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IRDC
Odile RAGUIN Psychologue clinicienne, Praticienne de la psychothérapie Vittoz
Formation 2014 /2015
PSYCHOPATHOLOGIE
- LES NEVROSES -
SOMMAIRE
BIBLIOGRAPHIE ………………….…...…..……………………………. 41
2
CHAPITRE I
LA NEVROSE
A. Définition
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- la perception d'une conflictualité interne ;
- la conscience de « difficultés » sexuelles.
Les trois premiers sont souvent explicités et parfois publics, tandis que les autres demeurent
plus volontiers dissimulés. Ils s'auto alimentent pour constituer la personnalité du névrosé.
L'angoisse, même lorsqu'elle ne s'organise pas sous forme de névrose caractérisée, occupe une
place centrale dans sa personnalité. Elément essentiel de la vie psychique et de sa pathologie,
« peur sans objet » (Janet), elle se manifeste comme un état affectif marqué par un sentiment
d'insécurité et une extrême sensibilité à l'environnement se traduisant par un état émotionnel
d'intensité variable, dépendant pour une large part des caractéristiques propres à chaque
individu.
Plus grave que l'anxiété qui reste de nature essentiellement psychique, l'angoisse
s'accompagne de manifestations ou de sensations somatiques diverses, d'oppression ou de
« resserrement » (selon sa propre étymologie, angustus : étroit) : constrictions de l'œsophage,
spasmes intestinaux, tachycardie, sudation, anxiété … ; ces traits décrivent une disposition
quasi permanente de la personnalité, qui constitue la base de la névrose d'angoisse…
Chez le névrosé, cette angoisse est vivement combattue par les différents mécanismes de
défenses et par les symptômes chargés de la déplacer. La conscience de ses troubles et de leur
traitement psychique interne, qui caractérise le névrosé par comparaison avec le psychotique,
contribue souvent à renforcer cette angoisse et à rendre progressivement inopérants les
mécanismes construits pour la combattre.
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La notion de symptômes a été profondément transformée par la théorie psychanalytique à
partir de l'étude de l'hystérie. Elle y a découvert la marque du désir inconscient du sujet
tendant à trouver ainsi une voie d'expression déplacée. Chaque névrosé témoigne de la
présence de tels « signes », plus ou moins marqués, qui lui sont singuliers et qui
accompagnent ses conduites publiques ou strictement privées : petits rituels inoffensifs,
pensées insistantes dans telle ou telle situation, mises en scènes d'attitudes corporelles
systématisées, ton de la voix dans certaines circonstances, sont autant de petites « manies »
considérées parfois avec sympathie de la part des autres, parfois avec irritation ou hostilité.
Dans certains cas graves, ces habitudes sont très handicapantes et conduisent à une véritable
inhibition des conduites sociales. Parfois, les symptômes concernent quasi exclusivement les
processus psychiques, dans d'autres cas, les manifestations somatiques sont prévalentes,
parfois enfin c'est l'angoisse qui prévaut, soit pour elle-même, sans explication particulière,
soit en lien avec l'extérieur. Ces conduites et manifestations diverses ont comme
caractéristiques communes leur répétitivité et leur lien à l'angoisse. Elles échappent à la
volonté du sujet qui « ne peut s'en empêcher ». Elles mettent en outre en jeu
systématiquement la relation entre le sujet, son corps, ses pensées et
le monde extérieur. De ce point de vue, les symptômes constituent la charnière entre les
signes « sociaux » et les signes « intimes » de la névrose.
La combinaison de ces pôles permet une première représentation clinique de la névrose selon
l'importance relative qu'ils prennent pour le sujet :
- certains névrosés développent des symptômes témoignant d'une tension s'exerçant
prioritairement entre les processus de pensée et le monde environnant qui aboutit à une mise
en retrait apparente du corps. Leurs symptômes rendent compte soit d'un surinvestissement du
monde extérieur sur le processus autonome de pensée (pensées extérieures obsédantes, par
exemple), soit, à l'inverse, d'une tentative pour échapper à l'emprise de l'environnement sur
leurs pensées (rituels). Dans les deux cas, ces symptômes correspondent à ceux
traditionnellement décrits dans la névrose obsessionnelle
- d'autres névrosés mettent l'accent sur un accordage problématique entre leur vécu corporel et
l'environnement avec un désinvestissement corrélatif du processus de pensée. Les symptômes
témoignent de l'envahissement de l'extérieur sur le corps propre du sujet ou, à l'inverse, d'une
mise en avant « anormale » de la dimension corporelle dans le contact avec le monde
extérieur : ce sont les symptômes de l’ hystérie Ils constituent également le fonds récurrent de
la personnalité de tout névrosé, avec la trilogie « fatigue, troubles du sommeil, troubles
fonctionnels ». Ces derniers apparaissent en général à l'enfance (énurésie, bégaiements, tics,
rougissements) et sont susceptibles de devenir les symptômes névrotiques privilégiés de
l'adulte ;
- une troisième catégorie est marquée par un report sur le monde extérieur de ces difficultés
internes corps-psychisme, désignant donc, dans les objets de ce monde, la nature de leur
angoisse. Tels seront les symptômes phobiques
- d'autres enfin privilégieront des symptômes témoignant d'une régulation plus difficile au
plan interne entre corps et psychisme, au terme de laquelle le monde extérieur est disqualifié
dans son rôle de soutien. L’angoisse prévaut alors en tant que structure donnant sa forme
principale à la névrose
Ces symptômes témoignent d'un dérèglement des conditions de la subjectivité et, dans le
même temps, d'une issue compensatrice trouvée sur l'un de ses pôles interne (corps ou
psychisme) ou externe. Ils se différencient des symptômes du psychotique chez qui le
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rééquilibrage ne peut s'opérer à un niveau équivalent et entame la définition même de la
subjectivité.
b – Quelles fonctions assume pour le névrosé le symptôme ainsi défini ?
Sa dimension « mensongère » a été souvent soulignée : il trompe, et joue donc d'abord une
fonction de leurre. En montrant un élément stable du caractère ou de la présentation sociale du
névrosé, le symptôme participe d'un rééquilibrage psychique en offrant un substitut à
l'expression première de la conflictualité vécue par le sujet. Dans le même temps, il joue un
rôle de rappel et de témoin du trouble du sujet, celui-ci montrant par là-même qu'il ne se
leurre « pas tout à fait ». Il est donc un compromis entre l'expression du trouble, son
traitement et sa dissimulation. Ce faisant, il contribue à fixer le trouble dans la personnalité
du névrosé et devient un élément supplétif de la subjectivité, d'autant plus précieux qu'il
remplit convenablement cette triple fonction d'intermédiaire. La question du sens de ce
symptôme pour le névrosé se pose alors, à distinguer de sa fonction. Le fait que le symptôme
renseigne sur la personnalité profonde du sujet traverse toute l'histoire de la névrose : avec ses
symptômes, le névrosé fait état de son incapacité à « dire » autrement le trouble qui l'occupe.
Dans ce sens, la méthode proposée par Freud pour le traitement de la névrose - passant par les
mots librement échangés - correspond effectivement à un objectif cohérent avec la nature du
trouble et ses perspectives thérapeutiques.
C'est que le symptôme se présente en fin de compte comme l'expression même d'un trouble
des associations et le témoin d'un « raté » intervenu dans la chaîne associative. Le sens de ce
signal peut donc être interprété de deux manières : soit en prenant en compte la rupture
verbale ou tonale virtuelle, comme le concevaient Wundt ou Charcot en travaillant sur la
faiblesse opérationnelle de la chaîne et le déficit psychique qui en découle, ou bien comme le
propose Freud en considérant que cette rupture offre l'occasion au « vrai » sujet de s'exprimer.
