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quielles veulent, c'est stentendre dire combien elles sont grandes. Le bananes vetes wulent sentendre dire quelles ‘sont mares. Dapres Freud, le filles envient les bananes. En “Amérique on sat que lesirop de chocolat et Iacrémefoweitée texhalen le goat des bananes. Ca apple un bonana split, ‘une banane fend, pr Pa trgo 200 Pourquoi n'y a-t-il pas eu de grands artistes femmes? Alors méme que le récent surgissement de Pactvitéfémi- nate dane ce pays fut un événement librateur, sa force avant tout émotive —personnelle, paychologique, subjective —sest focalise, a Tinstar dece quion observe dans les autres mouve- ‘ments révolutionnaires auxquels le feminisme est lig, sur le présent et les besoins immédiats plutat que sur Tanalyse his: torique des questions intellectuelles fondamentales que sow leve automatiquement Vattaque féministe du statu quo Mais comme toute révolution, et dans le droit fil de sa remise fen cause des idéologies propres aux institutions sociales actuelles, la révolution féministe devra tot ou tard s'en prendre aux fondements rationnels et idéologiques des diverses disciplines intellectuelles ou universitaires —his- toire, la philosophic, la sociolagie, la peychologie, ee. Si John Stuart Mill a raison davancer que nous inclinons a accopter tout ce qui est pour naturel, sa remarque vaut autant pour la recherche universitaire que pour nos arrangements soiau, [La premiare exige elle aussi que soient réinterrogées les hyp théses «naturelles» et echumées les bases mythiques dont se soutiennent bien des fats so-disant réels. Bt cest la que la Position d’-autres, dintruse de la femme, e elle» dissident venu se substituer au «ons possiblement neutre (qui en réa- lite désigne la position-de-homme-blane-enue-pour-natu relle les il» masqué sujet de tous le prédicats savants) repr: 201 sente un avantage décisf plus qu'un obstacle ou une distor. sion subjective. ‘Svagissant de Vhstoie de Vart, le point de vue de "homme bane oecidental, qui passe incansciemment pour le point de ‘yue de Phistorien dart, savére peut-dtre —savere de fait — Jnadéquat, pour des raisons qui ne sant pas seulement dordre ‘moral et éthique, ox liges& son éitieme, mai purement intel Teetuelles. En révélant Vinespacité une majrité de travaux universitaire en histoire de Far, et de nombre do travaux {histoire tout court, a tenir compte dun eystome de valeurs ‘non reconnu, de la présence méme d'un sujet immiseé dans la recherche historique, la critique féministe dévoile du méme ‘coup leur suffisance conceptuelle, eur naiveté méta-histo rique, Accepter aver si peu esprit ertique «ee qui est» pour ‘naturels risque d'tre intellectuellement fatal au moment justement oi toutes les disciplines fant preuve de plus de luc dite, prennent mieux conscience de la natare des présupposés fa Teuvre dans le langage et les structures des différents ddomaines du savoir. De méme que Mill voyait dans la domina- tion masculine une des innombrables injustices sociales & surmonter pour mettre en place un ardre social véritablement Juste, de méme nous pouvons vair dans la domination off- ‘ieuse du aujet blanc masculin une des ianombrables distor sions intellectuelles qu'il convient de eorrger pour avoir enfin tune vue plus adéquate et plus précise dos situations histo riques Tl revient aux esprits féministes engagés (tel John Stuart Mill de foreer les limites idéologieo-culturelles de notre Spoque et son «professionnalisme> spécifique pour en décou- vir les préjugés et les insulfisances, sans €arréter Ia seule ‘question des ferames mais en #attachant a formuler les ques tions erucialesintéressant un champ entier de savoir. Ainsi, ‘au licu dapparaitre comme un sous-probléme mineur, mar nal, ridiculement provineal, geffé sur une discipline sérieuse 202 et table, ladite question des femmes pourrait