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République Tunisienne

Ministère de la Formation
Professionnelle et de l’Emploi

Guide de l’accompagnateur
de projets de l’économie
sociale et solidaire
Avec l’appui financier du :
Guide de l’accompagnateur
de projets de l’économie
sociale et solidaire
Copyright © Organisation internationale du Travail 2018
Première édition 2018

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ISBN: 978-92-2-133245-9 (Print)


ISBN: 978-92-2-133246-6 (web)

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Imprimé en Tunisie
TABLE DES
MATIÈRES

Remerciements 7
Liste des acronymes 8
Avant-propos 9

I – SE LANCER DANS UN PROCESSUS D’ACCOMPAGNEMENT 11


DE PROJET D’ECONOMIE SOCIALE ET SOLIDAIRE
Accompagner des projets d’ESS : quel processus et quelles positions pour
l’accompagnateur ? 11
Mieux comprendre l’économie sociale et solidaire 19
ESS, de quoi parlons-nous ? 19
Quels statuts juridiques pour l’ESS ? 20
Quel écosystème pour l’ESS en Tunisie ? 24

II – ACCOMPAGNER LE LANCEMENT DE PROJET D’ESS 29


A quel besoin de projet veut s’attaquer ? Analyse du contexte 29
Réflexion collective et recherche d’informations pour identifier
les besoins 29
Faire émerger les besoins ou les problèmes à traiter 31
Comment analyser le problème 33
Mobiliser la communauté et comprendre les parties prenantes du projet 37
37

III – ANTICIPER LE LANCEMENT ET STRUCTURER


L’IDÉE DE PROJET 45
Utiliser la créativité 45
Faire l’inventaire des ressources 46
La Charte du Projet pour fixer les grandes orientations de l’Organisation de
l’économie sociale et solidaire 47
Un modèle économique de l’organisation de l’économie sociale et solidaire 53

IV – S’organiser pour le bon fonctionnement du projet d’ESS 57


Organisation interne et gouvernance participative et démocratique 57
Planifier et organiser le travail du groupe 60
Accompagner le projet en activité 62
Accompagner à prendre les bonnes décisions 63
REMERCIEMENTS

Le guide de « l’accompagnateur de projets de l’économie sociale


et solidaire » est le fruit de la coopération entre le Ministère de la
Formation Professionnelle et de l’Emploi et les projets PROMESS
« Promotion des Organisations et des Mécanismes de l’Economie
Sociale et Solidaire » et JEMP « Jeunes et Employabilité »,
financés par le Royaume des Pays Bas et mis en œuvre par
l’Organisation Internationale du Travail (OIT).

L’élaboration du guide a été assurée par Mehdi Baccouche,


consultant auprès du Bureau International du Travail, sous la
supervision du Ministère de la Formation Professionnelle et de
l’Emploi.

L’auteur est reconnaissant aux cadres du Ministère de la


Formation Professionnelle et de l’Emploi ainsi que des structures
sous sa tutelle dans les Gouvernorats de Béja, Jendouba, Siliana
et le Kef pour leurs contributions efficaces.

Il saisit aussi cette opportunité pour remercier M. Karim Toumi


Coordonateur National du Projet PROMESS et Mme Nawel
Marzouki, Coordinatrice Nationale du Projet JEMP, pour leurs
contributions techniques substantielles et les orientations
stratégiques qu’ils ont définies en vue de la préparation du guide.

Ses remerciements s’adressent également à M. Abdel Monaem


Derouiche et M. Fakhreddine Mhadhbi, Coordinateurs locaux
du projet PROMESS, pour leurs commentaires et appui à
l’organisation de l’atelier d’expérimentation du guide.

REMERCIEMENTS
7
LISTE DES
ACRONYMES
AGR : Activités Génératrices de Revenus
AMF : Association de Micro-finance
ANETI : Agence Nationale de l’Emploi et
du Travail Indépendant
APIA : Agence de Promotion des
Investissements Agricoles
APII : Agence de Promotion de l’Industrie et
de l’Innovation
BAD : Banque Africaine de Développement
BFPME : Banque de Financement des Petites et
Moyennes Entreprises
BIT : Bureau International du Travail
BMC : Business Model Canvas
BP : Business Plan
BTS : Banque Tunisienne de Solidarité
CRDA : Commissariat Régional du
Développement Agricole
ES : Entreprise Solidaire
ESS : Economie Sociale et Solidaire
EE : Espace Entreprendre
GDAP : Groupe de Développement Agricole et de Pêche
IHEC : Institut des Hautes Etudes de Commerce
IMF : Institution de Micro-finance
ISG : Institut Supérieur
JEMP : Jeunes et employabilité
LABESS : Laboratoire de l’économie sociale et solidaire
OESS : Organisation de l’Economie Sociale et Solidaire
PROMESS : Promotion des Organisations et
des Mécanismes de l’Economie Sociale et Solidaire
SARL : Société à Responsabilité Limitée
SMSA : Société Mutuelle de Services Agricoles
SWOT : Strengths Weaknesses Opportunities Threats
TCSE : Tunisian Centre for Social Entrepreneurship
WES : Women Enterprise for Sustainability
WWF : World Wildlife Fund

8 LISTE DES ACRONYMES


AVANT-PROPOS

Si l’économie sociale et solidaire connaît, à juste titre, un regain


d’intérêt pour les acteurs publics et privés, à l’échelle régionale,
nationale et locale, la nécessité s’impose de consolider l’écosystème
naissant pour passer de l’intention à la mise en œuvre. Trouver
des solutions innovantes aux défis sociaux et environnementaux
auxquels fait face la Tunisie par le développement d’une
économie où la performance et la rentabilité sont mises au service
de l’intérêt général, est un objectif fondamental pour l’ensemble
des organisations de l’économie sociale et solidaire, existantes
ou en devenir. Le projet PROMESS a précisément pour but de
contribuer à la construction de cet écosystème, par l’appui aux
organisations et entreprises de l’économie sociale et solidaire, par
la mise en mouvement d’une dynamique institutionnelle et par la
mobilisation des acteurs de l’écosystème. Le projet JEMP, quant
à lui, a but d’améliorer l’employabilité des jeunes à travers la mise
en place de nouveaux services d’accompagnement qui facilitent
le retour des jeunes à l’emploi notamment dans l’économie
sociale et solidaire.

Bien souvent isolés, les acteurs sur le terrain de l’ESS n’ont


pas toujours devant eux un environnement propice pour se
développer, d’autant plus qu’ils sont loin de la capitale.
L’approche ESS exige - évidemment,- des communautés et
des entrepreneurs engagés et dévoués, mais aussi des acteurs
d’accompagnement à même de fournir le soutien nécessaire, tout
autant qu’une compréhension nouvelle de la part des acteurs
publics, une coopération avec le secteur privé « classique », une
mobilisation des universités, des financements adaptés, un cadre
réglementaire adéquat et une dynamique commune propre à
mobiliser tous ces facteurs.

En s’engageant au service des gouvernorats du Nord-Ouest,


les projets PROMESS et JEMP et leurs partenaires apportent
une réponse à ce défi, en transmettant aux acteurs locaux de
l’accompagnement les outils et les clés de compréhension leur
permettant d’être les agents locaux d’appui à la création et au
développement d’organisations de l’économie sociale et solidaire.
Un des éléments clés pour ces organisations de l’ESS en devenir
réside dans l’accès aux services d’accompagnement, qui doivent
être basés sur une approche partagée entre les différents acteurs
de la chaîne d’accompagnement sur le territoire. L’innovation du
modèle d’accompagnement des projets sera ainsi un facteur clé
de l’enracinement dans la durée des projets d’économie sociale
et solidaire.

AVANT-PROPOS
9
Ce guide a pour ambition d’éclairer le chemin de ceux et celles
qui vont endosser la responsabilité d’accompagner des projets
naissants ou en développement d’économie sociale et solidaire.
L’accompagnement sera ici d’une autre dimension : s’il fait appel
aux compétences et outils classiques de l’accompagnement
d’entreprise, il devra également mobiliser chez l’accompagnateur
les ressources nécessaires pour transmettre aux groupes
accompagnés les valeurs et concepts de l’économie sociale et
solidaire, et s’assurer que le projet en soit imprégné dans toutes
ses dimensions. L’accompagnateur devient-il dès lors, lui aussi,
par son action un acteur de l’ESS? Certainement ! Vivre les
valeurs de l’ESS dans sa mission d’accompagnement rendra
d’autant plus pertinent et légitime le rôle de l’accompagnateur,
et contribuera ainsi à renforcer un nouvel écosystème qui pense
différemment l’économie sur nos territoires, au service de ceux
qui la font.

10 AVANT-PROPOS
I –SE LANCER DANS UN PROCESSUS
D’ACCOMPAGNEMENT D’UN PROJET
D’ECONOMIE SOCIALE ET SOLIDAIRE

ACCOMPAGNER DES PROJETS D’ESS :


QUEL PROCESSUS ET QUELLES POSITIONS
POUR L’ACCOMPAGNATEUR ?

Mettre en place un accompagnement de projet d’économie


sociale et solidaire est à la fois une action valorisante pour
l’accompagnateur et un défi car ce type d’accompagnement
fait appel à des compétences et à des valeurs qui vont
au-delà de l’accompagnement classique. Il faut donc planifier
et adapter son accompagnement pour bien cibler son action.

Se lancer dans un processus d’accompagnement pour des


organisations de l’ESS signifie :

• Transférer des outils, méthodes et connaissances techniques


pour structurer, consolider ou développer le projet.
• Définir une attitude et une posture à observer, à mettre
en œuvre par le collectif porteur de projet d’ESS, qui doit
s’organiser et se responsabiliser.
• Faire vivre et renforcer les valeurs de l’ESS dans le projet.

Pour ce faire, l’accompagnement doit avoir un cadre et des


objectifs précis et se dérouler sur une durée limitée dans le
temps. Le cadre fixé va permettre de clarifier les rôles et
les engagements de chacun, tout en laissant aux acteurs la
possibilité de s’adapter en fonction de l’évolution de la relation.
La relation d’accompagnement n’est pas un chemin tout tracé.
L’accompagnateur doit percevoir le besoin et la situation du
moment pour s’adapter et agir en conséquence, en interaction
avec le collectif et la situation donnée. La spécificité de
l’accompagnement de projet d’économie sociale et solidaire
tient notamment à la mise en pratique des valeurs de l’ESS à
toutes les étapes de la maturation du projet. Ceci prend plus
spécifiquement forme quand on doit amenerle groupe à définir
sa mission sociale, à en mesurer l’impact et àladévelopper.
Il s’agit également d’interagir souvent avec un groupe, et
donc d’accompagner la mise en place d’une gouvernance qui
repose sur la participation de tous. Le modèle économique qui
sera développé devra aussi prendre en compte les valeurs de
l’ESS et, souvent, aller vers une forme hybride en termes de
revenus et de financement où le client peut être bénéficiaire,
ou le consommateur guère solvable… Enfin, la connaissance
du contexte et de l’ancrage territorial exigé par le projet vient
apporter une dimension supplémentaire à l’accompagnement.

I – SE LANCER DANS UN PROCESSUS D’ACCOMPAGNEMENT D’UN PROJET D’ECONOMIE SOCIALE ET SOLIDAIRE


11
Les phases de mise en œuvre d’un projet d’économie sociale et
solidaire peuvent être synthétisées ainsi :

1. Le travail communautaire

a. L’émergence d’un besoin collectif et/ou social, qu’on


analyse et qu’on comprend

b. Une première phase de prototypage oùl’on va designer


le projet et structurer le collectif

2. La préparation au lancement et le lancement

a. De l’idée à la structuration, les porteurs de projets


structurent l’idée dans toutes ses dimensions

b. La préparation au lancement

3. Le développement et la mise en marche du processus de


changement

a. Le suivi pour la bonne mise en place du projet, aussi bien


en structuration interne qu’en développement commercial.

b. Le suivi de l’impact social, aussi bien en interne, en


termes de gouvernance que dans la relation aux territoires
et aux parties prenantes

Le processus d’accompagnement passera donc par plusieurs


phases, dans lesquelles l’accompagnateur aura à chaque fois
un rôle spécifique. L’accompagnateur doit donc être en mesure
d’identifier la phase dans laquelle se trouve le projet, pour cibler le
bon besoin et apporter l’accompagnement adéquat.

Première étape : L’accompagnateur doit mener le groupe


à déterminerle besoin collectif ou le besoin social auquel il
souhaiterait apporter une réponse à travers le projet d’ESS.
Ce besoin doit être analysé et faire l’objetd’une étude des
exigences et des opportunités qui y sont liées, afin de formaliser
l’idée du projet. A ce niveau, l’accompagnateur ESS doit être en
mesure de:

• Transmettreles concepts ESS et situer le projet en fonction de


cesconcepts.
• Amener les porteurs de projets à prendre en compte
leurenvironnement socio-économique.
• Créer une dynamique de groupe pertinente.

12 I – SE LANCER DANS UN PROCESSUS D’ACCOMPAGNEMENT D’UN PROJET D’ECONOMIE SOCIALE ET SOLIDAIRE


Deuxième étape : L’accompagnateur va guider le groupe et
s’assurer de la bonne structuration du projet pour en anticiper le
lancement. L’accompagnateur doit être en mesure de mobiliser
les outils de base de la structuration d’un projet d’entreprise
auquel il faudraappliquer les critères ESS. Toute la complexité
de l’accompagnement réside, ici, sur l’équilibre à trouver entre la
performance économique nécessaire à la réussite du projet et la
concrétisation des valeurs ESS dans les process et orientations
stratégiques de l’entreprise. A ce niveau, l’accompagnateur ESS
doit être en mesure de:

• Elaborer un modèle économique et une proposition de valeur


« sociale » qui intègre le besoin du marché et le besoin social.
• Mettre en œuvre une planification stratégique qui permet
d’atteindre les objectifs économiques et sociaux.
• Concevoir une gouvernance participative.

