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Titre de l’ouvrage 

Approche concrète pour la maîtrise de la croissance urbaine au


Cameroun

1
INTRODUCTION GENERALE
Le concept de l’aménagement du territoire s’est imposé en langue française
dans les années 1960 grâce à des auteurs tels que Lajugie (1964), Gottmann (1966),
Labasse (1966) ou Rochefort et al. (1970). Il se définit d’abord par sa finalité que l’on
peut, comme Piveteau (1979) assimiler à une réponse à des contradictions spatiales,
contradictions qui ont cru avec le temps en raison de la multiplication des
dysfonctionnements, des déséquilibres spatiaux et des destructions (notamment de
l’environnement écologique et du patrimoine). Il s’explique aussi par le changement
d’attitude des pouvoirs publics et par les nouvelles compétences de ces derniers en
matière de gestion de l’espace.
Les géographes tels que Brunet et al., (1998) définissent ce concept comme l’action
volontaire et réfléchie d’une collectivité sur son territoire, soit au niveau local
(aménagement urbain, rural, local), soit au niveau régional (grands aménagements
régionaux, irrigations), soit au niveau national (aménagement du territoire). Pour eux,
le territoire est une maille de la gestion de l’espace, un espace approprié avec
sentiment ou conscience de son appropriation et relevant d’un Etat.

Avec la montée en puissance de la mondialisation, l’aménagement du territoire


devrait occuper le centre des préoccupations aussi bien des chercheurs que des
décideurs. La majorité des villes à travers le globe fait déjà face à la hausse
considérable du taux de chômage, la multiplicité des flux migratoires inter et
intracontinentaux. Elle présente aussi une désarticulation de son territoire et une
désintégration économique. Ces villes vivent au quotidien les réalités que sont le
désordre et l’anarchie urbaine.

La mondialisation implique la libre circulation, le brassage économique, social et


culturel. De ce fait, elle peut être un handicap pour les territoires mal aménagés et les
économies mal structurées. Ce dynamisme qui se traduit localement par une forte
pression sur le processus d’urbanisation est source d’une explosion des besoins en
infrastructures urbaines et en services collectifs, lesquels sont exacerbés par
l’importance des retards accumulés et par l’accroissement de la pauvreté en zone
urbaine (AFD, 2005).

La tendance actuelle de l’aménagement du territoire est à la décentralisation. Depuis


plus d’une dizaine d’années, les politiques d’aménagement du territoire s’intéressent
aux politiques de décentralisation. Ces politiques s’accompagnent d’un transfert de
responsabilité vers les CTD destinées à devenir progressivement des acteurs majeurs
dans les domaines du développement économique, de la fourniture des services

2
essentiels et de la lutte contre la pauvreté. Mais alors, elles sont souvent peu
expérimentées et peu préparées à la gestion de la ville. Cette nouvelle configuration
conduit les bailleurs de fonds à faire évoluer leurs modes d’intervention 1. Ainsi, les
politiques d’aménagement du territoire doivent être fondées sur la réciprocité 2,
doivent être un instrument de compétitivité nationale de l’économie, doivent être
placées au cœur des priorités, et doivent promouvoir le développement endogène et
des modes d’urbanisation modernes.

En effet, les modes d’urbanisation sont aussi un des enjeux majeurs de


l’aménagement du territoire. Le territoire est au cœur des stratégies visant à renforcer
la compétitivité et l’attractivité économique. Il incarne les nouveaux ressorts de la
compétitivité : la mobilisation du savoir des hommes, leurs capacités d’organisation
productive, la valorisation des singularités.

La performance des entreprises ne s’entend plus sans un environnement de qualité


que seule une communauté d’acteurs (le capital social) peut organiser et maintenir
dans ses dimensions technologiques, mais aussi sociales, culturelles et
environnementales. Le besoin d’innovation réclame aujourd’hui le développement de
systèmes où inter-réagissent unités de production et services d’accompagnement. De
tels systèmes exigent de fortes convergences entre stratégie d’entreprises et projets de
territoires.

Les nouvelles dynamiques d’emploi s’appuient largement sur le développement de


nouveaux services de proximité. Ils requièrent des systèmes d’organisation collective
et le développement de fonction de stimulation et d’expérimentation. Ces systèmes ne
sauront se construire et durer qu’en s’organisant à partir d’espaces vécus.

Ainsi, l’initiative locale et collective, en valorisant les composantes de la proximité


(voisinage, esthétique, échange, quotidienneté…) est en mesure de s’affirmer comme
précurseur de nouvelles solidarités complémentaires des mécanismes traditionnels.
Ces mécanismes apparaissent de plus en plus dans leurs insuffisances. Le territoire
est l’instrument de la modernisation des politiques publiques. Il impose la
transversalité à ces politiques, leur décloisonnement. Il impose aussi l’enjeu d’une
démarche qui doit faire converger la légitimité des politiques publiques sectorielles et

1
Il s’agit en particulier de passer de financements jusqu’ici principalement attribués à l’Etat (financement
souverain) à des financements attribués aux communes directement (financement sous-souverain) ou par le
biais d’institutions spécialisées. L’enjeu est également de faciliter l’accès des municipalités au marché
financier, grâce à la mise en place de mécanismes spécifiques (émission des titres, emprunts obligataires).
2
La réciprocité est le fait de fonder une pratique sur le principe d’équilibre, le principe d’harmonie.

3
les initiatives locales des acteurs économiques et sociaux. Cette démarche doit
favoriser la rencontre entre un processus ascendant global, complexe, nourri de la
mobilisation de ses acteurs locaux et un processus descendant qui équilibre et qui
intègre au nom de l’équité républicaine. in fine, il est le lieu d’ancrage de nos
institutions locales, reste le domaine de l’action exclusive de l’État qui dispose à
travers « la compétence de la compétence » de degrés de liberté non affectés par les
effets de la mondialisation. Ces libertés lui permettent toutes les initiatives pour
améliorer l’efficacité économique tout autant que démocratique du système
d’administration publique (Lipietz, 2001).

Ainsi, les politiques d’aménagement du territoire doivent donc être en mesure


d’ « aménager le territoire plutôt que de déménager les hommes » tout en essayant,
autant que faire se peut, de maîtriser la croissance urbaine.

PROBLEMATIQUE.
L’aménagement du territoire est un art au service de la puissance publique, qui
vise à travers une planification physique pertinente, à favoriser la réduction autant
que faire se peut des disparités inter ou intra régionales. Il est l’une des missions
régaliennes de l’État, qui cherche à atteindre les objectifs de cohésion territoriale et la
solidarité nationale de manière à créer des synergies entre le développement
économique et la protection de l’environnement. Cela passe par la réalisation du
souci du  « détenteur de la compétence de la compétence » de créer des conditions de
vie décente dans un cadre décent, de permettre l’accès égal à tous les points du
territoire à ses populations. En bref, les politiques d’aménagement du territoire visent
à maîtriser la croissance urbaine tout en garantissant le bien-être des populations.

Le Cameroun est marqué par deux faits incontestables. D’un côté, l’Etat essaye
depuis l’indépendance de maîtriser la croissance urbaine en mettant sur pied plusieurs
instruments3 en matière d’aménagement du territoire, de l’autre côté, la croissance
urbaine explose4 entraînant avec qu’elle de nombreux problèmes parmi lesquels le
désordre et l’anarchie urbaine.

Malgré le dynamisme des pouvoirs publics en matière d’aménagement du territoire,


les réalités au Cameroun montrent plutôt une fragilité accentuée de l’économie, une
désintégration du territoire et des systèmes productifs. On note que les dirigeants ont
d’énormes difficultés à apporter des solutions adaptées aux problèmes que sont la
crise économique, le chômage, le manque de compétitivité économique, l’anarchie
3
Lois, SDAU, PUD, PDU, POS, PS, PSU
4
52% de taux d’urbanisation selon l’INS
4
urbaine, la non maîtrise du foncier et la poussée démographique en milieu urbain,
bref, la non maîtrise de la croissance urbaine.
On peut donc s’interroger de la relation entre la croissance urbaine et l’aménagement
du territoire au Cameroun. Est-ce que c’est l’aménagement du territoire qui est à
l’origine de la croissance urbaine ou bien c’est la croissance urbaine qui incite à
l’aménagement du territoire au Cameroun ? En d’autres termes, est-ce que ce sont les
politiques publiques en matière d’aménagement du territoire qui impactent la
croissance urbaine ou bien c’est la croissance urbaine qui amène les pouvoirs publics
à mettre en œuvre ces politiques? Quelle relation existe-il entre l’aménagement du
territoire et la croissance urbaine au Cameroun ?

OBJECTIFS
L’objectif principal de ce travail est de connaitre le sens de la causalité entre
l’aménagement du territoire et la croissance urbaine au Cameroun. Plus précisément,
nous voulons savoir si les politiques publiques en matière d’aménagement du
territoire sont justifiées ou expliquées par la croissance urbaine ou bien c’est la mise
en place de ces politiques qui sont à l’origine de cette croissance urbaine.

HYPOTHESES
Nos objectifs nous amènent à la formulation des hypothèses suivantes :

- L’aménagement du territoire influence positivement la croissance urbaine au


Cameroun.

- La croissance urbaine influence négativement l’aménagement du territoire au


Cameroun.

5
METHODOLOGIE
Notre analyse se fera grâce à la recherche documentaire et l’analyse
économétrique. A partir des données de l’INS et de la Banque Mondiale, nous
effectuerons des tests de corrélation et de causalité au sens de Granger afin de savoir
si d’une part, il existe une relation entre les politiques d’aménagement du territoire et
la croissance urbaine et d’autre part le sens de cette relation et donc de la causalité
entre ces deux variables.

INTERET
Les résultats de notre analyse permettront aux autorités de mettre en place des
politiques urbaines efficaces qui prennent en compte la dynamique urbaine et les
moyens dont disposent les acteurs concernés.

PLAN DU TRAVAIL
Notre travail s’organise autour de deux grandes parties :

La première partie met en exergue la relation potentielle entre l’aménagement du


territoire et la croissance urbaine ;

La deuxième partie procède à la vérification empirique dans le cas du Cameroun.

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PREMIERE PARTIE : ANALYSE DES LIENS ENTRE
L’AMENAGEMENT DU TERRITOIRE ET LA CROISSANCE
URBAINE

INTRODUCTION
L’objectif de cette partie est de présenter les liens éventuels entre
l’aménagement du territoire et la croissance urbaine. La méthodologie déployée est la
recherche documentaire.

La partie s’organise autour de deux chapitres :

- Le premier met en exergue l’influence de l’aménagement du territoire sur la


croissance urbaine ;

- Le deuxième met en exergue l’influence de la croissance urbaine sur


l’aménagement du territoire.

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CHAPITRE I : LA CROISSANCE URBAINE, UNE
CONSEQUENCE DE L’AMENAGEMENT DU TERRITOIRE
L’objectif de ce chapitre est d’analyser l’influence de l’aménagement du
territoire sur la croissance urbaine. La littérature laisse penser que cette influence peut
être positive ou négative. Notre chapitre s’organise autour de deux principales
sections :

- la première section met en exergue l’influence positive de l’aménagement du


territoire sur la croissance urbaine ;

- la seconde section met en exergue l’influence négative de l’aménagement du


territoire sur la croissance urbaine.

Section I : L’influence positive de l’aménagement du territoire sur la


croissance urbaine.
Diverses théories tentent de mettre en exergue l’influence positive de
l’aménagement du territoire sur la croissance urbaine. Nous nous intéresserons aux
théories liées aux modèles de croissance endogène (A) et celles liées aux économies
d’agglomération (B).

A. Aménagement du territoire et croissance endogène


Les politiques publiques d’aménagement du territoire présentent des atouts
indéniables lorsqu’elles sont véritablement mises en œuvre. Leurs succès passent par
la réalisation des infrastructures importantes, les services publics, la maîtrise du
foncier ainsi qu’une différenciation du territoire.

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A.1. Dépenses publiques et croissance urbaine

Schéma 1 : du budget des dépenses publiques aux services publics.


BUDGET DES
DEPENSES
PUBLIQUES

BUDGET
D’INVESTISSEMENT
S PUBLICS
BUDGET D’INVESTISSEMENTS
COURANTS
CAPITAL PUBLIC

INFRASTRUCTUR
ES PUBLIQUES

SERVICES PUBLICS

TARIFICATION
SERVICES PUBLICS UNIFORMISEE
GRATUITS

SERVICES SERVICES PUBLICS SERVICES PUBLICS


PUBLICS AVEC CONGESTION PAYANTS

Source : Charlot (1996) et traitement de l’auteur

Le schéma ci-dessus décrit le budget des dépenses publiques. Il montre


l’importance de ces dépenses dans la relance des activités économiques grâce à la
mise en œuvre des infrastructures et des équipements indispensables pour les agents
économiques.

Meade (1952) considère que le capital public a deux rôles dans la sphère
économique : il peut être un facteur de production non-rémunéré mais, aussi, une
variable d’environnement qui contribue à augmenter la productivité du capital privé
et du travail. Ceci peut être traduit en termes d’externalités. Les services publics sont
à la base de deux grandes catégories d'externalités technologiques.

9
Ils sont tout d’abord source d’externalités technologiques directes. Ils sont en effet
des facteurs de production non-rémunérés (Barro, 1990) ou rémunérés à un taux
inférieur à leur productivité marginale. Les services tels l’utilisation de réseaux
électriques ou de canalisations rentrent dans la fonction de production des entreprises
sans engendrer de coût supplémentaire.

Outre cette externalité directe, les services publics engendrent des externalités
technologiques indirectes. L’existence de services de transport et communication,
même s’ils sont payants, améliore la circulation des sources de progrès technique
comme les innovations, la connaissance. Les produits joints de la production
circuleront plus rapidement entre les agents, si les infrastructures sont développées.
Les infrastructures de transport et communication constituent un support de
transmission des externalités directes procurées par le capital humain, les
innovations, le progrès technique. Elles favorisent donc les externalités de "spillover"
(Artus et Kaabi, 1993) et développent les organisations de type réseaux.

Que l’externalité soit directe ou indirecte, les services publics sont complémentaires
aux facteurs privés. Ils accroissent en effet la productivité du capital privé et du
travail, et améliorent les combinaisons productives. Ils peuvent accroître le nombre
de combinaisons productives possibles et modifier les complémentarités et/ou
substitutions existant entre les autres facteurs. Par exemple, dans l'analyse de la
croissance de Kaldor (1959), la substitution entre travail et capital n'est pas élevée
pour un processus donné mais varie avec les infrastructures qui transforment ce
processus de production.

L'offre publique de services aux entreprises permet également d'obtenir des gains par
l’allongement du détour de production. Cet allongement stimule la division du travail
et la spécialisation des tâches (Kaldor, 1970). Il s'agit également d'effets que les
agents ne contrôlent pas individuellement et qui vont pourtant accroître leur utilité
future, en transformant la structure des coûts de production. Ces effets peuvent être
décrits en termes d'externalités pécuniaires (Charlot, 1996).

Les politiques de développement économique des territoires peuvent permettre de


tirer le meilleur parti de leurs atouts, même s’ils sont modestes, et d’enrichir leur base
productive. Au besoin, des politiques de redistribution sont susceptibles de
compenser partiellement les inégalités de revenus qui, dans certains cas, sont même
susceptibles de servir de moteur de croissance par un effet de caractère keynésien
(Prager et Thisse, 2009).

10
De même, les théories économiques modernes ont élargi le paradigme de la
croissance de façon à rendre endogène la capacité d’innovation. Cette action s’est
faite par la mise en exergue de la relation entre la croissance et les composantes
institutionnelles au travers de la motivation à investir dans l’innovation (Aghion,
2002). Ainsi, une meilleure protection des droits de propriété intellectuelle, un
contexte entrepreneurial favorable aux activités innovantes et une plus grande
efficacité institutionnelle de la recherche sont perçus comme étant de nature à
stimuler la croissance.

Cette approche offre un solide cadre théorique permettant d’expliquer les différences
institutionnelles entre les pays faisant l’expérience d’une croissance économique
soutenue et ceux qui stagnent. Les premiers sont ceux où le système juridique et le
système d’éducation permettent aux entrepreneurs de profiter de la diffusion des
connaissances, faisant ainsi évoluer le pays vers la frontière technologique. Par
contre, les pays manifestant une forte instabilité dans les règles du jeu économique
dissuadent les élites d’investir dans des activités innovantes et les orientent vers la
lutte pour la capture de la rente publique (“rent-seeking”). Cette lutte se fait alors au
détriment de la rente d’innovation (Baumol, 2002).

Les modèles de croissance endogène tiennent compte de ces externalités positives


dans l’analyse de l’évolution de long terme des taux de croissance des économies.
Les premiers modèles se sont centrés sur la connaissance (Römer, 1986, 1990) et la
formation (Lucas, 1988), puis les dépenses publiques au sens large ont été évoquées
(Barro, 1990 ; Artus et Kaabi, 1993). Ces derniers travaux mettent en avant la
nécessité de la production par l’Etat de certains services source d’externalités. Le rôle
économique de l’Etat est alors clair: produire des services qui vont accroître la
productivité (Barro, 1990) et/ou accroître l’utilité des ménages (Artus et Kaabi,
1993), sans être directement financés par les agents mais par une taxe, et permettre à
l’économie de se positionner sur une trajectoire de croissance optimale (Charlot,
1996).

Selon Lucas (1993), la formation et la croissance des villes s’expliquent par la


présence de rendements croissants liés à la spécialisation industrielle et à la formation
d’un marché local du travail, mais également au potentiel de la demande finale
localisée, c’est-à-dire au potentiel de marché que représente une agglomération. Il
initie, par-là, un ensemble de modèles de croissance endogène qui prennent en
considération les dynamiques d’agglomération engendrées par la formation d’un
capital humain localisé.

11
La théorie générale de l’emploi de l’intérêt et de la monnaie a été popularisée par
John Maynard Keynes dans les années 30. Elle montre qu’on peut stimuler la
croissance économique par la consommation, l’investissement ou les dépenses
publiques.

Keynes stipule que le chômage est le résultat d'une insuffisance de la demande


effective. L’État peut agir sur les deux composantes de la demande globale :

- sur la consommation : l'État peut augmenter les revenus disponibles en réduisant la


fiscalité. Plus directement, l'État peut accroître sa propre consommation (la
consommation publique).

- sur l'investissement : en réduisant les taux d'intérêt, l'État va réduire le coût des
emprunts pour les ménages et le coût de financement des investissements pour les
entreprises.

Dans les faits, l’action de l’État se traduira par une politique budgétaire expansive.
L'impact sur l'économie sera plus que proportionnel, c’est ce que l’on appelle l’"effet
multiplicateur".

La théorie de la base exportatrice est une transposition territoriale des modèles post-
keynésiens de croissance par la demande. Les activités d’exportation sont l’élément
principal de la dynamique économique régionale, alors que la croissance des
branches productrices des biens et services pour le marché local dépend des revenus
distribués par le secteur d’exportation. L’approche en termes de clusters 5 lui est
associée et est devenue un élément incontournable des doctrines de développement
régional, malgré sa fragilité aussi bien théorique qu’empirique. C’est le bon mélange
des clusters, aussi bien dans leur nombre, et leur importance que dans leur variété qui
fait la richesse d’un territoire.

