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R A D I O

& T É L É V I S I O N

...mais c'est très simple !


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DUNOD
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EditonremiseàjourparJ.-P.Oehmichen

AlamémoiredeMonsieurEugèneAisberg
grâceàquij'aicommencéàcomprendre
cequidevaitêtremacarrière.
J.-I'.O.

Ce pictogramme mérite une explica- ments d'enseignement supérieur, provo-


tion. Son objet est d'alerter le lecteur quant une baisse brutale des achats de
sur la menace que représente pour livresetderevues, aupointquela possi-
l'avenir de l'écrit, particulière- bilité mêmepourles auteurs de
mentdans le domaine de l'édi- créer des œuvres nouvelles et
tion technique et universitaire, de les faire éditer correctement
le développement massif du estaujourd'hui menacée.
photocopillage. Nous rappelons donc que
LeCodede la propriété intel- toute reproduction, partielle ou
lectuelle du 1er juillet 1992 totale, de la présente publica-
interdit en effet expressément la tion est interdite sans autorisa-
photocopie à usagecollectif sansautori- tionduCentrefrançaisd'exploitation du
sation des ayants droit. Or, cette pra- droit decopie (CFC,3rue Hautefeuile,
tiques'est généralisée danslesétablisse- 75006Paris).

@Dunod, Paris, 1995


ISBN 2 10 002878 2
Toute représentation ou reproduction, intégrale ou partielle, faite sans le
consentement de l'auteur, ou de ses ayants droit, ou ayants cause, est
illicite (loi du 11 mars 1957, alinéa 1er de l'article 40). Cette
représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit,
constituerait une contrefaçon sanctionnée par les articles 425 et suivants
du Codepénal. Laloi du 11 mars 1957 n'autorise, aux termes des alinéas
2 et 3 de l'article 41, que les copias ou..[eproductions strictement
réservées à l'usage privé du copiste!' 'n'iirr destinées à une utilisation
collective d'une part, et d'autre part, que 1e,s analyses et les courtes
citations dansunbutd'exemple eL j d'illustration.'
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PRÉFACE
En 1936parut la première édition de « La Radio ?.. mais c'est très simple ! » qui
fut traduite à l'époque en cinq langues, ellefut suivie de nombreuses éditionsfrançaises
et étrangères remises àjourjusqu 'en 1969. Parallèlement et dans le mêmestyleparaissait
depuis 1952« La Télévision ?.. maisc'est très simple ! »dont les rééditions et les traduc-
tions en langues étrangères devaient se succéder.
La convergence des deux branches d'une même technique amenait Eugène Aisberg
à réunir ces deux ouvrages et un seul, en 1970, sous le titre évident de « La Radio et la
Télévision ?.. mais c'est très simple ! »Cenouveau titre, plusieursfois réédité, réclamait
dixansaprès, desremisesàjour rendues nécessaires dufait del'évolution de la technique.
Mon mari n'ayant pu accomplir ce travail, je suis profondément reconnaissante à
MonsieurJ.P. Oehmichen auteurd'ouvrages tels que« L'Electronique ?.. rien deplus sim-
ple ! »et « Emploirationnel des transistors »d'avoir voulu rendre hommageà mon mari
en se chargeant de cette remise à jour et ainsi prolonger son œuvre.
Monsieur J.P. Oehmichen s'est livré à un travail scrupuleux et a rédigé cet ouvrage
dansl'esprit d'origine quiconsistait à vulgariserl'électroniquesérieusementmaissans ennui.
J'espère que celivre contribuera à répandre la connaissanceet lapassion del'électro-
nique pour laquelle Eugène Aisberg a œuvré sa vie durant.
Hélène Aisberg
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AVANT-PROPOS
J'ai toujours considéré Monsieur Aisberg comme mon «père spirituel » en ce qui
concerne le lot de connaissances qui devait devenir l'essentiel de macarrière : l'électroni-
que. Car, comme tant d'autres, j'ai commencé à mepassionner pour l'électronique en
passantpar la radio, et, commetant d'aùtres, j'ai trouvé desréponsesà unefoule deques-
tion dans « La radio ?Mais c'est très simple ! », quej'ai lu avec enthousiasme ily aplus
de quarante ans.
' Les discussions entre Ignotus, quiposait toujours les questions quej'aurais posées,
et Curiosus, qui lui répondait toujours avec tant de verve, d'humour et de précision,
m'avaientplu à telpoint queje n'eus de cessede connaître lepère de nos deuxsympathi-
quespersonnages. Quelquesannées après, MonsieurAisberg mefaisait le grandhonneur
de meconsidérer commeson ami, au point même de me laisser utiliser ses personnages
dans un livre auquel il prit une part considérable : « L'électronique ? Rien de plus sim-
ple ! », mais dont il ne voulutjamais percevoir une trace des droits d'auteur. Monsieur
Aisberg était ainsi.
Les années ont passé, Monsieur Aisberg nous a quittés, laissant un vide impossible
à combler dans le groupe des écrivains de l'électronique. Et la technique a évolué, aban-
donnant les tubespourpasseraux transistors, auxcircuits intégrés, à telpoint que lescom-
posants quej'avais utilisés dans majeunesse, ou du moins ceux qui avaient échappé à
lapoubellepour causededésadaptation à la techniquedujour, finissaientpar être recher-
chés comme raretés par les amateurs de la mode « rétro ».
Cette évolution avait donc amené le livre de Monsieur Aisberg à prendre un déca-
lage, non danssonfond maisdanssaforme, par rapport à l'état contemporain de la tech-
nique. C'est alors que Madame Aisberg meprécisa que le livre avait besoin d'être revu,
m'indiquant que, conformément à ce que lui avait dit Monsieur Aisberg, il lui semblait
quej'étais qualifié pour le faire.
Honneur redoutable ! Retoucher une œuvre aussi monumentale, qui a été traduite
en 13 langues, quifut tirée à un tel nombre d'exemplaires qu'elle bat de loin les records
deplusieurs romanciers à succès, m'a d'abord semblé au-delà de mesforces. Et puis, il
yavait unesorte de« sacrilège »à modifier certainsdéveloppements, sous leprétextepeut--
être futile que la réalisation pratique des montages avait évolué du point de vue
technologique.
Puisj'ai réalisé qu'un nombrecroissant de lecteurspotentiels allait considérer, à tort,
le livre capital qu'est : « La radio ?Maisc'est très simple ! »commeune oeuvre « démo-
dée », et que cela allait empêcher la diffusion du mode de pensée de Monsieur Aisberg
parmi lesfuturs électroniciens, ce qui aurait été une grande perte pour eux. Je mesuis
donc décidé à accepter le travail de remise à jour de l'œuvre oùj'avais tant appris.
Dès lors, une question se posait : commentprocéder ? Reprendre le texte initial en
modifiant touslespassagesquimettaienten causedescomposantsremplacéspar d'autres
(dufait desprogrès technologiques) aurait conduità un manqued'homogénéité. La meil-
leure solution était de s'imprégner autant que possible de 1'« esprit Aisberg » et de ré-
écrire le texte, enpratiquantpresquecequecertains ontappelé1'« écriture automatique »,
la main étant guidéesur les touchesdela machineà écrirepar l'esprit dequelqu'un d'autre.
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J'ai doncécrit ce texte, en medemandant, à chaquepassage important : « Comment


