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Une nouvelle approche de l’accompagnement des

parents ….
La démarche des UPP, par différents points, diverge d’autres actions
autour de la parentalité :

- Elle part des ressources des parents et met de coté leurs


difficultés en les positionnant comme experts de leur parentalité vécue.
Ils sont sollicités, non pas pour parler de leurs difficultés ou s’entraider,
mais pour produire un savoir et faire entendre leur voix. Ainsi la
démarche n’est pas descendante (des professionnels vers les parents)
mais bien ascendante (des parents vers les professionnels et les
institutions).

- Au sein des UPP, les parents ne sont pas « bénéficiaires » mais


« partenaires » en étant au cœur de la démarche. Ils participent non
seulement à la production du savoir mais aussi au pilotage des UPP, à la
fois au niveau local et national. Toutes les décisions sont prises par eux,
tant en ce qui concerne la recherche que le travail avec les institutions,
l’évaluation, la recherche de financements pour certaines. Au niveau
national, les parents sont sollicités pour préparer les séminaires de
parents, participent aux coordinations nationales avec les animateurs,
interviennent à des colloques nationaux pour lesquels ils sont sollicités
etc.

- Le pari des UPP est de s’appuyer sur la réalisation d’une recherche sur la
parentalité pour qualifier et légitimer le savoir des parents, ce qui en soi
est aussi une démarche originale.

…Qui valorise et dynamise les parents

Les parents sont valorisés parce que leurs compétences sont reconnues :

« Qu’on me demande de participer à une recherche, c’est


incroyable ! J’ai le sentiment d’exister, d’être importante, cela me
donne un nouveau dynamisme pour être plus proche de la vie de
mes enfants »

Les parents sont valorisés et dynamisés par la place qu’ils occupent dans
les UPP :
« Les UPP, c’est une nouvelle approche qui nous projette en avant et
qui nous donne envie de donner le meilleur de nous-mêmes parce que
les parents ont une place centrale »

La recherche permet aux parents et plus particulièrement à ceux qui sont


les plus stigmatisés de retrouver fierté et dignité y compris au sein de leur
famille :

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« Qu’on me demande, à moi, de participer à une recherche, c’est
incroyable ! J’ai le sentiment d’exister, d’être importante, cela me
donne un nouveau dynamisme pour être plus proche de la vie de mes
enfants »

Le travail intellectuel est très valorisant et permet aux parents de changer


de regard sur les universitaires, mais aussi sur les spécialistes, les experts
en général et d’oser exprimer leur point de vue :
« J’ai plus de facilités à parler aux enseignants, parce que je me
rends compte que ceux qui ont fait des études sont finalement
pas tellement d’un autre monde que moi, que je peux parler
avec eux, je suis moins complexée. »

La dimension collective de la recherche sécurise et renforce les parents.


En passant de leurs problèmes individuels à un problématique collective et
sociétale ils se décentrent de leurs difficultés et déculpabilisent..

« Je me suis rendu compte que les problèmes qui arrivaient à mes


fils, c’était aussi des questions de société, ca ne m’a pas
déresponsabilisée mais ça m’a permis de relativiser. Ca m’a donné
envie de faire bouger les choses pour eux et pour tous les autres. »

« Avant j’étais tout le temps entrain de montrer que je n’étais pas


« démissionnaire ». J’avais peur qu’on me colle cette étiquette. Mais
j’ai compris des choses : c’est surtout les parents pauvres qui sont
traités, même si on s’occupe de nos enfants. C’est souvent parce
que les professionnels jugent trop vite. Y’a pas de parents
démissionnaires, ou très peu, dans les quartiers. Par contre, y’a des
conditions de vie difficiles, des gens qui se débattent dans de
multiples problèmes. »

Les actions citoyennes les valorisent et leur donnent un sentiment que


leur travail est utile, non seulement pour eux mais pour d’autres, qu’ils
vont faire avancer la question de la parentalité. Il se sentent comme
investis d’une « mission » importante.
« Loin des réunions, rencontres, groupes de paroles qui soulagent
parfois les maux mais ne vont pas loin dans le : « qu’est ce
qu’on fait pour que cela change vraiment ? Là, nous étions ensemble
« maîtres du jeu » parce qu’actrices et auteurs de la recherche,
des actions, du projet, cela ne ressemblait pas aux
participations habituelles »