Ainsi, donner du sens au symptôme engage à penser la psychologie du sujet de deux façons
complémentaires : l'une qui privilégie les modalités d'explication d'une « erreur de langage »
en termes de déficit de représentation symbolique dans renonciation, et l'autre qui postule la
manifestation à ce moment-là d'une « vérité » subjective. Se profilent, là, en filigrane les deux
grands axes de la psychologie clinique, celui qui va s'intéresser aux mécanismes de
représentation et à leur possible formalisation, et celui qui va se saisir de ce qui « échappe »
au sujet comme un lapsus, et qui informe donc l'interlocuteur sur ses desseins profonds. Freud
a tenté au début de son œuvre une synthèse de ces deux courants, sous forme d'une «
psychologie scientifique » Le sujet peut-il exprimer quelque chose qui lui soit préexistant ?
Peut-il se faire porteur d'une forme, d'une représentation qu'il n'ait pas lui-même créée ? La
laïcité de la science bute sur cette hypothèse à laquelle la psychanalyse a tenté de répondre en
postulant que la place de l'autre est inscrite, a, priori, dans le psychisme du sujet, et qu'elle
gouverne les productions de son inconscient. C'est dans ce sens qu'il faut comprendre
l'insistance freudienne à souligner que le sujet n'était pas « maître chez lui ». Par ses trois
modes d'expression privilégiés - le corps, la pensée et les relations à l'espace des autres -, le
symptôme du névrosé montre que quelque chose fait signe, qui lui appartient en propre et qui
lui est en même temps étranger. Son adéquation au monde est transformée. C'est le
déséquilibre de la subjectivité qui s'exprime de la sorte dans cette « aliénation contrôlée »
dont témoigne le symptôme.
Le symptôme assure la transition avec les trois signes « intimes ». Le mal-être va représenter
la traduction interne pour le sujet de la vanité relative de la solution symptomatique, la
conflictualité mettra en scène sa rébellion contre cette « fausse » solution, tandis que les
désordres de la sexualité vont témoigner de la spécificité de cette dimension subjective et de
son irréductibilité à une complète traduction symptomatique.
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Ces trois signes « intimes » expriment directement la souffrance du névrosé, qui ne doit
jamais être oubliée dans l'approche clinique de la névrose, quoi qu'il fasse pour la dissimuler.
« Mal dans sa peau », le névrosé rend compte en général de cet état flottant, éminemment
subjectif, qui le met en décalage par rapport à certaines situations sociales et le conduit
parfois à des attitudes interprétatives par rapport au monde extérieur.
Ce mal-être a directement à voir avec l'angoisse vécue par le sujet quand sa propre
représentation dans les situations sociales est en jeu (solitude, vie de couple, groupe ou foule).
À la différence de la dépression mélancolique l'isolement du névrosé est rarement vécu de
façon positive. Une culpabilité massive remplace l'absence de honte, l'impudeur et l'auto
dépréciation. Le mal-être du névrosé ne peut pas non plus être confondu avec l'expression
envahissante de l'angoisse psychotique, qui exclut la responsabilité du sujet dans sa survenue.
La sexualité est l'expérience cruciale de la névrose, et ce fait a été reconnue dès l'Antiquité,
avec le choix du terme « hystérie » pour en désigner l'une des formes principales. Elle
constitue un signe malaisé à circonscrire en raison du caractère ultime de cette expérience
intime, par construction peu communicable. Chez le névrosé, la sexualité parasite la
personnalité, qui ne peut plus trouver les aménagements habituels que le sujet normal est
contraint d'organiser avec elle. La question de la sexualité doit donc être prise d'abord dans sa
dimension clinique, à séparer nettement de la question étiologique qui a consacré la rupture de
la théorie psychanalytique avec les théories classiques de la névrose. Rares sont ceux qui
contestent en effet aujourd'hui, indépendamment de toute affiliation théorique, la réalité des
anomalies de la conduite sexuelle qui caractérisent le névrosé. Ces anomalies s'expriment en
règle générale par une forme d'inhibition ; elles peuvent cependant par formation réactionnelle
se manifester par l'excès. Dans les deux cas, c'est l'équilibre du sujet entre ses manifestations
pulsionnelles internes et leur traduction dans l'échange avec le partenaire qui est en jeu. Il en
résulte une pathologie du désir sexuel et une confrontation difficile avec l'acte sexuel
proprement dit que le névrosé peut cependant contourner de différentes manières.
L'inhibition du désir sexuel est marquée par l'impuissance chez l'homme et par la frigidité
chez la femme. Rarement totale, l'impuissance masculine se manifeste le plus souvent par
périodes. Elle est à rapprocher des troubles de l'éjaculation, en particulier de l’éjaculation
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précoce. La frigidité féminine est plus complexe à repérer, pour d'évidentes raisons
anatomiques, qui sont cependant loin d'en résumer la question. Nettement plus fréquente que
l'impuissance masculine, elle s'en distingue également par une plus grande variabilité. Elle est
aussi difficilement séparable des données culturelles et sociales dans lesquelles s'inscrit la
féminité, dont elle rend compte de façon directe.
L'excès fantasmatique peut également représenter un signe névrotique, lorsque la satisfaction
sexuelle avec le partenaire ne peut être obtenue qu'au prix de la construction par le sujet de
scénarios impliquant d'autres personnes. Ces conduites assurent la transition de la
problématique névrotique et de la perversion (fétichisme) . La névrose phobique puise là sa
complexité et son intérêt. La difficulté de confrontation à l'acte sexuel est difficile à établir,
voire à reconnaître par le sujet névrosé lui-même, s'agissant de pratiques dont le caractère
intime est antagonique avec la fixation de normes sociales. Pour autant, on rapprochera trois
types de conduites qui méritent dans chaque cas d'être examinées sous cet angle névrotique :
la masturbation, l'homosexualité et les symptômes phobiques.
Face à la difficile rencontre sexuelle de l'autre, ces conduites proposent trois choix alternatifs :
la rencontre sexuelle avec soi-même, la rencontre sexuelle avec le même, et la non-rencontre
avec l'autre.
La masturbation n'est considérée comme un symptôme névrotique spécifique que dans
l'excès. Elle est cependant très présente dans tous les tableaux névrotiques, où elle apparaît à
la fois comme une alternative à la rencontre et comme une conduite de rassurement.
La question de l'homosexualité est plus complexe, et son caractère ou non névrotique n'est pas
seulement lié à la culpabilité qui peut lui être attachée. Assumer cette homosexualité pour le
sujet peut en effet représenter une véritable stratégie psychique d'évitement de l'autre sexe,
plus que l'expression de l'orientation particulière de son désir. Le choix étant cependant
radical, les rationalisations pourront conduire le sujet à s'y attacher avec force et à quitter un
registre initial proprement névrotique pour celui de la perversion.
Les symptômes phobiques constituent eux aussi très fréquemment des stratégies névrotiques
d'évitement de la rencontre avec l'autre à tonalité fortement sexuelle. Précieux pour le
névrosé, souvent peu visibles par le monde extérieur, ils lui offrent la possibilité d'un bon
compromis en préservant une « zone de vérité » de son symptôme.
L'importance des troubles sexuels dans la clinique de la névrose ne doit pas être confondue
avec leur revendication explicite. S'il en souffre indubitablement, le névrosé est peu enclin à
en faire part, sinon de façon indirecte, rationalisée, et presque toujours « gênée ». La crudité
d'expression est plutôt le signe d'une déstructuration plus archaïque (schizophrénie ou
mélancolie), ou d'une pathologie du lien de type pervers si la provocation l'emporte.
Chacun peut aisément se reconnaître dans l'ensemble des signes ainsi décrits, et pourtant tout
le monde n'est pas névrosé...
Comment alors opérer une distinction, toujours malaisée, entre névrose et normalité ?
Il s'agira d'abord d'une question de degré et de circonstances. Une mauvaise humeur, même
tenace, n'est pas l'équivalent d'une névrose ; un « état d'âme » adolescent non plus ; de même
qu'une fragilité psychique faisant suite à un licenciement ou une transformation de caractère
liée à la ménopause : il leur manque ce contexte global qui réserve la désignation de la
névrose à un état pathologique chronique de la personnalité.
Il s'agit ensuite d'une construction subjective de la personnalité : le névrosé est « sujet de sa
névrose ». Il y « tient » parce qu'elle constitue une partie essentielle de lui-même. S'en défaire
lui coûte, parce qu'elle lui a permis de construire une organisation relativement stable qui a
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rééquilibré son rapport à l'autre et à lui-même. Elle lui apporte des « bénéfices secondaires »
qui peuvent compenser la souffrance.