5
Un cluster est une concentration géographique d’entreprises et d’organismes divers (associations, banques,
sociétés de conseil, infrastructures de formation,…) se rattachant à une activité. Il permet donc à chacun de
ses membres de bénéficier d’économies d’échelles en gardant la souplesse d’une PME (Porte 2001). Les
clusters peuvent être décrits et analysés de trois manières complémentaires qui se réfèrent chacune à un «
type idéal » correspondant à une perspective particulière de l’agglomération (Gordon et Mc Cann, 2000) :
• le modèle traditionnel du « complexe industriel », concentration géographique d’activités reliées dans une
même chaîne de valeur, autour, en général, d’une ou plusieurs grandes entreprises directrices (automobile,
aéronautique, chimie, ..) ;
• l’agglomération d’entreprises - le plus souvent des PME -, relevant de la même activité, induite par la
division du travail et les avantages liés à la spécialisation locale d’inputs humains, physiques ou immatériels,
l’ensemble étant le fruit d’arbitrages entre coûts de transaction et économies d’échelle ;
• le modèle du tissu économique et social, des réseaux sociaux, formels ou informels, qui contribuent à
renforcer la confiance et à faciliter la circulation des connaissances dans une aire géographique déterminée,
la proximité géographique restant un facteur de réduction des incertitudes et des coûts de transactions dans
les activités innovantes.
12
La théorie de la base inverse la théorie traditionnelle faisant dépendre la croissance
des variables internes telles la croissance démographique ou l’accumulation du
capital. Cette théorie avait l’intuition majeure de faire dépendre la croissance de petits
ensembles territoriaux aux variables exogènes en l’occurrence les exportations.
Selon cette théorie, la croissance urbaine est due principalement à des facteurs
extérieurs à la ville, en particulier par la demande d’exportations. Sa formulation la
plus simple part d’un constat clair : « seuls les ensembles économiques de grande
dimension, sont maîtres de leur développement au point que celui-ci dépend de
variables internes, de proportions qui leurs sont propres. Si l’on considère des «
morceaux d’espace » infranationaux incomplets, spécialisés, ils ne peuvent plus tirer
de leurs efforts ni de leurs aptitudes propres les moyens de leur croissance. Celle-ci
dépend des signaux venus de l’extérieur». Cette théorie d’inspiration mercantiliste,
keynésienne et même néoclassique (le modèle de l’échange international) a inspiré un
grand nombre de travaux (Hoyt, 1954 ; North, 1955). La théorie a des racines
mercantilistes puisqu’elle repose sur le rôle primordial des échanges commerciaux de
la ville avec le monde extérieur; son appartenance au keynésianisme est apparente : la
théorie permet la définition du coefficient multiplicateur. Quant à la filiation
néoclassique; on peut établir le coefficient de localisation à partir de la notion
d’intensité relative d’une activité dans l’espace.

Selon cette théorie, les activités d’exportation sont l’élément principal de la


dynamique économique régionale, alors que la croissance des branches productrices
des biens et services pour le marché local dépend des revenus distribués par le secteur
d’exportation.

Des auteurs comme Czamanski (1964) ont essayé d’aboutir à un schéma dynamique
qui développe les propos de la théorie ; ils ont proposé que le processus de
développement urbain se succède selon des phases au cours desquelles certaines
activités auront un rôle moteur de la croissance et des phases où ces mêmes activités
seront liées par d’autres. Ces auteurs proposent d’expliquer les différentes étapes de
la croissance urbaine selon un schéma d’ensemble qui n’est pas sans rappeler celui de
Walt Rostow (1963) pour le développement économique général.

13
A.2. Le foncier, la différenciation urbaine et la croissance urbaine
Malthus (1815) et Smith (1776) considèrent que la rente foncière est un don
gratuit de la nature récupérée par les propriétaires fonciers en vertu de leur pouvoir
monopole de détention de la terre. La terre constitue un capital, voire une valeur
refuge sur laquelle investissent les urbains au profit de leurs enfants ou pour accroître
leur propre richesse (pratiques spéculatives). Ces dynamiques – anciennes –
s’accélèrent aujourd’hui en raison de l’augmentation très importante de la valeur des
parcelles, notamment en milieu péri-urbain où les champs se transforment en terrains
à bâtir. Cette évolution s’accompagne de pratiques clientélistes : les élites
économiques ou politiques nationales et locales utilisent le foncier comme moyen de
rétribution et de consolidation de leur base sociale et de leur clientèle politique
(Mansion et Broutin, 2012).

La théorie des places centrales de Christaller (1955) a connu plusieurs extensions


dont celles proposées par Losch (2002). Losch a montré « qu’il y a avantage à
ordonner les ensembles de réseaux urbains en un paysage économique où des
secteurs riches en villes, …, alternent avec des secteurs plus pauvres en
agglomérations ».

Le caractère centrifuge des mouvements d’activités a fait l’objet de diverses enquêtes


qui l’ont rendu évident. Ces enquêtes ont été à la base de plusieurs constructions
théoriques qui empruntent une idée très ancienne selon laquelle : derrière
l’acquisition d’un bien foncier, il y a aussi la disponibilité d’un type d’accès au
centre.

Différents travaux ont été menés à partir du modèle d’Alonso (1964) aux Etats-Unis
et en France. Selon ces travaux, pour minimiser les dépenses de transport et accroître
ainsi la surface de son logement, un individu recherchera une localisation proche du
centre. Le prix de l’unité de sol central s’élèvera, ce qui dissuadera certains de s’y
rapprocher. Finalement, le prix du sol décroîtra du centre vers la périphérie
parallèlement à la croissance des dépenses de transport. Un double arbitrage
intervient donc : entre dépenses de transport et de logement ; entre prix de l’unité
d’espace et quantité d’espace.

Dans le même ordre d’idée, l’importance du modèle élaboré par Mayer (2001) est
qu’au lieu de partir du centre pour expliquer la décroissance des prix du sol plus on
s’approche de la périphérie; « c’est l’évolution du prix du sol périurbain qui se
transmet en ville : la hausse des prix fonciers urbains dépend de la hausse du prix du
sol aux limites de l’urbanisation ».
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En ce qui concerne la différenciation du territoire, les stratégies de différenciation
horizontale ou verticale des territoires sont des réponses pertinentes pour mobiliser et
valoriser les atouts particuliers de chaque région dans un pays. Les autorités
publiques de différents territoires ont intégré, du moins partiellement, avec la
mondialisation, les enjeux de la concurrence internationale. Elles ont aussi intégré le
fait que la compétitivité territoriale peut se gagner avec des spécialisations adaptées.

Les stratégies de différenciation verticale accordent une priorité au renforcement du


système éducatif à tous les niveaux et à l’amélioration des compétences dans tous les
secteurs de l’activité économique. Les universités apparaissent comme les moteurs et
les catalyseurs du développement des régions les plus avancées, les collèges
technologiques et les centres techniques sont les instruments privilégiés d’accès à la
connaissance dans des régions qui se situent encore loin de la frontière technologique.
Ces stratégies verticales jouent sur le développement des capacités d’innovation de
l’ensemble des entreprises par l’élévation du niveau d’ensemble du capital humain de
la région, le renforcement des interactions des PME avec les grandes entreprises, les
collèges techniques, les centres de recherche et les universités. Elles passent
également par l’amélioration des infrastructures de la région et de son accessibilité.
Toutes ces actions supposent l’élaboration et la bonne mise en œuvre de stratégies
d’innovation adaptées à la situation de chaque territoire (Madiès et Prager, 2008).

B. Aménagement du territoire et économie d’agglomération.


L’aménagement du territoire peut être source de croissance économique d’un
territoire dans la mesure où, lorsqu’il est une réussite, on arrive à la formation des
économies d’agglomération.

B.1. Apport de l’économie géographique


Les nouvelles théories de l’économie géographique mettent l’accent sur le rôle
de l’agglomération. « L’agglomération peut être un facteur de croissance, permettant
de stimuler les autres facteurs de productions de façon directe grâce à l’innovation,
grâce aux infrastructures de transport…et indirecte par le biais des économies de
l’agglomération » (Cureaux, 2000).

Ainsi, pour l’économie géographique (Scott, Storper, 2003), la concentration


d’acteurs économiques induit une surproductivité globale (Krugman, 1991 ; Combes
et al., 2009 ; Martin et al., 2010) ou une croissance supérieure (Paci, Usai, 2008) en
raison des externalités positives induites par l’agglomération des firmes. Cette règle
vaut pour les externalités de type Marshall-Arrow-Romer qui retracent la relation
croissante entre les interactions et le degré de spécialisation des firmes et les
15
externalités de type Jacobs (Massard, Riou, 2002) qui soulignent que les interactions
sont d’autant plus importantes que les firmes agglomérées se caractérisent par un fort
degré de diversification des activités. Dans l’un et l’autre cas, la densité urbaine
exerce un effet positif sur les échanges et, par conséquent, sur la dynamique
économique (Dreier et al., 2001).

Le mouvement de métropolisation est un facteur puissant d’efficacité et de croissance


économique qu’il serait contreproductif de vouloir contrecarrer. L’aménagement du
territoire doit avant tout viser à libérer les initiatives des territoires. Pour cela, le
cadre institutionnel doit évoluer dans le sens amorcé par l’intercommunalité et, plus
largement, vers une recomposition de l’architecture des collectivités territoriales.
Quant à l’indispensable souci d’équité territoriale, l’instrument le plus puissant pour
y répondre réside de fait dans la redistribution horizontale, par le canal de la fiscalité
nationale, de la protection sociale et d’un certain nombre de services collectifs
(Maurice, 2001).

Cependant, une très forte concentration spatiale peut renforcer l’effet de concurrence
dans les régions centre et peut conduire à une délocalisation d’activités vers les
périphéries. Cette tendance se confirme d’autant plus que les facteurs qui favorisent
la localisation tels que l’infrastructure, la main-d’œuvre bon marché ou la demande
des biens produits existent aussi bien au centre qu’aux régions périphériques. La
mutation des espaces urbains est le résultat direct de la mobilité des activités. Les
activités pour se localiser « sont amenées à retenir l’emplacement urbain le mieux
adapté à leurs besoins ou celui qui leur est imposé par les contraintes auxquelles elles
font face » (Aydalot, 1985).

Sans aucun doute, les principes de l’économie géographique et urbaine font - ou


devraient pouvoir faire - consensus en fournissant aux décideurs un cadre de
référence et des concepts nouveaux susceptibles d’être mobilisés dans leurs travaux.
Ainsi, est-il nécessaire de reconnaître la prévalence des rendements d’échelle
croissants dans la formation des espaces économiques (Prager et Thisse, 2009).

B.2. Apport de la théorie des pôles de croissance


Perroux (1958) a proposé sa théorie des pôles de croissance qu’il présentait à la
fois comme théorie de la croissance sectorielle déséquilibrée et comme théorie de la
croissance régionale déséquilibrée.

La théorie part d’un constat selon lequel la vie économique résulte de l’action
spécifique d’unités économiques et non pas de l’action des agents isolés en situation
de concurrence. Ainsi, la croissance n’est pas une progression linéaire mais plutôt un
16
processus qui se propage dans le déséquilibre sous l’impact de l’action de certains
agents que Perroux nomme « Unités Motrices». C’est la localisation des activités
motrices qui donne à la théorie des pôles de croissance son contenu spatial. Les
activités additionnelles dépendantes des activités motrices ne se dispersent pas sur
tout le territoire, mais au contraire elles manifestent un comportement de
regroupement aux alentours de la production dominante. Selon la théorie, il y a
polarisation lorsque les activités additionnelles se multiplient et que les bénéfices de
la croissance du pôle se diffusent à son arrière-pays. Ainsi, Perroux présente une
théorie qui explique la concentration spatiale de la croissance.

Selon le théorème de George-Hotelling-Vickrey (1977), lorsque la taille de la


population est optimale, le total des dépenses requises pour l’implantation d’un
équipement public coïncide avec la rente différentielle totale donnant la valorisation
du sol en chaque point du territoire. Un nombre d’individus trop élevé (petit) par
rapport à l’optimum se traduira par un loyer du sol trop important (petit) en chaque
point. La rente foncière urbaine peut alors constituer un instrument de l’aménagement
en équipements publics (Guigou et al., 2001).

De même, au fur et à mesure que s’accroît la taille de la population, le nombre de


firmes opérant dans le secteur intermédiaire augmente, permettant ainsi une division
plus fine et poussée des tâches et, par conséquent, un accroissement concomitant de
la production globale (Abdel-Rahman et Fujita, 1990). Autrement dit, une plus
grande spécialisation du secteur intermédiaire a un effet multiplicateur sur la
productivité du secteur final, ce qui rend une grande ville plus productive qu’une
petite. A son tour, cette productivité plus élevée permet au salaire de croître avec la
taille de la force de travail locale (Glaeser et Maré, 2001). Si les entreprises du
secteur final se concentrent dans une région, la demande de biens intermédiaires y est
très élevée, ce qui attire les producteurs de biens intermédiaires. En retour, ces biens
étant fournis à un coût moindre dans la région centrale, les entreprises du secteur final
y sont également attirées. Un processus d’agglomération de nature cumulative va
donc s’enclencher (Krugman et Venables, 1995) correspondant à des compétences
plus pointues (Kim, 1989).

L’hétérogénéité croissante des formations professionnelles des travailleurs et des


besoins des firmes favorise alors leur regroupement géographique. A cause du
nombre élevé d’opportunités qu’elles engendrent, les grandes villes permettent de
réduire les difficultés d’appariement entre firmes et travailleurs : un employeur
cherchant à pourvoir un emploi vacant a une plus forte probabilité de trouver un
salarié doté des compétences requises et, réciproquement, les travailleurs ont une plus

17
forte probabilité de trouver un emploi permettant de valoriser au mieux leurs
compétences lorsque le marché du travail présente une taille suffisante (Kim, 1989 ;
Hamilton et al., 2000 ; Zenou, 2009). De nouveau, le niveau moyen de productivité
s’accroît avec le nombre de firmes et de travailleurs installés au sein du même
territoire (Prager et Thisse, 2009).

Image 1 : Infrastructures et transports

Source : Magazine d'information sur la formation professionnelle en Lorraine | n° 56 |


Avril 2012

L’image 1 présente les avantages dont dispose un territoire qui, grâce à la mise
sur pied des infrastructures, met en œuvre la multimodalité, intégrant ainsi l’ensemble
18
des moyens de communication et créant au passage une mine d’emplois. La mise sur
pied de la multimodalité passe par l’intégration de l’ensemble des inter- modalités
existantes sur le territoire. Ce schéma montre ainsi que ce sont les politiques en
matière d’aménagement qui doivent précéder la croissance urbaine afin de pouvoir la
contrôler et l’orienter.

Les politiques d’infrastructures peuvent aider au développement des régions les


plus en retard si elles se concentrent en leur sein, mais avec le risque de voir
l’amélioration de la convergence s’exercer au détriment de la croissance nationale.
En effet, si la baisse des coûts de transaction à l’intérieur des régions les plus en
retard aide à leur développement, les effets d’agglomération y sont moins favorables
à la croissance globale que dans les régions plus avancées (Martin, 2000). Par contre,
des politiques d’innovation assurées par le canal d’aides financières en faveur de la
recherche et du développement peuvent à la fois favoriser une meilleure répartition
de l’activité dans l’espace et un supplément de croissance économique. Ceci est
possible car la baisse des coûts de l’innovation a un effet positif d’ensemble supérieur
à l’effet négatif dû à la moindre croissance des activités dans les régions où les effets
d’agglomération sont les plus faibles (Prager et Thisse, 2009).

Section II : Influence négative de l’aménagement du territoire sur la


croissance urbaine.
Deux groupes de théories seront évoqués dans cette section : celui des théories
relatives aux flux migratoires des facteurs (A) et celui des théories relatives au
marxisme (B).

A. Théorie de flux migratoires des facteurs de production.


Cette théorie s’analyse à partir de deux principaux travaux : les travaux de
Tiebout (1956) et ceux d’Alonso (1964).

A.1. L’apport du modèle de Tiebout


Le modèle développé par Tiebout (1956) explique la différenciation communale
selon l’offre de biens et services publics locaux. En considérant un consommateur-
électeur parfaitement mobile, il suppose que l’information sur les dépenses et les
taxes locales est disponible, qu’il n’y a pas de rendements croissants ni décroissants
et qu’il existe une taille optimale du fait de la rareté de ressources foncières. Le choix
du consommateur –électeur se fait en fonction de la collectivité qui offre des biens et
services qui satisfont le mieux ses préférences ; sa mobilité dépend de sa demande en
biens publics et sur les ressources dont disposent les collectivités. Les collectivités
sont alors appelées par la loi de la concurrence tout comme les entreprises à produire
19
le plus efficacement leurs biens collectifs locaux, à inciter les ménages à révéler leurs
préférences réelles pour ces biens collectifs afin d’aboutir à une répartition des
ménages en collectivités homogènes. Les élus locaux séduisent les entreprises en
s’investissant dans une bataille « marketing » dont l’enjeu est de vendre au mieux
leurs territoires.

En France, par exemple, les décideurs ont pris conscience que le développement des
services collectifs avait de l’influence sur l’évolution des activités économiques. Le
développement urbain n’était plus condamné à suivre le développement économique,
mais pouvait espérer l’orienter. Les villes commencent à se mettre ouvertement en
concurrence. Les maires consacrent de plus en plus de temps à la promotion
économique de leur Cité (Oblet, 2003).

Néanmoins, l’attractivité d’une ville repose à terme sur son urbanité, c'est-à-dire la
capacité de faire d’une ville un lieu qui favorise les échanges et les rencontres entre
les agents économiques qui en dépendent.

A.2. L’apport du modèle d’Alonso


Le modèle monocentrique élaboré par la nouvelle économie urbaine est fondé
sur les travaux d’Alonso (1964). Ce modèle a permis d’expliquer un grand nombre de
caractéristiques urbaines telles que la centralité de l’emploi, la décroissance de la
densité de la population et des prix fonciers avec la distance au centre. Le modèle de
base reprend l’hypothèse monocentrique de Von Thünen (1826), avec l’existence
d’un Central Business District et système de transport radial générant un coût des
déplacements. Les agents économiques maximisent leur utilité sous contrainte de
budget en cherchant la localisation la plus optimale. C’est en fait, répondre aux
exigences que postule la rationalité du raisonnement marginaliste. Le principal
résultat du modèle est d’établir la décroissance de la rente foncière. Ainsi les agents
qui occupent les localisations les plus loin du centre et qui supportent par la suite un
coût de transport plus lourd, bénéficient en récompense d’une faible rente foncière.
La périurbanisation résidentielle devint donc parmi les causes de l’étalement urbain
qui, selon cette optique, se traduit par une baisse des densités centrales au profit de la
périphérie et donc par un éloignement des frontières de la ville. En reformulant le
modèle de base, l’économie urbaine a pu analyser l’étalement urbain : le Centre des
affaires devient un pôle urbain qui concentre les emplois et qui enregistre la densité
de populations la plus élevée. Le modèle permet en outre d’analyser l’effet de la
population, du revenu et des coûts de transport sur l’étalement urbain.

La croissance démographique engendre une croissance urbaine en taille et en densité.


L’accroissement de la population conduit à une augmentation de la demande de sol ;
20
en considérant que le coût de déplacement est indépendant du revenu alors si
l’élasticité-revenu de la consommation de sol est supérieure à zéro, une augmentation
de revenu engendre nécessairement une augmentation de la demande de
consommation de sol et les ménages se trouvent incités à se localiser plus loin du
centre. La ville s’étale davantage. L’analyse économique a longtemps essayé de
démontrer que la hausse des revenus et la baisse des coûts de transport sous-tendent
le mouvement de périurbanisation qui apparaît comme le résultat de la croissance
économique. Le maintien de cette croissance est le souci de tout décideur. Dès lors, il
faut accompagner la périurbanisation par une politique raisonnable qui visera entre
autre la minimisation de ses effets négatifs.

Ainsi, l’aménagement du territoire peut être source de déséquilibre territorial. En


favorisant l’étalement urbain, il induit des coûts supplémentaires pour les entreprises
de distributions et pour les ménages. Cela réduit les profits des firmes, augmente les
dépenses ménagères ainsi que les coûts pour l’environnement (augmentation du
volume des gaz à effet de serre, transformation des forêts en zones d’habitation).

B. Théories marxistes
Les théories marxistes regroupent entre autre les travaux de Marx et ceux des
néo-marxistes.

B.1. Analyse de Marx (1864)


Le courant marxiste s’oppose à la théorie libérale en démontrant que
l’organisation capitaliste de la société aboutit à l’exploitation de la plus grande partie
de la population par les détenteurs des moyens de production. La société se divise
donc en deux grandes classes qui s’affrontent : le prolétariat (qui détient la force de
travail) et la bourgeoisie (qui détient le capital).

L’affrontement de ces classes s’effectue dans le cadre du processus de production.


Marx distingue deux sphères importantes : celle de l’échange de marchandises et du
cycle MAM (marchandises, argent, marchandises) ; celle de la production et du cycle
AMA (capital avancé, marchandise, produit obtenu).

