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Née en 1903, Marguerite de Crayencour perd sa mère 10 jours après sa naissance. Elle est
élevée par sa grand-mère et son père qui se chargeront de son instruction.
Elle voyagera dans de de très nombreux pays. Elle a une prédilection pour certains pays : la
Grèce en particulier car elle est un point de rencontre entre des civilisations différentes (orientale et
occidentale), aux limites d’un monde et aux commencements d’un autre. Elle a pris la nationalité
américaine mais elle a revendiqué d’appartenir à la culture de son pays natal : « je suis française de
culture ».
On retrouve cette ouverture culturelle dans son personnage. Hadrien a comme elle un certain goût
pour se tourner vers les pays frontaliers (p 136-137) : « Sur vingt ans de pouvoir, j’en ai passé douze
sans domicile fixe. La tente légère, l’architecture de toiles et de cordes, était encore la préférée.
mais je me défiais de toute fixité pour m’attacher à aucune demeure, même mouvante. »
Hadrien fait un aveu à Marc Aurèle page 138 « Il faut faire ici un aveu que n’ai fit à personne : je n’ai
jamais eu le sentiment d’appartenir complètement à aucun lieu, pas même à mon Athènes bien-aimée,
pas même à Rome. Etranger partout, je ne me sentais particulièrement isolé nulle-part. »
A son goût des voyages dans le monde s’ajoute celui du voyage dans le temps. Là encore elle
aime les périodes charnières : Deniers du rêve (montée du fascisme), Le coup de grâce (région Balte
pendant la période qui suit la révolution russe), Les mémoires d’Hadrien : « Les dieux n’étant plus, et
le Christ n’étant pas encore, il y a eu, de Cicéron à Marc Aurèle, un moment unique où l’homme
seul a été »1. Il s’agit de la période de règne d’Hadrien, apparue au tout début de l’existence du
christianisme. Il s’agit donc d’une transition religieuse ici où le pouvoir des hommes a pu s’instituer
sans trop dépendance au pouvoir religieux.
Son œuvre est marquée par sa diversité et sa longévité. À 16 ans, Yourcenar publie sa
première œuvre : Le jardin des chimères et invente son pseudonyme « Yourcenar » (anagramme de
Crayencour. À l’autre bout, les dernières publications sont posthumes : Quoi ? L’éternité. Tome 3
inachevé des Mémoires. Elle est l’auteur d’une œuvre longue touffue et diverse : romancière,
essayiste, mémorialiste, nouvelliste, dramaturge, poète et traductrice d’un auteur grec mais aussi de
Virginia Wolf.
1 C’est une citation de Flaubert citée par Yourcenar elle-même dans ses notes.
Très tôt, sa mère meurt. Son père très cultivé veille à l’éducation de sa fille. Ils lisent
ensemble les Mémoires de Saint Simon. Ils lisent ensemble Flaubert, Chateaubriand. À 9 ans, elle
s’installe à Paris. Elle reçoit une éducation fine sans aller à l’école, elle apprend en autodidacte,
aidée de précepteurs. Elle a une éducation humaniste et encyclopédique.
En 1937, elle rencontre Grace Frick, universitaire américaine, qui deviendra sa compagne.
C’est elle qui sera la dédicataire des notes de Mémoires d’Hadrien. En France, c’est la guerre, le
séjour temporaire aux Etats-Unis devient une installation définitive. Yourcenar va accepter de
donner des cours. Le thème de l’homosexualité n’est pas négligeable dans ses romans puisque
Yourcenar développe le récit de la mort d’Antinoüs, amant d’Hadrien, alors que cette évocation tient
en 5 lignes dans l’histoire Auguste et que ce sujet est également abordé dans son roman Alexis ou le
traité du vain combat : Alexis écrit à sa femme Monique pour lui dire pour lui dire qu’elle est parfaite
mais il s’est trompé et est homosexuel.
Elle entre à l’Académie française en mars 1980. Elle a 77 ans et mourra 7 ans plus tard, à 84
ans.
