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R A D I O
& T É L É V I S I O N
DUNOD
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EditonremiseàjourparJ.-P.Oehmichen
AlamémoiredeMonsieurEugèneAisberg
grâceàquij'aicommencéàcomprendre
cequidevaitêtremacarrière.
J.-I'.O.
PRÉFACE
En 1936parut la première édition de « La Radio ?.. mais c'est très simple ! » qui
fut traduite à l'époque en cinq langues, ellefut suivie de nombreuses éditionsfrançaises
et étrangères remises àjourjusqu 'en 1969. Parallèlement et dans le mêmestyleparaissait
depuis 1952« La Télévision ?.. maisc'est très simple ! »dont les rééditions et les traduc-
tions en langues étrangères devaient se succéder.
La convergence des deux branches d'une même technique amenait Eugène Aisberg
à réunir ces deux ouvrages et un seul, en 1970, sous le titre évident de « La Radio et la
Télévision ?.. mais c'est très simple ! »Cenouveau titre, plusieursfois réédité, réclamait
dixansaprès, desremisesàjour rendues nécessaires dufait del'évolution de la technique.
Mon mari n'ayant pu accomplir ce travail, je suis profondément reconnaissante à
MonsieurJ.P. Oehmichen auteurd'ouvrages tels que« L'Electronique ?.. rien deplus sim-
ple ! »et « Emploirationnel des transistors »d'avoir voulu rendre hommageà mon mari
en se chargeant de cette remise à jour et ainsi prolonger son œuvre.
Monsieur J.P. Oehmichen s'est livré à un travail scrupuleux et a rédigé cet ouvrage
dansl'esprit d'origine quiconsistait à vulgariserl'électroniquesérieusementmaissans ennui.
J'espère que celivre contribuera à répandre la connaissanceet lapassion del'électro-
nique pour laquelle Eugène Aisberg a œuvré sa vie durant.
Hélène Aisberg
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AVANT-PROPOS
J'ai toujours considéré Monsieur Aisberg comme mon «père spirituel » en ce qui
concerne le lot de connaissances qui devait devenir l'essentiel de macarrière : l'électroni-
que. Car, comme tant d'autres, j'ai commencé à mepassionner pour l'électronique en
passantpar la radio, et, commetant d'aùtres, j'ai trouvé desréponsesà unefoule deques-
tion dans « La radio ?Mais c'est très simple ! », quej'ai lu avec enthousiasme ily aplus
de quarante ans.
' Les discussions entre Ignotus, quiposait toujours les questions quej'aurais posées,
et Curiosus, qui lui répondait toujours avec tant de verve, d'humour et de précision,
m'avaientplu à telpoint queje n'eus de cessede connaître lepère de nos deuxsympathi-
quespersonnages. Quelquesannées après, MonsieurAisberg mefaisait le grandhonneur
de meconsidérer commeson ami, au point même de me laisser utiliser ses personnages
dans un livre auquel il prit une part considérable : « L'électronique ? Rien de plus sim-
ple ! », mais dont il ne voulutjamais percevoir une trace des droits d'auteur. Monsieur
Aisberg était ainsi.
Les années ont passé, Monsieur Aisberg nous a quittés, laissant un vide impossible
à combler dans le groupe des écrivains de l'électronique. Et la technique a évolué, aban-
donnant les tubespourpasseraux transistors, auxcircuits intégrés, à telpoint que lescom-
posants quej'avais utilisés dans majeunesse, ou du moins ceux qui avaient échappé à
lapoubellepour causededésadaptation à la techniquedujour, finissaientpar être recher-
chés comme raretés par les amateurs de la mode « rétro ».
Cette évolution avait donc amené le livre de Monsieur Aisberg à prendre un déca-
lage, non danssonfond maisdanssaforme, par rapport à l'état contemporain de la tech-
nique. C'est alors que Madame Aisberg meprécisa que le livre avait besoin d'être revu,
m'indiquant que, conformément à ce que lui avait dit Monsieur Aisberg, il lui semblait
quej'étais qualifié pour le faire.
Honneur redoutable ! Retoucher une œuvre aussi monumentale, qui a été traduite
en 13 langues, quifut tirée à un tel nombre d'exemplaires qu'elle bat de loin les records
deplusieurs romanciers à succès, m'a d'abord semblé au-delà de mesforces. Et puis, il
yavait unesorte de« sacrilège »à modifier certainsdéveloppements, sous leprétextepeut--
être futile que la réalisation pratique des montages avait évolué du point de vue
technologique.
Puisj'ai réalisé qu'un nombrecroissant de lecteurspotentiels allait considérer, à tort,
le livre capital qu'est : « La radio ?Maisc'est très simple ! »commeune oeuvre « démo-
dée », et que cela allait empêcher la diffusion du mode de pensée de Monsieur Aisberg
parmi lesfuturs électroniciens, ce qui aurait été une grande perte pour eux. Je mesuis
donc décidé à accepter le travail de remise à jour de l'œuvre oùj'avais tant appris.
Dès lors, une question se posait : commentprocéder ? Reprendre le texte initial en
modifiant touslespassagesquimettaienten causedescomposantsremplacéspar d'autres
(dufait desprogrès technologiques) aurait conduità un manqued'homogénéité. La meil-
leure solution était de s'imprégner autant que possible de 1'« esprit Aisberg » et de ré-
écrire le texte, enpratiquantpresquecequecertains ontappelé1'« écriture automatique »,
la main étant guidéesur les touchesdela machineà écrirepar l'esprit dequelqu'un d'autre.
