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Applications linéaires et matrices associées.

Introduction : Pour l’instant on a vu une matrice comme un tableau de chiffres avec des
lignes et des colonnes. Dans ce cas on peut voir la matrice comme représentant des vec-
teurs, c’est à dire chaque colonne représente un vecteur, donc ses coordonnées dans la base
canonique. On peut alors aussi, si on change de base et que l’on met dans les colonnes les
coordonnées des vecteurs dans la nouvelle base, dire que la matrice représente les vecteurs
dans cette nouvelle base.
Une matrice peut donc être vue comme représentant des vecteurs, et il faut alors dire dans
quelle base.
Une autre façon de voir les matrices est de les associer à des applications linéaires, c’est à
dire à des transformations de l’espace vectoriel composant des translations et des dilata-
tions. Cela permettra de comprendre les opérations que l’on peut faire subir à un tableau
de données, et aussi de voir comment cela opère sur les modèles probabilistes.

1 Application linéaire.

Définition 1 Soient E et F des espaces vectoriels. L’application f de E dans F est une


application linéaire si et seulement si :

∀X, Y ∈ E, f (X + Y ) = f (X) + f (Y )

∀X ∈ E, ∀α ∈ R f (αX) = αf (X)

Exemples et contre-exemples :
– Si U est un vecteur fixé de E, l’application qui à tout vecteur X de E associe f (X) =
hU, Xi est une application linéaire de E dans R.
– L’application de R2 dans R qui à tout vecteur X associe sa norme n’est pas une appli-
cation linéaire.

Proposition 1 Si f est une application linéaire de E dans F , alors l’image par f d’une
combinaison linéaire d’éléments de E est la combinaison linéaire des images par f de ces
éléments :

∀X1 , . . . , Xp ∈ E, ∀α1 , . . . , αp ∈ R f (α1 X1 + . . . + αp Xp ) = α1 f (X1 ) + . . . + αp f (Xp ).

1
se démontre par récurrence sur p à partir des propriéteś de la définition.
Application : Si E est de dimension n, et si B1 , . . . , Bn est une base de E, alors tout
vecteur X de E admet une décomposition unique sur cette base : X = α1 B1 + . . . + αn Bn ,
et si f est une application linéaire, l’image de X est la combinaison linéaire sur les images
de la base : f (X) = α1 f (B1 ) + . . . + αn f (Bn ). Donc :

Proposition 2 Une application linéaire de E dans F est entièrement déterminée par la


donnée des images des vecteurs d’une base de E.

Exemple :
Soit f de R3 dans R3 donnée par les images de la base canonique :
     
1 3 2
f (E1 ) =  2  , f (E2 ) =  1  , f (E3 ) =  1  ,
1 2 3
   
x1 x1 + 3x2 + 2x3
alors si X =  x2  = x1 E1 + x2 E2 + x3 E3 , alors f (x) =  2x1 + x2 + x3 .
x3 x1 + 2x2 + 3x3

2 Matrice associée à une application linéaire.

Soit f une application linéaire de E dans F , avec dim(E) = m et dim(F ) = n. On munit


E de la base BE = (U1 , . . . , Um ) et F de la base BF = (V1 , . . . , Vn ).
Pour connaitre f il suffit de connaitre les composantes des m vecteurs f (U1 ), . . . , f (Um )
dans la base BF . Donc f est caractérisée par n · m réels. Si
f (Uj ) = A1,j V1 + . . . + An,j Vn ,
la matrice A(f ) représentant f dans les bases BE et BF est :
 
A1,1 A1,2 · · · A1,j · · · A1,m
 A2,1 A2,2 · · · A2,j · · · A2,m 
A(f ) =  .
 
.. .. .. .. .. 
 .. . . . . . 
An,1 An,2 · · · An,j · · · An,m
n × m-matrice : dans les colonnes les composantes des f (Uj ) dans la base BF .
 
x1
Si les coordonnées de X dans la base BE sont  ...  et si les coordonnées de Y = f (X)
 

xm
 
y1
 .. 
dans la base BF sont  . , alors on a
yn
 
Xm Xn m
X
f (X) = xj f (Uj ) =  Ai,j xj  Vi
j=1 i=1 j=1

2
soit pour tout i = 1, . . . , n
m
X
yi = Ai,j xj
j=1
ce qui s’écrit :
 
  A1,1 A1,2 ··· A1,j ··· A1,m  
y1 x 1

 ..   A2,1 A2,2 ··· A2,j ··· A2,m 
  .. 
 . = .. .. .. .. .. ..  . 
 . . . . . . 
yn xm
An,1 An,2 · · · An,j ··· An,m

