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Série « annales »

ANNALES 2018
DE LA BANQUE
D’ÉPREUVES
COMMUNES CCIR
SUJETS ET CORRIGÉS

HEC
ESSEC
ESCP EUROPE
EMLYON
EDHEC
IÉNA
BSB
LA ROCHELLE BS
EM STRASBOURG BS
SCBS

Avec le soutien de l’ISC Paris

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Le mot
ESPACE PRÉPAS
Préparationnaires, futurs candidats à l’intégration de l’une des vingt-quatre
Grandes Écoles de management qui recrutent via le concours BCE en 2019, ne
lâchez pas ce livre ! Vous avez entre les mains l’un des outils les plus précieux
pour accompagner votre préparation aux écrits qui se dérouleront en avril et
mai prochains. Vos professeurs prévoient certainement de vous faire travailler
sur des épreuves tombées l’an passé, voire lors de sessions précédentes du
concours, et ils ont raison… pour deux raisons : l’approche technique et la mise
en condition physique ! Comme le sportif s’entraîne pour réussir une compéti-
tion, le préparationnaire s’entraîne pour réussir les concours. Cela passe par la
connaissance la plus précise possible des consignes, la maîtrise des attendus
de chaque épreuve, et par une série de mises en situation pour vous confronter
à des sujets sur lesquels ont planché vos aînés, seuls ou sous la supervision
de vos professeurs.
Ils ne sont de toute façon jamais loin, et encore moins dans ce cas précis,
puisque ce sont eux les auteurs de l’ensemble des corrigés que vous trouverez
dans ces pages. Nous avons veillé à rassembler le panel de sujets le plus
représentatif possible de la diversité et de l’exigence du concours : toutes les
options (ECS, ECE, ECT), toutes les matières (maths, culture gé, éco, langues…)
et tous les concepteurs d’épreuves sont présents. À chaque fois qu’ils l’ont
jugé nécessaire, les professeurs ont agrémenté leurs corrigés de commentaires,
de réflexions, de conseils aux futurs candidats. Un grand merci à eux pour ce
travail précieux qu’Espace Prépas a le plaisir de vous adresser avec l’ISC Paris,
fidèle compagne de votre préparation au concours. La business school soutient
en effet la réalisation des annales BCE depuis plus de dix ans et rappelle cette
année d’une nouvelle manière son attachement aux enseignements des classes
préparatoires en intégrant de la philosophie au curriculum du programme
Grande École. Vous le savez déjà si vous consultez régulièrement le site Espace
Prépas (https://grandes-ecoles.studyrama.com/espace-prepas), ce que je ne
saurais trop vous conseiller ! Vous y trouverez toute l’année des informations
sur les concours et des actualités sur les écoles analysées par la rédaction
d’Espace Prépas en plus d’articles de géopolitique, de culture générale, d’éco-
nomie, de méthodologie… écrits par vos professeurs. Nous avons aussi des
rendez-vous « IRL » dans l’année, à l’occasion de la sortie des quatre numéros

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du magazine Espace Prépas. Vous les recevrez directement dans vos classes.
Avec tout cela, le concours, ce sera juste l’occasion de décrocher vos meilleures
notes de l’année !

Stéphanie Ouezman
Rédactrice en chef d’Espace Prépas

Le concours BCE 2019 évolue.

Toute l’information sur le site Espace Prépas, rubrique


« Concours »

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Sommaire
Le mot d’Espace Prépas 3
Coefficients et cooptation
les épreuves du concours ISC Paris 2019 7
Présentation de l’ISC Paris 9

Épreuves communes

CULTURE GÉNÉRALE
Épreuve HEC 14
Épreuve EDHEC 22
RÉSUMÉ DE TEXTE
Épreuve HEC 28
LANGUE VIVANTE 1
Anglais IENA 36
Anglais ELVi 40
Allemand IENA 46
Allemand ELVi 50
Espagnol IENA 56
Espagnol ELVi 61
Italien IENA 67
LANGUE VIVANTE 2
Anglais IENA 71
Anglais ELVi 74
Allemand IENA 79
Allemand ELVi 83
Espagnol IENA 88
Espagnol ELVi 92
Italien IENA 96

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Option scientifique

HISTOIRE, GÉOGRAPHIE ET GÉOPOLITIQUE


DU MONDE CONTEMPORAIN
Épreuve ESCP Europe 99
Épreuve ESSEC 117
MATHÉMATIQUES
Épreuve EMLYON 131
Épreuve ESSEC 154
Épreuve HEC 178
MATHÉMATIQUES II
Épreuve HEC/ESCP Europe 206

Option économique

ÉCONOMIE, SOCIOLOGIE ET HISTOIRE


DU MONDE CONTEMPORAIN
Épreuve ESSEC 221
Épreuve ESCP Europe 234
MATHÉMATIQUES
Épreuve EMLYON 249
Épreuve EDHEC 268

Option technologique

ÉCONOMIE
Épreuve SCBS 292
Épreuve ESSEC 308
DROIT
Épreuve SCBS 324
Épreuve ESSEC 333
MATHÉMATIQUES
Épreuve ESCP Europe 340
Épreuve BSB 359
RÉSUMÉ DE TEXTE
Épreuve EM Strasbourg 374

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iscparis.com

Préparez vos écrits et retrouvez gratuitement


toutes les annales depuis 2006 sur notre site internet.

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ÉPREUVES ÉCRITES ET COEFFICIENTS
ISC PARIS
AUX CONCOURS 2019
OPTION SCIENTIFIQUE Concepteur Coefficient Durée
Dissertation de culture générale EMLYON + HEC Paris 5 4h
Contraction de texte HEC Paris 3 3h
Mathématiques EM LYON 4 4h
Langue vivante I IÉNA 8 4h
Langue vivante II IÉNA 5 3h
Histoire, géographie et géopolitique du monde
ESCP Europe 5 4h
contemporain

OPTION ÉCONOMIQUE Concepteur Coefficient Durée


Dissertation de culture générale EMLYON + HEC Paris 4 4h
Contraction de texte HEC Paris 3 3h

ÉPREUVES ISC PARIS DU CONCOURS 2019


Mathématiques EMLYON 3 4h
Langue vivante I IÉNA 7 4h
Langue vivante II IÉNA 5 3h
Économie, sociologie et histoire du monde ESCP Europe +
8 4h
contemporain SKEMA

OPTION TECHNOLOGIQUE Concepteur Coefficient Durée


Dissertation de culture générale La Rochelle BS 3 4h
Résumé de texte EM Strasbourg BS 3 3h
Mathématiques BSB 3 4h
Langue vivante I IÉNA 4 4h
Langue vivante II IÉNA 3 3h
Économie/ Droit SCBS 5 4h
Management et sciences de gestion EM Strasbourg BS 9 4h

OPTION A/L Ulm et ENS Lyon Concepteur Coefficient Durée


Contraction de texte HEC Paris 3 3h
Langue vivante I IÉNA 7 4h
Langue vivante II IÉNA 5 3h
Moyenne concours ENS ENS 15

OPTION B/L Concepteur Coefficient Durée


Contraction de texte HEC Paris 3 3h
Dissertation littéraire ESSEC BS 5 4h
Dissertation philosophique HEC Paris 4 4h
Histoire ESCP Europe 4 4h
Langue vivante I IÉNA 5 4h
Langue vivante II IÉNA 3 3h
Épreuve à options ESSEC BS 6 4h

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ISC PARIS
22, boulevard du Fort de Vaux
75017 Paris
Tél. : 01 40 53 79 99
Fax. : 01 40 53 98 98
Internet : www.iscparis.com
E-mail : jmongodin@iscparis.com

I NTERLOCUTEURS
Président du groupe :  Yves Hinnekint
Directeur Général :  Henry Buzy-Cazaux
Directeur Général adjoint Académie et Programmes :  Thierry Delecolle
Directrice du Programme Grande École : Corinne Rougeau-Mauger
Directeur Entreprises Étudiantes :  Pierre Barreaud
Chargée promotion Classes Prépas : Jennifer Mongodin

I NFORMATIONS GÉNÉRALES
Principaux repères
Une formation académique, internationale et professionnelle sur 3 ans
• Création : 1963 (association loi 1901) ;
• Situation  : Paris, ville privilégiée pour l’emploi, les stages, les partenariats ;
• Reconnaissance par l’État : 1969, Diplôme visé à Bac+5 par le Ministère de
l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation et conférant

PRÉSENTATION DE L’ISC PARIS


le Grade de Master ;
• Membre de la Conférence des Grandes Écoles ;
• Membre du Chapitre des Écoles de Management ;
• Accréditée AACSB ;
• Membre de l’EFMD (European Foundation for Management Development) ;
• Membre de l’UGEI (Union des Grandes Écoles Indépendantes) ;
• Membre de la FNEGE (Fondation Nationale pour l’Enseignement et la Gestion
des Entreprises) ;
• Membre de l’EAIE (European Association for International Education) ;
• Membre de la NAFSA (Association for International Educators) ;
• Membre de Campus France ;
• Labellisée EESPIG (établissement d’enseignement supérieur privé d’intérêt général).

Quelques chiffres
• 2 000 étudiants ;
• Un corps professoral composé de professeurs permanents, d’enseignants-
chercheurs et d’experts professionnels ;
• De nombreuses spécialisations et des doubles diplômes ;
• 17 Entreprises Étudiantes (culture & arts, sports & aventures, service aux
étudiants, humanitaire) ;
• 142 accords internationaux dans 47 pays ;
• Au minimum 14 mois de stage ;
• Des coopérations actives avec plus de 1 200 entreprises ;
• 41 253  € de salaire annuel au 1 er emploi ;
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• Plus de 18 000 anciens élèves.
Frais de scolarité : 11 300 € pour l’année scolaire 2017-2018 (frais réévalués
chaque année).
Financement des études : bourses d’État, bourses ISC Paris (de 500 à
1 600  €), prêts bancaires à taux préférentiels. Job service interne (ISC Network,
missions rémunérées 10 € de l’heure), alternance, emploi du temps aménagé
et contrat de professionnalisation possible.

D
REAM, DARE, DO

Dans un monde interpellé par la globalisation de l’économie, les multiples


changements du système économique et social, les évolutions technologiques
incessantes, la mission de l’ISC Paris est d’assurer aux élèves sélectionnés une
formation généraliste au management, de haut niveau académique assise sur
une activité de recherche diversifiée, réellement professionnalisante et condui-
sant à une insertion professionnelle de qualité.

Dans le cadre de cette formation, l’ISC Paris se donne aussi pour mission :

• d’accompagner les élèves à devenir acteurs responsables de leur forma-


tion et de l’acquisition de leurs connaissances, à construire leur identité
professionnelle et à développer leur capacité à donner du sens au travail.
• de développer les capacités décisionnelles des élèves par une pédagogie de
l’action stimulant l’esprit d’entreprise, par la mise en œuvre d’enseignements
transversaux et par l’acquisition d’une bonne pratique des réseaux.
• d e conduire des activités de recherche diversifiée : recherche à visée
managériale, à visées théoriques et à visée pédagogique.
PRÉSENTATION DE L’ISC PARIS

• d’encourager les élèves à la prise de risque en milieu complexe et incertain,


en leur donnant le goût de l’entrepreneuriat, et en développant leurs capacités
d’analyse et de synthèse, de créativité et d’innovation, de prise de décision.
• de construire des communautés apprenantes favorables à l’apprentissage
collaboratif, source d’intelligence collective et de création de valeur.
• de préparer les élèves à la conduite du changement par l’hybridation des
savoirs, par la capacité à l’approche globale des problématiques de l’entre-
prise, par l’ouverture d’esprit et la culture générale, par le développement du
leadership.
• de prédisposer les élèves à assurer des responsabilités professionnelles dans
un environnement international par une exposition aux réalités internationales
et une approche multiculturelle du management.
• d’amener les élèves à prendre conscience des exigences de l’éthique des
affaires, de la responsabilité sociale de l’entreprise et de créer les conditions
favorables d’une pratique de l’altérité, du respect de l’autre et de la solidarité.

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Devenir expert et trouver sa voie

Objectif : dispenser une formation académique de qualité et personnalisée.

Marketing, droit, communication, gestion… avec 44 matières à valider au cours


de vos deux premières années d’études, vous aurez la possibilité d’acquérir
les connaissances nécessaires pour mener à bien les principales missions d’un
manager : définir une stratégie marketing et commerciale, diriger une équipe,
gérer un budget…
Cette polyvalence et cette pluridisciplinarité, fortement appréciées des recru-
teurs, seront complétées par 5 pré-spécialisations au choix.
En 3e année, avec plus de 300 heures de spécialisation, vous maîtriserez parfai-
tement l’un de nos domaines d’expertise. De la finance au marketing, du luxe
aux nouvelles technologies, des ressources humaines à l’international, chacun
pourra trouver le domaine de compétence qui conviendra le plus à sa vocation.
Ces spécialisations construites comme de véritables Masters vous ouvriront
les portes des recruteurs les plus exigeants.

Les spécialisations et doubles diplômes de 3e année

POLE MARKETING / COMMUNICATION ET RELATIONS COMMERCIALES


– Management des relations commerciales
– Marketing digital e-business
– Marketing stratégie
– Management des études Marketing et d’opinions DD
– Marketing communication :
Option communication sectorielle : Luxe / Sport / Digital

POLE MANAGEMENT
– Entrepreneuriat

PRÉSENTATION DE L’ISC PARIS


– Innovation in European Business DD
– Management et modélisation des Technologies de l’information DD
– Management des Systèmes d’information
– Achats et Supply Chain Management
– International Business and Management
– Management des Ressources Humaines

POLE FINANCE ET AUDIT


– Expertise Juridique et Fiscale / Gestion de Patrimoine DD
– Finance
– Gestion des Risques Financiers DD
– Gestion des Instruments Financiers DD
– Expertise Audit et Contrôle

DD = Double diplôme

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Mettre le cap sur l’international pour s’ouvrir au monde

Objectif : vous ouvrir les portes de l’international.

Conscient du caractère primordial des langues sur le marché du travail, l’ISC


Paris vous offre la possibilité d’étudier jusqu’à trois langues étrangères.

C’est pour vous une triple opportunité :

• Perfectionner votre niveau en anglais, langue des affaires par excellence, et


valider une qualification officielle (TOEFL et/ou TOEIC). À l’ISC Paris, les meil-
leurs étudiants en anglais pourront suivre un cursus bilingue et International ;
• Renforcer vos compétences dans une 2e langue déjà étudiée ou en
découvrir une nouvelle ;
• S’ouvrir à des cultures plus originales, avec la possibilité de choisir une
3e langue (arabe, chinois, coréen, espagnol, italien, japonais, portugais,
russe…) afin de vous préparer à aborder les nouveaux marchés en pleine
effervescence !
Au-delà de votre niveau linguistique, ce sont vos expériences réelles à
l’international qui feront la différence aux yeux des recruteurs.
À l’ISC Paris, vous aurez la possibilité en 1re année de faire un stage de
4 mois à l’international ; en 2e ou 3e année de partir 1 ou 2 semestres
chez un de nos partenaires avec la possibilité d’un diplôme de l’université
d’accueil ; d’effectuer un stage de 6 à 8 mois à l’étranger.
Pour ceux dont l’objectif professionnel n’est pas orienté vers l’international,
il faudra néanmoins valider le « passeport international » en validant le
TOEIC avec un score minimum de 785 points et/ou son TOEFL à 90 points,
et vivre au moins une expérience à l’international : lors d’un stage de
16  semaines minimum et/ou lors d’un échange dans l’une de nos
PRÉSENTATION DE L’ISC PARIS

142 universités partenaires dans 47 pays.