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CHAPITRE 1
Lapuissance transportéepar les ondes. Champsmagnétiques continus et alter-
natifs. Champélectrique. Electrisationparfrottement. Production decharges élec-
triques par action chimique. Définition de l'ampère et de sa valeur en électrons
par seconde.
CHARGES ET CHAMPS
IGNOTUS. —Bonjour, Curiosus, je suis content de vous voir.
CliRIOSUS. —Moi aussi, Ignotus, cela me fait toujours plaisir de vous rencontrer.
D'après le petit mot que vous m'avez envoyé, vous comptez sur ma collaboration, mais
vous ne m'avez pas dit ce que vous souhaitiez exactement.
IG. —Voilà : je voudrais que vous me donniez de bons arguments techniques pour
confondre un odieux exploiteur de la crédulité des gens.
CUR. —Je ne demande pas mieux : j'ai horreur de ce type d'individu. Expliquez-moi
l'affaire en détail.
IG. —Voilà : j'ai rencontré l'autre jour quelqu'un qui m'a montré un petit récep-
teur de radio qu'il a fabriqué (dit-il), permettant effectivement d'entendre, assez faible-
ment mais bien, quelques postes (France Inter,. Europe 1) dans un petit écouteur. Il m'a
proposé de me le vendre et, quand je lui ai demandé comment on mettait les piles dedans,
il a eu le culot de dire qu'il n'y en avait pas, que le récepteur fonctionnait indéfiniment,
sans aucune source d'alimentation. J'espère que vous allez m'aider à lui clouer le bec ?
ClIR. —Aïe... vous allez être terriblement déçu : je vois de quoi il s'agit et votre
homme n'est pas un exploiteur de la crédulité humaine : on peut parfaitement réaliser un
tel récepteur...
IG. —Mais enfin, Curiosus, vous n'allez pas me soutenir une monstruosité pareille.
Je peux vous démontrer d'une façon inattaquable que c'est impossible.
CUR. —Cela va être une intéressante démonstration, un peu dans le genre de celle
qu'avait faite un mathématicien qui démontrait scientifiquement qu'une montgolfière ne
pouvait pas voler. je vous écoute avec attention.
IG. —Je vois que vous vous moquez de moi. Bon, je commence quand même. Vous
admettrez bien que, pour produire un son dans un petit écouteur, il faut lui fournir de
la puissance ?
CUR. —Exact. Je précise toutefois qu'il en faut extrêmement peu : avec moins d'un
milliardième de watt, vous avez déjà un son parfaitement perceptible dans un bon écouteur.
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IG. — Pour être franc, j'ai peu compris et encore moins retenu.
CUR. —Alors, si vous voulez que nous parlions de ces sujets qui semblent vous pas-
sionner, de la radio, de la télévision et de bien d'autres, il va falloir que je rafraîchisse
un peu vos idées. Mais je suis sûr que ce sera bien moins pénible que vous ne le supposez,
si vous écoutez attentivement mes explications.
IG. —Je suis assez inquiet, mais je vous fait quand même confiance. Alors, si vous
le permettez, je vais mettre en marche mon petit magnétophone.
CUR. — Bravo : excellente idée. Et puis, pour vous simplifier le travail, voici ce que
je vous propose : après chacun de nos entretiens, je vais taper pour vous (vous lirez mieux
si c'est dactylographié) un petit texte, qui résumera et précisera les notions que nous aurons
abordées dans le courant de la conversation.
IG. —Alors, là, Curiosus, je ne sais que dire pour vous remercier : vous êtes un père
pour moi ...!
CUR. —Mon ambition va moins loin, mais je serai heureux si je peux être pour vous
un « initiateur », qui vous donne envie de continuer par vous-même, de progresser dans
le domaine de l'électronique. Je ne ferai que jeter la graine qui germera dans votre esprit.
IG. —Pour utiliser un langage aussi noble que le vôtre, je vous réponds que votre
« geste auguste du semeur » me touche beaucoup et que je suis prêt.
CUR. —Bien. Je commence par préciser deux notions qui ont paru vous faire peur
tout à l'heure. D'abord le champ magnétique. On nomme champ magnétique toute la partie
d'espace proche d'un aimant (ou d'un fil où passe un courant électrique, car nous verrons
qu'il y a une analogie forte entre les deux cas), dans laquelle se manifestent des phénomè-
nes produits à distance par l'aimant, comme la déviation d'une aiguille aimantée, ou l'at-
traction exercée sur du fer, du nickel ou du cobalt.
IG. —Les aimants attirent aussi le nickel ?
CUR. —Bien sûr : tenez, je pose sur la table ce petit aimant, qui me sert à maintenir
des papiers sur le panneau de mon armoire métallique : approchez-en une pièce de 1 F,
elle va se coller dessus. Mais revenons à notre champ. Mettez donc là-bas sur la table cette
boussole et attendez que son aiguille s'immobilise.
IG. —Ça y est : elle ne bouge plus.
CUR. —Maintenant, je pose mon aimant à une trentaine de centimètres de la
boussole.