devenir un catalyseur, un outi intllectuel qui permettrait de verifier les résupposés «naturela,fournirat un modele a dautres types de questionnements internes et se rattacherait a son tour aux rmodoles mis en place dans d'autres domaines par d'autres pproches radicales. «Pourquoi n'y a-til pas eu de grands artistes femmes?» Convenablement élucidée, cette simple ‘question peut elle aussi susciter une sorte de réaction en chaine, sétendre de manigre a ne plus seulement recouveir les idées admisos dana la discipline elle est énoncée pour ‘englober histoire, les sciences sociales, wire Ia psychologic tla littérature, et ainsi, d'emblé, révoquer en doute Pidée 4que le cloisonnement traditionnel de la recherche intelec twelle demeare plus approprié a examen des grands pro biemes de notre temps que les divisions spontanément sur ses ou simplement commodes, ‘oyons par exemple quelles sont les implications de cette question rtournelle (dont il suflit de modifier les termes pour ‘appliquer a nimporte quelle activité humaine ou presque). Tiens, tens si les femmes sont vraiment les égales des hommes, pourquoi n'y a-til jamais eu de grands artistes femmes (ou de grands eompositeurs, mathématicions, phil: sophes de sexe féminin, ous peu do“randes femmes” en tout ce quon veut)? Pourquoi n'y a-til pas eu de grands artistes femmes ? Ce reproche bourdonne en fond sonore de maintes discussioas sur ledit probleme des femmes. Mais comme tant autres evinettes suscitées parla «controverse> féministe, cette ‘question falsifi la nature du probleme qu’ele solve tout en ui apportant insidieusement une réponse: «II ny a pas de srands artistes femmes parce que les femmes sont incapables| de grandeur» Les présupposés la base de ce genre dinterrogation varient de par leur registre et leur degré de sophistication, 208 sclon une gamme allant des démonstrations «scientifique: ment prouvées» sur Vincapacité des ¢tres humains datés utémas-t non de pénis & ender quoi que ce soitdimportant, Pétonnement desprits relativement ouverts quiaprés tant ‘années de quasi-ggalité les femmes nnient pas encore réussi ‘ eréer quoi que ee soit Zexceptionnellement important dans Je domaine des arts visuels — dautant,n'est-co pas, que lex hhommes, eux aussi, ont lours propres dificult ‘La premiére réaction féminiate eonsisto a gober d'un coup appat, puis a tenter de répondre a la question telle quelle ‘est posée,autrement dita exhumer des exemples de femmes dignes d’éloges ox non appréciées a leur juste valeur; 8 reha- biliter des carrigres intéressantes et productives quoique rmadestes; a «redécouvrir» des peintres de tableaux floraux ‘aujourd'hui oublis ou des disciples de David et a réunir des arguments en leur faveur; & démontrer que Berthe Morisot fut en réalité moins influencée par Manet qu’on incline a le penser — bref se lancer dans activité habituelle de Vérudit tpécialiste qui entreprend d'établir Vimportance de son maitre a Iu, jsqualors négligé ou tenu pour mineur. Quils soiont impale par une perspective fiminist, tel Tambitieux article sur les femmes artistes publié en 1858 par la West minster Review 2, ou par dos recherches savantes, par exemple les études plus réceates sur Angelica Kauffinan et ‘Artemisia Gentileschi cos efforts méritent certainement df étre poursuivispaisquils completent nos connaissances sur la réussite artistique des femmes et histoire de Tart en gene: ral, Mais ils ne contribuent en rien & remettre en cause les présupposés de la question: «Pourquoi ny a-til pas eu de frrands artistes femmes? En essayant dy répondre, is vien- nent au contraire tacitement enforcer ses implications néga- tives. Une autre maniére de tenter de résoudre la question, ‘onsste ten modifier gerement les bases et affirmer,& Ia 204 suite de foministes contemporaines, que Ia «grandeur» de art des femmes ot de Vart des hommes n'est pas du méme