Exemples :
– Soit U est un vecteur fixé de E, et soit f l’application qui à tout vecteur X de E associe
f (X) = hU, Xi. Si l’on munit E d’une base orthonormée BE = (B1 , . . . Bm ), on sait
que si U1 , . . . , Um sont les coordonnées de U dans cette base et si X1 , . . . , Xm sont les
coordonnées de X dans cette base, ona f (X) = U1 X1 + . . . Um Xm . Si l’on choisit dans R
le vecteur de base (1), la matrice qui représente f dans les  bases B
E et (1) est la matrice
U1
1 × m ("vecteur ligne") (U1 , . . . Um ), soit le transposé de  ... .
 

Um
– Soit f l’application linéaire de R3 dans R3 telle que
   
x x+y+z
f ( y ) =  x + 2y + 3z  .
z 2x + 3y + 2z
Alors dans la base canonique la matrice représentant f est
 
1 1 1
 1 2 3 .
2 3 2
Si l’on munit maintenant R3 de la base B = (U1 , U2 , U3 ) avec
     
1 0 1
U1 =  1  , U2 =  1  , U3 =  0  ,
0 1 1
on a f (U1 ) = f (E1 )+f (E2 ) = 2E1 +3E2 +5E3 , f (U2 ) = f (E2 )+f (E3 ) = 2E1 +5E2 +5E3 ,
f (U3 ) = f (E1 ) + f (E3 ) = 2E1 + 4E2 + 4E3 , et la matrice représentant f dans la base B
et la base canonique est  
2 2 2
 3 5 4 .
5 5 4
On a aussi f (U1 ) = 3U2 + 2U3 , f (U2 ) = U1 + 4U2 + U3 , f (U3 ) = U1 + 3E2 + U3 , et la
matrice représentant f dans la base B est
 
0 1 1
 3 4 3 .
2 1 1

3
Il est donc indispensable de préciser les deux bases (de départ et d’arrivée) dans lesquelles
la matrice représente l’application !

3 Opérations.

3.1 Addition et multiplication par un réel.

Proposition 3 La somme de deux applications linéaires de E dans F est une application


linéaire de E dans F .
La multiplication d’une application linéaire de E dans F par un réel est une application
linéaire de E dans F .

Preuve :
Soient f et g deux applications linéaires de E dans F . Pour tous vecteurs X et Y de E,
on a

(f + g)(X + Y ) = f (X + Y ) + g(X + Y ) par définition de la somme de deux fonctions


= f (X) + f (Y ) + g(X) + g(Y ) car f et g sont linéaires
= (f + g)(X) + (f + g)(Y )

et de même pour tout réel α

(f + g)(αX) = f (αX) + g(αX)


= αf (X) + αg(X)
= α(f + g)(X).

Ensuite pour tout réel λ, pour tous vecteurs X et Y de E, on a

(λf )(X + Y ) = λf (X + Y ) par définition de la multiplication d’une fonction par un réel


= λ(f (X) + f (Y )) car f est linéaire
= (λf )(X) + (λf )(Y )

et de même pour tout réel α

(λf )(αX) = λf (αX)


= λαf (X)
= α(λf )(X).

On peut montrer :

Proposition 4 L’ensemble L(E, F ) des applications linéaires d’un espace vectoriel E dans
un espace vectoriel F muni de l’addition des fonctions et de la multiplication par un réel
est un espace vectoriel.

4
Addition des matrices et multiplication par un réel.
Soient f et g deux applications linéaires de E dans F et A et B les matrices qui les
représentent dans les bases BE et BF . Alors la matrice qui représente f + g est la matrice
A + B obtenue en additionnant terme à terme.
De même si λ est un réel, la matrice qui représente λf est la matrice λA obtenue en
multipliant chaque terme par λ.
On peut montrer :

Proposition 5 L’ensemble Mn,m des matrices n × m muni de l’addition et de la multi-


plication par un réel est un espace vectoriel.

3.2 Composition des applications et multiplication des matrices.

Proposition 6 La composition d’une application linéaire de E dans F et d’une application


linéaire de F dans G est une application linéaire de E dans G.

Preuve.
Soit f une application de E dans F et g une application de F dans G. L’application
composée g ◦ f associe à tout vecteur X de E le vecteur de G (g ◦ f )(X) = g[f (X)]. Soient
X et Y deux vecteurs quelconques de E. On a
(g ◦ f )(X + Y ) = g[f (X + Y )] par définition de la composition des fonctions
= g[f (X) + f (Y )] car f est linéaire
= g[f (X)] + g[f (Y )] car g est linéaire
= (g ◦ f )(X) + (g ◦ f )(Y ) par définition de la composition des fonctions.
De même pour tout réel α
(g ◦ f )(αX) = g[f (αX)] par définition de la composition des fonctions
= g[αf (X)] car f est linéaire
= αg[f (X)] car g est linéaire
= α(g ◦ f )(X); par définition de la composition des fonctions.