Troisième étape : L’accompagnateur va appuyer la mise en


place effective du projet et le suivi de la réalisationdes objectifs,
en cohérence avec les principes ESS. L’accompagnateur doit
assurer la transition entre la phase de structuration et l’utilisation
des outils comme des moyens de pilotage du développement
du projet. Il devraassurer en même temps un accompagnement
classique de projet économique, tout en veillant surtout à la
bonne mise en pratique des principes d’ESS, notamment dans
la gouvernance du projet, la relation aux partenaires et acteurs
du territoire, la réalisation des objectifs sociaux et solidaires.
A ce niveau, l’accompagnateur ESS doit être en mesure de
mener les actions suivantes :

• Guider le groupe sur la voie de la viabilité économique


du projet.
• Mettre en œuvre la bonne gouvernance de l’organisation.
• S’assurer de la bonne communication externe et du bon
positionnement du projet.

I – SE LANCER DANS UN PROCESSUS D’ACCOMPAGNEMENT D’UN PROJET D’ECONOMIE SOCIALE ET SOLIDAIRE


13
Pour diagnostiquer le projet, on peut utiliser les quatre sphères
qui évoquent quatre dimensions dans la structuration du projet.

Sphère Sphère
Visible Organisationnelle

Sphère Sphère
Pensable Invisible

La sphère organisationnelle : La manière dont le groupe ou


le projet s’organise, en fonction de sa taille et de sa formalité :
Comment vont-ils atteindre lesobjectifs définis et s’organiser
au quotidien ? Comment sont répartis les rôles et les tâches ?
Est-ce qu’on doit fonctionner sur un mode hiérarchique ou plus
horizontal ? Toutes ces questions se retrouvent dans la stratégie,
la planification, la répartition des tâches et font appel à une
multitude d’outils et de règles interne.

Exemple d’outils à mobiliser : Le plan d’action, l’organigramme,


les fiches de poste, le règlement intérieur.

La sphère pensable : comment le groupe s’organise-t-il pour


penser sa stratégie et son développement ? Comment mobiliser
les ressources adéquates et penser la viabilité du projet ?
On retrouve ici notamment des outils comme le modèle
économique social (proposition de valeur, ressources allouées,
partenaires, clients, bénéficiaires, activités clés), la faisabilité,
les questions juridiques. Est-ce que le groupe est outillé et
dispose des compétences pour construire les bonnes bases de
son développement ?

Exemple d’outils à mobiliser : Charte du projet, Business model


social, analyse du problème, analyse des parties prenantes,
compte de résultats simplifié.

La sphère visible : qui reprend tous les messages envoyés


vers l’extérieur, essentiellement les outils de communication et la
réputation de l’organisation.

Exemple d’outils à mobiliser : Site web, réseaux sociaux,


visuels, plan de communication, logo, pitch.

14 I – SE LANCER DANS UN PROCESSUS D’ACCOMPAGNEMENT D’UN PROJET D’ECONOMIE SOCIALE ET SOLIDAIRE


La sphère invisible : fait référence à toutes les notions subjectives
autour des dimensions personnelles, des relations, des ambitions
et des frustrations. C’est souvent un grand défique de trouver
l’équilibre dans ce domaine lorsqu’il s’agit de projets collectifs :
le groupe se doit de travailler sur ces aspects qui sont parfois
peu visibles mais qui influent grandement sur la dynamique de
groupe. Il est donc important de les expliciter et de les exprimer,
pour garantir une dynamique et une durabilité du projet sur le plan
humain. Les questions de leadership, de pouvoir, de gestion de
conflit doivent être abordées de manière formelle ou informelle,
en lien avec les objectifs de l’organisation.

Exemple d’outils à mobiliser : gestion des conflits, espace de


prise de parole et d’expression, teambuilding.

Ici, l’accompagnateur doit faire le bilan avec le groupe pour s’auto-


diagnostiquer. On peut alors dessiner les sphères de manière
proportionnelle à la mise en place de chacune des sphères. Un
projet équilibré aura des sphères de même taille, alors qu’un
déséquilibre des sphères pointera les axes de travail à développer.

Sphère
Visible Sphère
Organisationnelle

Sphère Sphère
Pensable Invisible

Dans cet exemple, on voit que la groupe a bien travaillé sur


la sphère pensable (une stratégie, un modèle économique
théorique), qu’il a travaillé sur la sphère visible avant même
le lancement du projet (début de communication sur les
réseaux sociaux, réunions publiques), mais que la sphère
organisationnelle est faible, ce qui signifie que les outils de
travail au quotidien ne sont pas suffisamment en place. Enfin,
la sphère invisible estpetite, ce qui laisse à penser que les
motivations et frustrations potentielles des membres du groupe
n’ont pasété prises en compte,du moins pour l’instant.

I – SE LANCER DANS UN PROCESSUS D’ACCOMPAGNEMENT D’UN PROJET D’ECONOMIE SOCIALE ET SOLIDAIRE


15
Cette forme de diagnostic permet donc de visualiser de manière
simple les points sur lesquels il faut travailler.

Afin de commencer le diagnostic, on peut également utiliser un


modèle en parallèle qui permet d’aborder les grands points de
la structuration du projet, en observant la situation actuelle et en
prévoyant les actions de renforcement à mettre en œuvre. La
liste de questions ci-dessous permet de faire un premier bilan,
qui évoluera au fil de l’accompagnement. Le but n’est pas d’y
répondre, mais de voir si les porteurs de projet sont capables d’y
répondre, partiellement ou pas du tout.

Evaluation de la communauté
1. Quelle est l'étendue et la taille du problème communautaire Je sais parfaitement y répondre
que vous essayez de résoudre ?
2. Quels sont les atouts et les ressources locales que vous Je sais partiellement y répondre
pourrez investir ?
3. En quoi votre idée novatrice aide-t-elle à résoudre le Je sais parfaitement y répondre
problème social ?
4. Quel serait l'impact de votre idée sur la communauté au plan Je sais parfaitement y répondre
social, économique et politique ?
Analyse du secteur
1. Quelle est l'étendue du secteur en termes de services et de Je sais parfaitement y répondre
produits offerts ?
2. Dans quelles mesures les produits/services sont-ils essentiels Je sais partiellement y répondre
au client ?
3. Quelles sont les tendances qui façonnent l'avenir du secteur ? Je sais partiellement y répondre
4. Quel est le niveau de compétitivité dans le secteur ? Je sais parfaitement y répondre
Analyse du marché
1. Quelle niche de marché le produit/service occupera-t-il ? Je sais parfaitement y répondre
2. Qui sont les acheteurs potentiels du produit/service ? Je sais parfaitement y répondre
3. Quelles sont leur caractéristiques ? Je sais partiellement y répondre
4. Qui sont les fournisseurs principaux ? Où se trouvent-ils ? Je sais partiellement y répondre
Analyse de la compétitivité
1. Qui sont les acteurs clés du secteur ? Je sais parfaitement y répondre
2. Quelles sont leurs caractéristiques ? Je sais parfaitement y répondre
3. Quels sont leurs domaines de compétitivité ? (prix, qualité, Je sais parfaitement y répondre
image, portée…)
4. Quelle est la plus-value de votre produit/service par rapport Je sais parfaitement y répondre
aux autres produits/services du marché ?

16 I – SE LANCER DANS UN PROCESSUS D’ACCOMPAGNEMENT D’UN PROJET D’ECONOMIE SOCIALE ET SOLIDAIRE


Etude d’implantation
1. Un local accessible et à bon prix est-il disponible ? Je sais partiellement y répondre
2. A-t-il besoin de construction/restructuration/décoration ? Je ne sais pas y répondre
3. Dans combien de temps serait-il prêt ? Je ne sais pas y répondre
Possibilité de production
1. Quels sont les matériaux nécessaires pour le produit/service Je sais partiellement y répondre
et où les trouver ?
2. Quels sont les moyens de transport ? Je sais parfaitement y répondre
3. La technologie requise est-elle disponible ? Je sais parfaitement y répondre
4. Sinon, où l'acquérir ? Je sais parfaitement y répondre
Analyse de la main d’œuvre
1. Quelles sont les fonctions indispensables tout au long de Je sais partiellement y répondre
l'opération ?
2. Quelles sont les qualifications (expérience, études) requises Je sais partiellement y répondre
pour chaque fonction ?
3. Quelles sont les compétences requises pour chacune ? Je sais partiellement y répondre
4. L'expertise technique nécessaire est-elle disponible ? Je sais partiellement y répondre
Analyse juridique
1. Quelles sont les conditions légales pour démarrer une Je sais parfaitement y répondre
entreprise sociale ?
2. Quelles sont les différentes formes légales d'entreprises Je sais parfaitement y répondre
sociales dans mon pays ?
Faisabilité financière
1. Avez-vous pris en considération et calculé tous les coûts ? Je ne sais pas y répondre
2. Avez-vous pris en considération les implications du flux de Je ne sais pas y répondre
trésorerie ?
3. Quel est le coût opérationnel par jour ? Je ne sais pas y répondre
4. Quelles sont les sources potentielles de financement ? Je ne sais pas y répondre

I – SE LANCER DANS UN PROCESSUS D’ACCOMPAGNEMENT D’UN PROJET D’ECONOMIE SOCIALE ET SOLIDAIRE


17
Le deuxième tableau ci-dessous peut être utilisé
par l’accompagnateur lors du premier rendez-vous
d’accompagnement afin de diagnostiquer les besoins et de
synthétiser les actions à mettre en œuvre. L’outil doit aussi
être validé par les porteurs de projets, afin de fixer des
objectifs et un cadre, dans la transparence et sur la base
d’une validation collective.

Observation de Commentaire Evaluation


l’existant et appréciation du besoin en
collective renforcement
Phase du Projet existant ou en cours
projet de création ?
A quel stade exact le projet
en est-il
Ressources Matériel à disposition
Matérielles ou besoin en acquisition
de matériels, matières
premières, infrastructures.
Ressources Nombre de personnes
Humaines dans le groupe,
qualification, engagement,
rôle, statuts
Gouvernance Statut juridique existant
Gouvernance interne
organigramme du projet
Modalités de prises de
décision
Impact social Le problème/besoin a bien
été identifié ?
L’impact social peut être
mesuré ?
La logique communautaire
et le lien avec les
partenaires du territoire
est-elle présente ?
Modèle Financements obtenus ou
économique espérés
Description du produit/
service
Etat du cycle de production
Identification des clients,
du marché
Existence d’un prototype
ou d’un premier produit/
service à tester

18 I – SE LANCER DANS UN PROCESSUS D’ACCOMPAGNEMENT D’UN PROJET D’ECONOMIE SOCIALE ET SOLIDAIRE


MIEUX COMPRENDRE
L’ÉCONOMIE SOCIALE ET SOLIDAIRE

L’accompagnement des projets d’économie sociale et


solidaire mobiliser les savoirs et attitudes classiques
d’un accompagnement de création, structuration ou
développement d’entreprises. Il requiert cependant la
capacité de l’accompagnateur à bien appréhender les
concepts d’ESS, les valeurs transversales nécessaires à
leur bonne application, ainsi que la capacité à penser ces
concepts dans le cycle de vie du projet. L’accompagnateur
des projets d’ESS doit, en somme, avoir une vision en 3D
et à 360° : penser toutes les dimensions du projet
(économique, sociale et solidaire) et avoir la capacité de
guider les porteurs de projets pas à pas dans le processus.

La première étape pour l’accompagnateur est donc de bien


assimiler les notions d’économie sociale et solidaire. Il existe
une importante littérature sur la question, les concepts
devront donc être intégrés au projet au fur et à mesure de sa
conception et de sa mise en œuvre.

Voici les critères de base nécessaires à l’accompagnateur :

ESS, de quoi parlons-nous ?

Dès la fin du 19ème siècle en Europe, en parallèle avec la


croissance du capitalisme, de nouvelles pratiques collectives
ont émergé pour répondre aux besoins notamment en matière
de protection sociale. C’est cette capacité à « créer de l’activité
collectivement pour répondre à des besoins communs » qu’on
appelle l’économie sociale. Plus récemment, avec l’apparition
des problèmes sociaux et sociétaux comme le chômage, la
dégradation écologique, le besoin de chaînes de valeurs plus
équitables, on a vu se développer un mouvement qui vise à « créer
de l’activité collectivement, pour répondre à des enjeux d’intérêt
général », qu’on appelle l’économie solidaire. Dans le patrimoine
tunisien, on trouve certains exemples de pratiques collectives
(la pratique de la « Touiza », mais aussi le fonctionnement des
Mederssa, dans la Médina de Tunis par exemple) qui nous
montrent que les valeurs transversales de l’ESS ne sont pas des
concepts importés, mais qu’elles trouvent aussi des racines dans
notre histoire. L’économie sociale et solidaire en Tunisie peut
donc faire la synthèse entre des principes normés et partagés à
l’échelle internationale et des valeurs plus locales et bien ancrées
dans les représentations des Tunisiens.

I – SE LANCER DANS UN PROCESSUS D’ACCOMPAGNEMENT D’UN PROJET D’ECONOMIE SOCIALE ET SOLIDAIRE


19
L’ESS concentre l’ensemble des activités économiques de
production, de transformation, de distribution, d’échange et
de consommation de biens ou de services exercées par les
coopératives, les mutuelles et les associations ainsi que
par toute personne morale de droit privé qui respectent les
principes cumulatifs suivants :

• La primauté de l’être humain et de la finalité sociale sur le


capital ;
• La liberté d’adhésion et de retrait ;
• L’indépendance vis-à-vis des pouvoirs publics ;
• La gestion autonome, transparente et démocratique selon la
règle « une personne, une voix » ;
• La « lucrativité » limitée assurée par les trois règles suivantes :
la répartition limitée des bénéfices, le réinvestissement de la
plus grande part des bénéfices nets pour le maintien ou le
développement de l’entreprise et des réserves obligatoires
constituées impartageables ;
• Les valeurs de solidarité en interne et avec la société, l’égalité,
la citoyenneté, la cohésion sociale, la justice, l’équité, et la
responsabilité individuelle et sociale partagée.