type, a postuler done Vexistence d'un style feminin dstinetit ct reconnaissable, different de par ses qualités tant formelles dqulexpressives et fondé sur le earactore particulier dela situa: tion et de Pexpérience féminines. A promitre vue cela parait assez raisonnable: dans ensemble, Texpérience des femmes et leur position dans la sacits, y compris on tant qu'artistos, different de celles des hommes, et la preduction artistique d'un groupe de ferames tun et onstitué de propos délibéré, résolu a donner forme & une conseience collective de Texpérience feminine, meriterait sans aucun doute dete stylistiquement recone comme art feiniste, sinon feminin. Cetto éventualité reste da domaine 4 possible, matheureusement elle ne sest encore jamais réa- lisée. Alors que les membres de Vécole du Danube, les dis- ciples du Caravage, les peintres rassemblés autour de Gau- gain a Pont-Aven, le Blaue Reiter ou le cubistes se laissent reconnalitre par des qualité stylistiques ou expressives clai- ‘ement définies a =féminité» ne possbde a prior pas de qua lités susceptibles de relier entre eux les styles des artistes femmes en général; ces qualités ne se retrouvent ailleurs as non plus chez les Grivains de sexe fiminin, sn argument {que Mary Ellmann a billamment défendu contre les clichés ® Joe plus dévastatours, et contradietoires entre eux, de a er tique masculine * Aucune subtle essence feminine me rat: tache apparemment entre elles les @euvres d’Arvemesia Gen Uileschi, de Mme Vigée-Lebrun, «'Angelica Kauffmann, de Rosa Bonheur, de Berthe Morisot, de Suzanne Valadon, de ‘Kathe Kollwitz, de Barbara Hepworth, de Georgia O'Keefe, de Sophie Taeuber-Arp, d'Hlen Frankenthaler, de Bridget Riley, de Lee Bontecou ou de Louise Nevelson, ni celles de * En francais dans le texte (NLT) Sappho, Marie de France, Jane Austen, Emily Bronte, George Sand, George Eliot, Virginia Woolf, Gertrude Stein, Anais Nin, Emily Dickinson, Sylvia Plath ou Susan Sontag. Dans tous les cas, les artistes et éerivains formes semblent plus proche des artistes et écrivains de leur temps et de leur sen- ‘bits qutlles ne le sont les unes des autres. Peutétre pourrait-on avancer que les artistes femmes cont plus introverties, travaillent leur moyen dexpression avec plus de délicatesse et de sens de la nuance. Mais parmi dessus, yen s-til une qui soit plus subtile et plus nusnede que les artistes femmes citées plus introvertie que Redo Corot dans le maniement des pigments? Fragonard esti plus ‘ou moins fémminin que Mme Vigée-Lebrun? Quit a juger en fonetion d'une mesure binaire opposant la «masculinite»& Ia «féminité>, ne faudrait-i pas plutot invoquer le «féminin: propre au rococo frangais du XVIII? Et si la suavité la deli tatesse, la préciosité doivent étre rangées au nombre des ‘marques distintives du style féminin, on eonviendra qu'il n'y ‘assurément rien de fragile dans le Marehé aux chevaus de Rosa Bonheur, rien de suave ni dintroverti dans les formats igéants dHlolen Frankenthaler, Les femmes se sont tournées vers les sednes do la vie domestique ou ver ls enfants, mais Jan Steen aussi, et Chardin, et les impreasiannistes — Renoir ‘ou Monet tout comme Morisot et Cassatt. De aureroit, le simple fait de choisir certaine eatégorie de themes ov de Sastroindre & certains sujets ne peut étre mis sur le méme plan que le style, « fortiori pas dune espace de style quintes: ‘enciellement feminin ‘La dificulté ne tient pas tant la conception que les fem nistes se feraient de la féminitéqu’a lour mauvaise interpré tation —d'ailleurs partagée per le grand publie—de ce quest Vart:Vidée naive quil exprime de manigre direct, person nelle, Pexpérience affective individuelle,traduit la vie intime centermes visuels. OrTart ee net presque jamais ga, le grand 206 art ga ne Test jamats, La production artistique repose sur un langage de la forme doté dune logique