L’existence de la ville suppose que la société est redistributrice. « Le capitalisme,


cependant, légitime l’urbanisation en termes de contribution à l’accumulation du
capital et à la croissance plutôt qu’en termes de fonctions magiques ou religieuses »
(Ahmed, 1999). D’abord, les problèmes spatiaux sont apparus au second rang de
l’analyse marxiste qui s’intéressait plutôt à l’étude des crises du capitalisme.
Enracinée dans l’histoire et basée sur l’étude des mécanismes du capitalisme
industriel, l’étude des villes repose sur la division du travail entre ville et compagne
21
qui constitue à l’œil du marxisme une force dialectique de transformation de la
société. Marx a démontré comment le capitalisme industriel impose la concentration
urbaine. Il a cherché comment les mécanismes de la concentration urbaine
constituent, avec l’industrialisation, le facteur qui détermine la transformation sociale
de son temps. La ville, selon l’analyse de Marx, devient le lieu privilégié des
mutations révolutionnaires.

D’un autre côté, Marx a mis en évidence le lien entre l’espace et les stratégies du
capital. Ce dernier, en cherchant le profit dépasse l’espace lorsqu’il atteint un degré
d’accumulation supranational, impérial. D’autres travaux qui ont inspiré Marx, ont
essayé d’étudier les problèmes de la « ville socialiste». Leurs apports ont enrichi la
pensée marxiste et ont permis l’émergence de plusieurs théories basées sur l’étude de
l’espace. La théorie de la rente est l’une de ces théories. Elle essaie d’expliquer les
fluctuations des prix du sol urbain et du prix du logement. En général, l’analyse
marxiste considère l’espace comme rapport social ; l’espace est le produit de
l’histoire du développement du capitalisme. «L’espace prend forme dans les villes,
lieux par excellence de la lutte des classes, point de jonction de la production des
marchandises et de la reproduction de la force du travail » (Aydalot, 1985).

B.2. Analyse des néo-marxistes


L’apport de Marx au problème de la rente foncière en milieu urbain est resté
médiocre ; mais, l’observation des faits et la richesse des modèles développés, ont
poussé les néo-marxistes à essayer de dépasser cette insuffisance théorique de leur
précurseur. Ainsi, Lipietz (1974), parle de tribut foncier urbain. Il part d’un constat
simple : le logement est différent du blé supposé homogène et reproductible dans la
théorie d’origine et que le sol urbain lorsqu’il est vendu, il l’est une fois pour toute. Il
propose la notion de tribut relevé une fois pour toute au lieu de la rente annuelle
traditionnelle. Dans son analyse, Lipietz aboutit à ce que « le prix du sol intègre un
tribut foncier créé par l’usage qui sera fait du sol, lui-même découlant de la division
sociale de l’espace. Le tribut foncier est la redistribution au profit d’une catégorie
parasitaire de la plus-value sociale déterminée par cette division sociale de l’espace ».
Le point faible de ces apports néo-marxiste c’est que la propriété foncière ne diffère
pas de l’espace. « Ce faisant, ce n’est pas l’espace comme rapport social, mais la
propriété du sol comme rapport social qui a été mis en avant de manière sans doute
excessive » (Aydalot, 1985).

Pour les marxistes, les villes, qui sont les résultats des politiques d’aménagement du
territoire, sont des « bombes à retardement ». Elles créent des fractures sociales

22
obligeant une partie de la population urbaine à se soumettre à une autre. Cela justifie
le fait que la majorité des révolutions a eu pour point de départ les villes.

En somme, il était question dans ce chapitre de mettre en exergue l’influence


de l’aménagement du territoire sur la croissance urbaine. Nous avons pu voir
véritablement que l’aménagement du territoire influence aussi bien positivement que
négativement la croissance urbaine.

Cependant, l’aménagement du territoire, en dehors du fait qu’il influence beaucoup


plus positivement que négativement la croissance urbaine, est indispensable pour la
maîtrise de la croissance urbaine.

Si l’influence de l’aménagement du territoire sur la croissance urbaine est


établie, qu’en est-il de celle de la croissance urbaine sur l’aménagement du
territoire ?

23
CHAPITRE II : LA CROISSANCE URBAINE, UNE CAUSE DE
L’AMENAGEMENT DU TERRITOIRE
L’objectif de ce chapitre est d’analyser l’influence de la croissance urbaine sur
l’aménagement du territoire. La littérature fait ressortir cette influence, mais aussi des
travaux empiriques qui la mettent en exergue. Notre chapitre s’organise autour de
deux principales sections :

- la première section met en exergue l’influence de la croissance urbaine sur


l’aménagement du territoire ;

- la seconde section s’intéresse aux travaux empiriques qui mettent en exergue


cette influence de la croissance urbaine sur l’aménagement du territoire.

Section I : Influence de la croissance urbaine sur l’aménagement du


territoire
Diverses théories mettent en exergue l’influence de la croissance urbaine sur
l’aménagement du territoire. Dans le cadre de cette section, nous nous pencherons sur
la théorie du développement (A) et sur la théorie démo-économique (B).

A. La théorie du développement
La théorie ci-dessus s’intéresse à la croissance démographique mais aussi au
foncier urbain.

A.1. Croissance démographique et aménagement du territoire


Selon Perroux (1950), le développement est « l’ensemble des transformations des
structures économiques, sociales, institutionnelles et démographiques qui
accompagnent la croissance, la rendent durable et, en général, améliorent les
conditions de vie de la population. ». Cependant, la croissance non contrôlée en
milieu urbain peut être source de nombreuses difficultés. En effet, la majorité des
théoriciens du développement sont unanimes à reconnaître que la croissance rapide
de la population et l’élévation de son taux posent de graves problèmes, surtout
lorsque l’évolution économique n’arrive pas à suivre ce rythme.

L’accroissement rapide de la population occasionne une diminution des ressources


susceptibles d’améliorer les conditions de vie de la population. Un pays à forte
natalité et à faible mortalité est amené obligatoirement à consacrer des ressources
importantes à la construction d’écoles, d’hôpitaux, de logements et d’autres services
dont a besoin la population. Ces fonds investis dans ces opérations sont socialement

24
indispensables, mais ne sont pas immédiatement productifs. Ainsi, on constate bien
qu’il existe une relation importante entre la croissance démographique et le
développement économique surtout pour un pays en développement.

Les résultats décevants des plans de développement peuvent être attribués en grande
partie à l’expansion rapide de la population. D’après certains spécialistes, un taux
d’accroissement démographique élevé tend à baisser le taux d’épargne et des
investissements, à ralentir la croissance économique, aggraver le chômage et à
alourdir les dépenses de formation (scolaire, professionnelle…).

Dans ce contexte, la population se fragmente et, la partie de la population qui «


fonde» la ville et son développement est celle qui est capable d’y attirer du revenu en
provenance de l’extérieur ; ce sont « le roi qui collecte des taxes, le propriétaire qui
perçoit des loyers, le marchand qui bénéficie de ses échanges avec l’extérieur, un
artisan ou un industriel qui vend ses biens à l’extérieur, un romancier dont les livres
sont achetés hors de la ville, un médecin qui a des clients à la campagne, un étudiant
vivant de l’argent de parents vivant ailleurs, etc.». Le reste de la population vit grâce
à ces revenus venus de l’extérieur.

Dans une économie nationale sous la loi de l’offre, les économies locales et
régionales sont encore largement dépendantes des lois de la demande keynésienne.
C’est le revenu des résidents, qui est redistribué via l’échange marchand vers le
secteur domestique. Ce revenu permet de fixer le niveau final d’emploi. Il est aussi le
revenu de cohésion spatiale et territoriale. Développer le territoire, faire de l’«
aménagement du territoire » comme on le dit, vise ce même objectif de cohésion par
le revenu et l’emploi (Davezies, 2001).

A.2. Foncier urbain et aménagement du territoire


La croissance urbaine entraîne la consommation de plusieurs ressources
naturelles. La transformation de terres agricoles en logements ou en routes tend à être
permanente et n’est réversible qu’avec des coûts très élevés. L’étalement urbain
implique aussi le transport de matières premières utilisées pour la construction,
l’ouverture de carrières à proximité de réserves naturelles, une extraction excessive
des graviers des lits de rivière. Il modifie les propriétés des sols en réduisant leurs
fonctions essentielles (perméabilité, puits de carbone). Il modifie les interactions
entre eaux superficielles et eaux souterraines.

L’artificialisation des sols s’accompagne de leur imperméabilisation, donc d’une


amplification du ruissellement des eaux de pluies, augmentant donc le niveau des

25
crues. Celles-ci deviennent d’autant plus dangereuses du fait de l’augmentation du
nombre de logements construits dans des zones inondables (Laugier, 2012).

B. La croissance démo-économique et l’aménagement du territoire.


La théorie démo-économique met en relation les populations et leurs richesses.
Elle permet aussi de comprendre la relation qui existe entre les populations et leur
environnement.

B.1. Populations et richesse urbaine


La croissance démographique urbaine couplée à l’exode rural met d’énormes
pressions sur les politiques publiques d’aménagement du territoire mais aussi sur les
ressources disponibles. En effet, La théorie démo-économique malthusienne et ses
prolongements contemporains situent, a priori, la relation entre population et richesse
dans un univers fini. Dans cet univers, la progression de la population est
positivement liée au niveau de vie et se heurte à la contrainte des ressources qu’elle
contribue elle-même à exacerber. Le modèle malthusien et ses prolongements directs
se sont concentrés sur la relation entre la population et les ressources naturelles et
alimentaires. Sous l’hypothèse de rendements marginaux décroissants de la
progression démographique, ils concluent que la croissance de la population exerce
une pression négative directe sur l’accumulation, considérée alors comme le seul
facteur de la progression des niveaux de vie.

La liaison dynamique entre croissance démographique et accumulation de capital est


décrite par les analyses pionnières de Coale et Hoover (1958). Ils identifient, sur une
double base théorique et empirique, une série d’effets démographiques négatifs sur
les conditions de l’accumulation. L’effet de diversion détourne l’investissement
d’emplois directement productifs vers des emplois non directement productifs; l’effet
de dilution du capital résulte arithmétiquement de la dynamique d’un rapport
macroéconomique dont le dénominateur est la taille croissante de la population; et
l’effet de dépendance relie négativement la capacité d’épargne d’un ménage ou de
l’économie avec la part des inactifs par rapport à la population active.

Dans l’agriculture, la relation positive qui existe entre la densité et la productivité


(choix des techniques, économies d’échelle, infrastructures) semble se transformer en
relation négative (rendements décroissants) pour des densités trop importantes
(supérieures à 100 habitants au km²). Dans l’éducation, le ralentissement de la
croissance démographique est associé avec des dépenses par élève supérieures, de
même que pour les dépenses par tête de santé ou de nutrition au sein du ménage.

26
Dans le court terme, une moindre croissance démographique diminuerait l’inégalité
de la répartition des revenus, dans le cas toutefois où les politiques de population
seraient orientées vers les groupes à revenu le plus faible. Dans le long terme,
l’avantage potentiel résulterait de l’accroissement du prix du facteur travail
relativement aux autres facteurs de production. Bien que la plupart des problèmes liés
au développement urbain (pression sur les services et ralentissement du
développement du secteur moderne) aient été amplifiés par la forte croissance
démographique, le ralentissement de cette croissance ne les réglera
vraisemblablement pas.

«La revue de la recherche postérieure à 1986, bien que ne suggérant pas de distances
radicales par rapport aux résultats du rapport de la NAS 6 de (1986), conduit à une
conclusion quelque peu appuyée concernant les effets négatifs de la croissance
démographique sur les potentialités de développement des pays en développement»
(ONU, 1993)

Cassen et al. (1994) identifient, dans un certain nombre de travaux récents, une
perception nouvelle des conséquences de la croissance démographique, moins
neutraliste et insistant sur un certain nombre de mécanismes négatifs :

Dans un premier temps, la forte croissance démographique a ainsi, à moyen terme, et


sous des conditions de forte fécondité, des effets négatifs évidents aux niveaux des
individus et des ménages, particulièrement sur la santé et les opportunités
économiques des femmes et des jeunes.

Dans un deuxième temps, la forte croissance démographique constitue également une


contrainte importante pour la provision de services publics adéquats en éducation et
santé, et diminue l’assurance d’opportunités d’emplois pour une force de travail
croissante. De façon à alléger ces pressions qui exacerberont les problèmes dans le
long terme, il est nécessaire d’agir rapidement sur les problèmes de population
(Cassen et Bates, 1994).

Le consensus qui semble caractériser les années quatre-vingt-dix, tel qu’il émane des
débats et des travaux de la Conférence Mondiale sur la Population et le
Développement du Caire de 1994, s’organise donc autour de plusieurs traits
caractéristiques. Ces traits sont fédérés par l’idée dominante selon laquelle la
croissance démographique est un obstacle majeur à un développement soutenu
(Amalric et Banuri, 1994).

6
National Academy of Sciences
27
B.2. Apport de la théorie de la modernisation
Une branche de la théorie de la modernisation affirme que la croissance
démographique est un problème à tous les niveaux d’agrégation. Au niveau local, le
problème est défini, comme il l’est par les analyses qui alimentent le nouveau
consensus des années quatre-vingt-dix, en termes de santé des femmes et des enfants,
de capacités parentales à pourvoir aux besoins de base de leur progéniture. Pour
l’ouvrage collectif édité par Cassen (1994), elle est un problème en termes
d’externalités.

Au niveau national, le problème se pose plus en termes de liaison macroéconomique


entre accroissement démographique et développement économique. Les focalisations
particulières sont faites en ce qui concerne les conséquences sur la formation de
capital, l’emploi et la capacité des Etats à pourvoir en services publics (éducation,
santé et infrastructures) une population croissante.

Section II : Lien empirique entre la croissance urbaine et


l’aménagement du territoire.
Plusieurs travaux mettent en exergue le lien entre la croissance urbaine et
l’aménagement du territoire. Dans cette section, nous analyserons ceux relatifs à la
croissance du PIB (A) et ceux relatifs à la croissance démographique (B).

A. Croissance du PIB et aménagement du territoire.


L’étude du lien entre la croissance urbaine et l’aménagement du territoire peut
se faire à travers l’analyse d’un modèle. Elle peut aussi se faire à travers l’ouverture
internationale d’un pays, laquelle impacte son économie.

A.1. Modèle de Catin, Hanchane et Kamal


Catin, Hanchane et Kamal(2008) ont proposé un modèle pour analyser, par
période quinquennale de 1950 à 2000, les principaux déterminants du taux
d’urbanisation et du degré de primatie urbaine dans 56 pays en développement. Ce
modèle arrive aux résultats qui révèlent que la croissance de la part de l’emploi non
agricole et la croissance du PIB par habitant encouragent le processus d’urbanisation.
La part de l’emploi non agricole dans la population active a un effet positif et
significatif sur l’urbanisation. L’exode agricole semble constituer un important
déterminant de l’urbanisation, indépendamment même de la croissance du PIB par
habitant. Lorsque la part relative de l’emploi dans les secteurs secondaire et tertiaire
s’accroît, le taux d’urbanisation s’en trouve renforcé.

28
Ainsi, la croissance du PIB par tête a aussi un impact positif et significatif sur
l’urbanisation et peut exercer en conséquence un effet de « boule de neige ».
L’accumulation capitalistique dans les zone urbaines contribue au développement
d’un marché final et intermédiaire, donc au développement d’activités induites et
complémentaires (effets de revenu et de demande). Cette accumulation peut générer
des économies d’échelle internes et des économies externes d’agglomération (effets
de productivité) (Catin, 1995).

Pour les pays en développement, la relation entre urbanisation et développement


économique s’avère non monotone : l’urbanisation augmente de manière sensible au
cours des phases initiales du développement, pour ensuite progresser moins vite.

A.2. ouverture internationale et aménagement du territoire


Il est montré dans de nombreux pays en développement en particulier en Chine
que l’insertion progressive de l’économie d’un pays en développement dans le
commerce international est une des recommandations fortes de nombreux auteurs.
Elle contribue en principe à la croissance selon la vision traditionnelle des avantages
comparés ; mais elle a également pour conséquence immédiate une polarisation des
activités économiques sur le territoire et une forte augmentation des inégalités
régionales (Kanbur et Venables, 2007). Toutefois, on peut s’attendre à terme à une
plus grande dispersion géographique des activités, idée confirmée par Ades et
Glaeser (1999).

De même, L’intégration économique entre pays voisins contribue à une meilleure


spécialisation économique et à des niveaux de croissance plus élevés. On constate
toutefois que les accords commerciaux bilatéraux ou régionaux sont susceptibles
d’avoir des effets positifs sur les relations politiques des pays concernés. Le
commerce entre deux pays augmente le coût d’opportunité d’un conflit, alors que si
ces deux pays sont très ouverts au commerce avec de nombreux pays tiers, leur
dépendance commune est réduite et le coût d’opportunité d’un conflit entre eux est
plus faible (Martin et al., 2008).

Mais, l’effet de l’intégration régionale sur le commerce international est ambigu. Si


elle est susceptible de renforcer le développement des pays appartenant à l’aire
régionale, cela peut se faire au détriment de ceux qui restent à l’écart de l’accord
(Coulibaly, 2006 ; Madiès, 2007). La mise en œuvre des accords régionaux peut avoir
pour effet, du moins dans un premier temps, de favoriser une croissance plus rapide
des territoires les mieux dotés en infrastructures et en capital humain. Ces accords
commerciaux régionaux ne peuvent profiter aux pays enclavés et faibles que si leurs
voisins adoptent des politiques dynamiques et « amicales » (Collier, 2007b).
29
Les forces du marché, l’ouverture internationale et des institutions économiques
efficaces sont à l’évidence des constituants majeurs du développement économique.
Toutefois, le libre jeu des forces de marché ne suffit pas à valoriser au mieux les
capacités des territoires et leur croissance économique. Par exemple, une étude
récente de la Banque Mondiale vient de montrer, sur un échantillon de 11 500
entreprises dans 27 pays émergents de l’ex-bloc soviétique, que l’ouverture à la
concurrence, contrairement aux idées reçues, peut avoir un effet négatif sur la
capacité d’innovation des entreprises (Gorodnichenko et al., 2009). Dans le même
esprit, les forces d’agglomération ne peuvent être laissées complètement à elles-
mêmes. Leur développement peut être utilement stimulé par des instruments
appropriés et bien choisis (Scott, 2002).

B. Infrastructures, services publics et croissance démographique


Il est intéressant d’étudier l’impact des infrastructures et services publics sur la
croissance urbaine, mais aussi d’étudier l’impact de la croissance démographique
urbaine sur l’aménagement du territoire.

B.1. Infrastructures, services publics et efficacité économique


Un certain nombre de travaux empiriques cherchent à mesurer les effets des
services publics dans le système économique. Ashauer (1989) affirme que la faiblesse
de l’offre de services publics, dans les années 1970 aux Etats-Unis, est cruciale dans
l’explication du déclin du taux de croissance de la productivité. Sa méthodologie a
été remise en cause, mais d’autres travaux concernant différentes nations confirment
l’impact plus ou moins direct des dépenses publiques sur la productivité. Femald
(1990), Rubin (1991), Ford et Prorret (1991) contestent l’absence de contrôle du biais
de simultanéité, c’est-à-dire du double sens de la relation dépenses-publiques-
revenus, par Ashauer, mais aboutissent au même résultat.

Munell (1992) trouve que le capital public a un effet significatif et positif sur la
croissance de l’emploi. Artus (1991) montre que le niveau des dépenses publiques a
un effet sur la Recherche-Développement et sur le taux de croissance du PIB, en
France.

Declercq (1996) conclut, après une étude par branches sectorielles portant sur la
période 1952-1989, que « le capital public a un impact sur l’évolution du coût
variable des entreprises des branches marchandes non financières de l’économie
française». Les dépenses publiques sont donc des instruments de politique
économique importants. Pour un pays en développement, un niveau

30
d’investissements trop faible peut accentuer les écarts initiaux de revenu entre
l’économie et le reste du monde et créer des effets d’hystérésis7.

Une économie ayant de faibles capacités productives initiales et ne bénéficiant pas


d’externalités positives ne peut combler son retard. Elle risque de tomber dans une
«trappe de sous-développement » (D’Autume-Michel, 1993), de se positionner sur
une trajectoire de croissance irrémédiablement faible. Dans ces conditions, la
convergence des taux de croissance des nations n’est plus assurée comme elle l’était
dans les modèles néoclassiques traditionnels de croissance (Solow, 1956) et
d’économie internationale.