Si les initiatives d’Economie Sociale et Solidaire de « terrain »


existent depuis de nombreuses années en Tunisie et que la
tendance mondiale des dernières années, couplée à la nouvelle
dynamique post-2011 tendent à donner l’image d’un écosystème
de l’ESS grandissant en Tunisie, une stratégie institutionnelle
reste encore à établir dans ce domaine.

Cependant, plusieurs initiatives relevant d’acteurs nationaux ont


vu le jour qui visent àapporter une réponse institutionnelle à la
nécessité d’organiser l’économie sociale et solidaire en Tunisie et
à promouvoir une nouvelle approche du développement qui, dans
l’idéal, devrait pallier les obstacles rencontrés par les modèles
précédents. Cette dynamique nationale a permis d’ouvrir le débat,
dans les ministères, les syndicats, les entreprises, les partenaires
internationaux, à Tunis et en région, et de mobiliser les différentes
parties prenantes.

Quels statuts juridiques pour l’ESS ?

En Tunisie, le secteur de l’Economie sociale et solidaire (ESS)


s’organise autour de trois grandes familles de structures :
coopératives, associations et mutuelles. Chacune de ces familles
présente des spécificités juridiques, mais les trois regroupent
des entités qui sont des personnes morales de droit privé qui
exercent une activité économique d’utilité sociale.

20 I – SE LANCER DANS UN PROCESSUS D’ACCOMPAGNEMENT D’UN PROJET D’ECONOMIE SOCIALE ET SOLIDAIRE


Les coopératives

Elles sont régies par le droit commun de la coopération prévu


par la loi n°67-4 du 19 janvier 1967, portant statut général de la
coopération et de la loi n°64-56 du 28 décembre 1964 relative à
l’agrément des coopératives.1

La coopérative est « une association autonome de personnes


volontairement réunies pour satisfaire leurs aspirations et
besoins économiques, sociaux et culturels communs au moyen
d’une entreprise dont la propriété est collective et où le pouvoir
est exercé démocratiquement », selon la définition de l’Alliance
Coopérative Internationale. En d’autres termes, les coopératives
sont des entreprises où ce n’est pas tant la maximalisation des
bénéfices qui prime, mais les besoins communs auxquels elle
peut répondre.

Le dispositif actuel des coopératives institue un régime de droit


commun (le statut général de la coopération) et deux régimes
particuliers : les unités coopératives de production agricole
(UCPA) et les sociétés mutuelles de service agricole (SMSA).

Sociétés mutuelles de service agricole (SMSA) : des


coopératives de service agricole à statut autonome

« À statut autonome » signifie que le droit commun de la coopération


(loi n°67-4) n’est pas applicable et ce, conformément à l’article 56
de la loi n°2005-94 du 18 octobre 2005, relative aux SMSA.

La loi définit les SMSA comme étant des « sociétés à capital et


actionnaires variables constituées par des personnes physiques
et/ou morales exerçant une activité d’exploitation agricole, de
pêche ou de prestation de services agricoles dans la zone
d’intervention de la société ». Elles constituent des coopératives
spécialisées dans le domaine des services liés à l’agriculture et à
la pêche.

On distinguait jusqu’en 2005, les SMSA de base des SMSA


centrales en fonction de la nature et de l’étendue territoriale de
leurs activités.

Selon la loi de 2005, les SMSA sont chargées de trois missions :


fournir les intrants et les services nécessaires pour l’exercice
de l’activité agricole et de la pêche ; orienter et encadrer leurs
adhérents afin d’augmenter la productivité et la rentabilité
________________________ de leurs exploitations et d’améliorer la qualité des produits ; et
commercialiser les produits agricoles, y compris la collecte,
1
Les références juridiques et le stockage, l’emballage, la transformation, le transport et
définitions sont reprises de l’exportation. Elles ont pour rôle d’exercer toutes les activités
« Etude Stratégique sur l’ESS
en Tunisie » PNUD, 2017 économiques à l’exception de la production.

I – SE LANCER DANS UN PROCESSUS D’ACCOMPAGNEMENT D’UN PROJET D’ECONOMIE SOCIALE ET SOLIDAIRE


21
La SMSA présente un important degré de compatibilité avec le
concept de l’ESS : son statut juridique garantit les critères de libre
adhésionet de retrait, de respect de la règle « une personne une
voix », de la gestion démocratique, de la constitution de réserves
obligatoires non partageables, et de la répartition des excédents
proportionnellement aux opérations effectuées par le coopérateur
avec la coopération. Toutefois, la coopérative subit, au nom du
contrôle de tutelle, une ingérence de l’administration publique
dans sa gestion interne, ce qui meten cause son indépendance à
l’égard des pouvoirs publics.

Les associations de droit commun

Elles sont actuellement régies par le décret-loi n°2011-88 du 24


septembre 2011.

À côté du régime de droit commun institué par le décret-loi


n° 2011-88, le droit tunisien reconnaît deux types d’associations
à statut particulier agissant dans des secteurs spécifiques : les
associations de micro finance (AMF) et les GDAP.

L’association est une structure à but non lucratif au sens strict


du terme. D’autre part, il est interdit aux associés de partager les
bénéfices réalisés grâce aux activités développées.

Toutefois, l’association ne constitue pas ipso facto une entreprise


d’ESS, sauf si les adhérents ont choisi d’inscrire les statuts de
l’association dans le cadre conceptuel d’une entreprise sociale et
solidaire.

L’association est une personne morale de droit privéqui œuvre à


réaliser des objectifs autres que la réalisation de bénéfices, elle
est dotée d’une indépendance vis-à-vis des pouvoirs publics et
jouit d’une liberté d’adhésion et d’une gestion transparente.

La gestion démocratique et participative selon la règle « une


personne, une voix », le réinvestissement de la plus grande part
des bénéfices nets pour le maintien ou le développement de
l’entreprise et la constitution de réserves obligatoires ne sont pas
expressémentprescrits par le texte du décret-loi.

Groupement de développement dans le secteur agricole et de


la pêche (GDAP) : des associations à statut particulier.

Les GDAP sont des associations à statut particulier car elles sont
soumises au droit commun des associations, sauf dispositions
spécifique établies par la loi n°99-43 relative au GDAP. La loi de
1999 est adoptée dans le but d’unifier les statuts de l’ensemble
des associations d’intérêt collectif dans les deux secteursde
l’agricultureet de la pêche.

22 I – SE LANCER DANS UN PROCESSUS D’ACCOMPAGNEMENT D’UN PROJET D’ECONOMIE SOCIALE ET SOLIDAIRE


Les GDAP constituent des associations à but non lucratif d’utilité
publique. Ils regroupent des agriculteurs et des pêcheurs,
propriétaires et utilisateurs, pour gérer collectivement certaines
ressources naturelles d’une zone clairement identifiée et contribuer
à leur développement. Les GDAP sont investis d’une mission de
protection et de gestion des ressources naturelles, de soutien à
l’investissement local et à l’infrastructure de base et de règlement
des questions d’occupation des sols. De nombreux GDAP sont
liés à la gestion des ressources hydrauliques.

Depuis 2004, les groupements de propriétaires et d’exploitants


dans les domaines des eaux, des forêts et de la conservation
des eaux et du sol, ainsi que les groupements de propriétaires
d’olivettes sont obligés d’adopter la dénomination “GDAP”.

Les GDAP coïncident à plusieurs niveaux avec les critères


de l’ESS : ce sont des associations à statut particulier dans
lesquelles la distribution de bénéfices est interdite, ils exercent
une activité économique à finalité sociale et sont investis d’une
mission de service public de l’environnement. En outre, l’adhésion
et le retraitsont volontaires, et leur mode de gouvernance est
démocratique. Enfin, le cadre juridique prévoit que les bénéfices
soient réinvestis au sein du groupement pour élargir ses
domaines d’intervention.

Toutefois, un élément consubstantiel àl’entreprise sociale et


solidaire, l’indépendance à l’égard despouvoirs publics, échappe
aux GDAP.

SARL Entreprise solidaire

Le choix du statut juridique le plus adapté peut aussi entrer


dans le cadre de l’accompagnement. Alors que l’élaboration du
cadre juridique et réglementaire de l’ESS en Tunisie n’est pas
encore achevée, la question se pose du choix dustatut le plus
approprié. Entre application puriste des concepts de l’ESS et
choix pragmatique de la durabilité du projet, notamment sur les
plans économique et humain, l’accompagnateur doit pouvoir
guider le groupe dans le choix du statut le plus adapté. Le statut
est en effet un outil qui doit permettre au groupe de réaliser ses
objectifs en appliquant les valeurs et principes de l’ESS. Ce
sont ces valeurs qui feront vivre les principes, et non le statut
en lui-même. Ainsi, une société anonyme ou une SARL, peuvent,
à condition d’appliquer dans leurs statuts et leurs pratiques les
critères généraux de l’ESS, devenir des entités à part entière.

I – SE LANCER DANS UN PROCESSUS D’ACCOMPAGNEMENT D’UN PROJET D’ECONOMIE SOCIALE ET SOLIDAIRE


23
Quel écosystème pour l’ESS en Tunisie ?

INFRASTRUCTURE DU CAPITAL

Capital Capital Capital Capital


Financier Humain Intellectuel Physique

Bénéficiaires Impact Social


Organisation de l’ESS servís Positif

Capital Capital Capital Capital


Financier Humain Intellectuel Physique

FACTEURS DE MISE EN CONTEXTE

Les organisations de l’ESS évoluent dans un écosystème à la


croisée des chemins. Au-delà de l’aspect sectoriel propre au
projet (agriculture, artisanat, commerce, social, santé…), le
projet d’ESS évolue également dans un écosystème proche de
la mission sociale de l’organisation, voire dans une démarche
de plaidoyer.

L’accompagnateur ne peut donc pas maitriser tout l’écosystème


de l’ESS. Cependant, il doit pouvoir guider le groupe dans la
compréhension des différents blocs de l’écosystème.

L’écosystème est composé de plusieurs capitaux qui sont


nécessairesà la mise en place des organisations de l’ESS

• Financier : quels outils de financement, quels montages


existants, quels outils alternatifs, quels schémas mettre en
place, quelles perceptions dans le monde financier de l’ESS ?
• Humain : quelles ressources humaines disponibles sur le
marché de l’emploi pour gérer, développer des projets d’ESS ?
Quelle diffusion dans les secteurs associés de l’ESS ?
• Intellectuel : quel est l’état des lieux de la recherche, de
l’enseignement en Tunisie en matière d’ESS ? Oùpuiser la
connaissance et l’inspiration ?
• Physique : quelles infrastructuressont mises à la disposition
des organisations de l’ESS ? Comment les identifier, comment
les mobiliser ?

24 I – SE LANCER DANS UN PROCESSUS D’ACCOMPAGNEMENT D’UN PROJET D’ECONOMIE SOCIALE ET SOLIDAIRE


L’écosystème est également boosté par des facteurs de mise en
contexte nécessaires à son développement, comme :

• Les politiques publiques : quelle politique, et pour quel projet ?


Qui est en lead sur les questions d’ESS ? Quelle application
et quel agenda prévoir ?
• Les Médias : qui parle de l’ESS, et comment en parle-t-on ?
• Les conditions sociales et économiques : le climat à l’échelle
ou sur le territoire national porte-t-il ou bien freine-t-il le
développement de l’ESS ?
• Les secteurs associés : Le secteur privé, à travers la RSE
par exemple, peut il renforcer le développement d’une
organisation ESS ? Idem pour le secteur associatif ?
Comment en faire profiter le projet d’ESS?

Si l’écosystème de l’ESS est en construction et toujours mouvant,


l’accompagnateur doit permettre au groupe d’envisagerson
devenir à l’intérieur de cet écosystème.

ZOOM sur des acteurs de l’écosystème en Tunisie

Cette liste n’est pas exhaustive, mais dresse les principaux acteurs
susceptibles d’intervenir dans le cycle de vie d’un projet d’ESS.

Acteurs de financement

BAD : la Banque Africaine de Développement, à travers notamment


le programme Souk Attanmia.

Yunus Social Business devenu Impact partner : créée en mars


2013, cette institution a pour objectif de promouvoir le concept de
social business en favorisant la création d’entreprises dans un but
social plutôt que lucratif, elle constitue une réponse novatrice au
chômage des jeunes. C’est le premier fond d’impact investing en
Tunisie.

Lamicro-finance :

Enda inter-arabe : ONG internationale installée en Tunisie depuis


1990 ; elle a lancé le premier programme de microcrédits en 1995.

ZitounaTamkeen : intervient selon les deux modes de finance


islamique la mourabaha et le quardhassen.

Microcred Tunisie : a pour mission d’offrir des services financiers


accessibles et de qualité ainsi qu’un accompagnement adapté
aux personnes exclues dusystème financier classiqueou mal
servies par lui.

I – SE LANCER DANS UN PROCESSUS D’ACCOMPAGNEMENT D’UN PROJET D’ECONOMIE SOCIALE ET SOLIDAIRE


25
Advans Tunisie créée en 2013, c’est une institution de micro
finance, membre du groupe Advans, réseau international de micro
finance.

Le Centre Financier aux Entrepreneurs – Tunisie S.A. est une


institution de micro finance qui vise à accroître l’accessibilité
des services financiers professionnels aux micros et petits
entrepreneurs.

Dispositifs d’accompagnement existants

LABESS : est un laboratoire de l’économie sociale et solidaire,


créé en 2013, membre du Groupe SOS (France). LABESS
accompagne les entrepreneurs sociaux à travers son incubateur.

TCSE : Le Centre tunisien pour l’entrepreneuriat social appuie les


entrepreneurs sociaux, à travers notamment les espaces Lingare
Mahdia et Lingare Médina (Tunis).

SHANTI : SHANTI est une entreprise sociale qui a pour mission


de promouvoir la co-conception de solutions innovantes aux défis
d’aujourd’hui, notamment en accompagnant les entrepreneurs
sociaux dans la concrétisation deleurs idées de projets.

Réseau Entreprendre : Réseau Entreprendre est une association


de chefs d’entreprises fondée en France, trente ans auparavant
par André Mulliez, sa devise est : « Pour créer des emplois,
créons des employeurs ». Elle a su développer une présence
internationale dans 10 pays : Belgique, Chili, Espagne, France,
Italie, Maroc, Portugal, Sénégal, Suisse et Tunisie.