propre, plus ou moins «dependant ou detache, selon des usages temporellement defi nis, des conventions, des schemes ou des aystémes de nota- tion, quil a fallu acquérir ou élaborer d'une fagon ou d'une autre en étudiant, en effectuant un apprentissage ou en ‘appliquant longtemps a Vexpérimentation personnelle, Pls coneritement, le langage de Tarts énonce dans la couleur ot trait posés sur la toile ou le papier, dans Ia pierre, Fangio, le plastique ou le métal — ee n’ast ni un mélo ni un murmure confidentil Le fait eat quil n'ya pas eu, autant quan sache, de grands artistes fommes suprémement grands, méme sil en est beau coup dintéressantes et dexcellentes encore trop peu connues| ‘ow appréciges; tout comme il n'y a pas eu de grands pianistes| de jazz ituanjens, de grands joueurs de tennis eskimos, et souhaiter de tout ewur quil yen ait eu n'y change rien. Cest comme ga, est regrettable, mais'on ne modifiea pas Ia situs tion en manipulant a loisr les données historiques ou er tiques ni en accusant le chauvinisme masculin de déformer "histoire. In a pas de ferames a la hauteur de Michel-Ange ou de Rembrandt, de Delacroix, Cézanne, Picasso ou Matisse, ou meme, plus pris de nous, de De Kooning ox de Warhol, tout eomme il n'y a pas de Noirs amérieains qui puissent leur ‘tre comparés. Si lox grands artistes femmes -oubliée- so comptaient vraiment a foison ou si des normes différentes et opposses régiasaient vraiment Part des femmes et Fart des hommes — il faut choisir, c'est sot Fun, sot Pautre — alors pourquoi les feministes se battraient-lles? Si les femmes ont de fait atteint un statut équivalent a celui des hommes dans le domaine artistique, alors le statu quo actuel est parfait Or en réalite, t nous le savons tous, en art et dans une bonne centaine d'autres domaines les choses telles qu'elles sont et ont été ne peuvent quiéeseurer,opprimer, décourager 207 ceux et celles qui nvont pas la chance d'appartenir & la race blanche, de préférence a la bourgeoisie, et surtout au sexe ‘maseulin, La faute n'en incombe pas aux astres qui nous ont ‘yues naire, nos hormones, notre cycle menstruel, au vide {de nos espaces intérieurs, mais & nos institutions et a notre ‘ducation — cette derniére désignant ici tout ce qui nous arrive dés que nous naissons & ce monde lourd du sens des tymboles, sgnes at signa. Le vrai miracle est quten dépit ‘Pun sort au departs contaire, tant de femmes, tant de Noirs sient réussi & atteindre un tel dogré de perfection dans cos dominions de Vapanage blane masculin que sont les sciences, 1a politique les arts ‘Commencer a vraiment penser toutes les implications inhérentes au «Pourquoi n'y a-til pas eu de grands artistes femmes?~ permet de réaliser & quel point la conscience que nous nous forgeons des alfaires do ce monde est onditionnée —et souvent fausséo— parla fagon dont sont posées les ques- tions les plus importantes. Nous admettons asser volontiers au'l y a en effet un Probleme asiatique, un Probleme des pauvres, un Probleme noir —un Probleme des femmes. Mais demandons-nous d'abord qui formule les «questions», puis ‘quels desseins peut servir leur formulation. (Le «probleme juif- des nazi a des connotations susceptibles de nous rafra chir la mémoire.) A notre époque de communication immé: diate les -problemes- sont rapidement énoness pour rations. Tiser la mauvaise conscience des détenteurs du pouvoir: ainsi les Américains évequent-ils le «Probleme asiatique~ pour parler du probleme pose par les Américains au Viét-nam et au Cambodge, quand les habitants du Sud-Est asiatique y ver~ ‘aient sans doute avee plus de réalisme un + Probleme améri- cain~;]es exclus des ghettos urbains ou des campagnes déser ‘ées pourraient plus franchement consider ledit Probleme dee pauvres comme un «Probleme des richas; une ironie de la méme eau transforme le Probldme blanc en son eontraire, 208 un