
menace. Tandis qu'elle trébuchait pour le suivre, elle regarda en
arrière. Aussi immobile qu'une statue, le vaida la fixait
toujours. Malgré la distance qui les séparait, elle sentit tant de
force et de dédain — ainsi qu'une intention qu'elle ne comprit
pas. Il lui adressa une courbette, aussi élégante que celle d'un
courtisan, mais ses yeux flambaient, en gâchant l'effet. Ariella
inspira et se détourna.
— Emilian.
— La femme?
Stevan sourit.
Il regarda Emilian.
— Il a été élevé comme un gadjo. Notre vie est meilleure,
mais il ne peut pas le savoir.
— Elle n'a pas quinze ans, déclara Emilian d'un ton crispé.
Stevan l'étreignit.
— Quand?
— Il y a un mois.
— Emilian.
Emilian se raidit.
C'était si ironique.
C'était une belle femme, bien en chair, d'à peu près son âge,
et il ne pouvait se tromper sur l'invitation qu'il venait de
recevoir. Il regarda ses cuisses tandis qu'elle relevait ses jupes,
dangereusement haut. Il n'y avait pas de maîtresse pareille à
une Tzigane.
— Etais-je si transparente?
Il rit.
— Oui, en effet, car cela fait un certain temps qu'il n'y a pas
eu de si grande réception à Rose Hill. Ariella, est-ce que
Montgomery t'a plu ?
Cliff sourit.
Ariella sourit.
Il rit.
— Vraiment?
Elle sourit
— Dosta!
— Que...
— Je n'espionnais pas. !
— Je le jure.
Elle inspira.
— La musique... la danse... c'est merveilleux.
Elle plongea les yeux dans les siens. Elle n'en avait pas
envie, ils le savaient tous les deux.
— La nuit ne fait que commencer, ajouta-t-il, toujours aussi
suave.
Il pivota, abaissant ses cils, non sans lui avoir lancé un long
regard.
Elle se figea.
— Emilian.
Il s'immobilisa.
Elle le sentit frissonner tandis qu'il baissait les yeux sur elle.
— Venez à moi.
— Attendez.
Elle se figea.
Il esquissa un sourire.
— Nous savons tous les deux que c'est pour cela que vous
êtes venue à moi.
Elle hésita. Il avait l'air aussi sauvage qu'un lion tiré de son
sommeil dans sa tanière.
— Attendez!
— Vraiment?
Elle se raidit.
— Bien sûr!
— Bonne nuit
— C'est dit avec une telle naïveté que je pourrais bien vous
croire.
— Je ne suis guère naïve, rétorqua Ariella.
En colère, elle lui saisit le bras. Elle n'était pas assez forte
pour le retenir, mais il lui fit face, les yeux aussi froids et
turbulents qu'une tempête hivernale.
Il rit
— C'est impossible.
Il s'étrangla.
Elle lui sourit. Elle pensait que son plan était excellent.
Il paraissait dégoûté.
Il gronda.
— Pourquoi pas ?
— Partez, tonna-t-il.
C'était incroyable.
Il avait désiré ses attentions dès qu'il l'avait vue, bien qu'il
ait supposé qu'elle n'était pas mariée. Il ne poursuivait jamais
de femmes non mariées, mais elle était superbe, anglaise et au-
dessus de lui. A cause de son père, peut-être, il l'avait
délibérément regardée avec de l'intérêt sexuel. Il n'avait pas été
surpris quand elle était venue le rejoindre au campement dans
la nuit. Elle pouvait prétendre qu'elle était venue écouter la
musique, mais elle était venue à cause de lui. Toutefois, il avait
pensé que c'était une femme expérimentée en amour.
— Vraiment?
— Peut-être.
Emilian le fixa.
Emilian se raidit.
Il devait la venger.
Ce serait si facile...
— Ariella!
Elle s'arrêta.
— Je ne sais pas.
— Bien sûr.
Mais en suivant sa sœur dans le grand escalier central, aux
marches recouvertes d'un tapis persan rouge et or, elle entendit
la voix de son frère. Son ton était dur.
— La voilà !
Alexi se tourna.
— Depuis que je suis allée dans leur camp avec père et que
j'ai vu des mères qui s'occupaient de leurs enfants et
préparaient le repas pour leur famille, comme nous !
Margery sourit.
Le regard d'Emilian restait rivé sur Ariella. Elle vit ses yeux
s'emplir de colère.
— Je l'espère.
Margery sourit.
Elle se tourna.
Elle hésita.
Il se détourna.
Ariella se crispa.