IG. —Oui, elle a bougé. Je dois dire que je m'y attendais. Donc, c'est le fameux
« champ magnétique » de votre aimant qui l'a fait bouger ?
CUR. —Tout à fait exact. Avant que j'approche mon aimant, la boussole était sou-
mise au champ magnétique que produit notre planète, la Terre. Une fois mon aimant au
voisinage de l'aiguille, il a produit un champ, qui modifie le champ terrestre, et fait donc
changer la position de l'aiguille.
IG. —Donc, un champ magnétique est caractérisé par sa direction, indiquée par l'ai-
guille de la boussole qui s'y trouve soumise.
CUR. —Parfait, mais il faut, en plus, de la direction d'un champ magnétique, don-
ner sa force. La boussole peut le faire : si vous la laissez soumise au seul champ magnéti-
que de la Terre, après l'avoir écartée du nord, vous la voyez osciller.
IG. —C'est une oscillation assez lente d'ailleurs.
CUR. —Exactement : le champ terrestre est relativement faible, et il ne ramène l'ai-
guille dans la direction du nord qu'avec peu de force. Il faut, comme vous pouvez le mesu-
rer, près de deux secondes pour que l'aiguille fasse un mouvement complet d'aller et retour.
Maintenant, je pose mon petit aimant à dix centimètres de la boussole.
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Champ électrique
IG. —Bon, je vois assez bien ce qu'est un champ magnétique. Mais le champ élec-
trique, alors, qu'est-ce que c'est ?
CUR. —Il est d'une toute autre nature. Je prends cette règle en plastique, et je la
frotte avec un chiffon de laine. Elle n'agit pas sur la boussole, mais elle peut attirer des
petits morceaux de papier, comme vous le voyez, parce qu'elle est, comme on dit,
« électrisée ».
IG. —Cela, c'est une histoire que je connais bien, hélas ! Mes disques microsillons
ont, dès qu'on les essuie, une tendance stupide à attirer affectueusement la poussière, qui
est cependant si nocive pour eux.
CUR. —C'est bien vrai : on ne connaît pas toujours ses vrais ennemis. Et, en effet,
votre disque crée, lui aussi, autour de lui, un « champ électrique », comme le fait ma règle
en plastique.
IG. —Bon, je vois. Au fond, vous avez raison : ces idées de champ magnétique et
de champ électrique sont assez simples. Mais, dites-moi : qu'est-ce qui a provoqué l'ap-
parition de ce champ lorsque vous avez frotté votre règle ?
IG. —Ignotus, savez-vous de quoi la matière est composée ?
IG. —Malgré mon peu de goût pour la physique, ça je le sais : elle est faite d'atomes.
CUR. —Je suis assez d'accord, mais je préfère préciser que la matière est presque
toujours composée de molécules, qui sont des groupements d'atomes. Presque tous les
atomes ont horreur de la solitude (à part ceux qui constituent l'argon, le néon, l'hélium
et quelques autres gaz). Les autres atomes font tout ce qu'ils peuvent pour rencontrer des
atomes d'espèce différente et s'unir étroitement à ceux, pour constituer une molécule. Par
exemple, un atome d'oxygène cherche à s'unir aux atomes d'hydrogène (il en prend même
deux simultanément), et cela fait une molécule d'eau. A défaut d'un atome de nature dif-
férente, il s'unira avec un atome identique : l'atome d'oxygène, s'il ne trouve pas « mieux »,
s'unira avec un autre atome d'oxygène. Cela donnera une molécule du gaz qu'est l'oxy-
gène, dans lequel il n'y a pas de pauvres atomes d'oxgène solitaires, sauf circonstances
exceptionnelles et fugitives.
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IG. —Alors, au fond, l'atome est un constituant de la molécule, qui est elle-même
un constituant de la matière. Est-ce bien cela ?
CUR. —Rigoureusement exact et bien dit. Bravo. Puisque vous me semblez tellement
en forme, allons maintenant plus au cœur de ladite matière. Savez-vous ce qu'il y a dans
un atome ?
le. —Je me le rappelle à peu près : un noyau et un électron.
CliR. —D'accord pour le noyau, mais, pour ce qui est autour, il n'y a que l'atome
d'hydrogène qui comporte un seul électron. Les autres atomes en comportent un nombre
qui peut aller jusqu'à 92 pour les éléments naturels (l'atome à 92 électrons est celui de
l'uranium). Mais on a pu réaliser, par « synthèse nucléaire », des atomes ayant jusqu'à
cent électrons et même plus.
IG. —Avec tellement d'électrons, ces atomes doivent être très lourds.
Noyaux et électrons
CUR.—Très amusant, cela. Ces atomes sont effectivement lourds (tout est relatif,
ils sont lourds par rapport à l'atome d'hydrogène, mais, si « lourds » qu'ils soient, il en
faut tout de même des dizaines de milliers de milliards de milliards pour arriver à quel-
ques grammes). Seulement, ce ne sont pas les électrons qui les rendent lourds. Dans un
atome, la masse vient, pour 99,98 070environ, du noyau et pour 1/4 000en moyenne des
électrons. Seulement, le noyau comporte des particules dites « protons » et-d'autres dites
« neutrons ». Elles ont la même masse (environ 1840 fois celle d'un électron), et il y a
toujours autant de protons dans le noyau qu'il y a d'électrons autour, parce que chaque
proton porte une charge positive, égale à celle d'un électron. Comme cela, l'atome est
normalement neutre du point de vue électrique. Les neutrons, eux, font une sorte de
« ciment »pour unir les protons. Ils n'ont pas de charge. Apart le cas de l'atome d'hydro-
gène (son noyau comporte uniquement un proton tout seul), il ya, en moyenne, dans les
noyaux des atomes, de dix à seize neutrons.pour dix protons.