Problame noi, etcettelogique a rebours transparait aussi dans Fexpression «Probleme des femmes» tilisée pour earac- \erise la situation que nous vivons aujourd'hut ‘Ceci tant, le probleme des femmes, et Vensemble des so Voici ce que névale un rapide passage en revue des repr sentations de séances de docein d'aprés nature: une elentéle on partie 219 Figure 1 Léon-Mathieu Cochereau, Interieur de atelier de David. Paris, mused Louvre, ‘exclusivement masculine oecupée & peindre un nu féminin tans Fatelier de Rembrandt; des hommes travaillant a partir {de nus féminins dans des illustrations du XVILT° sur Tense tmement académique dispensé & La Haye et a Vienne; des hommes travaillant a partie un nu masculin assis dans le Gharmant tableau que Boilly consacra au début du XIX" & atelier de Houdon. La peinture serupuleusement fidele de \intérieur de Vatelier de David (1) que Léon-Mathieu Coche- reau presenta au Salon de 1814, montre un groupe de jeunes hommes occupés & dessiner ou peindre avec zdle un modéle ‘nu mascalin dont les souliers gisent au pled de Vestrade La pléthore d'vacadémies» dans Veouvre de jounesse des 220 artistes, ces études min een ahricmny tiene llc eee dan plait eho es ‘tant par le 7 atelier partir d'un se eb: opie de dessins et de gravures, se poursuivant avoc le dessin de moulages de sculptures eélobres et #ache- vant sur ledeasin dapros natured modéle vivant. Empicher les jeunes Gills de suivre cette dernitre étape de Ia formation rovenait bel et bien & les priver de la posible de eréer des sures sauf pour Texception capable de dleployer des trésors dingéniosité et les abligeait a se canton: ner aux eatégories «mineures dix portrait, de Ia peinture de genre, du paysage ou de la nature morte, slut doptee par 2. ohana Zl, Le caddicens de ln Royal Ae demy, Angleterre, collection royale aaa 2a la plapart des femmes aspirant & devenir peintres. Un peu comme un étudiant en médecine qui n'aurait pasa possibilité dd disséquer ou méme diexaminer un corps humain dévét ‘Ama connaissance, aucune représentation historique artistes travaillant d'aprés nature sur le nu rvaccorde aux femmes autre re que celui du modale mu, justement, ce qut ‘endit long sur lesrégles de biensance: 1c encore, de peur vi ecteu siagine que le sic cole nous a fait bea

masculine le choix offert aux femmes se pose semble-til toujours entre le mariage ou lune caridre — entre a solitude quest la rangon du suecés ou la sexualité et une compagnie qui récompensent le renonce: ment la earriére Test indéniable que la réusste, artistique ou autre, exige lun combat et dos sacrifices; il est également indéniable que cola devint plus vrai encore aprés la moitié du XIX°, quand le _méeénat et les institutions jusque-la voudes soutenir Tacti- vité artistique cesstrent de remplir leurs ebligations cout imieres. Il suffit de penser a Delacroix, Courbet, Degas, Van Gogh ou Toulouse-Lautree pour trouver des exemples de srands artistes ayant renoneé, en partie au moins, aux dis trations et obligations de Ia vie de famille afin de poursuivre avee plus énergie leurs carridres artistiques. Mais aucun \Teux nese vit refuser les plaisirs de Ia sexuaité ou de la vie a ddeux & cause de ce choix. Et il ne lour vint jamais a Tesprit duis avaient sacrifié leur virilité oa leur rdle sexuol & la 229 es Debut du mode Figure 3, Maurice Bompard, de mauvais loi Ten aépit des métamorphoses de mon costume, il nest pas de Bille dBve qui apprécie plus que moi les raffinements; ma nature brusque et méme-un pe insociabe na jamais empéché ton ear de rester complotement féminin, Ty 1 quelque chose d'assex pathétique'dans le fait que cntte artiste eouronne de sucebs, qui est adonnée a Tétude 238 assidue de Vanatomie animale, sest employée avee diligence & traquer ses eujets bovins ou équins dans les endroits les plus Aéplaisants, a employé sa longue carriére a Ia