— Oh, oui, j'avais oublié. Vous voulez plus que mes baisers,
vous voulez mieux me connaître—comme ami ! Vous pouvez me
retrouver ce soir dans notre prochain campement, mais même
si vous prétendez que c'est pour converser, nous savons tous les
deux qu'il y aura peu de conversation.
Il s'étrangla.
— Que puis-je faire pour instaurer une trêve entre nous, afin
que nous puissions prendre un vrai départ?
Elle espérait que ce n'était pas le cas. Mais s'il était vraiment
monté contre elle, s'il désirait vraiment mettre fin à leur
relation, elle ne pouvait pas faire grand-chose. Elle l'avait déjà
poursuivi d'une façon éhontée. Les dames ne poursuivaient pas
des gentlemen.
— Croyez-vous au destin?
Il continua à travailler.
— Bien que je sois instruite et me considère comme plutôt
rationnelle, je crois au destin. Je ne viens jamais à Rose Hill. Je
n'ai pas séjourné dans le Derbyshire depuis des années. Mais
mon premier soir ici, nous nous sommes rencontrés.
Elle frémit.
Il s'étrangla de nouveau.
Ariella s'aperçut qu'elle avait les larmes aux yeux. Elle les
essuya.
— Je suis Jaelle. Je vous ai vue ici avec mon frère, hier soir.
— Tout le monde vous a vue avec lui, hier soir. Mon frère est
fort, beau et riche comme un roi. Beaucoup de femmes le
convoitent Elles seraient sottes de ne pas le faire. Elles sont
jalouses de vous, aujourd'hui.
Jaelle rit
Jaelle la toucha.
Jaelle sourit.
— D'bika t'maya.
Emilian laissa la caravane loin derrière, galopant sur son
pur-sang à travers champs et sautant de temps à autre un muret
en pierres. Mais il avait beau pousser son cheval, il ne pouvait
chasser les mots d'Ariella. Croyez-vous au coup de foudre ?
Viendrait-elle à Woodland ?
La rage le submergea.
Emilian l'interrompit.
— Non.
— Bien.
— Tu vas bien ?
— Bien sûr, que je suis revenu. C'est ici chez moi. Alors qu'il
parlait, une image de la tribu lui passa dans la tête, suivie par
ces maudites pancartes—et par Ariella de Warenne.
Robert rougit
Emilian comprit aussitôt que son cousin et ses amis avaient
fait des avances à la fille de Mme Dodd, qui n'avait que seize
ans. Il trembla.
Robert blêmit.
Mais il la retrouverait.
— Je réfléchis, répondit-elle.
— Bien sûr.
— Je te demande pardon?
Dianna rougit.
Alexi la regarda.
Ariella sut que quelque chose n'allait pas. Elle regarda dans
la même direction et vit une pancarte sur la porte de l’écurie de
louage, mais ne put la lire.
— C'est abominable !
— Bien.
— Djordi.
Alexi pivota.
Ariella l'enlaça.
Elle recula.
Il gloussa.
Ariella l'enlaça.
— Merci.
— Jaelle!
— Elle n'est pas une dame, dit-il d'un ton coupant. Puis ses
yeux s'élargirent quand il comprit à la stature et aux vêtements
d'Alexi que le jeune homme était un aristocrate.
— Je vous demande pardon, sir.
Elle vit alors une petite main sale saisir celle d'Alexi, et ce
dernier tira Jaelle dehors.
Alexi se raidit.
Elle indiqua le trou dans le mur. Ariella étudia ses yeux avec
attention. Elle essayait de se montrer fière, mais elle était
bouleversée. Ariella la trouva incroyablement forte et
courageuse. N'importe quelle autre femme aurait pleuré —
probablement dans les bras de son galant sauveur.
— Je vais à Woodland.
— Bien sûr.
De la chaleur l'envahit et c'était si bon — si peu familier. Il la
regarda avec plus d'attention et pensa que ses yeux étaient
pleins d'ombres. L'imaginait-il ? Il souhaita mieux la connaître.
— Non.
— Je lis l'anglais.
— Oui.
Il la dévisagea.
— Je vais bien.
— Ils t'ont attachée? Ces blessures ont été causées par des
cordes ?
Elle rougit.
Elle hésita.
Le livre était ouvert sur son lit, négligé. Elle avait essayé de
lire, mais elle ne pouvait distinguer les mots, qui dansaient et se
brouillaient comme les flammes dans la cheminée de sa
chambre.
Elle le vit debout près d'un feu, regardant vers l'est, et elle
fut certaine qu'il pensait à elle, aussi. Il était à Woodland,
l'attendant, aussi fiévreux et brûlant qu'elle.
— Merci.