IG. —Bougrement compliqué, tout cela. Mais, dites-moi, il y a un mot dans votre
explication qui m'a étonné : vous medites que l'atome est « normalement neutre ». Peut-
il cesser de l'être ?
CUR.—Ah, Ignotus, je suis ravi que vous ayez remarqué ce « normalement », parce
que, précisément, nous allons considérer les cas « anormaux », les seuls qui nous intéres-
sent. On peut rompre cet équilibre des charges entre le noyau et les électrons. Cela se fera
par des moyens mécaniques (le frottement demonchiffon de laine), thermiques (en chauf-
fant), lumineux (en éclairant), chimiques (par attaque par unacide) et surtout magnétique
(en faisant agir un champ magnétique variable). Voyez, tout à l'heure, nous avons rompu
l'équilibre de neutralité des atomes de marègle en plastique en la frottant. Ici, il se trouve
que l'on a amené un excès d'électrons dans la zone frottée (mais il ya des cas où, au con-
traire, on crée localement une pénurie d'électrons, un déficit, en quelque sorte). Comme
les électrons portent une charge négative, un excès d'électrons sur ma règle de plastique
correspond à une zone « électrisée négativement ».
IG. —Bon, je vois. Ennuyeux, cela, que les électrons portent une charge négative,
ça complique les raisonnements. Mais on ne peut pas aller le leur dire... alors tant pis.
Mais, dites-moi, si mes souvenirs sont exacts, on m'a dit autrefois que « des charges de
même sens se repoussent ». Ces électrons entassés en excès sur le bout de votre règle de
plastique, ils ont sûrement enviedese fuir les uns les autres, de s'en aller loin, n'est-ce pas ?
CUR.—Je ne peux pas aller le leur demander, mais c'est vraisemblable. Seulement
il ne suffit pas qu'ils en aient envie : il faut aussi que la matière où ils se trouvent leur
permette de se déplacer. Or, précisément, le plastique (comme le verre, le mica et bien
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d'autres corps) ne permettent absolument pas aux électrons de se déplacer. On dit que
ces corps sont des isolants.
IG. —Tiens, on m'avait dit qu'un isolant c'était un produit qui ne laissait pas pas-
ser l'électricité.
CUR.—On avait eu raison de vous le dire : l'électricité est faite par un mouvement
d'électrons. Si la région que l'on a enrichie en électrons, et une autre région, apauvrie
en électrons, sont misesen communication, par l'intermédiaire d'une matière qui ne s'op-
pose pas au passage des électrons (un métal, par exemple), il y a passage en masse des
électrons de la zone trop négative (ayant trop d'électrons) vers la zone positive (qui man-
que d'électrons). Ce passage est ce que l'on appelle un « courant électrique ».
-1
Le « sens » du courant
IG. —Je vois. Je pense que, dans ce cas, on appelle « conducteur » la matière qui
laisse passer les électrons. Mais, ce qui me choque, c'est de voir le courant aller du négatif
au positif, on m'avait dit autrefois le contraire...
CUR. —On avait eu raison, parce que l'on parlait du « sens conventionnel » du cou-
rant, une notion purement abstraite. Mais, comme le courant électrique est fait d'un dépla-
cement de particules à charges négatives, il est normal que le sens du mouvement de ces
dernières soit opposé au sens que l'on a défini comme « sens conventionnel » du courant.
Ic. —Mais alors, pour revenir à votre règle en plastique, si l'on pouvait transférer
les électrons en trop (que vous avez accumulés par frottement) dans un métal pour les
laisser passer, on fabriquerait du courant électrique ?
CUR. —Vous avez entièrement raison. C'est ainsi qu'étaient faites les premières
« machines électriques » d'il y a deux siècles. Mais elles ne pouvaient fournir qu'un cou-
rant minuscule : à peine mille milliards d'électrons par seconde.
Fig. 1.1. —L'eau acidulée agit, par attaque chimique, en prenant des électrons à la lame de cuivre et en en
donnant à la lame de zinc. Si l'on relie les deux conducteurs de cette pile (car c'est une pile) par un fil, les élec-
trons vont du zinc au cuivre. Oh dit que du courant électrique, passant dans le fil, passe dans le « sens conven-
tionnel » du cuivre vers le zinc.
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La pile
CUR. —Pour commencer, par une action chimique. Imaginez (fig. 1.1) que vous
trempiez, dans une solution acide, une plaque de zinc (attaquable) et une de cuivre (pres-
que inattaquable). L'action chimique va créer un excès d'électrons sur le zinc, un défaut
sur le cuivre. Si vous reliez, par un fil extérieur, la plaque de cuivre à la plaque de zinc,
les électrons en excès sur le zinc iront, par le fil, vers la plaque de cuivre. Vous avez réalisé
une pile. Elle transforme l'énergie chimique en énergie électrique. A l'intérieur de la pile,
l'action de l'acide va, en quelques sorte, « rehisser » les électrons d'un « niveau bas » (le
cuivre) vers un « niveau haut » (le zinc). Tout se passe un peu comme si une pompe (fig
1.2) puisait sans cesse de l'eau d'un récipient inférieur B pour la hisser vers un récipient
A à niveau haut, permettant ainsi à un courant continu (d'eau) de passer de A vers B par
un tube (le fil conducteur).