Il s'agit enfin d'une reconnaissance de sa souffrance psychique par le sujet lui-même. Le
névrosé ressent subjectivement que l'ensemble des mécanismes autour desquels s'est
construite sa personnalité sont insuffisants pour mettre à l'écart sa souffrance psychique. C'est
dans l'articulation entre souffrance et subjectivité que se loge l'essentiel de la problématique
névrotique ; ce qui pose la question de la reconnaissance de la névrose chez les enfants, dont
la subjectivité est encore en développement.
C. Le diagnostic de la névrose
Trois éléments positifs sont amenés par le sujet : un sujet adulte, venant consulter sur
l'instigation ou en lien avec son entourage, pour des problèmes répétitifs et anciens mettant en
jeu sa relation aux autres ; la présence de symptômes spécifiques, corporels ou psychiques,
qui demeurent mystérieux dans leur nature, et dont le sujet considère qu'il ne peut se passer ;
des troubles de la sexualité.
Ces éléments demandent à être validés dans les entretiens par la perception que le clinicien se
fait de la situation qui lui est apportée : le contact rend compte de la qualité de la relation aux
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autres et de ses difficultés ; la description des symptômes témoigne de l'angoisse qui leur est
liée ; le tact avec lequel sont abordées les difficultés sexuelles rend compte de leur caractère
névrotique.
Par ailleurs, la souffrance du sujet doit être perceptible, ainsi que sa reconnaissance du
caractère singulier des symptômes : le sujet montre de façon crédible que la situation est pour
lui difficile. Sa plainte est plus souffrante que revendicative.
La sensibilité à une approche psychothérapeutique : la relation établie avec le sujet évolue
dans le temps, montrant l'effet de l'échange entrepris avec lui à propos de sa demande.
Ce diagnostic positif doit être systématiquement conduit en parallèle avec la recherche
d'éléments d'exclusion, de suspension ou d'interrogation.
Au plan psychique, deux critères d'exclusion simple avec la psychose et la maladie maniaco-
dépressive : le délire ; les variations importantes et immotivées de l'humeur.
Au plan somatique, un critère de suspension : toute pathologie somatique grave doit conduire
à une mise en suspens du diagnostic de névrose compte tenu des effets psychiques
probablement associés.
Dans l'échange enfin, un critère d'interrogation sur le champ des perversions : la complaisance
dans l'expression des symptômes, en particulier sexuels, et la stabilité émotionnelle au cours
de l'entretien.
c – Remarques complémentaires
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souffrance physique caractérisée et brutale...). Ces névroses traumatiques témoignent d'une
impossibilité d'adaptation du sujet à la situation catastrophique. Bien que leur clinique
manque d'unité d'ensemble, elles présentent un grand intérêt au plan psychopathologique, en
montrant le lien qu'opère la névrose entre le sujet, son corps et l'environnement. Elles sont
marquées en général par un épisode d'importante anxiété, suivi par un état d'asthénie physique
et psychique, pouvant se poursuivre par l'installation de symptômes plus durables de nature
phobique, hystérique ou plus exceptionnellement obsessionnelle.
On a beaucoup évoqué à propos de ces névroses la simulation auxquelles elles pouvaient
donner lieu, par l'intermédiaire des phénomènes de contagion psychique. À partir de là,
certains ont voulu voir le soubassement d'un modèle général de la névrose, plus fondé sur la
suggestion que sur un mécanisme pathologique du moi dépendant de l'histoire du sujet. En
fait, la névrose traumatique démontre la limite de la notion de genèse psycho-sexuelle
infantile dans la construction de la névrose pour le sujet : lorsque l'équilibre est brutalement
rompu avec son histoire, le sujet est susceptible d'opter pour une configuration
psychopathologique qui lui dessine une « autre réalité » tout en restant en contact avec son
environnement, au prix de la souffrance névrotique et du symptôme.
La défense est « un ensemble d'opérations dont la finalité est de réduire, de supprimer toute
modification susceptible de mettre en danger l'intégrité et la constance de l'individu
biopsychologique. Dans la mesure où le moi se constitue comme instance qui incarne
cette constance et qui cherche à la maintenir, il peut être décrit comme l’enjeu et l’agent de
ces opérations » . Cette défense, dans la théorie freudienne, renvoie à la pulsion, source
de l'excitation interne. Elle se mobilise contre ses effets déplaisants pour le moi par des
mécanismes de défense plus ou moins intégrés à celui-ci. C'est à partir de ses études sur
l'hystérie en 1894 que Freud élabore un modèle du psychisme attribuant une part déterminante
à ces mécanismes de défense, qui permettent de justifier théoriquement l'antagonisme entre le
moi et la pulsion.
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Ces mécanismes de défense se répartissent en deux grandes catégories, selon leur nature, leur
intensité, et le niveau de dessaisissement ou de transformation que le moi accepte.
Ils sont en effet dans le même temps des mécanismes de construction du moi.
Les mécanismes « tactiques » visent un objectif protecteur du moi au prix de négociations
avec les autres instances du sujet, avec son corps ou avec le monde extérieur : le refoulement,
le déplacement, la somatisation, l’extériorisation, l'isolation, l'annulation et les formations
réactionnelles.
Les mécanismes « stratégiques » visent à transformer le moi afin de garantir sa permanence.
Ils se répartissent eux-mêmes en deux catégories : ceux qui jouent plutôt sur une réévaluation
de la place du moi vis-à-vis du monde extérieur (l'identification et la différenciation) qui
sont les deux grandes stratégies de la névrose, et ceux qui sacrifient l'unité du moi pour y
construire un substitut au monde extérieur déplaisant (le clivage, le déni et la projection) qui
relèvent des pathologies du narcissisme et de la psychose. Les troubles psychosomatiques
constituent une stratégie frontière avec les pathologies somatiques.
Le symptôme représente pour le névrosé l'aboutissement de ces choix stratégiques et
tactiques.
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Le corps constitue toujours un recours pour le névrosé. La conversion qualifie le « saut du
psychique dans l'innervation somatique », particulièrement spectaculaire dans l'hystérie.
Transposition du conflit psychique dans des symptômes somatiques, moteurs ou sensitifs, elle
offre une alternative au déplacement en utilisant le corps comme support des représentations.
Celui-ci fonctionne alors de façon symbolique, conformément à la mission qui lui a été
assignée, en « trompant » au besoin les lois anatomiques, à la différence des troubles
psychosomatiques
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en plus, d'autre part au plan énergétique parce que les dispositifs mis en œuvre perdent de leur
efficacité au fur et à mesure de leur emploi, leur automaticité risquant de les faire apparaître
comme des pensées extérieures à combattre. Ainsi se construit une architecture complexe de
menaces et de contre-menaces, d'anticipations et d'évaluations, garante de la performance
contre le risque. Tel sera le choix de l'obsessionnel. Une alternative radicale est proposée par
l'hystérie, avec l'identification.
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représentatives en fixant ce que la pensée ne pourrait que suggérer de façon fugace et
transitoire : le déplacement auquel il donne lieu est assigné à résidence dans l'« autre réalité »
somatique. Dans la seconde option, le sujet décide de s'affronter aux représentations issues de
sa perception et aux associations liées par un effort portant sur les chaînes associatives mêmes
pour les dériver, les troubler ou les transformer. Ce choix de la névrose obsessionnelle est
plus complexe car il accepte d'opposer la pensée à la pensée, au risque de multiplier les
mécanismes de défense.
Ce choix pour l'une des stratégies de défense dépend de trois raisons combinées :
- parce que le sujet ne peut faire autrement pour des raisons internes : la complaisance
somatique (Freud) rend compte de ses prédispositions somatiques. La faiblesse
constitutionnelle (Janet) peut expliquer le choix de la névrose obsessionnelle, qui ne réussit
pas à faire déboucher la pensée sur l'acte. Le genre du sujet, enfin, n'est sans doute pas sans
importance ;
- parce qu'il ne peut faire autrement pour des raisons extérieures, en raison de la force relative
de l'environnement ;
- parce qu'enfin il souhaite prendre cette option, en raison, pour l'essentiel, de ses expériences
passées, heureuses ou malheureuses avec le monde.