MonsieurAisberg aurait-il rédigé cettepartie ! ». Unpremierplan de réalisationfutfait,
au début, mais il se trouva que Curiosus refusa de le suivre. Carje réalisai très vite que
cet homme acceptait à la rigueur de suivre mes conseils, mais qu'il entendait garder son
indépendance : il était hors de question de luifaire dire cequeje voulais quandje le vou-
lais, et, souvent, il refusa d'aller oùje désirais qu'il aille, modifiant ainsi le plan de tel
ou tel chapitre. La vraieraison decette « rébellion apparente »tenait directement au sou-
venir tellement présent de la pensée de Monsieur Aisberg ; je le sentais presque derrière
moi, me disant : « Non, Curiosus nepeut pas dire ceci, il nepeut pas faire cela. Voici
la direction où il faut lefaire aller. »
Plus les chapitress'entassaient, plus cette influence meguidait, etj'espère ainsi avoir
étéfidèle à la mémoire de celui qui m'a tant appris.
Undernier mot à propos de la « radio ». Au temps despremières éditions de « La
radio ?.. Mais c'est très simple ! », au moins deux générations d'électroniciens, formés
par celivre, réalisaient eux-mêmesdespetits récepteursderadio ; unetelle réalisation était
fort instructive, pas trop difficile, et représentaitsouvent uneéconomiepar rapportà l'achat
du récepteur toutfait. Mais les temps ont changé. Les constructeurs depièces détachées
s'intéressent de moinsen moinsà l'amateur, et la construction en série apermis d'abais-
ser le coût deproduction despetits récepteurs à telpoint que la réalisation d'un récepteur
par un amateurserapresque toujoursplus chère que l'achat duposte correspondant. Pire
encore : .dufait de la progression des circuits intégrés et des « kits »de réalisation, celui
qui entreprend une telle réalisation estforcé de suivre des instructions précises, pas tou-
jours compréhensibles ; il arrive au résultatfinal sans avoir vraiment compris comment
celafonctionne, et surtout sans avoir appris grand-chose. Dans ces conditions, on peut
seposer la question : « cela vaut-il encore la peine d'étudier la réalisation des récepteurs
de radio ? ». Paradoxalement, beaucoup de gens répondent : « oui, sans hésitation ! ».
En effet, tout contact avecl'électronique estformateur. Cequi importe, denosjours,
est moins l'instrumentfini, probablement moinsperformant et plus coûteux que ce que
l'on pourrait trouver dans le commerce, mais la compréhension de ce qu'il y a dedans,
permettant de s'adapter aux techniques contemporaines de l'électronique. Beaucoup de
jeunes trouveront un grand intérêt à étudier l'idée defonctionnement d'un petit amplifi-
cateur destiné à un récepteur, et à le réaliser en « amateur », en donnant à ce mot son
sens le plus noble, direct : « celui qui aime ».
C'estpourquoi Ignotuset Curiosus, dans cenouveau livre, ont consacré unepart tel-
lementimportantede leursentretiensà l'électricitégénérale, sans la connaissancedelaquelle
il n'y a aucune possibilité defaire de l'électronique. C'est aussi la raison pour laquelle
ils ne sont pas entrés dans les détails de réalisation des récepteurs radio et télévision. De
telsdétailsauraientpris uneplace trop importante, et ilsauraientconstituéunepartiesujette
auxincessantesrefontesen raison desprogrès technologiques. Curiosusa vouluavant tout
faire comprendre à Ignotus lesprincipesgénérauxqui régissent la structure et lefonction-
nement des radio-récepteurs et des téléviseurs, mettant ainsi son disciple à mêmede lire,
en comprenant chaqueligne (sipossible), unedescription d'appareilréaliséouà construire.
S'ils y ont réussi, ils auront ainsifait durer la pensée de Monsieur Aisberg, permet-
tant à unenouvellegénération debénéficierdesa méthodepédagogique, desa clarté, dans
la mesure oùj'ai pu —ce queje souhaite —être aussi « transparent » que possible à
safaçon de penser.
J.-P. Oehmichen
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CHAPITRE 1
Lapuissance transportéepar les ondes. Champsmagnétiques continus et alter-
natifs. Champélectrique. Electrisationparfrottement. Production decharges élec-
triques par action chimique. Définition de l'ampère et de sa valeur en électrons
par seconde.

CHARGES ET CHAMPS
IGNOTUS. —Bonjour, Curiosus, je suis content de vous voir.
CliRIOSUS. —Moi aussi, Ignotus, cela me fait toujours plaisir de vous rencontrer.
D'après le petit mot que vous m'avez envoyé, vous comptez sur ma collaboration, mais
vous ne m'avez pas dit ce que vous souhaitiez exactement.
IG. —Voilà : je voudrais que vous me donniez de bons arguments techniques pour
confondre un odieux exploiteur de la crédulité des gens.
CUR. —Je ne demande pas mieux : j'ai horreur de ce type d'individu. Expliquez-moi
l'affaire en détail.
IG. —Voilà : j'ai rencontré l'autre jour quelqu'un qui m'a montré un petit récep-
teur de radio qu'il a fabriqué (dit-il), permettant effectivement d'entendre, assez faible-
ment mais bien, quelques postes (France Inter,. Europe 1) dans un petit écouteur. Il m'a
proposé de me le vendre et, quand je lui ai demandé comment on mettait les piles dedans,
il a eu le culot de dire qu'il n'y en avait pas, que le récepteur fonctionnait indéfiniment,
sans aucune source d'alimentation. J'espère que vous allez m'aider à lui clouer le bec ?
ClIR. —Aïe... vous allez être terriblement déçu : je vois de quoi il s'agit et votre
homme n'est pas un exploiteur de la crédulité humaine : on peut parfaitement réaliser un
tel récepteur...
IG. —Mais enfin, Curiosus, vous n'allez pas me soutenir une monstruosité pareille.
Je peux vous démontrer d'une façon inattaquable que c'est impossible.
CUR. —Cela va être une intéressante démonstration, un peu dans le genre de celle
qu'avait faite un mathématicien qui démontrait scientifiquement qu'une montgolfière ne
pouvait pas voler. je vous écoute avec attention.
IG. —Je vois que vous vous moquez de moi. Bon, je commence quand même. Vous
admettrez bien que, pour produire un son dans un petit écouteur, il faut lui fournir de
la puissance ?
CUR. —Exact. Je précise toutefois qu'il en faut extrêmement peu : avec moins d'un
milliardième de watt, vous avez déjà un son parfaitement perceptible dans un bon écouteur.
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La puissance passe par les ondes


IG. —Ça alors, je n'aurais jamais cru qu'il suffisait de si peu. Mais ça ne change
/pas la valeur de ma démonstration. Je la reprends...
CUR. —Et moi je la devine : « Il faut une puissance dans l'écouteur pour obtenir
un son ; il n'y a aucune source de puissance dans la boîte du récepteur, donc c'est tout
aussi impossible que le mouvement perpétuel ».
IG. —C'est, à quelques mots près, ce que j'allais vous dire. Et vous ne pouvez pas
dire le contraire !
CUR. —Justement si, je le peux. Tout à fait d'accord, il n'y a pas de source de puis-
sance « dans la boîte », comme vous le dites, mais, en fait, la puissance « entre dans la
boîte » : ce sont les ondes envoyées par la station d'émission qui vont vous fournir la puis-
sance nécessaire pour actionner votre écouteur.
IG. —Ça, c'est à peine croyable... ! Alors les ondes de radio peuvent donc trans-
porter de la puissance ?
CUR. —Exactement. Si vous visitez un jour le poste émetteur de France Inter, vous
verrez un ensemble qui consomme à l'Electricité de France plus de puissance qu'il n'en
faudrait pour alimenter un village de trois mille habitants, qui transforme cette puissance
électrique en un courant d'un autre type. On envoie ce courant dans une antenne, laquelle
rayonne autour d'elle, sous forme d'ondes, une puissance de plus d'un million de watts,
soit de quoi tirer à bonne vitesse une demi-douzaine d'autobus de la RATP lourdement
chargés. Cette énorme puissance est rayonnée dans l'espace, dans toutes les directions,
et vous, à des dizaines de kilomètres de là, vous pouvez en recueillir une petite trace, suffi-
sante pour agir sur la membrane de votre écouteur.
1(;. —Formidable ! Je n'aurais jamais cru cela possible.
CUR. —On peut même faire beaucoup plus : en concentrant bien les ondes, on a pu
envoyer, par leur intermédiaire, vers un petit hélicoptère, une puissance suffisante pour
faire tourner son moteur et le maintenir en l'air.
IG. —Extraordinaire ! Mais, dites-moi, ces ondes, que sont-elles exactement ?
CUR. —Voyez-vous, Ignotus, je sais bien produire des ondes et les utiliser, mais je
suis plus gêné quand il s'agit d'en donner une explication claire. Je vous dirai qu'il s'agit
d'une « radiation » qui se propage sans aucun support matériel (les ondes passent très
bien dans le vide), un peu comme la lumière, qui est d'ailleurs faite d'ondes assez analo-
gues à celles de la radio. Si l'on veut dire cela avec plus de précision, on ajoute que les
ondes sont constituées de champs électromagnétiques à haute fréquence...
IG. —Ça y est : voilà les mots incompréhensibles qui arrivent, je m'y attendais un
peu, je l'avoue.

