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James Fadiman

Les Transitions Transpersonnelles:
Repousser les Limites de la Psyché et de la Psychologie
v0.3

James Fadiman, né un 27 Mai 1939, est diplômé des universités d'Harvard et de


Stanford où il a rencontré et a travaillé avec Richard Alpert qui sera connu plus tard
sous le nom de Ram Dass. Ce fut Alpert qui introduisit Fadiman aux psychédéliques
avec des résultats qui changèrent sa vie. Les idées de Fadiman au sujet de l'esprit, de
l'identité, de la spiritualité et de la société furent transformées et il entreprit de
réorienter se vie en conséquence.
Fadiman rejoignit Myron Stolaroff et Willis Harman à la Fondation Internationale des
Etudes Avancées (IFAS) pour effectuer des recherches sur les effets du LSD sur la
personnalité et la créativité. Sa thèse de doctorat et une série d'importants articles de
recherche proviennent de ce travail.

Après le banissement des recherches sur les psychédéliques, Fadiman dirigea ses
énergies sur divers projets. Voyant la nécessité d'étendre la psychologie au-delà des
points de vue comportementaliste et psycho-analytique limités, il inspira la naissance
de la «Psychologie Transpersonnelle». Ce nouveau domaine intégrait le meilleur de
la psychologie conventionnelle avec des champs précédemment négligés tels que la
spiritualité et le développement post-conventionnel et aussi la psychologie et la
Sagesse asiatique.

Fadiman est l'un des fondateurs de l'Association de Psychologie Transpersonnelle,


du Journal de Psychologie Transpersonnelle et de l'Institut de Psychologie

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Transpersonnelle qui est maintenant une école accréditée qui forme des doctorants. Il
a servi comme président de l'Association de Psychologie Transpersonnelle et aussi de
l'Institut des Sciences Noétiques. Il siège au conseil de plusieurs organisations et il
est à la tête de sa propre entreprise de consultants en gestion.
James Fadiman a aussi publié activement. Il a écrit le livre «La Personnalité et le
Développement Personnel» [1-1] avec Robert Frager, les livres auodidactes «Une Vie
Sans Limite: Se Fixer et Atteindre des Buts» [1-2] et «Soyez Entièrement Vous» [1-
3], une anthologie avec Roger Frager «L'Essentiel du Soufisme» [1-4] et récemment
un roman «L'autre Côté d'Haight» [1-5].

Il est un enseignant populaire, un consultant, un conférencier avec un ravissant


sens de l'humour qui lui a valu le surnom "d'esprit le plus rapide de l'Ouest".

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Je dois dire que je suis l'un de ces pionniers irréfléchis des psychédéliques. J'étais
étudiant à Harvard et j'ai fini dans un petit cours privé avec un jeune et dynamique
professeur nommé Richard Alpert. Nous sommes devenus amis et nous avons fini
par louer ensemble une maison d'été à Stanford où j'ai travaillé pour lui sur un grand
projet de recherche.
Après mes années supérieures à Harvard en 1960, je suis allé vivre en Europe. Le
printemps suivant, Dick est venu à Paris avec Timothy Leary. Ils étaient en route
pour Copenhague pour apporter le premier article sur des travaux sur la psilocybine à
faible dose.

Dick était en très grande forme et m'a dit: «La chose la plus merveilleuse du
monde s'est produite et je veux la partager avec toi». J'ai répondu comme tout le
monde l'aurait fait: «Evidemment». Il a ensuite fouillé dans la poche de sa veste et a
pris un petit flacon de pilules. Ma première réaction fut: «Des pilules? De la drogue?
Quelle est cette étrangeté?» Je n'avais réellement aucune idée de ce qu'il voulait dire.
Mais le soir même je pris de la psilocycine de ce flacon, assis au café d'une
avenue principale de Paris. Après un moment j'ai dit à Dick: «Je me sens un peu
bizarre car les couleurs sont si lumineuses et les sons si perçants». Il n'avait lui-
même rien pris mais il répondit: «C'est ce que je ressens juste en étant à Paris».
Nous nous sommes alors retirés dans ma chambre d'hôtel où il fut de fait
l'accompagnateur de ma session.

A partir de cette expérience, j'ai réalisé pour la première fois que l'univers était
plus large que je ne le pensais et que mon identité était plus petite et qu'il existait
quelque chose au sujet des intéractions humaines qui j'avais raté. Ce fut absolument
une expérience qui a créé des liens entre nous et plus tard, nombre de mes
attachements semblèrent un peu plus insignifiants. Cependant, cette session n'avait

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pas impliqué la décomposition des différents niveaux de réalité qui allait venir avec
les sessions ultérieures.

Une semaine plus tard, Dick était à Copenhague et je l'ai suivi un peu comme un
chien qui s'est perdu sur des centaines de kilomètres puis retrouve son maître. Je suis
allé là-bas et nous avons eu une autre session dans la soirée. De cela est venu la
réalisation que quand les êtres humains sont proches les uns des autres, on peut se
demander n'importe quoi car le besoin d'autrui est pris en compte en premier. Vous
ne demanderiez pas quelque chose qui serait véritablement une obligation pour
l'autre. Ainsi il y avait quelque chose qui ressemblait à l'esprit des Trois
Mousquetaires émanant de tout ça.

Peut après je suis retourné au USA à cause du bureau de la conscription. J'avais


reçu une lettre de leur part disant principalement: «Voudriez vous vous joindre à
nous au Vietnam? Ou peut-être considéreriez vous une alternative qui vous est
ouverte par la loi?». L'une de ces options était une école doctorale et j'avais été
accepté à Stanford l'année précédente.
A cette époque je m'étais dit: «Je vais mettre en pause mes études car je voudrais
plutôt prendre du temps pour découvrir le monde». Mais quand le bureau de la
conscription m'a écrit, l'école doctorale me sembla être le mal le moins mauvais des
deux.

Je me suis pointé à Stanford comme un étudiant de 1ère année de 3ème cycle, un


peu amer car j'étais là pour éviter la conscription. J'avais le sentiment que le
gouvernement des USA aurait fait une terrible erreur en m'ayant comme soldat à
cause à la fois de mon dégoût pour la guerre, de mon refus de tuer des gens que je
ne connaissais pas, de ma lâcheté et un nombre d'autres profondes vérités
philosophiques que je n'avais pas encore pleinement compris.

J'ai débuté mon travail d'étudiant avec un sentiment de déception envers la

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psychologie parce qu'ayant maintenant usé de psychédéliques, je savais qu'il y avait
beaucoup plus de choses. Je ne savais pas ce que ce "plus" était mais je savais
sûrement que la psychologie ne l'enseignait pas.
Cependant caché à la fin du fascicule scolaire j'ai trouvé un cours "spécial pour
diplômé" appelé "Le Potentiel Humain" enseigné par Willis Harman qui était avant
tout un professeur de génie électrique. Le petit résumé disait: «A quoi les êtres
humains peuvent-ils aspirer de mieux et de plus élevé?» et il suggérait divers types
de livres. Pendant que je lisais, j'ai pensé: «Il y a quelque chose en rapport avec les
psychédéliques là dedans. Je ne sais pas ce que c'est mais cet homme connais
quelque chose de ce que je sais». A ce point de ma vie je divisais le monde entre
ceux qui savaient ce que je savais (ce qui n'était pas beaucoup mais néanmoins plus
que ce que je savais 2 mois plus tôt) et ceux qui ne savaient pas. Par exemple, si je
regardais des tableaux impressionistes, je me serais demandé: «Est-ce que le peintre a
vu ce qu'il a peint ou a-t-il copié d'autres impressionistes?». Et d'une certaine façon
je savais - que j'avais deviné correctement ou pas était hors de propos pour moi à
cette époque.