Elle ne lui avait pas donné son nom. Elle était certaine que
s'il était assez intelligent, il devinerait qui elle était, mais elle
espérait qu'il la prendrait pour une invitée de passage. S'il
s'avisait de son identité, ce qui restait de sa réputation serait
maintenant en lambeaux, car il n'y avait qu'une raison pour
laquelle une dame sortait en secret à une heure pareille. Elle ne
s'en souciait pas trop, mais ses parents seraient dévastés si
jamais ils avaient vent de son aventure.
— Oui.
— Je sais.
Elle le lécha.
— Je sais.
Se jouait-il d'elle?
— Emilian?
Elle était allongée, nue, dans les bras d'Emilian, dans une
chambre d'hôte de Woodland. Leurs corps étaient emmêlés, une
de ses jambes prise entre les siennes. Il l'entourait de ses bras et
son visage était pressé sur ses côtes. Aussitôt, elle se rappela la
façon lente, délibérée et exquise dont il lui avait fait l'amour.
— Vraiment?
Un fauteuil craqua.
— Bonjour.
Il la dévisagea.
— Je vous regardais.
— Vous savez que je ne peux pas rentrer chez moi avec mes
cheveux dans cet état, et dans ces vêtements ! Que se passe-t-il ?
Pourquoi ne souriez-vous pas ? Pourquoi parlez-vous comme si
vous me rejetiez—comme si vous nous rejetiez?
— C'est Ariella!
Elle s'avisa qu'il ne l'avait appelée par son nom qu'une fois
de toute la nuit, lorsqu'ils s'étaient unis pour la première fois.
— Et comment le sauriez-vous ?
— Voulez-vous ma perte?
Il pivota vivement.
Elle sentit ses jambes lui manquer. Elle ne s'en soucia pas.
Elle se laissa tomber à terre, renversant une table, atterrissant
durement sur son épaule. Une vive douleur la traversa, mais elle
l'accueillit volontiers. Il avait dû entendre le vacarme, et
cependant il ne revint pas. Ariella se roula en boule.
Ariella se raidit
— Le Tzigane?
Elle inspira.
— Merci, murmura-t-elle.
— L'épouserais-tu ?
— Le pourrais-tu?
Ariella inspira.
L'aubergiste blêmit.
Il avait envie de tuer cet homme pour ce qu'il avait fait. Des
mains l'agrippèrent par-derrière. Il les ignora, tirant Jack par-
dessus le bar tandis que ses clients essayaient frénétiquement
de l'écarter. Alors que les yeux de l'aubergiste saillaient de peur
et de panique, il entendit l'assistance lui crier d'arrêter. Des
doigts s'emparaient de ses épaules, de ses bras, de ses poignets.
Il refusa de lâcher Tollman, conscient que tous les hommes
présents dans la salle s'efforçaient de le séparer de lui. Qu'ils
essaient. L'aubergiste allait payer pour ce qu'il avait tenté de
faire à Jaelle et il le regarderait mourir lentement
Tollman blêmit.
— Oui.
Il lutta pour recouvrer son contrôle et finit par lui faire face.
Il l'ignora.
Il secoua la tête.
Elle ne pensait pas qu’il n’ait jamais été aussi furieux contre
elle.
— T'a-t-on accostée?
— Accostée?
— Père.
— Tu parais épuisée.
— Et tu sembles triste.
— Hoode!
Un moment s'écoula avant que son majordome arrive en
hâte.
— Milord?
Elle était sur la piste de danse, dans les bras d'un autre
homme. Elle était si belle et les souvenirs étaient si vivaces que
son cœur se contracta.
Même s'il était soulagé, il mesura qu'il était trop tendu pour
se relaxer. Son sang était trop bouillant. Une nuit de séduction
n'avait pas suffi.
— Milord, bonsoir.
Elle pouvait se dire mille fois qu'ils étaient fautifs tous les
deux et qu'elle était la sotte de l'histoire, mais elle ne pouvait
échapper à ses souvenirs. Elle pouvait prétendre que son cœur
n'était pas brisé, mais c'était une feinte très fragile, vraiment.
— Allez-vous-en!
Margery s'avança.
— Je ne pense pas !
— Non, laisse-nous.
— Quoi?
— J'ai dit que j'étais désolé. Je suis venu ici pour m'excuser.
Je suis empli de regrets.
— Oui. En partie.
Elle frissonna.
— Alors, je vous ai mal jugé. Vous êtes cruel, et même
impitoyable.
Il ne répondit pas.
Il parla lentement :
— Que faites-vous ?
Il s'étrangla.
Il déclara fermement :
Elle fut envahie par une telle chaleur... Elle ne voulait pas et
n'avait pas besoin de ces souvenirs maintenant, pas avant de
comprendre exactement Emilian.
