Ensembles de nombres
En mathématiques nous sommes confrontés à différents ensembles. Les plus simples d’entres
eux sont des ensembles de nombres. Nous allons étudiés certaines propriétés de ces derniers dans
ce chapitre.
1.1 Introduction
Certains nombres apparaissent naturellement dans le vie de tous les jours (notamment lorsqu’il
s’agit de dénombrer des quantités diverses et variées). Pourtant la construction historique (d’un
point de vue mathématique) de ces ensembles n’est pas forcément celle que l’on imagine. Voici
quelques mots à ce sujet :
• Les nombres entiers sont connus depuis Euclide (environ 300 av. J.C.), la notation N
est introduite par Peano en 1894 et sa construction formelle a été établie (de manière
indépendante) par Peano et Dedekind à la fin du 19ième siècle.
• Les nombres entiers relatifs (possédant éventuellement un signe « − ») apparaissent dans des
textes du mathématiciens indien Ârybhata (476 − 550) : ils permettent de traiter la notion
de dettes et de recettes. Ces nombres sont également présents dans les écrits du perse Abu
I-Wafa (940 − 998) ; en revanche, il faut attendre les travaux de Stevin (1548 − 1620) pour
qu’ils apparaisent en Europe. La construction formelle de cette ensemble est de nouveau
obtenue par Dedekind (1831 − 1916) et la notation Z (du mot allemand Zahlen signifiant
nombres) est popularisée par le mathématicien polycéphale Bourbaki (né en 1935).
• La notion de fraction est déjà présente dans des papyrus égyptiens (notamment le papyrus
Rhind datant de −1650 av. J.C.) mais leur véritable construction mathématique date des
travaux de Peano en 1895 ; il choisit la lettre Q (de l’italien quoziente signifiant quotient)
pour désigner de tels nombres.
√
• Certains nombres comme π ou 2 ne peuvent s’exprimer comme des fractions, l’ensemble
R contenant ces nombres n’a été inventé qu’à la fin du 19ième siècle par les mathématiciens
Cantor et Dedekind.
7
8 CHAPITRE 1. ENSEMBLES DE NOMBRES
Définition 1.2.1. 1. L’ensemble N désigne l’ensemble des entiers positifs. Autrement dit,
N = {0, 1; 2, . . . ; 100; . . . ; }
2. L’ensemble des entiers relatifs Z désigne l’ensemble des nombres entiers. Autrement dit,
Remarque. En particulier, N ⊂ Z ceci signifie que tous les éléments de N sont également des éléments
de Z. L’inclusion réciproque n’est pas vérifiée : en effet, −2 ∈ Z mais −2 ∈ / Z. Nous étudierons la
propriétés de ces deux ensembles plus tard dans l’année.
Définition 1.3.1. L’ensemble des nombres décimaux D est composé de nombres de la forme
a
avec a ∈ Z, n ∈ N
10n
Exemple 1.3.1. 1. −1 ∈ D car −1 = a
10n avec a = −1 ∈ Z et n = 0 ∈ N.
a
2. 20, 3 ∈ D car 20, 3 = 10 avec a = 203 ∈ Z.
Il est important d’observer que tout nombre décimal admet un développement décimal avec un
nombre fini de chiffres après la virgule.
1 3 217
= 0, 5 ; − = −0, 12 ; = 1, 736
2 25 125
Voici un deuxième ensemble de fraction, plus général.
Définition 1.3.2. L’ensemble des nombres rationnels Q est composé de nombre de la forme
a
avec a ∈ Z, b ∈ Z∗
b
1.3. NOMBRES FRACTIONNAIRES 9
Remarque. En particulier D ⊂ Q. Pour cela, il suffit d’observer que tous éléments de D s’écrit de la
façon suivante
a a
=
10n b
avec b = 10n ∈ Z∗ . Autrement dit D ⊂ Q. Comme nous le verrons l’inclusion réciproque est fausse.
Quelques exemples de nombres rationels.