Quoiqu'il en soit, j'ai attérri dans le bureau de Willis Harman qui était le bureau
typique d'un maître de conférence en génie électrique dans un bâtiment aussi terne
qu'un hôpital et j'ai dit: «Je voudrais suivre votre cours spécial pour diplômé». Il me
répondit gentiment: «Eh bien, c'est complet pour ce trimestre mais je vais le faire à
nouveau. Peut être que vous resteriez intéressé pour une date ultérieure». Je l'ai
regardé et j'ai dit: «J'ai pris de la psilocybine 3 fois». Il se leva et traversa le bureau
et ferma la porte. Et nous avons ensuite parlé affaire.
Il se trouva que j'avais deviné correctement. Ce cours était une manière pour lui de
répondre à la question: «Comment puis-je donner un cours sur les psychédéliques
sans être découvert et mis à la porte?». Après avoir parlé un moment, nous
décidâmes que non seulement j'allais participer au cours mais aussi le co-enseigner
d'une certaine façon car à la différence de Willis je voulais êre ouvert sur ce qui

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m'était arrivé. J'avais moins à perdre dans l'affaire.

Nous avons donc donner le cours ensemble en commençant avec la question:


«Vers quoi l'être humain peut-il tendre pour être meilleur et s'élever?». Nous
sommes graduellement passés de la psychologie à la philosophie et ensuite au
mysticisme et finalement à l'expérience personnelle.

A cette époque j'ai commencé à travaillé avec la Fondation Internationale des


Etudes Avancées. Financée par Myron Stolaroff, cette fondation s'était établie à
Menlo Park en Californie pour travailler sur les psychédéliques. Willis Harman y
était associé comme certaines autres personnes. Il n'y avait pas de psychologue dans
l'équipe et je suis donc devenu leur psychologue. C'était un peu grotesque car j'avais
seulement 2 mois d'étude dans mon 3ème cycle et je n'avais pas étudié la
psychologie dans le second cycle.
Nous avons commencé par travailler ensemble sur un article: «L'Expérience
Psychédélique» qui décrivait les résultats des sessions sous LSD de la fondation.

Pendant que nous attendions que l'article soit publié, Willis m'a demandé si je
voulais une session avec eux. Voilà, j'étais immergé dans mes expériences à faible
dose sous psilocybine sous l'influence de Dick Alpert/Tim Leary avec un contact
humain rapproché et j'ai dit: «Ca serait super!». Je me suis pointé le 19 Octobre
1961 au siège de la fondation, dans deux pièces jumelées au-dessus d'un magasin de
beauté avec une vue sur un parking. Une opportunité de prendre du LSD avec Willis
et une charmante professeur comme accompagnateurs et Charlie Savage comme
docteur, m'était offerte. Charlie a principalement fait son travail de docteur en me
donnant le matériel puis est retourné à ses occupations psycho-analytiques plus loin
dans le couloir.

J'ai pris le matériel et j'ai regardé autour de moi et j'ai dit à mes accompagnateurs:
«Bon, vous autres ne prenez pas quelque chose?», car c'était le modèle que j'avais

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suivi avec Dick et Tim dans mes précédentes sessions. Je crois que Willis a pris un
petit peu d'amphétamine juste pour me calmer. J'ai mis mes cache-yeux, je me suis
couché sur le canapé et j'ai écouté la musique. C'était la méthode qui avait été
développé à travers le travail d'Al Hubbard et d'autres. Et dans cette pièce à ma
grande surprise, mon petit mental fut emporté. Le journée se passa à la manière
d'une journée classique sous forte dose de psychédéliques.

J'ai découvert que mon désintérêt pour les choses spirituelles était aussi pertinent
que le désintérêt d'un gamin de 10 ans pour le sexe: cela provenait d'une complète
méconnaissance des choses sur lesquelles le monde est bâti. Je suis allé dans un lieu
de solitude totale, avec une sorte de conscience que "vous devez traverser à pied
cette vallée par vous même" et le sentiment de séparation avec l'Univers, le
sentiment qu'il n'y a réellement aucune chose à laquelle vous pouvez vous accrocher.
Ce lieu heureusement était très proche de celui où il n'existe qu'une seule chose et
j'en faisais partie.
A ce point, il y eu ce qui pourrait être décrit comme des chants d'allégresse à
travers les cieux: «Un autre imbécile s'est réveillé!». La jubilation ne venait pas de la
réalisation de ce que j'étais, Jim Fadiman mais de ce dont je faisais partie. Quel
soulagement! Je suis entré dans un lieu où j'avais le sentiment que je ne faisais non
pas partie de tout mais que tout faisait partie de tout et je faisais clairement partie de
cela.
Soudainement, il était évident qu'il n'y avait pas de mort et que l'onde
fondamentale de l'Univers peut être décrite en terme humain de la meilleure façon
par l'Amour. C'était tout simplement, incroyablement, évident. Et pour quelques
raisons singulières, moi, Jim Fadiman, j'ai reçu le don de ce moment d'éveil à ma
véritable nature. A partir de ce lieu, j'ai regardé les divers structures de ma vie et
elles étaient toutes, au mieux, amusantes. L'idée me frappa qu'être un étudiant
diplômé cherchant à éviter la guerre semblait être une chose tout à fait plausible à
faire puisque l'on doit produire quelque chose de cette incarnation, de ce corps.

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Il n'était pas clair pour moi que Jim Fadiman, en tant que personnalité, avait vécu
avant. Mais cela n'était pas très important aussi car le Jim Fadiman qui était dans
cette pièce le 19 Octobre n'était pas vraiment important mais servait plutôt comme
une boîte dans laquelle je me suis retrouvé.

Ce soir là avant de rentrer chez moi avec Willis, je suis allé au sommet de
Skyline, une fameuse chaîne montagneuse surplombant Stanford. J'ai regardé au loin
et j'ai eu une formidable sensation d'identification avec la Création. Je marchais ici et
là en disant des choses comme: «J'ai réellement fait quelque chose de splendide de
tout cela». Le "Je" ici n'etait manifestement pas moi, pas Jim Fadiman mais le "Je"
était content de la Création et satisfait qu'une partie de moi était en train d'observer
d'autres parties de moi.
Maintenant on peut se questionner d'un point de vue "terre à terre" sur la notion
que l'on retrouve dans l'Ancien Testament qui est de chanter des louanges au
Seigneur puisqu'Il a écrit ces chants etc. Mais quand vous êtes dans l'état de faire
des louanges, vous avez le sentiment que c'est une bonne manière de s'auto-
congratuler pour les travaux bien achevés.

Je suis allé chez Willis pour la soirée afin "d'atterrir" et j'ai regardé dans les yeux
de son fils, Dean, encore bébé. Dean rampait partout à cette époque et nous avons
partagé l'un de ces moments de "Hé mon gars, hé mon gars! c'est rigolo pas vrai?".
J'ai pensé: «Tu es tout juste dans le corps d'un bébé». Et il me sembla qu'il pensa:
«Ouai, c'est ce que je fais en ce moment mais t'inquiètes pas pour ça». Il était aussi
une âme avec de l'âge.

Finalement de retour, on me déposa dans mon taudis d'étudiant. Les jours suivant
en émergeant de tout ça, je me demandais ce que je devais faire maintenant que je
savais et sachant que j'ai été réincarné [à nouveau] comme étudiant de 1ère année de
3ème cycle à Stanford dans un monde qui n'était pas hostile mais complètement
ignorant de tout ça.