S’immerger en entreprise et devenir professionnel

Objectif : faire de l’entreprise un lieu d’acquisition des compétences.

Lors de vos recherches de stages et d’emplois, les recruteurs seront particu-


lièrement attentifs à vos expériences professionnelles. En bref : à ce que vous
savez faire !
L’ISC Paris a donc développé sa pédagogie autour de l’acquisition d’ex-
périences, en proposant 12 à 26 mois de stage au cours des trois années.
Ces expériences de terrain vous permettront d’appréhender les missions
d’entreprises, de tester différents secteurs d’activité et d’acquérir des
compétences professionnelles. De plus, vous pourrez choisir de passer
12 mois en entreprise entre votre 2e et 3e année, c’est l’année d’expérience
professionnelle. Pour vous aider à aborder ces stages de façon efficace et
professionnelle, vous bénéficierez d’un coaching personnalisé.
Autre atout : vous profiterez à Paris, d’une situation géographique exception-
nelle, qui vous donnera accès à un important réseau d’entreprises dans des
domaines d’activité variés.

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Des moyens mis en place pour accompagner la recherche de stage

• L’Entreprise Étudiante Partner ISC propose à tous les étudiants de l’école des
offres de stage en France et à l’international. L’année dernière, ce sont près
de 4 000 offres de stages qui ont été proposées.
• MyISCstage permet aux recruteurs de déposer leurs offres de stage à partir de
notre site internet et à nos étudiants de les consulter en temps réel. Cet outil
permet aussi à nos étudiants d’être en contact avec les différents recruteurs
afin d’échanger avec eux sur les missions proposées.

Des outils pour trouver son 1er emploi :

• Les forums ISC Paris : permettent deux fois dans l’année à nos étudiants de
rencontrer les entreprises qui recrutent ;
• La semaine des métiers et la quinzaine des secteurs d’activité ;
• Les ateliers CV/emploi ;
• CV des jeunes diplômés en ligne, consultables par les entreprises ;
• La rédaction et la soutenance d’un projet professionnel pour chaque étudiant
de 3e année ;
• Un réseau actif de plus de 18 000 anciens ;
• Plus de 3 000 offres d’emploi déposées par an ;
• 20e Business School française au classement du Financial Times ;
• Une nouvelle plateforme exclusive en partenariat avec Job Teaser.

Un pédagogie par l’action : « Entreprendre pour Apprendre »

Objectif : créer un pont entre connaissances et expérience professionnelle grâce


à l’univers des Entreprises Étudiantes.

PRÉSENTATION DE L’ISC PARIS


Dès votre première année, et pendant toute votre scolarité, vous pourrez
allier formation académique et missions réalisées au sein de votre Entreprise
Étudiante. L’intérêt premier de cette « alternance » est de vous permettre
d’appliquer l’ensemble des connaissances enseignées en cours lors de missions
d’entreprises réelles.
Point d’orgue du parcours, les Entreprises Étudiantes vous obligeront à
gérer un emploi du temps chargé, à l’image des managers en activité. Des
expériences qui vous apprendront à vous organiser, à planifier, à déléguer,
à anticiper… des qualités attendues par les entreprises.

Depuis plus de 50 ans, l’ISC Paris accompagne


ses élèves sur le chemin de la réussite.

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S UJET

CULTURE GÉNÉRALE
Durée : 4 heures.

Il sera tenu compte des qualités de plan et d’exposition, ainsi que de


HEC la correction de la langue.
Aucun document n’est autorisé. L’utilisation de toute calculatrice et
de tout autre matériel électronique est interdite.

S
UJET

DISSERTATION

Mon corps et moi

C ORRIGÉ
Par Tony Brachet, agrégé de philosophie, correcteur aux concours des
S

Grandes Écoles de commerce.

Voilà un sujet qui, avec son caractère asyntaxique devenu habituel à HEC,
a de quoi effrayer. Le jury a-t‑il voulu interpeller Mon corps et moi de René
Crevel ? Nous l’avons reparcouru.
« Ce soir, mon souhait réalisé, je me trouve disponible à moi-même. Je n’ose
plus espérer que se trouve la solitude. "Bonjour, esprit habillé d’un corps."
Hélas ! le malheur veut que je sois tout juste en présence d’un corps qui se
croit habillé avec esprit. »
Eco. techno. Khâgne

Plus loin : « Mourir, c’est se désintéresser. La magnificence d’un corps débar-


rassé de la vie et que nos mains colorées, chaudes mais faibles, n’osent
toucher est déjà, semble-t‑il, d’un monde où commence le vrai et son règne
insensible, puisque le sensible auquel nous devons de nous renouveler,
c’est-à‑dire de nous nier et nous renier sans cesse, ne saurait tolérer rien
CULTURE GÉNÉRALE

de définitif ».

En inversant le titre, le jury a pu vouloir interroger, entre autres, l’inconscient


même du poète, esprit encombré d’un corps que des « ailes de géant »
empêchent de marcher. Nous commencerons par là. L’abstraction poétique
et/ou philosophique, assise sur le mythe de l’Âme, qui enfante, à partir de
l’expérience fictive de la mort, ainsi que l’a montré Durkheim, un second
corps, plus adéquat au Moi que le corps défaillant.
L’esprit peut se complaire à la « mise en scène » de cette dualité, bientôt
reprise dans une perspective religieuse, d’un corps « toujours-déjà » mourant
(soma-sèma) et d’un corps éternel, comme l’illustre le dogme catholique de
S cient.

la Transsubstantiation. Il peut aussi interpeller, au-delà du sien, rappelé à la


finitude ontologique, le corps du « non-Moi » – en particulier, le corps sexué.
Enfin, dépassant le « corps-à‑corps » d’un esprit divisé d’avec lui-même
et ne souhaitant plus, comme le dit Rousseau de la Profession de foi,

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qu’être « délivré des entraves du corps » afin de rester un « moi sans contra-
diction », le Moi peut consentir à n’être, au prix de la reconnaissance de sa
double finitude sexuelle et mortelle, qu’un « corps tranquille » au sens du HEC
titre de l’œuvre-fleuve de Jacques Laurent.

Une concurrence déloyale

C ORRIGÉ
Reprenons le texte de Crevel : ma chair devenait insensible – poursuit l’au-
teur de Mon corps et moi reconnaissant qu’il « n’a pas voulu se sentir vivre »
– Écrire, c’est vivre comme si l’on était déjà mort, souligne Rilke. Mais peut-
être la leçon s’étend-elle à tout vivant : on qualifie ainsi de syndrome du
gisant la difficulté de survivre à un deuil anticipé qui, dans le cas de l’« écri-
vant », pourrait être le deuil de soi-même :
« J’ai pincé ma peau devenue indifférente. Je me suis mordu la main, et je
n’ai pas reconnu le goût humain » poursuit le plus endolori, peut-être, des
surréalistes. Le mort-vivant – véritable zombie psychique – qu’est le gisant
de l’écriture se figure être déjà passé par les portes de la mort.
Telle est la problématique de Mon corps et moi : nous pourrions l’appeler,
avec Mélanie Klein, « dépressive », le Moi paraissant aussi clivé – radicale-
ment séparé – de son corps qu’il l’est, pour Freud, de lui-même en tant que
moi divisé. Notre corps ne nous est pas initialement « propre » comme le
voudra la Phénoménologie : il nous est au contraire parfaitement « étranger »,
au point que nous ne le reconnaissons comme notre qu’au terme d’une
expérience solipsiste.

Ontologie du gisant

« Je me considérois premièrement comme ayant un visage, des mains, des


bras, et toute cette machine composée d’os et de chair, telle qu’elle paroît
en un cadavre, laquelle je désignois par le nom de corps ». Le sentiment
premier déployé par Descartes dans sa seconde Méditation ne révèle pas,
Eco. techno. Khâgne

chez le philosophe, une attitude bien différente – elle est seulement plus
« platonicienne » – de celle de Crevel. Le déni du dernier – « animal raison-
nable, hélas » – se mue ici en dénégation :
« Je ne suis point cet assemblage de membres que l’on appelle le corps
humain ; je ne suis point un air délié et pénétrant répandu dans tous ces
membres ; je ne suis point un vent, un souffle, une vapeur, ni rien de tout ce
CULTURE GÉNÉRALE

que je puis feindre et m’imaginer, puisque j’ai supposé que tout cela n’étoit
rien, et que, sans changer cette supposition, je trouve que je ne laisse pas
d’être certain que je suis quelque chose. »
Moi, chose qui pense – âme, esprit – je ne suis point corps. La relation est ici
d’exclusion, d’égarement – celui d’un Ange incarné – voire d’erreur (il faudra
cinq autres Méditations pour établir l’union réelle de l’Âme et du Corps) ou
même de faute (l’âme est libre, les passions du corps la font errer). « Le mal,
c’est la matière », résume Hugo, avant que Valéry ne campe dans l’Ange
une créature trop humaine qui « ne trouve pas sa cause dans le ciel clair ».

La même « néantisation », la même angoisse émergent de la prose subite-


S cient.

ment moins poétique de Marcel Proust :


« Il fallait partir, en effet, de ceci que j’avais un corps, c’est-à‑dire que j’étais
perpétuellement menacé d’un double danger, extérieur, intérieur […]. Et avoir

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un corps c’est la grande menace pour l’esprit. La vie humaine et pensante
(dont il faut sans doute moins dire qu’elle est un miraculeux perfectionne-
HEC ment de la vie animale et physique, mais plutôt qu’elle est une imperfection
encore aussi rudimentaire qu’est l’existence commune des protozoaires en
polypiers, que le corps de la baleine, etc.), dans l’organisation de la vie spiri-
tuelle, est telle que le corps enferme l’esprit dans une forteresse ; bientôt la
forteresse est assiégée de toutes parts et il faut à la fin que l’esprit se rende. »
C ORRIGÉ

Ces mots du Temps retrouvé sont dans toutes les mémoires. La médecine,
« science – pourtant – extrêmement relative du peu que nous sommes » les
corrobore : tel généraliste d’« autrefois », annonçant à sa compagne sa fin
imminente par cardiopathie aigüe, dit seulement : je vais mourir, la mort
suivit. Un autre, physicien, calcula au tableau le temps qui lui restait à vivre
après avoir manipulé accidentellement une pile de plutonium.

« […] il m’était arrivé, dans les moments d’excitation intellectuelle où quelque


circonstance avait suspendu chez moi toute activité physique, par exemple
quand je quittais en voiture, à demi gris, le restaurant de Rivebelle pour aller
à quelque casino voisin, de sentir très nettement en moi l’objet présent de
ma pensée, et de comprendre qu’il dépendait d’un hasard, non seulement
que cet objet n’y fût pas encore entré, mais qu’il fût avec mon corps même
anéanti ».
Cette suite moins fréquentée du texte proustien institue une « interface »
commune au corps et à l’esprit. Conditionné par une semi-ébriété, l’instant
créatif de l’esprit, non encore couché sur le papier – pensée sans langage
comme l’est celle de Dieu – demeure évanescent et contingent, voire inter-
mittent comme les « égarements » du titre de Crébillon fils, et en ce sens
également affectif.
La lumière naturelle de Descartes en effet, l’instant du génie – même en
faisant abstraction de la mort puisque le corps n’est pas encore – ne suffit
pas à nous maintenir éternellement dans la clarté du cogito. Il y faudrait
l’esprit sans corps dont parle Joseph Joubert, le château de la pureté de
Eco. techno. Khâgne

l’Igitur de Mallarmé. Mais Igitur n’est qu’un fantôme, un double du corps


réel, projeté hors du temps comme de l’espace.

« Tout à l’heure – poursuit l’auteur de Jean Santeuil – quand je rentrerais


chez moi (nous admirerons le conditionnel) il suffirait d’un choc accidentel
pour que mon corps fût détruit, et que mon esprit, d’où la vie se retirerait, fût
CULTURE GÉNÉRALE

obligé de lâcher à jamais les idées qu’en ce moment il enserrait, protégeait


anxieusement de sa pulpe frémissante et qu’il n’avait pas eu le temps de
mettre en sûreté dans un livre. »
L’esprit est, par opposition au corps proprement dit, corps pour soi ou corps
métaphorique. « Soleil qui se noie dans son sang qui se fige », il est rappelé
par l’Ange de la mort qui recueille « du passé lumineux tout vestige ». Du
Baudelaire des Harmonies du soir au Tombeau d’Edgar Poe, tout poète
articule l’éternel changement par lequel le Moi tente de nier le changement
temporel jusqu’à rejoindre ce que le jeu World of Warcraft appelle l’Île du
temps figé, Rachmaninov l’Île des morts.
La densification, la matérialisation, l’ossification de l’esprit grandissent
S cient.

à mesure que s’achève la Recherche : « Avec ma mort eût disparu non seule-
ment le seul ouvrier mineur capable d’extraire les minerais, mais encore le
gisement lui-même. » L’en soi de l’esprit n’est pas un os, affirme, contre Gall,

16 l ANNALES CCIR 2018-2019

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Hegel. L’artiste pourtant, tel le Grand macabre de Michel de Ghelderode,
prend sa folie pour un ossuaire. Occupé à sa propre autopsie « anthume »,
à fusionner hallucinatoirement le Corps et le Moi, il est le phénoménologue HEC
de la mort.

Nécessité de la contingence

C ORRIGÉ
Sartre pointe dans l’Être et le Néant l’« aliénation » mortelle que constitue
l’être-corps en tant que tel : « dans la mesure où mon corps indique mes
possibilités dans le monde, le voir, le toucher, c’est transformer ces possi-
bilités qui sont les miennes en mortes-possibilités » (E.N., III, ch. 2). Ainsi
« il n’y a pas de différence de nature entre la perception visuelle que j’ai du
corps du médecin [qui m’opère] et celle que j’ai de ma propre jambe » – ce
qui signifie que mon corps m’est substantiellement lié sans être moi.
Le point d’aboutissement de Proust – le corps assiège, puis dépossède
l’esprit, comparé (en tant que cerveau puisqu’esprit et corps confluent peu
à peu vers la « monade dominante ») à « un thésauriseur dont le coffre-fort
crevé eût laissé fuir au fur et à mesure ses richesses » – est le point de départ
de Sartre. Affirmant que « l’esprit ne saurait être uni à un corps » puisque
« c’est tout entier que l’être-pour-soi doit être corps et tout entier qu’il doit
être conscience » l’auteur de La Nausée conclut que « le corps est tout entier
psychique ».
Sartre est ainsi proche de Spinoza. Fin kabbaliste, lecteur d’Henri Morus,
Spinoza considérait en effet dans l’Éthique (II, prop. 7 scolie) que le Corps et
l’Âme – l’idée du corps, avec sa réflexivité, « l’idée de l’idée », notre « Moi » –
sont une seule et même chose, ce que la Kabbale elle-même n’aurait perçu
« que comme dans un nuage ». Compris dans le Tout – Nature ou Dieu – le
Moi n’est que son corps, plus la représentation, dédoublée ou « répliquée »,
de ce dernier.