Les deux derniers motifs rejoignent une intuition freudienne concernant l’étiologie des
névroses reliée à sa théorie de la séduction avant qu'il ne déclare l'abandonner. Selon celle-ci,
la névrose résulterait d'une séduction sexuelle opérée sur le jeune enfant par un adulte plus
âgé : la participation passive de l'enfant à cette scène le conduirait à l'hystérie, tandis que sa
jouissance active produirait au contraire une structure obsessionnelle. Reprise à la lumière du
schéma proposé, cette hypothèse se révèle intéressante, car une stratégie d'identification
puisant une part de ses ressources sur le corps paraît compatible avec l'élaboration de
fantasmes dans la relation à l'autre corroborant cet « accord » obtenu sous le sceau de la
contrainte. Ce « roman de la séduction » serait le prototype de l'identification à l'agresseur
définie par Anna Freud. Réciproquement, la problématique obsessionnelle, marquée par les
effets de la répétition, joue pour l'essentiel sur la contrainte des mécanismes de pensée
et la construction d'une distance avec l'autre. Le sujet, dans la liberté de pensée que lui offre le
fantasme, rêve indéfiniment d'une autre scène où il aurait pris un plaisir actif. Dans les deux
cas, une formation réactionnelle compense les effets des choix initiaux de défense.
Les mécanismes de défense se présentent donc comme un descripteur fidèle des théories et de
la clinique des névroses, tant pour ce qui fait l'unité de cette forme pathologique que pour leur
organisation dans les deux formes cliniques élaborées de la névrose hystérique et de la
névrose obsessionnelle. Ces deux grandes options ne sont pas strictement parallèles dans la
mesure où une option psychique n'est pas comparable à une option somatique, pas plus qu'une
option de différenciation du monde extérieur n'est comparable à une option identificatoire :
ces choix sont complexes, interconnectés, et s'apprécient à différents niveaux d'analyse. Ils se
situent de ce fait aux frontières de la normalité et des problématiques psychopathologiques
plus graves dans le champ des psychoses ou des pathologies du narcissisme. Les deux grandes
stratégies de différenciation et d'identification mettent en évidence les proximités créées par
les mécanismes de défense dans la psychopathologie. Partant de la normalité, le sujet
s'organise selon une option qui déséquilibre son rapport à la pensée, au corps ou au monde. Si
le névrosé entre en conflit avec ce dernier, il ne lui délègue jamais l'intégralité de sa personne,
comme le font le paranoïaque avec la projection, l'autiste avec le rejet, ou le schizophrène
avec le concernement.
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En revanche, à la différence du sujet normal, il joue en permanence du dualisme corps/psyché
pour répondre aux sollicitations d'un monde extérieur qu'il perçoit dans son hostilité
potentielle plus que dans sa différence. Ce schéma (cf. p. 65) montre l'unité de ce champ
névrotique, organisé par la névrose obsessionnelle et la névrose hystérique, marquées
respectivement par une prévalence de la pensée et du corps. Les deux autres grandes
problématiques névrotiques - névrose d'angoisse et névrose phobique
- sont caractérisées par l'absence de mécanismes de défense organisés, et l'absence
consécutive de « choix » stratégique marqué autre que l'indifférenciation. L'orientation vers le
monde de la névrose phobique lui confère une grande proximité avec les problématiques non
névrotiques, en particulier les pathologies du narcissisme.
Il montre également la place des névroses sur les deux axes fondamentaux de la
psychopathologie : l'axe névrose obsessionnelle/perversion/psychose paranoïaque orienté par
les stratégies de différenciation et polarisé par le rejet, et l'axe hystérie/pathologies
somatiques/schizophrénie formé autour des stratégies d'identification et polarisé par la fusion.
La névrose, dans ce contexte, apparaît comme un outil privilégié de transformation psychique
de la relation du sujet au monde, et comme un témoin de celle-ci.
La névrose se présente donc comme un trouble très structuré au plan clinique par
l'unité que lui confèrent les symptômes, les mécanismes de défense et les stratégies qui les
sous-tendent. Ceci étant posé, la névrose adopte chez chaque sujet une forme particulière qui
témoigne des dispositions, des conflits et des choix qui ont structuré cette personnalité. Le
tableau de la névrose se répartit ainsi selon les quatre problématiques qui regroupent les
grandes « solutions » disponibles pour le névrosé, fondées sur ses choix inconscients :
- la première modalité, la plus simple et la moins structurée, consiste à s'abandonner à son
angoisse, sans organiser de mécanisme de défense spécifique. C'est la névrose d'angoisse ;
la seconde essaie de fixer l'angoisse sur le monde extérieur grâce au déplacement : c'est la
névrose phobique.
Les deux autres modalités tentent d'intérioriser le conflit et l'angoisse sous-jacente grâce au
refoulement :
- la névrose hystérique choisit une stratégie d'identification au monde extérieur appuyée de
façon non exclusive sur le corps ;
- la névrose obsessionnelle, la plus structurée des névroses, opte pour une stratégie de
différenciation appuyée de façon non exclusive sur la pensée.
A. La névrose d’angoisse
Présente dans toute névrose, l'angoisse devient dans la névrose d'angoisse une stratégie
stable et efficace de traitement du conflit : celui-ci est admis sans défense par le sujet, qui
accepte l'invasion incontrôlée de l'angoisse. Il n'est ni passif ni déprimé, il la « névrotise », en
particulier dans le mécanisme de l’attente anxieuse dans laquelle il « attend » la crise qui va
l'assaillir, aux aguets des signaux réels ou imaginaires transmis par son corps : rythme
cardiaque, bouffées de sueur, vertiges...La névrose d'angoisse relève dans ce sens d'une
stratégie d'indifférenciation dans laquelle le sujet accepte de mettre son être au diapason du
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monde et de ses risques. Son diagnostic est délicat en raison de l'anticipation de ses troubles
par le sujet. Les examens somatiques de contrôle peuvent renforcer son angoisse.
L'étiologie de la névrose d'angoisse est une question cruciale de la théorie des névroses : la
théorie freudienne désigne le sexuel comme cause spécifique de l'angoisse, tout en
considérant déterminant le terrain génétique. La clinique montre la pertinence de cette double
hypothèse, car la névrose d'angoisse se rencontre chaque fois que le sujet ne peut
répondre psychiquement à un traumatisme actuel de nature sexuelle (viol, impuissance
soudaine, privation sexuelle imposée...
Son évolution s'opère vers des symptômes plus élaborés ou un glissement hors du champ
névrotique. Elle est aggravée par les stimulations extérieures qui ne prennent pas sens
directement pour le sujet (stress, surmenage, excitants...), et peut s'orienter vers une forme
dépressive ou mélancolique si le mécanisme de l'attente anxieuse ne joue plus son rôle
moteur. Toxicomanie et alcoolisme peuvent remplacer l'anxiété liée à la séparation par une
addiction à un objet plus « fiable ». L'évolution vers une forme névrotique plus structurée
s'opère par extériorisation de la source de l'angoisse (névrose phobique), ou par déplacement
vers des mécanismes de défense plus élaborés (névrose hystérique ou obsessionnelle).
La thérapeutique de la névrose d'angoisse associe en général chimiothérapie (anxiolytiques) et
psychothérapies de soutien. L'évaluation des traitements est rendue difficile par la place
qu'occupe l'angoisse dans la vie psychique du sujet et la stabilité de l'aménagement qu'il offre
à sa personnalité.
B. La névrose phobique
Peur spécifique et intense déclenchée par la présence d'un objet ou d'une situation qui
ne sont pas en eux-mêmes objectivement dangereux, la phobie est d'abord, comme l'angoisse,
un symptôme dans la plupart des névroses. Dans la névrose phobique, le sujet focalise son
angoisse sur des personnes, des situations ou des actes qui deviennent l'objet d'une terreur
paralysante, incoercible et incontrôlable. Elle était qualifiée par Freud d'hystérie d'angoisse -
par opposition avec l'hystérie de conversion - pour marquer le lien entre les deux
problématiques.