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J'ai alors entamé une carrière assez engagé en tant qu'étudiant, résolu à rendre
l'expérience psychédélique plus accessible à tout le monde. A ce point, je ne voyais
personne qui n'aurait pu profiter de la connaissance de ce que j'appelais "la vérité
fondamentale de l'existence".
Je suis donc devenu une sorte d'agent double. Le jour j'étais un étudiant ordinaire.
Je me suis mis à porter la veste et la cravate pour ressembler le moins possible à un
hippie. J'ai pensé, correctement, que le département [où j'étudiais] croirait que je
n'étais rien d'autre que l'apparence que je suggérais.
Le soir, je lisais ce qui était nécessaire pour mon éducation, ce qui se composait
du Bhagavad-Gita, du Livre des Morts Tibétain etc. De temps en temps j'arrêtais de
lire et j'allais m'asseoir dehors devant un petit arbre près de ma maison et je le
regardais commencer à vibrer et devenir semblable à une énergie dans la forme d'un
arbre. Ainsi je pouvais me réunir à ce que j'étais vraiment.
Il y a une magnifique église à Stanford avec de larges vitraux où je m'assayais
pour me relaxer jusqu'à ce que les personnages et les couleurs aient semblé se mettre
en mouvement ce qui me faisait penser aux psychédéliques.

J'ai commencé à faire des recherches sur les psychédéliques dans l'équipe de Willis
Harman, Myron Stolaroff, Charlie Savage et d'autres. Mais maintenant, je regardais
mon travail à un niveau qui différait grandement d'autrefois car finalement, je
comprenais ce que nous faisions sur Terre.
Nous essayions de savoir si avec de fortes doses, dans un contexte de support total
et dans un environnement non médicale, il était possible d'induire des expériences
enthéogéniques. Et si oui, était-ce bénéfique?

Le groupe disposait d'une autorisation fédéral de quelques années parce que nous
coopérions avec le gouvernement quelque soit le niveau où il fallait le faire.
Notre mentor était Al Hubbard, un personnage mystérieux qui était à divers
moments un agent du Canada et aussi un agent du gouvernement fédéral des USA. A

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cause de sa propre expérience transformative, Al avait décidé que ce qu'il allait faire
de sa vie était de rendre les expériences et la recherche sur les psychédéliques
possibles. Il était véritablement la lumière qui nous guidait et était certainement un
perturbateur majeur dans notre petit monde.

"L'entraînement avancé" comme il fut nommé, était toujours fait avec Hubbard et
généralement dans la «Vallée de la Mort». C'était le contexte et le site en pleine
nature le plus intense qui existait. Il permettait le type d'ouverture qui n'était pas
facilement réalisable dans d'autes lieux.
Nous partions de Lone Pine et nous nous arrêtions à un certain point, pour prendre
le matériel. Puis on roulait vers différents lieux et on y passait du temps,
généralement avec les "yeux ouverts" sur ce qui était visible (ou visible dans les
plans invisibles à cet endroit). On abordait aussi nos propres vie plus directement à
cause de la dure et grandiose beauté et l'immensité désertique du paysage.
L'entraînement avancé était la manière principale de s'assurer que l'on n'était pas
prisonnier de ses propres systèmes de croyance.

Ainsi la plupart du temps, je faisais un travail sanctionné par l'état. Pourtant avec
le monde de Ken Kesey, j'étais aussi impliqué dans d'autres aspects des choses parce
que ma femme Dorothy était une amie de Ken. Ce qui fit de moi l'une des rares
personnes qui étaient profondément impliquées dans l'utilisation de fortes doses pour
les expériences religieuses. Je passais aussi du temps avec les premiers groupes
illégaux d'utilisateurs de psychédéliques qui étaient des explorateurs ultimes avec
aucune restriction sur ce qu'ils exploraient. Ils faisaient réellement des choses plus
dangereuses et excitantes.
A un certain moment, nous avons découvert que les graines de Belle-de-Jour
(morning glory) contenaient un analogue du LSD mais je me suis inquiété du fait
qu'elles pouvaient aussi entraîner des effets secondaires et même contenir du poison.

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Donc un matin, Willis et moi, récupérâmes un paquet de graines de morning glory
que nous avions achetées à notre fleuriste local et nous les avons mangées. Notre
intention était de voir si elles étaient mauvaises pour la santé. Avec le recul, c'est le
genre d'expérimentation scientifique que je ne referais plus.
Mais ce jour là, nous avons marché jusque dans la Réserve Biologique au-dessus
de Stanford et nous sommes restés couchés toute la journée. J'étais devenu un peu
malade mais j'ai découvert que cet analogue du LSD m'a absolument ammené au
même endroit que le LSD lui-même. Pendant cette session, j'ai eu l'une de ces
visions qui donnent à jamais une couleur particulière à la manière dont vous regardez
certaines attitudes et idées.

Dans cette vision j'étais devant un immense tableau en train d'écrire une analyse
complexe et sophistiquée de la réalité que j'avais comprise avec l'aide des
psychédéliques. Dieu est arrivé et a jeté un coup d'oeil à ça et a dit: «C'était
vraiment magnifique!». Et il a tout effacé. J'ai demandé avec un peu d'attachement:
«Pourquoi l'avez vous effacé?». Il répondit: «Eh bien, c'était véritablement
magnifique. J'ai vraiment adoré. Et j'ai bon espoir que vous en créerez d'autres».
J'ai réalisé que ce que l'on a voulu me faire comprendre est que nous avons, dans
ce corps, cette vie, avec notre language, dans cette civilisation, aucune chance de
réellement comprendre ce qu'est la réalité. Mais j'ai aussi compris qu'il est
extraordinairement divertissant et même nourissant d'inventer ces châteaux de cartes
théoriques.
A partir de ce moment là, je ne me suis plus plus attaché à mes croyances les plus
profondes car j'ai commencé à voir qu'elles étaient parmis les croyances que je
changeais. Si je regardais quelques années en arrière, je voyais un basculement réel
dans les croyances que je percevais comme étant aux centres de toutes les autres.
Ainsi puisque j'en laissais partir d'année en année, je n'avais aucune raison
d'assumer que celles que j'avais à ce moment là allaient durer. Un certain
soulagement se dégageait de tout cela, une manière de laisser s'envoler ses

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prétentions.
Combien de temps avez vous pu travailler avec les psychédéliques à Stanford et
comment est-ce que ça s'est terminé?

Cela m'a pris 2 ans pour trouver un comité de personnes qui acceptèrent d'avoir
leurs noms sur ma thèse "Les Effets des Psychédéliques sur le Changement
Comportemental", un titre que j'avais trouvé pour éviter que Stanford ne me jetât
dehors. J'avais donc eu mon doctorat et par conséquent j'avais acquéri une certain
niveau de conception de la recherche et aussi de la crédibilité bla, bla, bla.

Le gouvernement fédéral nous a alors permis de faire une étude sur la question de
la créativité qui consistait à savoir si les psychédéliques pouvaient aider à la
résolution de problème de nature technique.

Oscar Janiger et de nombreuses autres personnes avaient fait des travaux avec des
artistes mais ici on avait un vrai défi: Pouvions nous utiliser ce matériau pour des
personnes travaillant sur des problèmes hautement techniques?
La difficulté que nous connaissions, résidait dans le fait que si nous augmentions
suffisamment la dose, les sujets étaitent beaucoup plus attirés par Dieu et laissaient
s'en aller leur identité personnelle et les notions de temps et d'espace. Il était évident
que nous devions utiliser de faibles doses.

Puis un soir, Myron, Willis, James Watt (notre médecin à cette époque) et moi,
nous nous sommes réunis et avons pris 25 microgrammes de LSD, une très faible
dose. Nous avons écouté de la musique jusqu'à ce qu'à ce que les murs aient
commencé à respirer et que nous soyions dans un un état raisonnable à l'intérieur du
flot. Nous avons alors commencé l'étude.
Notre raisonnement était que si nous pouvions concevoir une étude sous faible
dose alors il serait raisonnable de la poursuivre car nous faisions alors exactement ce
que nous demandions aux sujets de l'étude de faire: nommément de se concentrer sur

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les problèmes techniques de la conception et de la recherche sans être pris dans la
beauté et la grandeur de l'Univers. Et c'est ce que nous avons fait ce soir là. C'était
s'aider soi-même d'une façon des plus subtiles.