Il n’est pas besoin d’une décision spéciale de Dieu pour faire exister un Moi,
Eco. techno. Khâgne

une « idée de l’idée » seulement « possible », et il n’y a pas d’idée troisième :


le possible est le réel. Aussi Sartre, croisant l’illustre métaphysicien, définit-il
mon corps comme « la forme contingente que prend la nécessité de ma
contingence » (L’Être et le néant, III, ch. 2) – chez Spinoza, l’ignorance où je
suis, tant de l’état de mon propre corps, affecté qu’il est par tant d’autres
(Éthique, II, 19) que de mon « Moi », idée de l’idée de ces affections (ibid, 29).
CULTURE GÉNÉRALE

L’idée de l’idée, la conscience réflexive qui « existe son corps » – constituent


des faits d’expérience indépendants des expériences sensorielles auxquelles
un Hume, ou encore un Maine de Biran, réduisent le Moi ainsi que le Corps,
aboutissant à un « ni Moi ni corps » de continuité apparente jusque dans le
discontinu. Wittgenstein en fera l’hypothèse dans ses Investigations – « je
pourrais avoir mal aux dents d’un autre ».
La langue allemande ne s’embarrassant pas, quant à elle, de la distinction
du « Je » et du « Moi », est contrainte, pour penser le corps, à des distinctions
dites « transcendantales » – étrangères à l’expérience proprement dite – et
qu’alourdit encore la traduction. Ainsi Fichte, dans ses Fondements du droit
naturel, déduit-il le corps, au gré du traducteur, d’un « Je qui est un Moi »
S cient.

dans la mesure où ce serait la réflexivité qui le fait corps propre, de corps


quelconque qu’il était.

ANNALES CCIR 2018-2019 l 17

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Les deux corps du Moi

HEC Ceci n’est pas mon corps


Autrui, « ce moi qui n’est pas moi » selon Sartre (préférons, en toute rigueur
et en français, un « je qui n’est pas moi ») – autrui est « ce médiateur indis-
pensable entre moi et moi-même » qui me permet de m’approprier mon
corps, fût-ce dans l’éminente expérience de la honte où l’œil de l’autre me
C ORRIGÉ

surprend dans une posture corporelle (épiant, par exemple, par un trou de
serrure) que mon « être-pour-soi » ne saurait s’assumer seul à seul.
Mais, par ailleurs, « l’âme ne perçoit aucun corps extérieur comme existant
en acte », du moins sans la médiation des affections du nôtre (Éthique, II,
26). Autrui n’est qu’« horizon » que nous n’appréhendons que par « accouple-
ment transcendantal » de l’opération analogique et mystérieuse inventée par
Husserl, et qui ne suggère que métaphoriquement celle, pourtant décisive,
du « corps-à‑corps » sexuel.
Le corps pour nous « transcendantal » – d’autrui est pourtant pour lui –
un corps empirique différencié, que nous nous approprions dans le
fantasme sadien « Ton corps est mien », voire « J’ai le droit de jouir de
ton corps ». Le « mon corps m’appartient » qui lui répond devient, dans la
doctrine de Kant, le fondement du mariage qui définit comme un contrat
d’usage physique réciproque par lequel des Moi sexués se prêtent leurs
corps sans s’en déposséder, ni les aliéner à l’autre.
Ainsi, le corps du non-Moi est le corps juridique – analogue au corps dont
je suis propriétaire et susceptible de permuter avec lui dans l’usage – mais
il n’est pas le corps personnel dont j’ai le droit, souligne Hegel, de me
défaire par le suicide, alors que pour les autres il est « Moi-corps » et à ce
titre inviolable. Toutefois l’auteur de la Philosophie du droit rejette avec
vigueur la position de son prédécesseur, insusceptible de rendre compte,
en aucun sens, de l’impératif biblique de ne faire qu’une seule chair dans
l’union des « Moi ».
Eco. techno. Khâgne

Le corps-à‑corps du Moi

« Le corps du Christ n’est pas le Christ » note abruptement Leibniz en marge
de Thomas White définissant la Transsubstantiation catholique comme
« conversio panis in corpus Christi […] id est in Christum » – les propres
mots du Concile de Trente.
CULTURE GÉNÉRALE

Descartes définit ainsi la transsubstantiation naturelle : « Lorsque nous


mangeons du pain et buvons du vin, les petites parties de ce pain et de ce
vin se transsubstantient naturellement » et deviennent des parties de nous-
mêmes (Quatrièmes Réponses, in. Méditations). Dans la « surnaturelle » au
contraire, « […] le Corps de Christ est […] contenu sous la même superficie
sous [laquelle] le pain serait contenu s’il était présent, quoique néanmoins il
ne soit pas là comme proprement dans un lieu, mais sacramentellement ».
La formulation, « pas catholique » si l’on peut dire – sans être pour autant
luthérienne ni calviniste – implique que la présence réelle de Christ n’a rien
de permanent. C’est une « fulgurance » liée au « miracle » du Sacrement
eucharistique dans l’instant cartésien. La substance corporelle, il le souligne,
S cient.

ne tient pas au lieu, en sorte que le pain – le corps du non-Moi – n’est pas
incorporé (ni, ironisera Voltaire, excorporé) au corps du Christ comme il l’est
à celui du prêtre ou même au notre lorsque nous le nourrissons.

18 l ANNALES CCIR 2018-2019

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Il n’y a rien de commun entre le « corps de Dieu » – être-pour-soi absolu – et
le nôtre au regard de la substance ou du réel, alors que tout l’est entre ce
dernier et le « monde extérieur » – également sous-ensembles du « corps HEC
cosmique » – dont même les animaux, selon Hegel « prouvent » l’inexistence
« en se précipitant sur lui pour le dévorer » (Phénoménologie de l’Esprit,
ch.1), leur Soi (Selbst) préfigurant le Moi, vrai « cannibale psychique » de la
« chair du monde » avant de l’être du corps sexué d’autrui.

C ORRIGÉ
Descartes est ainsi parvenu à « feinter » son correspondant, Arnaud, qui
vient de l’accuser (Quatrièmes objections, in fine) de servir de « magasin
d’armes » aux libertins, incapables de détachement à l’égard du pain, du
vin comme de la chair, qu’elle soit du monde, d’autrui, voire – dans les
perversions et les psychoses – réellement cannibalique.

Mais comment deux corps – deux substances – peuvent-elles coexister,


voire se changer en un même être ? La solution de Leibniz est désormais
bien connue. C’est en tant que corps vivants, unis par le lien substantiel qui
en fait des substances organiques que le pain et le vin eucharistiques sont
conservés avec toutes leurs « monades » lorsque la Transsubstantiation leur
substitue le corps du Christ, à savoir un autre vinculum substantiale créant
des mêmes éléments, un autre Corps, avec son Âme, la monade dominante.
Il en va de même de l’espérance gracieuse – la grâce est don de Dieu –
faute de laquelle nous serions alors, comme l’enseigne Loyola (« perinde
ac cadaver ») voués non à la passivité « stylisée » du gisant sculptural ou
littéraire, mais au Néant de la « Charogne » de Baudelaire – agrégat de
« monades nues » – ou de la Ballade des pendus. Faute d’une grâce qui,
moralement, nous « transsubstantie » nous serions des « Morts sans sépul-
ture », à l’image du frère maudit d’Antigone ou des martyrs de la pièce
éponyme de Sartre.

Le corps du non-Moi
Eco. techno. Khâgne

Encore Toi
En 2005, une publicité de Marithé et François Girbaud, parodiant la Cène,
représentait en femmes Jésus et les Apôtres. Pourquoi l’Incarnation, en
effet, ne serait-elle pas féminine ? Le Moi de la philosophie – celui de Fichte
par exemple – est « asexué » : luttant pied-à‑pied pour maintenir son identité
jusqu’au sein du non-Moi, il finit par s’unir à lui dans le « troisième principe »,
CULTURE GÉNÉRALE

où Moi et non-Moi coexistent au sein du Moi fondamental.


Ainsi, au terme du parcours, la négation du Moi par le non-Moi – par le
Corps, l’altérité ou le sexe – n’est rien. La philosophie transcendantale
anticipe ainsi la moderne « théorie du genre ». Le Corps du « non-Moi » n’est
pas encore le corps propre, indifféremment sexué, de la phénoménologie ;
ce n’est déjà plus le corps autre de la psychanalyse. Corps étranger dans
le « choc » qu’il inflige au Moi le corps du non-Moi devient corps fantôme
dans la synthèse spéculative finale qui le réintègre à l’ordre discursif et en
fait un corps introuvable, le « corps de l’Autre » de Lacan, le corps refoulé
par le Moi et qu’il lui faudra déduire.
S cient.

Dans le « réel », la sexualité est la véritable rencontre du « corps propre » et


du « corps autre », non moins – en témoigne l’adolescence – que du Moi
et du non-Moi. Elle fait du corps narcissique de l’auto-érotisme, du miroir

ANNALES CCIR 2018-2019 l 19

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ou de l’homosexualité, un corps-pour-l’autre où se perd le Moi. Marqué
de la différence mythique – la castration – qui en fait un corps « féminin »,
HEC le corps du non-Moi – « non-corps du Moi » – vient, par la dépendance
génitale, séparer le Moi de lui-même comme du Corps qui le définissait.
Dans le mythe biblique, une « côte » ou une « queue » – objets d’un long
débat talmudique – transforment par soustraction le corps propre, masculin,
par la métonymie d’une partie devenue corps étranger du Moi en un corps-
C ORRIGÉ

autre qui ne redouble pas le corps propre ni ne le symétrise. « Côte » et


« queue » constituent le « Phallus » lacanien – la représentation réellement
impossible, car symbolique, de la différence du « corps-à‑corps » d’un Moi
dédoublé par la parole, non moins que par l’anatomie, en masculin et
féminin.
Commentant Fénichel, Lacan relève : elle n’est pas sans l’être, lui n’est pas
sans l’avoir. Cette disjonction de l’être et de l’avoir signe l’inexistence, le
caractère lui-même mythique du rapport sexuel, où deux Moi – au contraire
d’une transsubstantiation où deux corps ne font qu’un Moi – sont supposés
ne faire qu’un corps, chair unique (ou, si l’on suit Rachi, engendrée) distincte
toutefois du « corps sans organes », intensité pure, que préfèrent, aux subti-
lités anatomiques, un Deleuze ou un Artaud.

Les corps tranquilles

Le Moi, sauf extrême narcissisme, est « condamné » à  la sexuation.


Rappelons la définition qu’en donne Freud dans Le Moi et le ça. Le Moi est
« non seulement une entité de surface – superficielle – mais encore la projec-
tion d’une surface » – celle de l’enveloppe corporelle ou du « Moi-peau ».
Par un jeu d’opérations complexes admirablement décrites par Mélanie
Klein, puis par Anzieu, le Moi se retire d’un Corps devenu étranger alors
qu’il n’était pas encore « propre », mais « disloqué » par la « perversité poly-
morphe » de l’enfant.
Comment ce Moi « réduit aux acquêts » et essentiellement défensif – pour
Eco. techno. Khâgne

ne pas dire, comme Lacan, « paranoiaque » – devient-il être sexué, c’est-


à‑dire corporel ? L’effort extrême du sport, ébat « enfantin » étranger à la
différenciation sexuelle, ne retient du corps que sa tension agonistique,
expression directe d’une « pulsion de mort », dont la fin tragique du coureur
de Marathon demeure l’emblème, nourrissant un Moi hypertrophié.
En imprimant au Corps – depuis l’Imaginaire – la continuité du Cogito,
CULTURE GÉNÉRALE

Descartes a supprimé ab ovo toute référence à la sexuation. Il prépare


ainsi la voie d’un Spinoza « matérialiste », mais tout aussi porté à identifier
Corps et Âme dans la méconnaissance, tant de la différence (le corps
sexué est corps quelconque) que de l’espèce, et compare notre libido
à celle du cheval.

Comme le « corps sans organes » deleuzien – un corps parfaitement continu,


dont le théoricien se reconnaît en Spinoza – se passe de Moi et revendique
la schize, sinon la schizophrénie, le « moi sans contradiction » rousseauiste,
« délivré des entraves du corps », aspire à jouir sans différence. Ce ne sont
là, ni le Moi, ni le Corps réels.
S cient.

Les « corps tranquilles » – le titre du roman-fleuve de Jacques Laurent – ne


sont ni les corps sans organes ni des « corps-obstacles » de l’égotisme

20 l ANNALES CCIR 2018-2019

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philosophique ou littéraire. Ce sont des corps tranquillement sexués, aussi
simples que le sont, dans l’introduction et la conclusion de l’oeuvre, ces
entités géométriques qu’eût affectionnées Spinoza – ambitionnant de HEC
décrire nos passions comme si elles fussent des cercles ou des carrés,
n’eussent-elles été réparties, dans le tourment du désir, entre Corps et
Âme par notre « haïssable » Moi.

C ORRIGÉ
Eco. techno. Khâgne

CULTURE GÉNÉRALE
S cient.

ANNALES CCIR 2018-2019 l 21

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S UJET

CULTURE GÉNÉRALE
Durée : 4 heures.

Il sera tenu compte des qualités de plan et d’exposition, ainsi que de


EDHEC la correction de la langue.
Aucun document n’est autorisé. L’utilisation de toute calculatrice et
de tout autre matériel électronique est interdite.

S
UJET

DISSERTATION

Qu’est-ce qui fait qu’un corps est humain ?

C ORRIGÉ
Par Gilbert Guislain, professeur honoraire en classes préparatoires EC
à Versailles et à Paris, correcteur aux concours des Grandes Écoles de
commerce.