Elle sentit son regard fixé sur son dos. La soirée avait
changé de nature. Sa colère s'était évanouie, et cela laissait à nu
le courant qui semblait toujours passer entre eux. Il était là, à
présent, brûlant et tangible.
— Bien que je n'aie pas été invité à ce bal, j'ai été invité
maintes fois dans cette maison. J'escomptais un accueil
chaleureux.
— Je ne comprends pas.
Il s'inclina.
Elle s'enflamma.
— Emilian? demanda-t-elle.
Elle le regarda dans les yeux, des yeux qui étaient francs et
directs, ni hardis sous l'effet du désir, ni brûlants de colère.
C'était un moment rare. Il changea de position.
Il inspira.
— Je ne m'enfuirai pas.
Elle sourit
— Tu es fou, dit-elle.
Ariella hésita.
— Il n'était pas invité, dit une jolie blonde avec ardeur. Lady
Simmons me l'a dit elle-même. Elle est livide, absolument
livide, car il a refusé jusqu'ici toutes les invitations qu'elle lui a
envoyées. Et voilà qu'il apparaît sans être invité — et il n'a
même pas salué lord et lady Simmons !— C'est son côté sauvage,
Belle, déclara un homme. On peut habiller n'importe qui en
gentleman, mais les bonnes manières sont une autre histoire.
Une bonne éducation ne s'achète pas.
— Je vous sauve.
Elle sourit.
Et, pour la première fois, elle le vit sourire d'un air amusé.
— Bonne soirée.
Il sourit.
Elle se raidit.
Cliff se figea.
— Je serai prudente.
— Chéri.
— Aimeriez-vous danser?
Il s'inclina.
Il rit.
— Vous aussi.
Ariella se raidit.
Il s'inclina galamment.
— Bien sûr.
Il baissa les yeux sur elle. Il ne devait pas laisser son désir le
dominer. Elle n'était ni indifférente, ni nonchalante. Elle
déclarait vouloir qu'ils soient amis, et cela signifiait qu'elle
voulait une part de lui qu'il ne donnerait jamais. Elle ne pouvait
pas l'aimer, pas après la façon dont il l'avait séduite, mais
l'expression de ses yeux lui indiquait qu'elle tenait à lui plus
qu'elle ne le devrait. Elle méritait mieux qu'une liaison
charnelle, sans profondeur. Elle méritait un ami, si c'était ce
qu'elle cherchait en un amant. Il la blesserait, quoi qu'elle en
dise, car il ne pouvait lui donner qu'une nuit ou deux.
— Je le déteste.
— Lâche.
Il en resta incrédule.
Elle sourit
— Je sais que vous n'êtes pas sans cœur. Je sais que c'est
une façade. Je comprends maintenant, après cette soirée,
pourquoi vous aboyez si fort et menacez de mordre. Mais vous
ne mordez pas. Pas moi, en tout cas.
Elle le relâcha.
A la porte, il se retourna.
Elle rougit.
— Il m'a dit qu'il avait douze ans quand son père l'a fait
venir ici. Je sais qu'il a passé les premières années de son
existence avec sa mère tzigane. Je suis si curieuse de sa vie !
Hoode sourit.
— Voulez-vous entrer?
Hoode désigna d'un signe de tête la porte close. Elle avait
envie d'en savoir plus, mais elle désirait voir Emilian aussi. Bien
qu'elle l'ait vu quelques heures auparavant seulement, il lui
semblait que cela faisait des jours, et même des semaines.
— Je vais entrer.
Hoode gloussa.
Elle baissa de nouveau les yeux sur ses mains, serrées sur
ses genoux.
Il semblait s'étrangler.
Il se détourna.
Sa bouche s'incurva.
Il virevolta.
Ariella se figea.
Il rit.
— Oh, oui, bien sûr ! Vous avez décidé que je suis solitaire !
Il désigna le sofa.
Elle trembla.
Il inspira.
Elle se raidit.
Il s'empourpra.
Elle sourit.
— Hoode?
— Miss de Warenne?
Elle sut que c’était Emilian avant même de lever les yeux.
— Comment va-t-il ?
— Il se repose.
— Non.
Il la regarda sérieusement.
Hoode apparut.
— Oui.
— Cela a de l'importance.
Il se raidit.
— Que faites-vous?
Il inspira fortement.
— Bonsoir.
— Vous n'êtes pas celle que je veux blesser. Mais vous êtes
celle qui se trouve sur mon chemin.
— Le pensez-vous réellement?
Il abaissa ses cils épais. Elle crut voir du soulagement sur les
durs aplats de son visage. Il lui pressa les épaules de ses mains.
— Ariella.