La névrose phobique assure une transition avec les psychoses (lorsque le sujet ne reconnaît
plus l'irrationnalité de ses pensées) et les pathologies du narcissisme (perversion, addictions,
psychopathies). Elle relève d'une stratégie d'indifférenciation sélective : le sujet désigne dans
le monde extérieur un objet ou une situation spécifiques, porteurs de son angoisse.
Ce mécanisme simple et efficace lui permet de préserver une mémoire permanente de son
trouble, incarnée par l'objet phobique qui matérialise l'angoisse et la circonscrit. Spécifiques à
chaque sujet, les phobies privilégient le thème spatial et l'activité visuelle (agoraphobie,
claustrophobie, vision effrayante d'une chose, peur d'être vu d'une certaine manière, phobies
sociales...).
Le diagnostic de névrose phobique suppose l'existence de phobies, la détermination de
conduites phobiques pour le sujet (évitement et réassurance, notamment par l'objet
contraphobique), et un ensemble de traits de caractère (anxiété, inhibition notamment
sexuelle, immaturité). Au plan étiologique, la théorie analytique met l'accent sur une
régression à des pulsions partielles investies lors des apprentissages de l'enfant. Les théories
comportementales soulignent l'impuissance du sujet à dépasser un apprentissage erroné. L'une
et l'autre reconnaissent les bénéfices secondaires que tire le sujet de cette situation. Elles
relèvent la relation que la phobie entretient avec le processus même du savoir La névrose
phobique est souvent stable au prix de conduites parasites dissimulées, mais elle peut évoluer
vers des formes plus structurées. La névrose obsessionnelle permet la fixation de rituels de
17
rassurement, qui perdent alors leur caractère énigmatique pour devenir le support d'une
régression plus archaïque à des conduites répétitives. L'hystérie dilue au contraire les phobies
en généralisant les conduites contraphobiques dans le tableau hystérophobique marqué
par l'identification. Certaines névroses phobiques centrées sur la perception corporelle sont
susceptibles d'évoluer vers la psychose.
18
CHAPITRE II
LA NEVROSE PHOBIQUE
1. GENERALITES
Tout d’abord, un bref rappel pour situer la névrose dans la pathologie du point de vue
de l’évolution psychologique.
Pour la névrose, après une période d'évolution normale plus longue, c'est le conflit oedipien
non résolu qui provoque la névrose.
Le conflit chez le garçon, par exemple, découle de la rivalité oedipienne avec le père dans le
projet de conquête de la mère ; chez la fille, c'est la rivalité avec la mère et la conquête du
père.
Ce projet est abandonné en fonction des sentiments tendres envers le père et des craintes de
mesures de rétorsion de ce dernier, qui prend la forme de l'angoisse de castration.
L'interdiction du père est intériorisée, on dit que : le "Surmoi est 1'héritier du Complexe
d'Oedipe" ; en même temps, l’identification au père projette pour plus tard, la possession
d'une femme.
Le conflit entre le "Surmoi " (l'interdit, la loi) et les pulsions sexuelles (le « ça ») est la trame
sur laquelle se construit la névrose.
Le refoulement, souvent dépassé, laisse place au symptôme qui est une formation de
compromis entre la pulsion et la défense. Le moi du névrotique est faible.
On observe :
19
- La névrose obsessionnelle, avec intellectualisation.
E. LA PHOBIE
La phobie est un symptôme qui fait lien entre l'angoisse et les symptômes plus
organisés des névroses hystériques et obsessionnelles.
C'est une peur spécifique et intense déclenchée par la présence d'un objet ou d'une
situation qui ne sont pas en eux-mêmes dangereux,
F. LE PETIT HANS
C'est la cure du petit Hans qui a permis a Freud de voir les principales caractéristiques
de la névrose phobique.
Ce garçon de cinq ans avait peur de voir tomber les chevaux dans la rue et
de se faire mordre par un cheval… La peur de la castration s'était substituée à la
peur de perdre l'amour de sa mère, qui est une angoisse plus profonde.
En ce qui concerne la névrose, Freud parlait aussi de terrain et de facteur héréditaire ;
le Professeur Baruk (Professeur de psychiatrie), lui, parle de troubles neurovégétatifs.
Une étude, portant sur 500 sujets, publiée dans « la Revue Américaine Science »
établissait une corrélation entre la tendance au stress, la névrose et une anomalie dans
le patrimoine génétique.
20
H. LE DIAGNOSTIC DE LA NEVROSE PHOBIQUE
a – Comme dans toutes les névroses, le sujet, victime d’une névrose phobique est un anxieux
Hypersensible aux frustrations et toujours en attente de souffrir, il est habituel qu'il traverse
une période de névrose d’angoisse non structurée avant de s'organiser dans la névrose
phobique. C'est souvent après une grande crise d'angoisse que s'organise la phobie comme
barrage de protection. Alors intervient la projection.
L’état constant d’alerte : Il guette avec une situation aiguë ses manifestations psychologiques
(sentiments ambigus, pensées floues…).
Il faut qu’il puisse tout expliquer par la rationalisation.
Il est aussi en état d’alerte vis-à-vis du monde extérieur, il contrôle le monde extérieur par la
vue, il craint d’être surpris, il sursaute au moindre bruit.
Le parti pris de la fuite : Dès qu’il y a danger, il lui faut fuir ; cette fuite s’exprime soit par
une attitude passive, inhibition soit par un comportement de défi, fuite en avant dans
l’activisme.
21
La dépression peut survenir dans les phobies de situation lorsque les désirs du sujet ne
peuvent être assouvis en raison des évitements restrictifs ou bien dans les phobies
d'impulsion, en raison de la peur du passage à l'acte.
e – Le diagnostic différentiel
Il peut y avoir une phobie résultant d'une situation particulièrement traumatisante (comme
dans les névroses de guerre).
Pour la névrose phobique, l'existence de phobies constitue le critère majeur.
Dans la névrose d'angoisse, on remarque l'importance de l'anxiété de fond et des
manifestations psychofonctionnelles. Les craintes sont variables, peu organisées, avec peu de
conduites d'évitement.
La phobie, plus ou moins cachée, se retrouve dans les autres névroses où leurs symptômes
dominent :
- Le somatique, pour l'hystérie
- L'intellectualisation, pour la névrose obsessionnelle
Le phobique veut qu'on l'aide, l'obsessionnel ne pense pas qu'on puisse l'aider ( l'asthénie est
plus importante, le contact assez froid).
22
- Les phobies d'impulsion homicides
o la phobie d'étrangler son enfant, chez les femmes
o la phobie des armes dans la peur de tuer autrui : la sécurité de
l'environnement, de la maison et surtout d'une personne chère peut être
suffisante… Le sujet éprouve une peur panique d'être poussé à perpétuer un
acte agressif… Le facteur déclenchant n'est plus extérieur mais intérieur
Dans les névroses, les phobies d'impulsion, témoignent d'une aggravation. Elles marquent
souvent le passage vers la névrose obsessionnelle.
Elles ne sont pas rares chez les psychotiques où elles s'associent à des conduites impulsives.
A l'observation, existe le cas de telles phobies, à la suite d'une gastro-entérite : le Professeur
BARUK, dans l'un de ses ouvrages, parle de psychose induite par des colibacilloses
intestinales.
23
CHAPITRE III
LA NEVROSE D’ANGOISSE
1. DEFINITION
C'est un état affectif marqué par un sentiment d'insécurité ainsi qu'une grande
sensibilité à l'environnement, se traduisant par un état émotionnel plus ou moins intense.
Elle est différente de la peur qui, elle, est liée à un objet.
Selon JANET, c'est une "peur sans objet" .
Selon MENECHAL, l'angoisse est la marque du conflit entre deux excitations contraires :
l'une liée à la toute puissance psychique de la pensée de la mort et l'autre relevant de la
contrainte vitale du sexuel.
L'angoisse est un facteur de régression. Elle nous pousse à renforcer les défenses et contribue
à aggraver les difficultés du fonctionnement psychique .