Les services publics peuvent constituer des avantages comparatifs à part entière et
permettre à la région d’attirer de nouvelles activités. Les services et infrastructures
publics jouent sur la croissance régionale de deux façons : ils produisent des
externalités technologiques et pécuniaires et engendrent une croissance nette et ils
créent des avantages comparatifs qui vont attirer les agents dans la région et amplifier
les économies d’échelle. Ainsi, les infrastructures et services publics peuvent être un
catalyseur de développement. Ils permettent, dans un premier temps, aux entreprises
localisées sur place d'obtenir des gains de productivité, puis ces bénéfices vont attirer
d'autres firmes dans la région et générer une activité économique importante, donnant
lieu à de fortes possibilités de division des tâches, de circulation de la connaissance et
de technologies. Cette interdépendance conduit à un processus de développement
auto-entretenu et cumulatif. Murphy et al., (1989) préconisent une injection exogène
de capital public pour lancer ce processus cumulatif.

D’autres travaux empiriques ont traité de ces questions. Duffy-Deno et Eberts (1991)
montrent que les investissements et le stock d’infrastructures publiques ont un effet
positif significatif sur le revenu individuel par tête dans 28 unités urbaines de 1980 à
1984. De même, Ralle (1991) montre sur la période 1970-1989 que le capital public
accroît la productivité du secteur privé dans les régions françaises. Des auteurs tels
Eberts et Fogarty (1987) ou Munell (1990) testent la relation entre capital ou
investissements publics et investissements privés et constatent une influence positive
du capital public sur les investissements privés.

Richardson (1973) et Lever, Legler et Shapiro (1970) mettent en avant


l'interdépendance entre la distribution partiale du capital public et les investissements
privés. Les infrastructures de transport et communication vont diminuer les coûts de
transport des biens, des capitaux, des hommes et de l’information entre les régions.
Ces infrastructures vont permettre aux entreprises de développer leurs aires de
7
Retard dans le développement d'un phénomène physique par rapport à un autre.
31
marché, de réduire les monopoles spatiaux et donc de renforcer les effets de la
concurrence. Elles sont donc à l’origine d'externalités spatiales qui vont profiter à
l’ensemble de la communauté (Quinet, 1992). Cependant, elles ont un effet ambigu
sur la croissance d’une région. La répartition des gains peut être défavorable aux
régions les plus faibles.

Les modèles de localisation (Martin et Rogers, 1995) et les études empiriques


(Johansson, 1993; Rietvield, 1989; William et Mullen, 1992) s’intéressent plus
spécifiquement aux infrastructures et en particulier aux infrastructures de transport et
communication. L’importance des coûts de transport dans l’analyse géographique des
activités économiques les place au premier plan des discussions sur les conséquences
des dépenses publiques sur le développement régional. Elles ont également des
conséquences spatiales spécifiques. "Les transports comportent une dimension de
plus que la plupart des autres activités : ils sont localisés dans l'espace, leur impact est
déjà géographique, avant d'être macro-économique" (Quinet, 1992).

Hansen (1965) a construit une typologie des régions allant dans ce sens. Pour lui, il
existe trois types de régions :

- les régions "congestionnées" dans lesquelles il y a une forte concentration de


population, d'activités industrielles et commerciales et un stock important
d'infrastructures. Dans ces régions, l'effet marginal positif d'investissements publics
supplémentaires sera absorbé par l'effet négatif de pollution et la congestion
supplémentaire.

- Les régions intermédiaires, où il y a abondance de main-d’œuvre formée et de


matières premières. Les investissements publics peuvent avoir dans ce cas un effet
marginal supérieur aux coûts.

- Les régions pauvres, où le niveau de vie est faible : ce sont généralement des
régions agricoles peu développées ou possédant une industrie déclinante. Ces régions
sont peu attractives pour les entreprises et les investissements publics ont peu d'effets
sur leur dynamisme.

Les tests effectués par Williams et Mullen (1992) sur 48 États américains, pour les
années 1970, 1980 et 1986, nuancent l’hypothèse d’Hansen : les investissements
publics en infrastructures routières ont un effet stimulant sur l’ensemble des régions,
même les plus « en retard ».

Le jeu des répartitions d’activités entre les régions dépend des caractéristiques
initiales de chacune, en particulier de leur position, les unes par rapport aux autres. La

32
croissance de la région peut être reliée positivement avec le stock d’infrastructures de
transport et communication qu’elle possède si les gains nets qu’elle tire de ces
infrastructures sont supérieurs à ceux que les autres régions en tirent. La plupart des
modèles s’intéressent à ces gains en termes de baisse de coûts de transport des biens
(Martin et Rogers, 1995) et de leurs conséquences sur la répartition des entreprises.
Or, si le déploiement des infrastructures de transport et communication a des effets
directs sur le coût de transport des biens, il en a aussi sur la circulation des personnes
et de l’information. Il est donc simplificateur de restreindre l’impact des
infrastructures de la région à une baisse des coûts de transport.

Ces infrastructures facilitent également les échanges de main-d’œuvre, de


connaissance, de technologie entre différentes régions. Elles amplifient les
externalités que peuvent se procurer les agents à se localiser près d’une région où les
économies d’échelle sont fortes (Kubo, 1995).

L’intervention publique dans la sphère économique peut alors être positive.


Cependant, l’étude du rôle des dépenses publiques dans les mécanismes de croissance
doit tenir compte de deux caractéristiques capitales, au niveau régional.

En premier lieu, la région est ouverte sur le reste du monde. Les facteurs de
production peuvent quitter la région ou affluer des autres régions. Les barrières
culturelles et institutionnelles étant plus limitées, la région peut entrer dans un
processus cumulatif de croissance qui peut être impulsé par les dotations initiales ou
par des facteurs exogènes tels les externalités générées par la proximité de régions
riches (Kubo, 1995) ou celles générées par des investissements publics importants
(Murphy et al., 1989).

Ensuite, les dépenses publiques en infrastructures de transport et communication


transforment l’espace et vont être essentielles pour comprendre les schémas de
croissance régionaux. Elles baissent les coûts de transport, elles favorisent
l’externalité de spillover et, au sein de la région, développent les complémentarités
entre espaces urbains et espaces ruraux (Charlot, 1996).

Dans une étude s'intéressant aux effets des travaux publics sur la croissance du
revenu réel dans 195 petites municipalités du Missouri, les auteurs ont estimé que les
investissements de travaux publics contribuaient à 30 % de l'augmentation du revenu
réel entre 1963 et 1966. La construction d'autoroutes, de ports maritimes,
d'établissements d'enseignement professionnel et de structures récréatives
participeraient le plus à la croissance du revenu (Charlot, 1996).

33
Au total, c’est d’abord le montant des ressources publiques consacrées aux
infrastructures de transport et la qualité de la gestion des modes de transport qui
contribuent à l’efficacité économique de la ville (Perrot, 2004). Dans l’ensemble, les
infrastructures de transport comme les autres services publics sont une condition
majeure du développement et du bien-être des populations (Prager et Thisse, 2009).

B.2. Croissance démographique et aménagement du territoire


La croissance démographique de la Colombie a entraîné une multiplication par
quatre de la population en un demi-siècle (FIórez, 2000 : Dureau et Flórez, 1996).
Même si la population rurale a presque doublé sur cette période, l'essentiel de cet
accroissement a profité aux villes qui ont connu un formidable essor. Cette croissance
urbaine très rapide a été alimentée à la fois par un afflux migratoire massif et par un
accroissement naturel très élevé dû aux caractéristiques de la transition
démographique en Colombie, en particulier la jeunesse et la natalité élevée des
populations citadines. La répartition du peuplement sur le territoire national ainsi que
la configuration générale du réseau urbain s'en sont trouvées modifiées de façon
irréversible.

L’impact positif de l’emploi non agricole, en pourcentage de la population active, sur


la primatie urbaine indique que l’exode rural s’oriente d’abord vers la grande ville.
L’exode rural renforce aussi bien le taux d’urbanisation que le degré de primatie. La
faiblesse des infrastructures, d’autant plus pour les pays à bas revenus, renforce la
polarisation de la population dans la ville principale. D’ailleurs, l’impact négatif de la
variable population montre que la croissance démographique s’accompagne en
général d’un mouvement d’urbanisation profond qui profite plus aux autres villes
qu’à la ville principale (Catin et al., 2008).

Dans un contexte de forte natalité, c’est au contraire l’absence d’exode rural qui peut
expliquer l’urbanisation. Les habitants se déplacent peu et viennent constituer de
petites concentrations urbaines, sans forcément émigrer dans la capitale ou les
grandes villes. L’urbanisation prend alors la forme d’une prolifération de petites et
moyennes agglomérations comme c’est le cas au Nigeria. L’accroissement très rapide
de la population engendre une pression importante sur les terres en milieu rural
comme urbain. La croissance horizontale des grandes métropoles et l’émergence des
villes secondaires entraînent une compétition importante sur le foncier situé à la
périphérie des villes (Mansion et Broutin, 2012).

D’après le CERED, la population du Maroc augmente de 450 mille personnes par an.
Cette croissance importante de la population par rapport aux ressources disponibles
constitue une entrave au progrès et un obstacle à l’amélioration du niveau de vie.
34
Ceci parce que l’économie n’est pas suffisamment développée pour faire face au
problème d’alimentation, de logement, de santé, d’éducation, et d’emploi de la
population.

Dans le même ordre d’idée, une étude réalisée sur l’agglomération rennaise a montré
que les coûts d’aménagement diminuent avec l’augmentation de la densité. D’autres
études ont démontré le surcoût de l’étalement urbain sur les réseaux d’infrastructures
(électricité, eau potable, eaux usées, voirie). Au niveau des ménages, l’étalement
urbain a d’abord un coût dans les déplacements (frais d’automobile notamment, prix
du carburant en augmentation). De plus, les prêts immobiliers constituent une part
importante de leur endettement.

L’étalement urbain et le développement des réseaux de transports génèrent une


dégradation et une fragmentation des habitats, engendrant isolement des populations,
perte de diversité génétique et homogénéisation des espèces.

De même, les faits décrits par les données des enquêtes ECAM, montrent au
Cameroun, l’impact négatif qu’une croissance démographique forte peut avoir sur les
conditions de vie des populations, en affectant le taux de croissance du PIB par tête.
Une croissance démographique relativement élevée peut également avoir un impact
négatif sur les conditions de vie des ménages à travers la pression qu’elle peut
exercer sur les infrastructures de base existantes liée à l’augmentation de leur
demande. (UNFPA, 2013)

Somme toute, il était question dans ce chapitre d’analyser l’influence de la


croissance urbaine sur l’aménagement du territoire à travers une analyse théorique et
empirique relative à la recherche documentaire. Nous avons vu que la croissance
démographique urbaine impacte négativement les ressources disponibles, limite les
efforts des politiques d’aménagement du territoire. Nous avons aussi vu qu’il existe
un lien empirique entre la croissance économique et l’aménagement du territoire.

Deux constats émergent ainsi de cette analyse : la croissance démographique urbaine


influence négativement l’aménagement du territoire ; il existe une corrélation positive
entre l’aménagement du territoire et la croissance urbaine.

35
CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE
Au terme de cette partie, il était question d’analyser les liens entre
l’aménagement du territoire et la croissance urbaine. Nous avons vu que la mise en
œuvre des politiques publiques en matière d’aménagement du territoire était un
préalable pour assurer la croissance économique d’un territoire ; nous avons aussi vu
que la croissance démographique incontrôlée pouvait être un handicap pour les
politiques d’aménagement du territoire.

Il ressort de cette analyse qu’il existe effectivement un lien étroit entre


l’aménagement du territoire et la croissance urbaine, ce lien peut être une corrélation
positive s’il s’agit de la croissance économique ou une corrélation négative s’il s’agit
de la croissance démographique urbaine.

Ainsi, la mise en œuvre des infrastructures et des équipements, la densification


urbaine sont des facteurs qui favorisent la croissance économique ainsi que
l’efficacité économique. Ces efforts des pouvoirs publics pour satisfaire les demandes
croissantes des agents économiques permettent à ces derniers de contrôler et
d’orienter la croissance urbaine.

La croissance démographique se traduit par l’anarchie dans l’occupation des sols, la


naissance des quartiers précaires. Elle se traduit aussi par les besoins croissants en
logements sociaux. Elle pousse les pouvoirs publics à mettre en œuvre les
instruments de planification urbaine et d’aménagement du territoire mais aussi, de
nouvelles mesures pour orienter et encadrer les activités humaines.

Au final, la croissance urbaine cause sans aucun doute la mise en œuvre des
politiques publiques d’aménagement du territoire et par conséquent, cause
l’aménagement du territoire.

Ceci étant, cette double corrélation est-elle perceptible dans le contexte


camerounais ? Existe-il un lien entre les décisions de mise en œuvre des politiques
publiques en matière d’aménagement du territoire et la croissance urbaine
empiriquement vérifiable?

Seule une étude empirique du contexte camerounais permettra de répondre à ces


questions.

36
DEUXIEME PARTIE : VERIFICATION EMPIRIQUE DU LIEN DE
CAUSALITE ENTRE L’AMENAGEMENT DU TERRITOIRE ET
LA CROISSANCE URBAINE AU CAMEROUN

INTRODUCTION
L’objectif de cette partie est de faire une vérification empirique des liens de
corrélation ou de causalité entre l’aménagement du territoire et la croissance urbaine
dans le cadre du Cameroun. La méthodologie déployée est la recherche documentaire
et l’analyse économétrique.

La partie s’organise autour de deux chapitres :

- Le premier met en exergue les caractéristiques de la croissance urbaine dans


les établissements urbains du Cameroun ;

- Le deuxième fait une analyse économétrique sur les potentiels liens entre
l’aménagement du territoire et la croissance urbaine dans le contexte
camerounais.

37
CHAPITRE III : LES PRATIQUES DE L’AMENAGEMENT DU
TERRITOIRE ET LA CROISSANCE URBAINE AU CAMEROUN.
L’objectif de ce chapitre est double : présenter les politiques et pratiques
d’aménagement du territoire au Cameroun, d’une part, d’autre part, les éléments
caractéristiques de la croissance urbaine dans ce pays. Le chapitre s’organise alors
autour de deux sections

- La première présente les caractéristiques de la croissance urbaine dans les


villes camerounaises ;

- La seconde présente les approches pratiques des dirigeants camerounais en


matière d’aménagement du territoire.

Section I : Les caractéristiques de la croissance urbaine dans les villes


camerounaises
Cette section présente les caractéristiques de la croissance urbaine relatives à
l’habitat urbain (A) et celles relatives aux transports urbains (B).

A. Croissance urbaine et habitat urbain.


La manifestation de la croissance urbaine au Cameroun peut s’apprécier à
travers l’analyse de la situation actuelle des villes de ce pays.

A.1. Visage actuel des villes camerounaises


La pression démographique 8pose la problématique de l’habitat comme enjeu
majeur pour le développement du pays. Ces taux de croissance élevés drainent avec
eux une foultitude de problèmes qui se posent en termes de qualité et de quantité
d’habitats sociaux.

Les graphiques qui suivent illustrent l’évolution de la population totale et urbaine du


Cameroun pendant les trois décennies passées, tout comme l’évolution du BIP.

8
Le Cameroun est marqué par un taux de croissance démographique de 2.5% et un taux d’urbanisation au-
dessus de 52%,
38
Graphique 1A : Évolution du BIP de la POPTOTAL et de la POPURB entre
1986 et 2015.

Source : INS et traitement de l’auteur

Graphique 1B : Évolution du BIP, de la POPTOTAL et de la POPURB entre


1986 et 2015.

Source : INS et traitement de l’auteur.

Ces deux graphiques montrent une tendance croissante des trois variables. La
population totale et la population urbaine présentent une forte croissance, ce qui
confirme le fait que la population camerounaise a beaucoup évolué ces dernières
décennies tout comme la population urbaine dont la croissance a été fortement
39
influencée par l’exode rurale. On note également que le BIP croit mais à un rythme
beaucoup plus lent. Cependant, la tendance croissante de la population et du BIP
cache une réalité que le graphique ne permet pas de voir, celle du lien de corrélation
négative entre la croissance démographique et la croissance du BIP. Cela explique la
carence des logements sociaux au Cameroun, vu les ressources limités dont dispose
l’État à travers la SIC et le CFC pour financer ce secteur.

En effet, les villes camerounaises sont confrontées aux problèmes de :

 L’insuffisance des revenus des ménages ;

 Le déficit qualitatif et quantitatif des cadres d’habitation ;

 La faiblesse des fonds mobilisés en faveur de l’habitat ;

 La présence importante de l’informel dans le secteur de l’habitat ;

 Le vieillissement des tissus bâtis ;

 Le désordre urbain ;

 L’insuffisance, la méconnaissance et la non implémentation des documents de


planification urbaine existants ;

 La méconnaissance des procédures liées à l’acte de construire et le non respect


des règles de construction.

Il en découle une anarchie très marquée dans l’occupation de l’espace urbaine, la


prolifération des quartiers précaires, la dégradation des conditions de vie et de
sécurité des personnes dans les habitations et les bâtiments en milieu urbain.

A cause de la crise urbaine des années 80, il y a eu fragilisation de l'équilibre ville-


campagne.  Les migrations en direction des villes se sont intensifiées car ce sont elles
qui créent les richesses. L'accumulation des difficultés a abouti à l'intensification
de l'exclusion des pauvres dans les villes, mais aussi au façonnement de villes
duales. Il s’agit de la juxtaposition de plusieurs espaces qui correspondent à différents
niveaux d'intégration et de pratiques de la ville. 
On note ainsi la coexistence d'une ville légale, celle qui correspond aux normes
établies et qui regroupe les centres administratifs, les quartiers résidentiels et les
quartiers populaires centraux. À côté de cette ville légale, on trouve une ville
illégale, résultat des développements périphériques irréguliers, illégaux, sous-équipés.
C’est celle où les habitants parleront d'aller en ville, lorsqu'ils doivent quitter leur
quartier.
40
A.2. Villes camerounaises et quartiers précaires

Les quartiers précaires sont la manifestation la plus flagrante du manque de


planification et de contrôle de la croissance des villes. Ces quartiers s'étendent en
raison de l'urbanisation croissante, de la pénurie du logement abordable dans les
villes, mais également à cause de multiples autres raisons telles que la pauvreté, les
déplacements liés à des conflits, à des catastrophes naturelles.

Le phénomène de quartier précaire est devenu une particularité des pays


d'Asie, d'Afrique, et d'Amérique Latine. Ces trois sous-ensembles concentrent la
quasi-totalité du milliard d'habitants des quartiers précaires dans le monde. Les pays
développés concentrent environ 10 millions d'habitants dans les quartiers
précaires, contre 550 dans les pays d'Asie et du Pacifique, 250 dans les pays
d'Afrique, ou encore 150 millions en Amérique Latine et dans les Caraïbes. Cette
situation est le résultat de la combinaison de plusieurs facteurs qui tiennent à la fois
aux situations démographiques, à la place des villes, et aux différentes formes de
gouvernance qu'on rencontre dans les différents pays (Diagane, 2019).

Cette situation amène à distinguer :

-Le bidonville stricto-sensu : Ce type de quartier précaire concentre toutes les formes
d'exclusions, c'est-à-dire une exclusion sociale, une exclusion urbaine et une
exclusion foncière. Les populations qui y vivent subissent les contraintes d'une
double précarité; celle physique des abris de fortune mais aussi celle juridique des
statuts d'occupation. Ce qui caractérise ce type de quartiers tient à plusieurs facteurs.
Le premier d'entre eux est l'installation sur les zones à risque, c'est-à-dire que ces
quartiers s'installent souvent sur les plus mauvais terrains des villes.
La seconde caractéristique tient à la nature des matériaux utilisés pour les
constructions. Il s'agit souvent de matériaux de récupération, qu'il s'agisse de tôle, de
toile ou de bois, qui sont utilisés pour la confection des habitations précaires. La
troisième caractéristique est l'absence d'équipement et d'infrastructure de base.