1 1
2. 3 = 0, 33333 . . . ∈ Q car 3 = a
b avec a = 1 ∈ Z et b = 3 ∈ Z∗ .
Remarque. Il est possible de montrer que tous éléments de Q peuvent s’écrire avec un nombre fini
de chiffre après la virgule ou bien avec une période de nombre (après la virgule) qui se répète
indéfiniment.
Il est alors naturel de s’interroger sur le fait suivant :
1
= 0, 3333333 . . .
3
Ce nombre admet une période (le chiffre 3) qui se répète de manière infinie après la virgule. Il
s’agit d’un élément de Q mais se pourrait-il que 13 ∈ D ?
1
Comme nous allons le voir 3 / D. Avant toutes choses, il est important de noter certains faits.
∈
Définition 1.3.3. Tous les nombres divisibles par 3 peuvent s’écrire de la façon suivante :
Proposition 1. [Critère divisibilité] Un nombre est divisible par 3 si la somme des chiffres qui le
compose est divisible par 3.
Exemple 1.3.5. Par exemple, 27 est divisible par 3 car 2 + 7 = 9 est divisible par 3 ; 25 n’est pas
divisible par 3 car 3 ne divise pas 2 + 5 = 7.
1
Supposons donc, par l’absurde, que 3 ∈ D. Par définition de cet ensemble, cela signifie qu’il
existe a ∈ Z et n ∈ N tel que
1 a
= n
3 10
Nous allons voir que cette identité va nous amener à une contradiction. Pour cela, il suffit d’observer
que cette identité peut s’écrire sous la forme
10n = 3a.
Ainsi, 10n est un multiple de 3 (par définition, cf. 1.3.1), ceci est absurde car la somme des chiffres
composant 10n (ce nombre n’est rien d’autre que 1 suivit de n zéros) vaut 1 qui n’est pas divisible
par 3 (cf. proposition 1)
Comme nous l’avons fait remarquer plus tôt, les inclusions suivantes sont vérifiées
N⊂Z⊂D⊂Q⊂R
Il existe encore de nombreux ensembles en mathématiques mais il faudra patienter encore pour les
étudier.
Une question a longtemps embêtée l’école Pythagoricienne. Pendant longtemps, les élèves de
Pythagore étaient persuadés que toutes longueurs pouvant être dessiner devait aussi s’écrire comme
un nombre rationnel (i.e. une fraction ab ∈ Q). Ils furent bien ennuyé face à l’hypoténuse d’un
triangle
√ rectangle isocèle de côté 1.
√ En effet, d’après le théorème de Pythagore l’hypoténuse mesure
2 et comme nous allons le voir 2 ∈ / Q. Ceci sera traité dans un D.M.
1.5. ENCADREMENT PAR DES NOMBRES DÉCIMAUX 11
√
Proposition 3. 2∈
/ Q.
Démonstration. Cf. D.M. (donné dans le chapitre d’arithmétique)
d1 ≤ x ≤ d2 avec d1 , d2 ∈ D.
La différence d2 − d1 correspond à l’amplitude de l’encadrement.
√ √
Exemple 1.5.1. Il est évident que 1, 4 < 2 < 1, 5 est un encadrement de 2 d’amplitude
1, 5 − 1, 4 = 0, 1 = 10−1 .
D’une certaine manière, trouver un encadrement d’un nombre revient à faire des arrondis (à
l’inférieur ou au supérieur) d’un nombre en ne conservant qu’un certain nombre de chiffres après la
virgule.
Définition 1.5.2. Soit x ∈ R et considérons un encadrement de x d’amplitude 10−n :
1.6 Sous-ensembles de R
Il est parfois utile d’étudier des sous-ensembles de R, c’est à dire une collection de nombre réels.
Remarque. 1. Il faut prendre garde dans quel sens les symboles [ et ] sont placés. Si le crochet
est tourné vers « l’interieur », cela signifie que l’extrémité du segment (ou de la demi-droite)
fait parti de l’ensemble en question ; au contraire, si le crochet est tourné vers « l’extérieur »,
cela signifie que l’extrémité du segment (ou de la demi-droite) est exclue.