Nous avons commencé à effectuer cette éblouissante étude avec des chercheurs de
haut rang venant d'un certain nombre de compagnies. Nous leur disions que nous
allions les assister dans leurs problèmes les plus pressants en particulier s'ils étaient
réellement coincés.
Notre critère d'admission pour l'étude était qu'ils devaient fournir au moins 3
problèmes sur lesquels ils ont travaillés sur au moins 3 mois. Il y avait un large
éventail de personnes des sciences dures, des mathématiciens théoriques aux
architectes. Nous les faisions entrer 4 à la fois.
Les matinées étaient semblables à celles avec les expériences sous fortes doses (les
relaxer, mettre des cache-yeux, écouter la musique, ne pas tenter de travailler sur
leurs problèmes). Ensuite à midi, nous les sortions et leur demandions de travailler
sur leurs divers problèmes techniques jusqu'à environ 16H. Puis nous laissions tout le
monde revoir leurs travaux et évaluer leurs valeurs.
Un nombre de brevets ont émergé de cette étude.

L'un de mes succès favoris était celui d'un architecte qui devait concevoir un petit
centre commercial à Santa Cruz. C'était une tâche avec des possibilités architecturaux
compliquées. A la fin des 4H, comme il le disait: «J'ai vu l'entière structure». Il
l'avait littéralement vu et s'est promené autour d'elle. Elle été conçue et existait
comme une sorte de forme platonique. Pour lui ce fut juste du pure plaisir car cela
n'aurait jamais était la manière dont il aurait mené un projet auparavant.

Mais toutes les bonnes choses ont une fin. Un matin de 1965 pendant que 4
personnes faisaient la relaxation de leur première partie du programme, nous reçûmes
une lettre disant en substance:

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«Salut, c'est votre gouvernement fédéral. Nous sommes maintenant soucieux que les
psychédéliques soient disponibles, que les gens en font mauvais usage et qu'il y ait
de mauvaises choses qui se produisent chez les jeunes. Tout ce que nous pouvons
dire est que nous ne pouvons rien faire au sujet de ce problème gênant. Mais nous
pouvons arrêter quelqu'un, quelque part, ce qui nous fait nous sentir mieux. Donc
nous avons décidé ce matin de stopper toutes les recherches aux USA».
Eh bien notre petite équipe a lu cela et ensuite nous avons pensé à nos 4
scientifiques de haut rang à côté. Et nous nous sommes mis d'accord que nous
avions reçu cette lettre que le lendemain.
Néanmoins, cela a effectivement arrêté nos recherches. Nous avons néanmoins
publié nos résultats et il y a un nombre de scientifiques plutôt distingués qui étaient
trés contents et qui étaient impliqués dans nos études. L'un devint le vice-président
de Hewlett-Packard, un autre a gagné toutes les récompenses scientifiques majeures
dans le domaine de l'informatique.

L'ironie bien sûr est que c'était une façon tout à fait acceptable d'introduire les
psychédéliques dans notre culture. Non seulement c'était acceptable pour notre
culture mais cela était acceptable pour nous, comme une manière de ne pas interdir
les valeurs spirituelles des gens car c'étaient des problèmes sur lesquels les gens
voulaient travailler, des choses qui avaient de la valeur pour eux.

Et pourtant, on nous a demandé de non seulement arrêter nos recherches mais


aussi d'essayer de rejeter tout ce que nous avions déjà appris et de garder la société
ignorante du mieux que nous le pouvions. On nous a demandé de le faire, pendant
que des millions de personnes dans la culture en général étaient en train
d'expérimenter les psychédéliques sans connaissance, aide ou support.

Etant donné que vous avez eu vous même une expérience tellement profonde,
qu'avez-vous fait par la suite?

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J'ai réellement pris du recul à ce point. Je ressentais plus l'absurdité de cet instant
que ma peine personnelle car j'étais en un lieu où les choses ne m'affectaient pas
beaucoup personnellement; ces choses se sont juste produites et j'ai fait ce que
j'avais besoin de faire.
J'ai donc pris du recul et j'ai pensé: «Bien, qu'elles sont les autres possibilités?». A
cette époque, un nombre énorme d'autres chemins spirituels commençaient à s'ouvrir
parce que des millions de personnes utilisaient les psychédéliques. La plupart
venaient de traditions existantes: la méditation, le jeûne, les quêtes visionnaires, les
pratiques chamaniques, la voie avec le peyote.
Je ne pouvais pas utiliser ce qui semblait être la façon la plus propre, la meilleure,
le plus facile pour travailler avec moi-même et autrui. Je me suis donc dit: «Qu'est-
ce qui existe d'autre? Je sortais tout juste de thèse et étais sans emploi et je ne
voulais pas commencer à vendre des assurances vie.

On m'a presque offert une position de conseiller à l'université d'état de San


Francisco car ils étaient désespérés de trouver quelqu'un qui avait de l'expérience
avec les psychédéliques et qui pouvait travailler avec les étudiants ayant ces
problèmes. Mais quand ils ont réfléchi à ça, ils ont décidé que s'ils m'engageaient ou
quelqu'un d'autre comme moi, cela impliquerait qu'il y avait du vrai ou de la
légitimité dans ce qui se passait. Donc au lieu d'avoir quelqu'un qui savait réellement
ce qui se passait, ils décidèrent de ne pas m'engager.
Cela m'a fait réalisé que ma carrière était sur des bases instables puisque ma thèse
m'avait exposée comme l'un d'entre "eux" peu importe ce que "eux" représentait.
Evidemment, je m'étais faufilé à travers Stanford. Le temps que je finisse mes
études, la grande terreur de Stanford était d'être reconnu comme "l'Harvard de
l'Ouest" car Tim et Dick ont été limogés d'Harvard à cette époque pour avoir fait
des recherches moins controversées que les miennes.

J'ai donc tenté d'utiliser ma vision des psychédéliques avec un esprit simple qui

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consistait à montrer ce que j'avais appris dans ma propre vie.
Il y a une formidable chanson de Bessie Smith qui dit: «Si tu as pigé, porte le
intérieurement ou sinon tu dois le laisser dehors» [3-1].

L'une des choses que j'ai fait, était de débuter le travail qui allait devenir Le
Journal de la Psychologie Transpersonnelle. C'était un journal dans lequel
différentes religions et traditions intellectuelles pouvaient discuter ensemble non pas
de doctrine mais d'expériences. Cela leur permettait de coopérer entre elles d'une
façon qui n'était pas possible auparavant dans les cercles religieux ou
psychologiques.
Le Journal est né d'une rencontre à Esalen que nous avons mis en place avec l'aide
du fondateur d'Esalen, Michael Murphy. Nous avons réuni les meilleurs catholiques
que nous pouvions trouver (les plus ouverts, les plus libéraux, les plus érudits) et un
certain nombre d'entre nous, pas des hors la loi à proprement parlé car il n'y avait
pas beaucoup de lois mais des personnes qui étaient clairement loin des limites
coventionnelles.
Nous nous sommes réunis pour un weekend et sommes partis avec la réalisation
qu'un pont entre les expériences spirituelles et psychologiques devaient être construit.
Cependant ces catholiques n'allaient pas mettre une seule pierre à sa fondation!
C'était donc de notre ressort. Un modèle existant était le Journal de Psychologie
Humaniste et son association. Nous avons commencé à former quelque chose de
similaire.