Souk At-tanmia : représente la plus importante mobilisation


d’acteurs travaillant sur la promotion de l’emploi en Tunisie à
travers l’appui à l’entreprenariat. Ce programme, qui a vu le jour
en 2012, est structuré sous la forme d’un Partenariat impliquant
près d’une vingtaine d’acteurs du monde du développement, des
institutions publiques et privées, ainsi que de la société civile et
académique.

El Space : El Space soutient les idées qui peuvent aider à améliorer


notre existence à différents niveaux, en fournissant un espace
partagé, un incubateur social et un laboratoire d’apprentissage
pour responsabiliser les communautés locales.

26 I – SE LANCER DANS UN PROCESSUS D’ACCOMPAGNEMENT D’UN PROJET D’ECONOMIE SOCIALE ET SOLIDAIRE


WWF : Le WWF, ou Fonds mondial pour la nature, travaille
notamment sur la région du Nord Ouest et l’appui aux projets
d’écotourisme.

Centres WES (Women’s entreprise for sustainability) : La


mission du Centre WES est de fournir des services de qualité pour
soutenir la création et l’accroissement de l’entreprise féminine en
lui assurant une autonomie financière ; le Centre WES participe
égalementau développement d’une économie sociale et solidaire.

Cit’ess Mahdia / Cit’ess Sidi Bouzid : ces cités de l’ESS sont des
associations de promotion de l’ESS sur les territoires.

Diffusion de la culture ESS et de l’innovation sociale

IHEC Tunis : Un module est dédié à l’entrepreneuriat dans toutes


les licences, et un master est dédié à l’entrepreneuriat social.

ISG Tunis : Un master dédié au management des organisations


sociales et solidaires.

Université de Jendouba : Un master professionnel dédié à l’ESS.

INTES : Un master professionnel dédié à l’ESS.

Cogite : Cogite est un espace de travail partagé et un réseau de


start up.

Associations estudiantines : Aissec, Junior entreprise, programme


ENACTUS.

Prix Orange de l’Entrepreneur Social.

La fondation BIAT aves programmes : Spark, bloomasters, Open


startup tunisia, Engage.

Mais aussi des évènements qui peuvent être organisés et intégrés


en vue de donner une visibilité aux projets ESS : TEDx, Salon de
l’entrepreneuriat, ATUGE, CJD, Forum Convergences…

I – SE LANCER DANS UN PROCESSUS D’ACCOMPAGNEMENT D’UN PROJET D’ECONOMIE SOCIALE ET SOLIDAIRE


27
Institutions publiques

BTS : la Banque Tunisienne de Solidarité (BTS, créée en 1997)


s’est spécialiséedans le financement de petits projets par le biais
du financement direct ou via lesassociations de Microcrédits
(460 000 microprojets et micro-entreprises de jeunespromoteurs
financés à ce jour).

BFPME : la Banque de Financement des Petites et


Moyennes Entreprises créée en 2005, la BFPME dispose de
20 représentations régionales réparties surl’ensemble du pays.

APII : L’Agence de Promotion de l’Industrie et de l’Innovation.

CRDA : Commissariat Régional de Développement Agricole.

APIA : Agence de Promotion des Investissements Agricoles.

ANETI/Espace entreprendre : Agence Nationale pour l’Emploi


et le Travail Indépendant.

28 I – SE LANCER DANS UN PROCESSUS D’ACCOMPAGNEMENT D’UN PROJET D’ECONOMIE SOCIALE ET SOLIDAIRE


II – ACCOMPAGNER LE
LANCEMENT DE PROJET D’ESS

A QUEL BESOIN DE PROJET VEUT


S’ATTAQUER ? ANALYSE DU CONTEXTE

Les projets d’économie sociale et solidaire ont en commun une


mission sociale, celle-là qui fut à l’origine de la création de ce
type de projet : répondre aux besoins communs d’un groupe
de personnes, ou s’attaquer à un problème d’intérêt général.
Cependant, identifier, quantifier, délimiter un “bon” problème est
en soi un problème. Ici, le rôle de l’accompagnateur est crucial,
car il permet d’éviter deux extrêmes : un problème ou un besoin
trop grand que le groupe seul ne peut résoudre, et, à l’inverse,
un problème social qui n’est qu’un prétexte pour développer un
projet économique classique.

Si les besoins et défis sociaux ne manquent pas en Tunisie,


comment accompagner le groupe à bien les définir ?

Réflexion collective et recherche d’informations


pour identifier les besoins

Cette étape est bien évidemment nécessaire pour les groupes de


porteurs de projets en phase d’idéation, mais également pour les
groupes porteurs de projets déjà pensés, voire structurés, afin qu’ils
puissent reprendre le travail de structuration et de développement
sur de bonnes bases.

Ce travail de réflexion collective peut se faire sous forme de


brainstorm, à travers la formulation spontanée les besoins ou
problèmes vécus. Il peut également se faire à travers l’observation
et le partage d’expériences vécues par la communauté, de sorte
à faire ressortir les besoins communs non satisfaits.

IDÉE OUTILS :

On peut utiliser la matrice SWOT. L’analyse S.W.O.T. ou matrice


S.W.O.T. vient del’anglais Strengths (forces), Weaknesses
(faiblesses), Opportunities (opportunités), Threats (menaces).
Le S.W.O.T permet de déterminer les options stratégiques
envisageables au niveau d’un domaine d’activité stratégique.
Cet outil peut être adapté pour une identification progressive du
ou des problèmes pertinents à traiter. Il permet, en outre, aux
membres du groupe d’avoir une base de réflexion commune
en vue de comprendre leur environnement et de mettre en
évidence le problème à traiter, et donc l’idée de projet pertinente,
ou bien la manière de repenser l’idée de projet initial.

II – ACCOMPAGNER LE LANCEMENT DE PROJET D’ESS


29
Forces (Strength) : Qu’est-ce qui rend l’élément à analyser
unique ? Quels sont les avantages ? Qu’est-ce qui, ici, est bien fait ?
Qu’est-ce que les autres perçoivent comme étant une force ?

A ce niveau, il s’agit pour les candidats de mettre en évidence


les forces dont dispose le secteur d’activité, la thématique
d’intérêt commun, le territoire ou bien l’organisation, si celle-ci
est déjà en place. Il est intéressant d’aller plus en profondeur
dans la réflexion afin de constituer de premiers atouts
susceptibles de donner de premières pistes de projets. Le but
n’est pas de remplir du papier mais de profiter de l’intelligence
collective pour aller dans le détail, à partir d’éléments précis
et, si possible, chiffrés.

Faiblesses (Weaknesses) : Qu’est-ce qui n’est pas bien ?


Qu‘est-ce qui pourrait être amélioré ? Qu’est ce qui devrait être
évité ?

Les faiblesses qui peuvent ressortir ici vont pour la plupart être
expliquées par la défaillance des pouvoirs publics. C’est ici qu’il
faut essayer d’amener les porteurs de projet à une certaine
autocritique. Chacun de nous est responsable de la défaillance
de son environnement et se doit, s’il veut changer les choses,
de commencer à agir. Il faut aussi que les faiblesses identifiées
soient des faiblesses sur lesquelles on peut intervenir.

Opportunités (Opportunities) : Quelles sont les opportunités


objectives qui s’offrent à nous ? De quelles tendances
intéressantes avons-nous conscience ? Quel est le potentiel
d’expansion potentielle dans le futur?

Le rôle de l’accompagnateur est ici important car il a sans


doute plus de recul par rapport aux réalités quotidiennes et
une meilleure compréhension de la situation nationale et
régionale.

Menaces (Threats) : À quels obstacles faisons-nous face ? À


quels enjeux/challenges sommes-nous confrontés ? Que font
nos concurrents ? Notre groupe possède-t-il toutes les
compétences nécessaires pour accomplir le travail ?

L’analyse SWOT permet donc un premier travail en collectif


en amenant legroupe àcroiser les points de vue et à les
analyses par-delà le projet en tant que tel. Il permet de prendre
du recul par rapport à la situation. Une fois réalisé, ce travailpeut
être confronté au regard de personnes externes qui pourront
corriger, adapter, compléter l’analyse. Il est donc intéressant de
faire travailler les participants sur post-it pour faire de ces notes
un outil évolutif.

30 II – ACCOMPAGNER LE LANCEMENT DE PROJET D’ESS


Exemple : L’analyse du secteur de l’artisanat dans la ville de
Kesra par un groupe de jeunes voulant potentiellement lancer
un projet dans le secteur.

Forces Faiblesses

• L’expérience et le savoir-faire • La commercialisation


des artisanes locales • La capacité réduite
• L’histoire de la ville d’autofinancement
• Le style architectural berbère • L’infrastructure (moyens
• La diversité des ressources de transport, espaces
naturelles d’exposition…)
• Le prix bas des matières • La désaffection des jeunes à
premières l’égarddesmétiers de l’artisanat
• La présence de jeunes • Le manque d’accompagnement
diplômes des beaux arts

Opportunités Menaces

• L’absence de concurrence locale • La diminution des visiteurs


significative • L’importation des produits turcs
• Le soutien des pouvoirs et chinois
publics • Le marché parallèle

Faire émerger les besoins ou les problèmes à traiter

Avant de se lancer…

Bon ou mauvais problème ?

Voici deux problèmes qu’un groupement de femmes spécialisées


dans la transformation de produits du terroir veut résoudre. A votre
avis, quel est le plus pertinentdes deux ?

Exemple 1 : La mauvaise valorisation des produits agricoles en


Tunisie et le déséquilibre entre producteurs et commerçants sur
le marché.

Exemple 2 : Le manque de technique de transformation


(recettes, dosage, traçabilité) et de commercialisation (marketing,
emballage, logistique et réseau) des produits dérivés de la figue
de Kesra pour atteindre un marché de niche dans les épiceries
fines, à Tunis et à l’étranger.

II – ACCOMPAGNER LE LANCEMENT DE PROJET D’ESS


31
L’identification passe en premier lieu par un brainstorming
général. Une écoute active est indispensable à cet égard pour
bien orienter les porteurs de projets. A partir des faiblesses
identifiées dans l’analyse SWOT, il convient de repérer celles
qui pourront être résolues en s’appuyant sur les “forces”, tout en
profitant des opportunités et en évitant les menaces.

Il faut ensuite affiner les problématiques choisies, et identifier


un BON problème. On a souvent tendance à penser qu’un
bon problème est le problème le plus répandu, le plus grave
ou le plus urgent. Ici, on considérera que, pour servir de base
au développement d’une organisation d’économie sociale et
solidaire, “un bon problème” doit avoir les trois caractéristiques
suivantes :

· Il est exprimé par ceux et celles qui le subissent, qui le


vivent au quotidien. S’agissantd’un projet qui vise à satisfaire
un besoin commun du groupe constitué pour créer l’OESS (ex :
groupe d’agriculteurs, groupement de femmes travaillant dans
la distillation), il faut s’assurer que le problème a été réellement
formulé par l’ensemble du groupe, et non pas uniquement
par un représentant, voire par un tiers extérieur au groupe et
s’exprimant en son nom. Pour les projets entrepris en réponse
à des problèmes d’intérêt général, (ex : emploi des personnes
handicapées, action pour la préservation de l’environnement
dans le process de production), il faut s’assurer que le problème
identifié existe réellement (statistiques, preuves concrètes),
et que la communauté exprime réellement la volonté de s’y
attaquer. Dans le cadre du travail d’accompagnement à la
réflexion, il peut être difficile de vérifier in situ l’existence du
besoin. L’accompagnateur doit donc organiser avec le groupe un
plan de travail pour aller vérifier sur le terrain et ramener, pour
une prochaine séance, les preuves du besoin exprimé.

· Le groupe a les ressources pour le résoudre, ou en résoudre


une partie. Il faut replacer le groupe dans le contexte qui est le
sien (un groupe de jeunes, une association locale, une petite
entreprise), donc ne pas s’attaquer à un problème devant mobiliser
des ressources inaccessibles. Il est également intéressant de
faire parler ici le groupe sur les limites de son action. On verra
alors, par exemple, que le projet d’ESS en question n’a pas pour
vocation d’éradiquer la pauvreté, de supprimer le chômage, de
régler le problème des déchets ou des infrastructures. Cependant,
cette réflexion permet de faire prendre conscience au groupe du
potentiel de changement que son projet pourrait avoir. En traitant
un problème à petit échelle, la solution proposée peut servir de
base pour un plaidoyer en vue d’un changement à plus grande
échelle, qui pourrait alors être repris par les autorités locales ou
nationales, par d’autres initiatives sur le territoire (essaimage) ou
par de grands groupes privés. (Se référer aussi à « l’inventaire des
ressources » dans la partie Point étape sur l’accompagnement).

32 II – ACCOMPAGNER LE LANCEMENT DE PROJET D’ESS


· Le problème doit tenir compte du contexte social, politique,
culturel. Il faut comprendre, avant de passer à l’action, si
le contexte offre l’opportunité de trouver des solutions à ce
problème. Ce qui est vrai sur un territoire peut ne pas l’être sur
un autre. On peut également disposer des moyens de s’attaquer
à un problème sauf que le moment n’est pas opportun. Des
blocages relatifs aux représentations socioculturelles peuvent
également apparaître : on peut prendre ici l’exemple d’un projet
visant à faire travailler de manière collective des agriculteurs pour
récolter leur production et la stocker de manière collective : si l’on
sent sur le terrain que le contexte ne permet pas l’émergence de
relations de confiance suffisantes pour que soit mis en place un
tel projet, il sera nécessaire de travailler plus en amont afin de
s’assurer que le contexte permet de lancer le projet (travail de
sensibilisation, présentation d’autres initiatives, réalisation d’un
pilote, etc…). Parfois, les contraintes juridiques et réglementaires
peuvent également limiter le champ d’action. Il convient, en
somme, de bien mesurer la portée d’une action avant de
l’entreprendre.