Si dim(E) = m, dim(F ) = n et dim(G) = p, si BE = (U1 , . . . , Um ), BF = (V1 , . . . , Vn ),


BG = (W1 , . . . , Wp ) sont des bases de E, F , et G, si A est la matrice n × m qui représente
f dans les bases BE et BF , et B la matrice p × n qui représente g dans les bases BF et BG ,
soit C la matrice p × m qui représente g ◦ f dans les bases BE et BG . Alors les colonnes
de C sont les coordonnées dans BG des images des vecteurs de BE par g ◦ f .
 
Xn
(g ◦ f )(Uk ) = g  Aj,k Vj 
j=1
n
X
= Aj,k g(Vj )
j=1
n
X p
X
= Aj,k Bi,j Wi
j=1 i=1

5
Pn
ce qui montre que le terme d’indice i, k de C est j=1 Bi,j Aj,k .
Produit de matrices.
On appelle alors produit de B par A et on note BA la matrice C ci-dessus. Autrement
dit, si B est une matrice p × n et A une matrice n × m, BA est la matrice p × m de terme
général
n
X
(BA)i,k = Bi,j Aj,k .
j=1
Exemple :
Soit E de dimension 2 de base BE = (U1 , U2 ). Soit f l’application linéaire donnée par
f (U1 ) = U2 et f (U2 ) = −U1 + 4U2 . Soit g l’application linéaire donnée
 par g(U1 ) = U1 − U2
0 −1
et g(U2 ) = 2U1 − 4U2 . Dans BE la matrice représentant f est A = , la matrice
1 4
 
1 2
représentant g est B = .
−1 −4
La matrice représentant g ◦ f est
    
1 2 0 −1 2 7
BA = =
−1 −4 1 4 −4 −15
et la matrice représentant f ◦ g est
    
0 −1 1 2 1 4
AB = = .
1 4 −1 −4 −3 −14
Sur cet exemple, on voit que le produit de matrice n’est pas commutatif.

3.3 Transposition

Soit A une matrice m × n. La matrice AT est la matrice n × m dont les colonnes sont les
lignes de A, autrement dit dont le terme général est donné par
AT i,j = Aj,i .


On a T
AT = A,
et l’on vérifie facilement que si B est une matrice p × n et A une matrice n × m, (BA)T
est une matrice m × p et
(BA)T = AT B T .
En effet, pour tout i = 1, . . . , m et j = 1, . . . , p :
(BA)T i,j = (BA)j,i


n
X
= Bj,k Ak,i
k=1
n
X
= (AT )i,k (B T )k,j
k=1
T
A BT

= i,j

6
Si l’on interprète A comme représentant une application linéaire f de Rn dans Rm alors
AT représente une application linéaire f ∗ de Rm dans Rn qui vérifie :
∀X ∈ Rn , ∀Y ∈ Rm , hf (X), Y i = hX, f ∗ (Y )i.
En effet, hf (X), Y i = (AX)T Y = X T AT Y = hX, f ∗ (Y )i.

4 Image et noyau.

Définition 2 Si f est une application linéaire de E dans F , l’image de f , notée Im(f )


est l’ensemble des vecteurs f (X) où X parcourt E :
Im(f ) = {f (X) : X ∈ E} = {Y ∈ F : ∃X ∈ E, Y = f (X)}.
Le noyau de f , noté Ker(f ), est l’ensemble des vecteurs X dont l’image par f est le vecteur
nul de F :
Ker(f ) = {X ∈ E : f (X) = 0}.

Exemples :    
x x + y + 2z
– Soit f de R3 dans R3 donnée par f  y  =  x + 2y + 3z .
z 2x + 3y + 5z
Im(f ) est l’ensemble des vecteurs de la forme
           
x + y + 2z 1 1 2 1 1
 x + 2y + 3z  = x  1  +y  2  +z  3  = (x+z)  1  +(y +z)  2  .
2x + 3y + 5z 2 3 5 2 3
   