Nous avons écrit au conseil éditorial du Journal de Psychologie Humaniste en


disant: «Nous allons avancer. Il y a plus de choses au sujet de la condition humaine
que ce que nous avons expérimenté avec notre orientation humaniste. Nous ne
savons pas vraiment ou nous allons mais voilà quelques unes des choses auxquelles
nous allons jeter un coup d'oeil. Voulez vous vous joindre à nous?».
Et les éditeurs du journal se divisèrent en disant soit "j'ai une vague idée de la

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direction dans laquelle vous allez et j'irai avec vous" soit "absolument pas". Les
réponses négatives majeures qui me viennent à l'esprit sont de Victor Frankl qui a
dit: «C'est du grand n'importe quoi» et Rollo May qui pour diverses raisons est
devenu un ennemi sérieux de la spiritualité et a travaillé activement contre. Ajouter
la spiritualité à la suite de la psychologie semblait l'effrayer.

A travers de nombreux aspects, le mouvement humaniste était très progressiste


pour son époque. En quoi pensez vous que le problème des psychédéliques et le
mouvement transpersonnel étaient si antithétiques à leur système de croyance?

Eh bien, ayant été des 2 bords, je pense que si vous avez été élevé avec une vision
du monde dans laquelle il n'existe que ce monde, vous avez été élevé provincial
intellectuellement. Les seules expériences que vous avez eu avec la religion ont été
avec des personnes qui n'ont elles mêmes pas eu d'expérience spirituelle. Ce que
vous avez, est peut être une religion de forme. Ce qui vous donne une communauté
de gens qui parlent en métaphores de la religion car c'est le meilleur langage à leur
disposition.
Tout que cela offre est plutôt une vision appauvrie de la spiritualité. Vous faites
alors une projection sur des personnes comme moi à cette époque, en pensant que si
je dis être un intermédiaire divin de Dieu alors je suis clairement un schizophrène
paranoïaque. Parce que les schizophrènes paranoïaques disent aussi être des
intermédiaires divins et des anges de Dieu. Ce que vous avez en réalité est un
groupe de personnes qui ont une peur peur profonde que leur entière vision du
monde soit minuscule.
Et quand votre vision du monde est minuscule est que vous êtes en position de
pouvoir, il ne semble pas irréaliste ni difficile de dire que les gens qui attaquent
votre vision doivent avoir tords.

La psychologie possède une formidable facilité à tourner un désaccord en démence,

17
un handicap ou une pathologie. Dans le monde scientifique la "peur" est souvent
nommée "scepticisme". Prenez les choses de cette façon: si vous avez fait un petit
peu de biologie il semble hautement improbable qu'un ornithorynque puisse exister.
Si vous n'avez jamais vu une giraffe ou un éléphant il est facile de croire qu'ils
n'existent pas. Ainsi si quelqu'un venait à vous dire: «Je voudrais vous présenter
mon ami l'éléphant qui va nous conduire dans la jungle», il n'est pas surprenant que
vous lui diriez: «Je préférerais que vous vous en alliez et je ne vais certainement pas
vous embaucher. Et par dessus tout je ne publierai pas vos articles».

Diriez vous que c'est aussi représentatif de la raison qui a poussé la culture en
général à devenir hostile aux psychédéliques et qui malgré l'enthousiasme initial, a
produit une vague de répression qui inclue la terminaison de votre programme à
Stanford?

Bon, la manière dont je vois ça c'est que les psychédéliques étaient une onde qui
grandissait en magnitude et le Vietnam fut un mur. Quand les psychédéliques ont
rencontré le Vietnam et que le pays s'est divisé en deux, l'ancienne garde qui a créé
et maintenu la guerre au Vietnam et était pour la guerre etc, se sentit avec raison
terriblement menacé.
Pourquoi? parce que les gens avec les psychédéliques disaient:
«Nous ne sommes réellement intéressés par aucune de vos institutions.
Nous voulons faire tout ce qui est nécessaire pour les mettre en pièce.
Nous voulons fermer vos universités et non pas ajouter des cours supplémentaires.
Nous voulons éliminer les forces militaires et non pas améliorer les entraînements.
Nous voulons transformer les églises en parcs car la vraie expérience religieuse ne
fonctionne pas bien cloisonnée».
Donc tous les groupes de l'ancienne garde ont dit:
«Les gars, je sais pas jusqu'où vous voulez allez mais je me sens tellement menacé
que je vais vous stopper avec tous les moyens à ma disposition».

18
En conséquence, on a eu une incroyable union de toutes les institutions majeures
contre la vague psychédélique. Et ce qu'elles ont dit fut:
«Nous contrôlons les armes; nous contrôlons les universités; nous contrôlons le
secteur médicale. Nous jurons par Dieu que nous sommes en guerre contre ces gens
qui ne sont pas contents que nous vivions nos vies mais qui sont déterminés à
travers les éléments les plus vulnérables d'entre nous, nos enfants, de faire disparaitre
l'amour, le respect et le support à nos institutions et à nous-mêmes».
De ce point de vue, il est dur de savoir ce qu'ils auraient pu faire d'autre.

Lors des 6 ou 7 premières années du Journal de Psychologie Transpersonnelle, il


y avait un grand nombre d'article qui traitaient du problème avec les
psychédéliques. Puis sur les 14 ans suivantes il n'y a pas eu un seul article sur
les psychédéliques. Que s'est-il passé?

Utilisons cela comme un point de départ pour des questions plus larges sur le rôle
des psychédéliques dans la culture.

Comment et où les psychédéliques ont ils profondément influencé la culture?


Si vous faites la liste des personnes principales de la psychologie transpersonnelle ou
des psychologies spirituelles en général, ce dont vous vous apercevez est que presque
tout le monde a été affecté par leurs propres expériences psychédéliques. Cependant
cela n'est pas écrit dans les journaux ou n'est pas discuté ouvertement avec le monde
extérieur.
Il existe un grand parallèle avec les programmeurs et les hackeurs. Si vous alliez à
une conférence où figurent les esprits qui ont fait des "avancées" en informatique
dans la première vague de compagnies en informatique, presque tous ont été
profondément affectés par les psychédéliques. Mais il n'y aura aucune mention des
psychédéliques dans l'histoire de l'informatique car cela ne sert pas le milieu, sauf
d'un individu à un autre. Je soupçonne qu'à un point ces personnes feront un grand

19
"déballage". Mais jusqu'à présent lorsque qu'il a été demandé à nombre d'entre eux,
de parler de leur usage des psychédéliques, ils ont dit: «Non merci, nous préférons
ne pas nous exposer».

Ce que vous avez dans la psychologie transpersonnelle ceux sont des gens qui
travaillaient avec leurs propres expériences transpersonnelles et psychédéliques et
essayaient de créer et de définir cette branche de la psychologie. Nous nous
aperçûmes à mesure que nous nous développions, qu'il y avait de plus en plus de
gens profondément concernés par divers aspects des traditions spirituelles et par la
manière dont elles affectaient la conscience.
Dans un sens, tandis que les figures majeures [du mouvement] étaient tous touchés
personellement par les psychédéliques, la notion de "transpersonnel" devint plus large
et le place explicite des psychédéliques dans le puzzle diminua.

Les gens me demande: «quelle est la différence entre la psychologie


transpersonnelle et la psychologie conventionnelle?». Je dis d'abord: «Eh bien, la
psychologie conventionnelle a au moins 150 ans et la psychologie transpersonnelle
date d'au moins 45000 ans».
Ce que nous avons rapidement appris est que nous avons redécouvert des choses
que de nombreux peuples avaient déjà trouvées. Nous avons commencé par regarder
les bouddhistes, les tibétains et les hindous, non seulement pour explorer notre propre
expérience personnelle mais aussi pour voir comment une vision du monde
apparentée pouvait être découverte à travers ces lentilles beaucoup plus anciennes et
sophistiquées.
Vous vous souvenez de la vision du grand tableau avec Dieu? L'une des choses
que cet événement m'a révélé est que ma compréhension des choses n'était pas très
large. Peut être ai-je compris une vérité fondamentale de l'Univers mais si vous me
demandiez de la décrire, je devrais utiliser un système de métaphores parmis d'autres
parce que je n'aurais pas le choix.

