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UNIVERSITÉ DE CARTHAGE 1ére ANNÉE

École Polytechnique de Tunisie 2020 - 2021

PHYSIQUE QUANTIQUE ET STATISTIQUE


Chap. n◦ 3
adel.trabelsi@cern.ch

Chapitre 3

Oscillateur harmonique quantique

1 Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1
2 Oscillateur harmonique à une dimension . . . . . . . . . . . . . . . 2
3 Méthode analytique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3
4 Méthode des opérateurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7
5 Spectre et Base Propre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8

1 Introduction
L’oscillateur harmonique simple est un problème physique extrêmement important. C’est l’un
des rares potentiels pour lesquels nous pouvons résoudre exactement l’équation de Schrodinger.
Bien que le potentiel ne soit pas physique parce qu’il ne tend pas vers zéro à l’infini, il constitue
souvent une très bonne approximation pour un large éventail de systèmes physiques. Beaucoup
de potentiels sont assimilables à un oscillateur harmonique au voisinage de leur minimum.
Nous allons résoudre le problème unidimensionnel à l’aide de méthodes analytiques standard. En-
suite, nous aborderons le problème sous un angle différent en introduisant la notion d’opérateurs
d’échelle. Le spectre énergétique et les états propres d’énergie seront obtenus par les deux
méthodes.

1
2 Oscillateur harmonique à une dimension
Considérons une particule de masse m se déplaçant dans une dimension sous l’effet d’un potentiel
de rappel (comme un ressort) de la forme :
1
V (x) = kx2 (3.1)
2
où k > 0 est la “constante de raideur”. L’équation classique du mouvement pour cet oscillateur
unidimensionnel simple est la suivante
d2
m = −kx (3.2)
dt2
Il est d’usage de remplacer la constante de raideur k par la fréquence angulaire classique de
l’oscillation :
r
k
ω= (3.3)
m

Les solutions pour les variables de position et de momentum sont les suivantes
x = x0 sin(ωt + δ) (3.4a)
p = mωx0 cos(ωt + δ) (3.4b)

L’énergie totale est une constante du mouvement et s’exprime comme :


p2 1
E= + mω 2 x2 (3.5)
2m 2
qui est aussi l’expression du Hamiltonien classique. En supposant que l’opérateur Hamiltonien
de mécanique quantique a la même forme que l’opérateur Hamiltonien classique, le Hamiltonien
d’un oscillateur harmonique 1-D est :
p2 1
H= + mω 2 x2 (3.6)
2m 2
Puisque le potentiel croı̂t sans limite en s’éloignant de x = 0 :
V (x) −−−−→ ∞ (3.7)
x→±∞

il s’ensuit que quelle que soit la quantité d’énergie cinétique de la particule, pour une valeur
suffisamment grande x, l’énergie potentielle domine. Par conséquent, les fonctions d’onde doivent
s’annuler à l’infini pour n’importe quelle valeur de l’énergie. Par conséquent, tous les états
stationnaires sont liés, le spectre énergétique est discret et non dégénéré.
Nous avons vu que lorsqu’une particule pénètre dans une barrière de hauteur constante V
(supérieure à l’énergie de la particule) la fonction d’onde décroı̂t exponentiellement dans la
barrière, comme e−qx , où
r
2m(V − E)
q= . (3.8)
~2

2
Mais, contrairement à cette barrière de hauteur constante V , la “hauteur” du potentiel de
l’oscillateur harmonique simple V (x) continue d’augmenter au fur et à mesure que la particule
atteint des x plus grands. Dans ce comportement asymptotique à grand x, on peut négliger E
par rapport à V (x) dans l’expression (3.8) et on pourrait s’attendre à ce que
p
q ∝ V (x) ∝ x (3.9)

Évidemment, dans cette situation, la décroissance de la fonction d’onde sera plus rapide que
l’exponentielle. Une estimation naı̈ve de la fonction d’onde pourrait être
2
ψ(x) = h(x)e−αx (3.10)

où h(x) est une fonction, qui croı̂t plus lentement qu’une exponentielle.
De plus, puisque le potentiel a une symétrie paire, les fonctions d’onde seront donc paires ou
impaires. Ainsi h(x) devrait être pair ou impair.

