Vous êtes sur la page 1sur 4

Sous-titre 2 

: L’exécution de la peine aménagée


Le régime d’exécution de la peine est dominé par un objectif d’aménagement de la peine, tout doit
être mis en œuvre pour que l’aménagement soit réalisé. L’aménagement va être contenu/permanent
pendant tout le temps de l’exécution de la peine. Il existe 3 moments pour aménager la peine :

- Moment du prononcé de la peine (concerne en grande partie les peines correctionnelles, les
peines criminelles sont un peu laissées de côté)
- Moment de l’exécution de la peine. Ici subdivision :
o On peut avoir un aménagement dès le début, lors de la mise à exécution de la peine
o Cela peut intervenir plus tard pendant l’exécution de la peine (prise en compte de
l’évolution du condamné et de sa progression)
Le principe est celui de l’aménagement de la peine. Néanmoins, il y a une restriction => période
durant laquelle l’aménagement est interdit qui est la période de sureté.

Chapitre 1 : L’aménagement interdit, la période de


sureté
La période de sureté a été créée par la loi du 22 novembre 1978, objectif : empêcher l’aménagement
de la peine pendant une certaine période pour rapprocher la peine prononcée de la peine qui va être
exécutée dans les cas les plus graves.

Différents articles traitent de la période de sureté  : Art 132-23 CP qui explique que tout
aménagement est impossible durant cette période de sureté. Mais la majeure partie des dispositions
qui régissent cette question est issue des art 720-2 et s. CPP.

Débats autour de la période de sureté. On s’interroge sur sa nature juridique => peine, mesure de
sureté ? La doctrine a longtemps hésité sur ce point. Il semblerait aujourd’hui qu’une théorie
l’emporte : la période de sureté devrait être considérée comme une modalité d’exécution de la
peine. C’est ce qui ressort des récents décisions de la Cour De Cassation et du Conseil Constitutionnel
quant à la motivation de la période de sureté.

Mais certains considèrent que cette période de sureté qui empêche d’aménager n’est pas
souhaitable au regard des objectifs de personnalisation et d’individualisation de la peine. Pendant
cette période le condamné est coupé de toute perspective de réinsertion et de resocialisation. D’un
point de vue plus pragmatique, la période de sureté tend à aggraver la surpopulation carcérale.

 Ces critiques n’entament que peu le succès de la période de sureté. D’importantes périodes
de sureté sont prononcées par les juridictions qui y trouvent un moyen d’avoir une influence
sur la peine exécutée.
La période de sureté obéit à un ensemble de conditions qui montrent qu’elle est réservée aux cas les
plus graves (on est en matière criminelle). Exigence de motivation quand on veut dépasser la période
de sureté automatique => incite les juridictions à évaluer toutes les conséquences de cette décision.
I) Le calcul de la période de sureté
Principe : on déduit chaque année passée en détention de la durée de la période de sureté.
Hésitation quant au point de départ de la période de sureté.

Une solution ancienne retenait le moment où le détenu était placé en détention provisoire (car
détenu privé de sa liberté) mais problèmes = cela donnait lieu à deux points de départ distinct selon
que les personnes aient fait de la détention provisoire ou non + la période de sureté est une modalité
d’exécution de la peine donc la peine doit avoir été prononcée (pas le cas au moment de la Détention
Provisoire).

Aujourd’hui, la solution a été modifiée : on va considérer que le point de départ doit être situé au
moment où la peine est mise à exécution (arrêt de 2014 qui procède au revirement de JP). Ce même
arrêt a précisé qu’on devait déduire le temps passé en détention provisoire (aujourd’hui solution
reprise par art 716-4 CPP).

Quid lorsque plusieurs peines doivent être exécutées et qu’elles sont plusieurs à être assorties d’une
période de sureté ? CDC, Crim. 2016 : il faut différencier plusieurs hypothèses.

 Est-ce que les condamnations étaient, ou non, en concours ?


Lorsque le condamné exécute plusieurs peines qui ne sont pas en concours, il doit exécuter
cumulativement de manière continue toutes les périodes de sureté sans obtenir de
réduction.
En cas de condamnation en concours qui comportent toutes des périodes de sureté, la règle
est que la période totale de sureté à exécuter est réduite au maximum des 2/3 de ces
condamnations après leur réduction au maximum légal (exemple : X est condamné à 20 ans
pour meurtre assorti d’une période de sureté de 10 ans + condamné à 20 ans pour
empoisonnement assortis d’une période de sureté de 15 ans => 30 ans de réclusion
criminelle à exécuter, ici 20 ans = 2/3 de 30 ans donc on passe de 25 ans à 20 ans de peine de
sureté). Si peine à perpétuité prononcée, la période de sureté est de 22 ans maximum.
 Est-ce qu’il y a eu confusion des peines ?
S’il y a confusion de peines (= peine qui absorbe l’autre) la durée de la période de sureté à
exécuter est celle de la période de sureté la plus longue.