Resituons le sujet parmi tous ceux de la session 2018. Identique à celui


d’Ecricome (« Qu’est ce qui fait qu’un corps est humain ? »), il nous mène
vers une réflexion sur la spécificité, l’essence du corps humain. Corps et
humain ne se recoupent pas ainsi, un corps peut ne pas être humain, car
nous devons prendre en compte l’animalité ou la nature – et toute l’huma-
nité ne se résume pas en un corps. L’un des autres sujets de la session
Eco. techno. Khâgne

des concours 2019 était plus large (EM Lyon : que faire de notre corps ?).
Le dernier enfin invitait à réfléchir au langage du corps (ESC, voie techno-
logique). En contraction, était proposé un texte de Michel Jeanneret Eros
rebelle, littérature et dissidence à l’âge classique, et en synthèse, un corpus
constitué d’un texte de Régis Debray (Modeste contribution aux discours du
CULTURE GÉNÉRALE

dixième anniversaire, 1978) Emmanuel Todd (Où en sommes-nous ?, 2017)


et Bruno Latour (Où atterrir, comment s’orienter en politique ?, 2017). Sujets
et commentaires, rapports de jurys, figurent sur le site bce.com, à examiner
de près par tous, dès la première année, pour toutes matières et toutes
épreuves. Le site Studyrama-Espace prépas met également en ligne des
corrigés, peu après la fin des épreuves, en particulier ceux de Tony Brachet.

La dialectique des deux concepts

Un corps est un ensemble dont les parties sont solidaires, tenues par des
liens organiques, internes, ou mécaniques, mus par une énergie extérieure.
S cient.

Il forme souvent un système, chaque partie contribue au tout, et le tout est


présent dans chaque partie. Traditionnellement, pour l’Antiquité comme
pour la Renaissance néoplatonicienne, le corps humain a été synonyme de

22 l ANNALES CCIR 2018-2019

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proportions harmonieuses. L’Homme était vu comme un résumé du monde,
un microcosme, thèse reprise par Rabelais dans le Tiers Livre, un intermé-
diaire entre les Dieux et la nature. Mais tout corps matériel par exemple, EDHEC
n’est pas humain, il peut exister une relation extrinsèque entre humanité et
corporéité. Le corps peut être seulement un espace matériel étendu, et, si
le matérialisme conclut à cela, en définissant l’Homme comme une matière
perfectionnée douée de sensibilité (La Mettrie, L’Homme machine et surtout

C ORRIGÉ
Diderot, Le Rêve de d’Alembert, Lettre sur les aveugles). En revanche, les
spiritualistes s’opposent à cette dernière thèse. En effet, l’humain n’est pas
réductible alors à un seul corps. Le culte des morts rend hommage à notre
dimension spirituelle, même lorsque nous ne sommes plus. L’Âme serait
supérieure au corps, on le voit chez Platon comme dans le christianisme.
Il convient alors d’interroger la spécificité de l’humanité, en relation avec la
nature et l’animalité. La main, le visage, l’exercice de la technique et de l’art
définissent le corps humain.
Dépassant la matérialité, le corps de l’Homme devient humain, il est construit
par la société, comme le montrent les exemples de la masculinité et de la
féminité, l’éducation, la sociabilité, la civilité, la mise en ordre des corps ou
bien enfin la morale humaniste. L’inconscient, le désir, le sens du beau sont
aussi proprement humains.

Humanité, animalité

L’Homme se définit par opposition à l’animal – le corps humain étant spéci-


fique – ou bien alors il s’inclut dans l’animalité. La Fontaine (Fables) prête
aux animaux des corps humains et les caricaturistes politiques du xixe siècle,
confère à ces figures des traits animaux. Par notre corps, nous sommes
proches et distants des animaux, qui mènent l’Homme à se questionner
sur son orgueil spéciste.
Dans les religions, philosophies et mythologies traditionnelles, l’animal
n’était pas dévalorisé, il appartenait comme l’Homme à un grand corps,
Eco. techno. Khâgne

le cosmos, parcouru de vie, selon l’animisme, le vitalisme, le panthéisme.


Spinoza reprend au xviie siècle cette idée d’un grand tout. Le monde est
une continuité vivante, rien ne vient limiter et définir un corps humain spéci-
fique. Initialement, animaux, végétaux, humains sont en symbiose, avant
que les formes et les essences ne se séparent, ne soient rationnellement
distribuées. Dans le monde primordial, toutes les espèces communiquent,
CULTURE GÉNÉRALE

la vie est partout. Le divin, les esprits et le surnaturel sont dans la nature en
union avec les hommes qui peuvent agir sur ces forces par la magie, le
maraboutage, le masque pour communiquer avec l’au-delà. Par opposi-
tion, le judéo-christianisme refuse l’âme aux animaux, pourtant créatures
de Dieu. La Bible enjoint aux hommes de dominer la nature, entreprise
accomplie en particulier par les Anglo-saxons en Amérique. Au xviiie siècle,
la modernité cartésienne inaugure une impasse de la pensée, la théorie de
l’animal-machine ; la nature, l’« étendue » pour Descartes, serait mécanique
et distincte de l’esprit humain. La conscience, mais aussi la souffrance
ne seraient pas reconnues aux animaux. La philosophie mécaniste de
la nature dévalue donc l’animal. Inversement, si l’Homme appartient au
S cient.

grand Tout sensible, en permanente transformation, seulement distribué


en différences de sensibilité et non de nature, alors il n’y pas de corps
spécifiquement humain. La connaissance est alors affaire de sens relatif et

ANNALES CCIR 2018-2019 l 23

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non de vérités absolues. Au xviie siècle, le libertin Cyrano de Bergerac avait
postulé dans l’Autre Monde l’égalité de l’Homme et du chou. Il ne saurait
EDHEC y avoir de distance définitive entre l’animal et l’Homme. Le spécisme, l’an-
thropocentrisme sont donc contestés. Ainsi, l’intelligence pratique et les
ruses du chat de Montaigne révèlent les aptitudes des animaux et ainsi,
rabaisseraient la présomption, l’orgueil humain. Aujourd’hui des intellec-
tuels toujours plus nombreux, à la suite de Peter Singer, Florence Burgat,
C ORRIGÉ

Elisabeth de Fontenay, Luc Ferry, Matthieu Ricard, Michel Onfray, Corinne


Pelluchon, Franz-Olivier Giesbert et le christianisme d’inspiration francis-
caine (Laudato Si) défendent les intérêts des animaux, l’idée de nos devoirs
envers eux. L’animal est maintenant reconnu juridiquement comme être
vivant et non plus comme un objet, comme un meuble. L’opinion est alertée
sur les pratiques insupportables de certains abattoirs et élevages contraints
de l’agro-industriel, alors que les neurosciences montrent l’empathie entre
toutes les créatures, comme l’échange avec un chat loué par Lévi-Strauss
(Tristes tropiques). Dans Les Fleurs du mal, (LXVI) Baudelaire avait écrit trois
poèmes sur les chats, appréciés des « amoureux fervents et des savants
austères ». Pour achever avec l’idée de la défense de la nature, il faut ajouter
qu’amalgamer écologie radicale et nazisme est malveillant et simpliste. C’est
par la défense des animaux que l’Homme révèle son humanité. Les animaux
sont mes amis, je ne mange donc pas les animaux. L’Homme est frugivore
et l’alimentation carnée, habitude très récente dans l’histoire humaine, n’est
qu’une seconde nature.
Au terme de ce moment de réflexion, nous sommes en présence du concept
de corps naturel plus que de corps spéciquement, exclusivement humain.

La main et l’art

Néanmoins, des attributs humains soulignent notre spécificité, comme la


main ou le visage, le regard. Il faut éviter de faire une revue de détail de
ces attributs, il faut faire porter l’accent sur la question de l’humanité. Les
Eco. techno. Khâgne

philosophes antiques avaient établi un lien entre intelligence et usage des


mains. Pour Anaxagore, l’Homme est intelligent parce qu’il a des mains ;
pour Aristote, l’Homme a des mains parce qu’il est intelligent. Son âme est
intellective et il réalise sa finalité comme être politique au sein de la cité.
La main manifeste plusieurs rapports au monde, elle n’est pas qu’un outil.
On parle de la main du paysan, du chirurgien, du peintre, de l’artisan, dans
CULTURE GÉNÉRALE

le quotidien. On signe et l’on écrit. On lève la main, on s’engage, on prête


serment, on joint les mains pour la prière, dans une tension vers le divin. Il
existe une mystique comme une symbolique de la main. Dans la Création
d’Adam (1511) Michel-Ange, sur la voute de la chapelle Sixtine à Rome,
peint l’index de la main de Dieu tendu vers Adam.
La main et ses multiples usages permet à l’homme de saisir le monde, de
le domestiquer, de le transformer et aussi de s’en distancier, cette trans-
formation permet d’aborder les concepts antiques de techné, de praxis et
de poeisis. La technique humanise le monde et provient de l’usage du feu
donné par Prométhée aux hommes (Protagoras 320 d-321 d) plus démunis
que les animaux mais plus libres, même si ceux-ci ne peuvent changer leurs
S cient.

armes – et doivent « garder leurs chaussures ». L’Homme peut opposer


la culture à la nature, en se tournant vers l’art. Dans le Peintre de la vie

24 l ANNALES CCIR 2018-2019

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moderne, faisant l’éloge du maquillage, Baudelaire soutient que la nature
doit être réformée, corrigée, voire métamorphosée par cet art.
Le regard est aussi humain, direct ou détourné, dérobé, dubitatif, est défini EDHEC
souvent comme expression de l’âme, de l’esprit, comme le montrent les
statues des cathédrales. Profond, il rend sensible l’émoi. Sur la scène
sociale, dans le cadre de la comédie humaine, il se livre au jeu de la séduc-
tion et du pouvoir. Partie la plus visible et dénudée du corps, il nous oblige

C ORRIGÉ
à soutenir ce que l’on voit. Je suis vu et regardé, sous le regard de l’autre,
comme le montre Sartre. Pour Levinas, le visage d’autrui exerce un interdit :
« Tu ne tueras pas. » Le bras prêt à frapper est suspendu.
L’usage du masque signale également l’humanité. On revêt des apparences
multiples, on dissimule ses desseins, c’est l’inverse du nu ou tout est vu
jusqu’au point où le regard en sait où se poser. Le masque, lié à l’esthétique
baroque, à l’artifice devenu nature du courtisan, s’inscrit surtout dans une
dimension socio politique. Grâce au masque, on voit sans être vu, ce qui
est le principe de toute police efficace. Michel Foucault comme Balzac
l’ont montré chacun à leur façon. Les animaux se dissimulent certes par
intérêt, mais les hommes se travestissent par jeu, de manière gratuite et
désintéressée.

Corps, culture et morales

Le corps est humain parce qu’il est spécifiquement couvert. Le nu n’est pas
naturel. Le naturisme est souvent ascétique. Le nu revêt diverses valeurs et
connotations : dépouillement, innocence, humilité mais aussi dénuement,
déshumanisation, perte de l’individualité. De même, le vêtement fait sens :
se masquer, séduire, se distinguer, être conformiste, transgressif. Érotisme,
sexualité, dévoilement, séduction, entrent en jeu. La nudité chez le médecin
n’est pas la même qu’à Pigalle.
C’est l’empreinte de la société qui fait que le corps est humain. Foucault
a montré que la société moderne met les corps en ordre. Au moment de la
Eco. techno. Khâgne

Renaissance, naît une civilité ordonnée (Erasme, La Civilité puérile, Elias,


La Civilisation des mœurs). On suit des codes et des manières de se tenir.
Être humain face à autrui c’est suivre une morale, adopter une attitude
humaniste et ouverte. Nous pourrions réfléchir au triptyque suivant : humain,
humaniste, humanitaire. Mais derrière cette humanité de façade, ne se mani-
feste-t-il pas réellement la férocité des appétits, comme l’ont montré Balzac,
CULTURE GÉNÉRALE

Maupassant, Zola à la fin du xixe siècle, puis Jack London (Le Talon de Fer,
Iron Heel) et Céline (Voyage au bout de la nuit), où le réalisme pessimiste
sombre s’oppose à l’optimisme idéaliste humaniste issu des Lumières. Une
photographie montre des chiens à une table de banquet, costumés en aris-
tocrates servis par des hommes en livrée de laquais (Michel Onfray, L’Anti
Manuel de Philo, Bréal).
Mais ce qui fait aussi qu’un corps est humain, c’est sa possibilité de faire
des écarts, de transgresser les normes, de pratiquer l’excès physique
comme réalisation de la nature, comme chez Rabelais, avec l’ivresse, le
rire, la fête, l’amour, la danse, le jeu, la goinfrerie dans un climat bouffon et
grotesque. C’est homo demens, pour reprendre l’expression d’Edgar Morin
S cient.

(Le Paradygme perdu, La Nature humaine), celui de la culture populaire, qui


est alors en scène. La performance systématique contemporaine est tournée
aussi vers l’excès, mais elle gère et maximise les possibilités du corps, mais

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en suivant des processus établis, normalisés et en visant des résultats ; elle
diffère donc de la liberté du corps humain comme de la transgression. La
EDHEC performance et le dressage surtout, forment parfois des corps mécaniques
et grotesques.
Cette dernière, illustrée par exemple par le libertinage aristocratique, de
Don Juan ou de Sade au xviie siècle, montre que la nature de l’Homme
serait de se défaire des normes, de laisser faire cette propre nature, même
C ORRIGÉ

si la morale bourgeoise du travail vient réfréner la liberté dans le monde


industriel du xixe siècle.
Ce qui est humain est culturel, un corps est humain dans la mesure où il
est l’objet de choix culturels : pratiques de chirurgie, du visage ou du sexe,
attitudes face à la douleur, la santé, la mort, à l’alimentation, au choix des
sports, des vêtements, pour obtenir des apparences idéales : aristocrate à la
peau pâle, bourgeois obèse, ascétisme, androgynie, culte de la ligne, genre
auto-défini, au-delà de la détermination de naissance, peau bronzée, corps
des punks scarifié, tatoué, percé, opposé aux body-buildés californiens des
années 60. Les tatouages et les piercings constituent des signes identitaires,
tandis que les rapports sociaux à autrui sont distants ou expansifs, policés
ou decontractés… Les sociologues sont nombreux, qui ont été étudié ces
signes, ces métamorphoses, ces choix, comme Alain Corbin, Georges
Vigarello, Jean Jacques Courtine (Histoire du corps, Histoire de la virilité),
Anne Marie Sohn, le pionnier ayant été Roland Barthes dans Mythologies
(1957). Dans ce qu’il dit de certains signes et mythes des années 1950-
1960. L’histoire des générations, des goûts et des valeurs, des préférences
des jeunes, nous offrent de nombreux exemples en ce sens. Le corps est
humain dans son conformisme, mais aussi dans sa distinction et l’exercice
de sa liberté.
En allant plus loin, le transhumanisme prétend accroitre l’humanité du corps
non seulement par des prothèses, mais aussi par des exosquelettes, l’eu-
génisme, les biotechnologies, l’intelligence artificielle, les robots, les singes
« augmentés », les cyborgs, entre « quincaillerie » électronique, informatique,
Eco. techno. Khâgne

et organique, avec comme rêve la vie éternelle. C’est le messianisme des


penseurs californiens de la Silicon Valley, des gourous des nouvelles tech-
nologies comme Norbert Wiener, qui a imposé le rêve d’un monde meilleur
et pacifié, assorti en fait de normalité et de contrôle social. Contre ses
apôtres, comme Elon Musk ou Raymond Kurzweil, ont pris parti Jean Michel
Besnier ou Christian Godin, Mathieu Terence (Le Transhumanisme est un
CULTURE GÉNÉRALE

intégrisme). Libertaires, zadistes, technocritiques, défendent l’empathie et


l’intelligence sensible, le hasard et la différence contre la normalisation et
une lecture infantile du Progrès.