3 Méthode analytique
Nous recherchons les états et les valeurs propres de ce Hamiltonien, c’est-à-dire que nous vou-
lons résoudre l’équation Schrödinger pour ce système. L’équation Schrödinger” indépendante du
temps pour une particule de masse m et d’énergie E se déplaçant dans un potentiel harmonique
simple devient
~2 d2 ψ(x) 1
− + mω 2 x2 ψ(x) = Eψ(x) (3.11)
2m dx2 2
ou encore
d2 ψ(x)
2
= (ξ 2 x2 − κ)ψ(x) (3.12)
dx
avec
2mE mω
κ= , ξ= (3.13)
~2 ~

Pour trouver sa solution, souvenons-nous de (3.10) et faisons usage de :


2
ψ(x) = Cte e−αx (3.14)

En substituant ceci dans l’équation asymptotique, nous obtenons

4α2 x2 − 2α = ξ 2 x2 − κ (3.15)

Cela implique que

ξ = ±2α (3.16a)
κ = 2α (3.16b)

3
La forme globale de la solution serait la suivante
1 2 1 2
ψ(x) = A e− 2 ξx + B e 2 ξx (3.17)

Pour que ψ(x) reste fini à la limite des grands x nous devrions avoir B = 0. Donc
1 2
ψ(x) = Ae− 2 ξx (3.18)

Ainsi, la forme conjecturée de la fonction d’onde est en fait la solution exacte pour l’état d’énergie
le plus basse puisqu’il n’y a pas de nœuds. D’autre part, l’équation (3.16b) indique que la valeur
de l’énergie propre correspondante est :

κ=ξ ⇒ E = 12 ~ω (3.19)

Il convient de noter que même dans cet état fondamental, l’énergie est non nulle, tout comme
elle l’était pour le puits carré infini.
Pour obtenir les solutions des états excités de l’équation de Schrodinger de l’oscillateur har-
monique, nous allons prendre une forme polynomiale au lieu de A puis essayer de dériver une
relation de récursion entre les coefficients du polynôme, et montrer que la série de puissance doit
être terminée si les solutions sont normalisables, dériver les valeurs propres d’énergie, puis enfin
dériver les fonctions qui sont les solutions.
Nous partirons de l’hypothèse que la solution complète, valable partout, peut s’écrire ainsi :
1 2
ψ(x) = h(x)e− 2 ξx (3.20)

Il est clair que h(x) doit diverger plus lentement que le taux avec lequel la gaussienne converge
pour les grands x. Nous avons
1 2
ψ 0 (x) = [h0 (x) − ξxh(x)]e− 2 ξx (3.21a)
− 12 ξx2
ψ 00 (x) = [h00 (x) − 2ξxh0 (x) + (ξ 2 x2 − ξ)h(x)]e (3.21b)

En replaçant ceci dans l’équation de Schrodinger, on obtient une équation différentielle pour
h(x) :

h00 (x) − 2ξxh0 (x) + (κ − ξ)h(x) = 0 (3.22)

Essayons maintenant de résoudre ce problème à l’aide d’une série de puissances en x :



X
h(x) = aj x j (3.23a)
j=0

X
h0 (x) = jaj xj−1 (3.23b)
j=0

X ∞
X
h00 (x) = j(j − 1)aj xj−2 = (j + 1)(j + 2)aj+2 xj (3.23c)
j=2 j=0

4
En substituant ceci dans l’équation différentielle nous obtenons

X
[(j + 1)(j + 2)aj+2 − (2jξ + ξ − κ)aj ]xj = 0 (3.24)
j=0

Exiger que le coefficient de chaque puissance s’annule, conduit à une formule de récurrence

(2j + 1)ξ − κ
aj+2 = aj (3.25)
(j + 1)(j + 2)

Manifestement, la série des puissances impaires et celle des puissances paires sont des solutions
indépendantes impaires et paires à l’équation de Schrödinger. A moins que cela ne s’arrête après
un nombre fini de termes, la solution entière divergera pour x = ±∞. En effet pour les grands j
la relation de récurrence se simplifie à
2ξ 2
aj+2 = aj ⇒ h(x) ∼ eξx (3.26)
j

ce qui conduirait à une divergence exponentielle de la fonction d’onde pour les grands x. La série
infinie de puissance doit être arrêtée : nous devrions avoir à un certain ordre n de la série de
puissances