IG. —Mais, dites-moi, dans le cas des récipients et de l'eau, on peut définir une pres-
sion, donnée par la différence de niveau h, qui pousse l'eau de A vers B. Ya-t-il une gran-
deur de ce type pour le cas de votre bizarre pile ?
CUR. —Cette pile n'est bizarre que parce que vous êtes trop jeune pour avoir connu
des piles de ce type. Maintenant, pour répondre à votre question, il y a une grandeur qui
exprime l'équivalent électrique de la pression : on l'appelle la « tension » ou « différence
de potentiel ». Elle traduit la force qui met en mouvement les charges. On la mesure en
volts. Pour un élément de pile, on a ainsi de un à trois volts, suivant les produits utilisés
pour les électrodes et pour ce qui les attaque. Mais, pendant que nous en sommes aux
analogies avec des récipients et des écoulements d'eau, il y a une autre grandeur que l'on
doit définir, dans notre histoire du tube qui laisse couler l'eau de A vers B. Voyez-vous
de quoi il s'agit ?
IG. —Je ne vois pas, moi. Vous pensez peut-être à la longueur du tube ?
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Fig. 1.2. —Le rôle de l'action chimique est de maintenir une « différence de niveau d'électrons »constante
entre le cuivre et lezinc, commela pompe maintient unedifférence de niveau, h, constante, entre les deuxréci-
pients Aet B, malgré le courant d'eau qui passe de Avers Bpar le tube.
L'intensité
CUR. —Non. Nous en reparlerons plus tard, mais, pour le moment, je pense à quel-
que chose de plus immédiat : il passe de l'eau dans le tube, et il me semble qu'il y a lieu
de préciser quelque chose à propos de cette eau.
IG. — Peut-être la vitesse avec laquelle elle passe.
CUR. —Vous n'êtes pas loin de ce que je voulais vous faire dire. Je m'intéresse moins
à la vitesse de l'eau dans le tube qu'à son débit, en litres par secondes. C'est très impor-
tant, cela, car ça conditionne le travail que devra fournir la pompe pour remonter cette
eau, chaque seconde, de B vers A.
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(G. —Mais c'est bien sûr, j'aurais dû y penser. Alors, en électricité, on va compter
le débit de charges, par exemple en électrons par seconde.1
CUR.—On pourrait le faire, mais cela donnerait, commeje vous l'ai dit, des nom-
bres énormes. On a choisi, pour d'autres raisons, une unité qui s'appelle l'ampère, qui
correspond à un débit de 6 241 450 383 milliards d'électrons par seconde. Il vaut mieux
écrire ce nombre sous la forme :
1A=6,241 450 383 1018 électrons/seconde
IG. —Unchoix vraiment simple, il n'y a pas à dire ! Enfin, je pense que l'on a choisi
l'unité « ampère »alors quel'on ne savait pas encore la valeur dela charge d'un électron,
alors je pardonne à Monsieur AMPEREson choix bizarre.
CUR.—J'en suis heureux pour lui. J'en profite pour vous préciser l'existence d'une
autre unité, celle de « quantité d'électricité », autrement dit de charge. On la nomme le
« Coulomb », c'est la charge que transporte, en une seconde, un courant dont l'intensité
est de un ampère.
IG. —Alors, si je comprends bien, un coulomb représente votre fameux nombre de
6,241 etc. 1018électrons.
CUR.—Bravo, Ignotus, vous avez parfaitement compris. Nous allons terminer notre
premier entretien sur votre réponse qui me fait très plaisir et nous préciserons d'autres
notions bientôt.
COMPLEMENTS AU CHAPITRE 1
Unécouteur (téléphonique par exemple) nécessite une puis- L'électrisation est produite par un déséquilibre, dans les
sance donnée, très faible (un milliardième de watt suffit) pour atomes d'un corps, entre les charges positives (portées par les
fournir un son. Dans un récepteur sans pile, cette puissance est noyaux des atomes) et les charges négatives (électrons), situées
fournie par les « ondes ». Ces ondes sont émises dans l'espace autour de ces noyaux.
par l'antenne d'émission, rayonnant une forte puissance. Elles Les corps qui laissent le passage aux électrons sont dits
comportent un champ magnétique (ce que l'on trouve autour « isolants », les métaux, qui laissent les électrons passer, sont
d'un aimant et qui agit sur une aiguille aimantée) qui change dits « conducteurs ». Le courant électrique est le résultat d'un
périodiquement de valeur, que l'on nommechamp magnétique déplacement d'électrons. On peut réaliser un courant qui dure,
« haute fréquence », plus un champ électrique qui en fait autant. en appauvrissant systématiquement un corps en électrons (il
devient positif), par exemple par action chimique (pile). Lecou-
Le champ électrique est ce que l'on observe autour d'un iso- rant électrique se mesure en ampères. Un ampère correspond
lant, électrisé par frottement par exemple. au passage de 6,241 450 838.1018 électrons par seconde.