Promenons-nous dans les champs


CUR. —Vous exagérez, Ignotus. Vous savez tout de même ce qu'est un champ élec-
trique et un champ magnétique, je suppose ?
IG. —Pour le champ magnétique, un peu, pour le champ électrique, pas du tout.
CUR. —Mais vous avez tout de même dû étudier un peu l'électricité et le magnétisme
au lycée, enfin je le suppose ?
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IG. — Pour être franc, j'ai peu compris et encore moins retenu.
CUR. —Alors, si vous voulez que nous parlions de ces sujets qui semblent vous pas-
sionner, de la radio, de la télévision et de bien d'autres, il va falloir que je rafraîchisse
un peu vos idées. Mais je suis sûr que ce sera bien moins pénible que vous ne le supposez,
si vous écoutez attentivement mes explications.
IG. —Je suis assez inquiet, mais je vous fait quand même confiance. Alors, si vous
le permettez, je vais mettre en marche mon petit magnétophone.
CUR. — Bravo : excellente idée. Et puis, pour vous simplifier le travail, voici ce que
je vous propose : après chacun de nos entretiens, je vais taper pour vous (vous lirez mieux
si c'est dactylographié) un petit texte, qui résumera et précisera les notions que nous aurons
abordées dans le courant de la conversation.
IG. —Alors, là, Curiosus, je ne sais que dire pour vous remercier : vous êtes un père
pour moi ...!
CUR. —Mon ambition va moins loin, mais je serai heureux si je peux être pour vous
un « initiateur », qui vous donne envie de continuer par vous-même, de progresser dans
le domaine de l'électronique. Je ne ferai que jeter la graine qui germera dans votre esprit.
IG. —Pour utiliser un langage aussi noble que le vôtre, je vous réponds que votre
« geste auguste du semeur » me touche beaucoup et que je suis prêt.
CUR. —Bien. Je commence par préciser deux notions qui ont paru vous faire peur
tout à l'heure. D'abord le champ magnétique. On nomme champ magnétique toute la partie
d'espace proche d'un aimant (ou d'un fil où passe un courant électrique, car nous verrons
qu'il y a une analogie forte entre les deux cas), dans laquelle se manifestent des phénomè-
nes produits à distance par l'aimant, comme la déviation d'une aiguille aimantée, ou l'at-
traction exercée sur du fer, du nickel ou du cobalt.
IG. —Les aimants attirent aussi le nickel ?
CUR. —Bien sûr : tenez, je pose sur la table ce petit aimant, qui me sert à maintenir
des papiers sur le panneau de mon armoire métallique : approchez-en une pièce de 1 F,
elle va se coller dessus. Mais revenons à notre champ. Mettez donc là-bas sur la table cette
boussole et attendez que son aiguille s'immobilise.
IG. —Ça y est : elle ne bouge plus.
CUR. —Maintenant, je pose mon aimant à une trentaine de centimètres de la
boussole.
IG. —Oui, elle a bougé. Je dois dire que je m'y attendais. Donc, c'est le fameux
« champ magnétique » de votre aimant qui l'a fait bouger ?
CUR. —Tout à fait exact. Avant que j'approche mon aimant, la boussole était sou-
mise au champ magnétique que produit notre planète, la Terre. Une fois mon aimant au
voisinage de l'aiguille, il a produit un champ, qui modifie le champ terrestre, et fait donc
changer la position de l'aiguille.
IG. —Donc, un champ magnétique est caractérisé par sa direction, indiquée par l'ai-
guille de la boussole qui s'y trouve soumise.
CUR. —Parfait, mais il faut, en plus, de la direction d'un champ magnétique, don-
ner sa force. La boussole peut le faire : si vous la laissez soumise au seul champ magnéti-
que de la Terre, après l'avoir écartée du nord, vous la voyez osciller.
IG. —C'est une oscillation assez lente d'ailleurs.
CUR. —Exactement : le champ terrestre est relativement faible, et il ne ramène l'ai-
guille dans la direction du nord qu'avec peu de force. Il faut, comme vous pouvez le mesu-
rer, près de deux secondes pour que l'aiguille fasse un mouvement complet d'aller et retour.
Maintenant, je pose mon petit aimant à dix centimètres de la boussole.
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le. —Oh, mais l'aiguille semble prise d'une nervosité frénétique.


CUR. —Disons, en termes plus précis, que la fréquence d'oscillation est plus grande
que tout à l'heure. C'est dû au fait que l'action qui ramène l'aiguille dans la direction
du champ produit par l'aimant est plus énergique que celle que donnait le champ terres-
tre. Le champ de l'aimant est plus intense et l'aiguille nous le dit. Bon, maintenant, je
laisse mon aimant là et j'attends une vingtaine de secondes. L'aiguille ne bouge plus.
le. —Oui, la danse de l'aiguille l'a fatiguée.
CUR. — L'expression est jolie. Je dirais plutôt que l'oscillation s'est amortie, en rai-
son des différentes actions qui tendent à freiner le mouvement de l'aiguille. Donc, cette
dernière ne bouge plus. Je dis que le champ magnétique produit par l'aimant est continu.
Mais, maintenant, toutes les cinq secondes, je retourne mon aimant, mettant son pôle nord
à la place de son pôle sud et inversement. Donc, toutes les dix secondes, il revient à la
position de départ.
le. — L'aiguille réagit, évidemment : toutes les cinq secondes, elle pivote de 180°
(avec des oscillations en plus). Il fallait s'y attendre.
CUR. —Oui, mais ce qui est intéressant, c'est que, maintenant, je viens de produire
un champ magnétique « alternatif ». Quand nous en reparlerons plus tard, vous vous en
souviendrez.

Champ électrique
IG. —Bon, je vois assez bien ce qu'est un champ magnétique. Mais le champ élec-
trique, alors, qu'est-ce que c'est ?
CUR. —Il est d'une toute autre nature. Je prends cette règle en plastique, et je la
frotte avec un chiffon de laine. Elle n'agit pas sur la boussole, mais elle peut attirer des
petits morceaux de papier, comme vous le voyez, parce qu'elle est, comme on dit,
« électrisée ».
IG. —Cela, c'est une histoire que je connais bien, hélas ! Mes disques microsillons
ont, dès qu'on les essuie, une tendance stupide à attirer affectueusement la poussière, qui
est cependant si nocive pour eux.
CUR. —C'est bien vrai : on ne connaît pas toujours ses vrais ennemis. Et, en effet,
votre disque crée, lui aussi, autour de lui, un « champ électrique », comme le fait ma règle
en plastique.
IG. —Bon, je vois. Au fond, vous avez raison : ces idées de champ magnétique et
de champ électrique sont assez simples. Mais, dites-moi : qu'est-ce qui a provoqué l'ap-
parition de ce champ lorsque vous avez frotté votre règle ?
IG. —Ignotus, savez-vous de quoi la matière est composée ?
IG. —Malgré mon peu de goût pour la physique, ça je le sais : elle est faite d'atomes.
CUR. —Je suis assez d'accord, mais je préfère préciser que la matière est presque
toujours composée de molécules, qui sont des groupements d'atomes. Presque tous les
atomes ont horreur de la solitude (à part ceux qui constituent l'argon, le néon, l'hélium
et quelques autres gaz). Les autres atomes font tout ce qu'ils peuvent pour rencontrer des
atomes d'espèce différente et s'unir étroitement à ceux, pour constituer une molécule. Par
exemple, un atome d'oxygène cherche à s'unir aux atomes d'hydrogène (il en prend même
deux simultanément), et cela fait une molécule d'eau. A défaut d'un atome de nature dif-
férente, il s'unira avec un atome identique : l'atome d'oxygène, s'il ne trouve pas « mieux »,
s'unira avec un autre atome d'oxygène. Cela donnera une molécule du gaz qu'est l'oxy-
gène, dans lequel il n'y a pas de pauvres atomes d'oxgène solitaires, sauf circonstances
exceptionnelles et fugitives.
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IG. —Alors, au fond, l'atome est un constituant de la molécule, qui est elle-même
un constituant de la matière. Est-ce bien cela ?
CUR. —Rigoureusement exact et bien dit. Bravo. Puisque vous me semblez tellement
en forme, allons maintenant plus au cœur de ladite matière. Savez-vous ce qu'il y a dans
un atome ?
le. —Je me le rappelle à peu près : un noyau et un électron.
CliR. —D'accord pour le noyau, mais, pour ce qui est autour, il n'y a que l'atome
d'hydrogène qui comporte un seul électron. Les autres atomes en comportent un nombre
qui peut aller jusqu'à 92 pour les éléments naturels (l'atome à 92 électrons est celui de
l'uranium). Mais on a pu réaliser, par « synthèse nucléaire », des atomes ayant jusqu'à
cent électrons et même plus.
IG. —Avec tellement d'électrons, ces atomes doivent être très lourds.