(2n + 1)ξ − κ = 0 (3.27)

où n est un entier non négatif, de sorte que tous les coefficients supérieurs disparaissent aj>n = 0.
Une fois κ est contrainte comme ci-dessus, nous avons

 −2ξ(n − j + 2) aj−2 0 ≤ j ≤ n

aj = j(j − 1) (3.28)

 0 n<j

Comme les séries commencent par a0 ou a1 , les séries finies h(x) seront respectivement des
polynômes pairs ou impairs. Ce sont en fait des polynômes d’Hermite. Les fonctions propres
correctement normalisées sont les suivantes
  14
ξ 1 1 2
ψn (x) = √ Hn (x)e− 2 ξx (3.29)
π n
2 n!

Puisque κ dépend de l’énergie, on obtient les énergies propres correspondantes


 
1
E = ~ω n + n = 0, 1, 2, 3, . . . (3.30)
2

Il existe donc une infinité dénombrable de solutions à intervalle d’énergie constant. Nous avons
été forcés d’avoir des énergies quantifiées par l’exigence que les fonctions des ondes soient nor-
malisables.

5
Notez que n est égal au nombre de zéros de la fonction d’onde. C’est une caractéristique com-
mune. Avec plus de zéros, une fonction d’onde a plus de courbure et donc plus d’énergie cinétique.
La fonction de l’onde d’état fondamental est la suivante
 mω  41 2
ψ0 (x) = e−mωx /2~ (3.31)
π~

Il s’agit d’une distribution gaussienne (incertitude minimale). Puisque le potentiel de l’oscillateur


harmonique a une symétrie paire, les solutions sont paires ou impaires. L’état fondamental est
paire. Le premier état excité est un état impaire, avec un polynôme de premier ordre multipliant
le même gaussien.
 mω  41 r 2mω 2
ψ1 (x) = xe−mωx /2~ (3.32)
π~ ~

Le deuxième état excité est paire, avec un polynôme du second ordre multipliant le même
gaussien.

mωx2 −mωx2 /2~


 
ψ2 (x) = C 1 − 2 e (3.33)
~

Nous remarquons deux différences intéressantes entre ce spectre et notre expérience classique.
Tout d’abord, les niveaux d’énergie sont quantifiés. Deuxièmement, l’énergie de l’état de base
est E0 = 12 ~ω > 0. Le zéro n’est pas une énergie permise. Cette valeur d’énergie la plus faible
est appelée “mouvement du point zéro”. Nous ne pouvons pas donner à la particule une énergie
nulle et rester cohérents avec le principe d’incertitude, car cela nécessiterait p = 0 et x = 0,
simultanément.

6
4 Méthode des opérateurs
Contrairement à la méthode directe décrite ci-dessus pour résoudre le problème de l’oscillateur
harmonique, il existe une autre méthode élégante pour déterminer les valeurs propres et les
fonctions propres en utilisant la méthode opérateur due à Dirac. Le Hamiltonien d’un oscillateur
harmonique 1-D s’écrit :

p2 1
H= + mω 2 x2 (3.34)
2m 2

Ensuite, nous définissons les opérateurs dits opérateurs d’échelle :


r
mω p
a= x + i√ (3.35a)
2~ 2m~ω
r
mω p
a+ = x − i√ (3.35b)
2~ 2m~ω

a s’appelle l’l’opérateur de décrémentation, et a+ l’opérateur d’incrémentation appelés aussi


opérateur de création et opérateur d’annihilation. Notez que a+ est l’adjoint hermitien de a.
Compte tenu des opérateurs d’échelle, la relation de commutation suivante peut être facilement
démontrée :
−i
[a, a+ ] =

[x, p] − [p, x] = 1 (3.36)
2~

Nous pouvons inverser ces équations pour obtenir les opérateurs x et p en termes de a et a+ :
r
~
x= (a + a+ ) (3.37)
2mω
r
m~ω
p = −i (a − a+ ) (3.38)
2

En remplaçant dans (3.34), le Hamiltonien peut être écrit sous la forme :


 
+ 1
H = ~ω a a + (3.39)
2

Posons maintenant

N = a+ a (3.40)

le Hamiltonien devient finalement :


 
1
H = ~ω N + (3.41)
2

Le problème de l’énergie propre équivaut maintenant à trouver les vecteurs propres et les valeurs
propres de N .