20
Ceux d'entre nous qui étaient impliqués dans le Journal de Psychologie
Transpersonnelle commencèrent à réaliser qu'au lieu de puiser dans nos propres
expériences qui étaient initialement naïves et chancelantes, nous pouvions publier des
articles d'une incroyable profondeur et sophistication en puisant dans les expériences
millénaires d'autres personnes.
Prenez le travail de Casteneda par exemple. Dans son premier livre, «Les
Enseignements de Don Juan: La Voie Yaqui de la Connaissance» [4-1], il dit
principalement:
«Je suis un imbécile d'étudiant diplômé. Par chance je suis tombé sur des gens dont
certains étaient analphabètes et qui cependant en connaissaient 1000 fois plus que je
ne pourrais savoir. Mais à la fin de mon livre je vais mettre du baraguoin
anthropologique juste pour prouver que je suis encore un étudiant diplômé».
Il travaillait avec une tradition qui nous était inconnue, une tradition d'indigènes
américo-mexicains. On lui a donné beaucoup de psychédéliques car il avait une tête
tellement dure et avait tellement de barrières conceptuelles que le problème pour ses
maîtres était: «Que peut-on faire pour lui faire comprendre quelque chose?».

Nous sommes au fond allés d'une exploration qui nous flattait personnellement à
une version du monde beaucoup plus large.
J'ai donné des conférences et écrit des livres sur certaines traditions religieuses.
Puis-je trouver des psychédéliques dans ces traditions? Oui évidemment. Ai-je besoin
de le mentionner? Non, pas particulièrement. Pourquoi pas ? Une raison est que les
psychédéliques avaient de plus en plus mauvaise presse et devinrent moins associés
avec l'expérience religieuse à sa base et plus associés avec la représentation
malhonnête du moment, souhaitée par le gouvernement fédéral.

Depuis les dernières années, il semble y avoir une résurgence de l'intérêt pour les
psychédéliques. Que se passe-t-il?

21
La culture est doucement en train d'admettre que malgré l'arrêt des recherches par
le gouvernement fédéral, le refus des articles par les revues scientifiques et la
raréfaction des fonds pour la recherche, les jeunes continuent à prendre des
psychédéliques.

Et ces jeunes gens qui sont pour la plupart bien éduqués commencent à reconnaître
entre eux que les décennies de désinformation n'ont pas tenu aussi bien que ceux qui
ont fabriqué cette désinformation l'espéraient. C'est une autre génération parmis
laquelle certains disent: «J'ai honnêtement comparé ma propre expérience avec la
désinformation que l'on voulait me faire croire et ma propre expérience semble plus
valide».

Ainsi ce n'est maintenant pas si terrible de parler des psychédéliques car si vous
dites dans un forum publique: «Le gouvernement est à la fois mal informé et
désinforme», personne ne s'en offusque.

Vous savez, Hitler avait la théorie que le "Gros Mensonge" marcherait. Et il


marche, à moins que tout le monde ait l'expérience personnelle du contraire. Eh bien,
20 ans de concerts du groupe «Grateful Dead» a laissé une culture de personnes qui
ont eu des expériences personnelles.

J'ai réalisé une série de films sur les psychédéliques il y a de nombreuses années
pour KQED, une chaîne de télévision publique à San Francisco. Ce que nous avons
appris vers disons 1967, est que les jeunes gens considéraient que si quelqu'un leur
été présenté comme venant du gouvernement ou comme médecin alors on allait leur
mentir. Cette relation centrale (que vous ne pouvez pas faire confiance au
gouvernement pour vous dire la vérité au sujet de vos propres expériences
intérieures) a été maintenue depuis lors.
La raison pour laquelle la marijuana est maintenant disponible pour une utilisation
médicale, que le gouvernement le veuille ou non, vient de ce qu'il existe trop de

22
médecins qui disent que c'est une bonne idée malgré toutes les règles qui empêchent
les médecins et les psychologues de dire la vérité. Il y eu une époque où si vous
aviez un cancer votre médecin ne vous l'aurait pas dit.

Mais maintenant nous avons une autre vague de gens à des postes d'autorité, de
connaissance et de responsabilité à qui on demande (en particulier leurs enfants qui
sont maintenant la 3ème génération): «Quelle est la vérité?».

Les psychédéliques sont donc maintenant en train de sortir de leur placard. Dans
quel contexte pourraient-ils devenir acceptables par la société dans son ensemble
dans le futur?

Je pense que l'on doit regarder l'utilisation du matériel psychédélique dans 2


contextes. L'un est enthéogénique et l'autre est psychothérapeutique.

Le contexte enthéogénique affirme que la religion est un acte privé et que la


répression gouvernementale d'événements privés et intérieurs est fondamentalement
contre l'humanité. Le président Clinton lors de son premier voyage en Chine a dit
qu'il existait certaines libertés humaines fondamentales. Aux USA, l'une de ces
libertés est celle de la liberté religieuse. C'est la voie enthéogénique, une voie à
laquelle je suis totalement attaché.

Je réalise maintenant que le gouvernement n'a pas uniquement stoppé mes


recherches avec une lettre arrêtant l'étude sur la créativité dans la pièce d'à côté. Ce
qu'elle disait réellement est: «Vous ne pouvez pas pratiquer votre religion ou alors
nous allons physiquement vous emprisonner».

C'est une déviance frappante avec ce que les USA furent historiquement.

L'autre contexte (sur lequel ma thèse par exemple s'est concentré) est l'utilisation
de psychédéliques pour aider les gens à vivre mieux avec moins de névroses, moins

23
de psychoses, moins de fixations, moins de perversions etc. C'est un domaine très
différent qui devrait être entre les mains de personnes ayant effectué historiquement
des interventions qui ont été qualifiées de "médicales".

Ceci étant dit, je suis beaucoup plus radical. Aux USA dans les années 1830, les
lois stipulaient que quiconque pouvait pratiquer des soins ou la médecine qu'il
désirait. Si vous faites du mal au gens vous pourriez être poursuivi mais si vous ne
faites pas de mal au gens vous ne devriez pas être poursuivi. J'aime être libre d'aider
les gens.
Mais maintenant je ne suis pas un psychologue avec une licence ce qui signifie
que je ne peux pas légalement aider les gens et les faire payer. Mais je suis un
homme de religion donc si je le désir, je peux aider les gens sous un autre angle. J'ai
la liberté de venir en aide. Si j'étais un psychologue, j'aurais un vaste ensemble de
restrictions sur la manière dont je pourrais aider les gens. Si j'étais un médecin,
j'aurais un ensemble différent de restrictions. J'ai opté pour l'approche religieuse qui
me donne un maximum de liberté d'être d'une utilité maximale.

En regardant vers le futur, voyez vous un rôle pour les enthéogènes et les
psychédéliques dans ces domaines religieux et médicaux?

Pas avant que nous sortions de la présente période de répression morale. Nous
avons mis le pas dans une véritable ère d'Inquisition ou le but d'un très grand
nombre de gens dans ce pays est d'empêcher autrui d'avoir le droit de choisir: le
droit d'avoir des enfants ou ne pas en avoir, le droit d'avoir des médicaments ou de
ne pas en avoir, le droit d'avoir une religion ou de ne pas en avoir. A présent, nous
avons atteint un lieu véritablement hideux en termes de déclin de la liberté
individuelle.

Avec un peu de chance nous allons en sortir et la prochaine vague va non


seulement autoriser les psychédéliques dans le modèle médical et les enthéogènes

24
dans le modèle spirituel mais va aussi réellement mettre un place des structures qui
ont du sens pour de telles utilisations.

Par exemple, il existe maintenant quelques religions qui viennent du Brésil qui ont
non seulement trouvé des stuctures intelligentes pour l'utilisation des enthéogènes
mais touchent aussi remarquablement la classe moyenne, ne sont pas socialement
perturbatrices et ne menacent pas de mettre en pièce les fondations des structures de
la société. C'est ce qui a rendu nos actions si difficiles dans les années 1960.