La Genèse
Villa Hadriana : la plus riche des villas impériales romaines, réalisée, de 117 à 138, par l'empereur
Hadrien, près de Tibur (Tivoli), à 26 km à l'est de Rome. L'ensemble contenait de magnifiques collections
dont les restes ont, notamment, alimenté les musées pontificaux aux XVIIIe et XIXe s.
Un projet qu’elle réalisera en deux temps, car elle peine à trouver la manière dont elle
entrera dans le roman.
- Entre 1924 et 1929, puis entre 1934 et 1937, elle fait de nombreuses recherches à
l’université de Yale (USA) sur ce personnage historique (voir note de Yourcenar), écrit un
texte, puis elle délaisse le projet.
- En 1948, elle reçoit une malle venue de France avec des papiers personnels et retrouve
un texte qu'elle avait écrit bien longtemps auparavant qui commençait comme une lettre
d'Hadrien adressée à Marc Aurèle : « Mon cher Marc… » « Depuis ce moment, il ne fut
plus question que de récrire ce livre coûte que coûte ». Elle trouve la clef du roman « La
Certains points communs entre MY et H saillissent (voir goût pour les voyages en début de
biographie), cependant MY refuse à son lecteur d’interpréter son roman comme une forme
d’autobiographie déguisée : « Grossièreté de ceux qui vous disent : « Hadrien, c’est vous.» (note 56
p.341). La suite de la note montre cependant qu’écrire le portrait d’un autre et de faire entendre sa
voix ne se fait pas sans une relation étroite avec ce dernier. « Le sorcier, qui se taillade le pouce au
moment d’évoquer les ombres, sait qu’elles n’obéiront à son appel que parce qu’elles lapent son
propre sang ».
Pour écrire ce roman et faire revivre l’empereur Hadrien, M. Yourcenar fera preuve d’un
riche travail d’érudition. Elle écrit : « Les règles du jeu : tout apprendre, tout lire, s’informer de
tout » (Note 37 p.332). La méthode c’est le savoir, la collecte de matériaux, la volonté de
s’approprier la culture d’une époque dans la volonté de représenter un homme. Elle écrit dans son
carnet de notes qu’elle cherche à « reconstituer sa (celle d’Hadrien) bibliothèque » (p327) pour
recréer la pensée d’Hadrien ; elle lira donc tous les livres qu’aurait pu lire Hadrien à son époque, afin
d‘en saisir l’esprit. Elle se fondera aussi sur des récits historiques antiques, narrant la vie d’Hadrien :
Histoire auguste (notices biographiques de 39 empereurs), L’Histoire romaine de Dion Cassius (II° s.
Av. JC) Elle s’est aussi aidé d’épigraphie = étude des inscriptions sur la pierre (sur la colonne Trajan),
de la numismatique (étude de la monnaie), de la statuaire et de l’architecture. Dans le paratexte,
Yourcenar oriente la lecture par une note (p.349) qu’elle publie dans une démarche d’historienne (p
349) et dans laquelle elle cite ses sources.
Néanmoins, elle ne veut pas de notes de bas de page dans le roman pour ne pas divertir le
lecteur. Les notes introduisent un intrus et perturbent l’échange entre l’auteur et le lecteur. Elle veut
faire « le portrait d’une voix » et « (s)e passer le plus possible de tout intermédiaire fusse de (elle)-
même » (p 330).
Le savoir ne doit pas figer le récit. Elle s’efforce donc de mettre son imagination au service de
son récit pour donner vie à son personnage. Elle déclare que simultanément à ses investigations, elle
adopte la méthode de « l’ascète hindou qui s’épuise, des années durant, à visualiser un peu plus
exactement l’image qu’il crée sous ses paupières fermées » et qu’en plus de « poursuivre à travers
de milliers de fiches l’actualité des faits ; (elle) tâche de rentre leur mobilité, leur souplesse vivante,
à ces visages de pierre. » (idem : note 37 p.332). Elle situe cependant son œuvre entre « roman » et
« poésie » en revendiquant une appropriation d’une région du passé. Cf P330 Note 31 : « Un pied
dans l’érudition, l’autre dans la magie, ou plus exactement (…) dans cette magie sympathique qui
consiste à se transposer en pensée à l’intérieur de quelqu’un » Cf note 33 : « De notre temps, le
roman historique (…) ne peut être que plongée dans un temps retrouvé, prise de possession d’un
monde intérieur ». Elle se compare à une archéologue de l’âme lorsqu’elle déclare vouloir « faire du
dedans ce que les archéologues du XIXème siècle ont fait du dehors » (CN note 23 p.327).
