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Introduction
La pathologie de la cavité buccale, plus précisément celle de la muqueuse
buccale, est un domaine extrêmement vaste et complexe qui se partage
entre la Stomatologie et la Dermatologie. Elle constitue donc une
pathologie frontière type puisque l’on retrouve aussi bien des atteintes
muqueuses d’affections cutanées pouvant toucher par ailleurs d’autres
régions muqueuses, comme les zones génitales ou, plus spécifiques au
revêtement épithélial des muqueuses buccales, comme la langue.
Cette cavité orale est fréquemment le siège d’érosions et d’ulcérations
muqueuses.L'Aphtose buccale est l’une des ulcérations les plus
connuesde la muqueuse buccale, elle touche à peu près 25% de la
population générale.
La notion d’aphte est très répondue mais assez floue dans l’esprit du
public, et même dans celui des milieux médicaux non spécialisés.
Même si plusieurs formes cliniques existent, le diagnostic d’un aphte
buccal est relativement aisé mais toute ulcération muqueuse n’est pas
forcément un aphte, les diagnostics différentiels étant nombreux.
En effet, les ulcérations buccales posent surtout un problème étiologique
pouvant révéler des maladies locales ou générales très diverses et parfois
graves.
Le médecin dentiste doit faire le plus souvent le diagnostic d’aphtes et en
assurer le traitement symptomatique. Cela dit, devant une ulcération
buccale, le diagnostic d’une aphtose est parfois hésitant ; le recours au
spécialiste se justifie alors, surtout si un traitement préventif ou
étiologique est envisagé.
II. Rappels
1. Histologie de la muqueuse buccale
La cavité buccale est recouverte d’une muqueuse dans sa totalité. Cette
muqueuse, de type malpighien, ressemble à la peau, mais en
diffère par l’absence d’annexes (bulbes pileux, glandes sudoripares,
glandes sébacées) et le petit nombre de mélanocytes. De plus, elle tire
son originalité d’une humidification permanente par la salive que
sécrètent les nombreuses glandes salivaires accessoires qui lui sont
annexées et du turnover très rapide des cellules de son épithélium (25
jours au lieu de 50 à 75 jours pour l’épiderme). Notons que quelques
glandes sébacées hétérotopiques sont parfois visibles dans la lèvre
supérieure et dans la muqueuse buccale, donnant des nodules jaunâtres
appelés taches de Fordyce.
Elle est constituée d’un épithélium de revêtement en surface séparée
d’un tissu conjonctif (encore appelé chorion), par une membrane basale.
2
La base de l’épithélium réalise des reliefs plus ou moins importants
réalisant des crêtes épithéliales entourant des papilles conjonctives.
Epithélium
Il forme une barrière entre cavité buccale et tissus profonds. De type
malpighien, il est constitué de plusieurs couches de cellules étroitement
attachées les unes aux autres, appelées kératinocytes.
Comme dans la peau, l’intégrité de cet épithélium est maintenue grâce au
renouvellement permanent des cellules par l’intermédiaire des divisions
mitotiques des assises profondes et de la migration vers la surface des
cellules ainsi formées qui remplacent régulièrement les cellules vieillies et
desquamées.
Ainsi, peut-on distinguer dans l’épithélium une double population de
cellules : les cellules germinales, capables de se diviser et de produire
constamment de nouvelles cellules ; les cellules en maturation qui se
différencient progressivement vers la surface.
3
Cet épithélium varie selon que se produit en surface une kératinisation
ou non.
- Dans les zones kératinisées se superposent les couches suivantes :
– le stratum germinatum(couche basale ou germinative) repose sur la
membrane basale. Les cellules, cubiques ou cylindriques, ont un gros
noyau très chromophile. Elles sont disposées en une ou deux assises.
Elles sont le siège de nombreuses mitoses.
– le stratum spinosum(ou couche squameuse) est composé de cellules
polygonales ou arrondies accrochées les unes aux autres par des ponts
linéaires correspondant aux desmosomes.
– le stratum granulosum(ou couche granuleuse) est formé de cellules
aplaties renfermant dans leur cytoplasme de fines granulations de
kératohyaline, colorées en violet par l’hématoxyline.
– le stratum corneum(ou couche kératinisée)est constitué de fines
squames acidophiles de kératine.Au sein de cette couche persistent
souvent quelques noyaux résiduels pycnotiques, ou des espaces clairs
représentant l’emplacement de noyaux dégénérés. Cet aspect caractérise
la parakératose.
- Dans les zones non kératinisées, la couche granuleuse est absente.
Outre ces cellules épithéliales, on trouve également des cellules
dendritiques particulières (cellules de Langerhans et mélanocytes) ainsi
que quelques cellules de Merkel.
Membrane basale
Cette zone, où les papilles conjonctives alternent avec les crêtes
épithéliales, est une zone fondamentale dans les échanges épithélio-
conjonctifs. Seule la microscopie électronique a révélé les détails
complexes de cette lame basale (basal lamina) hautement organisée. On y
distingue :
–La lamina densa
–La lamina lucida
–Les fibrilles d’ancrage
Tous les échanges entre conjonctif et épithélium se font par
l’intermédiaire de cette membrane basale. Celle-ci sert d’attache aux
kératinocytes et contrôle leur différenciation et leur renouvellement. Elle
intervient également comme un filtre sélectif. Elle peut se modifier dans
diverses circonstances pathologiques (diabète, pemphigoïde bulleuse). Sa
rupture est un facteur important dans l’invasion des cancers.
Chorion
C’est le tissu conjonctif qui sert de support à l’épithélium. On le divise en
deux zones :
– Superficielle (papilles associées aux crêtes épithéliales) ;
4
– Profonde, avec arrangement des fibres collagènes en réseau.
- La muqueuse masticatrice
Retrouvée sur les gencives et le palais dur, elle participe à la
compression mécanique des aliments. Au niveau du palais,
l’épithélium kératinisé présente des crêtes s’insérant profondément
dans le tissu conjonctif. L’ensemble est ancré au périoste palatin par
5
un réseau de fibres collagènes lamellaires. L’épithélium gingival est
également kératinisé, mais ses crêtes sont grêles et acuminées dans le
chorion au sein duquel on retrouve de nombreux histiocytes,
lymphocytes et plasmocytes.
- La muqueuse bordante
Elle recouvre la majeure partie de la cavité buccale (lèvre, joue, palais
mou, face ventrale de langue, plancher). Elle est non kératinisée et ses
crêtes épithéliales sont de faible amplitude.
Le chorion, abondamment vascularisé, repose sur une sous-muqueuse
lâche avec un plan musculaire sous-jacent.