Noyaux et électrons
CUR.—Très amusant, cela. Ces atomes sont effectivement lourds (tout est relatif,
ils sont lourds par rapport à l'atome d'hydrogène, mais, si « lourds » qu'ils soient, il en
faut tout de même des dizaines de milliers de milliards de milliards pour arriver à quel-
ques grammes). Seulement, ce ne sont pas les électrons qui les rendent lourds. Dans un
atome, la masse vient, pour 99,98 070environ, du noyau et pour 1/4 000en moyenne des
électrons. Seulement, le noyau comporte des particules dites « protons » et-d'autres dites
« neutrons ». Elles ont la même masse (environ 1840 fois celle d'un électron), et il y a
toujours autant de protons dans le noyau qu'il y a d'électrons autour, parce que chaque
proton porte une charge positive, égale à celle d'un électron. Comme cela, l'atome est
normalement neutre du point de vue électrique. Les neutrons, eux, font une sorte de
« ciment »pour unir les protons. Ils n'ont pas de charge. Apart le cas de l'atome d'hydro-
gène (son noyau comporte uniquement un proton tout seul), il ya, en moyenne, dans les
noyaux des atomes, de dix à seize neutrons.pour dix protons.
IG. —Bougrement compliqué, tout cela. Mais, dites-moi, il y a un mot dans votre
explication qui m'a étonné : vous medites que l'atome est « normalement neutre ». Peut-
il cesser de l'être ?
CUR.—Ah, Ignotus, je suis ravi que vous ayez remarqué ce « normalement », parce
que, précisément, nous allons considérer les cas « anormaux », les seuls qui nous intéres-
sent. On peut rompre cet équilibre des charges entre le noyau et les électrons. Cela se fera
par des moyens mécaniques (le frottement demonchiffon de laine), thermiques (en chauf-
fant), lumineux (en éclairant), chimiques (par attaque par unacide) et surtout magnétique
(en faisant agir un champ magnétique variable). Voyez, tout à l'heure, nous avons rompu
l'équilibre de neutralité des atomes de marègle en plastique en la frottant. Ici, il se trouve
que l'on a amené un excès d'électrons dans la zone frottée (mais il ya des cas où, au con-
traire, on crée localement une pénurie d'électrons, un déficit, en quelque sorte). Comme
les électrons portent une charge négative, un excès d'électrons sur ma règle de plastique
correspond à une zone « électrisée négativement ».
IG. —Bon, je vois. Ennuyeux, cela, que les électrons portent une charge négative,
ça complique les raisonnements. Mais on ne peut pas aller le leur dire... alors tant pis.
Mais, dites-moi, si mes souvenirs sont exacts, on m'a dit autrefois que « des charges de
même sens se repoussent ». Ces électrons entassés en excès sur le bout de votre règle de
plastique, ils ont sûrement enviedese fuir les uns les autres, de s'en aller loin, n'est-ce pas ?
CUR.—Je ne peux pas aller le leur demander, mais c'est vraisemblable. Seulement
il ne suffit pas qu'ils en aient envie : il faut aussi que la matière où ils se trouvent leur
permette de se déplacer. Or, précisément, le plastique (comme le verre, le mica et bien
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d'autres corps) ne permettent absolument pas aux électrons de se déplacer. On dit que
ces corps sont des isolants.
IG. —Tiens, on m'avait dit qu'un isolant c'était un produit qui ne laissait pas pas-
ser l'électricité.
CUR.—On avait eu raison de vous le dire : l'électricité est faite par un mouvement
d'électrons. Si la région que l'on a enrichie en électrons, et une autre région, apauvrie
en électrons, sont misesen communication, par l'intermédiaire d'une matière qui ne s'op-
pose pas au passage des électrons (un métal, par exemple), il y a passage en masse des
électrons de la zone trop négative (ayant trop d'électrons) vers la zone positive (qui man-
que d'électrons). Ce passage est ce que l'on appelle un « courant électrique ».
-1
Le « sens » du courant
IG. —Je vois. Je pense que, dans ce cas, on appelle « conducteur » la matière qui
laisse passer les électrons. Mais, ce qui me choque, c'est de voir le courant aller du négatif
au positif, on m'avait dit autrefois le contraire...
CUR. —On avait eu raison, parce que l'on parlait du « sens conventionnel » du cou-
rant, une notion purement abstraite. Mais, comme le courant électrique est fait d'un dépla-
cement de particules à charges négatives, il est normal que le sens du mouvement de ces
dernières soit opposé au sens que l'on a défini comme « sens conventionnel » du courant.
Ic. —Mais alors, pour revenir à votre règle en plastique, si l'on pouvait transférer
les électrons en trop (que vous avez accumulés par frottement) dans un métal pour les
laisser passer, on fabriquerait du courant électrique ?
CUR. —Vous avez entièrement raison. C'est ainsi qu'étaient faites les premières
« machines électriques » d'il y a deux siècles. Mais elles ne pouvaient fournir qu'un cou-
rant minuscule : à peine mille milliards d'électrons par seconde.

Fig. 1.1. —L'eau acidulée agit, par attaque chimique, en prenant des électrons à la lame de cuivre et en en
donnant à la lame de zinc. Si l'on relie les deux conducteurs de cette pile (car c'est une pile) par un fil, les élec-
trons vont du zinc au cuivre. Oh dit que du courant électrique, passant dans le fil, passe dans le « sens conven-
tionnel » du cuivre vers le zinc.
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IG. —Pas plus, vraiment ! Merci du peu ! Mais c'est énorme, ça !


CUR. —Oh non, tant s'en faut. N'oubliez pas la petitesse de la charge d'un électron.
Ce courant de mille milliards d'électrons par seconde est cependant un million de fois plus
petit que celui qui passe dans votre ampoule de lampe de poche.
IG. —C'est vraiment minable, la charge d'un électron !
CUR. —C'est petit, mais, par rapport à sa masse, c'est énorme : songez que, avec
un « gramme d'électrons » (si l'on arrivait à isoler un gramme de ces particules à « l'état
pur »), on pourrait alimenter votre magnétophone pendant trente ans.
IG. —Il y a vraiment des chiffres stupéfiants. Mais alors, puisque la production par
frottement est tellement insignifiante, pourquoi m'en avez-vous parlé ?
CUR. —Pour deux raisons. D'abord parce que nous avons pu, ainsi, définir le champ
électrique, qui va mettre en mouvement les charges ; ensuite parce que cela nous a permis
de voir ce qu'était une charge par elle-même, arrêtée, autrement dit, de « parler de l'eau
avant de parler des fleuves ».
IG. —Alors, pour réaliser ces « fleuves », par quoi remplacerons-nous l'action de
votre chiffon de laine ?