NE PAS OUBLIER : Un bon problème est exprimé par la


communauté, il peut être résolu avec les ressources du groupe
et cela, dans un contexte local qui permet d’agir dessus. Plus le
problème sera exprimé de manière précise, chiffrée, localisée,
délimitée, plus il sera facile de bâtir un bon projet. Souvent, le
groupe de porteurs de projet a tendance à avoir déjà une idée
de projet en tête. Mais, pour que le projet soit bien conçu, il est
important de faire d’abord machine arrière et d’essayer d’oublier
temporairement son idée pour se concentrer sur les problèmes de
base. Si le projet a été bien pensé, l’analyse du problème croisera
l’idée de projet initialement pensé. Si, par contre, l’analyse de la
situation n’a pas été bien faite, ce sera l’occasion pour le groupe
de réorienter son idée de projet vers une option plus réalisable et
adaptée au contexte et aux besoins réels.

Comment analyser le problème

Une fois le bon problème identifié (même de manière théorique),


il convient d’en analyser les tenants et aboutissants.

L’analyse doit permettre au groupe d’en comprendre les causes


et les causes des causes, mais aussi les conséquences ou
les effets.

II – ACCOMPAGNER LE LANCEMENT DE PROJET D’ESS


33
IDÉE OUTILS :

Le groupe peut réaliser un arbre à problème. L’appui de


l’accompagnateur est ici très important pour les guider dans
l’analyse, et l’identification des causes sur lesquelles ils pourront
réellement agir. Les porteurs de projets doivent faire une analyse
en profondeur en entrant dans les détails et les précisions
nécessaires.

ASTUCE : l’arbre à problème peut être travaillé avec des


post-it, pour permettre de faire évoluer l’analyse au fil de la
réflexion collective et de l’apport de nouvelles idées.

Conséquences

Donc ?

Problème

Pourquoi ?

Causes

34 II – ACCOMPAGNER LE LANCEMENT DE PROJET D’ESS


EXEMPLE POUR COMPRENDRE :

Abandon des Baisse des revenus


Conséquences techniques de travail des femmes du
traditionnelles groupement

DONC ?

La transformation des produits


Problème de terroir à Kesra ne fonctionne
pas suffisamment pour faire
vivre les femmes du groupement

POURQUOI ?

L’infrastructure Le manque de technique


Causes de stockage et de de transformation et de
transport á l’échelle commercialisation des produits
locale est insufficante dérivés de la figue à Kesra

POURQUOI ? POURQUOI ?

Pas Des Les femmes Absence de


d’investissement commerçants du groupement ressources
des autorités à l’échelle n’ont pas suivi humaines en
Sous causes locales dans régionale ont la de formation marketing et
un espace de mainmise sur professionnelle commercialisation
stockage la chaîne de
distribution

Ici, l’analyse d’un problème est schématisée sous une


forme assez simple avec deux causes principales et deux
sous-causes. Bien évidemment, l’analyse du problème peut
amener à plusieurs causes. Il est intéressant de noter, dans un
premier temps, toutes les causes sous forme de brainstorming,
et en suite de garder les causes les plus importantes, de les
hiérarchiser et, éventuellement, de les regrouper.

Cet exemple nous montre en quoi l’arbre à problème peut


amener le groupe à affiner son travail. Le problème initial conduit
à identifier deux causes. On retient que les causes de gauche
(infrastructure) nécessitent des ressources et des moyens qui
sont au-delà des capacités de l’OESS pour être abordées (rôle
des autorités locales, intervention auprès des commerçants à
l’échelle régionale). Les causes de droite (formation technique,
commercialisation) mettent l’accent sur des actions qui peuvent
être à la portée de l’OESS.

II – ACCOMPAGNER LE LANCEMENT DE PROJET D’ESS


35
Ainsi, l’arbre à problème permet parfois d’identifier le problème
réel sur lequel l’OESS va agir. Il convient alors de restructurer
l’arbre à problème : la cause de droite va monter à la place
du problème, et le problème va monter au niveau des
conséquences, comme dans le schéma ci-dessous.

La transformation des produits Disparition des techniques


de terroir à Kesra ne fonctionne traditionnelles de transformation
Conséquences
pas suffisamment bien pour faire des produits du terroir
vivre les femmes du groupement

DONC ?

Le manque de technique
Problème de transformation et de
commercialisation des produits
dérivés de la figue à Kesra

POURQUOI ?

Les femmes du Absence de ressources


Causes groupement n’ont pas humaines en marketing et
suivi de formation commercialisation
professionnelle

POURQUOI ? POURQUOI ?

Pas de Pas de RH Pas de revenus Les jeunes


formations locales pour suffisants pour diplômés à
adaptées au former les embaucher une l’échelle locale
Sous causes niveau et aux femmes. Savoir RH dèdièe au ne se projettent
capacités traditionnel non Marketing pas dans le
d’apprentissage valorisé groupement
des femmes du
groupe

36 II – ACCOMPAGNER LE LANCEMENT DE PROJET D’ESS


A RETENIR : L’identification d’un problème n’est pas suffisante,
il faut également en analyser les causes et les conséquences
pour être sûr que le projet sera bâti sur un besoin bien compris.
Si l’accompagnateur ne peut pas connaître tous les détails du
problème, il doit veiller au respect de la METHODE, et pousser
les porteurs de projets à affiner leur analyse et à aller dans le
détail. Si les porteurs de projets n’ont pas de réponses à apporter
au moment de la séance de travail, pas de problèmes ! Invitez-les
à aller sur le terrain et à collecter de l’information pour remplir
progressivement leur arbre à problème. Cet outil est EVOLUTIF
et ne doit pas être figé.

Tout ce travail d’analyse doit prendre en considération un


dénominateur commun : la communauté. C’est elle qui viendra
confirmer les premiers éléments théoriques et qui validera
l’orientation du projet. Que la communauté fasse corps avec
le groupe porteurs de projets ou qu’elle soit dans une position
de simple bénéficiaire, elle doit être au cœur de la stratégie du
projet d’ESS.

MOBILISER LA COMMUNAUTÉ ET COMPRENDRE


LES PARTIES PRENANTES DU PROJET

Le fait que les porteurs de projet soient issus du territoire ou


aient une expérience technique sur le domaine du projet, ne
signifie pas qu’ils représentent l’ensemble de la communauté,
ou qu’ils connaissent dans le détail les besoins des
bénéficiaires directs ou indirects du projet. L’accompagnateur
doit donc guider le groupe à intégrer le projet aux attentes
et besoins de la communauté.

II – ACCOMPAGNER LE LANCEMENT DE PROJET D’ESS


37
Par où commencer ?

• Prendre contact avec de potentiels partenaires


SE qui travaillent déjà avec le public cible
RENSEIGNER • Etudier le contexte et le problème identifié
(statistiques, études, rapports...)

• Se déplacer et visiter les bénéficiaires


sur le terrain
RENCONTRER
• Echanger avec eux sur les problèmes qu’ils
rencontrent, leurs besoins, leurs attentes

• Organiser une réunion, un comité qui rassemble


les parties prenantes et l’équipe du projet
COMMUNIQUER
• Organiser un évènement de sensibilisation et
d’information en invitant les bénéficiaires

• Présenter le projet et l’organisation


COMMUNIQUER • Définir ensemble les axes du projet autour du
problème exprimé par les bénéficiaires

• Favoriser la proposition d’activités


• Faire participer les bénéficiaires à la prise
INTÉGRER
de décision (vote) et à la gestion du projet
(organisation d’une activité...)

• Privilégier des formats d’activité et de réunion


qui sont accessibles et qui intéressent les
ÊTRE
bénéficiaires
ACCESSIBLE
• Prévoir des solutions aux problèmes
qui peuvent se poser (activités gratuites,
encadrement des enfants, horaires de
disponibilité, indemnités de transport, nourriture...)

38 II – ACCOMPAGNER LE LANCEMENT DE PROJET D’ESS


LEURS
• Les bénéficiaires expriment leur problèmes, leurs besoins
PROBLÈMES
et leurs attentes.
• Le porteur de projets définit un problème qui est à sa portée.

LE • La réflexion sur le projet (problème, causes, effets) implique les


PROJET bénéficiaires et les responsables du projet
• Les activités proposées conviennent aux bénéficiaires, et permettent
d’obtenir les résultats et d’atteindre les objectifs du projet

LE
• Les bénéficiaires ont été les acteurs de la résolution
CHANGEMENT
de leurs problèmes
• Le projet est un succès ; une deuxième étape est envisageable

De quoi parlons-nous ?

L’accompagnateur doit amener le groupe à mettre en place


un plan de mobilisation communautaire. Comment le groupe
envisage-t-il son action dans une dynamique collective ? Comment
s’assurer que les membres leaders du groupe ont recueilli l’avis
et l’approbation des autres membres qui seront impliqués dans
la démarche. Au-delà des aspects statutaires ou du respect des
principes de l’ESS, cette étape de vérification et de validation
est nécessaire pour la bonne mise en œuvre du projet, et pour
éviter les frustrations ou les blocages à venir, en cas de non prise
en compte des attentes et avis du maximum de personnes qui
seront impliquées dans la démarche.

Le développement de l’OESS nécessite une compréhension


de l’opportunité de répondre à un besoin social insuffisamment
satisfait sur son territoire, mais aussi une capacité à développer
une solution qui trouve sa place et se positionne bien sur le
marché. Il est donc important de bien comprendre son public,
ses besoins et la plus-value que l’on peut apporter pour résoudre
les problèmes réels auxquels il fait face. Cette capacité à
bien comprendre les besoins rendra d’autant plus forts le
positionnement et la crédibilité sur le marché qu’elle permettra
de bien cibler les bénéficiaires.

II – ACCOMPAGNER LE LANCEMENT DE PROJET D’ESS


39
Le groupe doit pouvoir identifier clairement qui sont les
bénéficiaires directs du projet d’ESS :

• Ceux-là vont être concernés en personne par les services et


les actions de l’OESS.
• Ils doivent autant que possible être identifiés avec précision
(âge, sexe, localité, niveau d’éducation, les habitudes… )
pour que l’on obtienne une vraie plus-value.
• Ils font face à des difficultés précises et ont des besoins précis
à identifier, à comprendre et à analyser.

Les bénéficiaires potentiels font face à beaucoup de problèmes,


et plusieurs solutions (plus ou moins efficaces) sont déjà en
place. L’accompagnateur peut alors utiliser cette grille de
questions que le groupe doit se poser :

• De quoi ont-ils réellement besoin ? Ou de quoi avons-nous


réellement besoin ?
• Est-ce qu’ils ont réellement exprimé et formalisé leurs
besoins, ou bien doit-on le faire à leur place ?
• Quel est le besoin dont personne ne s’occupe actuellement ?
• Est-ce que les solutions proposées aujourd’hui apportent
une réponse durable à ce besoin ?
• Est-ce que je suis en train de bien comprendre le besoin, et
comment j’y procède ? Qu’est-ce que je peux améliorer ?

Pour résumer :

Bien comprendre Bon Efficacité sociale


le besoin positionnement ET économique

Bénéficiaires ou clients ?

Plusieurs cas de figure :

Clients
Bénéficiaires Clients Bénéficiaires Clients
Bénéficiaires

1. Le client paie pour 2. Des bénéficiaires 3. Les clients sont les


le bénéficiaire et des clients bénéficiaires

40 II – ACCOMPAGNER LE LANCEMENT DE PROJET D’ESS


Exemple 1 : Le client paie pour le bénéficiaire. Par exemple, un
bailleur de fonds paie une prestation à une association locale
pour qu’elle apporte un accompagnement à de jeunes chômeurs.
Le jeune est donc bénéficiaire et consommateur du service,
mais le client (celui qui paie) est un acteur tiers. La qualité du
service et la capacité financière du partenaire peuvent alors
justifier une tarification supérieure à ce que le bénéficiaire aurait
pu payer. Dans une coopérative de femmes artisanes, le client
est le consommateur du produit artisanal, mais le bénéficiaire
direct du projet est la femme artisane (si les ventes permettent
réellement d’améliorer sa situation économique).

Exemple 2 : L’OESS a des bénéficiaires et des clients. Dans


ce cas, on est dans une tarification adaptée. Le service donné
est similaire, mais la tarification dépend de la situation sociale,
ou d’autres critères, et l’entreprise adapte son modèle pour être
à l’équilibre. Exemple : Dar Ellamma, une maison de retraite
pour personnes atteintes d’Alzheimer, accueille des clients qui
payent les services offerts mais adapte son offre pour permettre
à d’autres bénéficiaires plus modestes d’accéder à ses services
d’assistance. Dar Ellamma a su trouver un modèle économique
viable, tout en étant accessible à tous.

Exemple 3 : Le client est le bénéficiaire, il paie lui-même le service.


Cela nécessite donc une tarification adaptée aux capacités
financières du bénéficiaire, et que le coût financier soit inférieur
à la plus-value sociale que cela génère. Il faudra donc jouer sur
les économies d’échelle et optimiser les coûts de fonctionnement.
Par exemple, trouver un modèle économique qui permet de
vendre des lunettes de vue à un prix très bas, accessible à tous.
Ici, les clients sont les bénéficiaires.

L’OESS, peut jouer sur les 3 tableaux, mais doit être en mesure
de justifier et d’assumer ses choix.

Rappel : En tant qu’entreprise de l’ESS, il est intéressant de


toujours mettre en avant l’impact social et la réponse à un
besoin vis-à-vis des clients partenaires. Ainsi le groupe n’est pas
seulement dans une position marchande (je vends un service),
mais dans une position de complémentarité, de soutien et de
partage d’objectifs communs. Cette valeur ajoutée sociale dans
le service rendu et vendu est un acte majeur pour se positionner
et se différencier des concurrents. Si cette différenciation se
concrétise dans la qualité du service rendu au client, elle devient
alors une force de vente et un argument pour une tarification
cohérente avec le service rendu.

II – ACCOMPAGNER LE LANCEMENT DE PROJET D’ESS


41
IDÉE OUTILS :

Le groupe peut travailler sur une analyse des parties prenantes


pour cerner les attentes des différents groupes.

