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Les giratoires en béton

André Jasienski,
ingénieur, directeur promotion,
recherches et développement
FEBELCEM, Bruxelles (B)

En Belgique, fin des années 1980, profitant de l’expérience d’autres pays européens notam-
ment de l’Angleterre et de la France, la gestion du trafic dans les carrefours a été organisée
par des giratoires.
La gestion des giratoires peut toutefois s’avérer complexe et nous n’avons pas toujours
cherché la difficulté, comme le montrent ces deux photos. En effet, on n’oserait imaginer ce
type de carrefour à Bruxelles avec en prime notre signalisation bilingue.

Le présent exposé traitera principalement des points suivants:


• les sollicitations spécifiques des giratoires
• le choix du revêtement
• les revêtements en dalles de béton
• le béton armé continu
• les points particuliers.

Rapidement, sur les carrefours sollicités par un trafic lourd et dense sont apparues des
dégradations importantes des revêtements.
Nous ne ferons pas un exposé sur le calcul des sollicitations propres aux giratoires mais
les deux diagrammes suivants illustrent d’une part les sollicitations spécifiques à l’approche
du giratoire et d’autre part la différence entre les sollicitations d’une chaussée en alignement
droit et dans l’anneau d’un giratoire. On peut constater qu’outre le transfert d’une partie de la
charge sur la roue extérieure, la force centrifuge induit un effort horizontal sur le revêtement.

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Les conséquences de ces sollicitations sont: un orniérage du revêtement, un glissement de
la couche de roulement, un arrachement des granulats en surface, voire même, un faïençage
par défaut de portance de la chaussée au droit du passage des roues extérieures des véhi-
cules.

Pourquoi prévoir un revêtement en béton?


• Le revêtement des voies d’accès et de l’anneau doit résister à l’orniérage, aux sollicitations
dynamiques des charges lourdes à vitesse réduite, à l’érosion, aux cycles de gel-dégel
en présence de sels de déverglaçage,...
• Le matériau doit s’adapter aux contraintes de mise en œuvre, rapidité d’exécution,
phasage, géométrie de l’ouvrage,...
• De plus, le revêtement doit répondre à des exigences de sécurité, adhérence, maintien
de l’uni transversal, clarté,...
• Enfin, il doit aussi satisfaire aux exigences d’exploitation, contraintes d’entretien limitées,
nettoyage, marquage, ... et limiter au maximum les gênes à l’usager.

La première solution adoptée consiste à construire ces giratoires en dalles de béton. De


nombreux exemples existent déjà en Belgique mais également dans d’autres pays tels que la
Hollande, l’Autriche, mais aussi l’Australie,... La présence des joints devra alors être soigneu-
sement étudiée. En Belgique, des giratoires en dalles armées ont déjà été réalisés comme à
Scherpenheuvel où l’auteur de projet a utilisé des bétons de couleur différente.
Parmi les différents types de joints, nous citerons les joints transversaux de retrait, de dilata-
tion et de construction. Les joints longitudinaux sont principalement de deux types, les joints
de flexion et ceux de construction.
Le schéma des joints nécessite une étude préalable détaillée et ne peut en aucun cas être
improvisé sur chantier. Deux exemples illustrent ces difficultés. La présence d’angles aigus
doit à tout prix être proscrite au risque de voir des dalles se rompre.
Au vu de ces constatations et devant construire un giratoire sur un itinéraire particulièrement
sollicité: sortie d’une carrière, d’une cimenterie et d’une zone industrielle dans laquelle sont
installées notamment une centrale à béton et une centrale d’enrobage, soit en période de
pointe ± 200 poids lourds à l’heure, la Direction des Routes de Mons du Ministère wallon de
l’Equipement et des Transports a envisagé en 1993 la construction d’un giratoire dont le revê-
tement serait en béton armé continu.

Pourquoi construire un giratoire en béton armé continu?


• Les armatures transversales permettent de reprendre les efforts radiaux de poussée au vide
• Les armatures longitudinales permettent de supprimer les joints de retrait et donc d’éviter
les charges de coin.

La présente communication s’attardera plus sur la conception et la réalisation de ces


ouvrages en béton armé continu, car ils ont été mis au point en Belgique et que le pays en
compte aujourd’hui plus de trente.
Sur le profil en travers type retenu pour les différents giratoires étudiés et construits depuis
1993, on peut constater la surépaisseur de la fondation en béton maigre sur la partie exté-
rieure de l’anneau. Cette surépaisseur permet de renforcer la structure de la chaussée dans
sa zone la plus sollicitée. L’importance de cette surépaisseur est déterminée par un calcul de
dimensionnement. Ce dimensionnement doit être adapté aux circonstances locales de
chaque carrefour.