La pile
CUR. —Pour commencer, par une action chimique. Imaginez (fig. 1.1) que vous
trempiez, dans une solution acide, une plaque de zinc (attaquable) et une de cuivre (pres-
que inattaquable). L'action chimique va créer un excès d'électrons sur le zinc, un défaut
sur le cuivre. Si vous reliez, par un fil extérieur, la plaque de cuivre à la plaque de zinc,
les électrons en excès sur le zinc iront, par le fil, vers la plaque de cuivre. Vous avez réalisé
une pile. Elle transforme l'énergie chimique en énergie électrique. A l'intérieur de la pile,
l'action de l'acide va, en quelques sorte, « rehisser » les électrons d'un « niveau bas » (le
cuivre) vers un « niveau haut » (le zinc). Tout se passe un peu comme si une pompe (fig
1.2) puisait sans cesse de l'eau d'un récipient inférieur B pour la hisser vers un récipient
A à niveau haut, permettant ainsi à un courant continu (d'eau) de passer de A vers B par
un tube (le fil conducteur).
IG. —Mais, dites-moi, dans le cas des récipients et de l'eau, on peut définir une pres-
sion, donnée par la différence de niveau h, qui pousse l'eau de A vers B. Ya-t-il une gran-
deur de ce type pour le cas de votre bizarre pile ?
CUR. —Cette pile n'est bizarre que parce que vous êtes trop jeune pour avoir connu
des piles de ce type. Maintenant, pour répondre à votre question, il y a une grandeur qui
exprime l'équivalent électrique de la pression : on l'appelle la « tension » ou « différence
de potentiel ». Elle traduit la force qui met en mouvement les charges. On la mesure en
volts. Pour un élément de pile, on a ainsi de un à trois volts, suivant les produits utilisés
pour les électrodes et pour ce qui les attaque. Mais, pendant que nous en sommes aux
analogies avec des récipients et des écoulements d'eau, il y a une autre grandeur que l'on
doit définir, dans notre histoire du tube qui laisse couler l'eau de A vers B. Voyez-vous
de quoi il s'agit ?
IG. —Je ne vois pas, moi. Vous pensez peut-être à la longueur du tube ?
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Fig. 1.2. —Le rôle de l'action chimique est de maintenir une « différence de niveau d'électrons »constante
entre le cuivre et lezinc, commela pompe maintient unedifférence de niveau, h, constante, entre les deuxréci-
pients Aet B, malgré le courant d'eau qui passe de Avers Bpar le tube.

L'intensité
CUR. —Non. Nous en reparlerons plus tard, mais, pour le moment, je pense à quel-
que chose de plus immédiat : il passe de l'eau dans le tube, et il me semble qu'il y a lieu
de préciser quelque chose à propos de cette eau.
IG. — Peut-être la vitesse avec laquelle elle passe.
CUR. —Vous n'êtes pas loin de ce que je voulais vous faire dire. Je m'intéresse moins
à la vitesse de l'eau dans le tube qu'à son débit, en litres par secondes. C'est très impor-
tant, cela, car ça conditionne le travail que devra fournir la pompe pour remonter cette
eau, chaque seconde, de B vers A.
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(G. —Mais c'est bien sûr, j'aurais dû y penser. Alors, en électricité, on va compter
le débit de charges, par exemple en électrons par seconde.1
CUR.—On pourrait le faire, mais cela donnerait, commeje vous l'ai dit, des nom-
bres énormes. On a choisi, pour d'autres raisons, une unité qui s'appelle l'ampère, qui
correspond à un débit de 6 241 450 383 milliards d'électrons par seconde. Il vaut mieux
écrire ce nombre sous la forme :
1A=6,241 450 383 1018 électrons/seconde
IG. —Unchoix vraiment simple, il n'y a pas à dire ! Enfin, je pense que l'on a choisi
l'unité « ampère »alors quel'on ne savait pas encore la valeur dela charge d'un électron,
alors je pardonne à Monsieur AMPEREson choix bizarre.
CUR.—J'en suis heureux pour lui. J'en profite pour vous préciser l'existence d'une
autre unité, celle de « quantité d'électricité », autrement dit de charge. On la nomme le
« Coulomb », c'est la charge que transporte, en une seconde, un courant dont l'intensité
est de un ampère.
IG. —Alors, si je comprends bien, un coulomb représente votre fameux nombre de
6,241 etc. 1018électrons.
CUR.—Bravo, Ignotus, vous avez parfaitement compris. Nous allons terminer notre
premier entretien sur votre réponse qui me fait très plaisir et nous préciserons d'autres
notions bientôt.

COMPLEMENTS AU CHAPITRE 1

Unécouteur (téléphonique par exemple) nécessite une puis- L'électrisation est produite par un déséquilibre, dans les
sance donnée, très faible (un milliardième de watt suffit) pour atomes d'un corps, entre les charges positives (portées par les
fournir un son. Dans un récepteur sans pile, cette puissance est noyaux des atomes) et les charges négatives (électrons), situées
fournie par les « ondes ». Ces ondes sont émises dans l'espace autour de ces noyaux.
par l'antenne d'émission, rayonnant une forte puissance. Elles Les corps qui laissent le passage aux électrons sont dits
comportent un champ magnétique (ce que l'on trouve autour « isolants », les métaux, qui laissent les électrons passer, sont
d'un aimant et qui agit sur une aiguille aimantée) qui change dits « conducteurs ». Le courant électrique est le résultat d'un
périodiquement de valeur, que l'on nommechamp magnétique déplacement d'électrons. On peut réaliser un courant qui dure,
« haute fréquence », plus un champ électrique qui en fait autant. en appauvrissant systématiquement un corps en électrons (il
devient positif), par exemple par action chimique (pile). Lecou-
Le champ électrique est ce que l'on observe autour d'un iso- rant électrique se mesure en ampères. Un ampère correspond
lant, électrisé par frottement par exemple. au passage de 6,241 450 838.1018 électrons par seconde.
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CHAPITRE 2
La notion de tension reliée à celle de travail. Analogie hydraulique du cou-
rant. Notion de résistance, sa variation enfonction de la longueur et de la section
du fil. Le néologisme « résisteur ». Résisteurs en série et en parallèle, loi de Joule.

LOI D'OHM
CURIOSUS.—Alors, Ignotus, avez-vous lu le petit papier que je vous ai remis le len-
demain de notre premier entretien ?
IGNOTUS.—Je l'ai lu, relu, et bien compris. Mais je constate que je ne sais toujours
rien sur les ondes, sur le petit poste sans pile, sur...
CUR. — Doucement, nous commençons. Mais, vous allez voir, cela sera moins long
que vous ne le craignez. Nous allons aujourd'hui voir comment sont liées, l'intensité d'un
courant dans un fil et la tension aux bornes de ce fil.

La tension

le. —Qu'entendez-vous exactement par « tension aux bornes » du fil ?


CUR.—Vous vous souvenez : notre source d'électricité (momentanément il s'agit
d'une pile) utilise l'action chimique pour enrichir en électrons le pôle négatif de la pile
(la plaque de zinc), et appauvrir en électrons le pôle dit « positif », le cuivre. Il s'établit,
entre ces plaques, une différence d'état électrique, que nous avons comparée à une diffé-
rence de niveau entre deux récipients reliés par un tube. Pour bien connaître la force qui
met en mouvement l'eau dans le tube, nous pourrions (fig. 2-1) mettre un « manomètre
de différence », M, qui nous permet de connaître la différence de pression P capable de
déplacer l'eau. Ainsi, P est la « pression entre les bouts du tube ». De même, pour les
pôles de notre pile, le fil qui les relie transporte des charges, parce que ses deux extrèmités
(on dit ses deux « bornes ») ne sont pas au même « niveau électrique », cette différence
de« niveau », ou différence de potentiel, ou tension, s'exprimant en volts. Unepile comme
celle que je vous ai décrite donne à peu près 1Ventre ses deux lames. C'est le premier
modèle, découverts par VOLTA, qui a laissé son nom à l'unité de tension.
IG. —Alors, cette tension c'est la même chose que la différence de niveau h entre
les surfaces des deux réservoirs que nous avons vus la dernière fois.
CUR.—Oui, c'est tout à fait analogue. En fait, pour être plus précis, dans le cas des
deux réservoirs, nous pourrions nous faire une idée de la différence de niveau en comp-
tant le travail qu'il faut faire contre la pesanteur pour remonter une quantité connue d'eau
du récipient bas (B) au récipient haut (A). Vous connaissez, je l'espère, l'unité de force ?
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Fig. 2-1 : Le«manomètrededifférence », M,mesurela différence depression entre lesdeuxextrémités du


tubeconducteur(d'eau) qui relie les récipients Aet B.