L’analyse des parties prenantes permet d’identifier tous les


individus, les groupes de personnes et les organismes qui ont un
lien avec le projet. Elles impactent le projet de façon positive ou
négative. Elles sont impactées par le projet de façon positive ou
négative.

L’analyse vise à comprendre :

• Les intérêts et les attentes des bénéficiaires ou des partenaires.


S’ils s’engagent dans le projet, qu’attendent-ils de la part de
l’OESS ? Quel est leur intérêt à se joindre à vous ?
• Leurs capacités et leur motivation pour le changement. Il se
peut qu’ils aient intérêt à vous rejoindre, mais quelles sont
leurs capacités (techniques, intellectuelles, de mobilisation…)
à s’investirdans le projet. Est-ce que le groupe ciblé ou le
partenaire ontenvie de s’engager dans un processus de
changement ou bien sont-ils réfractaires au changement ?
• Quelles vont être leurs interactions / relations avec le
projet ? Est-ce qu’ils seront des associés, des salariés, des
bénéficiaires, des adhérents, des fournisseurs, des clients ?

1. Bénéficiaires Directs et indirects

Il s’agit ici de décrire précisément le segment/le groupe de


bénéficiaires. Ce groupedoit être homogène en termes de besoin.
Les critères à préciser peuvent être : l’âge, le sexe, le niveau
d’éducation, les capacités financières, le niveau d’avancement
dans l’aventure entrepreneuriale, la localisation, la situation
familiale, le niveau d’éducation. L’idéal c’est ausside quantifier
la taille du segment : estimation de la taille du segment sur le
territoire ainsi que du nombre qui peut être pris en charge. Vous
pouvez lister autant de groupes bénéficiaires que vous voulez
(rajouter des lignes dans le tableau).

2. Intérêts, besoins et attentes en général

On va s’intéresser ici aux besoins du segment. De quoi a-t-il


besoin en général ? Il faut être le plus précis possible.

FAUX : Une femme a besoin d’accompagnement.

CORRECT : Les femmes rurales dans un rayon de 40 km autour


de Béja ayant une activité économique dans la distillation ont
besoin d’améliorer la qualité produit et de mieux comprendre les
besoins du marché pour adapter leur produit.

42 II – ACCOMPAGNER LE LANCEMENT DE PROJET D’ESS


Attention : On ne peut pas inventer le besoin, il faut donc pouvoir
échanger avec le groupe pour comprendre et collecter le besoin.

Il faut ensuite affiner les résultats et s’intéresser aux attentes


du segment et à l’intérêt de ses membres à participer à vos
services : pourquoi vont-ils faire appel à vous ? Dans ce que vous
proposez, qu’est ce qui répond à leurs attentes ?

3. Capacités et motivation pour le changement

Vous avez identifié les bénéficiaires/prescripteurs, et leurs


besoins et attentes. Mais il faut aussi comprendre quelles sont
leurs capacités, en fonction de leur niveau d’études, de leurs
expériences professionnelles, mais aussi de leur motivation pour
le changement. Sont-ils prêts à s’investir dans un processus
d’accompagnement ? Qu’est ce qui va les motiver et les
convaincre ? Ainsi, même si le besoin est bien identifié, il faut
également s’assurer que le service proposé pour répondre au
besoin puisse correspondre aux capacités et aux motivations
des bénéficiaires. Parfois, nous n’avons pas les outils pour
faire face à un besoin précis en fonction des capacités
particulières du public, il faut dans ce cas être capable de le
reconnaître.

4. Qui s’occupe de leurs besoins, aujourd’hui ?

Le besoin exprimé est peut-être partiellement couvert par


d’autres acteurs ou par le bénéficiaire lui-même. Vous devez
ici présenter ce que fait le bénéficiaire aujourd’hui pour répondre
au besoin et la nature de ce qui lui est proposé, soit par le public,
soit par un autre acteur.

5. Interactions avec le projet

Quels sont les liens qui font la relation entre ces bénéficiaires
et votre équipe ? Feront-ils de ces bénéficiaires des clients ? Des
bénéficiaires gratuits ? Vont-ils payer la totalité du service ou une
partie symbolique ? Vont-ils venir eux-mêmes vers le local ou
allez-vous vous déplacer vers eux ? Vont-ils devenir des
ambassadeurs et faire la promotion du projet ? Sont-ils des
associés potentiels ? Des adhérents ?

Il faut ici comprendre les interactions, et, à partir de là, le type


d’adhésion que cela va impliquer.

II – ACCOMPAGNER LE LANCEMENT DE PROJET D’ESS


43
6. Comment les atteindre ?

Ils sont à présent identifiés : comment les atteindre ? Quels


partenaires vontnous aider à les atteindre, à les impliquer, à les
fidéliser ? Est-ce qu’ils viennent grâce à la publicité, à travers un
autre programme ? Par le boucheà oreille, la réputation ? Il faut
donc présenter ici les canaux et le parcours pour atteindre les
bénéficiaires.

7. Stratégie à adopter

Grâce à toutes les informations recueillies, vous pouvez


présenter en quelques lignes la stratégie à adopter : doit-on
continuer avec ce groupe de bénéficiaires ? Doit-on agir en
direction d’une nouvelle cible ? Doit-on développer plus de
partenariats avec ce type de prescripteurs ? Doit-on développer
un nouveau module pour répondre à ce nouveau besoin ?

EXEMPLE POUR COMPRENDRE :

Cette matrice constitue l’outil pratique à faire remplir au


groupe, on peut y travailler avec les porteurs de projets pour analyser
les parties prenantes. Reprenons ici l’exemple du Groupement à
Kesra travaillant sur la valorisation des produits du terroir.

Intérêts, besoins Capacités et


Interactions Stratégie à
Partie prenante et attentes en motivation pour
avec le projet adopter
général le changement

Niveau scolaire
Mettre en place
Plus de revenus basique
Bénéficiaire Elles sont un plan de
associées dans renforcement
Valorisation de Envie d’améliorer
25 Femmes le groupement technique adapté
leur travail les conditions
de 40 à 60 ans et veulent être aux capacités, et
de travail, mais
travaillant dans la rémunérées au expliciter l’impact
Apprendre responsabilités
transformation de prorata de la du changement de
de nouvelles familiales limitant
produits du terroir production technique sur les
techniques l’engagement en
revenus espérés
volume horaire
Mise à
Valoriser le Nouvelle équipe
disposition d’un
patrimoine local qui a envie de
espace pour les Signer une
et attirer des mettre en place
Partenaire formations convention de
visiteurs de nouveaux
Mise à partenariat pour la
projets
Municipalité de disposition d’une mise à disposition
Créer de Budget à allouer
Kesra tente pour faire d’infrastructures et
nouvelles très faible mais
des ventes lors de matériel
opportunités pour infrastructures et
des évènements
les habitants RH disponibles
dans la ville

44 II – ACCOMPAGNER LE LANCEMENT DE PROJET D’ESS


III – ANTICIPER LE LANCEMENT ET
STRUCTURER L’IDÉE DE PROJET

Les porteurs de projet à ce stade ont analysé le contexte, les


besoins de leur communauté ou des bénéficiaires du projet. Ils
sont en mesure de définir le problème auquel ils vont s’attaquer,
avec qui et pour qui ils vont le faire. Ces étapes sont essentielles
avant d’aller plus loin dans la structuration du projet.

UTILISER LA CRÉATIVITÉ

Concrétiser cette première base en idée de projet n’est pas


évident pour tous. Pour faciliter le passage à la structuration de
l’idée de projet, on peut faire appel à la créativité.

Il s’agit de demander aux participants de créer un premier


modèle pour l’organisation de l’ESS, qui peut représenter le projet
de manière factuelle ou symbolique. L’objectif est de penser
son projet d’une manière différente et de stopper la pensée
automatique. Les porteurs de projets sont invités à travailler en
groupe afin de réaliser un prototype collectif de leur solution.
L’idée est qu’ils puissent modéliser à travers une maquette
leur idée de solution, donc de projet à mettre en place pour
résoudre le problème auquel ils souhaitent s’attaquer. Cet
exercice permet aux porteurs de projets d’échanger entre eux
de manière alternative sur leur idée de solution/projet, et de
la concevoir sous une forme matérielle, tout en instaurant une
vision de travail collaboratif.

Il faut dans l’idéal des jeux du type lego, mais on peut aussi
demander au groupe de se procurer du matériel aisément
disponible (papier, stylo, feuille, sable, cailloux, bouteilles,
carton…). La maquette doit être suffisamment explicite pour
qu’on puisse comprendre l’idée du projet sans avoir recours
à une explication. C’est également une forme alternative de
travail pour mixer des groupes dans lesquels certains membres
sont moins à l’aise avec l’écrit ou les présentations orales, et
ainsi leur donner la possibilité de s’exprimer malgré tout.

III – ANTICIPER LE LANCEMENT ET STRUCTURER L’IDÉE DE PROJET


45
FAIRE L’INVENTAIRE DES RESSOURCES

A ce stade, l’accompagnateur peut également présenter


« l’inventaire des ressources » au groupe. L’inventaire des
ressources peut aussi se faire plus en amont. Il peut être un outil
d’introduction au travail d’accompagnements’il est compliqué de
travailler directement sur l’analyse du contexte avec le groupe.
C’est également un bon moyen de diagnostiquer le groupe, et
d’évaluer sa capacité à s’auto-analyser.

L’inventaire des ressources permet de classer les ressources


entre celles que l’on possède, celles facilement mobilisables et
celles plus difficilement mobilisables. L’inventaire des ressources
peut ainsi permettre de redimensionner le projet en fonction de
ce qui est faisable en termes de ressources.

Les ressources garantissent donc le bon fonctionnement de


l’OESS et la capacité à délivrer une plus-value sociale. On peut
retenir différents types de ressources, à savoir :

• Les ressources matérielles : les usines de fabrication, les


infrastructures, les locaux, les bureaux, les équipements,
les véhicules de fonction, les installations de stockage, les
réseaux de transport...
• Les ressources intellectuelles : la notoriété, la base de
connaissances, le conseil consultatif, les compétences en
affaires, l’expertise technique, ...
• Les ressources humaines : le personnel, les partenaires,
les partenaires à titre gracieux, l’équipe d’appui ponctuel,
les réseaux locaux, les réseaux d’appui, les réseaux
d’entreprise…
• Les ressources financières : la trésorerie, les lignes de
crédit, l’accès aux crédits, les fonds propres, l’accès aux
fonds d’investissement, les compétences en matière
de rédaction de propositions de projets à des bailleurs,
l’accès aux bailleurs de fonds, l’accès aux plateformes de
financement participatif (crowdfunding), ...
• Les ressources communautaires : les groupes
communautaires, les lieux emblématiques, les infrastructures
communautaires (écoles, hôpitaux, librairies, jardins publics,
forêts...), les services communautaires (transports, centre
d’éducation, centre de recyclage...), les talents locaux...

46 III – ANTICIPER LE LANCEMENT ET STRUCTURER L’IDÉE DE PROJET


Conseil : Les porteurs de projet ont souvent tendance à
considérer qu’ils n’ont pas de ressources car ils n’ont pas
d’argent en poche, mais cela est faux ! A vous de leur révéler
les nombreuses ressources qu’ils ont acquises à travers leurs
expériences professionnelles ou les stages qu’ils ont suivis,
mais aussi à travers leurs familles et leurs amis. Il faut aussi
les rassurer : il est tout à fait normal de ne pas avoir toutes les
ressources avant de débuter.

Avant d’avancer dans la structuration du projet, vous pouvez


vous assurer que l’idée de projet est cohérente avec le contexte
et les capacités de l’équipe, et qu’elle s’inscrit dans une
démarche collective qui met la communauté au cœur du projet.
La structuration du projet permettra par la suite d’en affiner la
faisabilité. Il s’agit ici plus de s’assurer que le groupe ne fait pas
fausse route (trop ou pas assez ambitieux, en lien ou pas avec
les contraintes du territoire). Si le groupe avait déjà une idée bien
arrêtée sur le projet, cette étape a dû vous permettre de remettre
les choses au clair et de rectifier la trajectoire, si besoin.

LA CHARTE DU PROJET POUR FIXER


LES GRANDES ORIENTATIONS DE
L’ORGANISATION DE L’ÉCONOMIE
SOCIALE ET SOLIDAIRE

De quoi parlons-nous ?

La charte du projet est un élément de base pour l’organisation


de l’économie sociale et solidaire, dans la mesure où elle aide
le groupe à définir au mieux son projet en le situant dans son
contexte et en en précisant les objectifs. La charte permet aussi
de susciter l’intérêt des interlocuteurs et de motiver toutes les
parties prenantes en les mobilisant au service de la finalité
sociale du projet. Elle devient en quelque sorte la « constitution »
de l’organisation sociale et solidaire : au-delà des statuts,
elle présente en interne et en externe la raison d’être de
l’organisation.

III – ANTICIPER LE LANCEMENT ET STRUCTURER L’IDÉE DE PROJET


47
En résumé, la Charte du projet :

• Met en évidence les priorités que se fixe l’organisation.


• Montre la cohérence entre la vision, la mission, les objectifs et
les principes d’action.
• Expose situation du projet par rapport à un contexte social.
• Montre la spécificité du projet - clarté et précision dans
l’expression de la vision et de la mission.
• Use d’une formulation dynamique et motivante.

Vision Mission Objectifs Principes d’action


Quelle vision de la A quel enjeu de Quelles actions le Quelles valeurs
société sous-tend le société le projet project propose-t-il ? doivent être
projet ? répond-t-il ? Quoi, quand, où ? respectées ?

A partir de quoi aider le groupe à bâtir la Charte du projet ?

Pour cela il faut réutiliser le travail d’analyse du projet. Comme


indiqué, une bonne analyse du problème permettra la bonne
construction du projet ! La première étape consiste donc à
transformer les problèmes formulés de manière négative en
affirmations positives.

Dans la charte du projet, le problème central devient la mission,


ce à quoi le groupe s’engage à apporter une réponse. Les causes
à l’origine du problème deviendront les objectifs qu’il faudra
atteindre pour remplir la mission. Les conséquences du problème
sur lesquelles ils ne peuvent agir directement deviendront la
vision, le grand rêve auquel l’organisation ESS contribuera à
apporter une réponse. Les valeurs et principes viendront guider
la bonne mise en œuvre du projet.