« Ce qui est important dans les UPP, c’est que ce qu’on fait est utile
peut changer les choses. Les parents ont des choses à dire. Quand
je participe à l’UPP, je ne viens pas que pour parler de mes
difficultés, mais pour agir avec d’autres. J’ai le sentiment d’être prise
au sérieux et d’être sur un pied d’égalité avec les universitaires
et les institutionnels. La force des UPP c’est que les parents sont
vraiment acteurs et citoyens. »

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Les parents développent des compétences multiples

Le travail de recherche nécessite de la rigueur, d’exprimer sa pensée,


d’interviewer, d’écrire. Toutes ces démarches sont l’occasion de
d’apprentissages et de dépassement de soi et d’éventuelles difficultés..

« Construire le questionnaire a été très compliqué, et le


dépouillement encore plus. Il a fallu trier, organiser, classer. Certains
avaient envie de baisser les bras, mais bon, on a continué… Et la
fierté est à la hauteur des efforts… On a appris des tas de choses,
sans s’en rendre compte »

« Quand j’ai compris que l’UPP, ce n’était pas seulement du théâtre


forum, je me suis dit c’est pas pour moi ! Je n’aime pas écrire, j’ai
toujours eu des problèmes avec ca ! Les autres m’ont dit « Restes
là, on a besoin de toi ! ». ca a fait tilt, j’ai décomplexé. On a trouvé
une organisation, moi je dis, et un autre parent écrit ce que je dis. Je
me suis surprise à écrire un peu. Les fautes, tout le monde s’en fout,
dans les UPP »

Le travail de croisement de la réflexion avec les institutionnels et élus,


les initiatives prises dans l’espace public (voir ex ci-dessus) est source
d’apprentissage et de dépassement de soi (prise de parole publique..)

« J’ai appris à prendre la parole en public. Même si j’ai peur avant,


maintenant je sais que je vais y arriver. Je suis portée par mes
copines, par le groupe. »

« Le travail de l’UPP nous a donné l’occasion d’acquérir une


assurance et une aisance pour aller au devant des institutions et
discuter avec eux des points essentiels liés aux enfants et
adolescents du quartier »

Le fait que les groupes soient composés de parents de milieux sociaux


et culturels différents, ayant des pratiques éducatives diversifiées,
permet de travailler sur la compréhension et l’acceptation les uns des
autres. Les parents sont en contact avec d’autres réalités, d’autres
pratiques qui permettent de dépasser les préjugés. Le fait de partager
l’identité de parents et de participer à un même projet pour lequel ils
ont des enjeux communs de réussite leur permet de dépasser ces
appréhensions. Les parents disent aussi, à travers les UPP, apprendre à
faire avec la diversité, à gérer le groupe et les conflits…

« Dans ce groupe, il y a des gens que je n’aurai jamais rencontré


avant. Je me rends compte des privilèges que j’ai. J’ai une famille
unie, je suis française, j’ai un travail. Pour d’autres, la vie est plus
dure : vivre en caravane, ne pas savoir de quoi sera fait le
lendemain, avoir peur du placement…. Moi qui avait tendance à les

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critiquer, je me rends compte qu’à leur place, je ne ferai sans doute
pas mieux, et même moins bien.»
« Se retrouver entre parents d’origines différentes pour travailler sur
des thèmes qui nous concernent tous et où chacun peut apporter
son expérience, ses difficultés, ses espoirs fut pour moi un vrai
moteur dans ma réflexion parentale »

« Parce que les caractères sont différents et les échanges vifs, il y a


parfois des tensions. Mais les tensions se règlent car l’envie de faire
ensemble est plus forte »

Plusieurs UPP notent que des parents ont repris des formations et/ou ont
trouvé un emploi. Cet axe va être approfondi en 2010 et 2011, mais déjà,
nous observons que certains parents, notamment des premières UPP ont
engagé des VAE, repris des formations ou obtenu des emplois assez
directement liés aux compétences acquises grâce aux UPP, notamment
dans les métiers de l’animation sociale, de la médiation…

Les parents renforcent leurs compétences parentales et


leur confiance en eux

Au niveau familial certains parents ont changé leur façon de faire vis-à-vis
de leurs enfants.
« En parlant avec les autres parents de l’UPP, j’ai réalisé qu’il était
important que je puisse dire « non » à mes enfants, alors que jusqu’
là je
n’osais pas. »