-La sous-intégration à la ville. D'abord l'éloignement par rapport à la ville, mais


également la déconnexion par rapport aux structures formelles de la ville, se traduit
par de mauvaises liaisons en termes de transport, mais également en termes de
service. Enfin, parce que ces quartiers occupent souvent illégalement le terrain, ils
restent sous la menace d'éviction et cela empêche les populations dans la
consolidation de leur habitation.

41
-Les quartiers irréguliers déjà consolidés ou en voie de l'être : Il s'agit souvent de
quartiers anciens, qui finissent par être tolérés parce qu'ils connaissent une
consolidation de leur bâtit en dur et font l'objet d'une amélioration d'un niveau
d'équipement. Les autorités finissent en effet, même si c'est timidement, à y consentir
quelques investissements ne serait-ce que pour assurer la sécurité des biens et des
personnes. Parce qu'ils sont anciens, ces quartiers atteignent également un niveau de
mixité sociale par l'arrivée progressive de populations diversifiées.

-Les quartiers centraux laissés à l'abandon et qui se transforment en taudis : Ce sont


des quartiers formels qui subissent un processus avancé de dégradation au point de
constituer des ghettos qui cumulent plusieurs handicaps et ne retiennent que des
populations captives, celles qui n'ont pas une grande liberté en matière de choix de
leur lieu de résidence. De façon générale, il s'agit de quartiers qui ont mal vieillis au
point d'accuser également un retard important dans l'adaptation des équipements et
infrastructures tels que la voirie, les approvisionnements en eau potable et en
électricité, mais aussi des services. La dégradation de ces quartiers peut aussi être une
conséquence d'un processus de gentrification9 en cours qui affecte des portions
entières des villes et souvent des centres villes.

B. Croissance urbaine et transports urbains


La croissance urbaine peut s’apprécier aussi à travers la mobilité des agents au
sein des villes et les moyens de transport utilisés par ces derniers.

B.1. Villes camerounaises et embouteillages


Il devient de plus en plus difficile de se rendre à son lieu de travail dans les
grandes villes tentaculaires du Cameroun. Cette situation est due en grande partie à
l’invasion des minibus et motocyclettes qui sont parvenus à prendre la place d’un
transport public par autobus défaillant. Les raisons de ce dysfonctionnement du
transport urbain ne sont pas difficiles à comprendre. Les régies affaiblies,
fragmentées et sous-financées ont été incapables tant de maintenir les services
existants que de faire des plans de développement. Les autobus tombent en ruine
après des années de surcharge sur des routes défoncées et d’entretiens mécaniques
rapidement interrompus par le manque de pièces de rechange. Les tarifs sont trop bas
et les subventions trop irrégulières pour assurer des exploitations soutenables. Les
habitants des banlieues marchent ou ont recours à des services informels, largement
non réglementés, sales, dangereux, inconfortables et peu fiables (mototaxis, cargos,
etc.).
9
La gentrification est la transformation des espaces due à une intensification des investissements, de
l’accroissement de la valeur immobilière des constructions et de l’attrait d’activités à fortes valeurs ajoutées
42
Dans la plupart des villes (Yaoundé, Douala), les régies ont eu des difficultés à
satisfaire les demandes de service des nouveaux habitants urbains, les pauvres en
particulier. L’absence de politiques d’utilisation des terres et de développement
économique ont débouché sur l’extension tentaculaire des villes. La baisse de la
densité associée à une extension anarchique a fait augmenter les distances et poussé à
la hausse le prix du transport public. Ces développements affectent souvent les
pauvres de manière disproportionnée, les excluant de l’emploi et des services
sociaux. Pendant ce temps, l’utilisation accrue des véhicules privés a entraîné
l’engorgement des routes, menaçant la sécurité des piétons et la santé des citadins qui
inhalent les gaz d’échappement.

Les villes camerounaises partagent certaines caractéristiques communes :

- une population urbaine en croissance, mal servie par le système des transports ;

- un déclin des normes du transport public ;

- des chevauchements et des conflits entre les agences chargées de la


planification et de la mise en œuvre des solutions en matière de transport ;

- une forte croissance de l’utilisation du transport par minibus et par


motocycles ;

- une dépendance croissante vis-à-vis du transport privé (voitures et


motocyclettes) ;

- une absence et dégradation des infrastructures de transport ;

- des mauvais aménagements pour le transport non motorisé (marche et


bicyclette).

L’engorgement des routes est un problème dans toutes les villes. Les causes en sont
la mauvaise gestion du flux de la circulation, l’absence d’aires de stationnement et la
médiocre application des règles. Le développement anarchique des villes les a
rendues incapables de faire face à l’augmentation du nombre des véhicules. Moins de
la moitié des routes sont revêtues, ce qui réduit l’accessibilité des autobus aux
faubourgs éloignés et quartiers périphériques densément peuplés. Les routes revêtues
représentent juste le tiers de la moyenne correspondant aux villes dans le monde en
développement. Dans toutes les villes, le réseau routier est inférieur aux normes. La
capacité est insuffisante, il n’y a ni bandes d’urgence ni voies de service, le
revêtement est dégradé et l’éclairage des rues réduit au minimum.

43
Le mauvais état des routes limite la vitesse des véhicules, réduit considérablement la
productivité du parc d’autobus et alourdit les coûts d’entretien des véhicules. Il
favorise également l’utilisation des minibus, taxis et motocyclettes qui présentent une
plus grande maniabilité que les grands autobus mais ne sont pas aussi efficaces en
tant que moyen de transport public urbain.

La plupart des routes ont été construites lorsque les villes n’avaient qu’un seul centre,
et avant la rapide croissance de formes personnalisées de transport motorisé. Le
réseau routier primaire part en étoile du centre-ville vers les zones environnantes et
manque de liaisons orbitales ou circulaires.

La majorité des routes n’ont qu’une seule bande de circulation dans chaque direction.
Lorsqu’elles sont plus larges, une des voies est souvent occupée par les piétons et les
véhicules en stationnement. Les carrefours sont peu espacés et mal conçus pour
changer de direction.

En plus de ces défauts généraux, peu d’attention a été accordée à d’autres facteurs qui
facilitent les opérations des systèmes de transport public. Les voies réservées aux
autobus sont rares ou carrément inexistantes. Les arrêts d’autobus, les abribus et
autres aménagements destinés aux passagers sont rares et en mauvais état. Les
terminaux d’autobus sont légèrement plus grands que les aires de stationnement
surencombrées, sans aménagements pour les passagers.

La plupart des villes ignorent les besoins des piétons. Une grande partie du réseau
routier manque de trottoirs, les piétons et véhicules motorisés doivent partager le
même espace. Lorsqu’ils existent, les trottoirs sont mal entretenus, comportent des
caniveaux à ciel ouvert, et sont grignotés par les propriétés qu’ils bordent. Il n’y a ni
passages pour piétons ni ponts, sauf dans les centres villes. À cause de la mauvaise
gestion de la circulation, les accidents sont fréquents. Les piétons représentent le gros
des victimes d’accidents mortels.

B.2. Genèse et ampleur du phénomène de « mototaxis »

L’utilisation des motocyclettes pour le transport commercial s’est développée


très rapidement au cours des dernières années, en raison du mauvais état des routes et
de l’incapacité des compagnies d’autobus de satisfaire la demande croissante. À
l’origine, les services offerts par les motocyclettes permettaient de relier les zones
résidentielles aux grands axes routiers où les passagers pouvaient trouver des taxis ou
des autobus. Actuellement, on retrouve les motocyclettes sur les routes principales et
même dans le centre-ville. Les conducteurs des motocyclettes sont souvent jeunes et
inexpérimentés. Les accidents sont fréquents et souvent mortels.
44
Un transport public urbain efficace requiert une attention coordonnée à la
planification urbaine, à la construction et à l’entretien des infrastructures ainsi qu’à
l’organisation des services de transport.

Malheureusement, ces fonctions sont rarement combinées. Même lorsqu’elles sont


toutes les trois assurées par les pouvoirs publics centraux, plusieurs ministères
différents sont généralement impliqués. Dans la plupart des villes camerounaises, de
nombreuses institutions à tous les niveaux du gouvernement (services centraux,
communautés urbaines, communes, entreprises publiques, gendarmerie nationale,
police nationale, armée nationale) sont impliquées dans la planification, la
réglementation, l’octroi des permis et le contrôle du transport urbain.

L’effet net de cette confusion généralisée des rôles se traduit par une mauvaise
responsabilisation, un manque de coordination et la dilution à tous les niveaux de
l’engagement vis-à-vis de la mise en œuvre de stratégies de transport au service des
besoins de la population.

En bref, « on constate une réglementation inefficace et une absence presque totale de
planification intégrée, ce qui explique le désordre urbain permanent » (Kumar et
Barrett, 2008).

Section II : Les approches pratiques des dirigeants en matière


d’aménagement du territoire.
Cette section présente les différentes formes d’organisation spatiale du territoire
(A) et les pratiques des dirigeants pour faire face au désordre urbain (B).

A. Les différentes formes d’organisation spatiale du territoire


L’appréciation des différentes formes d’organisation spatiale du territoire
permet de voir dans quelle logique se situe la vision du Cameroun en matière
d’aménagement du territoire.

A.1. les scénarii d’aménagement du territoire


Le processus d’urbanisation distingue les territoires connectés au monde, en
complémentarité et en compétitivité des territoires et d’espaces marginalisés ou
carrément exclus de ces dynamiques.

Quatre scénarios d’organisation spatiale se distinguent :

 Le scénario de l’archipel éclaté

45
Ce scénario est un scénario tendanciel, puisqu’il appelle pour l’essentiel
l’approfondissement de mécanisme déjà à l’œuvre. La globalisation accentue la
primauté de l’économie sur les autres dimensions de la vie collective.

Au sein de l’économie, l’hégémonie des forces de la concurrence et du paradigme


libéral entraîne un mouvement de dérégulation de grande ampleur. Celui-ci accroît le
volume des échanges internationaux, libérant certaines forces productives et aussi
stimulant la croissance économique selon de nouvelles modalités et dans de nouveaux
champs d’activité.

La traduction spatiale de ce scénario est logiquement l’accentuation de la


polarisation des foyers d’activités par agglomération. Ce qui n’exclut pas totalement
l’apparition de nouveaux pôles, portés par des activités innovantes, mais dont le
nombre ne pourra être que très limité.

La géographie liée à ce scénario correspond donc à une structure avec des pôles
économiques et technologiques (villes, pôles d’activités, entreprises) connectés entre
eux à l’échelle nationale ou régionale sur la base de projets partagés, mais sans effet
de diffusion ni de contagion sur les autres régions.

Le corollaire de cette organisation spatiale est le maintien, voire l’accentuation, des


écarts de développement entre les « territoires qui gagnent » et les autres et ce, aux
diverses échelles.

Les manifestations les plus critiques de cette fracture territoriale résident, d’une part,
dans certaines parties des périphéries des villes et, d’autre part, dans certains espaces
ruraux désertifiés, mais la fragilisation pourrait également gagner de nombreuses
villes petites et moyennes à l’économie largement tributaire des transferts sociaux.

 Le scénario du local différencié

Dans ce scénario, ce ne sont plus des forces économiques qui jouent leur carte en
participant à la constitution de véritables « villes-État », mais des pouvoirs locaux
assis sur des régions ou des communautés, qui tendent à se construire sur des
logiques identitaires et communautaristes.

Ce scénario est celui de la constitution de nouvelles féodalités. Il est également,


comme le précédent, producteur d’inégalités entre les territoires, convenablement
dotés, qui sauront tirer profit de la nouvelle donne, et ceux, moins attractifs, qui ne
parviendront pas à développer les alliances et les partenariats nécessaires à leur
développement.

46
Ce scénario peut notamment naître d’une période de trop long atermoiement de l’État
pour trancher sur la question des articulations et des priorités entre les différentes
entités territoriales, dont la plupart constituent davantage un reflet de l’histoire
qu’une vision de l’avenir.

 Le scénario du centralisme rénové

Dans ce scénario, l’État est au cœur de toutes les initiatives en matière


d’aménagement du territoire. Le partage des responsabilités et le pluralisme des
initiatives dans le domaine du développement territorial pourraient alors venir buter
sur la prétention tutélaire de l’État à incarner à lui seul l’intérêt général.

Le mode d’intervention privilégié des pouvoirs publics demeure de type allocatif. Les
objectifs consistent à mieux intégrer les espaces périphériques ou délaissés, à limiter
le développement anarchique des flux, à parfaire le traitement social des territoires.

Dans ce contexte, le monopole retrouvé de l’État aurait deux conséquences : favoriser


le corporatisme en permettant à des intérêts coalisés de bénéficier d’avantages ;
développer les réflexes d’assistanat à travers le maintien d’une sphère publique
excessive, bloquant ainsi les mécanismes des changements nécessaires, l’initiative et
l’innovation, notamment à travers un ferme encadrement des initiatives locales.

 Le scénario du polycentrisme maillé

Ce scénario est celui d’une approche polycentrique du territoire en grands bassins


de peuplement, approche qui devrait approfondir l’intégration en mettant l’accent sur
les valeurs de cohésion, de solidarité et de responsabilité, y compris vis-à-vis des
générations futures.

Au sein de ces ensembles, des réseaux de villes seraient appelés à se développer


autour de pôles urbains dynamiques, compétitifs aux niveaux sous régional et
mondial et intégrés dans des ensembles territoriaux solidaires.

Des coopérations, se tissant entre agglomérations d’un même grand bassin de


peuplement sous forme de métropole polycentrique avec un partage des compétences
et des infrastructures, permettraient un véritable système de villes maillées entre elles,
complétant le dynamisme national grâce à une combinaison optimale entre qualité du
cadre de vie et performances de la gamme des biens et services disponibles.

De nouveaux modes de régulation territoriale seraient en mesure d’ouvrir le champ à


des stratégies locales différenciées, sans pour autant être déconnectées les unes des
autres. Le rôle prégnant de l’État central et l’importance accordée à la définition de
47
stratégies nationales ne seraient pas remis en cause, mais se construiraient désormais
différemment.

On devrait assister à une redéfinition des missions de la puissance publique centrale,


au profit de la régulation des conflits, de l’organisation des cadres territoriaux et de la
prévention des risques.

Dans cette nouvelle donne, le niveau régional apparaîtrait comme le plus à même de
valoriser les réseaux de croissance et de solidarité, rendant possible une
différenciation des politiques publiques permettant de prendre en compte la diversité
des territoires, la variété de l’armature urbaine, notamment au niveau des villes
moyennes et petites, de leurs profils, de leur spécialisation. (Guigou, 2001)

A.2. la vision du DSCE par rapport au territoire Camerounais


Le Cameroun semble s’inscrire dans la vision d’organisation des villes décrite
par le scénario du polycentrisme maillé, dans la mesure où le DSCE intègre en son
sein la logique sous-entendue par ce scénario 10 tout comme la loi d’orientation pour
l’aménagement et le développement durable du territoire au Cameroun.

Cette vision pousse à réfléchir sur la structure de l’État, laquelle structure doit
favoriser l’action publique et la structuration de l’économie.

Schéma 2 : Le polymorphisme maillé du territoire camerounais

Schéma 2 : Le polymorphisme maillé du territoire camerounais

Taille des villes


Plus de 1 000 000 habitants

Plus de 500 000 habitants

Plus de 100 000
habitants
Plus de 10 000
habitants

10
Selon le MINHDU, la réalisation de la vision 2035 passe par la rationalisation de l’occupation de l’espace
urbain, l’amélioration du cadre et des conditions de vie des populations, la maîtrise de la croissance urbaine à
57.4% en 2020, l’entretien et/ou la mise en place des infrastructures urbaines, la maîtrise de la gestion
foncière en milieu urbain, la mise en réseau des villes , l’aménagement de nouvelles trames foncière.
48
Source : traitement de l’auteur.

Le schéma ci-dessus traduit l’image du territoire camerounais lorsque ce


dernier aura mis en œuvre le polymorphisme maillé. On note une intégration des
différentes villes avec des effets de contagion, de diffusion du développement, de la
technologie d’une ville, d’une partie du territoire vers les autres.

B. Les approches pratiques des dirigeants pour faire face aux


désordres urbains.
Deux principales interventions visent à mettre fin au désordre urbain. Celle des
délégués du gouvernement auprès des communautés urbaines et celles des services
centraux (MINHDU).

B.1. Interventions des délégués du gouvernement dans les grandes villes


Dans leurs approches, les délégués du gouvernement auprès des communautés
urbaines ont essayé plusieurs opérations de planification urbaine parmi lesquelles le
déguerpissement la réhabilitation/restructuration et la résorption intégrale.

- Le déguerpissement.

Jusqu'en 1960, la pauvreté se concentrait dans les espaces très circonscrits des
villes. Les quartiers précaires étaient alors considérés comme la manifestation d'une
transition urbaine, et devaient rapidement disparaître. Et lorsqu'on s'est aperçu qu'il
ne s'agissait pas d'un phénomène passager, des réponses ont été apportées souvent
49
sous la forme de déguerpissement, une façon d'affirmer l'autorité de la puissance
publique.

Les déguerpissements ont en effet montré leurs limites. Ils induisaient des coûts
élevés sur les plans social, économique et sécuritaire, et étaient souvent à l'origine de
troubles sociaux. C'est ce qui explique qu'à la fin des années 60 des courants de
pensée se sont affirmés. John Turner en était la figure emblématique pour soutenir
une approche qui privilégie, plutôt que la démolition, l'amélioration de
l'environnement des pauvres et leur implication directe dans les projets qui les
concernent.

- La réhabilitation/restructuration.

Le consensus a été fait autour de la réhabilitation/restructuration. Du point de vue


des bailleurs de fonds, il s'agit de la nécessité d'une intervention vigoureuse, dans ces
quartiers précaires, lieux de concentration de la pauvreté, dans le but d'enclencher un
cercle vertueux, qui conduira à l'évolution, tant physique que sociale, des
quartiers. Pour les autorités, il s'agit d'intervenir pour éliminer les divers risques
sanitaires, environnementaux, sécuritaires et sociaux auxquels sont exposées les
populations, la nécessité de soigner l'image de la ville en éliminant ce qui pourrait
l'entacher, vu de l'extérieur, lutter contre la pauvreté, l'exclusion, et la recherche d'une
amélioration des conditions difficiles d'existence dans ces quartiers.

- La résorption intégrale des quartiers précaires. 


Comme dans les déguerpissements, le but recherché dans la résorption intégrale
est l'élimination pure et simple du quartier. Dans cette situation, les quartiers
précaires occupent soit des terrains publics, soit des terrains privés. L'intervention
peut avoir une légitimité lorsqu'ils occupent des terrains privés alors que dans le cas
du squat des terrains publics, il est plus difficile de justifier les
déguerpissements. Dans tous les cas de figure, il s'agit d'interventions risquées surtout
lorsqu'aucune solution d'accompagnement n'est proposée comme c'est
malheureusement souvent le cas. La nouvelle donne aujourd’hui est la restructuration
in-situ.
- La restructuration in situ.
  C'est celle qui vise l'amélioration du quartier sur place, en minimisant les
déplacements de populations. Même si les projets sont tous différents, les démarches
conduisant à la restructuration sont identiques. Elles comprennent, dans une première
phase, la préparation et l'état des lieux ; dans une seconde phase, les travaux de
viabilisation ; et dans une troisième phase, les travaux d'ingénierie sociale, sous

50
forme d'accompagnement et de soutien des populations à se réinstaller dans le
nouveau quartier.  

La restructuration in situ des quartiers précaires est une opération complexe, qui


imbrique plusieurs tâches et exige souvent l'intervention coordonnée de plusieurs
structures. Elle a cependant l'avantage de maintenir le quartier et ses populations sur
place, pour un traitement parfois sur de longues années. Cela diffère naturellement les
résultats dans le temps, et rend moins visible l'impact d'une action souvent lourde qui
nécessite une préparation minutieuse et des moyens importants dont on n'a souvent
pas l'entière maîtrise.