Pour aller plus loin

Vidéos sur les thèmes de culture générale


Vidéos de Gilbert Guislain – culture générale sur Youtube Espace Prépas

Thème 2018-2019 : la mémoire


S cient.

La Mémoire, F. Farago, E. Akamatsu, G. Guislain, Dunod


Dissertations sur la mémoire, V. Bonnet, Studyrama
Magazine Espace prépas, site grandes-écoles.studyrama.com

26 l ANNALES CCIR 2018-2019

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Bibliographie de culture générale

Cent Fiches de culture générale, collectif, D. Bourdin, Bréal EDHEC


Réussir son oral, 50 sujets de culture générale, Gilbert Guislain, Studyrama
Éléments de culture générale, collectif, Ellipses
L’Intégrale de la culture générale, collectif, Ellipses
Exercices de contraction et de synthèse de textes, G Guislain et Y. Terrades,

C ORRIGÉ
Ellipses
QCM commentés de culture générale, G. Guislain, Studyrama

Eco. techno. Khâgne

CULTURE GÉNÉRALE
S cient.

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S UJET

RÉSUMÉ DE TEXTE
Durée : 3 heures.

Résumez en QUATRE CENTS MOTS plus ou moins 5 % (soit


HEC 380-420 mots), le texte suivant, en vous attachant à mettre en valeur
les idées essentielles et les articulations de la pensée de l’auteur.
Mentionnez le décompte par 50 mots et, en fin de copie, reportez le
nombre de mots utilisés.

N.B. : Cet exercice doit rester impersonnel dans le fond comme dans
la forme, et respecter STRICTEMENT les limites imposées.
La copie doit être entièrement rédigée : la correction et la clarté de
la langue entrent pour une part dans l’appréciation du correcteur.
Il n’est fait usage d’aucun document ; l’utilisation de toute calcula-
trice et de tout matériel électronique est interdite.

S
UJET

Nous baignons aujourd’hui dans une culture molle et permissive, si libérée


des interdits (du moins en apparence) qu’on cherche laborieusement ce
qui pourrait encore surprendre ou choquer. Les conduites, les images, les
mots qui, autrefois, soulevaient les émotions, inspiraient de la honte ou de
l’indignation, sont banalisés à tel point que les médias s’essoufflent à la
recherche de scandales qui puissent, en dépit de la saturation, frapper
un public anesthésié. La rigueur de la règle et le défi de la transgression
Eco. techno. Khâgne

appartiennent à un passé qui s’éloigne. Il y a peu, la publication de Sade


soulevait une tempête et se réglait devant les tribunaux ; cinquante ans plus
tard, l’événement paraît si incongru qu’il relève de l’histoire ancienne. Dans
ces conditions, nous risquons d’oublier que l’érotisme a pu être un choix
philosophique hardi, une posture subversive et dangereuse. Plus générale-
ment, il faut un effort de mémoire pour se rappeler que la littérature a milité,
jadis et naguère, dans la dissidence, qu’elle a bravé les censures et qu’elle
a été souvent, contre les abus de pouvoir, le refuge de la liberté. (…)
RÉSUMÉ DE TEXTE

Pour déplacer les bornes de la routine et ouvrir le monde à son versant


caché, la littérature n’a pas besoin d’argumenter ni de polémiquer. Sa force
tient à l’évocation d’un univers ténébreux, qui est une part de nous­-mêmes
et pourtant nous échappe. Il suffit qu’à l’espace familier, surveillé, elle super-
pose un ordre de phénomènes normalement censurés pour que l’existence
prenne soudain une profondeur insolite et que les certitudes étroites de
la vie consciente se mettent à bouger. On connaît la théorie freudienne
du rêve éveillé : au même titre que les visions oniriques et les divagations
S cient.

diurnes de l’imagination, l’œuvre d’art dévoile le monde des fantasmes.


Parce qu’elle échappe aux contraintes du principe de réalité, elle offre une
compensation, imaginaire mais essentielle à notre équilibre, aux sacrifices

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S UJET
que nous impose l’ordre moral et social. Elle mime la liberté et, par cet
accomplissement hallucinatoire des contenus de l’inconscient, nous permet
de vivre, par procuration, une vie plus pleine, plus accueillante à nos désirs
et nos angoisses. Faisant entendre cette voix montée des profondeurs de la
psyché, la littérature est investie d’une fonction vitale : par elle, nous recon-
naissons les forces interdites et, au lieu d’en avoir honte, nous en jouissons.
HEC
Par elle encore, l’imaginaire prend consistance, le déraisonnable acquiert
une légitimité, les poussées de l’instinct se chargent d’une dignité nouvelle.
Le temps d’une fantasmagorie, nous voici amples et plus libres que dans
la vie ordinaire ; réconciliant les deux faces de notre être, nous atteignons
à une plénitude dangereuse sans doute, troublante et convulsive, mais qui
nous transporte loin des tiédeurs quotidiennes.
L’un des avatars de l’œuvre d’art se charge, mieux que tout autre, de cette
fonction compensatoire de rêve éveillé : l’érotisme. On pourrait même
soutenir que la littérature, quelle qu’elle soit, a toujours une composante
érotique et se demander si elle n’est pas, de nature, érotique, puisque,
souterrainement irriguée par le travail des pulsions, elle module, sous des
formes plus ou moins cryptées, les élans du désir. Éros serait la source
d’énergie qui anime l’écriture et il revêtirait une valeur emblématique, dans la
mesure où il dit tout haut ce que d’autres genres camouflent ou édulcorent.
Car l’érotisme expose l’objet par excellence que la loi oblige de cacher :
l’appétit sexuel. Il lève les inhibitions, donne forme aux images interdites et
en revendique la légitimité. Parlant du corps et de ses besoins, ramenant
à la surface l’animal refoulé qui repose en nous, il fait entendre une voix
– celle de l’organique et du biologique – que la culture officielle s’emploie
à assourdir. Il récuse les hypocrisies de l’angélisme et rappelle que l’homme
n’est pas fait d’esprit seulement. Des sources de plaisir qui semblaient
inavouables, frappées de vergogne, trouvent ainsi accès à la conscience et,
un instant, échappent à la peur de la faute. Le processus ne se limite d’ail-
leurs pas à une opération psychologique. La lecture affecte aussi le corps et
se manifeste en symptômes physiques. De tous les types de représentation,
Eco. techno. Khâgne

l’érotique est le seul qui touche la sphère sensuelle autant que l’intellectuelle,
et l’un des rares qui invitent à passer, sans retard, de la parole à l’acte.

L’érotisme fait plus que libérer des fantasmes personnels et réconcilier


le moi avec ses penchants secrets. Il balaie les censures culturelles pour
renouer aussi avec les forces archaïques qui, à l’aube mythique de la vie,
ont donné à la nature ses premières impulsions. Contempler la puissance
sauvage du désir, c’est découvrir que l’amour est le moteur par excellence,
RÉSUMÉ DE TEXTE

l’énergie vitale qui crée le monde, puis le transforme et le régénère au gré


de renaissances infinies. Le mythe grec fait d’Éros une divinité primordiale,
antérieure à tous les autres dieux. Aux quatre éléments qui, dans le magma
primitif, se font la guerre, il impose la paix ; entre les forces centrifuges et
stériles qui plongent l’univers dans le désordre, il introduit l’union ; il leur
imprime l’amour, leur apprend à marier leurs qualités et transforme ainsi le
chaos en cosmos. L’érotisme authentique nous fait donc rejouer le mystère
des origines : montrant les hommes qui s’accouplent, il reproduit le geste
créateur et rend témoignage à la pulsion qui, implantée au cœur des êtres
S cient.

animés, perpétue la vie. Cet Éros cosmique est l’inverse exact des grivoi-
series mesquines, des petitesses salaces auxquelles succombe le discours
sur le sexe lorsqu’il est coupé de ses racines mythiques.

ANNALES CCIR 2018-2019 l 29

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S UJET

Mais il ne suffit pas d’invoquer la levée des inhibitions et le retour fantas-


matique aux ardeurs premières. Le processus est plus complexe, et c’est
la médiation par l’art, par la littérature, qui fait la différence. Car la pulsion
à l’état pur ne génère que la violence et conduit à la mort. Sans distance ni
contrôle, elle détruit l’individu et ruine l’ordre social ; les puissances animales
triomphent, la civilisation et ses sauvegardes sont livrées à l’anarchie. Le
HEC
relais par la forme change tout. Dès le moment où il est représenté comme
un objet au second degré, l’instinct sauvage ne menace plus. Cette force
qui risquait de m’anéantir, je peux la regarder en face, parce que je la mime,
je la reproduis, sans m’identifier à elle ni succomber à la fascination. C’est
la fonction cathartique telle que Freud l’a reprise d’Aristote : l’art purifie la
violence primitive ; il ne l’affaiblit pas, mais la dépasse en la sublimant. Au
lieu de subir la tyrannie des fantasmes, je peux alors en jouir intellectuelle-
ment. Grâce à la transmutation opérée par l’esthétique, les images refoulées
se donnent à voir, séduisantes et pourtant exorcisées ; le spectacle des
pulsions s’étale dans toute son énormité, mais, au lieu de conduire à la
passion ou la folie, il produit du plaisir.

Ainsi fonctionne l’érotisme : il exprime d’autant mieux l’intensité du désir qu’il


lui impose une bride – la prise en charge par une forme belle. La position
qu’il occupe est instable et dangereuse : il se situe à la limite de l’harmonie
et de l’infamie, de la volupté et de la ruine. Cette subtile négociation entre
la reconnaissance des puissances aveugles et le besoin de les contrôler
s’opère encore d’une autre manière, à travers une évidence que la littérature
amoureuse n’a jamais cessé d’illustrer : le désir a besoin de résistance, il se
nourrit d’obstacles. Plus il affronte de dangers et brave d’interdits, plus il
est vigoureux. Le plaisir comporte une part de souffrance, il ne peut jamais
se reposer.

L’épisode de Mai 68, l’explosion libertaire et la révolution sexuelle des


années 1970 ont bien montré, malgré eux, à quel point il était naïf de croire
Eco. techno. Khâgne

que le plaisir, exalté comme un absolu, pouvait s’affranchir de la règle et


s’épanouir en dehors des contraintes. Contre la pensée de Freud, dénoncée
pour son caractère répressif, Wilhelm Reich puis Herbert Marcuse avaient
plaidé pour une civilisation émancipée de l’ordre moral et de la norme
sexuelle. Ils avaient voulu instaurer un autre principe de réalité, qui favorise
l’expression de l’instinct et substitue la liberté, le rêve éveillé, l’épanouis-
sement libidinal aux contraintes mutilantes et à la sagesse timorée des
bien-pensants. Ainsi allait surgir une contre-culture, qui prônait l’idée d’un
RÉSUMÉ DE TEXTE

désir sans restriction, d’autant plus vif et jouissif qu’il se passerait des subli-
mations et des médiations traditionnelles. Débarrassée des vieux tabous, la
nouvelle société allait pouvoir s’abandonner aux voluptés de l’amour libre
et au dérèglement de tous les sens.

La contestation de 1968 a eu ses torts et ses mérites. À une société confor-
miste et hypocrite elle a brutalement montré son envers en refusant les
fausses pudeurs, en rendant leur dignité au corps et aux sensations. Elle
a su aussi défendre le parti de l’imagination, du plaisir, de la spontanéité
S cient.

et pousser jusqu’au bout la logique d’une liberté sans compromis. Mais


son aile radicale allait précipiter la défaite. Car la fin des tabous est une
illusion, la totale émancipation des mœurs est au mieux un leurre, au pire 1. L’e
littéra

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S UJET
une imposture : la voie ouverte à de sinistres dérives. Ce qui nous ramène
à l’érotisme. Sans distance ni résistance, il verse dans la provocation primaire,
il est aussi stérile et dangereux que l’instinct affranchi de tout contrôle. Pour
opérer une réelle libération et produire du plaisir, il doit trouver un difficile
équilibre entre le déchaînement et la maîtrise des forces ainsi dégagées. (…)

Mais de quoi, au juste, s’émancipe-t‑on ? Les interdits changent et les fron- HEC
tières de la tolérance varient selon de multiples paramètres – l’époque, le
milieu social, la religion… Les normes qui définissent l’érotisme, et à plus
forte raison les distinctions entre divers degrés de provocation – l’obs-
cène, le pornographique –, sont instables et appellent à chaque fois une
enquête particulière. Tel phénomène ou tel acte – la nudité, l’homosexualité,
les postures… –, ainsi que les mots pour le dire se déplacent sur l’échelle
des scandales. Tandis que les bornes de la décence et celles de la faute
bougent, les sanctions, elles aussi, fluctuent. Pour toutes ces raisons, les
gestes déviants, les discours subversifs changent de signification à travers
le temps et l’espace. S’en tenir à des termes généraux, c’est donc manquer
la portée singulière – la cible, l’impact, le risque – du défi d’Éros. Le livre que
voici1 repose sur les principes théoriques énoncés tout à l’heure, mais il tente
d’échapper à l’anachronisme, à l’indifférenciation, en situant la subversion
érotique dans une configuration précise – le xviie siècle français.

La montée de l’absolutisme et le raidissement de la Contre-Réforme : tel


est donc le terrain sur lequel nous allons voir des francs-tireurs affronter
une société d’ordre et de discipline, aussi différente que possible de la lati-
tude actuelle. Nous sommes alors à un âge où, au nom de la centralisation
politique et de la religion triomphante, les activités de l’esprit sont placées
sous haute surveillance. Qu’il s’agisse de la correction des mœurs ou de
la doxa théologique, de la langue ou de la création poétique, les pouvoirs
s’emploient à neutraliser les forces centrifuges. Après l’effervescence désor-
donnée et la succession de crises qui, dans tous les domaines, ont ébranlé
le xvie siècle, la tendance est au durcissement et à la normalisation. Or cette
Eco. techno. Khâgne

police intellectuelle rencontre des résistances. Des esprits libres déploient


toute sorte de ruses – des prodiges de courage et d’habileté – pour se
soustraire à la ligne officielle et au conformisme de la pensée unique. De la
Fronde à Fouquet, la machine d’État traverse des zones de turbulence ; de
Port-Royal à Fénelon, l’Église est secouée de multiples disputes ; et maints
auteurs, comme Molière et La Fontaine, dénoncent bravement les risques
de glaciation, qu’elle soit politique, morale ou littéraire. Le mythe d’un Grand
Siècle uni dans la conquête de l’ordre et dans un cheminement glorieux vers
RÉSUMÉ DE TEXTE

les lumières de la raison, l’image simpliste d’écrivains dociles récupérés


par le pouvoir du Trône et de l’Autel, ces clichés trahissent la complexité
des forces en présence. Si la notion même de littérature prend corps aux 
xviie et xviiie siècles, c’est que les intellectuels se mettent à exercer, de façon
plus ou moins visible, un contre-pouvoir, que l’autorité s’efforce de récupérer,
de contrôler ou de juguler, reconnaissant, du même coup, son efficacité.