2. L’ORIGINE DE L’ANGOISSE
Elle se ramène a quatre types de situations que nous avons tous connues dans le passé :
- L'angoisse morale et l'angoisse sociale. C'est la peur d'être rejeté par les autres,
exclu du groupe. C'est l'angoisse du Surmoi. La peur de ne pas répondre aux exigences
culturelles et sociales des parents et du groupe.
24
Lorsque les exigences du Surmoi sont excessives, l'angoisse morale est très vive.
L'anxiété et la névrose actuelle apparaît (névrose d'angoisse). A l'inverse, l'absence d'exigence
morale, ravive les angoisses plus anciennes par défaut d'idéal du moi.
3. L’ANGOISSE ET L’ANXIETE
L'angoisse et l'anxiété sont au premier plan dans la névrose d'angoisse, tant au niveau
du vécu que du discours du sujet.
L’anxiété dès qu'elle est intense est vécue sur le double versant :
- psychique, avec un état de tension douloureuse
- somatique, sous la forme de manifestations psychofonctionnelles, le plus souvent
cardio-respiratoire.
Cette névrose privilégie la sensation et l'expression de l'angoisse. Celle-ci pouvant être due à
toute situation extérieure ou intérieure du sujet.
« Il y a une anxiété massive, sans objet précis » - MENECHAL -
25
1 – Le caractère particulier
Dès l'enfance, il y a timidité, inquiétude, anxiété avec besoin de protection et de
réassurance de la part de1'entourage. Leur vie se passe sur fond d'anxiété.
Toute frustration ou contrariété est ressentie comme un traumatisme. Toute frustration de
l'existence (échec, séparation, maladie, deuil, vieillesse…) étant mal supportée, peut
provoquer soit des crises aiguës d'anxiété soit des réactions dépressives.
L'importance de la réaction est fonction non pas de la gravité de l'événement mais de sa
signification symbolique.
Le concept « d’état de panique », dans le DMS III-R, tend à remplacer, ce que l'on
nommait avant "crise d'angoisse".
La névrose d'angoisse n'est ni un état stable, ni un état durable. Elle peut s'améliorer et guérir
sous l'influence d'un meilleur champ relationnel, de gratifications ou d’un traitement.
Souvent, elle se complique et débouche sur des états plus structurés et plus stables, plutôt
névrotiques, parfois psychotiques.
Si l'angoisse est renforcée par des frustrations ou des exigences pulsionnelles, le moi
recourt à des défenses diverses :
- la conversion somatique (hystérie de conversion)
- le dessèchement intellectuel de la vie mentale (névrose obsessionnelle)
- le déplacement et la condensation (névrose phobique).
Il y a souvent recours à des médicaments ou à l'alcool.
26
Si les défenses névrotiques sont insuffisantes, il y a décompensation psychotique de
type :
- dissociation chez le jeune
- mélancolique chez le sujet âgé
- paranoïaque chez l'adulte.
7. LE DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL
1 – L’Hystérie de conversion
L'hystérique se débarrasse de son angoisse dans un symptôme fixe et stable, purement
somatique. Alors que dans la névrose d'angoisse, ils sont plus labiles et il y a un contexte
émotif.
2 – La névrose phobique
L'anxieux a de multiples craintes mais ce ne sont pas des phobies. Elles ne sont ni
systématisées, ni permanentes, ni stables.
Les thèmes sont particuliers : peur de la maladie, peur de devenir fou, peur de mourir…
1 – La mélancolie anxieuse
Dans la mélancolie anxieuse on a une crise aiguë d'anxiété ; par contre, s'y ajoute des
délires de dépréciation de soi-même et des autres, une douleur morale intense et des
antécédents.
2 – La schizophrénie
Chez les schizophrènes, aux crises aiguës se rajoutent toujours du négativisme, de
l'opposition, de la catatonie, de l'hypochondrie sur un mode paranoïde.
8. LE TRAITEMENT
27
CHAPITRE IV
LA NEVROSE HYSTERIQUE
1. INTRODUCTION
28
donné d'autre issue que de le penser indispensable. L'autre, le monde extérieur, est ainsi
toujours susceptible d'être assimilé fantasmatiquement, ce qui constitue une « solution » à la
gestion de l'altérité, solution pathologique qui renforce la névrose puisqu'elle interdit la prise
en considération de la différence. Principale source du narcissisme de l'hystérique,
l'identification est le gage de sa fragilité psychique lorsque l'autre se refuse : la rupture de la
réalité, le quasi-délire, la « jalousie » typique de l'hystérique en sont le prix, ou bien la toute-
puissance psychique agressive du caractère hystérique phallique, jamais à l'abri des
symptômes somatiques.
L'identification rend parfois floues les frontières de l'hystérie avec les autres
problématiques dont elle épouse les formes, le cas typique des maladies somatiques étant
particulièrement complexe à démêler. Dans le champ des névroses, bien que la différence soit
en principe tranchée avec la névrose obsessionnelle, de nombreuses zones intermédiaires les
réunissent dans leur mode de relation au monde ou au corps (hypocondrie, érotisation de la
pensée, pseudo-rituels, phobies...). Les pathologies addictives (alcoolisme, toxicomanies...)
s'en rapprochent, en lien avec le pôle oral. Anorexie et troubles des conduites alimentaires
renvoient en général à une pathologie identitaire masquée derrière les symptômes de
l'hystérie. Les frontières sont également nombreuses avec les psychoses, notamment la
schizophrénie. La catégorie nouvellement créée des personnalités multiples dérive
directement des mécanismes identificatoires de l'hystérie.
2. HISTORIQUE
29
BERNHEIM à Nancy, privilégie les causes psychiques et la suggestibilité de
l'hystérique.
CHARCOT et BERNHEIM pratiquent l'hypnose.
FREUD rencontrera les deux et s' inspirera de ces deux modèles pour les dépasser.
Il retournera à Vienne, pour écrire avec BREUER, à parti r du cas d'Anna O., les
"Etudes sur l'hystérie".
Ce sont les patients hystériques qui ont ouvert à FREUD les voies de la
psychanalyse. Il s'est inspiré de la méthode cathartique dérivée de l'hypnose, mise
au point par BREUER avec Anna O., patiente de Breuer, puis de Freud.
30
C'est au cours de ces états de moindre vigilance que surviennent le somnambulisme et les
fugues.
31
a – Le théâtralisme
L'expression des sentiments est souvent exagérée. Tantôt l'hystérique exagère la réalité ou au
contraire ne prend rien au sérieux. On parle de la « belle indifférence » de l’hystérique.
Il y a une conduite de séduction et d'érotisation de la relation.
Il s'agit d'une sorte de précipitation affective qui a tendance a raccourcir la distance avec -
l'autre. La moindre réponse à cette "offre/demande" entraîne la rupture immédiate et la fuite
éperdue.
Avec l'hystérique, il y a un problème de distance. Quand la distance est trop courte (elle doit
sans doute régresser à l'oralité avec retour des fantasmes oraux) elle ne le supporte pas, c'est
la fuite ou la crise.
Et quand, avec les objets dont elle dépend, au contraire1a distance devient trop grande, elle
rejoue la séduction pour la réduire car reviennent alors les sentiments d'abandon,
d'impuissance et d'échec, qui peuvent réveiller l'angoisse endormie. La distance doit donc
être ni trop courte, ni trop grande : ce qui est difficile à maintenir dans la relation car
l'hystérique est quasiment toujours entrain de manipuler l'autre par ses affects, de façon
inconsciente.
Dans la relation avec les hystériques, il est nécessaire de garder une certaine distance et un
certain mystère, de manière à éviter ces réactions de fuite et aussi de permettre au fantasme
de se jouer dans la relation et de se dire. En un mot, garder la « neutralité bienveillante » afin
que la confiance puisse s'établir et les souvenirs s'exprimer.
Dans la relation, aussi, l'hystérique culpabilise et culpabilise les autres, sur lesquels elle essaie
de se décharger de sa propre culpabilité.
Car dans l'hystérie sont en jeu le "TABOU DE L'INCESTE" et "LE TABOU
ANTRHOPOPHAGIQUE" ( désir de mort de l'autre).