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CHAPITRE 2
La notion de tension reliée à celle de travail. Analogie hydraulique du cou-
rant. Notion de résistance, sa variation enfonction de la longueur et de la section
du fil. Le néologisme « résisteur ». Résisteurs en série et en parallèle, loi de Joule.
LOI D'OHM
CURIOSUS.—Alors, Ignotus, avez-vous lu le petit papier que je vous ai remis le len-
demain de notre premier entretien ?
IGNOTUS.—Je l'ai lu, relu, et bien compris. Mais je constate que je ne sais toujours
rien sur les ondes, sur le petit poste sans pile, sur...
CUR. — Doucement, nous commençons. Mais, vous allez voir, cela sera moins long
que vous ne le craignez. Nous allons aujourd'hui voir comment sont liées, l'intensité d'un
courant dans un fil et la tension aux bornes de ce fil.
La tension
Force et travail
IG. — Bien sur, c'est le kilo.
CUR. — Horreur ! Mais vous retardez affreusement, Ignotus ! Il y a bien longtemps
(et c'est fort heureux) que l'on n'utilise plus le « kilogramme-force », mais l'unité dite
« newton », qui permet des calculs bien plus cohérents. Voyez-vous, une force est définie
par la possibilité qu'elle a de faire accroître la vitesse d'une masse à laquelle on l'appli-
que. Si vous appliquez à une masse d'un kilogramme (le kilogramme-masse est l'unité nor-
male d'aujourd'hui) une force de un newton, vous communiquerez à cette masse l'aug-
mentation de vitesse (on dit l'accélération) unité, autrement dit, sa vitesse augmentera de
1 m/s à chaque seconde. La force qu'exerce l'attraction de la Terre sur cette masse d'un
kilogramme, sous nos latitudes, est environ 9,8 fois plus forte que le newton. Autrement
dit, le newton est à peu près la force avec laquelle la Terre, sous nos latitudes, attire une
masse de 102 g.
IG. — C'est bougrement compliqué, tout cela. Au fond, votre unité de force est un
peu indépendante de l'attraction terrestre, si je comprends bien.
CUR. — Vous comprenez parfaitement, Ignotus, et c'est bien là son grand intérêt.
Le poids d'une masse de 1 kilogramme est de l'ordre de 9,8 newtons sur la Terre sous
nos latitudes, il est nul dans l'espace, il est d'un peu plus d'un newton et demi sur la Lune,
mais, même dans l'espace, si vous appliquez une force de un newton à une masse de un
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kilogramme, vous aurez une accélération unité. Donc, pour en revenir à notre exemple
hydraulique, si je prends une masse d'à peu près 102 g d'eau (qui pèse environ un newton
par ici), et que je la rehisse de un mètre, je fais un travail unité : on dit que c'est un travail
de un joule.
IG. —C'est vraiment la façon la plus compliquée que l'on puisse trouver pour dire
que la dénivellation est de un mètre...
CUR. —D'accord avec vous, mais si on transpose au cas des « niveaux électriques »,
s'il y a, entre deux points, une différence de potentiel de V volts, il faudra un travail de
Vjoules pour amener une charge de un coulomb d'un de ces points à l'autre. Si vous vou-
lez un exemple numérique, quand une charge de un coulomb « tombe » de 12 V, elle accom-
plit un travail de 12 J. C'est à partir de cela que l'on définit le volt. Je reconnais que ce
n'est pas si simple. Dites vous, en quelque sorte, que la tension, entre deux points, c'est
une « envie de passer » de l'électricité d'un point vers l'autre.
du « feu vert ». Pour les conducteurs électriques, on parle plus volontiers de la gêne qu'ils
provoquent (leur résistance) que de la facilité avec laquelle ils laissent passer le courant
(leur conductance). Mais, si vous savez parler aussi bien de l'une que de l'autre, cela vous
aidera par la suite.
Donc, pour écrire quelques formules (oh, ne vous alarmez pas, elles sont extrême-
ment simples), si nous désignons la tension par U, l'intensité par i, la résistance par R,
la conductance par K, on peut écrire :
R=Q , K=L , U=Ri , i=KU
i U
IG. —En général, j'ai horreur des formules, mais je dois reconnaître que celles-là
sont simples. Seulement, vous avez dit tout à l'heure que, pour le passage de l'eau dans
le tube, on devait tenir compte de la longueur du tube et de sa section. Nous n'avons rien
vu d'équivalent ici pour le passage de l'électricité.
Calcul de la résistance
CUR. —J'allais y venir. Pour un fil homogène, plus il est long, plus sa résistance est
grande. A l'opposé, plus sa section est grande, plus sa résistance est faible, alors...
IG. —Ça y est, j'ai trouvé ! Nous allons trouver sa résistance en divisant sa longueur
par sa section.
CUR. —Ignotus, vous êtes en très bon chemin. Mais il vous manque encore quelque
chose : n'oubliez pas que tous les métaux ne sont pas identiques ; il y en a qui sont meil-
leurs conducteurs que d'autres. Imaginez, par exemple, différents fils ayant une section
de 1 mm2 (soit un diamètre d'environ 1,1 mm), et une longueur de 60 m. Je prend ces
valeurs parce que, en cuivre, un tel fil a juste une résistance de un ohm. Mais, en argent
(le seul métal meilleur conducteur que le cuivre), on n'aurait que 0,9 0. Si le fil était en
aluminium, nous trouverions 1,6 9 ; s'il était en fer, nous aurions 5,6 9 et en chrome 23 ü.