- La muqueuse de la face dorsale de la langue
Il s’agit d’une muqueuse kératinisée dont la particularité est la
fonction gustative assurée par différents types de papilles :
• Papilles filiformes sont les plus nombreuses, de couleur blanchâtre
et recouverte d’un épithélium kératinisé desquamant régulièrement.
• Papilles fongiformes sont plus massives et peu nombreuses. Elles
sont situées en avant du V lingual, de couleur rouge vif et contiennent
les bourgeons du goût.
• Papilles caliciformes ou papilles gustatives circumvalléessont les
plus volumineuses. Au nombre habituel de 9, elles siègent au niveau
du V lingual qu’elles contribuent à former.
• Les papilles foliées(ou corolliformes) : elles sont situées sur le bord
latéral postérieur de la langue : on en compte 5 ou 6 par coté, enfouies
au niveau de dépressions verticales ; on y trouve des bourgeons du
goût pour les saveurs acides.
6
lésions secondaires qui résultent d’une transformation spontanée ou
provoquée de la lésion primaire.
a. Couleur
La diversité de couleur constitue un élément important du diagnostic des
maladies muqueuses. Ainsi, l’hémangiome superficielle est rouge vif et
devient grisâtre en évoluant, les tumeurs fibreuses bénignes sont plutôt
blanchâtres, et les aphtes présentent un fond de couleur jaune beurre frais.
b. Caractère squameux
7
La peau et les muqueuses desquament en permanence de façon
imperceptible. Elles peuvent être adhérentes comme dans les kératoses ou
détachables facilement comme dans le psoriasis. Elles peuvent être aussi
uniformément réparties comme dans l’eczéma, ou plus marquées en
périphérie des lésions. Cela est mis en évidence par le grattage de la lésion
(différenciation entre une kératose et une candidose buccale au niveau de la
muqueuse buccale). Les résidus de toit de bulle dans les pathologies
bulleuses superficielles sont une forme de caractère squameux.
c. Configurations
Les lésions peuvent être disposées selon une configuration particulière qui
peut être linéaire, en bouquet (herpès), en réseau ou en maille de filet,
en bande ou zoniforme, angulaire, serpigineuse ou annulaire.Cette
dernière peut être arrondie, arciforme, polycyclique, centrifuge, en cocarde
ou en cible.
d. Formes
Formes arrondies ou ovalaires
La majorité des lésions inflammatoires sont rondes ou ovales, comme les
aphtes. Elles peuvent êtres dans certains cas, surélevées, bien délimitées
nummulaires, dessinant ainsi une pièce de monnaie, comme dans certains
eczémas, être discoïdes tel le lupus érythémateux chronique.
Formes annulaires ou circinées
De nombreuses dermatoses peuvent prendre occasionnellement une forme
annulaire ou circinée avec des arcs de cercle : urticaire, psoriasis, syphilis
secondaire, lichen plan.
e. Bordure
Le contour de la lésion peut être discret, comme dans le psoriasis ou flou
comme dans de nombreuses formes d’eczéma. Il peut exister une bordure
active avec une tendance à la guérison centrale comme avec l’herpès circiné
(dermatophytie). La bordure peut être surélevée par un bourrelet, comme
dans le carcinome épileptoïde (forme ulcéreuse), ou être irrégulière comme
dans le mélanome malin.
8
Les lésions élémentaires primaires sont des lésions qui apparaissent en
premier lieu sur une muqueuse ou une peau saine.
9
Elevures circonscrites de la peau, à sommet blanc
jaunâtre, contenant un exsudat purulent d’emblée et
entourées d’un halo inflammatoire. Elles
correspondent à une nécrose, à une cavitation, à un
afflux massif de polynucléaires. Après maturation,
elles laissent sourdre du pus. Elles ont un diamètre
Pustule inférieur à 0,5 mm.
Il convient de les distinguer des vésicules se
troublant secondairement comme dans les éruptions
virales.
10
photosensibilisantes) ou d'une cause locale (UV,
parfums).
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Lésions Définitions Figures
Les érosions sont des pertes de substance
superficielles à fond plat, bien limitées, pouvant
cicatriser sans laisser de marque. En effet, les
érosions sont caractérisées par une
Erosion disparition partielle ou totale de l’épithélium.
Elles résultent d’un traumatise mineur, ou font
suite à la rupture ou la perte du toit d’une vésicule
ou d’une bulle ou à une intense inflammation du
derme papillaire
- Grisâtresuite à la coagulation de
polymorphonucléaires neutrophiles et pus.
- Hématiquesuite à une coagulation à partir d’une
plaie
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Les fissures prennent l’aspect de fentes linéaires,
Fissure profondes, douloureuses.
13
Les végétations sont constituées d’excroissances
papillaires réunies en une élevure circonscrite ou
étalée en nappe saillante ou extensive. La surface
Végétation de la lésion est formée d’un épiderme aminci, rosé
ou couvert d’érosions suintantes ou d’ulcérations.
Elles évoquent certaines toxicodermies, certaines
pyodermites, les végétations vénériennes, le
botryomycome, plus rarement les mycoses
profondes.
14
- Ne saignant jamais,
- Nombre : Unique (isolé), multiple, ou en en grappe (en bouquet),
- La surinfection bactérienne des aphtes est inhabituelle (par le
streptocoque sanguis),
- Absence d’adénopathies ;
- Ils évoluent par poussées spontanément résolutives (Auto-involutives)
- L’aphte banal dure 8 jours et guérit sans laisser de cicatrice, l’aphte
géant peut persister pendant plusieurs semaines et laisser une cicatrice,
surtout l’aphtose qui peut être récidivante et récurrente (ABR) ;
Chez la femme, les lésions peuvent récidiver de façon cyclique pendant
l’ovulation ou avant la période menstruelle, et des rémissions fréquentes
pendant la grossesse ;
Les formes récurrentes, géantes les lésions atypiques vont nécessiter une
enquête étiologique.
2. Epidémiologie :
- C’est l’atteinte récurrente la plus fréquente de la muqueuse buccale ;
- Les aphtes buccaux concernent 5 à 60% de la population selon les
études ;
- 10% à 30% de la population est touchée par l’aphtose récidivante.
Les chiffres sont extrêmement variables en fonction des régions, de l’âge des
patients, du sexe et de critères sociaux économiques.