Elle lui rendit follement son baiser, glissant les mains sous
sa chemise, les ongles raclant son torse. Il grogna, ses cuisses
dures écartant ses jambes. Il saisit ses jupes, les relevant
abruptement, et elle cria quand il pressa sa paume sur sa chair
moite et palpitante.
— Emilian.
Quand ce fut fini, elle flotta comme dans un rêve entre ses
bras. Emilian lui avait fait l'amour. Elle ouvrit les yeux, l'amour
emplissant sa poitrine. Il la contemplait avec attention. Elle
toucha sa joue et lui sourit. Ils étaient amants, maintenant.
— Oui.
Aussitôt, elle ramena ses jupes sur elle et replia ses jambes
dessous. Elle toucha son bras, soucieuse. Son ton était distant
Il lui décocha un regard sombre.
— Il est 5 h 30.
Elle se raidit.
— Attendez ! s'écria-t-elle.
Elle inspira.
— Me poussez-vous à partir?
— Reviendrez-vous?
Elle hésita.
Ariella inspira.
— Il y a eu un accident au campement tzigane, hier.
Ariella se raidit.
Elle s'arrêta.
Ariella se crispa.
Elle inspira.
Le haïssait-elle, finalement?
« Cher Emilian,
Il rit.
— Ariella!
Il inclina la tête.
— Emilian, répondit-elle.
Il la fixa.
Elle sourit
— Cette fois, c'est moi qui ne suis pas d'accord. Je fais partie
de ce monde, Emilian, de ce monde dans sa totalité, même avec
les ombres que nous n'apprécions pas—des ombres que la
plupart des gens préfèrent ignorer.
— Non ! Bien sûr que non ! Vous aviez raison. Une liaison
sans amitié ou sans amour est beaucoup trop crue pour ma
nature.
Elle se figea.
— Quoi?
Il secoua la tête.
— Je ne sais pas.
Partez-vous maintenant?
— Nous partirons peu après le lever du soleil, demain.
Il élargit les yeux. Elle prit son visage dans ses mains.
— J'ai besoin d'être avec vous une autre fois. Je ne veux pas
que vous partiez. Vous devez m'accorder des souvenirs que je
pourrai chérir !
Ariella? demanda-t-il.
— Djordi
— Il sera pendu.
Le chirurgien s'avança.
Ariella trembla.
Il se détourna.
— Je me chargerai de le punir.
Il jeta le gilet
— Milord, sir !
L'aubergiste rit.
— Il est l'un d'eux. Il l'a prouvé depuis qu'il est arrivé ici. Il
est à moitié tzigane, et au diable son titre !
Puis elle vit tout le monde écouter Emilian qui parlait dans
la langue rom. Les regards étaient fascinés, captivés. Tollman
parut satisfait, ainsi que Robert. Le désespoir d'Ariella fut
complet. Elle alla à lui.
— Ne faites pas ceci, le supplia-t-elle doucement
Commencez ! ordonna-t-il.
Le fouet claqua, laissant une marque rouge sur le dos
d'Emilian. Il se tenait appuyé à la charrette, figé, comme s'il
était de pierre. Il n'avait même pas sursauté.
— Il est chargé?
— Assez, le prévint-elle.
Juste ciel, elle était prête à le tuer pour ce qu'il avait fait.
— Ne tirez pas.
— Bien sûr.
Le Tzigane la regarda.
Le Tzigane déclara :
— Ariella?
Il l'étreignit brièvement.
— Le Dr Finney est dans le vestibule, ainsi que Marriott.
Ariella inspira.
Il l'enlaça.
Il l'étudia encore.
Elle se raidit.
— Merci, dit-elle.
14
— Sept jours.
Elle l'avait soigné pendant sept jours. Elle avait été prête à
tuer Tollman pour lui. Par réflexe, il saisit son poignet. Il était
peut-être faible, mais il avait envie de la tirer dans le lit avec lui.
Il avait envie de la caresser, de la tenir et de lui faire lentement
l'amour. Il avait envie de lui montrer sa gratitude.
— Souffrez-vous? demanda-t-elle.
Il secoua la tête.
Elle sourit.
— Je suis restée.
Il était amusé.
— Pourquoi Henry V?
— Bien sûr.
Elle se crispa.
— Et Stevan et la tribu ?
— Oui.
— Elle n'a quitté votre chevet que lorsque son père le lui
ordonnait, et jamais plus d'une heure ou deux.
— Certainement, milord.
Emilian rit.
— Evidemment.
— J'en ai conscience.
— Répondez à ma question.
Cliff sursauta.
— Ariella le sait-elle?
— Oui.
— Et votre domaine?