Cette approche est celle encouragée par les bailleurs des fonds parmi lesquels la
Banque Mondiale. Pour elle en effet, les interventions n'ont de sens que si elles
permettent de rendre les villes plus compétitives et d'améliorer les conditions de vie
des plus pauvres. Autrement dit, il s'agit de cibler les actions dont la mise en œuvre
permettra d'accroître la compétitivité des villes, de dégager des ressources
durables, qui donneront les moyens d'équiper les quartiers précaires et de les intégrer
dans les structures des villes. Toujours pour la Banque Mondiale, la forte
concentration des populations, dans les grandes villes du Sud, est inéluctable et peut
constituer une chance de développement pour les pays, même si elle se fait, dans un
premier temps, de façon désordonnée et incontrôlée.

Pour la Banque Mondiale, l'urbanisation est inévitable. Elle est essentielle pour le


maintien de la croissance économique, construite sur l'effet d'agglomération. Les
villes sont, en effet, le moteur de la croissance économique. Elles se spécialisent et
interagissent pour soutenir l'économie nationale, et les quartiers précaires ne sont
qu'une conséquence du dysfonctionnement du marché foncier. Cette idée maîtresse
est lancée par la Banque Mondiale, et renforcée par une succession de paradigmes,
dans l'objectif d'assister les pays, pour créer des richesses, qui seront équitablement
partagées.

 La Banque Mondiale considère en effet, que même si la concentration urbaine


peut constituer un atout, la non maîtrise des flux de migration vers les villes
peut constituer un danger, surtout lorsque les demandes sociales ne sont pas
satisfaites.

Depuis l'an 2000, la Banque Mondiale s'est engagée énergiquement dans la


lutte contre la pauvreté. Elle reconnaît ainsi les insuffisances des stratégies fondées
sur les politiques d'ajustement structurel (PAS), credo des années 80-90. Sa nouvelle
stratégie, la réduction de la pauvreté doit tenir compte des conditions économiques
51
spécifiques, et de la situation sociale de chaque pays. C'est cela qui aboutit à la
définition des stratégies nationales de réduction de la pauvreté, élaborée par les
différents groupes sociaux, dans le cadre d'une démocratie participative. Les objectifs
économiques et les objectifs sociaux sont désormais placés sur un même plan.

 Cet engagement nouveau de la Banque Mondiale s'est traduit par la définition


d'objectifs du millénaire pour le développement (OMD), lesquels ont été remplacés
par les objectifs de développement durable (ODD).  Au départ, 8 objectifs, 18 cibles
et 40 indicateurs avaient ainsi été retenus, cela correspondait à un engagement de la
communauté internationale, pour améliorer la situation des habitants des quartiers
précaires, réduisant de moitié la pauvreté à l'horizon 2015.

Depuis le 25 septembre 2015, un nouvel ensemble d'objectifs mondiaux pour


éradiquer la pauvreté, protéger la planète et garantir la prospérité pour tous, a été
adopté dans le cadre d'un nouveau programme de développement durable. Chaque
objectif a des cibles à atteindre d’ici les 15 prochaines années.
B.2. Intervention des pouvoirs centraux
Dans son approche, le MINHDU a effectué en 2013, un diagnostic urbain afin
de faire ressortir les problèmes dont souffre le secteur urbain au Cameroun dans les
composantes que sont les transports urbains, gouvernance urbaine et urbanisme-
habitat-cadre de vie.

Dans la composante transports urbains, il ressort l’arbre à problèmes suivant :

Schéma 3 : Arbres à problèmes/transports urbains.


Augmentation
Augmentation des
des Allongement
Allongement du
du temps
temps Fréquence Prolifératio
Fréquence élevée
élevée Prolifératio
dépenses
dépenses de
de d’attente
d’attente d’un
d’un moyen
moyen des nn des
des accidents,
accidents, des
transport
transport pour
pour les
les de
de transport
transport encombrement mototaxis
encombrement mototaxis
usagers
usagers des
des voies
voies
Faiblesse quantitative et qualitative de l’offre
de transports collectifs et semi collectifs

Politique peu incitative de Faible fluidité du


Insuffisance de la trafic
développement du
couverture des villes
transport urbain de
par un réseau viaire masse
principal Insuffisante application de
la réglementation sur
Chevauchement des Chevauchement Coût élevé
l’occupation de la voie
interventions des des missions et d’acquisition
publique
acteurs publics sur le absence d’un des matériels
terrain et absence cadre de roulants neufs
Absence de voies de
d’un cadre de concertation et absence de
contournement des grands
concertation réglementation
centres urbains
52 relative à
l’importation
des véhicules
d’occasion
Insuffisance de la
politique et de la Mesures fiscales
stratégie de construction et réglementaires
Chevauchement des
et d’entretien des peu incitatives
voiries urbaines missions et absence d’un
pour les
cadre de concertation
entreprises de
transports Conditions
Insuffisance des
d’exploitation Inadéquation des
financements alloués collectifs
difficiles du fait caractéristiques
à l’aménagement des Inadaptation des des géométriques des voiries
voiries infrastructures au encombrements
transport en
commun (absence Insuffisance
Insuffisance de
Formes d’extension de couloirs de d’aménagement des
la signalisation
urbaine peu favorables circulation marchés de vivres frais
routière
au développement des réservés aux bus et
transports collectifs aux taxis
Absence de plans de
(étalement urbain non collectifs)
déplacement
planifié)

Source : Stratégie de Développement du Sous-secteur Urbain au Cameroun,


MINHDU, 2013

Cet arbre à problème montre clairement que « La faiblesse quantitative et


qualitative de l’offre de transports collectifs et semi-collectifs accessibles au plus
grand nombre dans les grandes villes », est le problème central en matière de
transports urbains au Cameroun.
Il apparaît que l’urbanisme n’est pas suffisamment réglementé, et les textes en
vigueur sont mal maîtrisés ou mal appliqués ; la mobilité urbaine est réduite,
notamment du fait de l’insuffisance quantitative et qualitative d’un réseau viaire
adapté au transport collectif et semi-collectif; l’insuffisance des aménagements à
caractère socio-économique entraîne des désordres urbains, et amoindrit l’apport
économique attendu des villes. 
Dans la composante gouvernance urbaine, l’arbre à problèmes se présente comme
suit :
Schéma 4 : Arbre à problèmes / gouvernance urbaine
Faiblesse
Faiblesse des
des appuis
appuis
Difficultés
Difficultés de
de Faible
Faible appui
appui des
des Faiblesse
Faiblesse de
de
structurel
structurel et
et
transfert
transfert de
de CTD
CTD aux
aux planification,
planification,
organisationnel
organisationnel des
des
compétences
compétences populations
populations programmation
programmation et et
services
services déconcentrés
déconcentrés de de
Etat-CTD
Etat-CTD urbaines
urbaines exécution
exécution
l’Etat
l’Etat

Difficulté de la mise en cohérence de tous


les leviers novateurs d’une gestion
optimale de la cité
Faible participation des
populations de communes
Insuffisances 53 aux activités de l’Etat,
organisationnelles, méconnaissance des
financières, humaines ; faible procédures et fonctionnement
productivité des villes des services étatiques
Insuffisances de la
coordination entre services
étatiques, entre Etat et CTD,
et entre les CTD

Nombreuses
insuffisances dans la Faible respect des textes,
gestion des communes, éclatement des compétences,
tant au plan Insuffisances diverses au
absence d’approche concertée
organisationnel que niveau des OSC
financier Forte résistance de la
plupart des administrations
Faible ancrage des notions
Capacités des services de à déconcentrer leurs
d’imputabilité et de
l’Etat limitées, en raison activités
transparence, du fait à la fois des
d’une insuffisance Insuffisance des moyens insuffisances d’un cadre formel,
qualitative et quantitative financiers et humains des mais aussi du non-respect des
des ressources humaines communes dispositions en vigueur tant par
les CTD que par les services de
l’Etat

Source : Stratégie de Développement du Sous-secteur Urbain au CAMEROUN,


MINHDU, 2013.

Cet arbre à problème fait apparaître clairement que le problème central de la


gouvernance urbaine est la difficulté de la mise en cohérence de tous les leviers
novateurs d’une gestion optimale de la cité. Cette situation est due au fait que, les
mécanismes de la gouvernance urbaine sont insuffisants et ne jouent pas leur rôle de
manière satisfaisante, du fait en particulier du faible niveau des capacités techniques
et organisationnelles des acteurs.

Dans la composante urbanisme-habitat-cadre de vie, nous avons :

Schéma 5 : Arbre à Problèmes / Urbanisme-Habitat-Cadre de vie

Caractère peu Urbanisation de Autoproduction de Aggravation de la


ordonné des zones l’habitat par la situation sanitaire
installations humaines de la population qui
inconstructibles et grande majorité des
et absence de réserves affecte directement
impropres à ménages
foncières pour les son développement
l’installation de
équipements collectifs (Plus de 90%.)
l’habitat

Un habitat indécent s’est développé de façon anarchique et


inorganisée dans l’essentiel des zones urbaines au Cameroun

Insuffisance quantitative et qualitative


Insuffisance Fourniture insuffisante des
de l’offre de logements décents et de
d’espaces urbanisés services urbains de base
terrains à bâtir
54
Séparation des Désengagement Difficultés Coût des
responsabilités en d’approvisi Forme
de l’Etat dans extensions de
matière de droit onnement d’urbanisatio
le soutien réseaux très
foncier et en n non
budgétaire à élevé
d’urbanisme matériaux structurée et
l’habitat
de fortement
planifié
Absence ou non construction consommatri Inadaptation
application des Faible ce d’espace des méthodes
Insuffisance de
documents professionn de collecte des
l’offre
d’urbanisme et de la alisation des ordures
quantitative du
réglementation de artisans et ménagères
secteur privé
l’occupation et de PME de la
formel
l’usage des sols construction Enclavement
Absence
des quartiers
Lotissements Absence d’organisation
Absence d’un périphériques
sommairement d’orientation, de l’espace et de
système de où le réseau est
aménagés et faible d’incitation et de réserves
financier essentiellement
professionnalisation contrôle de la part foncières pour
adapté aux en terre
du secteur immobilier. des pouvoirs les équipements
besoins des
publics et les VRD
promoteurs

Source : Stratégie de Développement du Sous-secteur Urbain au Cameroun,


MINHDU, 2013

Cet arbre à problèmes laisse apparaître clairement que, le problème central de


la sous-composante urbanisme est l’insuffisance d’espaces aménagés, celui de la
sous-composante habitat est l’insuffisance de l’offre de logements décents et de
terrains à bâtir et celui de la sous-composante cadre de vie est une fourniture
insuffisante des services urbains de base.
Les leçons que nous pouvons tirer du sous-secteur urbain au Cameroun relatifs aux
composantes transports urbains, gouvernance urbaine et urbanisme-habitat-cadre de
vie sont les suivants :

 L’urbanisme n’est pas suffisamment réglementé, et les textes en vigueur sont


mal maîtrisés ou mal appliqués ; 

 La crise économique a raréfié les ressources allouées à l’aménagement urbain,


et en particulier aux opérations de restructuration et de rénovation des quartiers
dans les villes ;

 L’offre de logements décents accessibles au plus grand nombre est


insuffisante. Il en est de même pour la fourniture des services urbains de base ;

 L’insuffisance des aménagements à caractère socio-économique entraîne des


désordres urbains, et amoindrit l’apport économique attendu des villes ;

55
 La mobilité urbaine est réduite, notamment du fait de l’insuffisance
quantitative et qualitative d’un réseau viaire adapté au transport collectif et
semi-collectif ; 

 Les difficultés d’accès aux financements, couplés à l’insuffisance de la


réglementation ou à sa mauvaise application, freinent l’exercice des
professionnels des métiers urbains ; 

 Les mécanismes de la gouvernance urbaine sont insuffisants et ne jouent pas


leur rôle de manière satisfaisante, du fait en particulier du faible niveau des
capacités techniques et organisationnelles des acteurs ;

 Les données statistiques disponibles sur les questions urbaines sont très
globales et insuffisantes pour permettre de bien cerner les problématiques du
sous-secteur.

Ainsi, en tant que acteur central en matière d’aménagement du territoire en milieux


urbains, le MINHDU participe à la mise en œuvre de tous les projets d’infrastructures
et d’équipements urbains ; il assiste aussi les CTD dans l’élaboration de leurs
documents de planification (PDU, POS, PSU, PS) en finançant les études.

Somme toute, il était question dans ce chapitre de présenter les politiques et les
pratiques d’aménagement du territoire au Cameroun, d’une part, d’autre part, les
éléments caractéristiques de la croissance urbaine dans ce pays. Il ressort de cette
analyse que, malgré les efforts consentis par les dirigeants, l’urbanisation n’est pas
maitrisée et, au lieu de constituer le levier de la croissance économique, elle s’est
traduite par l’expansion anarchique de l’habitat, l’insuffisance des infrastructures et
services urbains de base.

Le corollaire de cette situation est la promiscuité, l’insalubrité et la fracture sociale.


Les nombreux dysfonctionnements auxquels nos villes sont confrontées conduisent à
un contexte urbain marqué par la régression de la production, la stagnation voire la
baisse du revenu urbain, l’exposition des populations aux risques divers et à
l’aggravation de la pauvreté. En un mot, la pauvreté urbaine et les désordres
socioéconomiques qui en découlent se sont considérablement accrus, en obérant par
là même la triple fonction économique, culturelle et résidentielle des villes11.

Ainsi, l’ampleur des problèmes urbains demande une réflexion plus poussée afin
d’apporter des solutions adaptées pour faire face aux désordres urbains. Cela est
d’autant plus vrai que les mesures mises en œuvre interviennent dans un contexte où
11
DECLARATION DE S. E. JEAN CLAUDE MBWENTCHOU, MINISTRE DE L’HABITAT ET DU
DEVELOPPEMENT URBAIN DU CAMEROUN, Quito, Equateur, 18 octobre 2016
56
le laxisme des dirigeants a déjà permis à l’anarchie de précéder la planification
urbaine.

Néanmoins, nous avons aussi vu que la Banque Mondiale et les dirigeants


camerounais sont d’accord sur le fait que l’aménagement du territoire y inclue la
densification urbaine est un facteur qui influence positivement la croissance
économique.

L’aménagement du territoire nécessite des moyens colossaux, lesquels doivent


provenir d’une source viable. Cela demande à analyser les liens entre l’aménagement
du territoire et la croissance urbaine quantitativement.

57
CHAPITRE IV : RESULTATS DE LA VERIFICATION
EMPIRIQUE ET RECOMMANDATIONS
L’objectif de ce chapitre est de présenter les résultats de la vérification
empirique et de faire des recommandations à l’intention des pouvoirs publics. Notre
chapitre s’organise autour de deux principales sections :

- La première présente la méthodologie dont nous avons fait usage ainsi que les
résultats ;

- La seconde fait des recommandations à partir des résultats obtenus par


l’analyse.

Section I : L’analyse de la relation entre l’aménagement du territoire


et la croissance urbaine
Cette section présente le modèle d’analyse usité (A) et son estimation (B), ainsi
que les résultats et leurs interprétations (C).

A. La présentation du modèle d’analyse


La présentation du modèle d’analyse passe par sa spécification et la
présentation de ses variables.

A1. Spécification du modèle


Deux modèles de régression linéaire multiple12 ont été utilisés dans le cadre de
notre analyse empirique. Ceci pour apprécier la relation étudiée dans le cadre du
champ défini, mais aussi pour voir la manifestation de ce phénomène au niveau
national.

- Le premier modèle met en relation le Budget d’Investissement Public (BIP), le


Produit Intérieur Brut(PIB) et la Population Total du Cameroun(POPTOTAL)
et s’écrit :

LogBIPit = αo + α1LogPIBit +α2LogPOPTOTALit +εit (1)


Les hypothèses suivantes doivent être vérifiées pour la validation des résultats  d’une régression linéaire
12

multiple
H1 : les xit sont observées sans erreur
H2 : E(εit) =0
H3 : E(εit2) = σε (homoscédasticité )
H4 : E(εt, εt’) =0, si t≠t’(erreurs indépendantes)
H5 : cov(xit, εt’) =0
H6 : absence de colinéarité entre les variables explicatives
H7 : X’X/n tend vers une matrice finie non singulière
H8 : n> k+1, le nombre d’observations est supérieur au nombre de séries explicatives (Bourbonnais, 2009)
58
Où αo est le terme constant, εit est le terme d’erreur (iid); i Є [1, 30] et t Є
[1986,2015], α1t et α2t les pentes liées aux variables respectives.

- Le deuxième met en relation le Budget d’Investissement Public, le Produit


Intérieur Brut et la Population Urbaine(POPURB) du Cameroun et s’écrit :

LogBIPit = βo + β1LogPIBit +β2LogPOPURBit +υit (2)

Où βo est le terme constant, υit est le terme d’erreur (iid) ; i Є [1, 30] et t Є
[1986,2015], β1t et β2t les pentes liées aux variables respectives.

Suivant les théories relatives aux potentiels économiques et sociaux qu’offrent les
investissements publics, on s’attend à une valeur positive de α 1 traduisant la
corrélation positive entre le Budget d’Investissement Public et le Produit Intérieur, et
une valeur négative de α2 traduisant la corrélation négative entre Budget
d’Investissement Public et la Population Totale du Cameroun.

Suivant les mêmes théories, on s’attend à une valeur positive de β 1 traduisant la


corrélation positive entre le Budget d’Investissement Public et le Produit Intérieur
tout comme dans le premier modèle et une valeur négative de β 2 traduisant la
corrélation négative entre Budget d’Investissement Public et la Population urbaine du
Cameroun.

A.2. Les variables


Deux catégories de variables seront utilisées dans notre analyse : la variable
expliquée BIP et les variables explicatives PIB, POPTOTAL et POPURB.

BIP : Budget d’Investissement Public,

PIB : Produit Intérieur Brut,

POPTOTAL : Population Totale du Cameroun,

POPURB : Population Urbaine du Cameroun.

Etant donné que nous étudions des phénomènes dynamiques, il nous est paru évident
de retenir plutôt le logarithme népérien des valeurs des variables supra au lieu des
valeurs brutes, vu que la dérivée du logarithme donne immédiatement le taux de
croissance de la variable. Ainsi, nous aurons comme variables : LBIP, LPIB,
LPOPTOTAL et LPOPURB. Le tableau 2 en annexe donne les valeurs de ces
variables.

LBIP : Logarithme népérien du Budget d’Investissement Public,

59
LPIB : Logarithme népérien du Produit Intérieur Brut,

LPOPTOTAL : Logarithme népérien de la Population Totale du Cameroun,

LPOPURB : Logarithme népérien de la Population Urbaine au Cameroun.

Afin d’arriver à un modèle significatif qui, non seulement nous permettra de faire
notre vérification mais qui rend compte également de l’évolution socio-économique
du Cameroun pendant les périodes de crise et en dehors des périodes de crise, notre
analyse s’est focalisée sur les trois décennies qui partent de 1986 à 2015.

Cet intervalle de temps nous permet ainsi de prendre en compte le premier, le


deuxième et le troisième recensement de la population au Cameroun pour plus de
lisibilité dans l’analyse des données.

B. Estimation des modèles


Pour effectuer une bonne estimation, il est nécessaire d’avoir des données
issues d’une source viable, mais aussi de faire usage d’une méthode bien spécifique.

B.1. Source des données


Les données utilisées dans le cadre de notre analyse sont essentiellement des
données socio-économiques. Dans la mesure où l’aménagement du territoire qui est
une mission régalienne de l’Etat se traduit par des investissements importants en
infrastructures et en équipements, nous avons choisi de capter économiquement cette
action par le BIP.

En ce qui concerne la croissance urbaine, celle-ci est considérée dans le cadre de


notre analyse comme la croissance économique en milieu urbain et la croissance de la
population urbaine. Nous capterons la croissance économique urbaine par le Produit
Intérieur Brut (PIB national), vu la difficulté de déterminer le PIB urbain dans le PIB
national. Nous nous appuyons néanmoins sur le fait qu’il est établi 13 que la grande
partie du PIB national est produite par les établissements urbains. La croissance
démographique urbaine sera captée par la population urbaine au Cameroun.

Ces données ont été obtenues à partir des données de l’INS, des lois de finance sur les
années considérées et les données de la Banque Mondiale. Le tableau 1 en annexe
présente ces différentes données.