Parmi ces foyers de résistance, il en est un que les spécialistes ont largement
ignoré : la voix des rebelles qui proclament les droits du corps et la force
S cient.

1. L’extrait ici reproduit constitue l’avant-propos d’un essai que M. Jeanneret consacre à l’érotisme dans la
littérature du xviie siècle.

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S UJET

du désir – le choix de Don Juan. Je voudrais replacer sur la carte les bribes
d’une littérature libre (aux deux sens du terme), une série de textes hardis,
parfois triviaux, qui prennent le risque de défendre les valeurs compromises.
Car la licence est liberté. Sous ses allures polémiques ou bouffonnes, elle
revendique courageusement le droit d’aimer et le droit de penser, souvent
délibérément confondus. L’enquête que je propose n’est ni exhaustive ni
HEC
systématique ; c’est une promenade dans quelques quartiers mal famés
du Grand Siècle.

Mais pourquoi Éros ? La discipline asphyxiante qui gagne alors la France


frappe, tout particulièrement, les mœurs sexuelles et le discours sur le sexe.
Une vague de pudibonderie contamine de larges cercles, un profond malaise
devant la chair, que les écrivains, inquiets du sectarisme et de la tartufferie,
se doivent de défier. Plus que jamais, dans l’histoire de la chrétienté, l’obses-
sion de l’impur et la peur de la faute, la honte du génital et la répression de
l’instinct pèsent sur les consciences. Une éthique de l’abstinence, doublée
par une civilité mondaine qui prétend exercer sur les appétits sensoriels
un contrôle rigoureux, s’emploie à proscrire, ou à camoufler, la part du
biologique. Une vaste opération de refoulement est en cours, qui censure le
pulsionnel et conduit à ce que Jean Delumeau a appelé une « névrose collec-
tive de culpabilité ». Telle est la menace que les esprits libres, plus ou moins
consciemment, entendent conjurer. Aux fidèles voués à l’ascèse, divisés et
mutilés, ils veulent suggérer la légitimité du désir. L’offensive érotique répond
donc par la provocation à une autre provocation : la tentation de l’angélisme
qui, dans un élan spontané vers le plaisir, ne voit que péché et opprobre.

L’équilibre du corps et de l’esprit, de même que l’unité psychosomatique


de la personne, subit encore, dans les premières décennies du xviie siècle,
une autre atteinte. La conception de la nature ainsi que les méthodes des
sciences de la vie connaissent alors un bouleversement profond. La philo-
sophie naturelle avait enseigné, à la Renaissance, que le monde est un
Eco. techno. Khâgne

animal, que la matière est vivante et habitée par l’esprit : mélange diffus
d’animisme et de magie que les novateurs – Galilée, Descartes… – allaient
durement critiquer. Ils vident la nature de sa vitalité, la séparent du règne de
l’esprit et la réduisent à une série de mécanismes mesurables. La conception
cartésienne des animaux-machines allait pousser cette logique à son point
extrême. Pour expliquer les phénomènes physiques, on substitue les obser-
vations de l’expérience, les raisonnements et les calculs aux croyances,
aux intuitions et aux spéculations occultes. Tandis qu’on s’achemine ainsi
RÉSUMÉ DE TEXTE

vers la maîtrise d’une matière désacralisée et déshumanisée, on s’oriente,


simultanément, vers la dissociation du corporel et de l’incorporel. Étrange et
redoutable coïncidence : à partir d’horizons totalement différents, l’Église et
la science moderne convergent en une représentation résolument dualiste
de l’être humain. Là encore, quelques penseurs à contre-courant se doivent
de rétablir un équilibre, de reconquérir une unité qui se perd.

Le choix de l’érotisme, dès le début du xviie siècle, se donne donc à lire


comme un acte d’insubordination, un geste de rébellion intellectuelle et
S cient.

politique, une bravade contre le pouvoir montant du Trône et de l’Autel. Pour


la première fois dans son histoire, Éros est mobilisé comme porte-drapeau
d’une idéologie ou, du moins, comme meneur d’une dissidence. Le message

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S UJET
sera d’ailleurs pleinement reçu : l’autorité ecclésiastique, bientôt relayée par
la juridiction civile, assimilera la littérature luxurieuse à une offense grave,
un délit souvent confondu avec la libre pensée et puni comme une hérésie.
Le mouvement qui, au xviiie siècle, mettra le libertinage philosophique et
son allié, le roman pornographique, au service du matérialisme et de la
déstabilisation politique s’amorce. Il est encore diffus, dispersé, intimidé
HEC
par les menaces, mais il se distingue vaillamment du conformisme ambiant.
L’érotisme de la Renaissance, partagé entre le naturisme des poètes et la
gaillardise des conteurs, s’était fondu, sans scandale, dans la culture envi-
ronnante. Un brutal changement de registre, autour de 1600, l’allure obscène
et le ton agressif qu’adoptent les histoires d’alcôve, semblent répondre, par
le durcissement de la provocation, au durcissement de la répression. Des
crispations et des tabous nouveaux sont apparus, qui appellent la riposte.
Les deux antagonistes, désormais, seront tour à tour agresseurs et agressés,
avec les écrivains qui bravent l’autorité et l’autorité qui, de son côté, se
durcit et suscite la résistance. De part et d’autre, on se guette, on se défie,
et les enchères montent. Au printemps 1968, le soulèvement a commencé,
à Nanterre, lorsqu’on a voulu défendre aux garçons d’accéder aux dortoirs
des filles. Tout le monde sait d’ailleurs que le désir se nourrit d’obstacles et
s’aiguise sous l’effet des interdits.

Effarouchés ou blasés, les historiens minimisent volontiers cette production :


de vulgaires et inoffensives plaisanteries de corps de garde ou des divertis-
sements confidentiels, réservés à quelques gentilshommes jaloux de leur
indépendance. Trois théories influentes circulent aujourd’hui, qui conduisent
à neutraliser le phénomène et appellent une réplique.

Mikhaïl Bakhtine a montré, à propos de Rabelais et de la fête populaire, que


l’explosion d’obscénités pouvait être l’expression sporadique, contrôlée et
codée, d’une liberté nécessaire au maintien de la stabilité sociale. C’est le
rire du Carnaval qui, loin de compromettre les institutions, les renforce. La
Eco. techno. Khâgne

prétendue subversion ne serait donc qu’un rite pacifique, une compensation


bienvenue, une respiration normale et même nécessaire au bon fonctionne-
ment du système. Mais, dans la culture puritaine qui s’installe, la fonction de
défoulement n’est plus tolérée. Bakhtine lui-même le dit : l’espace symbo-
lique du monde à l’envers et la représentation euphorique des plaisirs
interdits succombent au raidissement des mœurs. Le grotesque n’amuse
plus, il dissone ; la sexualité n’est plus jouissive, elle est devenue suspecte.
Simultanément, les bouffons, désormais intempestifs, sont chassés de la
RÉSUMÉ DE TEXTE

cour. Si l’autorité avait reconnu aux textes obscènes un rôle positif dans
l’équilibre de la société nouvelle, elle ne les aurait pas poursuivis et jugulés.

Dans le premier volume de son Histoire de la sexualité, Michel Foucault


défend une thèse séduisante, mais excessive. Le discours sur le sexe
à l’âge moderne, dit-il, bien loin d’être réprimé et rejeté dans les marges
de la société, se multiplie et répond à une large volonté de savoir. Les
supposés secrets d’Éros sont débusqués, investigués et livrés à la curiosité
publique avec l’accord des pouvoirs. Exhiber le sexe, c’est donc satisfaire
S cient.

une demande générale et, par là même, désamorcer le tabou. Foucault,


qui écrivait son livre au lendemain de mai 1968, avait sans doute raison de
dédramatiser une transgression complaisante, qui vulgarisait le sexe autant

ANNALES CCIR 2018-2019 l 33

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S UJET

ou plus qu’elle le libérait. Les révolutionnaires autoproclamés, un peu trop


enclins à accuser les autres de répression et à se décerner des brevets d’es-
prits affranchis, méritent d’être, à leur tour, démystifiés. Mais cette théorie,
C
extrapolée à une configuration comme celle qui nous intéresse, risque de
faire des interprètes d’Éros les complices du pouvoir, les propagateurs d’une
science quasi officielle, alors qu’ils affrontent au contraire des menaces qui
HEC
n’ont rien de chimérique.

Une même condescendance – nous sommes les modernes, affranchis


de la tyrannie puritaine, et nous regardons dédaigneusement le passé,
asservi à une morale rétrograde – a été dénoncée récemment par Jean­
Claude Guillebaud, et elle nous guette. Je sais bien que, pour dramatiser le
tableau, je cours le risque de démoniser le xviie siècle, de le forcer dans une
raideur ou une pudibonderie qui seraient des caricatures. Je reconnais aussi
que l’opposition d’un Bien hédoniste et d’un Mal répressif, d’un héroïsme
libertin et d’une infamie policière, simplifie une situation plus complexe et
nuancée. Guillebaud a raison : les sociétés traditionnelles observent souvent
une sévérité théorique et une tolérance pratique ; entre l’interdit et sa trans-
gression, elles appliquent une dialectique, un art de la transaction et du
compromis que nous avons oublié. Qui nierait par exemple que les nobles
du xviie siècle et leurs protégés, loin de succomber à la terreur des gardiens
de la morale, ont eu une sexualité débridée ? Tout cela est vrai, mais le
procès de Théophile et le scandale de L’École des filles1, la Querelle du
Cid et les campagnes contre Molière le sont aussi. Les condamnations, la
dissimulation, les ruses de l’équivoque prouvent que les accommodements
avaient leurs limites et ne profitaient pas à tous.

Si quelques-uns des auteurs réunis dans ce livre choisissent la confrontation


directe et outragent froidement les bonnes mœurs, la plupart, justement,
adoptent des stratégies prudentes, de la clandestinité à l’ambiguïté calculée,
en passant par tous les stades de la subordination simulée à la provocation
Eco. techno. Khâgne

voilée. Pour faire sa place, dans une société surveillée comme celle-là, il faut
tricher avec la censure et porter le masque. Alain Viala et Christian Jouhaud
ont montré que la marge d’indépendance dont dispose l’écrivain est alors
très réduite. Il ne peut pas ne pas composer avec le pouvoir – l’aristocratie,
l’Église ou l’État. Pour s’émanciper sur un front, il doit avoir fait acte de
soumission sur un autre. La part d’assujettissement et celle d’autonomie font
l’objet, à chaque coup, d’une pesée extrêmement subtile – une négociation
entre la nécessaire obéissance et la non moins nécessaire indépendance
RÉSUMÉ DE TEXTE

intellectuelle. Les uns nous étonnent par la brutalité de leur offensive, en


rupture avec toutes les règles, tandis que les autres nous captivent par
leurs feintes, leurs subterfuges et leur double jeu. Un xviie siècle discipliné
et docile, monumental et conformiste ?
C’est au contraire le théâtre de confrontations violentes, une scène tour-
mentée où se conquièrent, dangereusement, le droit de parler et celui de
publier, la liberté d’aimer et celle de fantasmer.
Michel Jeanneret, Éros rebelle, littérature et dissidence à l’âge classique,
Paris, Éd. du Seuil, 2003, « Introduction », p. 9-20.
S cient.

1. Ce livre érotique de 1655, à la paternité incertaine, est considéré comme un des premiers romans
libertins français.

34 l ANNALES CCIR 2018-2019

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C ORRIGÉ
Par Françoise Détharré, professeure agrégée de lettres modernes.
HEC

Notre société manifeste un tel esprit de tolérance que la/ provocation devient
un exercice difficile. Qui s’émouvrait encore de/ l’édition des œuvres de Sade

C ORRIGÉ
dont la dimension politique/ s’efface ? Pourtant, la littérature a longtemps
participé aux luttes/ émancipatrices par sa puissance créatrice. Ignorant
barrières et frustrations générées/(50) par les normes sociales, laissant
émerger pulsions et fantasmes, elle/ nous rend notre intégrité psychique.
Davantage qu’une voie de/ la littérature, l’érotisme en est donc un élément
constitutif./ Il réhabilite notre nature animale qui contribue au plaisir stimu-
lant/ de la lecture.
Il nous ramène également à la mythique/(100) cosmogonie grecque : Eros
ordonna et harmonisa le chaos, proposant l’/archétype de la sexualité
créatrice. Loin de libérer bestialement des/ instincts mortifères, cette sexua-
lité appelle une représentation cathartique ; reconnaissant mes/ pulsions
sur scène, non édulcorées mais magnifiées par le dramaturge/, je m’en
libère. L’essentielle composante esthétique de l’/(150)érotisme souligne
qu’affrontés à des contraintes, désir et plaisir/ se subliment. Les revendi-
cations de 1968 s’inspiraient des contempteurs/ de Freud : affranchie de
toute entrave, la jouissance atteindrait des/ paroxysmes. La pudibonderie
ambiante fut certes battue en brèche mais,/ comme tout érotisme débridé,
l’extrémisme iconoclaste s’avéra délétère./(200)
Chaque mouvement libérateur naît d’un contexte historique spécifique par/
sa morale, ses modes de transgression et de répression. Voulant/ rompre
avec l’instabilité du seizième siècle, Église et État,/ au dix-septième, régulent
et verrouillent la société. Des dissidences/ parviennent pourtant à s’ex-
primer, Don Juan incarne l’exigence de/(250) liberté spirituelle et sexuelle,
en opposition ouverte avec l’Église./ Paradoxalement, la science rationaliste,
développant une approche mécaniste de la/matière, appuie la doxa. Une
Eco. techno. Khâgne

spirale inflationniste s’instaure alors/ entre libertins provocateurs et institu-


tions répressives, spirale négligée par l’/Histoire.
Analyste de Rabelais, Mikhaïl Bakhtine a établi qu’au seizième/(300) siècle,
transgressions festives et carnavalesques constituaient un exutoire protec-
teur du/ système en place. Mais le dix-septième substitua la répression/
à  cette habile tolérance. Pour Michel Foucault, les temps modernes
affichent/ l’érotisme pour devancer la rébellion. Le philosophe mouchait
RÉSUMÉ DE TEXTE

ainsi/ la prétention émancipatrice de soixante-huitards à ne pas confondre/


(350) avec les valeureux libertins du dix-septième. Jean-Claude Guillebaud
relativise le/ poids du conformisme passé, rappelant pertinemment que la
noblesse s’/en affranchissait gaillardement. Une forte répression frappa
cependant nombre d’/auteurs, dont Molière. Cet ouvrage exposera la puis-
sance et la/ diversité des luttes contre le rigorisme du dix-septième, du/
(400) choc frontal au louvoiement entre allégeance apparente et audace
souterraine.
410 mots
S cient.