48 III – ANTICIPER LE LANCEMENT ET STRUCTURER L’IDÉE DE PROJET


Arbre à Problèmes Charte du projet

Conséquences VISION

Problème MISSION

Causes OBJECTIFS

Principes

La vision propose ce que serait la situation idéale.

Ces aspirations doivent être attirantes et ambitieuses, afin de


motiver tout partenaire potentiel de l’organisation mais aussi
son équipe autour d’une vision commune.

Celle-ci peut être une vision de la société dans laquelle on


souhaiterait vivre ou une vision de l’organisation, celle qu’on
cherche à mettre en place.

III – ANTICIPER LE LANCEMENT ET STRUCTURER L’IDÉE DE PROJET


49
IMPERATIFS :

La vision est en cohérence avec le défi identifié lors de l’analyse


du besoin social.

La vision doit être ambitieuse mais ne doit pas discréditer votre


projet ! Elle doit rester atteignable pour ne pas perdre de sa valeur.
La vision doit permettre de rassembler les parties prenantes
autour d’un projet commun.

La mission définit l’objet même de l’entreprise sociale, sa raison


d’être.

Elle résume en une phrase, deux maximum, de manière


précise et complète à la fois, la mission sociale que le groupe
fondateurs’est fixée. Si la mission n’est pas suffisamment
claire, elle peut entraîner l’équipe dans la confusion, et la
pertinence du projet risque d’être en permanence remise en
cause.

IMPERATIFS :

1. Décrire une réalité : l’action de l’organisation ESS peut


évoluer, il est donc important de réviser si besoin la mission
pour qu’elle soit cohérente avec l’action.

2. Refléter ses valeurs et ses priorités.

3. Être intemporelle : même si elle est susceptible d’évoluer, elle


doit être se présenter comme une ligne d’action qui restera
valide pendant un temps indéterminé.

4. Être précise : elle doit être exprimée dans un langage simple,


et être comprise par n’importe quel interlocuteur, qu’il soit
impliqué dans la structure ou totalement extérieur.

Il doit y avoir un lien logique entre la vision et la mission. La


vision et la mission doivent suffire à exprimer clairement le
cœur d’action de l’organisation et à faire comprendre ce
qu’elle apporte comme réponse aux problèmes sociaux et/
ou environnementaux identifiés. Une confusion entre vision et
mission peut entraîner des erreurs stratégiques et des
dysfonctionnements opérationnels : c’est un premier piège à
éviter pour le groupe fondateur, l’accompagnateur doit les guider
dans ce sens.

50 III – ANTICIPER LE LANCEMENT ET STRUCTURER L’IDÉE DE PROJET


Les objectifs sont les actions que l’entreprise de l’ESS s’engage
à mettre en œuvre pour réaliser la mission qu’elle s’est fixée.
Ils permettent de visualiser ce que fera concrètement
l’organisation pour répondre à sa mission dans le cadre de sa
vision.

Il peut y avoir plusieurs objectifs, mais leur nombre ne doit pas


être excessif (max. 6).

IMPERATIFS :

Spécifique /Mesurable /Ambitieux /Réaliste /Temporellement


défini

Les principes d’action sont les valeurs de l’organisation qui


doivent guider les actions mises en place. Il est important que le
groupe fondateur définisse les principes d’action de la structure :
les entrepreneurs de l’ESS s’attachent aux moyens autant qu’à la
finalité du projet.

Ces principes d’action guident la marche de l’organisation, de


ses membres et des différentes parties prenantes : ces valeurs
sont non-négociables, elles doivent être partagées par tous et
tous doivent se sentir représentés dans les actions réalisées.

i:

« Agir en concertation et en complémentarité avec les acteurs


existants »

« Chercher à être exemplaire, en étant exigeants dans tous les


aspects de notre action »

« Rechercher la diversité »
« Respecter l’égalité Hommes -Femmes »

III – ANTICIPER LE LANCEMENT ET STRUCTURER L’IDÉE DE PROJET


51
UN EXEMPLE POUR MIEUX COMPRENDRE :

Arbre à Reformulation Charte


problèmes positive du projet

La transformation
La transformation des
des produits
produits de terroir à
du terroir à
Kesra ne fonctionne
Kesra permet
pas suffisamment
aux femmes du Instaurer un modèle
bien pour faire vivre Vision : c’est
groupement de de commerce
les femmes du un grand rêve
vivre dignement équitable dans la
Conséquence groupement à long terme
région du nord-
auquel le projet
Préservation ouest et préserver
Disparition des va contribuer
des techniques les savoir-faire
techniques
traditionnelles de
traditionnelles de
transformation
transformation des
des produits du
produits du terroir
terroir

Permettre aux
Les techniques
femmes du Mission : c’est
de transformation
Le manque de groupement de ce que l’OESS
et de
techniques de Kesra d’améliorer va faire : on
commercialisation
transformation et de leurs revenus en perçoit ici la
Problème sont suffisantes
commercialisation réinventant la dimension
pour valoriser les
des produits dérivés stratégie marketing sociale ET
produits dérivés
de la figue à Kesra de la vente de économique du
de la figue à
différents produits projet
Kesra
du terroir

Mettre en place
un parcours de
Les femmes renforcement de
du groupement 6 mois pour 25
Les femmes du
ont suivi des femmes âgées
groupement n’ont pas Objectifs :
formations de 40 à 60 ans
suivi de formation Ce sont des
professionnelles habitant à Kesra
professionnelle actions clés qui
seront mises
Cause Des ressources Identifier et mette
Absence de en œuvre pour
humaines en en place une
ressources humaines réaliser la
marketing et équipe de jeunes
en marketing et mission, elles
commercialisation diplômés (2 filles,
commercialisation sont chiffrées
sont présentes 2 garçons) pour
dans assurer le travail
l’organisation de marketing et de
logistique lié à la
commercialisation

52 III – ANTICIPER LE LANCEMENT ET STRUCTURER L’IDÉE DE PROJET


Bien souvent, les porteurs de projets et/ou les bénéficiaires
connaissent bien leur domaine d’action. Ils n’ont parfois pas
les moyens d’exprimer de manière claire leur idée de projet et
la manière dont ils comptent le mettre en œuvre (stratégie). En
faisant ce travail de reformulation depuis l’analyse du problème
vers la charte du projet, l’accompagnateur doit s’assurer que les
membres du groupe sont en accord avec les termes employés et
qu’ils s’approprient bien la Charte. Le travail de reformulation se
fait au service du groupe, et non pas uniquement pour avoir un
beau document bien écrit. L’accompagnateur doit donc s’assurer,
tout au long du processus, que la vision, la mission et les objectifs
sont bien assimilés par le groupe.

UN MODÈLE ÉCONOMIQUE DE L’ORGANISATION


DE L’ÉCONOMIE SOCIALE ET SOLIDAIRE

La charte du projet permet donc d’avoir une base solide avec une
définition claire de la mission qui définit les principes d’actiond’une
organisation de l’économie sociale et solidaire, ainsi qu’une vision
claire et sur le long terme qui lui donne un bel élan et la volonté de
défier les obstacles sur le long chemin entrepreneurial.

Comme n’importe quelle organisation se positionnant sur un


marché concurrentiel, une entreprise de l’économie sociale
et solidaire doit structurer son activité autour d’un modèle
économique qui soit viable. Mais si l’organisation de l’ESS peut
mobiliser des outils d’entrepreneuriat classique, elle doit aussi
intégrer une approche spécifique, en termes de relations clients/
bénéficiaires, d’offre commerciale et sociale, d’organisation en
interne, de positionnement, de partenariat avec les acteurs de
l’écosystème. C’est en partie ce que nous avons abordé dans la
section réservéeà l’analyse des parties prenantes ! Il est donc
important, en tant qu’accompagnateur, de rappeler que les
exercices préalables, qui, parfois, sont en apparence loin du
« business », sont utiles à toutes les étapes ! Une organisation
de l’ESS intègrele social et l’économique à chaque aspect de
son travail et de son développement, l’accompagnateur se
devant d’en être le garant dans la phase de conception et de
développement.

Le canevas du modèle économique (BMC) est l’outil qui définit


les grandes règles de fonctionnement et la manière par laquelle
une structure génère et diffuse de l’argent mais aussi de l‘impact,
dans le cadre d’une entreprise de l’ESS. La grande spécificité
du BMC social que nous verrons ici relève de la définition de la
proposition de valeur commerciale ET sociale, ainsi que de la
segmentation clients / bénéficiaires.

III – ANTICIPER LE LANCEMENT ET STRUCTURER L’IDÉE DE PROJET


53
RAPPEL

Tout comme pour le travail fait avec les bénéficiaires, et comme


pour toute entreprise se positionnant sur un marché concurrentiel,
l’organisation de l’ESS se doit de comprendre ses clients. Elle
peut notamment réaliser des enquêtes pour :

Valider l’existence d’une réelle demande sur votre produit ou


service.

Déterminer qui sont les personnes intéressées par votre produit :


âge, sexe, catégorie socioprofessionnelle, lieu de vie, quantité de
la population, etc.

Mieux connaître leurs attentes et, s’il le faut, réajuster le projet.

Établir une première estimation du prix que les clients sont prêts
à payer pour votre produit/service.

L’OESS n’est donc pas exonérée du travail d’étude de marché


et d’étude de faisabilité. Vous pouvez ici utiliser des outils
classiques, mais en prenant en considération les critères de la
Charte du Projet. N’oubliez pas que le fait de défendre les valeurs
de l’ESS dans son produit, son service ou son cycle de production
peut être un élément clé dans le positionnement marketing et la
communication du projet !

Penser une proposition de valeur adaptée


aux organisations de l’ESS.

Plus-value
sociale bénéficiaires

proposition
commerciale clients

54 III – ANTICIPER LE LANCEMENT ET STRUCTURER L’IDÉE DE PROJET


La proposition de valeur est un élément central du modèle
économique (ci-dessus) ; elle est décortiquée ci-dessous pour
être adaptée à l’économie sociale et solidaire. Elle doit donc
proposer un produit ou un service qui répond aux exigences
des clients tout en apportant un gain pour la communauté et les
bénéficiaires. Parfois, si elle est bien formulée, la mission de la
Charte du Projet peut faire office de proposition de valeur, les
questions relatives aux bénéficiaires (en vert) ayant été traitées
au préalable.

Proposition de valeur Clients et bénéficiaires

Qu’est ce
qu’il veut
gagner ?

Qu’est ce
qu’il fait
aujourd’hui

...répond aux Qu’est ce qui


exigences des clients les gêne ?
Un produit
ou un
service
qui...

Qu’est ce
...apporte un gain qu’ils veulent
pour la communauté améliorer ?
les bénéficiaires
Comment
font ils
aujourd’hui

De quoi ils
souffrent ?

III – ANTICIPER LE LANCEMENT ET STRUCTURER L’IDÉE DE PROJET


55
Il est parfois difficile pour les porteurs de projet d’arriver à
comprendre le marché et les clients. Du fait de l’éloignement,
géographique tout autant que symbolique, et du manque de
données et d’informations, comment comprendre son client ?

IDÉE OUTILS : La carte d’empathie

L’accompagnateur propose au groupe de se mettre à la place


d’un client potentiel (BtoB ou BtoC) et d’essayer de comprendre
différents aspects qui l’amèneront à faire appel aux services de
l’organisation. Cette mise en situation fondée sur l’empathie est
importante pour les porteurs de projets, afin qu’ils prennent du
recul et essayent de comprendre le client, qui vit parfois dans une
réalité socio-économique ou culturelle complètement différente. Il
faut alors se poser un certain nombre de questions :

• Que pense-t-il, que ressent-il ? : Quelles sont ses


préoccupations majeures, ses inquiétudes et ses aspirations ?
• Que dit-il, que fait-il ? : Quel est son comportement vis-à-vis
d’autrui et son attitude en public ?
• Qu’entend-il ? : Que disent ses amis, ses collègues, sa famille,
et ceux qui comptent dans son choix d’entrepreneuriat ou
d’investissement en Tunisie ?
• Que voit-il ? : Quel est son environnement et qu’est ce qui lui
est proposé aujourd’hui ?
• Affects : Quelles sont ses frustrations, les obstacles auquel il
fait face, ses peurs ?
• Gain : Quels sont ses désirs, les critères de réussites ?

L’exercice est visuel, avec au centre le profil du client ciblé, et


autour ces 6 grandes questions.

Bien sûr, l’idéal est ensuite de pouvoir permettre aux porteurs de


projets de rencontrer directement le client potentiel. N’hésitez pas
vous-même à jouer le rôle du client, ou à mobiliser votre réseau.
Il est possible également d’organiser des entretiens par skype ou
téléphone si la distance ne permet pas une rencontre physique.

56 III – ANTICIPER LE LANCEMENT ET STRUCTURER L’IDÉE DE PROJET


IV – S’ORGANISER POUR LE BON
FONCTIONNEMENT DU PROJET D’ESS

ORGANISATION INTERNE ET GOUVERNANCE


PARTICIPATIVE ET DÉMOCRATIQUE

De quoi parlons-nous ?

La gouvernance démocratique ou participative est un des


principes clés du fonctionnement des organisations de l’économie
sociale et solidaire. Au-delà des aspects statutaires et légaux,
comment faire vivre cette bonne gouvernance au sein du groupe,
et cela, même avant la constitution légale de l’organisation ?
La gouvernance de l’organisation de l’ESS est une forme
d’organisation interne qui vise à favoriser la participation des
parties prenantes du projet à la définition des orientations de la
structure. Qu’ils soient membres, salariés, associés, usagers ou
bénéficiaires, ces acteurs peuvent avoir la possibilité de participer
au processus de décision, en fonction du règlement interne de
la structure. Cela permet d’agir plus efficacement sur le service
assuré ou le bien produit, d’optimiser ainsi l’activité menée, en
la faisant évoluer de manière à répondre le mieux possible aux
besoins des parties prenantes. La gouvernance participative ne
se fait pas au nom d’une idéologie mais au nom de l’efficacité et
de la qualité du service qu’elle produit, aussi bien socialement
qu’économiquement.