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Réalisation sur chantier des giratoires en BAC
Je ne mentionnerai dans cet exposé que les particularités du BAC dans les giratoires.
Toutes les règles de l’art propres au BAC classique sont bien entendu applicables également
aux giratoires.
Différents aspects seront abordés: les coffrages, le ferraillage, le bétonnage manuel ou à la
machine à coffrages glissants ainsi que divers points particuliers.
Si le bétonnage est réalisé au moyen d’une machine à coffrages glissants le revêtement est
bétonné avant les éléments linéaires.
Si le bétonnage est réalisé au moyen d’une poutre vibrante, les éléments linéaires peuvent
servir de coffrage tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de l’anneau. Au droit des accès le coffrage
est réalisé au moyen d’éléments; de madriers de 50 cm à un mètre de longueur et de hauteur
égale à l’épaisseur du béton à mettre en œuvre. Ces madriers sont solidarisés au moyen
d’attaches à incruster dans le bois pour permettre le glissement parfait de la poutre vibrante.

Le ferraillage
• L’armature longitudinale suit parfaitement la courbure du giratoire. Pour conserver l’angle
de recouvrement alpha avec la perpendiculaire à la tangente (le rayon) à l’axe de la voirie,
il y a lieu d’augmenter la longueur de recouvrement à l’intérieur de l’anneau.
• L’armature transversale fait un angle de 60° avec la tangente à l’axe de la voirie. Afin
d’éviter un espacement trop grand à l’extérieur de l’anneau, l’écartement de 70 cm entre
deux transversales est mesuré au 1/3 de la largeur de l’anneau à partir du bord extérieur.

De plus, lors de la construction de giratoire de plus de 20 m de rayon intérieur, une barre


transversale complémentaire est mise en œuvre sur le demi anneau extérieur afin d’éviter un
changement brusque de section d’acier. Ces armatures complémentaires sont décalées d’un
mètre.

Le bétonnage
• à la poutre
Cette technique a le plus souvent été utilisée compte tenu de la possibilité d’adapter une
poutre vibrante à la largeur de bétonnage. Cette poutre glisse à l’intérieur de l’anneau sur
la bordure du semi-franchissable ou sur la bordure intérieure du rond-point. Afin de corriger
les éventuelles dénivellations de ces bordures, la poutre vibrante prend appui sur la bordure
par l’intermédiaire d’une poutre articulée de 2 m minimum de longueur. La hauteur de la
poutre par rapport à la bordure doit pouvoir être réglée pour l’adapter à la saillie imposée à
la bordure.
Après mise en œuvre et nivellement du béton par une grue, et avant le passage de la poutre
vibrante, le béton est vibré au moyen d’aiguilles vibrantes; il est conseillé de prévoir une
aiguille vibrante par 1,50 m de largeur de bétonnage.
La raclette lisseuse permet de faire disparaître les petites dénivellations dues aux arrêts de
la poutre.

• à la machine à coffrages glissants


Cette technique de bétonnage pose plusieurs problèmes. Il faut disposer d’une machine
pouvant bétonner sur 8 voire même 9 m de largeur pour les giratoires de grande dimension.
Les amorces des voies d’entrée et de sortie sont difficilement réalisées dans la même phase.
Si le giratoire se bétonne en une seule journée, le nettoyage de la machine en fin de béton-
nage doit s’exécuter sur le revêtement non entièrement durci et la machine est bloquée sur
le giratoire pendant quelques jours, le temps nécessaire au béton pour atteindre une résis-
tance suffisante pour être circulé.

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Quelques mesures particulières

Le bétonnage en une phase et une journée


La fermeture du bétonnage de l’anneau se réalisant sur un béton non encore durci, il y a lieu
de prévoir une passerelle pour permettre la finition du joint sans marcher dans le béton. De
plus, si le bétonnage est supérieur â 150 m3, deux équipes sont nécessaires, elles se relaie-
ront après ± 10 heures de travail.