1 1
Im(f ) est donc engendré par  1  et  2  qui sont linéairement indépendants,
2 3
donc Im(f ) est un plan de R .3
 
x
Ker(f ) est l’ensemble des vecteurs  y  tels que
z

 x + y + 2z = 0
x + 2y + 3z = 0
2x + 3y + 5z = 0

 
1
soit x = y = −z, c’est la droite engendrée par  1 .
−1
 
x  
3 2 x−y+z
– Soit g de R dans R donnée par g  y  = .
2x − z
z
Im(g) est l’ensemble des vecteurs de la forme
           
x−y+z 1 −1 1 z 1 3z −1
=x +y +z = (x− ) +(y − ) .
2x − z 2 0 −1 2 2 2 0

7
   
1 −1
Im(g) est donc engendré par et qui sont linéairement indépendants,
2 0
donc Im(g) = R2 .  
x
Ker(g) est l’ensemble des vecteurs  y  tels que
z

x−y+z =0
2x − z = 0
 
1
soit z = 2x et y = 3x, c’est la droite engendrée par  3 .
2

Proposition 7 Si f est une application linéaire de E dans F , Im(f ) est un sous espace
vectoriel de F et Ker(f ) est un sous espace vectoriel de E.

Preuve :
Si Y1 et Y2 sont deux éléments de Im(f ), il existe X1 et X2 vecteurs de E tels que
f (X1 ) = Y1 et f (X2 ) = Y2 . On a alors Y1 + Y2 = f (X1 ) + f (X2 ) = f (X1 + X2 ) car f est
linéaire, et donc (Y1 + Y2 ) ∈ Im(f ).
Si maintenant α est un réel, αY1 = αf (X1 ) = f (αX1 ) et donc αY1 ∈ Im(f ). Im(f ) est
donc un sous-espace vectoriel de F .
De même, si X1 et X2 sont deux éléments de Ker(f ), alors f (X1 ) = 0 et f (X2 ) = 0. On
a alors 0 = f (X1 ) + f (X2 ) = f (X1 + X2 ), et donc (X1 + X2 ) ∈ Ker(f ).
Si maintenant α est un réel, f (αX1 ) = αf (X1 ) = 0 et donc αX1 ∈ Ker(f ). Ker(f ) est
donc un sous-espace vectoriel de E.

Théorème 1 Si f est une application linéaire de E dans F , alors

dim(Im(f )) + dim(Ker(f )) = dim(E)

Preuve :
Soit f une application linéaire de E dans F , soit p la dimension de E et m la dimension
de Ker(f ). Soit B1 , . . . , Bp une base de E telle que B1 , . . . Bm soit une base de Ker(f ).
Pour tous réels α1 , . . . , αp , f (α1 B1 +. . .+αp Bp ) = α1 f (B1 )+. . .+αp f (Bp ) = αm+1 f (Bm+1 )+
. . . + αp f (Bp ) (= 0 si p = m).
Si Y est dans Im(f ), il existe un vecteur X de E tel que f (X) = Y , et donc des réels
αm+1 , . . . , αp tels que Y = αm+1 f (Bm+1 ) + . . . + αp f (Bp ). Donc f (Bm+1 ), . . . , f (Bp ) en-
gendrent Im(f ). Si ces vecteurs étaient liés, il existerait des réels βm+1 , . . . , βp non tous nuls
tels que βm+1 f (Bm+1 ) + . . . + βp f (Bp ) = 0, donc tels que f (βm+1 Bm+1 + . . . + βp Bp ) = 0,
soit tels que βm+1 Bm+1 + . . . + βp Bp ∈ Ker(f ), donc combinaison linéaire de B1 , . . . , Bm ,
ce qui est impossible puisque B1 , . . . , Bp est une base de E. Donc f (Bm+1 ), . . . , f (Bp )
forme une base de Im(f ), et la dimension de Im(f ) est p − m.

8
Définition 3 On appelle rang d’une application linéaire f (ou rang d’une matrice A) la
dimension de l’image de f (ou de l’application linéaire que représente A)

Remarques :
1. Une matrice peut toujours représenter une application linéaire (prendre les bases
canoniques). La dimension de l’image ne dépend pas du choix de la base !
2. Pour une matrice A n × m, on a rg(A) ≤ m (pas plus de m colonnes) et rg(A) ≤ n
(pas plus de n vecteurs linéairement indépendants en dimension n).
3. rg(A) = rg(AT ) (résultat admis) : donc on peut aussi regarder combien de lignes
sont linéairement indépendantes.
Reprise des exemples :
– La matrice représentant f est  
1 1 2
A= 1 2 3 
2 3 5
et l’on voit rg(A) = 2, donc dim(Ker(f )) = 1.
– La matrice représentant g est
 
1 −1 1
B=
2 0 −1

et l’on voit rg(A) = 2, donc dim(Ker(f )) = 1.