D’autre part, la disparité des chiffres pourrait s’expliquer aussi par le fait
que le diagnostic d’aphte est souvent porté à tort devant toute ulcération de
la muqueuse buccale et que, les aphtes sporadiques sont fréquemment
confondus avec une véritable ABR
15
- Un contexte familial est retrouvé dans 90% des cas, où les enfants dont
les 2 parents ont une aphtose buccale, auront une aphtose idiopathique
et seulement 20% de ceux dont aucun parent ne souffre d’aphtose ;
3. Localisation :
Ils sont le plus souvent retrouvés au niveau buccal, mais peuvent parfois
être bipolaire (orogénital) ou tripolaire (oro-génito-anal) ;
16
sans laisser de cicatrice (sauf pour les aphtes géants et la
variété nécrosante) ;
IV. Classification des différentes formes cliniques
1. Aphtes communs « ulcération vulgaire »
Aphte isolé
L’aphte vulgaire est une ulcération ovalaire douloureuse de 2 à 10 mm
de diamètre, à bords réguliers ou plus rarement légèrement déchiquetés.
Le fond nécrotique de l’ulcération jaunâtre ou grisâtre repose sur une
base infiltrée mais non indurée. Il est classiquement entouré d’un halo
inflammatoire érythémateux. Le centre est habituellement déprimé en
forme decupule.
La poussée se caractérise par laprésence d’un petit nombre d’éléments
non confluents siégeant sur la muqueuse non kératinisée la plus
exposée aux traumatismes : muqueuse labiale, freins, joues, bords et
ventre de la langue, plancher buccal, voile du palais et piliers antérieurs
du voile du palais.
L’évolution se fait vers la guérison sans cicatrice en 7 à 10 jours.
Il existe des formes cliniques atypiques d’aphtes vulgaires dérogeant à
cette description cardinale et le diagnostic est alors plus difficile à poser.
Ainsi, les aphtes abortifs montrent des lésions peu douloureuses sans
ulcération nette. Certains aphtes, siégeant en particulier sur les bords de
la langue, peuvent présenter des bords déchiquetés et saillants, ce qui
leur confère un aspect cratériforme.
Le diagnostic d’aphte vulgaire est souvent posé en excès devant toute
ulcération de la muqueuse buccale. Il dépend avant tout de l’aspect
clinique et de l’anamnèse car,sur le plan histologique, on observe une
vascularite associée à une ulcération muqueuse non spécifique.
17
Figure03 : Aphtes vulgaires
18
Figure04 : Aphtes géants
Aphtose de Bednar (du nourrisson)
En 1850, un pédiatre viennois, Alois Bednar décrit pour la première fois
des ulcérations palatines chez des nourrissons. Ces lésions muqueuses
intéressent la jonction entre le palais dur et le palais mou, elles peuvent
déborder sur les piliers du voile du palais et sont généralement
symétriques. Ces ulcérations ne sont pas très profondes et la zone
centrale fibrineuse est entourée par un halo inflammatoire hyperhémique.
Elles cicatrisent spontanément en quelques jours à quelques semaines en
fonction de leur taille.
19
En néonatalogie, cette affection aurait une prévalence importante : une
aphtose de Bednar a été observée chez 16 % des nourrissons examinés
et, dans 13,7 % des cas, la lésion était unique.
Les facteurs de risque de survenue de l’aphtose de Bednar ont été
discutés. Les enfants nés à terme par voie basse et alimentés au biberon
présentaient une aphtose de Bednar dans près de 30 % des cas
contrairement aux enfants nés par césarienne et nourris au sein qui ne
présentaient cette affection que dans 11,8 % des cas. Ces résultats ont
fait suggérer qu’une exposition à la flore vaginale et l’absence
d’alimentation au sein (défaut d’anticorps maternels) favoriseraient
l’aphtose de Bednar. Une étiologie traumatique a été évoquée. Le
traumatisme pourrait être provoqué par le nettoyage de la cavité buccale
après la naissance
Le diagnostic différentiel doit être fait avec la gingivo-stomatite
herpétique, l’herpangine ou le syndrome pied-main-bouche qui présente
un tableau clinique plus large avec des ulcérations multiples, de la fièvre
et des adénopathies.
Les ABR s’améliorent avec l’âge, mais peuvent laisser des cicatrices
sévères dans les ABR majeures.
Les enfants atteints d’aphtes ou d’ABR, quelles que soient leurs formes
cliniques, peuvent se déshydrater suite à leur réduction d’apports
hydriques du fait des douleurs ressenties, avec alors des signes
généraux possibles comme une perte de poids, une tachycardie, une
hypotension.
a. Forme mineure
La forme mineure de l’aphtose buccale récidivante est la variété la plus
fréquente, affectant 80 % des patients atteints surtout l’enfant.
Elle atteint préférentiellement le sujet entre 10 et 40 ans.
20
Elle est caractérisée par la présence d’aphtes buccaux classiques, à savoir
des ulcérations superficielles rondes ou ovales, habituellement de 2 à 4
mm de diamètre (mais parfois jusqu’à 1 cm), avec une pseudomembrane
jaunâtre entourée d’un halo étroit érythémateux. Le fond jaunâtre devient
grisâtre avant la guérison.
Au niveau du fond des vestibules, site fréquent, leur forme est plus
linéaire. Ces aphtes sont isolés (aphte banal, d’aspect vulgaire) ou
multiples (deux à six). Ces lésions mineures surviennent surtout sur la
muqueuse labiale et buccale, ainsi qu’au niveau du plancher buccal.
Elles sont inhabituelles au niveau de la gencive, du palais ou du dos
de la langue. Elles guérissent en 7 à 14 jours sans laisser de cicatrice.
Elles récidivent après un intervalle de 1 à 4 mois.
21
Ces ulcérations sévères persistent jusqu’à 6 semaines, et laissent souvent
une cicatrice.
Des signes généraux peuvent accompagner ces lésions (état sub-fébrile,
dysphagie, malaise) avec élévation de la vitesse de sédimentation.
Cette forme peut survenir lors de la prise de nicorandil (antiangoreux),
avec des aphtes sévères.
22
L’aphtose buccale herpétiforme n’est cependant pas liée à une
infection à herpès simplex, et ne présente ni ne se développe au sein de
lésions vésiculaires. C’est son aspect d'éruption (lésions en bouquet,
punctiformes, polycycliques, aux contours irréguliers) qui est très proche
de l'herpès buccal d’où le terme d'aphtes herpétiformes.
23
des cellules malpighiennes dégénérées (immunoglobulines G [IgG], IgA,
IgM et complément C3 cytoplasmiques). Ces lymphocytes subiraient une
transformation blastique : d’une part des lymphoblastes (cellules B)
synthétiseraient des immunoglobulines (anticorps humoraux), qui
joueraient un rôle dans l’infiltration cellulaire et la vascularite, d’autre
part des lymphocytes (cellules T) produiraient un facteur cytotoxique
amenant la destruction des cellules épithéliales et l’ulcération clinique.
24
cite les HLA-Dr4. Aucune n’est significative et elles semblent plus liées
aux variétés ethniques étudiées et/ou à la faible importance de certaines
séries qu’à l’aphtose elle-même.