La gouvernance se manifeste sous différentes dimensions :

De manière organisationnelle et statutaire, par le respect de


l’esprit démocratique à travers la tenue de réunions régulières,
l’élection du conseil d’administration, la tenue des assemblées
générales. Les statuts et la loi précisent, dans certains cas, le
processus à suivre pour la tenue de ces réunions, comme on le
voit, par exemple, avec les SMSA, dont les articles 13 à 25du
Chapitre III de leurs statuts sont exclusivement dédiés aux
assemblées générales. Cependant, ces obligations statutaires ne
suffisent pas à mettre en place une gouvernance participative.
Il convient également de veiller constamment à la qualité
d’échange par l’implication des parties prenantes, l’accès à
l’information, la communication interne. En ce sens, la publication
en toute transparence des documents financiers et des rapports
d’activités annuels est importante. La mise en place d’un
espace protégé et inclusif pour le travail collectif prouve en soi
que la gouvernance est mise en œuvre au quotidien au sein de
l’organisation, dans le respect de la charte du projet.

IV – S’ORGANISER POUR LE BON FONCTIONNEMENT DU PROJET D’ESS


57
Comment faire vivre la gouvernance ?

L’accompagnateur peut aider de plusieurs manières à organiser


le collectif en phase de développement de projet et à mettre en
place cette gouvernance, en veillant à :

• Clarifier les valeurs et la cohérence du projet : ceci est le


résultat du processus de rédaction de la charte du projet et de
construction du projet dans son ensemble. Il convient ici de
rendre le projet lisible pour tous, notamment pour les groupes
ayant déjà avancé dans la structuration. Il faut s’assurer que
chaque membre a les moyens, les outils et les informations
pour comprendre tous les aspects du projet dans lequel il est
ou sera engagé.

• Dresser une liste des centres d’intérêt et des motivations :


il est important de faire régulièrement une pause pour
réexaminer les aspects techniques, économiques, juridiques
relatifs au projet, et de réévaluer la motivation du groupe et
prendre éventuellement connaissance des frustrations que
certains peuvent rencontrer. On travaille ici sur de l’« invisible »,
sur ce qui ne se voit pas et ne se dit pas au premier abord, un
effort doit être effectué à l’amont par l’accompagnateur pour
éviter la naissance de conflits.

• Identifier les métiers/fonctions nécessaires au projet et


répartir les rôles : il s’agit ici de la mise en place de fiches de
poste précises pour détailler les missions et responsabilités
de chacun.

• Communiquer en interne : il est parfois nécessaire dans le


groupe de désigner une personne responsable de cette
communication interne, qui se fera par la circulation de
l’information (panneau d’affichage, boucle de mail, groupe
facebook), des réunions régulières avec ordre du jour précis,
des espaces de discussion ouverts pour s’exprimer ou donner
son avis (temps conviviaux, repas, boîte à idées…).

• Formaliser l’organisation interne : cela peut passer par la mise


en place d’un organigramme. Il ne faut pas alors retomber
dans un schéma classique d’organigramme trop vertical, mais
faire vivre les principes de gouvernance participative à travers
cet organigramme, pour bien organiser le travail et partager
les responsabilités.

58 IV – S’ORGANISER POUR LE BON FONCTIONNEMENT DU PROJET D’ESS


• Le choix d’un statut va également déterminer des éléments
importants en termes de gouvernance et de prise de décision.
C’est pour cela que le statut ne peut pas être décidé apriori,
mais conçu de façon conforme aux choix des membres, aux
obligations de l’activité, et à la culture du groupe. Si le choix
s’oriente vers un statut qui n’est pas considéré comme faisant
partie de l’ESS, il faut alors intégrer dans les statuts des
éléments garantissant le respect des principes, et notamment
en termes de gouvernance et de prise de décision.

• Accueillir et transmettre : il est important de prévoir l’arrivée


potentielle de nouveaux membres ou salariés, et de penser
la façon dont ils seront accueillis et dont les valeurs du projet
leur seront transmises.

L’accompagnateur peut alors accompagner le groupe dans la


mise en œuvre d’un plan de gouvernance que l’on peut résumer
par le tableau suivant :

Organisation interne - Qui fait quoi et quand ?

1 - Partage du projet et des valeurs


• Quelle occasion ?
• Quelles approches ?
• Quels supports ?

2 - Organisation fonctionnelle et
décisionnelle
• Quel partage des responsabilités ?
• Quelle organisation fonctionnelle ?

3 - Régulation et coordination
• Quelles instances ?
• Quelles fréquences ?
• Quelles indicateurs/repères ?

4 - Limites et tensions
• Comment sont prises en charge les
tensions et éventuellement gérées les
sanctions ?

Zoom sur les outils : Ici aussi, l’accompagnateur peut mobiliser


les outils classiques de la création de l’entreprise, en les adaptant
aux principes de l’ESS. La structuration de la gouvernance interne
passe, en somme, par la mise en place de l’organigramme, des
fiches de poste et du règlement intérieur.

IV – S’ORGANISER POUR LE BON FONCTIONNEMENT DU PROJET D’ESS


59
PLANIFIER ET ORGANISER
LE TRAVAIL DU GROUPE

La planification est partie intégrante de l’accompagnement.


Apprendre à planifier facilite le processus de création et de
développement, mais aussi par la suite la bonne implémentation
des activités dans le quotidien de la vie du projet.

La planification d’action est le processus qui guide les activités


quotidiennes d’une organisation ou d’un projet. C’est le fait de
planifier ce qui doit être fait, quand cela doit être fait, par qui
cela doit être fait, ainsi que les ressources ou analyses qui
sont nécessaires pour cela. C’est le processus qui permet
d’opérationnaliser les objectifs stratégiques. C’est pourquoi il est
également appelé planification opérationnelle.

La plupart des plans d’action consistent en les éléments suivants :

• une déclaration de ce qui doit être réalisé (les résultats ou


les domaines de résultats qui émergent d’un processus de
planification stratégique)
• une énumération des étapes qui doivent être suivies pour
atteindre cet objectif
• une sorte de calendrier pour la succession des étapes et le
temps que chacune devra prendre (quand ?)
• des décisions claires sur qui aura la responsabilité de
s’assurer que chaque étape est réalisée avec succès (qui ?)
• une clarification des analyses/ressources nécessaires

Ne pas aller trop vite !

Avant de planifier les activités clés de l’organisation, il faut aussi


planifier les actions nécessaires à la création et au montage de
l’organisation sociale et solidaire ! Il faut aussi prendre en compte
la planification d’un pilote du produit ou du service à délivrer
avant même la mise en production proprement dite au sein de
la structure. Le passage par cette phase de test permettra d’être
le plus possible en adéquation avec les besoins des clients (avec
une approche terrain active), de développer un produit avec
des cycles itératifs très courts, de bien comprendre les
investissements nécessaires et de valider l’accroche au marché
et aux clients par des expérimentations.

60 IV – S’ORGANISER POUR LE BON FONCTIONNEMENT DU PROJET D’ESS


L’approche terrain active permet de mieux connaître le(s)
besoin(s) du client/bénéficiaire et d’y apporter une solution
efficace avec plus d’impact. Il est intéressant, dans le contexte
tunisien, d’encourager les jeunes porteurs de projets à minimiser
les risques au départ de sorte à pouvoir tester le marché et
avoir le plus de garanties possibles sur la pertinence de
l’investissement.

Ressources Ressources
Humaines Clés Suivi
Ou Quand
Indicateu
Activité Resp Equipe Temps Argent Matériel

Activité 1
Sous
Activité 1.1
Sous
Activité 1.2

1e partie : Où ? Quand ?

Dernière partie : Sous-activité (2 fois avec trait d’union)

Ici la planification est aussi une occasion de plus pour intégrer les
valeurs et principes de l’ESS dans les activités quotidiennes du
projet. La question du temps doit être prise en compte dans les
ressources. Bien souvent, les personnes qui vont être amenées à
prendre en charge des activités ne seront pas rémunérées pour
ce travail. Il est donc important de valoriser la ressource temps,
pour organiser efficacement l’engagement nécessaire de chacun.

L’accompagnateur a un rôle crucial pour détailler les sous activités


inhérentes à une activité principale.

Prenons, par exemple, le cas d’un groupe de jeunes artisans


dans le bois qui veulent ouvrir un espace d’exposition pour leur
produit. Avant de penser à l’aménagement du local, et même si
le budget est disponible, il y a de nombreuses activités à mettre
en place en parallèle (visite d’autres espaces existants, atelier
participatif pour l’aménagement, recherche documentaire sur
internet, prise en compte de l’avis des clients et de leurs goûts,
devis pour l’aménagement, etc. ) Bien souvent les porteurs de
projets se concentrent sur la finalité, alors que le processus est
un excellent moyen de faire vivre les valeurs de l’ESS. Ainsi, en
mettant en place une séance participative d’aménagement de
l’espace, tous les membres du groupe pourront exprimer leur avis,
ce qui renforcera à terme l’appropriation de l’espace. Faire vivre
les valeurs de l’ESS prend du temps, mais c’est le seul moyen de
les enraciner dans la culture du projet.

IV – S’ORGANISER POUR LE BON FONCTIONNEMENT DU PROJET D’ESS


61
ACCOMPAGNER LE PROJET EN ACTIVITÉ

On peut utiliser un tableau de management pour suivre les activités


réalisées par le groupe. L’idéal est d’utiliser un document excel,
si possible en ligne dans une version actualisable ? Adaptable au
fur et à mesure et que l’accompagnateur peut suivre à distance.

Tableau de management
Activité Responsable Objectif Actions à Prendre Commentaires Status
Activité 1.1
Activité 1.2
Activité 1.3
Activité 1.4
Activité 1.5
Activité 1.6
Activité 1.7
Activité 1.8

ADMIN, FINANCE ET LEGAL


Activité 2.1
Activité 2.2
Activité 2.3
Activité 2.4
Activité 2.5
Activité 2.6
Activité 2.7
Activité 2.8

CLIENT ET FOURNISSEUR
Activité 3.1
Activité 3.2
Activité 3.3
Activité 3.4
Activité 3.5
Activité 3.6
Activité 3.7
Activité 3.8

INTERNE ET LOGISTIQUE
Activité 4.1
Activité 4.2
Activité 4.3
Activité 4.4
Activité 4.5
Activité 4.6
Activité 4.7
Activité 4.8

TESTING
Activité 5.1
Activité 5.2
Activité 5.3
Activité 5.4
Activité 5.5
Activité 5.6
Activité 5.7
Activité 5.8

Mesure d’impact

Le code couleur peut aussi permettre de suivre ce qui est en


cours, ce qui est fait et ce qui est en retard.

62 IV – S’ORGANISER POUR LE BON FONCTIONNEMENT DU PROJET D’ESS


ACCOMPAGNER DANS LA PRISE
DES BONNES DÉCISIONS

L’ensemble des outils pensés et utilisés pour structurer le projet


n’ont pas vocation à être archivés ! Ils doivent être envisagés
comme des outils de pilotage et de référence pour le porteur de
projet, mais aussi pour l’accompagnateur qui doit y faire référence
fréquemment. Ainsi le Business Model évoluera en fonction de
l’évolution des clients, des fournisseurs ou des partenaires. La
Charte du Projet sera utilisée en interne pour rappeler à chacun
les valeurs, et en externe comme support aux éléments de
communication. L’organigramme sera évolutif pour faire vivre la
bonne gouvernance…

Il est impossible de décréter des règles strictes concernant toutes


les démarches que le projet d’ESS aura à entreprendre pour
diriger et gérer son activité.

Au fur et à mesure que la liste des actions à accomplir s’élargira,


l’accompagnement guidera le groupe dans la hiérarchisation
des tâches. La tâche peut sembler simple, mais les porteurs de
projets auront probablement des difficultés à prioriser et à établir
des différences entres les tâches qu’ils ont en main.

Commencez par établir une liste de toutes les tâches à accomplir,


sans ordre particulier. Utilisez ensuite la matrice « important vs
urgent » pour aider le groupe à définir ses priorités.

Importance

Haute Importance Faible Importance

I. a. Requiert une III. a. A déléguer


Haute
b. attention b.
Urgence
c. immédiate c.
Urgence
II. a. Prévoir IV. a. A ajourner
Faible
b. l’accomplissement b.
Urgence
c. de la tâche c.

Case III : À déléguer Case IV : À ajourner

IV – S’ORGANISER POUR LE BON FONCTIONNEMENT DU PROJET D’ESS


63
Il faut commencer par travailler sur les tâches de la case I, parce
qu’elles sont hautement urgentes et importantes. Ensuite, il faut
consacrer du temps et de l’attention aux tâches de la case II.
Les tâches de la case III peuvent être déléguées, et l’on pourra,
éventuellement, se débarrasser des tâches de la case IV.

Quelques conseils à donner au groupe :

Répartir les tâches dans un esprit d’équipe. Aucune personne ne


peut, à elle seule, posséder toutes les compétences requises.
Une équipe est solide quand chacun peut se concentrer sur son
domaine d’expertise. La confiance et la délégation des tâches
doivent être travaillées et discutées, il ne s’agit pas d’attitudes
innées.

En cas de ressources limitées, il faut se débrouiller et faire


preuve d’ingéniosité pour résoudre les problèmes. La dynamique
communautaire et sociale doit pouvoir mobiliser des partenaires
qui souhaitent partager éventuellement la mission sociale.

Être réactif et s’adapter aux changements qui pourraient


apparaître. Savoir faire évoluer ses priorités.

Le marketing ne s’arrête jamais. Il faut s’assurer que le groupe


rester constamment au courant des nouvelles évolutions du
marché.

64 IV – S’ORGANISER POUR LE BON FONCTIONNEMENT DU PROJET D’ESS


Guide de l’accompagnateur de projets de l’économie sociale et solidaire,
élaboré dans le cadre du projet JEMP “Jeunes et Employabilité”.

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