Force et travail
IG. — Bien sur, c'est le kilo.
CUR. — Horreur ! Mais vous retardez affreusement, Ignotus ! Il y a bien longtemps
(et c'est fort heureux) que l'on n'utilise plus le « kilogramme-force », mais l'unité dite
« newton », qui permet des calculs bien plus cohérents. Voyez-vous, une force est définie
par la possibilité qu'elle a de faire accroître la vitesse d'une masse à laquelle on l'appli-
que. Si vous appliquez à une masse d'un kilogramme (le kilogramme-masse est l'unité nor-
male d'aujourd'hui) une force de un newton, vous communiquerez à cette masse l'aug-
mentation de vitesse (on dit l'accélération) unité, autrement dit, sa vitesse augmentera de
1 m/s à chaque seconde. La force qu'exerce l'attraction de la Terre sur cette masse d'un
kilogramme, sous nos latitudes, est environ 9,8 fois plus forte que le newton. Autrement
dit, le newton est à peu près la force avec laquelle la Terre, sous nos latitudes, attire une
masse de 102 g.
IG. — C'est bougrement compliqué, tout cela. Au fond, votre unité de force est un
peu indépendante de l'attraction terrestre, si je comprends bien.
CUR. — Vous comprenez parfaitement, Ignotus, et c'est bien là son grand intérêt.
Le poids d'une masse de 1 kilogramme est de l'ordre de 9,8 newtons sur la Terre sous
nos latitudes, il est nul dans l'espace, il est d'un peu plus d'un newton et demi sur la Lune,
mais, même dans l'espace, si vous appliquez une force de un newton à une masse de un
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kilogramme, vous aurez une accélération unité. Donc, pour en revenir à notre exemple
hydraulique, si je prends une masse d'à peu près 102 g d'eau (qui pèse environ un newton
par ici), et que je la rehisse de un mètre, je fais un travail unité : on dit que c'est un travail
de un joule.
IG. —C'est vraiment la façon la plus compliquée que l'on puisse trouver pour dire
que la dénivellation est de un mètre...
CUR. —D'accord avec vous, mais si on transpose au cas des « niveaux électriques »,
s'il y a, entre deux points, une différence de potentiel de V volts, il faudra un travail de
Vjoules pour amener une charge de un coulomb d'un de ces points à l'autre. Si vous vou-
lez un exemple numérique, quand une charge de un coulomb « tombe » de 12 V, elle accom-
plit un travail de 12 J. C'est à partir de cela que l'on définit le volt. Je reconnais que ce
n'est pas si simple. Dites vous, en quelque sorte, que la tension, entre deux points, c'est
une « envie de passer » de l'électricité d'un point vers l'autre.

Comment varie l'intensité


16. —Alors, cette « envie de passer » c'est la cause, et l'intensité c'est l'effet.
CUR. —Parfaitement. Vous avez compris. Alors, maintenant, nous allons essayer de
préciser la relation qui lie la cause (la tension) à l'effet (l'intensité). Je crois que cela vous
sera peut-être plus facile en regardant notre « modèle hydraulique » de la figure 2-1. A
votre avis, pour une différence donnée de pression P, quelles sont les grandeurs qui pour-
raient agir sur le débit d'eau en litres par secondes ?
IG. —Le diamètre du tube, bien sûr : plus il est étroit, moins il laisse passer d'eau.
CUR. —Vous avez raison. Il faut aussi tenir compte de la longueur du tube : plus
il est court, mieux l'eau passe, pour un tube de diamètre donné. Cela dit, plutôt que de
parler de son diamètre, je parlerai de sa « section », soit de la surface intérieure du trou
du tube, la surface qu'il offre au passage de l'eau. Alors, pour un fil conduisant des char-
ges entre deux points à des « niveaux électriques » différents (autrement dit, deux points
entre lesquels il y a une différence de potentiel), nous aurons aussi un effet de « gêne »
au passage du courant électrique. Cette « gêne » est d'autant plus grande qu'il faut beau-
coup de volts et que l'on produit moins d'ampères. On la mesure donc en divisant la ten-
sion (en volts) par l'intensité (en ampères). On la nomme la « résistance » du conducteur,
on l'exprime en ohms. S'il faut, par exemple, 12 Vpour faire passer 3 A dans un conduc-
teur, nous dirons que la résistance de ce conducteur est égale à 12/3 = 4, soit 4 ohms,
ce que l'on représente par le symbole n, soit R = 4 n.
IG. —Bon, je vois. Mais, dites-moi, ne serait-il pas plus normal de parler de la
« facilité offerte au courant » que de la « gêne », cette « facilité » augmentant avec l'in-
tensité, et diminuant quand la tension monte ?
CUR. —Vous ayez parfaitement raison d'évoquer cette façon de noter la propriété
du conducteur. On le fait, effectivement, et l'on parle alors de « conductance », dont l'unité
est le « siemens », qui est l'inverse de l'ohm, puisque l'on trouve la conductance en divi-
sant la tension U par l'intensité I. Dans le cas de notre conducteur de tout à l'heure, dont
nous avons calculé qu'il faisait 4 n, nous pouvons voir qu'il a une conductance de
3/12 = 0,25 S, qui signifie un quart de siemens. Il est, en effet, très commode de parler,
. selon les cas, de la conductance ou de la résistance d'un conducteur (et l'on passe très
facilement de l'une à l'autre). Mais, comme vous le verrez, on parle très souvent de la
résistance et très rarement de la conductance. Cela tient d'ailleurs au pessimisme naturel
de l'esprit humain.
IG. —Comment cela ?
ClIR. —Ignotus, demandez à un automobiliste de vous désigner un point après un
carrefour, il vous dira : « C'est à cent mètres après le feu rouge », mais il ne parlera jamais
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du « feu vert ». Pour les conducteurs électriques, on parle plus volontiers de la gêne qu'ils
provoquent (leur résistance) que de la facilité avec laquelle ils laissent passer le courant
(leur conductance). Mais, si vous savez parler aussi bien de l'une que de l'autre, cela vous
aidera par la suite.
Donc, pour écrire quelques formules (oh, ne vous alarmez pas, elles sont extrême-
ment simples), si nous désignons la tension par U, l'intensité par i, la résistance par R,
la conductance par K, on peut écrire :
R=Q , K=L , U=Ri , i=KU
i U
IG. —En général, j'ai horreur des formules, mais je dois reconnaître que celles-là
sont simples. Seulement, vous avez dit tout à l'heure que, pour le passage de l'eau dans
le tube, on devait tenir compte de la longueur du tube et de sa section. Nous n'avons rien
vu d'équivalent ici pour le passage de l'électricité.

Calcul de la résistance
CUR. —J'allais y venir. Pour un fil homogène, plus il est long, plus sa résistance est
grande. A l'opposé, plus sa section est grande, plus sa résistance est faible, alors...
IG. —Ça y est, j'ai trouvé ! Nous allons trouver sa résistance en divisant sa longueur
par sa section.
CUR. —Ignotus, vous êtes en très bon chemin. Mais il vous manque encore quelque
chose : n'oubliez pas que tous les métaux ne sont pas identiques ; il y en a qui sont meil-
leurs conducteurs que d'autres. Imaginez, par exemple, différents fils ayant une section
de 1 mm2 (soit un diamètre d'environ 1,1 mm), et une longueur de 60 m. Je prend ces
valeurs parce que, en cuivre, un tel fil a juste une résistance de un ohm. Mais, en argent
(le seul métal meilleur conducteur que le cuivre), on n'aurait que 0,9 0. Si le fil était en
aluminium, nous trouverions 1,6 9 ; s'il était en fer, nous aurions 5,6 9 et en chrome 23 ü.
IG. —Alors, il n'y a plus moyen d'exprimer la valeur de résistance.
CUR. —Si, mais en introduisant, dans la formule qui l'exprime, un coefficient carac-
téristique du métal. Ce coefficient s'appelle sa « résistivité », on le note par la lettre gre-
que Q(rho), et on écrit alors :

où L désigne la longueur (en mètres) et s la section (en mètres carrés). Si je veux calculer
cette résistivité, il me faudra donc multiplier la résistance Rpar la section s, puis la diviser
par la longueur L :

Donc, puisque nous multiplions des ohms par des mètres carrés, pour les diviser par
des mètres, nous exprimons finalement cette résistivité comme un produit d'ohms par des
mètres. On la mesure donc en ohm x mètre (fl.m). Par exemple, pour le cuivre, la résisti-
vité est d'environ :
1,67 . 10-8
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1(;. —D'où sort cet ahurissant 10-8 ?