Souvent aussi du fait des rivalités oedipiennes, les jalousies sont assez fortes.
Dans nos sociétés actuelles semblent se jouer plutôt "LE TABOU DE LA MORT" que "LE
TABOU DE LA SEXUALITE" qui a été dénoncé par FREUD. C'est pourquoi l'hystérique
n'est plus forcément inhibée quant aux relations sexuelles, qui peuvent représenter une fuite
en avant de leur problématique.
Par ailleurs, à notre époque, où sont dénoncées les incestes et les violences sexuelles (viol,
pédophilie, etc.. ) à l'égard des enfants, la pratique psychothérapique permet de constater que
les manifestations hystériques sévères s'observent souvent chez les adultes qui ont été
victimes d'abus sexuels dans leur enfance. Et que, le caractère hystérique se retrouve souvent
chez des adultes qui ont eu des pères violents (jouant ainsi leurs pulsions sadiques sur la
famille et donc sur leurs enfants).
Pour l’école de PALO ALTO, en Amérique du Sud, l'hystérique agirait de façon excessive,
parce que dans sa famille, c'était ou c'est pour lui la seule façon d'être entendu.
b – La mythomanie
L'hystérique se fait passer pour autre qu'il n'est et a du mal à voir le réel pour ce qu'il est.
Il ou elle modifie le réel, l'enjolive ou le péjore. Cette tendance vient de la difficulté à
départager l'imaginaire du réel, le vrai du faux, ses fantasmes de la réalité.
c – La falsification de l’existence
Elle se retrouve en particulier dans le langage superlatif, emphatique et imprécis.
L'hystérique peut se réfugier dans la rêverie plutôt que de se confronter aux réalités frustrantes
de l'existence.
32
d – La suggestibilité
L'hystérique se révèle influençable, inconsistant, oscillant et versatile car son moi n'arrive pas
à se fixer dans une identité personnelle stable et il cherche toujours à trouver la meilleure
place dans le champ du désir de l'autre.
e – L’inconsistance du moi
Le décalage normal et dynamique entre le moi et l'idéal du moi est très grand chez
l'hystérique ce qui le fait douter de sa propre valeur. Il a donc besoin d'être rassuré par une
relation sécurisante à l'autre. D'où la grande quête affective de ces patients vers le thérapeute
perçu comme le "BON OBJET". L' hystérique évolue sur un fond d’anxiété.
La névrose hystérique est une affection chronique, qui peut être aussi fréquente chez les
hommes que chez les femmes. Il y a une certaine réticence des médecins à admettre l'hystérie
qui a une connotation féminine.
L'enfance de l'hystérique est souvent marquée par des conflits relationnels avec les parents. Et
aussi, on le voit de plus en plus, par un réel traumatisme sexuel (Cf. les écrits de FREUD).
g– Les fixations
Les traits de caractère et les symptômes désignent le déséquilibre d'une structure
par fixation à des stades précoces du développement psychoaffectif qui n'ont pas pu
entièrement être dépassés.
Dans l'hystérie, les fixations les plus importantes se font au stade phallique au
moment où s'instaure le primat du génital qui l'emporte sur les plaisirs de « l’oral »
ou de « l’anal ».
La reconnaissance de la différence des sexes permet la limitation de la
mégalomanie infantile en même temps le SURMOI qui se dégage des
identifications prégénitales devient plus réaliste.
La position oedipienne recouvre assez souvent d’importantes fixations orales.
Le pôle phallique privilégie l'agressivité et le narcissisme, le pôle oral les fantasmes
cannibaliques. Se retrouve aussi par la rivalité au parent de même sexe, la jalousie.
6. CONCLUSION
33
CHAPITRE V
LA NEVROSE OBSESSIONNELLE
1. INTRODUCTION
Dans son choix fondamental, l'obsessionnel tend à contrôler en permanence tout ce qui
parvient à sa conscience, la solution extrême consistant à produire lui-même ces éléments «
extérieurs » qui deviennent alors familiers et répétitifs : c'est le rôle des obsessions. Il peut
aussi anticiper le déclenchement de l'agir en court-circuitant ses incitations externes dans le
mécanisme des compulsions. Ces mécanismes le protègent efficacement d'une rencontre
aléatoire avec l'altérité et lui procurent une jouissance secrète. Les actes compulsifs (passages
à l'acte) peuvent trouver des équivalents symboliques de réassurance (détail ritualisé, trait
particulier...). Ils sont en général chargés d'agressivité et de haine. Avec les rites et la pensée
magique (« Si je pense ceci, il va se produire cela,.. »), l'obsessionnel tente d'apprivoiser le
monde et de le conjurer, ce qui entraîne de sa part une intense jouissance liée à cette toute-
puissance, associée à une grande frayeur, puisque sa pensée même est devenue menaçante. La
phobie du toucher résume son rapport de différenciation entretenu avec le monde, avec
l'impossibilité de contact dont elle témoigne. Le doute, équivalent pour l'obsessionnel de la
conversion somatique de l'hystérique, lui permet enfin de retenir en lui l'aboutissement de
l'action dans sa finalité normale d'échange avec l'autre.
Les multiples mécanismes de défense sont au centre de cette stratégie marquée par le
conflit ouvert, l'agressivité potentielle et la défiance. Certains sont privilégiés : l'annulation
rétroactive, l'isolation et la formation réactionnelle. Le caractère de l'obsessionnel s'oppose en
tous points à celui de l'hystérique : extrême retenue, refus du compromis, rigidité en sont les
éléments principaux. Dans la dialectique besoin/ désir/demande, l'obsessionnel dispose de
deux stratégies principales pour venir à bout de son désir. La première consistera à égaliser le
besoin et la demande, et donc à supprimer la tension créatrice du désir. 11 s'agira dans ce cas,
soit de ramener la demande au niveau du besoin, et la négation de l'autre qui en découle Cela
34
explique la grande proximité psychopathologique de la névrose obsessionnelle avec la
perversion, soit de prétendre que tout besoin est porté par une demande, ce qui se manifestera
dans l'attitude scrupuleuse de l'obsessionnel vis-à-vis des objets matériels, qu'il traite alors
comme objets de désir. La seconde stratégie consistera à assimiler purement et simplement le
désir reconnu à l'un des deux autres pôles : au besoin - la névrose obsessionnelle se rapproche
alors du sadomasochisme - ou à la demande, et c'est alors une tension paranoïaque qui la
guide, trouvant sa forme achevée dans le délire érotomaniaque . Dans toutes ces manœuvres,
l'obsessionnel est puissamment aidé par les effets de déliaison produits par la pulsion de mort,
foncièrement antagonique avec l'expression du désir. Au plan étiologique, on retrouve
l'opposition traditionnelle entre interprétation psychanalytique et comportementalo-
cognitive. Si la première met l'accent sur une fixation libidinale au stade anal (évidente dans
la clinique comme l'illustre l'Homme aux rats, cf. texte de FREUD)) ou bien une séduction
vécue activement ), la seconde privilégie une « erreur » dans le déroulement des processus
cognitifs. Ces points de vue, répétons-le, ne sont pas contradictoires
Quel rapport privilégié la névrose obsessionnelle entretient': elle avec la
masculinité ? Assiste-t-on là à une sorte de « partage des rôles » qui situerait plutôt le
masculin du côté de la contrainte, de la recherche, du doute, et de la construction intérieure,
contre un féminin plus « ouvert » à l'autre, inconsistant et poète ? Au fond, ne retrouve-ton
pas là l'essence des représentations populaires de la virilité et de la féminité ?...
La thérapeutique est controversée, le transfert dans la cure analytique des obsessionnels étant
contrecarré par la hantise du changement et la force des mécanismes de défense. La
mobilisation du noyau hystérique demande à être relayée de la part du thérapeute par la mise
en jeu de son propre doute, contre un usage pervers du savoir. Dans les cas graves, une
thérapeutique médicamenteuse vise à réduire l'angoisse ou à combattre les obsessions
(antidépresseurs). Certaines hypothèses récentes plaident en faveur de l'utilisation de
neuroleptiques spécifiques. Les thérapies cognitivo-comportementales font le choix de
privilégier la disparition du symptôme pathogène en étudiant les séquences comportementales
par une analyse fonctionnelle parfois étayée sur des dispositifs d'auto-observation.