Il ne s'expliquerait à personne.
Emilian se raidit.
Il le pensait.
Les yeux de Cliff devinrent brûlants.
Il sortit.
Il prit le livre posé sur le lit et fut surpris par le titre. C'était
le dernier programme politique du radical Francis Place.
— Je le vois.
Elle trembla.
— Oui.
Il ne bougea pas.
Sa rougeur s'accrut.
— Vraiment?
Elle sursauta.
— J’ai un faible pour le roi Cnut et Gengis Khan
— Absolument.
— Et à présent?
— Oui.
— Je rentre à Woodland.
Elle pâlit.
— Déjà ?
Il ajouta :
— Promettez-le.
Elle sourit.
— Je le promets.
15
— Je l'ignorais.
Oswald s'empourpra.
— Je peux essayer.
Cliff la toucha.
— Ariella, il m'a dit, en termes très clairs, qu'il s'en va. Il est
très déterminé. Il ne cédera pas d'un pouce. Il n'a pas
d'intentions sérieuses à ton égard. Même s'il tient à toi, le
meurtre de sa mère a changé le cours de sa vie.
Cliff la dévisagea.
— Emilian?
Stevan sourit.
Il hésita.
— Vraiment ?
— Quoi?
Ils avaient voulu tous les deux qu'il soit le seigneur et maître
de Woodland. Mais tandis qu'il devait presque tout à Edmund,
il devait encore plus à Raiza.
— Vraiment?
— Robert se crispa.
Robert s'empourpra.
Robert pâlit
— Emilian?
Sa rougeur s'accrut.
Il la dévisagea.
Elle inspira.
Jaelle se leva. Juste avant, elle tenait un bébé sur ses genoux
et le tendit à une autre femme.
— Personne n'est blessé. Mais cinq familles ont tout perdu,
Ariella, absolument tout. ?
— Je crois que j'ai vu Tollman, qui courait dans les bois avec
un autre homme.
Elle ajouta :
Elle hésita.
Jaelle la dévisagea.
— Je sais.
— Emilian.
— Emilian!
Il s'arrêta et se tourna.
— Oui.
— Non, personne.
C'était comme s'ils étaient revenus à l'époque de leur
première rencontre. Il se comportait comme un étranger. Elle
toucha sa manche.
Il trembla.
Ariella inspira.
Elle se crispa.
— Quoi?
Le choc la terrassa.
— C'est fini parce que vous êtes une princesse gadjé et que
je suis Rom, rugit-il.
Elle recula.
Il la lâcha.
Elle essuya ses larmes.
— Emilian!
Il ne reviendrait pas.
Ce serait impossible.
Je me libère.
Tout d'abord, elle avait cru qu'il voulait se libérer d'elle. Puis
elle avait vite compris qu'il souhaitait se libérer du tourment de
vivre dans un monde où il était insulté chaque jour dans son dos
et où il était impuissant à protéger les Tziganes de la haine, la
mesquinerie et la violence.
— Bien.
— La seule chose dont je suis sûre est qu'il n'y aura jamais
quelqu'un d'autre. Cela n'a pas d'importance, mentit-elle. Avant
de rencontrer Emilian, je ne m'intéressais pas aux hommes.
Maintenant, je retourne à mon ancienne vie, où je reprendrai
mes poursuites intellectuelles. Je n'oublierai pas Emilian, mais
j'espère qu'avec le temps mes souvenirs deviendront moins
douloureux.
Ariella céda.
— Elle chuchota :
— J'ai vécu dix-huit ans avec les gadjos. Il n'est pas simple
pour un homme de quitter une vie et d'en commencer une autre
du jour au lendemain.
— Et alors ? Moi aussi. Mais mon père n'a pas voulu de moi
— il ne me connaît même pas — et je suis Tzigane. Ton père a
voulu de toi. Tu as de la chance, Emilian, et tu es un gadjo à
cause de ça. Pourquoi es-tu ici ?
— Vas-tu la prendre ?
— Entre.
— Non.
Margery pâlit.
— J'ai voulu être séduite. Il n'a pas profité de moi. Et j'ai les
moyens de donner une très bonne vie à cet enfant.
—Il va falloir que je m'en aille et que j'aie cet enfant seule.
Ariella la regarda.
Margery pâlit.
— Tu devras bien revenir chez toi, finalement, et ton secret
sera divulgué, fit-elle remarquer. Ils le pourchasseront, alors, tu
le sais, même si c'est dans un an d'ici — même si c'est dans des
années. Dès qu'ils comprendront que tu as eu son enfant, il sera
condamné.
Ariella se raidit.
Sa cousine l'enlaça.