IG. —Alors, il n'y a plus moyen d'exprimer la valeur de résistance.
CUR. —Si, mais en introduisant, dans la formule qui l'exprime, un coefficient carac-
téristique du métal. Ce coefficient s'appelle sa « résistivité », on le note par la lettre gre-
que Q(rho), et on écrit alors :
où L désigne la longueur (en mètres) et s la section (en mètres carrés). Si je veux calculer
cette résistivité, il me faudra donc multiplier la résistance Rpar la section s, puis la diviser
par la longueur L :
Donc, puisque nous multiplions des ohms par des mètres carrés, pour les diviser par
des mètres, nous exprimons finalement cette résistivité comme un produit d'ohms par des
mètres. On la mesure donc en ohm x mètre (fl.m). Par exemple, pour le cuivre, la résisti-
vité est d'environ :
1,67 . 10-8
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... et je trouve comme vous, à peu près 1,67 cent-millionième, que vous écrivez 1,67.10-8.
Bon, cela va.
CUR.—Ouf ! Vous avez bien rattrapé votre abominable erreur. Puisque je vous vois
si bien disposé, calculez-moi donc la résistance d'un fil de cuivre de 0,2 mmde diamètre
et de 100 m de longueur.
1(;. —Si vous n'y voyez pas d'inconvénient, je sors ma calculatrice de poche.
CUR.—Parfaitement d'accord, Ignotus, ces instruments sont tout à fait précieux si
on les utilise correctement et quand il faut.
le. —Alors voilà. Vous m'avez dit que, pour le cuivre, on avait :
Je commence par calculer la section s. Cette fois, je fais attention pour l'expression
en mètres carrés. Je vais vous étonner, mais je me rappelle bien la formule de la surface
s d'un cercle de diamètre d, c'est 7rd2/4. Alors, pour d = 0,2 mm, soit 0,2 millième de
mètre, ou 2 dix-millièmes de mètre, cela fait 2.10-4. Ma machine accepte de calculer avec
les puissances de 10 (j'aime bien cela, sinon je m'embrouille souvent) et j'y vais. Je trouve
une surface de 3,14.10 -8. Je la loge dans la mémoire de ma calculatrice.
CUR. —Parfait, Ignotus, je suis plein d'admiration. Continuez.
IG. —Mais de rien, je suis toujours comme ça... Nous avons donc dit que l'on doit
poser 1,67.10-8, ça y est. Je le multiplie par 100 (oui, je sais, j'aurais pu faire cela sans
la machine, mais, avec les puissances de 10, et négatives par raffinement de sadisme, je
suis sûr de me tromper). On arrive à 1,67.10 - 6. Je divise maintenant par le contenu de
la mémoire, puisque c'est la section s et j'obtiens 53.
CUR. —Exact, 20/20, malgré votre multiplication par 100 (et aussi le 10-8 de la sec-
tion , que vous auriez pu éliminer avec le 10-8 de la résistivité). Alors, dites-moi quelle
sera la tension aux bornes de ce fil si vous y faites circuler un courant de 0,1 A.
IG. —Je vois, vous voudriez que je prenne ma machine pour multiplier 53 par 0,1,
mais tout de même je vous réponds sans la calculatrice. II y aura :
U= Ri = 53xO,1 = 5,3 V
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Fig. 2-2 : Si l'on met en série des fils résistants de natures diverses, la même intensité (ici 0,1 A) passe dans
tous ces fils. Les chutes de tension dans ces fils s'ajoutent.
ClIR. —Vous allez les mettre bout à bout et faire passer 0,1 Adans tout le monde,
mis, commeon dit, « en série ». Quelle sera la tension aux bornes de l'ensemble (fig. 2-2).
(G. —Il y aura 5,3 Vaux bornes du fil de cuivre, 8,5 Vaux bornes du fil d'alumi-
nium et 29,7 Vaux bornes du fil de fer. Je pense qu'on doit ajouter ces tensions. Est-ce
bien ça ?
CUR.—C'est exactement ça. Vous aurez donc une tension totale de :
5,3 +8,5 +29,7=43,5 V
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Vous voyez que, comme cette tension correspond au passage d'un courant de 0,1 A,
cela correspond à une résistance totale (des trois fils en série) de 43,5/0,1 =435 9.
Ic;. —Cela me semble exact. Et alors ?
CUR. —Alors ? Imaginez que J'écrire votre somme de tout à l'heure en divisant tous
les termes par 0,1, on peut écrire :
Un néologisme important.
Résisteurs en parallèle.
CUR. — La conclusion était logique, mais je ne dirais pas qu'elle était évidente. Et
maintenant, que pourrez-vous me dire de ce qui se passe si je mets les trois résisteurs (celui
qui est en cuivre, celui qui est aluminium et celui qui est en fer) comme l'indique la figure
2-3, autrement dit suivant le branchement que l'on nomme « en parallèle » ?
Ic,. —D'abord, une petite question : pourquoi avez-vous dessiné les résisteurs sous
forme de ce curieux zig-zag ?