Aucun polymorphisme génétique n’est également retrouvé dans l’aphtose
buccale. Une base immunogénétique paraît donc exclue à l’heure
actuelle, du moins avec les moyens actuels d’investigation.
2. Pathogénie immunitaire
Certaines constatations non spécifiques autorisent des hypothèses
immunitaires dans l’aphtose buccale récidivante.
Il semblerait que l’ulcération aphteuse soit due à une action cytotoxique
des lymphocytes T CD4+ et CD8+ et des monocytes, mais le facteur
déclenchant de ces réactions n’est pas élucidé.
Plusieurs anomalies concourent à cette hypothèse. Les anomalies
suivantes peuvent être constatées au niveau du sang périphérique, en
association ou isolément :
– Augmentation des lymphocytes T CD8+ circulants ;
– Diminution des lymphocytes T CD4+ ; in vitro, ces cellules T
circulantespeuvent provoquer une lyse des cellules épithéliales orales ;
– Réduction des cellules T « vierges » CD4+ [CD5+ (2H4T)] ;
– Augmentation de cellules T « mémoire » CD4+ [CD29+ (4B4+)] ;
– Augmentation des cellules T (rôle probable dans la pathogénie des
lésions) lors des poussées, ce qui révèle une cytotoxicité à médiation
cellulaire anticorps-dépendante ;
– Elévation sérique des interleukines IL6, IL2R, sans corrélation avec
l’activité de l’affection ;
– Niveau normal ou élévation des cellules natural killer, sans altération
de leurs sous-types (CD16+, CD56+ et CD14+) et sans altération de leur
fonction cellulaire basale
Au niveau de la muqueuse buccale de ces patients, les anomalies
lymphocytaires suivantes sont constatées :
3. Facteurs prédisposant
25
A. Facteurs généraux
Troubles hématologiques :
• Neutropénies et agranulocytoses :
• Anémies :
Maladie gastroduodénale :
• Maladie de Crohn :
• Rectocolite hémorragique :
26
Une minorité de femmes présente une aphtose buccale cyclique en
relation avec la phase lutéale du cycle menstruel, modulée peut-être par
une modification du niveau de substances progestogèneset par une
diminution consécutive du turn-over de l’épithélium de la muqueuse
buccale.
Une revue détaillée n’a cependant pas retrouvé d’association entre l’ABR
et une atteinte des corticostéroïdes sexuels chez la femme.
Stress :
27
l’aphtose
chronique.
B. Facteurs locaux
Réaction à certains aliments (gruyère, chocolat, …) :
Des études contrôlées n’ont pas réussi à mettre ce fait en évidence. Une
confusion de la part des patients entre par exemple une papillite linguale
de contact, douloureuse, et une véritable aphtose n’est pas rare. De plus,
le suivi de mesures diététiques améliore rarement le cours de l’aphtose.
28
buccale, ils ont conclu que l'arrêt du tabac peut activer les symptômes
des lésions aphteuses muco-cutanées.
Définition
La maladie de Behçet est une maladie caractérisée par une inflammation
des vaisseaux sanguins (vascularite)d’origine inconnue. Elle se manifeste
essentiellement par une atteinte des muqueuses, telle des aphtes
buccaux ou génitaux, à laquelle s’associe de façon variable une atteinte
des yeux, de la peau, des articulations, du système nerveux et plus
rarement d’autres organes. Une fatigue très prononcée est également
présente. Cette affection, dont la cause est inconnue, est parfois
dénommée maladie (ou syndrome) d’Adamantiadès-Behçet, d’après le
nom des médecins qui l’ont reconnue et décrite.
Historique
Undermatologiste français Touraine a montré en 1941 l’unicité de cette
affection qui jusqu’alors était considérée comme distincte et portait des
noms différents, et a proposé le nom d’aphtose pour caractériser une
affection allant de l’aphtose buccale ou cutanéomuqueuse à la grande
aphtose. Celui de la maladie de Behçet a finalement prévalu. Cette
affection décrite en 1937 par le dermatologiste turc (mais aussi de façon
29
indépendante par le grec Adamantiades) comme une association d’aphtes
buccaux, de lésions génitales et de lésions oculaires englobe actuellement
les variétés les plus sévères des aphtoses pluri symptomatiques.
Epidémiologie
La prévalence de la maladie de Behçet est plus importante dans les pays
du Moyen-Orient, au Japon et dans les pays du bassin méditerranéen. Au
Japon, sa prévalence est de 8,5 à 10/100 000 [59]. Aux États-Unis, elle
est de 0,4/100 000.
Etiopathogénie
La pathogénie de la maladie de Behçet est toujours discutée.
Comme dans beaucoup d’affections inflammatoires avec une composante
de vascularite, divers facteurs ont été tour à tour incriminés
indépendamment ou en interaction : infectieux, immunitaires,
génétiques, hormonaux et liés à l’environnement.
Manifestations cliniques
30
On peut, sur la base de leur fréquence, distinguer des lésions « majeures »
et des lésions « mineures », sans préjuger de leur gravité.
Manifestations buccales
Dans la maladie de Behçet, les aphtes buccaux constituent un des
critères majeurs de diagnostic, et l’aphtose buccale peut précéder de
plusieurs années les autres signes cliniques, particulièrement chez
l’enfant. Néanmoins, chez l’adulte, les premières lésions sont
généralement non muco-cutanées.
Manifestations cutanées
Eléments papulo-pustuleux ou pseudo-folliculites, les plus fréquents :
papules érythémateuses surmontées d’une pustule jaunâtre, plus
caractéristiques si elles ne sont pas centrées par un poil, peu
douloureuses, plus ou moins nombreuses sur les fesses, les membres
31
inférieurs ou sur le tronc et la face, ou elles peuvent être prises pour
une acné.
Eléments papulo-nodulaires rouges et douloureux, non pustuleux,
éphémères, sur le dos des mains et des doigts.
Eléments nodulaires dermo-hypodermiques d’un cm ou plus surtout
sur les membres inférieurs, rouges, modérément douloureux,
régressant en 10 à 15 jours. Ils ressemblent à l’érythème noueux mais
ne passent pas contrairement à lui par les teintes caractéristiques de
la dégradation de l’hémoglobine.
Manifestations génitales
Il s’agit d’ulcérations récidivantes qui ressemblent à celles de la
muqueuse buccale, mais souvent de plus grande taille, durent plus
longtemps et laissent des cicatrices.
Chez la femme, elles siègent sur les grandes et les petites lèvres, le
vestibule, plus rarement la muqueuse vaginale ou cervicale ou elles
peuvent rester méconnues car peu douloureuses.
Dans les deux sexes, les ulcérations peuvent siéger sur la peau périnéale
et la région périnéale, ou elles sont très douloureuses.