II) Le relèvement de la période de sureté


Art 720-4 et s. CP

A) Les conditions du relèvement de la période de sureté


Il faut que le condamné manifeste des gages sérieux de réadaptation sociale. Condition substantielle
commune à toutes les hypothèses de demandes de relèvement de la période de sureté. Que signifie
cette expression  ? La notion n’est pas définie par les textes. CDC, Crim. QPC, janvier 2019 : l’art 720-
4 CPP serait imprécis. La Cour De Cassation a refusé de transmettre la QPC au Conseil
Constitutionnel, elle justifie l’imprécision de l’article par la nécessité d’individualiser les peines
(donne une large marge de manœuvre au juge).

Il faut que le condamné montre des garanties de son futur amendement (projet professionnel, cours
en détention etc).
Condition supplémentaire => condition temporelle. Dans certains cas il va falloir que la peine ait déjà
été exécutée dans une partie suffisamment importante. Hypothèses dans lesquelles ce n’est pas
nécessaire mais le plus souvent il faut attendre un certain temps pour demander le relèvement de la
période de sureté.

 Dans l’hypothèse où la Cour d’assises prononce une peine de sureté de 30 ans, le Tribunal
d’application des peines ne peut réduire la période de sureté ou y mettre fin qu’après que le
condamné ait subi une période de détention d’au moins 20 ans.
 Le relèvement de la période de sureté ne pourra être accordée au condamné à perpétuité
que s’il a subi une incarcération au moins égale à 30 ans.
Question de la perpétuité réelle en France  : La JP de la CEDH tendrait plutôt à aller contre une
telle possibilité, il faudrait une perspective de sortie pour être conforme à l’art 3 CESDH. Mais
une peine de perpétuité peut être assortie d’une période de sureté perpétuelle dans certains
cas => on aboutirait donc à la véritable perpétuité. Quelques exemples connus comme Michel
Fourniret. Mais en réalité, il y a quand même une possibilité de sortie car à partir de 30ans de
réclusion criminelle, le condamné peut demander le relèvement de la période de sureté.
Toutefois, beaucoup de garanties encadrent cette hypothèse  : la décision ne peut être rendue
qu’après expertise d’un collège de trois experts médicaux qui va se prononcer sur l’état de
dangerosité du condamné.
 En matière de terrorisme, la loi de 2016 a créé l’art 720-5 CPP => hypothèse où la Cour
d’assises a décidé de porter la période de sureté à 30 ans. Le texte semble rendre possible la
réduction de la période de sureté mais pas le relèvement (on ne peut pas y mettre fin). De
plus, le texte multiplie les conditions pour que cette réduction de la période de sureté soit
possible.
A part ces 3 hypothèses, il n’y a pas de conditions temporelles dans les autres cas. Pas de minimum à
attendre mais le condamné doit présenter des gages sérieux de réadaptation sociale, ce qui prend un
certain temps (pour construire un projet).

Même si ces conditions sont réunies, il faut encore que la juridiction d’application des peines accorde
la réduction ou le relèvement.

B) La procédure
Juridiction compétente pour prononcer le relèvement ou la réduction de la période de sureté  : le
Tribunal d’application des peines (présente davantage de garanties que pour le juge unique).

Qui peut demander le relèvement de la demande de sureté  ? Le Tribunal d’application des peines
peut être saisi par le condamné lui-même, mais il peut aussi être saisi par le Juge d’application des
peines ou par le procureur de la République.

Dans quels cas accepte-t-on d’accorder une telle mesure  ? Les juridictions d’application des peines
ne sont jamais contraintes, elles bénéficient d’une marge d’appréciation pour chaque dossier,
surtout que les enjeux de ces décisions sont essentiels. Le législateur accentue sur ce point car il
précise que la réduction ou le relèvement de la période de sureté ne peuvent avoir lieu qu’à titre
exceptionnel. La Chambre criminelle va également dans ce sens. Cour De Cassation, Crim. 2015 : une
personne avait été condamnée en 2009 pour enlèvement, séquestration et assassinat. Perpétuité
avec période de sureté de 22 ans. Le condamné était âgé de 90 ans donc a demandé le relèvement
de la période de sureté. Cela a été refusé. La CDC rejette le pourvoi du détenu et confirme la décision
des juridictions du fond (c’est une appréciation de fait + le relèvement de la période de sureté doit
rester exceptionnelle donc le simple fait d’avoir un âge avancé ne justifie pas de réduire ou relever la
période de sureté).

Vous aimerez peut-être aussi