Ce n'est pas notre vision de ce que le monde pourrait être qui est incorrecte. C'est
en sapant la branche sur laquelle nous nous tenions que nous avons créé de
nombreux problèmes. Heureusement, Ceci ne se reproduira pas dans le prochain
round.

Ce qui est bien dans le désir des professions médicales d'alléger les souffrances
humaines est que tout le monde à un certain moment a besoin d'être aidé.
Le chemin enthéogénique est un peu plus difficile mais va probablement se réaliser
lorsque pays après pays, les gouvernements cesseront d'accorder crédit aux demandes
des USA d'avoir une politique sur drogue qui convienne à notre paranoïa moralement
conservatrice.

La marijuana à usage médicale est ici vraiment la trompe de l'éléphant qui sort du
rideau. Nous avons là une substance dont le gouvernement affirme qu'elle est un mal
absolu pour tout le monde, à toutes les époques, quoiqu'il arrive et refuse
d'apprendre quoique ce soit sur elle. Eh bien à un certain point, des nations matures
commenceront à dire: «Mince alors, ça ne ressemble vraiment pas à la façon dont un
adulte se comporterait». Mais la plupart des politiciens ont le sentiment qu'ils ne
peuvent pas se permettre de dire qu'ils ont eu tord.

Pourtant je pense que le futur, dans ses cycles, est fondamentalement radieux. En
un sens, je préfère me confronter au pire le plus tôt possible afin que nous puissions

25
en terminer avec lui. Car d'un point de vue personnel, c'est une époque terrible où je
n'ai pas de liberté personnelle. La liberté d'expression n'existe plus; cela s'appelle le
politiquement correcte. A moins que vous ne soyez un fanatique fasciste d'extrême
droite, vous ne pouvez pas dire ce que vous voulez. Et comme je n'en suis pas un, je
ne peux pas dire ce que je veux dans la plupart des réunions publiques ou alors on
m'attaque.

Je trouve cette époque terrible. Mais avec une perspective un peu plus large, ces
événements sont comme l'Acte II d'une pièce de théâtre. L'Acte I fut celui des
années 60 et l'Acte II est quand tout devient terrifiant et correspond à notre temps.
Cependant dans une fiction, vous savez que l'Acte III met en scène, soit une joyeuse
exubérance de découvertes et de réunification défaisant le mal, soit une tragédie.
Chacune des alternatives est de l'art et chacune porte le même message: quelque soit
la puissance des ténèbres il existera toujours une place pour la lumière.

Ceci est donc un appel aux personnes qui sont intéressées par l'audace et la
bravour comme Ram Dass le dit se "Lever" ["Standing Up"]. C'est une époque
merveilleuse pour être un héros car les forces des ténèbres sont partout. Tant que
tout le monde fait quelque chose, c'est très encourageant. Comme Johann Wolfgang
von Goethe le disait: «Que tout le monde balaie devant sa propre porte et le monde
entier sera propre».

Que diriez vous aux jeunes au sujet des psychédélques?

Je leur donnerais simplement des lectures de mes conférences des années 60 sur
[l'importance] du contexte et du lieu qui se résume ainsi: Si vous allez utiliser des
psychédéliques, faites le avec quelqu'un que vous aimez et avec de la chance
quelqu'un qui a été à votre place avant vous et soyez conscient que vous pourriez
vous rendre compte que le monde et meilleur que vous ne le pensiez.

26
Au-delà de ça, ce que je dis généralement aux jeunes gens, c'est de comprendre
que le gouvernement vous a réellement et lourdement désinformés et qu'il serait
grandement mieux que vous sachiez la vérité avant de travailler avec les
psychédéliques.

Beaucoup de personnes qui débutent avec les psychédéliques aujourd'hui sont peut-
être un peu trop jeunes. Ce que j'ai appris de mes propres recherches est que les
psychédéliques font du compostage avec les expériences de votre vie afin que
quelque chose de nouveau puisse se développer. Si vous n'avez pas beaucoup
d'expérience, vous n'allez pas en retirer beaucoup.

J'ai toujours regardé les psychédéliques comme des outils pour l'apprentissage.
Même au milieu d'une expérience psychédélique, je commencerais à penser: «Je me
demande ce que je vais faire avec ça?». Dans un sens, je voulais que cela se termine
pour commencer la phase de digestion et d'assimilation car les expériences
psychédéliques en elles-mêmes n'étaient pas mon intérêt principal.

Avez-vous pris des psychédéliques dans les récentes années? Si oui, avez vous
trouvé cela utile?

J'ai eu une longue période sans eux. Le problème était en partie dû au contexte et
au lieu. L'illégalité n'arrange pas les choses. La plupart de mes travaux étaient légaux
et légitimes et lorsque je prenais des psychédéliques à la fin de cette période, c'était
basiquement une chose acceptable que la police de la "pensée" n'avait pas ruinée.

Mais très récemment, j'ai eu une expérience psychédélique majeure. Ce que je


voulais explorer à partir de cette perspective était la question: «Ai-je vécu une vie
dans le cadre de cette vision plus large que je ne possédais pas auparavant et que je
possède à nouveau?».
Ce fut comme un avant-goût du Jugement Dernier où il y a tous ces poids et

27
mesures pour mettre en balance toutes les mauvaises choses que l'on a fait et celles
qui furent épatantes et vous regardez simplement le résultat des mesures. J'ai été
soulagé de voir que ma vie est correcte.

A un niveau plus élevé, quoique fût ma vie, cela n'aurait aucune importance (que
j'eus été un meurtrier ou un saint). A un niveau suffisament élevé, cela serait
simplement la manière dont fonctionne l'Univers. Mais le niveau auquel j'observais
était conventionnel.
En d'autres termes: Est-ce que j'ai appliqué ce que j'ai appris de la manière dont
j'ai traité les êtres humains et moi-même, de la manière dont j'ai aimé et me suis
développé? C'était une longue session d'auto-évaluation.
J'aurais pu accéder très confortablement à un espace spirituel ou j'aurais pu sauter
tout ça. Cependant, je pense que ce qui est ressorti de l'expérience fut la
réaffirmation que ma personnalité n'est pas le siège de mon intérêt. C'est un bon
outil; je l'apprécie. Et c'est un outil pour le genre de choses que je fais dans le
monde. Mais c'est la même chose pour ma voiture.

Qu'auriez-vous été sans les psychédéliques?

Sans les psychédéliques j'aurais été quelqu'un de très ennuyeux. Et je n'aurais


certainement pas pu maintenir un marriage convenable. J'ai une assez bonne idée de
qui j'étais lorsque j'étais étudiant à Harvard: fou, rusé, intelligent, sarcastique,
enfantin, arrogant, à vomir! Je veux dire, je suis amusé par qui j'étais mais je ne
l'inviterais certainement pas à table.
Mon monde était minuscule, fondé sur le fait d'avoir un large vocabulaire, un QI
modérément élevé, une petite âme, tellement petite que si vous l'aviez testé avec une
cuillère à café vous n'auriez pas été capable d'en avoir un goût.

Il est ainsi très clair pour moi que les psychédéliques sont la ressource
fondamentale sur laquelle j'ai puisé pour devenir un être humain.