2. HISTORIQUE
35
- le rapport à l' instantanéité, à l' histoire et à la mort contre le sentiment
d'éternité
- la gravité contre la "belle indifférence" de l'hystérique.
Il la perçoit comme un gigantesque mécanisme de défense psychique visant à ne
rien céder au désir confronté à l'ambivalence.
La névrose obsessionnelle est la névrose la plus organisée, la plus difficile à
soigner. Elle est relativement rare (2% de la population).
Elle se révèle plus dans la vie adulte et plus fréquemment chez les hommes.
3. LE CARACTERE OBSESSIONNEL
A. La psychasthénie
Elle est une forme particulière de fatigue à la fois somatique et psychique, résultant de
facteurs psychologiques et non pas somatiques. Ce qui explique certains comportements
comme la lenteur à se mettre en route le matin.
L'asthénie résulte à la fois de la lutte intérieure intense du sujet, ambivalence (en raison de la
difficulté des choix), de la crainte de nouvelles situations risquant de remettre en cause
l'équilibre pulsionnel et susceptibles d'entraîner de nouveaux débats.
Ce qui est le plus redouté, c'est l'imprévu par lequel l'aménagement de la distance vis-à-vis
des objets affectifs, ni trop près, ni trop loin, est remis en cause alors que la toute puissance de
la pensée est mise en doute.
En surface la réponse immédiate au lâchage du contrôle obsédant est une réaction brutale,
destructrice pour les objets d'amour. Cela peut aller des débordements verbaux orduriers à des
agressions imprévisibles, dont le sadisme n'est pas absent.
Plus en profondeur, l'angoisse jamais vraiment refoulée comme dans l'hystérie et ressurgit
massivement. La dépression peut être grave et le suicide réussi ; sinon il peut y avoir récidive
en raison de la blessure narcissique intolérable.
Ce qui conduit l'asthénique à l'incapacité d'agir, à des ruminations mentales et à une
introspection critique.
Le psychasthénique conscient de ses troubles est fortement culpabilisé de ne pas pouvoir agir.
Il se reproche d'être « un bon à rien » .
B. Le système compulsif
36
C. La fixation et la régression sadique – anale
Les névroses s'expliquent par l'existence de conflits affectifs de l'enfance mal résolus et
refoulés, laissant dans l' inconscient des fixations.
Quand il y a reviviscence symbolique de conflit, le névrosé régresse pour trouver des
satisfactions au niveau de ces fixations.
Dans l' ''Abrégé de Psychologie Pathologique" de Bergeret est précisé : "Il ne s'agit donc pas
d'une fixation des attitudes de l'enfant avec sa mère, au moment de la phase anale, mais d'une
fixation secondaire qui réutilise le matériel anal en raison des besoins de l'organisation
libidinale face au problème oedipien. Ce qui caractérise la phase anale, par rapport à la phase
orale, c'est le rôle actif de l'enfant qui décide ou non de donner son bol fécal et prend ainsi la
possession d'une puissance autonome. C'est ce contrôle qui est repris à la phase anale et est à
l'origine de la toute puissance de la pensée" .
Dans la névrose obsessionnelle, les fixations et donc la régression, se situe au stade sadique
anal.
37
lui servant d'écran entre lui et les autres. Si bien que le premier mouvement de l'obsessionnel,
contrairement à l’hystérique, est de se retirer, de prendre ses distances"… Il ajoute « qu’il y a
chez lui aussi une incapacité à s'adapter à l'ambiance affective, une certaine froideur des
gestes, avec absence d'émotivité. Au niveau de la parole, l'obsessionnel peut faire preuve
d'une prolixité à toute épreuve ; ce qu'il pourrait dire de la sexualité, dans des propos grivois,
est en fait désaffectivé, sans correspondance avec sa vie sexuelle réelle ».
Jean Pierre CHARTIER indique que "La réduction de l'acte à la pensée est un
mécanisme particulier de REFOULEMENT. La représentation amputée du désir, est ainsi
modifiée de façon à pouvoir être acceptée par le SURMOI. Les pensées peuvent avoir une
thématique sexuelle, ayant subi le mécanisme de l'ISOLATION, le désir ne les suit pas ; le
refoulement. est incomplet et l'ISOLATION un aménagement. précaire".
Jean MENECHAL précise « que toute la panoplie des mécanismes de défenses du MOI est
disponible dans cette organisation », il ajoute que le MECANISME DE DEFENSE préféré de
l'Obsessionnel, hormis l'ISOLATION, est l'ANNULATION RETROACTIVE.
Or, l'ANNULATION RETROACTIVE, c'est un peu la même chose que L'ISOLATION, mais
le pouvoir magique permet que l'accomplissement d'un acte fasse comme si des évènements
intérieurs ou extérieurs effectivement survenus n'avaient jamais eu lieu.
A . L’isolation
B . L’annulation rétroactive
« C'est le mécanisme psychologique par lequel le sujet s'efforce de faire en sorte que des
pensées, des paroles, des gestes, des actes passées ne soient pas advenus; il utilise pour cela
une pensé ou un comportement ayant une signification opposée,
Il s'agit. là d'une compulsion d' ''allure magique", particulièrement caractéristique de la
névrose obsessionnelle « (J. Laplanche et J-B, Pontalis, "Vocabulaire de la psychana1yse" .
J. Laplanche et J-B. Pontalis, dans le "Vocabulaire de la psychanalyse" rapporte cet exemple :
« Un sujet se reproche d'avoir gaspillé de l'argent en achetant un journal. Il voudrait annuler
cette dépense en se faisant rembourser ; n'osant pas le faire, il pense qu'acheter un autre
journal, le soulagera. Mais le kiosque est fermé et le sujet jette alors par terre une pièce de
même valeur….
Selon FREUD, les symptômes de l'obsessionnel seraient dus à la culpabilité liée à une
jouissance sexuelle trop précoce exercée par l'adulte. Si l'hystérique a vécu passivement cette
jouissance sexuelle, l'obsessionnel y aurait pris goût activement.
Serge LECLAIRE a noté l'importance de la relation de l’obsessionnel avec sa mère, il serait le
fils préféré d'une mère insatisfaite qui se retournerait vers ce garçon. Ils vivent alors tous deux
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dans un monde imaginaire, sorte de prison bien aimée, d'où l'isolation. Le contrôle obsédant
serait induit par l'identification au fantasme de toute puissance mégalo-maniaque de la mère.
A . L’ambivalence
A . L’obsession
L'obsession est l'apparition involontaire et anxieuse dans le champ de la pensée, d'une pensée,
d'une image parasite, qui tend à s' imposer au Moi. Ce mécanisme est assez banal.
Une pensée ne devient obsessionnelle qu'en raison de ses exigences, de sa permanence, de son
intensité qui lui font monopoliser la conscience.
Si le phénomène peut varier dans ses thèmes, pour une même personne, il se cristallise autour
d'un noyau unique qui va en se diversifiant.
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B . Les rites obsessionnels : moyens de défense
Pour conjurer l'univers hostile, l'obsessionnel a recours aux procédés magiques : rites
mystérieux, trucs dérisoires qui deviennent aussi incoercibles que sa préoccupation obsédante.
Le rituel se complique, devient un cérémonial avec un règlement. Aussi stupide que
draconien, avec des obligations et des interdits.
Les passages à l'acte sont rares (kleptomanie compulsive, violences physiques). Les
équivalents symboliques, permettant la décharge de la tension, sont plus fréquents (geste,
esquisse, tic corporel…). Ils sont toujours chargés d'agressivité et de haine plus ou moins
implicite.
7. EN CONCLUSION
Dans la relation d'aide, on rencontre le plus souvent des personnalités ayant des
défenses obsessionnelles ou bien alors des personnalités au caractère obsessionnel.
Les névroses obsessionnelles vraies (rares) sont à éviter, car elles sont très structurées et pas
forcément accessibles à la thérapie.
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BIBLIOGRAPHIE
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