32
Figure08 : Aphtes scrotaux dans une maladie de Behçet
Manifestations oculaires
Leur prévalence est très variable, forte en Japon et surtout en Turquie, ou
en 3 à 5 ans elles conduisent à la cécité chez près d’un malade sur 2,
faible en Europe et aux USA ou la perte de la vision atteint cependant
près d’un malade sur 4. Elles apparaissent souvent dans les 2 à 3 ans
après le début de l’affection, d’abord sur un œil quelques semaines ou
quelques mois après une poussée d’aphtes, puis elles se bilatéralisent
dans l’année qui suit. Elles sont parfois asymptomatiques au début, puis
apparaissent une vision trouble, une photophobie douloureuse, des
douleurs oculaires diffuses, un cercle rouge périkératique ou un excès de
larmes. En cas d’aphtose pluri-symptomatique sans signes oculaires, une
surveillance ophtalmologique doit être faite tous les 3 à 4 mois, et si des
symptômes apparaissent la consultation doit être immédiate. Il peut
s’agir d’une uvéite antérieure, ou postérieure, ou d’une atteinte globale
(panuvéite).
33
Autres manifestations
Articulaires (environ 50 à 75%) : arthralgie résolutive en quelques
jours, monoarthrite ou oligoarthrite aigue touchant le plus souvent les
grosses articulations, ou polyarthrite le plus souvent chronique, ne
provoquant classiquement ni déformation ni ankylose.
Cardiovasculaires et pulmonaires (environ 30 à 38%) : l’atteinte
veineuse est marquée par des thrombophlébites superficielles et
fugaces du tronc et des membres, se traduisant par un cordon
inflammatoire sous cutané le long d’un trajet veineux, et des
thrombophlébites profondes touchant surtout les veines caves
supérieure et inférieure. Elles peuvent être responsables d’embolies
pulmonaires fatales. Les thromboses artérielles touchent le plus
souvent l’artère sous clavière, l’artère pulmonaire et les artères
coronaires ce qui entraine un infarctus du myocarde chez le sujet
jeune. Les anévrysmes qui intéressent principalement l’aorte
abdominale présentent un risque élevé de rupture.
Digestives (environ 5 à 20%) : ulcérations œsophagiennes basses
avec douleurs rétro sternales et dysphagie, ulcérations de l’intestin
grêle et/ou du colon entrainant diarrhée, perte de poids rapide, et
parfois perforation, ulcérations rectales et anales.
Neurologiques (environ 5 à 50%) : rarement inaugurales, elles
apparaissent habituellement 5 ans après le début de la maladie de
Behçet, et sont une cause majeure d’infirmité ou de décès. Le début
est marqué le plus souvent par une céphalée sévère et persistante,
accompagnée de façon variable d’hypertension intracrânienne révélant
une thrombose veineuse cérébrale. Un état dépressif ou un syndrome
confusionnel accompagnent souvent les anomalies neurologiques.
Bien que rare, une neuropathie périphérique peut exister.
Diverses : atteinte rénale (glomérulonéphrite latente, sténose de
l’artère rénale), musculaire (myosite avec douleurs et contractures),
pancréatique, hépatique, cochléaire et parotidienne.
Diagnostic positif
Le diagnostic de la maladie de Behçet est un diagnostic clinique. La
présence d’aphtes buccaux ou génitaux, d’inflammation de l’œil (uvéite ou
vascularite rétinienne) et de signes cutanés (érythème noueux, pustules
ou pseudo-folliculite) sont particulièrement révélateurs de la maladie.
Mais son diagnostic n’est pas facile dans les cas peu symptomatiques ou
à début non muco-cutané.
34
Des critères ont été proposés parl’International Study Group for
Behçet’sDisease (ISGBD) en 1990 :
Critère majeur
Ulcérations buccales récidivantes, aphtose mineure, majeure ou
herpétiforme, observée par le médecin ou rapportée de manière fiable
par le patient, avec une récurrence d’au moins trois fois en 12 mois
Critères mineurs
• Ulcération génitale récidivante ou cicatrice de celle-ci, spécialement
chez l’homme, observée par le médecin ou rapportée de manière fiable
par le patient
•Lésions oculaires :
- uvéite antérieure ou postérieure, et cellules dans le vitré à l’examen
par lampe à fente,
- vascularite rétinienne observée par l’ophtalmologiste
• Lésions cutanées :
- érythème noueux observé par le médecin, pseudo-follicule, ou
lésions papulopustuleuses
- nodules acnéiformes observés par le médecin chez des patients
postadolescents sans traitement par corticostéroïde
• Pathergy-testpositif :
- papule érythémateuse plus large que 2 mm 48 heures après à
l’endroit de ponction par une aiguille stérile 20G à 22G, qui pénètre la
peau en zone avasculaire à une profondeur de 5 mm
- lu par le médecin 48 heures après
Diagnostic
Le critère majeur et deux des quatre critères mineurs
35
lésions du visage pour une banale acné, les aphtes buccaux pour des
aphtes isolés sans importance…).
Syndrome de Reiter ;
Lupus érythémateux ;
Aphtose idiopathique ;
Herpès récidivant
Sida.
Sarcoïdose ;
Spondylarthrite ankylosante.
Evolution
L’évolution de la maladie de Behçet se fait par poussées entrecoupées de
périodes d’accalmie (rémissions).
Même après le traitement, des rechutes sont possibles. Les poussées sont
d’intensité variable d’une personne à l’autre. De plus, chez la même
personne, l’intensité varie d’une poussée à l’autre.
36
2. Aphtes et VIH
La prévalence des aphtoses buccales est augmentée lors d’une infection
par le VIH.
Ces lésions peuvent être atypiques par leur aspect, leur localisation ou
leur évolution. Le fond en cupule est souvent absent, l'infiltration de la
base est fréquemment importante, surélevant la lésion. Le halo
érythémateux est discret, et disparaît progressivement au cours de
l'évolution du déficit immunitaire.
37
pharyngée et œsophagienne est fréquente.
Critères diagnostiques
1. Fièvre récurrente, début avant 5 ans
2. Au moins un des 3 symptômes en l’absence d’infection
respiratoire haute :
a) Stomatite aphteuse
38
b) Adénopathies cervicales
c) Pharyngite
3. Exclusion d’une neutropénie cyclique
4. Pas de symptômes entre les épisodes
5. Croissance et développement normal
40
Figure : Agranulocytose
7. Maladie cœliaque
41
Actuellement, la maladie cœliaque doit être comprise comme une maladie
dysimmunitaire systémique, initiée par la gliadine et les prolamines
proches, survenant chez des sujets génétiquement prédisposés.