13
Selon le diagnostic du sous-secteur urbain au Cameroun effectué par le MINHDU en 2013, les villes ont
contribué au PIB national pour 65,5% en moyenne sur la période 2003-2007
60
B.2. Méthode d’estimation
Notre analyse fait des régressions linéaires multiples avec la méthode des
MCO, ainsi qu’un test de causalité au sens de Granger.

Les régressions cherchent à mettre en exergue la relation entre l’aménagement du


territoire et la croissance urbaine, tandis que le test de causalité de Granger cherche à
savoir le sens de la causalité entre ces deux concepts.

C. Les résultats
L’estimation des modèles permet d’arriver à des résultats dont l’analyse permet
de prendre une position claire par rapport aux hypothèses émises.

C.1. Présentation des résultats


L’estimation des modèles grâce au logiciel Eviews.3 nous a permis d’arriver
aux résultats suivants.

Pour le premier modèle, nous avons :

Tableau 3 : régression du premier modèle dans Eviews.


Dependent Variable: LBIP
Method: Least Squares
Sample: 1986 2015
Included observations: 30
White Heteroskedasticity-Consistent Standard Errors & Covariance
Variable Coefficient Std. Error t-Statistic Prob.
LPIB 1.922391 0.248148 7.746948 0.0000
LPOPTOTAL -2.659402 0.613227 -4.336731 0.0002
C 14.65191 3.915810 3.741731 0.0009
R-squared 0.839941 Mean dependent var 5.773603
Adjusted R-squared 0.828085 S.D. dependent var 0.613579
S.E. of regression 0.254406 Akaike info criterion 0.194871
Sum squared resid 1.747509 Schwarz criterion 0.334991
Log likelihood 0.076938 F-statistic 70.84381
Durbin-Watson stat 0.918766 Prob (F-statistic) 0.000000
Source : traitement de l’auteur dans le logiciel Eviews.

Le tableau 3 présente les résultats de l’estimation du premier modèle. Sa


lecture, notamment les valeurs des probabilités, permet de dire que tous les
paramètres sont significatifs.

Pour le deuxième modèle, nous avons :

61
Tableau 4 : régression du deuxième modèle dans Eviews.
Dependent Variable: LBIP
Method: Least Squares
Sample: 1986 2015
Included observations: 30
White Heteroskedasticity-Consistent Standard Errors & Covariance
Variable Coefficient Std. Error t-Statistic Prob.
LPIB 1.360392 0.134827 10.08992 0.0000
LPOPURB -0.957616 0.250229 -3.826957 0.0007
C 2.460929 1.466592 1.677992 0.1049
R-squared 0.828233 Mean dependent var 5.773603
Adjusted R-squared 0.815510 S.D. dependent var 0.613579
S.E. of regression 0.263547 Akaike info criterion 0.265466
Sum squared resid 1.875333 Schwarz criterion 0.405586
Log likelihood -0.981992 F-statistic 65.09485
Durbin-Watson stat 0.887289 Prob (F-statistic) 0.000000
Source : traitement de l’auteur dans le logiciel Eviews.

Le tableau 4 présente les résultats de l’estimation du deuxième modèle. Il


montre clairement que tous les paramètres sont significatifs.

En ce qui concerne le test de causalité de Granger, notre analyse nous a permis


d’arriver aux résultats suivants relatifs aux modèles précédents :

Pour ce qui est du premier modèle, nous avons :

Tableau 5 : Sens de causalité entre les variables LBIP, LPIB et LPOPTOTAL.
Pairwise Granger Causality Tests
Sample: 1986 2015
Lags: 2
Null Hypothesis: Obs F-Statistic Probability
LPIB does not Granger Cause LBIP 28 5.63216 0.01021
LBIP does not Granger Cause LPIB 1.45800 0.25342
LPOPTOTAL does not Granger Cause LBIP 28 6.07809 0.00760
LBIP does not Granger Cause LPOPTOTAL 1.65334 0.21336
62
Source : traitement de l’auteur dans le logiciel Eviews.

Le tableau 5 présente les résultats du test de causalité au sens de Granger des


variables du premier modèle. Il laisse aussi apparaître la significativité de certaines
hypothèses par rapport aux autres.

Pour ce qui est du deuxième modèle, nous avons :

Tableau 6 : Sens de causalité entre les variables LBIP, LPIB et LPOPURB.
Sample: 1986 2015
Lags: 2
Null Hypothesis: Obs F-Statistic Probability
LPIB does not Granger Cause LBIP 28 5.63216 0.01021
LBIP does not Granger Cause LPIB 1.45800 0.25342
LPOPURB does not Granger Cause LBIP 28 8.49956 0.00172

LBIP does not Granger Cause LPOPURB 2.82346 0.08007


Source : traitement de l’auteur dans le logiciel Eviews.
Le tableau 6 présente les résultats du test de causalité au sens de Granger des
variables du deuxième modèle. Il laisse aussi apparaître la significativité de certaines
hypothèses par rapport aux autres.

C.2. Analyse des résultats


La lecture des résultats de l’estimation du premier modèles permet de constater
que :

Le coefficient de détermination R2 = 0.839941 est supérieur à 75%, ce qui évoque


une présomption à la causalité entre la variable expliquée LBIP et les variables
explicatives LPIB et LPOPTOTAL.

La statistique de Fischer calculée Fcal = 70.84381 est supérieure à la statistique de


Fischer tabulée, F0.05(3 , 28) = 2.95, ce qui signifie que le modèle est globalement
significatif.

Interprétation des paramètres :

- α1

Suivant le test des hypothèses : H0 : α1 = 0 contre H1 : α1 ≠ 0, nous avons :

63
La statistique de Student liée à α1, t1 = 7.746948 est supérieure à la statistique de
Student tabulée t0.05(27) =2.052, ce qui signifie que le paramètre α1 est
significativement différent de 0.

Suivant le test des hypothèses : Ho’ : α1 <0 contre H1’ : α1 >0, nous avons :

La statistique de Student t1’ = 7.746948 est aussi supérieure à la statistique de


Student tabulée t0.025(27) =1.703, ce qui signifie que le paramètre α1 est
significativement supérieur à 0, donc positif.

Nous concluons que le PIB influence positivement le BIP.

- α2

Suivant le test des hypothèses : H0 : α2 = 0 contre H1 : α2 ≠0, nous avons :

La statistique de Student liée à α2, t2 = -4.336731 est supérieure en valeur absolue à la


statistique de Student tabulée t0.05(27) = 2.052, ce qui signifie que le paramètre α2 est
significativement différent de 0.

Suivant le test des hypothèses : H0’ : α2 <0 contre H1’ : α2 >0, nous avons :

La statistique de Student t 2’ = -4.336731 est inférieure à la statistique de Student


tabulée donnée par t0.025(27) =1.703, ce qui signifie que le paramètre α2 est
significativement inférieur à 0, donc négatif.

Il ressort que la taille totale de la population camerounaise influence négativement le


BIP.

La lecture des résultats relatifs à l’estimation du deuxième modèle permet de


constater aussi que :

Le coefficient de détermination R2 = 0.828233 est supérieur à 75%, ce qui évoque


une présomption à la causalité entre la variable expliquée LBIP et les variables
explicatives LPIB et LPOPURB.

La statistique de Fischer calculée Fcal = 65.09485 est supérieure à la statistique de


Fischer tabulée donnée par F0.05(3 , 28) = 2.95, ce qui signifie que le modèle est
globalement significatif.

Interprétation des paramètres :

- β1

Suivant le test des hypothèses : H0 : β1 =0 contre H1 : β1 ≠0, nous avons :
64
La statistique de Student liée à β1, t1 = 10.08992 est supérieure à la statistique de
Student tabulée t0.05(27) = 2.052, ce qui signifie que le paramètre β1 est
significativement différent de 0.

Suivant le test des hypothèses : H0’ : β1<0 contre H1’ : β1 >0, nous avons :

La statistique de Student t1’ = 10.08992 est supérieure à la statistique de Student


tabulée donnée par t0.025(27) = 1.703, ce qui signifie que le paramètre β1 est
significativement supérieur à 0, donc positif.

Il en ressort que le PIB influence positivement le BIP.

- β2

Suivant le test des hypothèses : H0 : β2 = 0 contre H1 : β2 ≠ 0, nous avons :

La statistique de Student liée à β2, t2 = -3.826957 est supérieure en valeur absolue à la


statistique de Student tabulée t0.05(27) = 2.052, ce qui signifie que le paramètre β2 est
significativement différent de 0.

Suivant le test des hypothèses : H0 : β2 < 0 contre H1 : β2 > 0, nous avons :

La statistique de Student calculée t2’ = -3.826957 est inférieure à la statistique de


Student tabulée donnée par t0.025(27) = 1.703, ce qui signifie que le paramètre β2 est
significativement inférieur à 0, donc négatif.

Il en ressort que la taille de la population urbaine influence négativement le BIP.

La lecture des résultats relatifs aux tests de causalité au sens de Granger permet
d’apprécier le sens de ces causalités.

- Sens de causalité entre le BIP et le PIB.

Suivant le test des hypothèses :

H0 : LPIB ne cause pas LBIP au sens de Granger

H1 : LPIB cause LBIP au sens de Granger

Nous avons :

La statistique calculée de Fischer Fcal = 5.63216 est supérieure à la statistique


tabulée de Fischer, donnée par F0.05(1 , 26) = 5.23.

Ainsi, LPIB cause LBIP au sens de Granger, ce qui nous amène à dire que le PIB est
la cause du BIP.
65
Suivant le test des hypothèses :

H0’ : LBIP ne cause pas LPIB au sens de Granger

H1’ : LBIP cause LPIB au sens de Granger

Nous avons :

La statistique calculée de Fischer Fcal’ = 1.45800 est inférieure à la statistique


tabulée de Fischer, donnée par F0.05(1 , 26) = 5.23. Ceci signifie que LBIP ne cause
pas LPIB.

En définitive, seul le PIB cause le BIP.

- Sens de causalité entre BIP et la population totale.

Suivant le test des hypothèses :

H0 : LPOPTOTAL ne cause pas LBIP au sens de Granger

H1 : LPOPTOTAL cause LBIP au sens de Granger

Nous avons :

La statistique de Fischer calculée Fcal = 6.07809 est supérieure à la statistique de


Fischer tabulée F0.05(1 , 26) = 5.23, ce qui signifie que LPOPTOTAL cause LBIP au
sens de Granger.

Suivant le test des hypothèses :

H0’ : LBIP ne cause pas LPOPTOTAL au sens de Granger

H1 : LBIP cause LPOTOTAL au sens de Granger

Nous avons :

La statistique de Fischer calculée Fcal’ = 1.65334 est inférieure à la statistique


tabulée de Fischer, donnée par F0.05(1 , 26) = 5.23, ce qui signifie que LBIP ne cause
LPOPTOTAL au sens de Granger.

En définitive, la population totale cause le BIP au sens de Granger.

- Sens de causalité entre le BIP et la population urbaine.

Suivant le test des hypothèses :

H0 : LPOPURB ne cause pas LBIP au sens de Granger


66
H1 : LPOPURB cause LBIP au sens de Granger

Nous avons :

La statistique de Fischer calculée Fcal = 8.49956 est supérieure à la statistique de


Fischer tabulée donnée par F0.05(1 , 26) = 5.23.

Ceci signifie que LPOPURB cause sans aucun doute LBIP au sens de Granger.

Suivant le test des hypothèses :

H0’ : LBIP ne cause pas LPOPURB au sens de Granger

H1’ : LBIP cause LPOPURB au sens de Granger

Nous avons :

La statistique de Fischer calculée Fcal’ = 2.82346 est inférieure à la statistique de


Fischer tabulée donnée par F0.05(1 , 26) = 5.23. Ce qui signifie que LGBIP ne cause
pas LPOPURB au sens de Granger.

En définitive, seule la population urbaine cause le BIP au sens de Granger.

Il ressort de notre analyse que, non seulement il existe un lien entre


l’aménagement du territoire et la croissance urbaine, mais aussi, la croissance urbaine
cause l’aménagement du territoire. Ce résultat est vrai en ce qui concerne la
population urbaine mais aussi en ce qui concerne la population totale du Cameroun.

Les résultats obtenus ainsi que les enseignements tirés de la revue de la littérature
nous amènent à formuler quelques recommandations de politiques économiques ou
urbaines, à l’attention des dirigeants politiques ainsi que des chercheurs.

Section II : les recommandations de politiques économiques ou


urbaines.
Dans cette section, nous ferons des recommandations d’ordre socio-économique et
politique (A) et des recommandations d’ordre pratique (B), en nous appuyant sur les
résultats obtenus dans le cadre de notre analyse, mais aussi sur des enseignements
tirés des observations des pratiques courantes.

A. Recommandations d’ordre socioéconomique et politique.


Les pouvoirs devraient mettre en œuvre des mesures concrètes susceptibles
d’améliorer le contexte économique du pays ainsi que le cadre et le niveau de vie des
populations.
67
A.1. Recommandations d’ordre socioéconomique
Notre analyse a permis de mettre en exergue le lien qui existe entre
l’aménagement du territoire et la croissance urbaine. Les dirigeants devraient prendre
conscience de ce fait et mettre en place des politiques économiques qui créent un
cercle vertueux de développement, un cercle où l’aménagement du territoire permet à
l’économie de prospérer, laquelle va donner plus de possibilité de réaction aux
dirigeants grâce à ses fruits.

La programmation économique doit favoriser la mise en œuvre des politiques qui


boostent la croissance économique, étant entendu que celle-ci tire l’aménagement du
territoire positivement en lui apportant plus de ressources.

En ce qui concerne la corrélation négative entre l’aménagement du territoire et la


croissance urbaine, les dirigeants devraient mettre en œuvre des politiques qui, loin
de chercher à limiter la croissance démographique, vont plutôt en faire un instrument
de croissance économique. Cela est possible.

En effet, en communiquant avec les populations, en amenant celles-ci à comprendre


son importance dans la construction de la nation, en mettant sur pied des mécanismes
d’éducation de masse, les dirigeants peuvent rendre chaque mètre carré du territoire
urbain productif. Cela passe par à une politique foncière transparente et bien
encadrée. Le contrôle du foncier urbain permettra de limiter l’étalement urbain,
d’encourager la densification urbaine tout en permettant à l’Etat de gagner en
ressources.

En ce qui concerne les transports urbains, l’amélioration du transport urbain dans les
villes dépendra d’une stratégie de mesures coordonnées visant l’aménagement des
infrastructures, la gestion de la circulation, la qualité des services et le développement
du réseau. Parmi les mesures à court terme figurent l’augmentation du financement
des routes, l’application des réglementations existantes, le contrôle de la surcharge et
le renforcement des contrôles techniques. Les mesures à moyen terme incluent la
réhabilitation des routes, l’amélioration de la gestion de la circulation, la définition et
mise en application de normes pour le service (tarifs, horaires), la conception d’une
nouvelle structure d’itinéraires et la rationalisation du service à travers une
concurrence contrôlée.

L’objectif à long terme est de consolider les gains dans tous ces domaines grâce à la
création d’une régie métropolitaine du transport ayant autorité sur les infrastructures
et les véhicules. Pour être compétente, cette régie doit coordonner la planification du
transport, l’aménagement des infrastructures et la réglementation des services. Son
68
budget doit être suffisant pour attirer et retenir le personnel qualifié, et ne doit pas
faire l’objet de changements arbitraires lorsque le département d’appui est sous
pression. Les coûts pour les utilisateurs – en particulier les permis d’exploitation ou
les frais de franchise perçus sur les opérateurs – constituent l’option de financement
privilégiée. Ils ne doivent pas être onéreux ni avoir un effet important sur les tarifs.

Toutefois, pour exploiter leur potentiel, les villes doivent réparer leurs chaussées,
améliorer leurs pratiques de gestion de la circulation et assurer la viabilité
économique des services des grands véhicules à travers le recouvrement des coûts à
l’aide soit de boîtes de perception soit de subventions prévisibles.

La réintroduction des grands autobus dépendra non seulement des améliorations


physiques et institutionnelles mais également d’un ferme engagement politique en
faveur d’une exploitation soutenable. Peu d’opérateurs privés sont en mesure de
mobiliser le capital nécessaire pour acquérir de grands autobus. Pour lever les
barrières à l’investissement, il faudra un contrôle de la concurrence sous la forme de
droits d’exploitation exclusive des services d’autobus sur des itinéraires désignés.
Une concurrence contrôlée peut être introduite à travers la consolidation du secteur
informel en de plus grandes unités ou associations capables d’obtenir des contrats
exclusifs sur des itinéraires. L’élimination de la concurrence non rentable permettrait
de réduire la congestion et d’améliorer la vitesse du transport, rendant ainsi les grands
autobus commercialement intéressants. Cette approche est fondée sur une durée des
contrats calquée sur la durée de remboursement de l’investissement et sur un système
de réglementation tarifaire qui garantit une récupération raisonnable des coûts et
protège les opérateurs et régulateurs des pressions politiques éphémères.

Les villes camerounaises doivent rapidement évoluer vers le modèle de régie


métropolitaine des transports adopté avec succès dans nombre de villes à travers le
monde. Cette évolution permettra de coordonner la planification, la réglementation,
l’octroi des permis, le contrôle technique, le suivi et l’application des règles.

A.2. Recommandations d’ordre politique.


Le contexte camerounais est tel que le désordre urbain a précédé l’aménagement
du territoire en milieux urbains. Dans ce contexte, les opérations d’aménagement que
prône la loi d’urbanisme ont une portée limitée. Ces opérations se contentent
uniquement d’apporter de « l’aide à la pierre » et s’intéressent peu à « l’aide à la
personne » ou contribuent résiduellement à celle-ci. De plus, la brutalité liée à leur
mise en œuvre a été telle qu’elles ont causé plus de mal que de bien aux populations
et, n’ont contribué qu’à la réplication des quartiers précaires. Sans mesures
d’accompagnement, la restructuration des quartiers précaires n’a eu pour effets que
69
de déplacer les populations des quartiers précaires au centre-ville vers la périphérique
où de nouveaux quartiers précaires sont créés.

Ainsi, la loi portant urbanisme au Cameroun ainsi que ses décrets d’application
devraient évoluer, afin d’intégrer les nouvelles donnes que sont la restructuration in
situ, et l’approche devra être celle d’économie sociale et solidaire, où « les trois pieds
de la marmite »14 doivent jouer chacun son rôle. Les dirigeants devraient trouver des
stratégies de communication afin d’informer la masse populaire sur la nécessité de
connaître l’ensemble des lois relatives à la planification urbaine, l’ensemble des
documents de planification urbaine ainsi que leur respect. Il est coûteux pour les
pouvoirs publics de mettre sur pied des opérations de restructuration/réhabilitation ;
les mesures préventives qui passent par l’acquisition des documents de planification
urbaine par chaque CTD et leur respect et mise en application par l’ensemble de la
population sont prioritaires et l’Etat devrait travailler sans relâche dans ce sens.

Dans cette visée, il est nécessaire de vulgariser la loi d’orientation pour


l’aménagement et le développement durable du territoire ainsi que la loi portant
urbanisme au Cameroun. Les pouvoirs publics devraient aussi mettre en cohérence
toutes les lois et décrets qui ont traits à l’aménagement du territoire, coordonner leurs
interventions avec celles des CTD en ce qui concerne la mise en œuvre des
infrastructures ou la réalisation de certains projets pour plus d’efficacités.

B. Recommandations d’ordre pratique.


Les pratiques en aménagement du territoire au Cameroun doivent intégrer un
certain nombre de réalités incontournables pour une bonne orientation de la
croissance urbaine.

B.1. Recommandation par rapport aux villes


Les pouvoirs publics devraient procéder à une hiérarchisation légale des villes
camerounaises, à la constitutionnalisation des lois relatives au foncier, à la mise sur
pied d’un tribunal spécialisé dans les affaires foncières et d’habitat. Ils doivent aussi
implémenter l’expérience des pratiques israéliennes en matière de logements sociaux.
Ceci passe par la communication, le rapprochement entre tous les acteurs et une
bonne coordination des actions des uns et des autres.