Définition 4 Une application f de E dans F est dite :


– injective si et seulement si tout élément de F a au plus un antécédent dans E, ou encore
si et seulement si : (X ∈ E, X 0 ∈ E, f (X) = f (X 0 )) =⇒ (X = X 0 ),
– surjective si et seulement si tout élément de F a au moins un antécédent dans E, c’est
à dire si et seulement si Im(f ) = F .
– bijective si elle est injective et surjective, soit si tout élément de F a exactement un
antécédent dans E.

Remarque : Si une application est bijective, alors on peut l’ inverser : il existe une fonction
f −1 de F dans E telle que f −1 ◦ f = IE et f ◦ f −1 = IF .

Proposition 8 Soit f : E → F une application linéaire.


1. f est injective si et seulement si Ker(f ) = {0}.
2. f est injective si et seulement si Rang(f ) = dim(E).
3. f est surjective si et seulement si Rang(f ) = dim(F ).
4. f est bijective si et seulement si Rang(f ) = dim(F ) = dim(E).

Preuve :

9
1. Si f est injective, alors 0 est l’unique antécédent de 0, donc Ker(f ) = {0}. Récipro-
quement, supposons Ker(f ) = {0}. Soient X et X 0 tels que f (X) = f (X 0 ). Alors
f (X − X 0 ) = f (X) − f (X 0 ) = 0, donc (X − X 0 ) ∈ Ker(f ), donc X − X 0 = 0, et f
est injective.
2. f est injective si et seulement si Ker(f ) = {0}, donc si et seulement si dim(Ker(f )) =
0 donc si et seulement si Rang(f ) = dim(E) par le théorème des dimensions.
3. f est surjective si et seulement si Im(f ) = F , donc si et seulement si Rang(f ) =
dim(F ) puisque Im(f ) est un sous-espace vectoriel de F .
4. En appliquant 2. et 3., f est bijective si et seulement f est injective et surjective
donc si et seulement si Rang(f ) = dim(F ) = dim(E).
Exemples :
Dans les exemples précédents : f n’est ni injective ni surjective ; g est surjective et pas
injective.

5 Endomorphismes et matrices carrées.

Définition 5 On appelle endomorphisme de E une application linéaire de E dans E. La


matrice associée est carrée n × n si dim(E) = n.

Proposition 9 Un endomorphisme de E est bijectif si et seulement si il est injectif ou


encore si et seulement si il est surjectif.

Si f est un endomorphisme de E bijectif, alors son inverse f −1 existe.

Proposition 10 si f est un endomorphisme de E bijectif, alors son inverse f −1 est un


endomorphisme bijectif de E d’inverse f .

Preuve :
Montrons que f −1 est une application linéaire. Soient Y1 et Y2 deux vecteurs de E. Soient
X1 et X2 leur unique antécédant par f , autrement dit tels que f −1 (Y1 ) = X1 et f −1 (Y2 ) =
X2 . Alors f −1 (Y1 + Y2 ) = f −1 (f (X1 ) + f (X2 )) = f −1 (f (X1 + X2 )) car f est linéaire, et
f −1 (f (X1 +X2 )) = X1 +X2 par définition de f −1 . Donc f −1 (Y1 +Y2 ) = f −1 (Y1 )+f −1 (Y2 )
De la même façon, si α est un réel quelconque, f −1 (αY1 ) = f −1 (αf (X1 )) = f −1 (f (αX1 )) =
αX1 = αf −1 (Y1 ). Donc f −1 est un endomorphisme de E. Le reste découle du fait que
f ◦ f −1 = IE .
Si E est muni d’une base et que A est la matrice n × n qui représente f , la matrice B qui
représente f −1 vérifie, du fait que le produit des matrices représente la composition des
applications : A·B = B ·A = In ; on la note A−1 : c’est l’inverse de A pour la multiplication
des matrices.
Exemple : 
  
x x+y+z
Soit f de R3 dans R3 donnée par f  y  =  x + 2y + 3z .
z 2x + 3y + 2z

10
 
x
Ker(f ) est l’ensemble des vecteurs  y  tels que
z

 x+y+z =0
x + 2y + 3z = 0
2x + 3y + 2z = 0

soit x= y =
 z = 0,  f est injective, donc bijective.
 donc
x0 x
Soit  y 0  = f  y , donc tel que
z0 z
 0
 x =x+y+z
y 0 = x + 2y + 3z
 0
z = 2x + 3y + 2z

qui donne
 x = 12 (5x0 − y 0 − z 0 )

y = 21 (−4x0 + 2z 0 )
z = 12 (x0 + y 0 − z 0 )