2. Attention au fait suivant : les symboles ±∞ ne sont pas des nombres réels et, au lycée, le
crochet se trouvant à côté de ce symbole est toujours ouvert (pour exclure cette valeur).
1.7. ENCADREMENT ET VALEUR ABSOLUE 13
Notons au passage que R =] − ∞; +∞[. Par la suite, il sera important de savoir passer d’une
notation à l’autre.
Définition 1.7.1. La valeur absolue d’une nombre réel x est définie comme suit :
x si x ≥ 0
!
|x| =
−x so x ≤ 0
Voyons sur quelques exemples.
Définition 1.7.2. Soient a, b ∈ R alors la distance d(a; b) entre a et b est définie par
d(a; b) = |a − b|
Remarque. En particulier, |a| = d(0; a). De plus, le fait que |a − b| = |b − a| peut s’interpréter
géométriquement en disant que la distance entre a et b est la même que celle entre b et a.
Pour que cela soit moins abstrait, nous allons voir qu’il est possible de relier cette notion de
distance avec les intervalles. Nous devrons résoudre des équations et inéquations impliquant la
valeur absolue.
Exemple 1.7.2. Résolvons |x − 3| = 2. Cela signifie que nous cherchons l’ensemble des nombres
x se trouvant à une distance de 2 du point 3. Un petit dessin permet de trouver que dans ce cas
x = 5 ou x = −1.
Remarque. Attention, l’équation |x + 2| = 4 peut s’écrire sous la forme |x − (−2)| = 4. Il faut donc
trouver l’ensemble des nombres se trouvant à une distance de 4 du point −2.
14 CHAPITRE 1. ENSEMBLES DE NOMBRES
Lorsque nous modifions le symbole = de l’équation précédente par <, ≤, ≥ ou >, nous des
intervalles (ou réunion d’intervalles) au lieu de deux nombres.
Voyons sur deux exemples ce qu’il se produit.
Exemple 1.7.3. 1. Résoudre |x−2| < 6 revient à déterminer l’ensemble des x se trouvant à une
distance au plus de 6 du point 2. Un dessin permet de montrer que l’ensemble des solutions
est l’intervalle ]4; 8[.
2. Résoudre |x − 1| ≥ 3 revient à déterminer l’ensemble des x se trouvant à une distance au
moins de 3 du point 1. Il s’agit donc de l’ensemble
Remarque. Il est important d’être capable de faire la démarche inverse : exprimer un intervalle (ou
une réunion d’intervalles) à l’aide de la valeur absolue. Pour cela, il faut déterminer a le centre de
l’intervalle et la valeur de r.
1. le centre de l’intervalle [−3; 7] correspond à la moyenne des extrémités du segment. C’est-à-
dire a = −3+72 = 4. La valeur de r est obtenue en déterminant la différence entre le centre de
l’intervalle et l’une de ses extrémités. Par exemple, r = 7 − 4 = 3. En conclusion,
x ∈ [−3; 7] ⇐⇒ |x − 4| ≤ 3
2. Dans le même esprit, l’intervalle ] − ∞; −3] ∪ [7; +∞[ peut s’exprimer à l’aide d’une valeur
absolue. Pour cela, on déterminer a = −3+7
2 = 4 et r = 7 − 4 = 3. Donc
2. l’ensemble des x ∈ R tels que |x − a| ≥ r désigne l’ensemble des réels ] − ∞, a − r[∪]a + r; +∞[.
énoncés par Hilbert en 1900 lors du deuxième congrès international des mathématiciens.
Voici un autre problème, moins vertigineux, survenant en théorie des ensembles. Il s’agit du
paradoxe de Russel qui a été découvert par le mathématicien éponyme en 1901. Il propose le
contexte suivant : supposons que dans une ville, le barbier ne rase que les hommes qui ne se rasent
pas mêmes et posa la question suivante