28
Comment les psychédéliques ont influé votre opinion sur la vieillesse et la mort?

Bien, ceux sont 2 questions séparées. Prenons par exemple la mort parce que c'est
facile.
Mes expériences psychédéliques rendent limpide le fait que pour Jim Fadiman, la
mort va mettre fin à beaucoup de matériaux anecdotiques qui étaient intéressants. Et
en tant que Jim Fadiman, je pense absolument que c'est affreux. Mais pour "Moi",
l'autre Moi, quelle affaire!
J'ai le profond sentiment que ma personnalité est comme une chemise et quand ma
chemise sera suffisamment usée je l'enlèverai. Il y a d'autres chemises [6-1]. Donc la
mort est quelque chose que je n'attends pas particulièrement. Mais quelqu'un a dit:
«Cela va guérir ce qui te tourmente».
En ce qui concerne la vieillesse, eh bien, je n'ai pas encore trouvé de chose
pertinente à son sujet.

Pour changer un peu de sujet, qui selon vous devrait prendre des psychédéliques?
Imaginez que vous ayez le pouvoir d'établir une politique.

Si j'avez le pouvoir d'établir une politique, je concevrais probablement quelque


chose qui s'apparente à la manière dont la littérature pour adulte est conçue. On
donnerait cette expérience dans de bonnes conditions et ceux qui sont motivés pour
aider d'autres personnes seront habilités à le faire. Il serait clairement utile que les
personnes ayant une formation en santé mentale ou physique, soient là en premier
comme guides car il y a parfois des problèmes avec ces puissants matériaux.

J'ai un fort sentiment que nous devrions revenir à l'usage des enthéogènes dans le
contexte d'une relation guidée ce qui a été le modèle dans chaque culture
traditionnelle que j'ai étudiée.

29
L'idée que les gens devrait sortir et avoir un trip avec d'autres personnes du même
âge qui n'en savent pas plus qu'eux, qu'ils aient 50, 20 ou 12 ans, n'a jamais bien
marché dans aucune culture et cela ne marche certainement pas bien dans la notre.

Donc si j'étais le Tzar de l'expérience spirituelle je décrèterais que les gens


devraient être autorisés à avoir la liberté de religion aux USA. Je commencerais par
dire que la liberté de religion de type enthéogénique sera pratiquée comme l'on vole
avec un avion privé. Vous ne débuter pas en volant tout seul. Vous voler en premier
avec quelqu'un qui en sait plus que vous et il conserve les commandes jusqu'à que
vous soyez prêt.

Quel conseil donneriez vous à ceux qui seraient intéressés par rendre les
psychédéliques disponibles pour les soins et les expériences religieuses?

Un bon petit conseil est: Ne faites jamais confiance à quelqu'un des médias pour
vous donner une poignée de main honnête.

Mais en grande partie je n'ai pas de conseil à vous donner. Je ressens seulement
un mélange d'admiration et de tristesse pour vous et le gros rocher que vous poussez
en haut d'une pente raide car quand vous arrivez en haut, chaque fois quelqu'un le
pousse en bas.
Dans un sens, ceux qui sont impliqués dans l'art des soins avec les psychédéliques
sont dans une démarche de préservation; vous empêchez le potentiel de se perdre
totalement. Ainsi, c'est un peu comme les moines irlandais au 9ème et 10ème siècle:
vous préservez la connaissance jusqu'à ce qu'elle puisse être utile.

Si vous êtes autorisés à faire des recherches, je serais très heureux pour vous. Je
vous admire simplement, vraiment, d'avoir la volonté de faire ce travail que j'ai
clairement abandonné. L'approche médicale et psychatrique pourrait être l'unique
porte encore ouverte pour vous. Toutes les autres ont été fermées. J'ai regardé un

30
certains nombre d'entre elles se fermer devant moi et c'est pourquoi j'ai suivi des
routes alternatives pour garder la Vision vivante.

Du côté spirituel, j'encourage les gens à continuer à laisser le vent divin souffler à
travers eux, cela peut cependant être fait, que cela soit par la méditation "satsang"
[assis, chanté] ou n'importe quoi d'autre.

Aussi loin que je puisse voir, le système national des parcs est un ensemble de
cathédrales conçues pour que les gens puissent laisser aller leur petit ego. Je supporte
ainsi très fortement le système des parcs nationaux. Vous savez, je veux que vous
me donniez des Bryce Canyon, Death Valley, Zion, et autres Yellowstone. Je pense
que c'est une chose à laquelle le gouvernement n'a pas pensé: combien il est
séditieux que les gens tombent amoureux de la Nature.

Etes-vous optimiste sur le long terme?

Sur le long terme je dirais qu'il n'existe pas de vision claire de l'histoire qui
montre que nous allons dans une direction positive.

Socrates correspond à peu près au point le plus avancé que nous ayons atteint.
Avec quelques milliers d'années de plus nous n'avons pas amélioré le modèle. En
conséquence, je ne suis ni optimiste ni pessimiste.

Si vous avez été suffisament de fois au théâtre, vous réalisez que le spectacle
continuera. Néanmoins, l'une des choses qui vient avec l'usage correcte des
enthéogènes est qu'ils engendrent un noyau d'optimisme qu'aucune masse de "ce
monde" ne peut vaincre. Si vous regardez à travers l'histoire avec la perspective des
enthéogènes, vous réalisez que la vérité est toujours disponible et que par conséquent
des gens vont la découvrir d'une façon ou d'une autre dans chaque génération. Dans
cette génération beaucoup d'entre nous avons eu la chance de la découvrir.

31
Le problème potentiel avec le mouvement transpersonnel est le même auquel est
confronté toutes les traditions de Sagesse.
Toutes les traditions spirituelles dignes de ce nom, ont leur origine au niveau
d'individus qui ont fait une percée dans la véritable réalité. Quand ils revenaient, ils
se demandaient: «Comment vais-je apprendre ça à quelqu'un?». D'une certaine façon
ils trouvèrent le moyen de le faire et ensuite de nombreuses personnes finirent par
tourner autour d'eux, dont une partie dire: «Je vais faire le sale boulot. Je vais
arranger les rencontres. Je vais apporter la nourriture. Je vais gérer les choses». Les
gestionnaires comme ils le font toujours, prirent le contrôle de la situation.
Le fondateur original décèda et les gestionnaires commencèrent à rendre les choses
plus simple pour eux car il est plus simple d'apporter la nourriture quand c'est tout
les Dimanche, il est plus simple d'avoir certaines places assises pour chacun. Et donc
les bureaucrates finissent toujours par manger le pain spirituel des fondateurs. Sans
une infusion continuelle de pain spirituel, vous en arrivez à ce que l'on nomme une
religion.

L'urgence spirituelle (le besoin de faire partie de votre soi tout entier) ne peut pas
être réprimée, de la même manière que les besoins sexuels ne peuvent l'être. Mais
son expression se calcifie toujours, inévitablement et je dis cela sans aucune
animosité. Des os inflexibles mènent à plus d'inflexibilité.

Mon soucis par exemple, est que la psychologie humaniste et transpersonnelle sont
encore dirigées par des gens comme moi. Je veux savoir qui va se débarasser de
moi. Qui va mettre à la porte l'ancien régime? j'attends avec impatience la prochaine
génération psychédélique qui nous dira:
«Quelle bande fatiguée de vieux péteux avec ce journal, cette association et cette
psychologie traditionnelle alors que Dieu est tout autour de nous!».
Et je veux leur dire:
«Faites moi sortir du palais. Vous avez gagné! Abattez les murs. Revenons en aux

32
bases».

J'apprécierais tout de même que vous ne me fusilliez pas. Mais s'il vous plait,
prenez mon boulot!

Si vous aimez ce que vous avez lu, achetez le livre! LIEN

REFS

[1-1]: Personality and Personal Growth


[1-2]: Unlimit Your Life: Setting and Getting Goals
[1-3]: Be All That You Are
[1-4]: Essential Sufism
[1-5]: The Other Side of Haight
[3-1]: "If you got it, get it and bring it in here or else you've got to leave it out
there"
[4-1]: The Teachings of Don Juan: A Yaqui Way of Knowledge
[6-1]: «Mon Kimono est usé; là-haut, je le changerai pour un neuf» - Morihei
Uyeshiba

33

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