B.2. Recommandation par rapport aux documents de planification


Les pouvoirs publics devraient aussi accélérer la mise sur pied des schémas
d’aménagement du territoire que sont :

14
Secteur public, secteur privé, société civile.
70
- Le Schéma National d’Aménagement et de Développement Durable du
Territoire ;
- Les Schémas Régionaux d’Aménagement et de Développement Durable du
Territoire ;
- Les Schémas Sectoriaux ;
- Les Plans Locaux d’Aménagement et de Développement Durable du
Territoire ;
- Les Contrats Plans,
Afin que les documents de planification urbaine que sont le PDU, le POS, le PSU et
le PS puissent s’incorporer à ces schémas et que le territoire camerounais arrive
effectivement à une intégration comme celle décrite par le modèle du polycentrisme
maillé.

Pour conclure, dans ce chapitre, il était question de présenter les résultats de la


vérification empirique et de faire des recommandations à l’intention des pouvoirs
publics. Nos résultats montrent qu’il existe un lien entre l’aménagement du territoire
et la croissance urbaine. Ce lien peut être une corrélation positive ou une corrélation
négative.
Le résultat relatif à l’influence de l’aménagement du territoire confirme notre
première hypothèse. Il montre qu’il existe effectivement un lien entre l’aménagement
du territoire et la croissance urbaine. L’aménagement du territoire influence ainsi
positivement la croissance urbaine.
Le résultat relatif à l’influence de la croissance urbaine sur l’aménagement du
territoire confirme aussi notre deuxième hypothèse. La croissance démographique
urbaine influence négativement l’aménagement du territoire.
Enfin, les tests de causalité au sens de Granger montrent dans leur globalité que la
croissance urbaine est à l’origine de la mise en œuvre des politiques publiques en
matière d’aménagement du territoire et donc, cause l’aménagement du territoire.

71
CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE.
Au terme de cette partie, il était question de faire une vérification empirique
des liens de corrélation ou de causalité entre l’aménagement du territoire et la
croissance urbaine dans le cadre du Cameroun. Nous avons pu mettre en exergue les
caractéristiques de la croissance urbaine dans les établissements urbains du
Cameroun ; nous avons aussi effectué une analyse économétrique sur les potentiels
liens entre l’aménagement du territoire et la croissance urbaine dans le contexte
camerounais.

Il est apparu que l’aménagement du territoire est au cœur des politiques


gouvernementales, ce qui explique les nombreux efforts consacrés pour en faire un
instrument de croissance économique, qu’il influence positivement la croissance
économique urbaine, et que la croissance démographique urbaine influence
négativement ce dernier.

Nos résultats, lesquels ont confirmé nos hypothèses, nous ont montré clairement que,
non seulement, il existe un lien entre l’aménagement du territoire et la croissance
urbaine, mais aussi, la croissance urbaine cause l’aménagement du territoire. Ces
résultats sont vrais en ce qui concerne la population urbaine mais aussi en ce qui
concerne la population totale du Cameroun.

Au final, comme mentionné supra, il existe un lien entre l’aménagement du territoire


et la croissance urbaine et, la croissance urbaine cause sans aucun doute la mise en
œuvre des politiques publiques d’aménagement du territoire et par conséquent, cause
l’aménagement du territoire.

72
CONCLUSION GENERALE
Au terme de notre analyse, il était question de mettre en exergue la relation
entre l’aménagement du territoire et la croissance urbaine d’une part, et d’autre part,
le sens de cette relation. Nous avons vu aussi bien dans notre analyse théorique que
dans notre analyse empirique que l’aménagement du territoire influence positivement
la croissance économique urbaine, et que la croissance démographique urbaine
influence négativement l’aménagement du territoire.

Il est apparu très clair qu’il existe un lien entre l’aménagement du territoire et la
croissance urbaine, mais aussi que, la croissance urbaine cause l’aménagement du
territoire. Ce résultat est vrai en ce qui concerne la population urbaine mais aussi en
ce qui concerne la population totale du Cameroun.

In fine, l’aménagement du territoire apparaît non seulement comme étant un facteur


de développement urbain à travers la mise en œuvre effective des politiques y
relatives, mais aussi comme un préalable pour une intégration et une organisation
efficace du territoire.

Sa mise en œuvre obéit à une double approche, selon que celle-ci se fait ex-ante au
processus d’urbanisation, ce qui nécessite une planification rigoureuse, ou selon que
celle-ci se fait ex-post à l’urbanisation anarchique, ce qui nécessite des mesures
concertées dans une approche d’économie sociale et solidaire pour plus d’efficacités.

Le sens de la causalité qui va de la croissance urbaine vers l’aménagement du


territoire explique en partie les attitudes des dirigeants camerounais en matière
d’aménagement du territoire. L’approche des dirigeants est une approche réactive
destinée à répondre à des problèmes déjà existants. Ce fait avéré est regrettable et
traduit l’impuissance des pouvoirs publics qui semblent débordés par les problèmes
urbains. Pour inverser cette causalité, les dirigeants devraient mettre en œuvre des
politiques ambitieuses qui permettront de rattraper la croissance urbaine et de la
dépasser.

Ce n’est que lorsque les pouvoirs publics seront à mesure de prévoir avec exactitude
l’évolution des variables macroéconomiques ainsi que les solutions à apporter à ces
dernières en cas de chocs exogène ou endogène que le Cameroun dira qu’il contrôle
sa croissance urbaine.

Cela est possible dans la mesure où le Cameroun dispose des ressources importantes
pour faire face aux problèmes urbains. Le retard résiderait dans l’incapacité des
dirigeants qui n’arrivent pas à faire des stratégies élaborées des réalités concrètes,

73
mais aussi de la tournure de l’économie mondiale. Cela pourrait aussi être lié aux
risques de déstabilisation liés aux conflits armés.

Malgré tout, une chose incontestable est le fait qu’au Cameroun, il n’existe
malheureusement aucune ville fonctionnelle. Il existe plusieurs villes légales qui
jusqu’ici n’arrivent pas à assurer les trois principales fonctions d’une véritable ville.

Cette analyse bien qu’étant non exhaustive, nous pousse à nous intéresser au lien de
causalité qui pourrait exister entre l’aménagement du territoire et la croissance
urbaine à l’échelle de la sous-région d’Afrique centrale, mais aussi à nous interroger
sur les stratégies à mettre en œuvre pour arriver à une intégration territoriale et
économique des pays de la zone CEMAC.

BIBLIOGRAPHIE
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villes des pays en développement, Lyon, France.
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 Cureaux, O. (2000), « Intégration Régionale, Croissance et Dynamique de
spécialisation : une application à L’Afrique australe », thèse de doctorat,
université Panthéon Assas (Paris II).
 Lacat, G. (2006), « Analyse économique de planification urbaine », thèse de
doctorat, Bourgogne, p. 53

Articles et revues :

 Ajay Kumar et Fanny Barrett, Coincés dans les embouteillages Le transport


urbain en Afrique, Banque Mondiale, 2008
 Sylvie Charlot(1996). Dépenses publiques et croissance : effets macro-
économiques et spécificités régionales, Laboratoire d'Analyse et de Techniques
Économiques, n° 9615.

 Dimou Michel, Schaffar Alexandra, 2011« Les théories de la croissance


urbaine », Revue d'économie politique 2/ (Vol. 121) , p. 179-207

 Merlin, P. & Choay, F. (1996), Dictionnaire de l'urbanisme et de


l'aménagement. PUF, Paris.
 Catin et al.(2008), urbanisation, primatie et étapes de développement : existe-
t-il une courbe en cloche ? Région et Développement n° 27.

76
ANNEXES
 Mansion et Broutain (2012), Quelles politiques foncières en Afrique
subsaharienne? Défis, acteurs et initiatives contemporaines, revue Grain de sel
no 57.

Textes de loi :

 Loi n°2004/003 du 21 avril 2004 régissant l’urbanisme au Cameroun.


 Loi no 2004/017 du 22 juillet 2004 d’orientation de la décentralisation.
 Loi no 2004/017 du 22 juillet 2004 portant orientation à la décentralisation.

 Loi n°2014/026 du 23 décembre 2014 portant loi de finances de la République


du Cameroun pour l’exercice 2015.

ANNXES
Tableau 1 : Données socio-économiques sur le Cameroun
PIB en Population en Population urbaine
Année BIP en milliards milliards millions en millions
1986 310,00 3416,00 10197,9 2906,4
1987 340,00 3189,00 10493,7 3966,6
77
1988 250,00 3093,00 10920,9 5329,4
1989 225,00 3014,00 11226,6 5478,6
1990 175,00 3005,00 11541,0 5632,0
1991 186,00 3319,00 11864,1 5789,7
1992 166,00 3230,00 12196,3 5951,8
1993 136,00 3049,00 12537,8 6118,5
1994 136,00 2799,00 12888,9 6289,8
1995 184,00 3264,00 13249,8 6465,9
1996 286,00 4008,00 13620,8 6646,9
1997 147,00 4291,00 14002,1 6833,0
1998 166,00 4590,00 14394,2 7024,4
1999 229,00 4875,00 14797,3 7221,1
2000 295,00 5194,00 15211,6 7423,2
2001 339,00 7104,00 15637,5 7631,1
2002 294,00 7005,00 16075,3 7844,8
2003 264,00 7330,00 16525,5 8064,4
2004 271,00 7741,00 16988,2 8290,2
2005 289,00 8119,00 17620,0 8522,4
2006 348,00 8984,00 17252,3 8971,2
2007 496,00 9230,00 17735,7 9222,6
2008 574,41 10443,83 18214,6 9471,6
2009 640,34 11040,35 18706,4 9727,3
2010 421,19 11699,69 19406,1 10091,2
2011 677,20 20124,09 20124,1 10464,5
2012 792,20 13389,20 20687,6 10757,5
2013 957,00 14346,80 21266,8 11058,7
2014 1000,00 15193,26 21862,3 11368,4
2015 1150,00 16074,48 22474,4 11686,7

Source : INS, Lois des finances (1986-2015) et traitement de l’auteur.

Tableau 2 : Forme logarithmiques des données socio-économiques sur le Cameroun


Année LOGBIP LOGPIB LOGPOPTOTAL LOGPOPURB
1986 5.736572 8.136226 9.229938 7.974672
78
1987 5.828946 8.067463 9.258526 8.285665
1988 5.521461 8.036897 9.298430 8.580990
1989 5.416100 8.011023 9.326045 8.608605
1990 5.164786 8.008033 9.353660 8.636220
1991 5.225747 8.107419 9.381275 8.663835
1992 5.111988 8.080237 9.408890 8.691450
1993 4.912655 8.022569 9.436506 8.719066
1994 4.912655 7.937017 9.464121 8.746681
1995 5.214936 8.090709 9.491736 8.774296
1996 5.655992 8.296048 9.519351 8.801911
1997 4.990433 8.364275 9.546966 8.829526
1998 5.111988 8.431635 9.574581 8.857141
1999 5.433722 8.491875 9.602197 8.884757
2000 5.686975 8.555259 9.629812 8.912372
2001 5.826000 8.868413 9.657427 8.939987
2002 5.683580 8.854379 9.685042 8.967602
2003 5.575949 8.899731 9.712657 8.995217
2004 5.602119 8.954286 9.740272 9.022832
2005 5.666427 9.001962 9.767888 9.050448
2006 5.852202 9.103200 9.755701 9.101774
2007 6.206576 9.130214 9.783335 9.129408
2008 6.353344 9.253767 9.809979 9.156052
2009 6.461999 9.309312 9.836621 9.182695
2010 6.043082 9.367318 9.873343 9.219416
2011 6.517967 9.437133 9.909673 9.255747
2012 6.674814 9.502204 9.937289 9.283362
2013 6.863803 9.571282 9.964904 9.310977
2014 6.907755 9.628607 9.992519 9.338592
2015 7.047517 9.684988 10.02013 9.366208

Source : traitement de l’auteur.

TABLE DES MATIERES


INTRODUCTION GENERALE...............................................................................1

PREMIERE PARTIE : ANALYSE DES LIENS ENTRE L’AMENAGEMENT DU


TERRITOIRE ET LA CROISSANCE URBAINE...................................................6

CHAPITRE I : LA CROISSANCE URBAINE, UNE CONSEQUENCE DE


L’AMENAGEMENT DU TERRITOIRE.................................................................7

79
Section I : L’influence positive de l’aménagement du territoire sur la croissance
urbaine..................................................................................................................….7

A. Aménagement du territoire et croissance endogène............................................7

A.1. Dépenses publiques et croissance urbaine..........................................................8

A.2. Le foncier, la différenciation urbaine et la croissance urbaine.........................13

B. Aménagement du territoire et économie d’agglomération................................14

B.1. Apport de l’économie géographique...............................................................14

B.2. Apport de la théorie des pôles de croissance.................................................15

Section II : Influence négative de l’aménagement du territoire sur la croissance


urbaine.....................................................................................................................18

A. Théorie de flux migratoires des facteurs de production....................................18

A.1. L’apport du modèle de Tiebout.....................................................................18

A.2. L’apport du modèle d’Alonso........................................................................19

B. Théories marxistes............................................................................................20

B.1. Analyse de Marx (1864)................................................................................20

B.2. Analyse des néo-marxistes.............................................................................21

CHAPITRE II : LA CROISSANCE URBAINE, UNE CAUSE DE


L’AMENAGEMENT DU TERRITOIRE...............................................................23

Section I : Influence de la croissance urbaine sur l’aménagement du territoire......23

A. La théorie du développement............................................................................23

A.1. Croissance démographique et aménagement du territoire.............................23

A.2. Foncier urbain et aménagement du territoire.................................................24

B. La croissance démo-économique et l’aménagement du territoire.....................25

B.1. Populations et richesse urbaine......................................................................25

B.2. Apport de la théorie de la modernisation.......................................................27

80
Section II : Lien empirique entre la croissance urbaine et l’aménagement du territoire.
.................................................................................................................................27

A. Croissance du PIB et aménagement du territoire..............................................27

A.1. Modèle de Catin, Hanchane et Kamal...........................................................27

A.2. ouverture internationale et aménagement du territoire..................................28

B. Infrastructures, services publics et croissance démographique.........................29

B.1. Infrastructures, services publics et efficacité économique............................29

B.2. Croissance démographique et aménagement du territoire.............................33

CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE.......................................................36

DEUXIEME PARTIE : VERIFICATION EMPIRIQUE DU LIEN DE CAUSALITE


ENTRE L’AMENAGEMENT DU TERRITOIRE ET LA CROISSANCE URBAINE
AU CAMEROUN...................................................................................................37

CHAPITRE III : LES PRATIQUES DE L’AMENAGEMENT DU TERRITOIRE ET


LA CROISSANCE URBAINE AU CAMEROUN................................................38

Section I : Les caractéristiques de la croissance urbaine dans les villes camerounaises
.................................................................................................................................38

A. Croissance urbaine et habitat urbain.................................................................38

A.1. Visage actuel des villes camerounaises.........................................................38

A.2. Villes camerounaises et quartiers précaires...................................................41

B. Croissance urbaine et transports urbains...........................................................42

B.1. Villes camerounaises et embouteillages........................................................42

B.2. Genèse et ampleur du phénomène de « mototaxis ».....................................44

Section II : Les approches pratiques des dirigeants en matière d’aménagement du


territoire...................................................................................................................45

A. Les différentes formes d’organisation spatiale du territoire.............................45

A.1. les scénarii d’aménagement du territoire.......................................................46

A.2. la vision du DSCE par rapport au territoire Camerounais.............................48


81
B. Les approches pratiques des dirigeants pour faire face aux désordres urbains.50

B.1. Interventions des délégués du gouvernement dans les grandes villes...........50

B.2. Intervention des pouvoirs centraux................................................................52

CHAPITRE IV : RESULTATS DE LA VERIFICATION EMPIRIQUE ET


RECOMMANDATIONS........................................................................................58

Section I : L’analyse de la relation entre l’aménagement du territoire et la croissance


urbaine.....................................................................................................................58

A. La présentation du modèle d’analyse................................................................58

A1. Spécification du modèle..................................................................................58

A.2. Les variables..................................................................................................59

B. Estimation des modèles..................................................................................60

B.1. Source des données.........................................................................................60

B.2. Méthode d’estimation.....................................................................................61

C. Les résultats.......................................................................................................61

C.1. Présentation des résultats...............................................................................61

C.2. Analyse des résultats.......................................................................................63

Section II : les recommandations de politiques économiques ou urbaines.............68

A. Recommandations d’ordre socioéconomique et politique................................68

A.1. Recommandations d’ordre socioéconomique................................................68

A.2. Recommandations d’ordre politique..............................................................70

B. Recommandations d’ordre pratique..................................................................72

B.1. Recommandation par rapport aux villes........................................................72

B.2. Recommandation par rapport aux documents de planification.....................72

CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE......................................................74

CONCLUSION GENERALE.................................................................................75

BIBLIOGRAPHIE..................................................................................................77
82
ANNXES.................................................................................................................80

TABLE DES MATIERES.......................................................................................82

SIGNES ET ABREVIATIONS...............................................................................85

LISTE DES TABLEAUX.......................................................................................88

83
SIGNES ET ABREVIATIONS
AFD : Agence Française de Développement
AMA: Capital avancé Marchandise Argent
BEAC : Banque des États d’Afrique Centrale
BIP: Budget d’Investissements Publics
CEMAC: Communauté Économique et Monétaire de l’Afrique Centrale
CERED: Centre de Recherche pour le Développement
CFC: Crédit Foncier du Cameroun
CTD: Collectivité territorial Décentralisée
CP: Contrats Plans
DF: Documentation Française
DSCE: Document de Stratégie pour la Croissance et l’Emploi
DSRP: Document de Stratégie pour la Réduction de la Pauvreté
DSRPU: Document de Stratégie pour la Réduction de la Pauvreté Urbaine
ECAM: Enquête Camerounaise Auprès des Ménages
INS : Institut National de la Statistique
MAETUR: Mission d’Aménagement et d’Équipement des Terrains Urbains et
Ruraux
MAM : Marchandise Argent Marché
MINHDU : Ministère de l’Habitat et du Développement Urbain
NAS: National Academic of Sciences
OCDE : Organisation pour la Coopération et le Développement Économique
ODD: Objectifs pour le Développement Durable
OMD: Objectifs du Millénaire pour le Développement
ONU : Organisation des Nations Unies
ONU-HABITAT : Organisation des Nations Unies pour l’Habitat
PDU : Plan Directeur d’Urbanisme
PIB : Produit Intérieur Brut
PLADDT : Plans Locaux d’Aménagement et de Développement Durable du
Territoire
PME : Petite et Moyenne Entreprise
POS : Plan d’Occupation des Sols
PPP : Partenariats Publics-Privés
PS : Plans de Secteur
PSU : Plan Sommaire d’Urbanisme
PUD : Plans d’Urbanisme Directeurs
R& D : Recherche et Développement
SDAU : Schéma Directeur d’Aménagement Urbain
84
SNADDT : Schéma National d’Aménagement et de Développement Durable du
Territoire 
SRADDT : Schémas Régionaux d’Aménagement et de Développement Durable du
Territoire 
SS : Schémas Sectoriaux 
UNFPA: United Nations Population Fund

85
LISTE DES GRAPHIQUES, SCHEMAS ET FIGURES
Image 1 : Infrastructures et transports.....................................................................18

Graphique 1A : Evolution du BIP de la POPTOTAL et de la POPURB entre 1986 et


2015.........................................................................................................................39

Graphique 1B : Evolution du BIP, de la POPTOTAL et de la POPURB entre 1986 et


2015.........................................................................................................................39

Schéma 1 : du budget des dépenses publiques aux services publics.........................9

Schéma 2 : Le polymorphisme maillé du territoire camerounais............................48

Schéma 3 : Arbres à problèmes/transports urbains................................................. 52

Schéma 4 : Arbre à problèmes / gouvernance urbaine............................................53

Schéma 5 : Arbre à Problèmes / Urbanisme-Habitat-Cadre de vie.........................54

LISTE DES TABLEAUX


Tableau 1 : Données socio-économiques sur le Cameroun.....................................77

Tableau 2 : Forme logarithmiques des données socio-économiques sur le Cameroun


.................................................................................................................................78

Tableau 3 : régression du premier modèle dans Eviews......................................... 61

Tableau 4 : régression du deuxième modèle dans Eviews...................................... 62

Tableau 5 : Sens de causalité entre les variables LBIP, LPIB et LPOPTOTAL.....62

Tableau 6 : Sens de causalité entre les variables LBIP, LPIB et LPOPURB..........63

86

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