« Pour pouvoir aller au séminaire de parents, j’ai dû laisser mes


enfants à mon mari. C’est la première fois qu’il s’occupe seul des
enfants. »

Les échanges entre parents, mais aussi et surtout la valorisation et la


dynamisation que procurent les UPP modifient les capacités des parents et
leurs relations avec leurs enfants.
« J’ai mieux compris mes enfants, j’ai plus confiance en moi pour
leur transmettre des valeurs »

« Bien sur, au sein de l’UPP, en écoutant les autres, en parlant, on


devient plus intelligent, on a de nouvelles idées pour faire avec les
enfants. Mais ce qui est le plus important c’est qu’on se sent plus
forts, moins écrasés, on relève la tête. Et si on est fier de soi, les
enfants le sentent, et tout est facilité »

« En fait j’ai jamais eu l’impression de changer. Mais de prendre la


parole en public, réfléchir, ca m’a vraiment fait croire en moi et
finalement ça a tout changé. Ce n’est que maintenant que je m’en

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rends compte. Je ne suis plus la même, c’est tout mon regard qui a
changé. Je vois plus mes enfants et même mon mari pareil. Je suis
bien plus décontractée et à l’écoute parce que j’ai confiance en moi.
Je n’essaie pas de chercher ce que je dois faire à l’extérieur, mais je
me dis, c’est quoi que tu penses au fond de toi ? Et je fais
confiance à ce que je sens»

Les autres acteurs de l’éducation leur paraissent plus faciles d’accès :

« Je me sens plus assurée pour demander à l’école et au soutien


scolaire des informations. Je n’ai plus peur »

« J’ai pu prendre du recul par rapport à la situation que je vivais


avec mon fils et les problèmes qu’il rencontrait à l’école. J’ai pu
déculpabiliser et du coup dédramatiser avec mon enfant qui ne
semblait pas « conforme » nous n’entrions simplement pas dans le
moule. J’ai donc cessé de l’incriminer et de l’engueuler. J’ai pu
commencer à chercher d’autres solutions et faire le deuil de
« mon fils a eut le bac avec mention bien » . Je me suis sentie
mieux armée pour aller à la rencontre de ses professeurs,
proviseurs, aux conseils de discipline et autre »

Les parents sont ressources les uns pour les autres. Le groupe joue un rôle
de soutien et de valorisation pour chacun, permet de rompre l’isolement,
de dédramatiser, d’une part en constatant que d’autres parents partagent
les mêmes interrogations, mais aussi que les difficultés qu’ils rencontrent
sont aussi la conséquence de problèmes sociaux plus complexes.
« L’UPP, c’est comme une famille, on se soutient mutuellement. Si
l’un ou l’autre des parents a un coup dur, on l’aide. On est
solidaires, du coup, on se sent plus forts. »

« Ce qui a vraiment changé c’est que je culpabilise moins. J’ai


compris que tout ce qui arrivait de difficile à mes ados, c’était pas
qu’à cause de moi. Qu’il n’ y avait pas forcément de coupable,
d’ailleurs. Les ados ont des mauvaises passes… Avant j’étais
tellement culpabilisée, que je ne pouvais en parler, à personne.
Dans l’UPP, j’ai senti qu’il n’y aurait jamais de jugement sur moi sur
mon histoire. J’ai senti que j’avais la confiance des autres, des
animateurs, même si un de mes fils est placé »

« Les UPP ont permis de créer des réseaux d’entraide dans le


quartier. On se connaît entre parents, mais on connait aussi les amis
des autres parents. Ca fait de bons réseaux d’entraide »

La confiance des parents resurgit sur les relations familiales :


« Cela a changé le regard que mes enfants portent sur moi. Ils sont
fiers de moi, de ce que je peux faire, de mon engagement dans les
UPP. Pour la fête des mères, mon fils de 13 ans m’a écrit une lettre,
et à la fin il y avait « Vive les UPP ». Cela m’a touchée. »

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« Dès que j’ai fini de parler au colloque de Gand, j’ai vu dans les
yeux de mon fils et de mon mari à quel point ils étaient fiers de moi,
ils m’ont félicitée, et moi cela m’a fait vraiment plaisir je me suis
sentie vraiment
reconnue et soutenue »

Des postures des professionnels modifiées

Les Upp modifient considérablement les postures des animateurs


et coordinateurs, du point de vue de :