42
Symptômes chez l’enfant
Vomissements
Faible croissance/ petite taille
Anomalies de l’émail dentaire
Retard de la puberté
Irritabilité, modification du comportement
Une étude récente démontre donc la coexistence plus fréquente, mais loin
d’être systématique, entre l’aphtose et la maladie cœliaque. La prévalence
des aphtoses récidivantes est plus élevée au cours de la maladie cœliaque
(22,7% versus 7,1% chez la population générale) « Pan Afr Med J. 2012 ».
43
Deux types d’anémie contribuent pour une large part à ces ulcérations
orales récurrentes, l’anémie ferriprive et l’anémie mégaloblastique,
cette dernière étant imputable à une déficience en acide folique ou en
vitamine B12.
Le questionnaire du patient révèle habituellement la présence
d’ulcérations orales récurrentes remontant à plusieurs années, ainsi
qu’un certain nombre de symptômes suggestifs tels la dyspnée, la
fatigabilité et la diminution de la tolérance à l’effort.
La pâleur du visage, du lit de l’ongle, des plis de la main, des
conjonctives palpébrales et des muqueuses buccales sont des signes
qui peuvent orienter le clinicien dans son diagnostic tout comme la
glossite (une langue lisse, atrophique et rouge « plus importante pour
les carences en fer que les deux autres ») et la chéilite angulaire qui
sont deux autres manifestations buccales très caractéristiques de
l’anémie ferriprive ou mégaloblastique.
D’autres signes peuvent être retrouvés en cas d’anémie par carence
en vitamine B12 : une capacité réduite à ressentir la douleur
(paresthésies), une modification de la façon de marcher et de se
déplacer, une gêne de la vue, l’irritabilité et la dépression.
Chez l’adulte, l’anémie ferriprive est généralement secondaire à un
saignement chronique ou à des règles irrégulières et abondantes alors
que chez l’enfant et la femme enceinte, elle est habituellement
d’origine nutritionnelle. Les néoplasies malignes du tractus digestif ou
des voies génito-urinaires comptent parmi les causes les plus
importantes d’anémie ferriprive chez la personne âgée et il n’est alors
pas rare, que des ulcérations buccales récurrentes soient la première
manifestation du cancer.
L’anémie pernicieuse, quant à elle, constitue la forme la plus
fréquente des anémies mégaloblastiques par déficience en vitamine
B12. L’anémie pernicieuse (ou de Biermer) est un désordre secondaire
à la présence d’une gastrite chronique d’origine auto-immune qui
touche de façon spécifique la région du corps et du fundus de
l’estomac (gastrite de type A). la destruction des cellules pariétales qui
accompagne cette gastrite chronique engendre une baisse de
production de facteur intrinsèque, lequel est essentiel à l’absorption de
la vitamine B12 par l’ileum terminale, en la protégeant de la digestion
intestinale.
Il faut enfin préciser que certaines déficiences sub-cliniques en fer,
en acide folique et en vitamine B12 s’observent chez un nombre
substantiel de patients souffrant d’aphtose buccale récidivante ; ces
déficiences surviennent souvent sans anémie franche.
Les principales pathologies à l’origine d’un déficit en vitamine B12 :
44
L’anémie pernicieuse (ou de Biermer) est la cause la plus courante de
carence en vitamine B12.
Anamnèse :
45
répercussions fonctionnelles, telles que des difficultés à l’alimentation
ou à la déglutition sont autant d’éléments à prendre en compte.
- Les signes prodromiques (sensation de cuisson, brûlure avant
l’apparition de la lésion) ;
- Les modalités évolutives (ulcération aigue ou chronique donc qui
persiste et qui n’a pas tendance à cicatriser spontanément) ;
- Durée des lésions : Chaque lésion dure entre quelques jours et 2
semaines.
- Le caractère récidivant ou non de la poussée, le rythme des récidives
(irrégulier..).
- Les traitements déjà entrepris qu’ils soient locaux ou généraux
(Traitement d’essai avec des corticostéroïdes : Résultat thérapeutique
favorable ou non), attention à l’automédication.
- Le statut immunitaire du patient (une exposition au risque d'infection
VIH…) ;
- Par son caractère primaire (une lésion macroscopique est dite primaire
si elle est directement induite par le processus pathologique causal) ou
secondaire (quand elle est due à l'évolution d'une lésion primaire ou à
l'action de facteurs externes donc succédant à une autre lésion), la
présence d’une bulle ou vésicule avant l’apparition de l’ulcération exclut
le diagnostic d’aphte ;
46
- ulcérations linéaires (maladie de Crohn) avec aspect pavimenteux des
joues et ulcérations buccales hémorragiques (rectocolite).
Rq : Les formes géantes, les formes récurrentes et les lésions atypiques vont
nécessiter une enquête étiologique.
Examens complémentaires :
Il comprendra :
o Un hémogramme complet avec dosage de fer sérique et ferritine,
o Un bilan hépatique.
o Les dosages de folates, de la vitamine B12 et du zinc ne sont faits
qu’en cas d’anomalies de la NFS ou d’autres manifestations (s'il
existe des signes d'appel) en faveur d’une carence possible en ces
vitamines ou oligoéléments.
47
- Biopsie en immunofluorescence directe et indirecte (IFD + IFI) pour les
dermatoses auto-immunes…
- Ainsi que des sérologies virales (VIH …): devant une ulcération génitale,
la sérologie syphilitique sera en particulier systématique.
Ce test est une réaction cutanée non spécifique d’hyperréactivité induite par
une piqûre d’aiguille intradermique en zone avasculaire. La réaction est une
réaction d’hypersensibilité de type retardé;
Il est réalisé par deux piqûres sous-cutanées avec une aiguille mousse stérile
au niveau d’un bras, et deux autres par une aiguille tranchante au niveau
de l’autre bras;
Les ulcérations buccales, qui peuvent être liées à des causes variées,
constituent les principaux diagnostics différentiels d’une aphtose.
48
Les ulcérations buccales sont classées en trois groupes principaux :
- ulcérations aiguës (à début brusque et courte durée),
- ulcérations récurrentes (principalement dues à l’érythème polymorphe
post-herpétique)
- et ulcérations chroniques (à début progressif et insidieux).
49
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Elle doit obligatoirement disparaître en 8 à 10 jours après élimination de la
cause, en l’absence de guérison, se méfier d’un carcinome.
Ulcération maligne :
Lorsque la lésion est chronique, l’ulcération témoignant d’un carcinome doit
d’emblée être suspectée.
- Carcinome épidemoïde :
La forme ulcérée constitue en effet la présentation classique du carcinome
épidermoïde buccal (environ 94% de toutes les tumeurs malignes de la cavité
buccale) ;
A la palpation, on décèle une base indurée, qui dépasse largement les limites
de l'ulcération et s'étend en profondeur, ce qui témoigne de l’infiltration des
tissus et peut entrainer leur fixité.