ANNALES CCIR 2018-2019 l 35

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 35 24/10/2018 14:46


S UJET

LV1 – ANGLAIS
30
Durée : 4 heures.

Les candidats ne sont pas autorisés à modifier le choix, effectué


IÉNA lors de l’inscription, de la première langue dans laquelle ils doivent
35
composer.
Les candidats ne doivent faire usage d’aucun document, dictionnaire
ou lexique ; l’utilisation de toute calculatrice ou de tout matériel
électronique est interdite.
40
Si au cours de l’épreuve, un candidat repère ce qui lui semble être
une erreur d’énoncé, il la signalera sur sa copie et poursuivra en
expliquant les raisons des initiatives qu’il sera amené à prendre.
45

S UJET

Britain ignores social mobility at its peril


50
1 In 1845, as the Industrial Revolution gathered pace, Benjamin Disraeli,
a young politician on the make, published a novel, “Sybil”, which lamented
that Britain was dividing into “two nations between whom there is no inter-
course and no sympathy”. Today, as the information revolution gathers pace,
5 Britain suffers from the same problem. The country is more divided than it
has been for decades, with the rich consolidating their power and people 55
who are born in the wrong class or region seeing their chances of getting
ahead declining. Theresa May rightly put dealing with this problem at the
top of her agenda when she became prime minister. But on December 3rd
Eco. techno. Khâgne

10 all four members of Britain’s Social Mobility Commission resigned in protest


at the lack of progress. […] Social mobility is essential to the working of an 60
advanced capitalist society. For one thing, citizens will accept the inequal-
ities that capitalism generates only if they think they have a fair chance of
getting ahead. The notion that the system is rigged can be just as destabi-
15 lising as economic crises. Secondly, advanced economies can grow only
if they make a reasonable job of discovering the hidden Einsteins who
might be able to produce the next great invention if they were given
the chance. Britain is failing badly on both fronts. Its decision to leave the I. V
European Union was above all a revolt of the left-behind. The Social Mobility
20 Commission discovered that 62 of the 65 parts of the country that it identified
LV1 – ANGLAIS

as "social-mobility cold spots"– that is, those with the worst education and
employment prospects–voted to leave. […]
As social mobility has become more important it has become more difficult
to promote. The reason for this is the paradox of meritocracy. In the first
25 half of the 20th century, when the old establishment ruled the country, II. Q
opening up opportunities was relatively simple. You forced the establishment
S cient.

to abandon obvious prejudices, such as the fact that the best Oxbridge
colleges were reserved for men.

36 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 36 24/10/2018 14:46


S UJET
You also forced it to build a ladder of opportunity for the poor: the 1944
30 Education Act raised the school-leaving age to 15, then 16, and the expan-
sion of universities in the 1960s democratised higher education.
Today, opening up opportunities is much more difficult, precisely because
the meritocratic revolution has been so successful.
The meritocratic elite has proved remarkably good at hoarding opportunities.
IÉNA
35 Successful people tend to marry each other. Couples devote themselves
to giving their children the best education possible, starting in the nursery.
Private schools have also proved to be more successful than state schools
at adapting to the meritocratic spirit. […] To make matters worse, the knowl-
edge economy is a winner-takes-most economy. Superstar firms are pulling
40 ahead of run-of-the-mill ones. Superstar cities are pulling ahead of second-
tier ones. This problem is more pronounced in Britain than almost anywhere
else because London is so dominant. The London effect is obviously good
for London-based professionals who can provide their children with bed and
board as they get their feet on the career ladder (often as unpaid interns).
45 But it is also good for poorer people who are lucky enough to have subsi-
dised accommodation within the sound of Bow Bells. London’s state schools
are better than the national average, jobs are plentiful and you can get almost
anywhere, at a squeeze, by public transport.
The result is a calcified society. Seventy-one percent of senior judges, 62%
50 of senior officers in the armed forces and 55% of civil service department
heads attended private schools, which educate only 7% of the population.
[…] Only 6% of doctors, 12% of chief executives and 12% of journalists
come from working-class backgrounds. Reversing this calcification will take
a lot of innovative thinking.

55 […] But Britain’s two main parties are failing to give this growing problem
the energy it requires. The Conservatives are overwhelmed by Brexit. Labour
is devoting its intellectual resources, in so far as it still has any, to the
old problem of a closed establishment rather than the new problem of the
Eco. techno. Khâgne

marriage of meritocracy and plutocracy. Thanks to its commitment to intel-


60 ligent reform, Disraeli’s Britain became the most peaceful, as well as the
most successful, country in Europe. The political class may well be about
to demonstrate that what intelligence and reform can do, stupidity and
stasis can undo.
The Economist, Dec 9th 2017.

I. VERSION (sur 20 points)

Traduire à partir de « Today, opening up… » jusqu’à « …unpaid interns ».


LV1 – ANGLAIS

(de la ligne 32 à la ligne 44)

II. QUESTIONS (sur 40 points)


S cient.

1. Question de compréhension du texte


Explain what the following sentence means: ’Secondly, advanced econo-
mies can grow only if they make a reasonable job of discovering the hidden

ANNALES CCIR 2018-2019 l 37

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S UJET

Einsteins who might be able to produce the next great invention if they were
given the chance.’
(de la ligne 15 à la ligne 18)
C
(100 mots + ou –10 % * ; sur 10 points)

IÉNA 2. Question de compréhension du texte


Explain what the following sentence means: ’The political class may weil be
I. V
about to demonstrate that what intelligence and reform can do, stupidity
and stasis can undo.’
(de la ligne 61 à la ligne 63)
(100 mots + ou –10 % * ; sur 10 points)

3. Question d’expression personnelle


In your opinion, should governments get involved in promoting social
mobility?
(300 mots + ou –10 % * ; sur 20 points)

*Le non-respect de ces normes sera sanctionné.


(Indiquer le nombre de mots utilisés.)

III. THÈME (sur 20 points)

L’asphyxie est airrivée par surprise. Dans la nuit du 6 au 7 novembre, alors


que les températures chutaient à l’approche de l’hiver et que le vent s’est
arrêté de souffler, des milliards de milliards de particules fines ont été
prises au piège dans l’atmosphère de Delhi. […] La pollution atmosphé- III.
rique a entraîné 525 000 morts prématurées en Inde en 2015, soit le quart du
total mondial, selon une étude publiée par la revue The Lancet en octobre.
Eco. techno. Khâgne

A New Delhi, les premiers à avoir vu ou senti la couche de pollution sont les
sans-abri, endormis sur la banquette arrière de leur tricycle, ou les gardes
de sécurité postés devant les résidences des quartiers aisés de la capitale.
Les autres l’ont découverte le matin dans leur chambre, en se réveillant au
milieu d’une fumée blanchâtre. Depuis ce jour, l’air de Delhi pique les yeux
et irrite la gorge des habitants.
Julien Bouissou, Le Monde,
10 novembre 2017.
LV1 – ANGLAIS
S cient.

38 l ANNALES CCIR 2018-2019

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C ORRIGÉ
Par Alain Goudot, professeur de chaire supérieure d’anglais en CPGE écono-
IÉNA

mique et commerciale au lycée Bellepierre, à Saint-Denis de la Réunion.

C ORRIGÉ
I. VERSION

De nos jours, offrir un large éventail de possibilités est beaucoup plus diffi-
cile, précisément parce que la révolution méritocratique a été un grand
succès.
L’élite méritocratique s’est révélée d’une efficacité remarquable dans l’art
d’accumuler les opportunités. Ceux qui réussissent ont tendance à se
marier. Dès l’école maternelle, les couples se consacrent entièrement à la
meilleure éducation possible pour leurs enfants. Les écoles privées se sont
aussi révélées mieux adaptées à l’esprit de la méritocratie que les écoles
publiques. […] Pire encore, l’économie du savoir est une économie exclu-
sive où le gagnant rafle tout. Les grandes entreprises gagnent des parts
de marché par rapport aux entreprises de second rang. Les mégalopoles
distancent les villes de taille moyenne. Ce problème est plus sensible en
Grande-Bretagne que presque partout ailleurs parce que Londres domine
largement les autres villes. L’effet « Londres » est manifestement positif pour
les gens qui y résident et y travaillent car ils sont en mesure de procurer gîte
et couverts à leurs enfants qui débutent leur parcours de carrière (souvent
en tant que stagiaires non rémunérés).

III. THÈME

Suffocation occurred unexpectedly. During the night of the 6th to the


Eco. techno. Khâgne

7th November, while temperatures were falling down and winter was drawing
near, and while the wind stopped blowing/abated, billions and billions of fine
particles were trapped in Dehli’s air. […] Air pollution claimed 525 000 deaths,
that is to say one quarter of the world total, according to a survey published
by The Lancet last October. In New Dehli, the first ones to have seen or
felt the pollution layer were the homeless, sleeping on the rear seat of their
rickshaws, or the security guards keeping watch over the homes in the
well-off neighbourhoods of the capital. Others discovered it the morning
after in their bedrooms, waking up amidst whitish smoke. Since that day,
Dehli’s air has been stinging its dwellers’ eyes and irritating their throats.
LV1 – ANGLAIS
S cient.

ANNALES CCIR 2018-2019 l 39

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S UJET

LV1 – ANGLAIS
Durée : 4 heures.

Les candidats ne doivent faire usage d’aucun document, dictionnaire


ELVi ou lexique ; l’utilisation de toute calculatrice et de tout matériel élec-
tronique est interdite. Si au cours de l’épreuve, un candidat repère ce
qui lui semble être une erreur d’énoncé, il la signalera sur sa copie
et poursuivra sa composition en expliquant les raisons des initiatives
qu’il sera amené à prendre.

1. TRADUCTIONS

Durée de l’épreuve : 2 heures.

I. TRADUCTION DE FRANÇAIS EN ANGLAIS

Aucun objet ne lui parut original. Mais la vendeuse, qui la connaissait


bien, lui indiqua une nouveauté, une lampe simple, résolument ethnique
mais encombrante.
– Vous me la livreriez ?
– J’ai bien peur que non, madame, répondit la vendeuse, en tout cas
pas aujourd’hui. Elle ne pèse rien, vous savez, et une fois pliée… Vous êtes
à deux pas, n’est-ce-pas ?
Avant qu’elle ait pu répondre, un jeune homme, le seul autre client dans
la boutique, se proposa pour lui porter la lampe jusqu’à chez elle. Ce geste
de courtoisie inhabituel l’intrigua et elle enleva ses lunettes de soleil pour
Eco. techno. Khâgne

le regarder.
– Et pourquoi feriez-vous cela, monsieur ?
– Parce que cela ne se fait plus et que je suis à ma manière une sorte
de nostalgique.
L’explication lui plut. Elle paya et le laissa l’accompagner jusqu’à l’entrée
2
de son immeuble. En chemin, il risqua :
– Vous êtes Mme Launay, n’est-ce-pas ? Dur
– Qu’importe.
– Je ne disais pas cela par rapport à votre mari, mais par rapport à votre
fille. Nous étions très liés.
– Ma fille ? Laquelle ?
LV1 – ANGLAIS

– Bénédicte.
Faustine Launay s’arrêta au niveau d’une entrée latérale de l’église et
détailla le jeune homme avec plus d’attention.
Marc Dugain, L’Emprise, Gallimard, 2014.
S cient.

40 l ANNALES CCIR 2018-2019

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S UJET
II. TRADUCTION DE L’ANGLAIS EN FRANÇAIS

At the age of five, Gustav Perle was certain of only one thing: he loved his
mother.

[…] Gustav called Emilie Perle ‘Mutti’. She would be ‘Mutti’ all his life, even
ELVi
when the name began to sound babyish to him: his Mutti, his alone, a thin
woman with a reedy voice and straggly hair and a hesitant way of moving
from room to room in the small apartment, as if afraid of discovering,
between one space and the next, objects – or even people – she had not
prepared herself to encounter. [… ]

On an oak sideboard in the living room, stood a photograph of Erich Perle,
Gustav’s father, who had died before Gustav was old enough to remember
him.

Every year, on August 1st, Swiss National Day, Emilie set posies of gentian
flowers round the photograph and made Gustav kneel down in front of it
and pray for his father’s soul. Gustav didn’t understand what a soul was. He
could see only that Erich was a good-looking man with a confident smile,
wearing a police uniform with shiny buttons. So Gustav decided to pray for
the buttons – that they would keep their shine, and that his father’s proud
smile wouldn’t fade as the years passed.

“He was a hero,” Emilie would remind her son every year. “I didn’t under-
stand it at first […]. He was a goodman in a rotten world. If anybody tells
you otherwise, they’re wrong.” Sometimes, with her eyes closed and her
hands pressed together, she would mumble other things she remembered
about Erich. One day, she said, “It was so unfair. Justice was never done.
And it never will be done.”
Rose Tremain, The Gustav Sonata, Penguin 2016.
Eco. techno. Khâgne

2 . EXPRESSION ÉCRITE

Durée de l’épreuve : 2 heures.

Last week, the editors of GQ* named the [National Football League] quarter-
back Colin Kaepernick its Citizen of the Year for his work protesting racial
injustice. Mr. Kaepernick has been heavily criticized by people like President
LV1 – ANGLAIS

Trump, who claims that an N.F.L. player who kneels during the playing of
the national anthem “disrespects our flag” and should be fired; others argue
that he is out of bounds as an activist who mixes sports with politics.

The problem is that Mr. Kaepemick’s critics, and most of America, don’t


really understand how protests work. Our textbooks and national mythology
S cient.

celebrate moments when single acts of civil disobedience, untainted by polit-


ical organizations, seemed to change the course of history. But the ideal of
the “good” protest – one that materialized from an individual’s epiphany – is

ANNALES CCIR 2018-2019 l 41

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S UJET

a fantasy. More often, effective protest is like Mr. Kaepernick’s: it’s collective


and contingent and all about long and difficult struggles.

Consider what most Americans would agree were two “good” protests:
Rosa Parks’s refusal to move to the back of a bus in Montgomery, Alabama,
and the student sit-ins at a Woolworth lunch counter in Greensboro, North
ELVi
Carolina. Parks, the story goes, was exhausted from a day’s work and
took a seat in the “whites only” section. To the astonishment of onlookers,
she refused to give up her seat when asked. In Greensboro, black college
students decided to eat at the local five-and-dime* and initiated the first sit-in
at a segregated Southem restaurant. They were idealistic and perhaps naïve.