CUR.—Du calcul, tout simplement. Dites-moi, Ignotus, combien un millimètre carré
vaut-il de mètres carrés ?
k. —Un millième, évidemment.
CUR.—Horreur et abomination ! Mais, enfin, Ignotus, dans un mètre carré, je peux
placer mille rangées contenant chacune un millier de petits carrés d'un millimètre de côté.
Si je sais compter, cela en fait un million en tout, non ?
IG. —Je m'écroule de honte. Alors, pour calculer la résistivité du cuivre, je vais mul-
tiplier la résistance du fil (de 60 met de un millimètre carré) par un millionième, puis la
diviser par 60, cela donne :

... et je trouve comme vous, à peu près 1,67 cent-millionième, que vous écrivez 1,67.10-8.
Bon, cela va.
CUR.—Ouf ! Vous avez bien rattrapé votre abominable erreur. Puisque je vous vois
si bien disposé, calculez-moi donc la résistance d'un fil de cuivre de 0,2 mmde diamètre
et de 100 m de longueur.
1(;. —Si vous n'y voyez pas d'inconvénient, je sors ma calculatrice de poche.
CUR.—Parfaitement d'accord, Ignotus, ces instruments sont tout à fait précieux si
on les utilise correctement et quand il faut.
le. —Alors voilà. Vous m'avez dit que, pour le cuivre, on avait :

Je commence par calculer la section s. Cette fois, je fais attention pour l'expression
en mètres carrés. Je vais vous étonner, mais je me rappelle bien la formule de la surface
s d'un cercle de diamètre d, c'est 7rd2/4. Alors, pour d = 0,2 mm, soit 0,2 millième de
mètre, ou 2 dix-millièmes de mètre, cela fait 2.10-4. Ma machine accepte de calculer avec
les puissances de 10 (j'aime bien cela, sinon je m'embrouille souvent) et j'y vais. Je trouve
une surface de 3,14.10 -8. Je la loge dans la mémoire de ma calculatrice.
CUR. —Parfait, Ignotus, je suis plein d'admiration. Continuez.
IG. —Mais de rien, je suis toujours comme ça... Nous avons donc dit que l'on doit
poser 1,67.10-8, ça y est. Je le multiplie par 100 (oui, je sais, j'aurais pu faire cela sans
la machine, mais, avec les puissances de 10, et négatives par raffinement de sadisme, je
suis sûr de me tromper). On arrive à 1,67.10 - 6. Je divise maintenant par le contenu de
la mémoire, puisque c'est la section s et j'obtiens 53.

Plaçons des fils en série

CUR. —Exact, 20/20, malgré votre multiplication par 100 (et aussi le 10-8 de la sec-
tion , que vous auriez pu éliminer avec le 10-8 de la résistivité). Alors, dites-moi quelle
sera la tension aux bornes de ce fil si vous y faites circuler un courant de 0,1 A.
IG. —Je vois, vous voudriez que je prenne ma machine pour multiplier 53 par 0,1,
mais tout de même je vous réponds sans la calculatrice. II y aura :
U= Ri = 53xO,1 = 5,3 V
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ClIR. —Très bien. Et maintenant, imaginez un second fil, de même longueur et de


même diamètre, mais en aluminium, celui-là. Quelle sera sa résistance ?
IG. —Mais je ne peux pas vous répondre : vous ne m'avez pas donné la résistivité
de l'aluminium.
CUR.—Vous avez raison, mais je vous ai donné une indication qui vous permettrait
de répondre. Je vous ai dit que des fils identiques en section (1 mm2)et en longueur (60 m)
avaient une résistance de 1fi pour le cuivre, 1,6 fi pour l'aluminium et 5,6 fi pour le fer.
Vous vous en souvenez.
Ic„ —Oui, mais cela ne medonne pas la résistivité. Ah, oui, je vois, il faut la calcu-
ler à partir des données.
CUR.—Rectification, Ignotus, on peut calculer la résistivité, mais il est plus simple
de dire que, pour des valeurs de L(60 mdans notre exemple) et de s (c'était 1mm2)don-
nées, la résistance varie comme la résistivité. Donc, si, avec un fil de 100 mde longueur
et de0,2 mmde diamètre, j'ai 53 fi en cuivre, avec un fil de mêmediamètre et même lon-
gueur en aluminium, j'aurai une résistance 1,6 fois plus grande qu'avec du cuivre. Prenez
votre petite calculatrice et dites-moi combien vous avez avec 53 x 1,6.
k. —Ça y est : j'ai trouvé 84,8 n.
CUR.—Pour simplifier, nous dirons 85 n. Donc, si vous envoyez dans ce second fil
un courant de 0,1 A, vous voyez que vous aurez, aux bornes du fil, une tension de
85x0,1 =8,5 V. Et si le fil était en fer ?
IG. —Si j'ai bien compris, vous voulez que j'applique la même méthode. Comme,
d'après votre exemple, on a 5,6 fois plus de résistance pour le fer que pour le cuivre, la
résistance du fil de fer de 100 met de 0,2 mmde diamètre sera 53x5,6=297 fi à peu près.
Avec un courant de 0,1 A(j'anticipe votre question, n'est-ce pas ?), cela ferait une ten-
sion aux bornes de 29,7 V. Bon, alors, qu'est-ce que je vais en faire, de vos trois fils ?

Fig. 2-2 : Si l'on met en série des fils résistants de natures diverses, la même intensité (ici 0,1 A) passe dans
tous ces fils. Les chutes de tension dans ces fils s'ajoutent.

ClIR. —Vous allez les mettre bout à bout et faire passer 0,1 Adans tout le monde,
mis, commeon dit, « en série ». Quelle sera la tension aux bornes de l'ensemble (fig. 2-2).
(G. —Il y aura 5,3 Vaux bornes du fil de cuivre, 8,5 Vaux bornes du fil d'alumi-
nium et 29,7 Vaux bornes du fil de fer. Je pense qu'on doit ajouter ces tensions. Est-ce
bien ça ?
CUR.—C'est exactement ça. Vous aurez donc une tension totale de :
5,3 +8,5 +29,7=43,5 V
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Vous voyez que, comme cette tension correspond au passage d'un courant de 0,1 A,
cela correspond à une résistance totale (des trois fils en série) de 43,5/0,1 =435 9.
Ic;. —Cela me semble exact. Et alors ?
CUR. —Alors ? Imaginez que J'écrire votre somme de tout à l'heure en divisant tous
les termes par 0,1, on peut écrire :

Cela ne vous rappelle rien ?


1(;. —Attendez. Si... Au premier membre j'ai les résistances des trois fils, au second
la résistance du groupe des trois en série.

Un néologisme important.

CUR. —Alors, concluez : quand on place trois conducteurs en série, la résistance


totale est égale à la somme des résistances. On dit que les valeurs s'ajoutent quand on
met les résistances en série. Et puis, tenez, pendant que nous y sommes, je vais vous pro-
poser quelque chose. Le mot « résistance » désigne une valeur, exprimée en ohms, carac-
téristique d'un certain conducteur. Mais, comme on a réalisé des composants électriques,
faits justement de conducteurs présentant une valeur de résistance donnée, on a pris la
mauvaise habitude de désigner ces composants, ces éléments doués de résistance, sous le
nom de « résistances ». Ainsi, le même mot désignant deux choses, on s'y perd un peu :
on est obligé de parler de la « résistance d'une résistance ». Alors, si vous l'admettez, nous
allons employer ensemble un mot nouveau, un « néologisme », emprunté à nos amis anglais
(qui ont deux mots, eux, « resistor » pour l'élément, et « résistance » pour la propriété).
Nous dirons : « résisteur » quand il s'agira de l'élément, et « une résistance » quand il
s'agira de la propriété du « résisteur ».
IG. —Je suis très fier de partager avec vous un terme en langage secret.
CliR. —Bien, puisque vous admettez mon néologisme, je vais énoncer, en l'utilisant,
ce que nous avons établi plus haut : quand on met des résisteurs en série, la résistance
totale est égale à la somme des résistances des différents résisteurs.
IG. —Pour être franc, cette conclusion me semblait un peu évidente : chacun de vos
« résisteurs » ajoute son « coefficient de gêne » (autrement dit sa résistance) à celui des
autres.