51
Trois formes cliniques existent : Forme ulcéro-végétante, ulcéreuses et
végétante ;
Sialométaplasie nécrosante :
Elle atteint les hommes d'âge moyen, mais aussi les adolescentes et jeunes
femmes présentant des troubles alimentaires (alternance d'anorexie mentale
et de boulimie) probablement secondairement à l’agression chronique du
palais dur induite par les vomissements provoqués.
52
Cliniquement, on retrouve un nodule sous muqueux de 1 à 4 cm
essentiellement au niveau du palais dur, (zone rétromolaire, muqueuse
jugale, lèvre inférieure) très douloureux, qui évolue vers la nécrose.
53
Ulcérations multiples :
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A- Infections virales :
L'herpès humain fait parti des infections virales les plus communes de la
muqueuse buccale ;
54
Il en existe deux types : HHV1 et HHV2, responsables de l’Herpes bucco-
facial et de l’herpès ano-génital ;
Primo-infection herpétique :
55
Figure : herpes : érosions au niveau de la face dorsale de la langue et
vésicules toujours présentes sur les lèvres
Récurrence herpétique :
Sur les muqueuses, les récurrences siègent presque toujours sur les
muqueuses kératinisées du palais ou de la gencive attachée, le stade de
vésicules passe souvent inaperçu, remplacé rapidement par des érosions,
délimitées par un liseré érythémateux. Celles-ci sont recouvertes d’un enduit
fibrino-leucocytaire blanchâtre et guérissent sans laisser de cicatrice.
Varicelle et zona :
56
La varicelle survient en général durant l’enfance entre 1 et 14 ans.
Le zona, lui, se déclare le plus souvent chez les personnes âgées. Il peut
cependant se manifester chez l'enfant ou l'adulte jeune en cas de déficit
immunitaire (leucémie, VIH, lymphome, traitements immunosuppresseur...).
- La varicelle :
Les lésions buccales précèdent parfois les lésions cutanées (thorax, bras,
cuir chevelu et face).
Toute la muqueuse buccale peut être atteinte, le plus souvent sous forme de
discrètes vésicules jaunâtres qui s’ulcèrent rapidement laissant des érosions
arrondies, douloureuses avec sialorrhée.
57
Figure : Zona du trijumeau branche V3, érosions sur le bord latéral de la
langue ;
L’infection est marquée par une fièvre brutale (39-40°C), des douleurs bucco-
pharyngiennes et une dysphagie.
58
Syndrome Mains-Pieds-Bouche :
Les lésions buccales, toujours présentes, font l'objet des plaintes les plus
importantes. Elles sont caractérisées par de petites vésicules qui se rompent
rapidement laissant place à des ulcérations douloureuses entourées d'un
halo érythémateux. Palais, langue et muqueuses jugales sont les sites
préférentiellement atteints.
B- Infections bactériennes:
- Non spécifique :
Gingivite ulcéro-nécrotique :
La gingivite ulcéro-nécrotique (GUN) peut survenir d'emblée ou faire suite à
une gingivite érythémateuse classique ; elle intéresse seulement la gencive.
59
douleurs, halitose, fièvre et adénopathies. Les ulcérations sont recouvertes
d'une pseudo-membrane grisâtre.
- Spécifique :
Syphilis :
60
Figure : chancre syphilitique sur le bord latéral de la langue
Tuberculose
Un chancre est alors décelable à l'examen clinique, sous forme d'une petite
ulcération à fond rouge ou fibrineux jaunâtre. Celui-ci cicatrisera en
quelques semaines mais l'adénopathie persistera et évoluera vers une
fibrose.
Le dos de la langue est la zone la plus souvent atteinte, suivie des lèvres, de
la muqueuse buccale et du palais.
61
Figure : tuberculose, ulcération creusante de la langue
Le pemphigus :
Il apparait généralement entre 30 et 50 ans.
Bien que les bulles soient considérées comme les lésions les plus
caractéristiques du pemphigus, elles sont rarement observées dans la cavité
buccale en raison de leur minceur et de leur faible résistance au
traumatisme masticatoire.
62
Figure : pemphigus vulgaire, ulcération de la joue
Lupus érythémateux :
C’est une maladie auto-immune caractérisée par la présence de plusieurs
anticorps qui sont dirigés contre des constituants cellulaires.
63
Les signes généraux inaugurant la maladie dont : fièvre, malaise, fatigue,
anorexie et perte de poids.
64
Figure : Lésions buccales d’un lupus érythémateux discoïde
E- Ulcérations toxiques :
Erythème polymorphe :
L’érythème polymorphe est une dermatose éruptive aigue, récidivante, dont
la dénomination témoigne du polymorphisme des lésions observées chez un
même patient. Elle serait réactionnelle à des causes diverses de mécanismes
inconnu ;
Dans sa localisation buccale (langue, palais, face interne des joues), l’EP est
caractérisé par des vésicules laissant place à des érosions intra-buccale
périodique, récurrente, ou chronique, qui confluent pour donner des lésions
polycycliques recouvertes d’un enduit jaunâtre fibrino-leucocytaire,
douloureuse qui perturbe la phonation et la mastication.
Les lèvres présentent des érosions profuses, se recouvrant sur leur versant
cutané de croûtes épaisses hémorragique,
L’EP buccal survient fréquemment chez les adolescents et les jeunes adultes
mais peut se produire à tout âge.
65
Figure : Erythème polymorphe. Multiples érosions des lèvres et de la
langue
Toxidermie buccale :
Syndrome de Stevens-Johnson ;
Les signes généraux sont très marqués avec fièvre, asthénie et arthralgie,
associé à une pneumopathie de type viral et des atteintes oculaires et
génitales,
66
Figure : Syndrome de Stevens-Johnson. Lésions graves extensives des
lèvres, du visage et des yeux
Les lésions buccales peuvent être cycliques. La fréquence de ces lésions est
d’environ une fois toutes les 3 semaines. La durée de chaque cycle varie de
10 jours à 6 semaines.
Une grande variété de facteurs étiologiques ont été décrits, mais l’origine
médicamenteuse est la plus fréquente (antibiotiques, sulfamides, sulfones,
AINS, antiépileptiques...)
67
F- Ulcérations liées à des vascularites :
Maladie de Horton :
Granulomatose de Wegener :
La granulomatose de Wegener est une maladie chronique rare. Elle est
caractérisée par une vasculite nécrosante des petits vaisseaux des voies
aériennes supérieures, puis inférieures et une glomérulonéphrite souvent
terminale.
68
C'est une lésion végétante et purpurique de teinte rougeâtre à bleuâtre,
généralement peu douloureuse, siégeant au niveau des papilles
interdentaires.