Le bétonnage en deux phases


Si pour des raisons de circulation, le carrefour ne peut être isolé, le bétonnage en deux pha-
ses peut être envisagé. Que le bétonnage soit réalisé au moyen d’une machine à coffrages
glissants ou d’une poutre vibrante, les deux extrémités du revêtement doivent alors être char-
gées pour éviter les mouvements importants d’extrémités dus au retrait et aux variations de
température; le chargement préconisé s’effectue sur toute la largeur du revêtement, sur une
épaisseur minimum de 50 cm et une longueur de 15 m. En cas de manque de place, cette
longueur peut être réduite pour autant que l’épaisseur du chargement soit augmentée. Une
poutre (ou culée) d’ancrage peut remplacer le chargement.

Le bétonnage par temps chaud


Les précautions nécessaires à tout bétonnage par temps chaud doivent être prises. Toutefois
les conséquences d’une variation importante de température sur le ferraillage de l’anneau se
manifestent par un déplacement radial des armatures; il y a lieu de refroidir le support et les
aciers pendant le bétonnage. La protection comme pour un bétonnage classique doit être
réalisée au plus tôt pour éviter l’évaporation de l’eau de surface.

Le bétonnage des accès


Les accès à un carrefour giratoire constituent toujours des zones particulièrement sollicitées
(freinage, accélération, efforts tangentiels). Il est donc aussi souhaitable de réaliser le revête-
ment des accès en béton armé. Dans ce cas il y a lieu d’ancrer l’accès à l’anneau pour assurer
la continuité du revêtement en béton.
Si l’on ne dispose pas d’une poutre vibrante à largeur variable, un des côtés de l’accès doit
être coffré afin de permettre à Ia poutre de surplomber le coffrage dans la zone rétrécie. Par
contre, si la mise en oeuvre est réalisée avec une poutre à largeur variable, le bétonnage peut
se réaliser entre éléments linéaires.
L’accès au carrefour giratoire peut être accentué par une modification de la couleur du béton
(bétonnage béton frais sur béton frais).

Pour conclure, je vous dirai que depuis, le premier carrefour giratoire, réalisé fin mai 95, plus
de 30 anneaux en béton armé continu ont été réalisés.
En fonction des difficultés ou des contraintes rencontrées sur chacun des chantiers, la tech-
nique de mise en oeuvre a été affinée.

Les giratoires en béton offrent en tout cas:


• une résistance efficace aux sollicitations
• des solutions variées telles que des dalles en béton ou du béton armé continu,
le travail en faibles ou grands rayons de courbure, un choix multiple de textures ou
de couleurs, une intégration à tout type d’environnement,...
• une exécution rapide et un entretien réduit.

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Dans tous les cas, les giratoires en béton demandent une étude préalable détaillée et une
exécution soignée, tenant compte des contraintes locales. Il reste là encore des améliorations
à apporter, notamment:
• l’accès à l’îlot central pour l’approvisionnement du béton (une passerelle est envisagée)
• le déroulement correct du plastique pour éviter les plis côté intérieur
• le remplacement des barres par des torons dans les anneaux de petit diamètre
• le bétonnage des anneaux larges en deux anneaux concentriques, qui permettrait le
bétonnage au moyen de machines à coffrages glissants courantes.

J’ose espérer qu’après cet exposé, la technique de construction des giratoires en béton, et
en particulier des giratoires en béton armé continu n’aura plus de secrets pour vous et qu’elle
ne sera plus considérée comme une technique réservée à quelques spécialistes, mais qu’elle
pourra être mise en œuvre dans tous les cas de sollicitations importantes des revêtements
dans les giratoires.

Début des giratoires en Belgique

• Fin années 1980


• Expériences en Angleterre, France, ...
• Gestion du trafic par giratoires

Sollicitations spécifiques dans l’approche du giratoire

Déformation de la couche de roulement:


(plissements, orniérage,...)

Délestage des essieux arrières

Contraintes de cisaillement
• Zones de freinage et d’accélération
• Transfert de charges entre essieux
• Contraintes d’adhérence élevées

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Sollicitations spécifiques dans l’anneau du giratoire

4,5 t

13 t 13 t
1.50 m
6,5 t 6,5 t 3t 10 t

4,5 t
2.00 m
10 t

6,5 t 6,5 t

4,5 t
3t

• Délestage des roues intérieures


• Transfert des charges sur les roues extérieures
• Force centrifuge –> efforts horizontaux

Conséquences

• Dégradations de la couche de roulement des giratoires (orniérage, arrachements,


pelades, faiençage, ...)