   1 
x 2 (5x − y − z)
et l’inverse de f est donnée par f −1  y  =  12 (−4x + 2z) .
1
z 2 (x + y − z)
   5 −1 −1 
1 1 1 2 2 2
L’inverse de la matrice  1 2 3  est la matrice  −2 0 1 .
1 1 −1
2 3 2 2 2 2

6 Changement de base.
 
x1
Si B = (B1 , . . . , Bn ) est une base de Rn , si le vecteur X a pour coordonnées  ...  dans
 

xn
la base E = (E1 , . . . , En ), l’application f qui à X associe ses coordonnées dans la base B
est une application linéaire de Rn dans Rn , de matrice représentative dans les bases E et
B la matrice A dont les colonnes sont les coordonnées des Ej dans la base B.
En effet, soit A1,j , . . . , An,j les coordonnées de Ej dans la base B. On a
n
X n
X n
X
X= xj Ej = xj Ai,j Bi
j=1 j=1 i=1

11
 
y1
et donc, si f (X) =  ... , c’est à dire si X =
Pn
i=1 yi Bi , on a pour tout i yi =
 

Pn yn
j=1 Ai,j xj , et donc
    
y1 A1,1 . . . A1,n x1
 ..   .. .. ..   ..  .
 . = . . .  . 
yn An,1 . . . An,n xn

Par ailleurs, réciproquement, l’application qui associe pour tout vecteur X ses coordonnées
dans la base E à ses coordonnées dans la base B est l’application linéaire inverse de f , et
la matrice qui la représente dans les bases B et E est la matrice dont les colonnes sont les
coordonnées des Bj dans la base E. Mais cette matrice est la matrice inverse de A, donc :

Proposition 11 Si une matrice A a pour colonnes les coordonnées des vecteurs d’une base
E dans une autre base B, alors A est inversible et A−1 a pour colonnes les coordonnées
des vecteurs de B dans la base E.

Exemple :    
1 1
Soit B la base de R2formée par les vecteurs B1 = et B2 = . On a E1 =
−1 2
 1 1

1 1 3 3
3 (B1 + 2B2 ) et E2 = 3 (B1 − B2 ). Donc l’inverse de la matrice A = 2 1 est la
  3 −3
1 1
matrice A−1 = .
2 −1

Proposition 12 Soit E et B deux bases de Rn , et A la matrice dont les colonnes contiennent


les coordonnées des vecteurs de la base E dans la base B. Soit f un endomorphisme de Rn ,
et M sa matrice dans la base E. Alors la matrice de f dans la base B est M 0 = AM A−1 .

Preuve : Exercice 18.


Si maintenant les deux bases sont orthonormées, et si l’on calcule AT A, à la place i, j :
n
X n
X
AT A (AT )i,k Ak,j =

i,j
= Ak,i Ak,j = hEi , Ej i
k=1 k=1

car la base B est orthonormée (puisque son calcul ne change pas si on prend les coordonnées
dans une base orthonormée ), et comme la base E est orthonormée, (AT A)i,j = 1 si i = j
et (AT A)i,j = 0 si i 6= j, donc AT A = In , donc :

Proposition 13 Si A est une matrice n × n dont les colonnes sont les coordonnées d’une
base orthonormée dans une autre base orthonormée, alors A−1 = AT , et donc AT A =
AAT = In .

12
7 Projection orthogonale (bis).

Soit D une droite de Rn , engendrée par le vecteur U de norme 1.


Pour tout vecteur X de Rn , la projection orthogonale de X sur D est :

P (X) = hX, U iU

et la fonction P qui à X associe sa projection orthogonale P (X) est une application linéaire
de Rn dans D.
On peut aussi considérer P comme une application linéaire de Rn dans Rn .
De manière générale, si E est un sous espace vectoriel de Rn , définissons l’orthogonal de
E par
E ⊥ = {X ∈ Rn : ∀U ∈ E, hX, U i = 0} .
C’est un sous-espace vectoriel de Rn (exercice : le démontrer), et on a :

Proposition 14 La fonction P qui à tout vecteur X associe sa projection orthogonale


P (X) sur E est une application linéaire de Rn dans Rn dont l’image est E et dont le
noyau est E ⊥ .