Le traitement local est recommandé dans tous les cas. Il suffit généralement
dans les aphtoses peu invalidantes à récidives espacées ou en cas d’aphtes
sporadiques, communs.
69
1. Mesures générales :
- L’étiologie des carences hématiniques (fer, acide folique, vitamine B12) doit
être élucidée avant d’administrer une thérapie substitutive. La correction des
déficits en vitamine B12, folates (B9), fer et zinc (la suppplémentation)
classiquement associés à l’aphtose buccale n'améliore pas la plupart des
patients ;
2. Traitement local :
Aucun traitement local n’a fait la preuve de son efficacité sur l’évolution des
aphtes.
- Les antiseptiques :
70
Cette utilisation à long terme a des inconvénients, comme la coloration des
dents et de la langue en brun et le pouvoir inhibiteur du gluconate de
chlorhexidine sur la croissance de l’épithélium buccal a été signalé ;
• Dexaméthasone:4 à 20mg;
-Une anesthésie de contact peut aussi être obtenue avec 250 à 500 mg
d’acide acétylsalicylique (comprimé effervescent d’aspirine) dissout dans
l’équivalent d’un demi-verre d’eau et gardé en bouche, en particulier 10 à 15
minutes avant un repas
71
-Ou les protecteurs bio-adhésifs (colles tissulaires) comme les BUTYL-
CYANO-ACRYLATES, l'HISTOACRYL® : Trois jours après l'application, 50%
des aphtes (communs) ainsi traités avaient guéri et quatre jours après
l'application, le pourcentage de guérison était de 100%. Les 85% des
malades n'avaient plus aucune douleur, même après que la colle tissulaire
se soit décollée.
- Les antibiotiques
- Corticostéroides topiques :
72
L’application matin et soir d’une petite quantité dès l’apparition des
prodromes permet de supprimer la douleur et diminue la durée des aphtes
qui disparaissent en 2 ou 3 jours et réduiraient de moitié le délai de
cicatrisation mais comportent un risque de candidose buccale et
d’amincissement et des érosions de la muqueuse ;
Certains associent avec succès les corticoïdes locaux à la prednisone per os.
Remarque : l’effet protecteur des topiques locaux sous forme de pâte, peut
procurer une guérison plus rapide et une réduction des douleurs
indépendamment des produits plus ou moins actifs dans ces pâtes.
73
- Cautérisation de la lésion :
Pour obtenir une neutralisation immédiate et en général définitif des
douleurs (par nécrose de coagulation), au détriment cependant d’une brève
douleur vive lors de l’application, une cautérisation de la lésion peut être
pratiquée, par exemple avec :
On peut l’utiliser sur les aphtes vulgaires mais il est fortement contre
indiqué dans les aphtes géants car il risque entraîner des retard de
cicatrisation et aggraver l’algie.
Autres :
Le laser CO2 a été proposé plus récemment avec succès dans les aphtoses
rebelles.
74
La chirurgie : La résection chirurgicale des lésions transforme celles-ci en
une lésion traumatique moins douloureuse ; elle est rarement proposée.
3. Traitement systémique :
Habituellement les poussées sont résolues grâce aux traitements locaux.
Cependant, ils s'avèrent parfois insuffisants.
De nombreux traitements ont été proposés mais seuls quelques uns sont
dignes d’intérêt.
Immunomodulateurs :
Prescrite à la dose de 2 mg par jour les trois premiers jours, puis 1mg en
traitement prolongé. Au moins 3mois sont necessaires pour juger de son
efficacité ;
Effets secondaires :
Les effets secondaires sont rares à la dose de 1mg par jour et se manifestent
essentiellement par des diarrhées au début du traitement (interrompre la
75
colchicine pendant 3 jours, puis reprendre), mais la tolérance s’améliore
avec le temps.
Contre indication :
- La corticothérapie générale
(immunossupresseurs):
De courte durée est le traitement initial de choix en cas
d’aphtose géante, sous forme d’une à deux ampoules /
jour de dexaméthasone (4-8mg) pendant 3 à 7 jours par
voie intramusculaire ou intraveineuse ;
76
Les contre-indications :
Effets secondaires :
- Le thalidomide :
Contre indications :
Effets secondaires mineurs :
77
Effets secondaires majeurs :
Est à envisager dans les aphtes très nécrosants, et doit probablement être
limité aux patients VIH-positifs (traitement de choix de l’aphtose atteignant
le sujet séropositif pour le HIV) ;
L’effet est seulement suspensif, mais au long des années les poussées
tendent à s’espacer, et la maladie peut présenter de longues phases de
rémission, puis disparaître totalement,
78
Cependant, ces contraintes de surveillance et de prescription (test béta HCG
à chaque renouvellement de traitement et électromyogramme) n’encouragent
pas à son utilisation en première intention.
Contre indication :
Effets secondaires :
79
Autres :
Immunostimulants:
80
Les différentes modalités thérapeutiques ont été évoquées avec chacune des
lésions majeures ou mineures de la maladie de Behçet. ;
L’arrêt des glucocorticoïdes employés seuls entraîne des flambées des lésions
oculaires.
81
D’autres immunomodulateurs ont été essayés, avec des succès dans l’ABR
banale, mais avec des résultats plus inconstants dans la maladie de Behçet.
L’interféron alpha (9 à 12 000 000 UI/j) a une action transitoire sur les
lésions cutanéo-muqueuses, les atteintes articulaires et les réactions
inflammatoires périvasculaires.
4. Stratégie thérapeutique :
La stratégie thérapeutique est guidée par :
83
le cas des aphtes de cause médicamenteuse, les aphtes disparaissent en 2 à
4 semaines et ne récidivent qu’en cas de reprise du médicament ;
C’est également le cas des aphtes par déficit vitaminique, dont la disparition
est obtenue dans les 15 jours suivant la normalisation complète du déficit ;
IX. Conclusion :
Bien que la plupart des aphtes buccaux soient des lésions banales, la
vigilance et l’attention du praticien doivent permettre le diagnostic des
aphtoses récidivantes et des maladies aphteuses, signe d’une atteinte
systémique témoin d’un déficit immunitaire comme le HIV.
84
Il ne faut pas confondre des aphtes avec des lésions post-vésiculeuses ou
bulleuses, diagnostic parfois difficile ; au moindre doute une culture virale
ou une biopsie seront pratiqués.
85
X. Bibliographie
86
Encyclopédie Orphanet Grand Public ; La maladie de Behçet ; 2007.
87
R.Kuffer, T.Lombardi, J.Samson ; La muqueuse buccale de la clinique
au traitement ; 2009 Editiond MED’COM.
XI. Webographie
88