Choix du revêtement: le béton

Le revêtement des voies d’accès et de l’anneau doit résister


• A l’orniérage, au cisaillement
• Aux sollicitations dynamiques
• A l’érosion, au gel, aux sels de déverglaçage,...

Le matériau doit s’adapter aux contraintes de mise en œuvre


• Rapidité d’exécution
• Phasage
• Géométrie de l’ouvrage (courbes, dévers,...)

Exigences de sécurité
• Adhérence, maintien de l’uni transversal, clarté,...

Exigences d’exploitation
• Contraintes d’entretien limitées (nettoyage, marquage,...)
• Limitation des gènes à l’usager

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Giratoires en dalles de béton

Joints transversaux
• de retrait
• de dilatation
• de construction

Joints longitudiaux
• de flexion
• de construction

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Reinforced

No pavement

Square plan layout

No base
Terminal anchor
Joint Type 3 Longitudinal, tied and formed
Joint Type 4 Longitudinal, untied (butt)
Joint Type 7 Transverse construction
Joint Type 9 Transverse contraction
Joint Type 14 Isolation
Medium-radius roundabout – typical design for SFCP (above); repeated with notes for designers (opposite)

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Giratoires en béton armé continu

Pourquoi en BAC?
• Carrefour fort sollicité:
– cimenterie
– carrière
– centrale à béton
– centrale d’enrobage
– ...
• Reprise des efforts radiaux (poussée au vide) par les armatures transversales
• Pas de joints de retrait
• Pas de charges de coin

Choix en 1993: Revêtement en béton armé continu

Profil en travers – type

5.00 à 9.00
1.50

2.5%
0.35

1
2
3 1 Béton ou BAC: 20 – 23 cm
4 2 BB-3B: 5 cm
3 Béton maigre: variable de 20 à 35 cm
4 Sous-fondation: 40 cm

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Coffrages glissants

• Bétonner les éléments linéaires après le revêtement

Coffrages fixes

• Eléments linéaires = coffrages


• Accès: placer des madriers
– 50 cm de long
– Incruster les attaches

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Ferraillage BAC
70
70
70
70

max. 14
70

min. 7
Tg ␣ = (L-r) / (B-15)

60º
min. 7cm
Côtes en cm r

Ferraillage: barres longitudinales

⌸/2-␣

⌸/2-␣

• ␣ à mi-largeur –> augmenter la longueur de recouvrement (r) à l’intérieur

Ferraillage: barres transversales

0.07 m

L1

60°

L2

0.07 m

• Ecartement barres transversales: 70 cm au 1/3 de la largeur côté extérieur


• Angle de 60° à l’axe
• Si Rintérieur > ⬇ 20 m:
– Ajouter une barre sur ½ anneau extérieur
– Alterner les longueurs

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Bétonnage à la poutre

• Appui sur éléments linéaires via poutre articulée de 2 m


• Hauteur de poutre réglable

• Placement béton à la grue


• Aiguilles vibrantes: 1 / 1,50 m

Machine à coffrages glissants

Solution plus délicate


• Grande largeur: 8 ... 9 m
• Amorces difficiles à réaliser dans la même phase
• Nettoyage machine sur revêtement non durci (si bétonnage en une phase)
• Immobilisation de la machine durant quelques jours

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Point particulier: tout en 1 jour

• Fermeture sur béton non durci –> protection à poser sur le début du bétonnage
• Passerelle
• Si plus de 150 m3 –> 2 équipes: 2 ⫻ 10 h

Point particulier: 2 phases

• Maintien circulation –> 2 phases

• Chargement des extrémités (50 cm sur 15 m de long) ou poutre d’ancrage

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Point particulier: temps chaud

• Support chaud
• Dilatation des armatures
! Effet courbure: petite variation de longueur –> grande variation de rayon
• Protection du béton

Point particulier: accès

• Accès en béton: zone de freinage


• Ancrage au giratoire

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Point particulier: nettoyage

• Aspiration du fond de coffre (points bas)


• Nettoyage des joints

Conclusions

Les giratoires en béton offrent:


• Une résistance efficace aux sollicitations
• Des solutions variées
– Béton de dalles
– Béton armé continu
– Faibles ou grands rayons de courbure
– Un choix multiple de textures ou de couleurs
– Une intégration à tout type d’environnement: bâti, campagne,...
• Une exécution rapide et un entretien réduit...

Les giratoires en béton demandent:


• Une étude préalable détaillée
• Une exécution soignée tenant compte des contraintes locales

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