Résisteurs en parallèle.

CUR. — La conclusion était logique, mais je ne dirais pas qu'elle était évidente. Et
maintenant, que pourrez-vous me dire de ce qui se passe si je mets les trois résisteurs (celui
qui est en cuivre, celui qui est aluminium et celui qui est en fer) comme l'indique la figure
2-3, autrement dit suivant le branchement que l'on nomme « en parallèle » ?
Ic,. —D'abord, une petite question : pourquoi avez-vous dessiné les résisteurs sous
forme de ce curieux zig-zag ?
ClIR. —Tout simplement parce que c'est le symbole que l'on utilise presque toujours
pour représenter un résisteur. Alors, mettons que l'on applique à tout cela, entre les points
que j'ai désignés par (A) et (B) une tension de 1 V, que se passera-t-il ?
IG. — La question n'est pas trop méchante : pour chaque résisteur, je vais diviser
la tension qu'or, un applique (1 V) par sa résistance, c.r.=mc cela j'aurai le courant qui
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passe. Pour le premier, cela donnera :


1/53 =0,01887 A, et pour le second :
1/85 =0,01176 Aet, pour le troisième, celui qui est en fer :
1/297=0,00337 A.
Ct!R. —Tout à fait d'accord ? Alors, finalement, quelle est l'intensité total débitée
par la pile de 1Vque j'ai branchée entre (A) et (B) !

Kig. 2-3 : Quand les conducteurs sont en parallèle, ce sont les intensités qui s'ajoutent pour donner l'intensité
totale, les tensions aux bornes des différents conducteurs étant égales.

1g. —Je pense que cela doit faire la somme des intensités, soit :
0,01887+0,0176+0,00337=0,034 Aà très peu près.
Cur. —Bravo, Ignotus, et je suis très content que vous m'ayez donné la réponse
0,034, alors que j'ai lu sur votre calculatrice 0,033999. Bon,"la pile débite donc 0,034 A.
Tout sepasse donccommesi elle débitait dans un résisteur unique dont la résistance aurait,
selon vous, quelle valeur ?
1g. —Pour que l'on ait 0,034 Asous 1V, il faudrait R = U/i = 1/0,034 et je trouve
environ 29,40. Mais, là, je ne vois aucune conclusion à tirer.
Cuit. —Vous allez la trouver facilement. Les valeurs des intensités que vous avezcal-
culées ne vous rappellent-elles rien ?
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I<> — Non, ce sont les quotients de 1 par les différentes résistances.


Ct R. —En d'autres mots, ce sont donc les inverses des résistances.
Ic.. —Oui, et alors... Ah oui, je me rappelle : ce sont les valeurs que vous avez appe-
lées les « conductances », et elles sont, je crois, exprimées en siemens.
CI R. —Vous avez raison de le croire, parce que c'est vrai. Donc, cette addition d'in-
tensités en ampères est, en même temps, une addition de conductances en siemens. Et que
pensez-vous du résultat de cette addition, de l'intensité 0,034 A ?
I(.. C'est l'intensité totale, mais c'est tout.
Ct r. —C'est plus que cela. Vous en avez bien pris l'inverse pour trouver la résis-
tance équivalente à l'ensemble (les 29,4 0). Alors ?
1<, —Je vois ce que vous pensez : cette valeur exprime la conductance de l'ensem-
ble, en siemens. Donc, quand on met des résisteurs en parallèle, c'est la somme de leurs
conductances qui donne la conductance totale.
Cir. — Ignotus, bravo, vous parlez comme un vrai traité de physique. Vous pou-
viez vous attendre logiquement à une telle valeur : quand on met des conducteurs en paral-
lèle, chacun contribue, pour sa part, au passage du courant : ils ajoutent donc leurs « faci-
lités offertes au passage du courant », autrement dit leurs conductances. Si je désigne par
C la conductance totale, C,, C, et C,, étant les conductances des trois fils, on aura :
c =c, +c, +c,
!(.. —Je dois admettre que c'est simple. Mais, comme tout le monde, vous me l'avez
dit, raisonne plus avec les résistances qu'avec les conductances, comment votre formule
se transforme-t-elle pour utiliser les valeurs en ohms, au lieu des siemens ?
Ct r. —J'allais y arriver. Si vous désignez par R,, R, et R, les résistances de vos trois
résisteurs, et par R la résistance équivalente à l'ensemble, comme R= I/C,R, = I/C1...
etc. vous aurez finalement :

Comme vous le voyez, c'est beaucoup plus complexe à écrire qu'avec les conductan-
ces, c'est bien pourquoi je vous ai dit que la manipulation de la notion de conductance
est très intéressante.
k. —Je suis tout à fait de votre avis, et je compte fonder l'A.P.P.N.C.T. (ou Asso-
ciation Pour la Propagation de la Notion de Conductance chez les Techniciens).

La puissance.

Ciir. — Ça me semble une bonne idée et je m'y inscrirai. En attendant, nous allons
voir une nouvelle loi que vous connaissez déjà sans le savoir. Que pensez-vous du produit
de la tension aux bornes d'un résisteur par le courant qui traverse ce résisteur ?
h;. —Euh... pas grand chose. Le quotient U/i donne la résistance, ça je l'ai bien
compris, mais le produit U i ne m'évoque rien.
Ct R. —Vous vous souvenez tout de même que, quand N coulombs « tombent » de
U volts, cela fait un travail (disons une énergie) de Ux Ncoulombs. Or, dans le résisteur,
il y a des coulombs qui « tombent », il y en a même i par seconde, puisque c'est la défini-
tion de l'intensité.
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I(.. —Bon, vous voulez donc me faire dire que, à chaque seconde, la « chute des
coulombs », comme vous dites, apporte une énergie égale à Uxi, en joules.
Cur. —C'est précisément ce que je voulais vous faire dire. Vous voyez donc que
l'électricité produit, chaque seconde, Ux i joules, autrement dit la pile de tension U qui
débite un courant i dans le résisteur produit Uxi watts.
1(;. —Tiens, moi qui croyais que le watt était une unité de puissance.
CI R. —Continuez à le croire, puisque c'est vrai. Je ne vous ai pas dit autre chose :
si on divise un travail (en joules) par le temps (en secondes) qu'on a mis pour le faire,
on obtient une puissance (en watts). On va désigner cette puissance par P et l'on aura :
P= Ux i.
Ic.. — Puisque vous aimez les formules, je pense que l'on pourrait en trouver une
autre. Je me rappelle ce que vous aviez dit avec U = R x i, alors, si je remplace U par
Rxi dans votre formule de puissance, j'aurai :
P= Rx i x i
ClIR. —Tout à fait exact, quoique je préfère écrire P = Ri2 et je viens dénoncer ainsi
la « Loi de Joule ». On peut d'ailleurs dire aussi, puisque

I(,. —Je vois. Mais vous ne trouvez pas ça bizarre, ce carré dans les deux formules ?
Cur. — Pas du tout : si vous multipliez, par exemple, la tension par 3, vous allez
multiplier aussi l'intensité dans le résisteur par 3, ce qui fait que la puissance sera multi-
pliée par 9, qui est bien le carré de trois, si je ne me trompe.
!t;- —Vous avez raison, je n'y avais pas pensé. Dites-moi, puisque nous avons trouvé
une certaine puissance produite par l'électricité, que devient cette puissance ?
Ciir. —De la chaleur, tout simplement. Votre résisteur va chauffer :' c'est ce que l'on
appelle l'effet thermique du courant, ou l'effet Joule. Si réchauffement est très fort, et
que le résisteur puisse arriver à une température très élevée sans être détruit, cela donne
même de la lumière : l'ampoule qui nous éclaire fonctionne comme cela.
II.. —Je vous ai bien suivi mais, même sans qu'il y ait du courant dans ma tête, je
sens que mon cerveau commence à trop chauffer. Ce n'est pas l'effet Joule, mais je pense
que je suis près de la limite de mes possibilités aujourd'hui, et, si vous le permettez, j'ar-
rête le magnétophone, avant de déboucher une bonne bouteille pour nous remettre tous
les deux.
CIr. —Excellente idée. Nous continuerons donc la prochaine fois.
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ISBN 2 10 002878 2
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