Preuve :
Soit p la dimension de E, et soit B = (B1 , . . . , Bn ) une base orthonormée de Rn telle que
B1 , . . . , Bp soit une base de E. Alors Bp+1 , . . . , Bn est une base orthonormée de E ⊥ . En
effet, pour tout X de Rn , la décomposition de X sur la base B est
n
X
X= hX, Bi iBi .
i=1

Si X ∈ E ⊥ , pour tout i = 1, . . . , p, Bi ∈ E et hX, Bi i = 0, donc X est combinaison linéaire


de Bp+1 , . . . , Bn qui forment donc un système générateur de E ⊥ . Comme par ailleurs ils
sont linéairement indépendants, ils forment une base de E ⊥ , qui est orthonormée.
Maintenant P (X) est le vecteur de E tel que X − P (X) est orthogonal à E, autrement dit
tel que (X − P (X)) ∈ E ⊥ . On obtient donc facilement (exercice : le démontrer) que
p
X
P (X) = hX, Bi iBi .
i=1

On voit donc facilement (exercice : le démontrer) que P est une application linéaire, et que
P (X) = 0 si et seulement si hX, B1 i = · · · = hX, Bp i = 0, donc Ker(P ) est l’ensemble des
vecteurs du sous espace engendré par Bp+1 , . . . , Bn , c’est à dire E ⊥ .
Il est clair que Im(P ) ⊂ E. Par ailleurs tout vecteur de E est sa propre projection ortho-
gonale, donc Im(P ) = E.

13
Si A est la matrice qui représente la projection P dans la base B1 , . . . , Bn , on a
 
0 ... 0

Ip .. .. 

 . ... . 
 0 ... 0 
A=  0 ... 0

 0 ... 0  
 .. .. .. 
 . ... ... . ... . 
0 ... 0 0 ... 0

Si par contre on veut représenter P dans une autre base, on verra cela plus loin.

8 Exercices

Exercice 1
Déterminer si les applications suivantes sont des applications linéaires de E dans F (on
écrit les vecteurs en ligne) :
1. E = R2 ; F = R ; f (x, y) = x − y
2. E = R2 ; F = R ; f (x, y) = xy
3. E = R ; F = R3 ; f (x) = (x, 2x, x − 1)
4. E = R3 ; F = R3 ; f (x, y, z) = (2x, y + z, 2x + 5y − z)
5. E = R3 ; F = R3 ; f (x, y, z) = (x + 1, y + 2, z + 3)

Exercice 2
On considère les applications f de E dans F suivantes :
1. E = R3 , F = R2 , f (x, y, z) = (x + 2y + z, 2x + 4y + 2z) ;
2. E = R2 , F = R3 , f (x, y) = (2x, −x − y, y) ;
(on écrit les vecteurs en ligne). Dans chaque cas :
– Montrer que f est linéaire et préciser sa matrice associée dans les bases canoniques de
E et F .
– Déterminer Ker(f ) et Im(f ). En déduire si f est injective, surjective ou bijective.

Exercice 3
On considère les espaces vectoriels E et F suivants et f une application linéaire de E dans
F :
(i) E = R2 et F = R2 ; (ii) E = R2 et F = R3 ; (iii) E = R3 et F = R2 .
Dans chaque cas, donner tous les cas possibles pour dim(Ker(f )) et dim(Im(f )) et préciser
ceux où f est injective, surjective ou bijective. Donner à chaque fois un exemple pour f.

Exercice 4
Déterminer dans la base canonique, les matrices associées aux applications linéaires sui-
vantes :
1. f de R2 dans R définie par f (x, y) = x − y ;

14
2. f de R3 dans R3 définie par f (x, y, z) = (2x, y + z, 2x + 5y − z)

Exercice 5
Soit f de 3[X] dans 3[X] qui à P (X) associe XP 0 (X). (On rappelle que 3[X] désigne l’espace
vectoriel des polynômes de degré 3)
1. Montrer que (1, X, X 2 , X 3 ) est une base de 3[X].
2. Montrer que f est une application linéaire.
3. Ecrire la matrice de f dans la base (1, X, X 2 , X 3 ).

Exercice 6
Soit f l’application linéaire de R3 dans R2   exprimée de la base (E1 , E2 , E3 )
dont la matrice
1 2 −1
de R3 dans la base (E10 , E20 ) de R2 est . Soient x, y et z réels. Calculer
2 −3 2
f (xE1 + yE2 + zE3 ) en fonction de E10 et E20 .

Exercice 7   
1 −1 3 −2
Soient A = et B = . Calculer AB et BA. Que peut-on en conclure ?
2 2 3 4

Exercice 8
Pour les matrices A et B suivantes, calculer AB.
   