- la distance entre parents et professionnels


- la place, y compris dans le pilotage laissée aux parents ce qui
implique un partage du pouvoir
- le regard qui est porté sur les compétences et capacités des parents
et la nécessité de décentration par rapport à la fois aux difficultés
des parents et à son propre cadre de références

« La démarche des UPP renforce ma conviction que toute personne quel


que soit son niveau de scolarisation, son parcours, a des capacités
d’action et des compétences. J’aborde moi aussi pour la première fois une
recherche universitaire et je me sens de ce fait proche des parents des
UPP. C’est également une aventure pour moi ! Il faut une grande
disponibilité mais en retour, il y a un fort enrichissement professionnel et
personnel. »

« C’est une remise en question de mes pratiques professionnelles,


possible uniquement parce qu’on se soutient aux coordinations nationales,
car parfois il faut accepter d’être dans le doute. Animer une UPP ca
change des pratiques de travail social : ce n’est pas le même objectif et le
regard n’est pas porté au même endroit. On apprend à penser et à voir les
possibles et non pas les manques. Il faut lâcher les tendances à la
surprotection et faire confiance, y croire. On se forme tout le temps…. Et
ça restera après les UPP »

« L’UPP demande du temps et de l’engagement, y compris sur le temps


personnel. Mais le plaisir de réaliser un projet qui porte des valeurs
auxquelles on croit n’a pas de prix. On se sent partager une ambition
commune avec les parents car nous aussi, on souhaite que les parents
soient écoutés et démontrent leurs compétences »

« Dans les UPP il n’y a pas d’un côté les professionnels qui maîtrisent les
tenants et les aboutissants d’un projet. On est tous à construire ensemble.

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Cela demande de pouvoir lâcher prise, d’accepter de ne pas tout
maîtriser. D’accepter de n’être que des « facilitateurs », et jamais en
avant. Les parents ont le pouvoir de donner leur avis sur le projet, et ils ne
s’en privent pas … »

Ce changement de posture touche aussi les collègues et les institutions


qui portent les UPP.

« Cela a changé mes pratiques dans mes relations avec les parents de
l’UPP, mais plus largement ma manière d’animer les REAAP. Je ne pourrais
plus organiser une rencontre départementale sans solliciter des parents,
et pas seulement ceux des UPP »

Des universitaires qui adaptent leurs postures

La mission des universitaires est délicate car elle se trouve au cœur


d’objectifs qui peuvent être en tension entre eux. Par exemple, viser la
production d’une recherche de qualité avec des parents, tout en restant
accessibles à tous, laisser les parents prendre les décisions
méthodologiques tout en leur donnant des outils méthodologiques…
Plusieurs écueils sont à éviter :
- des postures d’enseignement sur la méthodologie qui rebuteraient les
parents
- des postures qui ne croient pas suffisamment dans les capacités des
parents à réaliser un travail de qualité.

Travailler dans le cadre des UPP demande beaucoup d’humilité, de


capacité à se décentrer de ses savoirs, de proposer sans imposer… et de
créer, d’inventer…

Selon les universitaires, il s’agit là d’un travail passionnant mais très


déstabilisant.

Une démarche qui intéresse les institutions

Comme montré en première partie, les institutions, et en particulier les


conseils Généraux, les CAF, les REAAP sollicitent fortement les UPP pour
participer à leurs réflexions, mais aussi aux évaluations de politiques
publiques comme les Programmes de réussite éducative.
Pour les premières UPP, à travers toutes ces actions, s’est opéré un
changement de regard entre parents issus des quartiers populaires et les
institutions. Pour les premiers, les institutions deviennent plus proches,
plus « abordables ». Pour les seconds, la participation des parents devient
possible et pertinente pour mieux appréhender et répondre aux
problèmes de société.

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Des dynamiques de développement local générées par
les UPP

Au-delà de l’activité des UPP, les UPP donnent lieu à des projets locaux :
- Création d’associations de parents pour soutenir et gérer l’UPP :
c’est le cas à Pierre-Bénite et Saint Genis-Laval ; à Lezennes, à Pau.
- Création d’une maison de la parentalité à Pau,
- Création d’une entreprise d’économie solidaire à Pau
- Création de fêtes de quartier à Saint Priest et à Paris
- Création d’un café des parents à Paris etc.

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