7
5 Spectre et Base Propre
Puisque N est Hermitien,

N + = (a+ a)+ = (a+ )(a+ )+ = a+ a = N, (3.42)

ses valeurs propres sont réelles. Désignons par |ni un vecteur propre normalisé de N , avec la
valeur propre n :

N |ni = n|ni. (3.43)

Alors, |ni est aussi un état propre de H avec la valeur propre ~ω(n + 21 ) :

H|ni = ~ω(n + 12 )|ni. (3.44)

De plus, la valeur propre n ≥ 0, puisque

n = hn|N |ni = hn|a+ a|ni = ka|nik2 ≥ 0. (3.45)

Nous calculons les commutateurs

[N , a ] = [a+ a, a] = [a+ , a]a = −a (3.46a)


[N, a+ ] = [a+ a, a+ ] = a+ [a, a+ ] = a+ (3.46b)

Si on applique le commutateur [N, a] à la fonction propre |ni, on obtient

[N, a]|ni = −a|ni (3.47)

qui se réarrange à l’équation aux valeurs propres

N a|ni = (aN − a)|ni = a(N − 1)|ni = (n − 1)a|ni. (3.48)

Cela signifie que a|ni est aussi un vecteur propre de N , à condition qu’il soit différent de zéro.
Puisque la valeur propre correspondante est n − 1, nous concluons que :

a|ni = C|n − 1i (3.49)

où C est une constante. Par conséquent a est appelé l’opérateur diminuant.
Puisqu’on a supposé que |ni est normalisé, alors

ka|nik2 = hn|a+ a|ni = hn|N |ni = nhn|ni = n. (3.50)

Ainsi nous pouvons normaliser le nouveau vevecteur propre |n − 1i avec le choix



a|ni = n|n − 1i (3.51)

8
Nous pouvons continuer ce processus à des puissances supérieures de a :
√ p
a2 |ni = a n|n − 1i = n(n − 1)|n − 2i. (3.52)

Si n est une valeur propre de N , alors n −1, n− 2, n− 3, . . . le sont aussi. Mais nous avons montré
que toutes les valeurs propres de N sont ≥ 0, donc cette séquence ne peut pas diminuer pour
toujours. Le processus d’abaissement doit s’arrêter à une certaine valeur. Pour qu’il se termine,
nous devons avoir n entier, de sorte que nous atteignons la valeur 0 au final :

a|ni = n|n − 1i, (3.53a)
..
.

a|1i = 1|0i, (3.53b)
a|0i = 0. (3.53c)

L’opérateur a annihile l’état non nul |0i. Comme la valeur propre correspondante est égale à
zéro, il doit s’agir de l’état propre le plus bas.
Pour étudier les valeurs propres plus élevées, nous considérons de la même manière :
[N, a+ ]|ni = a+ |ni (3.54)

qui se réarrange en une équation aux valeurs propres


N a+ |ni = (n + 1)a+ |ni. (3.55)

Ainsi a+ |ni est aussi un ket propre de N avec valeur propre n + 1 :



a+ |ni = n + 1|n + 1i. (3.56)

En opérant a+ encore et encore, nous gravirons une échelle infinie d’états propres. Le spectre
de N est donc l’ensemble de tous les entiers non négatifs {0, 1, 2, 3, . . . , n, . . .}. N est appelé
l’opérateur nombre de quanta : il mesure le nombre de quanta d’énergie de l’oscillateur.
Par conséquent, le spectre de H est constitué de niveaux d’énergie également espacés.
 
1
En = ω n + , n = 0, 1, 2, . . . . (3.57)
2

On peut donner une signification “physique” aux opérateurs a et a+ : L’énergie de l’oscilla-


¯ en commençant à l’état fondamental par l’énergie 1 ~ω.
teur est quantifiée, en unités de ~ω, 2
+
L’opérateur a crée un quantum d’énergie lorsqu’il opère sur un état – nous l’appelons un
opérateur création. De même, l’opérateur a détruit un quantum d’énergie – nous l’appelons
opérateur annihilation. Cette idée prend d’autant plus d’importance que l’on aborde le sujet de
la “seconde quantification” et de la théorie quantique des champs.

X Bon travail
A. Trabelsi

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