1 −1 3 −3 0 5
1. A = et B = ;
0 15 2 −3 6 −9
 
1 3  
0 2 3
2. A = 2 2 et B =
  ;
4 1 1
0 1
   
0 1 1 1 4 3
3. A = 1 2 0 et B = 5 0 10 ;
2 4 3 2 1 1

Exercice9 
cos(θ) − sin(θ)
Soit R = . Déterminer RT , puis calculer RRT .
sin(θ) cos(θ)

Exercice 10
Soient f et g les applications linéaires suivantes de R2 dans R2 : f (x, y) = (2x + y, 2y) et
g(x, y) = (x − y, x).
1. Exprimer l’application linéaire g ◦ f définie de R2 dans R2 .
2. Soient A la matrice associée à f dans la base canonique, B la matrice associée à g
dans la base canonique et C celle de g ◦ f . Déterminer A, B et C.
3. Calculer BA. Pouvait-on s’attendre à ce résultat ?

15
Exercice 11
Construire une base du noyau et de l’image del’application 3 3
 linéaire de R dans R dont la
1 2 −1
matrice associée dans la base canonique est : 3 1 7 .
2 1 4

Exercice 12  
2 1 −1
La matrice A =  1 −1 0  est-elle inversible ?
−1 −2 −1

Exercice  13 
1 2
Soit M = la matrice d’une application linéaire de R2 dans R2 exprimée dans la
3 −1
base (E1 , E2 ). Ecrire la matrice de f dans la base (E10 , E20 ) définie par E10 = E1 + E2 et
E20 = E1 − E2 .

Exercice 14
Soit E = R3 . Soit B la base canonique de E et soit B 0 la base de E formée des vecteurs
suivants :      
−1 3 2
V1 =  1 , V2 = 2 , V3 = 1 .
   
−3 1 1
 
5
1. Ecrire le vecteur 1 dans la base B 0 .

2
2. Calculer la matrice dans la base B 0 de l’application linéaire f de E dans E, définie
par f (x, y, z) = (2x + z, x − 3y, −x + z).
3. Calculer la matrice de l’application linéaire g de E dans E définie par g(Vi ) = iVi ,
i = 1, 2, 3, dans les bases B et B 0 . ( g est-elle bien définie ?)

Exercice 15 
1
Soit D la droite de R3 engendrée par le vecteur −1. Soit G l’orthogonal de D.
0
1. Démontrer que G est un sous-espace vectoriel de R3 .
2. Déterminer une base orthonormée de G.
3. Soit P la projection orthogonale sur G. Donner la représentation matricielle de P
dans la base canonique de R3 .

Exercice 16      
1 −1 1
Soient les vecteurs de R3 : U = 1, V =  0  et W = 1.
0 1 1

16
1. Montrer que U, V, W forment une base de 3.
 
x
2. Quelles sont les coordonnées du vecteur X = y  dans cette base ?
z
3. Soitf l’application 3 3
 linéaire de R dans R dont la matrice dans la base canonique
0 1 −1
est −1 2 −1. Quel est le noyau de f ?
−1 1 0
4. Montrer que f (U ) = U et f (V ) = V . Quelle est l’image de f ?
5. Montrer que si X = αU + βV + γW , alors f (X) = αU + βV . Interpréter f comme
une projection.

Exercice 17
Soit dans R3 le plan P d’équation 2x − y + 3z = 0. Donner la matrice de la projection
orthogonale sur P, dans la base canonique.

Exercice 18
Soient B = (B1 , . . . , Bn ) et C = (C1 , . . . , Cn ) deux bases de Rn , et A la matrice dont les
colonnes sont les coordonnées des Bj dans la base C.
 (B)   (C) 
x1 x1
n (B)  ..  (C)  .. 
1. Soit X un élément de R . On note X =  .  et X =  .  les
(B) (C)
xn xn
vecteurs des coordonnées de X respectivement dans les bases B et C :
n n
(B) (C)
X X
X= xi Bi et X= x i Ci .
i=1 i=1

Pour j entre 1 et n, écrire le vecteur Bj comme combinaison linéaire des vecteurs


(C) (B)
Ci , 1 ≤ i ≤ n. En déduire une écriture des xi , 1 ≤ i ≤ n en fonction des xj , 1 ≤
j ≤ n.
2. Écrire X (C) en fonction de X (B) (donner une relation matricielle).
3. Réciproquement, peut-on écrire X (B) en fonction de X (C) ?
4. Soit f un endomorphisme de Rn , et soit M la matrice de f dans la base B.
Soit Y = f (X). On note comme ci-dessus Y (B) et Y (C) les vecteurs des coordonnées
de Y respectivement dans les bases B et C.
Quelles relations y a-t-il entre Y (C) et Y (B) ?
5. Énoncer une relation matricielle entre X (B) et Y (B) . En déduire une relation matri-
cielle entre X (C) et Y (C) .
6. Quelle est la matrice de f dans la base C ?

17

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