production industrieuse de toiles tres populaires, que cette femme fore, sire delle, au style indiseutablement masculin, qui remporta la premidre mééaille au Salon de Pars, ft nommée officio de 1a Légion d'honneur, commandeur de ordre d’Isabelle Ia atholique et de Vordre de 1 amie dela eine Vietoria — que cette artiste mondialement ctlabre, donee soit surletard senie tenue, peu importe pour aquclles raisons, de jutiier ot de tempérer une appropriation ‘arfuitement raisonnable des manitres masculines, que pour Satisfaire sa conscience elle se soit également sentie tenve de <énigrer celles de ses semblables qui portaient la eulotte avee ‘moins de modestie qu'elle, Car malgré le soutien regu de son pére, sa eonduite non conformiste et 'approbation d'un succes ‘unanime, la conscience de Rosa Bonheur Taccusit toujours de nltre pas une femme «féminine. Les problémes poses & artiste femme par de telles ex ences ne cossent aujourd/hui encore ajouter a la difficulté de son entreprise, Pensons par exemple a une contemporaine se consacre A son auvre avec sept ans parce que -los gons disent ql faut eo marier, lars 4uielle avait la certitude de ne pouvoir vivre cans exéer ‘Meme cher cos deus artistes exception — qu'on aime ou pas [4 on ne peut pas ne pas admirer la reussite professionnelle de Rosa Bonheur — la voix de Ia femme mystifice et le pt-pourri de son narcissisme ambiva- risée viennent subtilement Ailuer et pervertiria totale confance en soi, absolue certitude tla détermination morale et esthétique indispensables pour accompli une uvre vraiment grandiose et novatriee. 239 Conelusion En examinant les raisonnements intellectuelsfallacewx ‘qui sous-tendent la question «Pourquoi n'y a-til pas eu de grands artistes fommes?s, en minterrogeant sur la validité ‘de Vénonciation des problemas en général et du «probleme des femmes en particulier, en établisant enfin quelques-unes des limites de Vhistoire de Vart, jai tenté d’épuicer un dos arguments sempiternellement opposés a Texigence dégalité ‘et pas seulement symbolique, des femmes. En mata chant plus aux prérequisinsti¢utionnels, cest-adire publics, ‘quindividuels (personnels) de la réussite ou de la non-réus- site artistique, jai essayé de dégager un paradigme utlisable par dautres recherches dans d'autres sosteurs de ce domaine. Eh analysant assez en détail un unique exemple d’empéche- rent ou de préjudice —Ia defense faite aux étudiantes en art de travailler sur des modéles nus — fai voulu suguérer qui Figure 4 Resa Bonheur, Le Marché aux ehevaux. New York, Metropolitan Museum of At. don de Corelve Vanderbilt 240 ‘était de fait institutionnellement impossible que les femmes parviennent 8 Texcellence, ou au succes, artistique sur un Pied dégalité avec les hommes, quelle que soit par ailleurs la mesure de leur talent ou génie présumé. La réusste, sinon la sloire, remportée au cours des sigeles par quelques artistes femmes ne sufft pas a démentir cette réalité, pas plus que existence de quelques superstars ou de quelques héros ‘emblématiques au sein dex groupes minoritaires. Car si la réussite triomphale est chose aussi rare que difficile, elle Savere encore plus rare et plus difficile a partir du moment ‘oi faut, tout en travaillant, se battre contre les démons {ntérieurs du doute et de la eulpabilité et affronter au-dehors les monstres du ridicule et de Tencouragementprotecteur, qui niles uns ni les autres n'entratiennent de rapport speeiique avec la qualité de Teouvre art en tant que tlle. Limportant, CCeat que les femmes regardenten face la réalité de leur his- toire et de leu situation présente, sans se chercher d’excuses ‘ose gonfler de médiocrité. Un préjudice peut cortes servir excuse; il ne saurait cependant se onfondre avee une posi tion intlleetuelle. En partant au contraire de leur situation

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