Hadrien,
Figure historique et figure romanesque
(naissance en 76 et décès en 138. Règne de 117 à 138).
Dès son plus jeune âge, il accéda à la politique gravit les échelons ainsi il passa de ses premiers
postes au commandement de l’armée (20 ans), à la fonction de gouverneur dans la province de
Pannonie (31 ans), au rang de conseiller privé de l’empereur (35 ans). Son adoption deux jours avant
la mort de Trajan lui permettront d’accéder au titre.
- Un pacificateur3
Hadrien n’est pas soucieux de gloire militaire et met fin aux campagnes d’expansion de
Trajan (qui avait considérablement agrandi l’Empire par ses conquêtes) et met en place la pax
romana. Dès le début de son règne, il effectua de nombreux voyages à travers tout l’empire. Ce fut à
partir de ces périples qu’il décida d’abandonner des territoires qui pouvaient mettre en danger le
- Un voyageur
C’est un intellectuel et grand voyageur, profondément hellénisé. Dès le début de son règne,
Hadrien entreprit de visiter ses provinces. Il avait un tel goût pour les voyages qu’il voulait voir de ses
yeux tout ce qu’il avait lu sur les sites du monde entier. Il supportait si facilement le froid et les
intempéries qu’il ne se couvrit jamais la tête. »
( Histoire Auguste, Spartien)
C’est à Athènes qu’il a vécu le plus longtemps. Il était passionné d’architecture, de chasse,
d’arts, plus particulièrement de l’art grec. Il écrit des vers (voir le poème de la fin du roman) et la
construction de la villa Adriana témoigne de son amour de l’art. Il perfectionna l’art romain en
s’inspirant de l’art grec. Hadrien décida d’embellir Rome. Il fit construire le Panthéon et le temple de
Vénus.
On dit qu’en mourant il fit ces vers qui serviront de structure au roman (le premier chapitre
est intitulé par le premier vers et ce poème, proféré par Hadrien narrateur, clôt le roman)
- Un amoureux
A la fin de sa vie, sa santé fragilisée (son cœur et ses poumons lui provoquaient de terribles
crises d’étouffement. Il tenta même de se suicider sans y parvenir, et demanda à ses amis de mettre
fin à ses jours mais tous refusèrent) et le problème de sa succession (Lucius, son successeur mourut
de tuberculose, ce qui conduisit Hadrien à adopter un homme pour qui il avait une grande estime :
Antonin. Il fit de lui son successeur à condition que ce dernier adopte Marc Aurèle, (le neveu de
l’empereur) âgé de 17 ans. Ainsi Hadrien assura sa succession). L’empereur décéda le 10 juillet 138, à
Baies, au sud de Rome. Son corps fut transporté dans le tombeau grandiose (mausolée), que
l’empereur avait fait construire de son vivant, à Rome sur la rive droite du Tibre. Antonin lui succéda,
jusqu’en 161, puis son fils adoptif, Marc Aurèle, le remplaça sur le trône, jusqu’en 180. La volonté
d’Hadrien fut ainsi accomplie.
MY exerce une liberté créatrice dans les limites des sources à l’exception de la fin de l’Empereur : « il
mourut détesté de tous » dans l’Histoire Auguste. Yourcenar atténue cet aspect pour peindre un
« homme presque sage », « héros de l’humanisme »
« Mémoires d’Hadrien, réécriture de l’antiquité » : émission La Compagnie des auteurs,
https://www.franceculture.fr/emissions/la-compagnie-des-auteurs/marguerite-yourcenar-44-
memoires-d-hadrien-une-reecriture-de-l
Antinoüs : 16ème minute et 41ème minute /Hadrien, voyageur comme Yourcenar : 39ème minute