ClIR. —Tout simplement parce que c'est le symbole que l'on utilise presque toujours
pour représenter un résisteur. Alors, mettons que l'on applique à tout cela, entre les points
que j'ai désignés par (A) et (B) une tension de 1 V, que se passera-t-il ?
IG. — La question n'est pas trop méchante : pour chaque résisteur, je vais diviser
la tension qu'or, un applique (1 V) par sa résistance, c.r.=mc cela j'aurai le courant qui
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Kig. 2-3 : Quand les conducteurs sont en parallèle, ce sont les intensités qui s'ajoutent pour donner l'intensité
totale, les tensions aux bornes des différents conducteurs étant égales.
1g. —Je pense que cela doit faire la somme des intensités, soit :
0,01887+0,0176+0,00337=0,034 Aà très peu près.
Cur. —Bravo, Ignotus, et je suis très content que vous m'ayez donné la réponse
0,034, alors que j'ai lu sur votre calculatrice 0,033999. Bon,"la pile débite donc 0,034 A.
Tout sepasse donccommesi elle débitait dans un résisteur unique dont la résistance aurait,
selon vous, quelle valeur ?
1g. —Pour que l'on ait 0,034 Asous 1V, il faudrait R = U/i = 1/0,034 et je trouve
environ 29,40. Mais, là, je ne vois aucune conclusion à tirer.
Cuit. —Vous allez la trouver facilement. Les valeurs des intensités que vous avezcal-
culées ne vous rappellent-elles rien ?
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Comme vous le voyez, c'est beaucoup plus complexe à écrire qu'avec les conductan-
ces, c'est bien pourquoi je vous ai dit que la manipulation de la notion de conductance
est très intéressante.
k. —Je suis tout à fait de votre avis, et je compte fonder l'A.P.P.N.C.T. (ou Asso-
ciation Pour la Propagation de la Notion de Conductance chez les Techniciens).
La puissance.
Ciir. — Ça me semble une bonne idée et je m'y inscrirai. En attendant, nous allons
voir une nouvelle loi que vous connaissez déjà sans le savoir. Que pensez-vous du produit
de la tension aux bornes d'un résisteur par le courant qui traverse ce résisteur ?
h;. —Euh... pas grand chose. Le quotient U/i donne la résistance, ça je l'ai bien
compris, mais le produit U i ne m'évoque rien.
Ct R. —Vous vous souvenez tout de même que, quand N coulombs « tombent » de
U volts, cela fait un travail (disons une énergie) de Ux Ncoulombs. Or, dans le résisteur,
il y a des coulombs qui « tombent », il y en a même i par seconde, puisque c'est la défini-
tion de l'intensité.
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I(.. —Bon, vous voulez donc me faire dire que, à chaque seconde, la « chute des
coulombs », comme vous dites, apporte une énergie égale à Uxi, en joules.
Cur. —C'est précisément ce que je voulais vous faire dire. Vous voyez donc que
l'électricité produit, chaque seconde, Ux i joules, autrement dit la pile de tension U qui
débite un courant i dans le résisteur produit Uxi watts.
1(;. —Tiens, moi qui croyais que le watt était une unité de puissance.
CI R. —Continuez à le croire, puisque c'est vrai. Je ne vous ai pas dit autre chose :
si on divise un travail (en joules) par le temps (en secondes) qu'on a mis pour le faire,
on obtient une puissance (en watts). On va désigner cette puissance par P et l'on aura :
P= Ux i.
Ic.. — Puisque vous aimez les formules, je pense que l'on pourrait en trouver une
autre. Je me rappelle ce que vous aviez dit avec U = R x i, alors, si je remplace U par
Rxi dans votre formule de puissance, j'aurai :
P= Rx i x i
ClIR. —Tout à fait exact, quoique je préfère écrire P = Ri2 et je viens dénoncer ainsi
la « Loi de Joule ». On peut d'ailleurs dire aussi, puisque
I(,. —Je vois. Mais vous ne trouvez pas ça bizarre, ce carré dans les deux formules ?
Cur. — Pas du tout : si vous multipliez, par exemple, la tension par 3, vous allez
multiplier aussi l'intensité dans le résisteur par 3, ce qui fait que la puissance sera multi-
pliée par 9, qui est bien le carré de trois, si je ne me trompe.
!t;- —Vous avez raison, je n'y avais pas pensé. Dites-moi, puisque nous avons trouvé
une certaine puissance produite par l'électricité, que devient cette puissance ?
Ciir. —De la chaleur, tout simplement. Votre résisteur va chauffer :' c'est ce que l'on
appelle l'effet thermique du courant, ou l'effet Joule. Si réchauffement est très fort, et
que le résisteur puisse arriver à une température très élevée sans être détruit, cela donne
même de la lumière : l'ampoule qui nous éclaire fonctionne comme cela.
II.. —Je vous ai bien suivi mais, même sans qu'il y ait du courant dans ma tête, je
sens que mon cerveau commence à trop chauffer. Ce n'est pas l'effet Joule, mais je pense
que je suis près de la limite de mes possibilités aujourd'hui, et, si vous le permettez, j'ar-
rête le magnétophone, avant de déboucher une bonne bouteille pour nous remettre tous
les deux.
CIr. —Excellente idée. Nous continuerons donc la prochaine fois.
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Code 042878
ISBN 2 10 002878 2
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