Elle s'arrêta, n'allant pas plus loin dans la salle. Et elle se vit
valsant dans les bras d'Emilian. Elle ne voulait pas être ramenée
à cette soirée de mai. Elle avait été immergée dans ses plans et
elle n'avait guère eu de temps pour déplorer ce qu'elle avait eu
et perdu. Elle était devenue habile à détourner instantanément
ses pensées. Dès qu'il lui manquait, dès qu'elle avait mal, elle
songeait à la vie minuscule qui grandissait en elle et s'imaginait
tenant son nouveau-né pour la toute première fois.
Il rit froidement.
— Aucun domaine ne peut se passer de son maître pendant
longtemps, et Woodland n'est pas une exception.
Il s'inclina.
— Non.
Cliff apparut à côté d'elle, lui souriant, mais ses yeux étaient
emplis de spéculation. Elle ne parvint pas à sourire.
Emilian.
— Jamais, s'écria-t-elle.
Ses larmes coulèrent. Il lui disait qu'il lui avait été fidèle.
Elle se haussa sur la pointe des pieds, cherchant sa bouche.
— Vous ai-je déjà dit que vos yeux sont mon obsession?
Elle sursauta.
— Otez-vous d'elle !
Cliff le frappa.
Emilian s'affala.
Ariella sentit les larmes lui monter aux yeux. Ce n'était pas
ainsi qu'elle voulait qu'ils procèdent ! Il était revenu parce
qu'elle lui manquait. Avec le temps, il aurait peut-être même pu
se présenter comme prétendant à sa main. S'ils n'avaient pas été
découverts, elle aurait pu lui parler du bébé. Mais à présent
Emilian était prêt à exploser, et cela aggraverait encore les
choses. Elle ne voulait pas qu'on le force à se marier avec elle !
— Père, non.
Cliff tournoya.
Emilian s'avança.
— J'ai profité de votre fille. Elle n'est pas une catin.
Cliff explosa.
— Vas-tu bien?
— Non.
Le comte dit :
Il sortit.
— Je tiens à vous.
Elle se redressa.
Il inspira.
Il inspira.
— Non.
Il respira fortement.
— Je sais, murmura-t-elle.
Il la dévisagea furieusement.
Il explosa.
— Pourquoi ? Laisse-moi deviner ! Il sera hors de lui que tu
aies eu le toupet de le poursuivre !
— Non.
— Je ne pense pas.
Elle sourit.
Il s'empourpra.
Il se colora.
Elle posa la main sur son bras nu. Il frémit quand elle
caressa son biceps. Son regard argenté devint brûlant et elle
s'avisa qu'elle avait plus de pouvoir sur lui qu'elle le pensait.
— Bien, fit-elle.
Elle sourit d'un air incertain à son reflet. Elle n'avait pas
beaucoup d'expérience, mais dans ses bras elle devenait une
femme très différente, une femme complètement éhontée, sans
la moindre inhibition. Elle devait se le rappeler maintenant et
s'en servir pour aviver sa confiance en elle. Elle allait le séduire ;
elle allait lui faire l'amour. Il pensait qu'il s'agissait d'un jeu et
d'un défi, mais ce n'était ni l'un, ni l'autre.
Jaelle rit.
Il la lâcha et recula.
— Emilian, oui !
Surpris, il la regarda.
Il parvint à sourire.
— Rien.
Il hésita.
Elle s'assit.
— Je ne partirai pas.
— Je suis sérieux.
Il sourit presque.
— Bien.
Il l'enlaça.
— Quand elle était avec mon père, elle lui a dit que son père
était mort à Tripoli, et qu'elle n'avait personne d'autre. Alors,
non, je n'ai jamais eu envie d'essayer de retrouver ce côté de
mes ancêtres.
Il s'empourpra.
Il connaissait la réponse.
Il déclara finalement :
— Oui, je le veux.
Le pasteur, un homme jeune dont l'épouse bien en chair
ouvrait des yeux excités au premier rang, se tourna vers Ariella.
Elle était sur le point de le laisser partir, quand elle vit deux
hommes qui venaient rapidement dans sa direction, arrivant
visiblement de la ferme voisine. Ils étaient furieux et elle fut
aussitôt alarmée.
— Laissez-moi partir!
— Fermez-la.
L'homme rit.
Elle ferma les yeux pour lutter contre sa peur. Puis elle dit :
Elle releva ses jupes et gravit la pente, allant aussi vite que
possible, saisie de terreur. Elle entendit l'homme qui jurait
perçut le bruit de ses pas, son souffle lourd. Il était si près
derrière elle. Elle força ses jambes à courir plus vite encore,
aspirant de l'air, étourdie par la peur. Il fallait qu'elle lui
échappe. Elle trébucha en arrivant en haut, mais elle ne s'arrêta
pas. Les poumons sur le point d'éclater, elle courut vers le
bosquet. Des branches lui griffèrent les mains, les bras, les
joues, et il attrapa sa jupe par-derrière.
— Je te tiens, gronda-t-il.
— Ariella!
En haletant, elle leva les yeux vers lui, les joues aussi
blanches qu'un linge, son regard brillant de souffrance.
— Ariella?
Croyez-vous au destin ?
Elle avait été accostée dans les bois — à cause de lui. Elle
avait perdu leur enfant — à cause de lui. Elle souffrait et avait
du chagrin — à cause de lui.
— Ariella?
— Je suis désolé.
Emilian attira son poing sur son torse, mais cela ne lui suffit
pas. Il prit son corps raide et résistant dans ses bras. Elle pleura
contre lui et il la tint, impuissant. Et finalement ses larmes se
mêlèrent aux siennes.
Ariella fixa le plafond vert foncé de la tente. Le bébé n'était
plus là.
Elle serra ses bras autour d'elle. Les Roms vivaient dans un
monde de mesquinerie et de haine, un monde empli d'injustice.
Même si elle savait, rationnellement, qu'elle aurait pu faire une
fausse couche à Rose Hill ou à Woodland, des gadjos ignorants
et haineux lui avaient fait cela. Ils l'avaient accusée de voler un
cheval et attaquée d'une façon cruelle et brutale. A cause des
deux fermiers, elle avait perdu son bébé. Et c'était ainsi que les
Roms vivaient. Comment pouvait-on le supporter?
Elle remarqua qu'il avait l'air fatigué, comme s'il n'avait pas
dormi. Il paraissait plus âgé — il y avait des lignes sur son front
et ses traits étaient tirés.
— Je sais.
Elle n'eut pas la force de discuter. Elle leva les yeux vers lui
et vit qu'il la contemplait avec intensité. Il était visiblement
bouleversé. Avait-il aimé leur enfant, lui aussi?
— Emilian ? Chuchota-t-elle. J'aurais dû vous le dire...
J'allais le faire. J'attendais le bon moment.
— Ariella.
— Je suis désolé.
— Je sais.
Il était trop tard pour avoir des regrets, mais il savait qu'il
n'aurait jamais dû l'épouser. Il n'aurait jamais dû retourner à
Rose Hill pour la voir. Il aurait dû la renvoyer dès qu'elle l'avait
rejoint à York.
— Emilian?
Elle lui fit face en s'essuyant les yeux.
— Pourquoi?
Un parfait mensonge.
Il le fit, en tremblant.
— De quoi parlez-vous ?
Il la lâcha.
Elle tressaillit.
— Je souffre, Emilian.
Il retrouva sa voix.
Elle eut une hésitation. Elle avait un devoir sacré envers son
enfant, mais voilà qu'elle se remémorait un après-midi agréable
et qu'elle aspirait à retourner en ville. Elle regarda le ciel. Le
soleil se trouvait derrière les épais nuages gris, comme s'il était
déterminé à sortir.
Enfant bien-aimé
27 juillet 1838
Je vous aime.
— Je l'ignore.
— Où est père?
— Je vois.
Je vous aime.
— Il m'écrit?
— Tu es la maîtresse de Woodland.
Cliff hésita.
— Oui?
Ariella se redressa.
— Votre nom?
— Barnes.
Le valet pâlit.
— Dans la bibliothèque, milady.
Ariella savait qu'elle était rouge, mais elle garda les yeux
rivés sur le visage de Robert.
Il se moqua d'elle.
Elle le suivit.
Elle jeta un coup d'œil autour d'elle et vit des accrocs sur le
canapé de brocart. Il y avait partout de la nourriture et des
boissons ; un plateau de restes gisait même sur le sol. La maison
tout entière avait été profanée, pensa-t-elle.
Ariella se crispa.
Son cœur lui faisait mal, à présent. N'avait-il pas passé les
six derniers mois à vivre comme un Rom ? Et n'avait-il pas
passé les dix-huit années précédentes à vivre comme un Anglais
?
Les gadjos avaient tué Raiza — et ils avaient tué son enfant
et celui d'Ariella.
Et Stevan avait dit que Raiza avait été fière de lui, aussi.
Woodland l'attendait
Il rayonnait.
— Bonjour, Hoode, dit Emilian en lui donnant son chapeau
haut de forme. Oui, je suis revenu, et je suis très satisfait de ce
que je vois.
— Ariella?
— Où serais-je donc?
— Non.
— Je me demande pourquoi ?
Elle rit.
— Alors, montrez-le-moi.