These stories follow a set narrative. They are “firsts”: the first time a black
woman refused to give up her seat or the first time students staged a sit-in.
They seemed to arise spontaneously when someone fed up with unfair treat-
ment couldn’t take it anymore. Good protesters act as individual citizens,
untainted by associations with suspect political organizations.

The trouble is that these stories are historically inaccurate and obscure just
how protest in the 20th century forged a more democratic country. A narra-
tive with greater accuracy would allow us to better evaluate protests against
racial discrimination. Earlier protests, similar to the one that Mr. Kaepernick
started, sprang from protesters’ associations with activist organizations,
were deeply political rather than individual, and played out in unfamiliar
venues in new forms.

Protests that change history have their own long histories. They are almost
never the frrst of their kind. Successful protesters plan campaigns, rather
than respond to oppression in a single, spontaneous act. Protesters often
belong to organizations that lend theoretical, moral and logistical support.
Protests don’t reveal previously hidden wrongs to an unaware public.
Eco. techno. Khâgne

Instead, they cast those wrongs in a new light. They fail, time and time
again. When they succeed, they win only partial victories.

Rosa Parks, for example, was a trained civil rights activist. She built on
efforts that started in the 19th century to desegregate transportation and
gained speed in the 1930s. In 1940, for example, Pauli Murray, a black
woman, refused to give up her seat on a bus in Petersburg, Virginia.

Though most Americans today look back on the desegregation of public


transportation with pride, most white Southerners opposed it vehemently,
and many did so violently. During World War II, white passengers and bus
drivers beat uniformed black soldiers who tried to integrate buses. […]
LV1 – ANGLAIS

Throughout the war, the movement continued to train people who became
civil rights protesters in the 1950s, including Pauli Murray. This pressure
influenced the Supreme Court in 1946, which ordered desegregation on
interstate buses in Morgan v. Virginia. That case set a precedent that Parks
S cient.

strategically worked to extend to local and state laws in Montgomery.

42 l ANNALES CCIR 2018-2019

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S UJET
Just as Parks had done, the students sitting-in at the Woolworth counter
drew from a long history of struggle. African-Americans had been “stool
sitting” since the early 1940s. Howard University students in Washington
staged some of the first sit-ins, which involved movement­trained protesters
led by Murray. Those sit-ins aimed at national chain stores that operated
outside the South, just as the Greensboro sit-ins purposefully did later. The
ELVi
Greensboro students knew all of this, because they were advised by the
legendary organizer Ella Baker.

White Americans’ deep investment in the myth that the civil rights movement
quickly succeeded based on individual protests has left the impression
that organizations such as Black Lives Matter are counterproductive, even
sinister. The same things were said of the N.A.A.C.P. [National Association
of Colored People].

Just as football players kneeling during the national anthem today must
repeatedly insist that they are not protesting the flag, Parks and the
Greensboro students had to fight against efforts to play down the stakes of
their protests. Parks’s action was not about a seat in the front of the bus. It
was about Jim Crow, a legal and social system of degradation. And as Baker
argued in her speech “Bigger Than a Hamburger”, the Greensboro sit-ins
marked the beginning of a fight for education, voting rights and economic
opportunity.

Rosa Parks was a hero. So were the students who sat in at the Woolworth
lunch counters. But they knew that their heroism was possible only because
of decades of what Baker called “spade work”. They knew that organizations
to which they belonged and that gave them strength were the most recent
manifestations of decades of struggle.
Glenda Elizabeth Gilmore, The New York Times, November 20, 2017.

* GQ: a monthly men’s magazine focusing upon fashion, style, and culture for men.
Eco. techno. Khâgne

* Five-and-dime: a type of store that was popular in the United States in the early to mid-20th century;
they sold many different items, most of which were worth five or ten cents.

Répondre en ANGLAIS aux questions suivantes :


(Environ 250 mots pour chaque réponse)

1. According to the author of the text, how does understanding Kaepernick’s


protest as an isolated incident misrepresent the history of protest move-
ments in the United States? Answer the question in your own words.

2. In your opinion, in what circumstances should citizens take things into


LV1 – ANGLAIS

their own hands to bring about social change? Illustrate your answer
with relevant examples from the English-speaking world.
S cient.

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ELVi
C
ORRIGÉ
Par Philippe Rayet, agrégé d’anglais, professeur honoraire en CPGE au lycée
Notre-Dame-du-Grandchamp, à Versailles.

I. TRADUCTION DU FRANÇAIS A L’ANGLAIS


C ORRIGÉ

There was no item (in the shop) that seemed original to her. However, the
shop assistant, who knew her quite well, pointed to something they had
just acquired, an ordinary lamp, which looked resolutely ethnic but (rather)
cumbersome.
“Could it be delivered to my flat, (please)?”
“I fear not [I’m afraid not], madam,” the shop assistant said [answered], “not
today, at any rate. It weighs nothing, you know, and once it’s been folded
up… You live just a few minutes from here, don’t you?”
Before she could say a word, a young man, who was the only other customer
in the shop, offered (his services) to carry the lamp for her up to where she
lived. She was intrigued by this unusual behaviour and (she) took off her
sunglasses [took her sunglasses off] to look at him (better).
“And why would you do that?”
“Because people no longer do it, and because in my way I feel somewhat
nostalgic for it.”
She liked the explanation. She paid and let him go with her up to the entrance
to her block of flats. On their way, he ventured,
“You’re Madame Launey, aren’t you?”
“What does it matter?”
“I didn’t say that in reference to your husband but to your daughter (in fact).
She and I used to be very close.”
“My daughter? Which one?”
“Bénédicte.”
Faustine Launey stopped outside a side entrance to the church and exam-
Eco. techno. Khâgne

ined the young man more carefully [closely].


Marc Dugain, L’Emprise, 2014.

II. TRADUCTION DE L’ANGLAIS AU FRANÇAIS

À (l’âge de) cinq ans, Gustav Perle n’avait qu’une seule certitude : il aimait sa
mère [s’il y a bien une chose dont Gustav Perle était sûr, c’est qu’il adorait
sa maman].
[…] Gustav appelait Emilie Perle « Mutti ». Et il allait (continuer à) l’appeler
« Mutti » pendant toute sa vie [toute sa vie durant], même lorsque ce (petit)
LV1 – ANGLAIS

nom commencerait à lui paraître puéril [enfantin] : c’était sa Mutti, la sienne


à lui tout seul, une femme maigre à la voix stridente [haut perchée/aiguë]
et aux cheveux en désordre [en bataille], qui se déplaçait d’un pas hésitant
d’une pièce à l’autre dans le(ur) petit appartement comme si elle avait peur
d’y découvrir, chemin faisant, des objets – ou même des personnes – qu’elle
ne s’attendait pas à (y) rencontrer. […]
S cient.

Il y avait dans la salle de séjour [dans le séjour/dans le salon], sur un buffet


en chêne, une photo d’Erich Perle, le père de Gustav, (qui était) mort avant
que ce dernier (ne) soit assez grand pour se souvenir de lui.

44 l ANNALES CCIR 2018-2019

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Chaque année au 1er août, jour de la fête nationale suisse, Emilie disposait
de(s) petits bouquets de gentianes autour de cette photo et obligeait Gustav
à s’agenouiller devant le portrait et à prier pour le salut de l’âme de son père. ELVi
Gustav ne comprenait pas le sens du mot « âme ». La seule chose qu’il voyait,
c’est qu’Erich était un bel homme au sourire confiant, qui portait un uniforme
de policier avec des boutons dorés [brillants]. Aussi Gustave décida-t‑il de
prier pour ces boutons – pour qu’ils gardent leur éclat, et pour que le fier

C ORRIGÉ
sourire de son père ne s’estompe pas au fil des ans.
« C’était un héros, redisait chaque année Emilie à son fils. Je ne l’ai pas
compris tout de suite. […] C’était un homme bon dans un monde pourri
[corrompu]. Si quelqu’un te dit le contraire, il se trompe [il est dans l’erreur]. »
Parfois, les yeux clos et les mains fortement jointes, elle marmonnait
[marmottait] d’autres choses dont elle se souvenait au sujet d’Erich. Un
jour, elle lâcha : « C’était tellement injuste ! On ne lui a jamais rendu justice.
Et on ne le fera jamais. »
Rose Tremain, The Gustav Sonata, 2016.

Eco. techno. Khâgne

LV1 – ANGLAIS
S cient.

ANNALES CCIR 2018-2019 l 45

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S UJET

LV1 – ALLEMAND
Durée : 4 heures.
30
(La note sur 80 sera divisée par 4 pour obtenir la note sur 20, qui
IÉNA sera arrondie au dixième supérieur.)
Les candidats ne sont pas autorisés à modifier le choix, effectué
lors de l’inscription, de la première langue dans laquelle ils doivent 35
composer.
Les candidats ne doivent faire usage d’aucun document, dictionnaire
ou lexique ; l’utilisation de toute calculatrice ou de tout matériel
électronique est interdite. 40
Si au cours de l’épreuve, un candidat repère ce qui lui semble être
une erreur d’énoncé, il la signalera sur sa copie et poursuivra en
expliquant les raisons des initiatives qu’il sera amené à prendre.
45

S UJET

Zeit ist geld? 50

1 Schnell einen Kaffee getrunken, zum Bus gerannt, auf der Fahrt Mails
gelesen, völlig außer Atem von der Bibliothek auf den Sportplatz gelaufen,
kurz „hallo!“ bei meiner Oma gesagt und zum Abendessen die Reste vom
Vortag aufgewärmt. Zwischen all den Aufgaben, die ich mir selbst gesetzt 55
5 habe, habe ich kaum Zeit für das gefunden, was ich wirklich machen wollte:
In aller Ruhe die Hausarbeit erledigen oder einen neuen Roman lesen.
Komischerweise bin ich nicht die Einzige in dieser Lage. Will ich mich mit
Eco. techno. Khâgne

Freunden spontan auf einen Kaffee verabreden, hat nie jemand Zeit. Sind
wir alle einfach nur keine Organisationstalente oder steckt da ein gesell- 60
10 schaftliches Phänomen dahinter? Wo ist diese Zeit denn hin, die niemand
mehr hat, die aber alle so dringend brauchen?
Dass wir unser ganzes Leben nach der Uhr orientieren, ist eine ziemlich
neue Entwicklung. In älteren Kulturen bestimmten der Lauf der Sonne und
die Jahreszeiten das gemeinsame und individuelle Leben. 65
15 So lebten die alten Ägypter mit den Hochwasserzeiten des Nils und unsere
Vorfahren, die oft Bauern waren, mit den Erntezeiten. Gearbeitet wurde,
LV1 – ALLEMAND

wenn die Sonne und die Natur es erlaubten. Mit der Entwicklung der Uhr und
der Stechuhr während der lndustrialisierung, mit der Kommen und Gehen
der Arbeiter kontrolliert wurde, änderte sich der Umgang mit der Zeit. Zeit
20 wurde zu einer wirtschaftlichen Ressource. Zeit ist Geld, lautete nun das I. V
Credo. Unser Zeitverständnis wandelte sich von einem qualitativen hin zu
einem quantitativen. Das allein erzeugt aber noch keinen Zeitdruck.
Wie dieser Druck in unserer spätmodernen Gesellschaft entsteht, hat der
S cient.

Soziologe Hartmut Rosa analysiert. Er beobachtet mehrere Bereiche der


25 Beschleunigung1: die technische Beschleunigung, die Beschleunigung des
Lebenstempos und die Beschleunigung des sozialen Wandels.

46 l ANNALES CCIR 2018-2019

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S UJET
Technische Beschleunigung bedeutet kurz gesagt: Ein Mercedes fährt
schneller als eine Pferdekutsche und die neue iPhone-Generation reagiert
schneller auf unsere Befehle als die ersten Smartphones. Mithilfe der tech-
30 nischen Entwicklungen können wir viel schneller reagieren und agieren.
Eigentlich müssten wir also mehr freie Zeit haben. Das klappt aber nur,
wenn die Zahl der Handlungen konstant bleibt. Faktisch machen wir aber
IÉNA
immer mehr und so sparen wir nicht nur keine Zeit ein, sondern sind auch
völlig gestresst.
35 Die soziale Beschleunigung lässt sich am besten im Vergleich zu dem
Leben unserer Großeltern zeigen. Viele Menschen der älteren Generation
leben seit jeher in derselben Stadt, sie lernten einen Job und blieben dabei,
entschieden sich für eine Partei und wählten diese bei allen Wahlen. Und
wie sieht es bei uns aus? Meist ganz anders. Arbeitsplätze, Wohnorte, Werte
40 und Familienstrukturen wechseln immer öfter. Unser gesamtes Leben wird
immer schneller.
Zum einen leben wir in einem kapitalistischen und leistungsorientierten
Wirtschaftssystem. Ob wir das möchten oder nicht, wir müssen uns diesem
System fügen, um darin zu arbeiten. In einem solchen Wirtschaftssystem ist
45 Zeit ein bestimmender Faktor. Möchte ich meine Leistung verbessern, muss
ich schneller arbeiten, schneller Informationen sammeln und flexibler sein.
Unsere Arbeit beschleunigt sich und wir akzeptieren das, denn Zeit ist Geld.
Zweitens leben wir in einer zu großen Teilen säkularisierten Gesellschaft,
in der viele nicht mehr an ein Leben nach dem Tod glauben. Also möchten
50 sie möglichst viel hier und sofort erleben, bevor es zu spät ist. Wir mögen
lieber viele Erlebnisse hintereinander haben, anstatt eines voll zu genießen.
Ein rasantes Leben erscheint uns länger und verspricht Zufriedenheit. So
reise ich lieber in zwei Wochen durch fünf Städte, statt mir zwei genauer
anzusehen, und übe nicht dieselbe Sportart allzu lange aus. Wir organisieren
55 unser eigenes Leben im Job und in der Freizeit also nach der Uhr und versu-
chen, wo immer möglich, Zeit einzusparen.
Unsere Gesellschaft ist strukturell gestresst und wir sollten uns dringend
Eco. techno. Khâgne

Gedanken über unser Zeitverständnis machen. Es ist schon ein Anfang zu


erkennen, dass unser Umgang mit der Zeit nicht natürlich gegeben ist und
60 sich ändern kann. Das heißt: Sich Zeit für ein gutes Gespräch nehmen,
Pausen machen, wenn man sie braucht, oder ein Wochenende mal nicht
auf die Uhr sehen und nach seinem inneren Zeitgefühl leben.
Aber vor allem verstehen, dass Pausen und Zeiten der Langsamkeit kein
Verlust sind. lm Gegenteil: Sie sind bereichernd und notwendig, denn Zeit
65 ist Leben.
Felicia Klinger, Nach einem Artikel, « ze.tt », 23. September 2017.
LV1 – ALLEMAND

1. Die Beschleunigung: 1’accélération.

I. VERSION (sur 20 points)

Traduire le titre et les 3 premiers paragraphes, depuis : « Schnell einen Kaffee


getrunken, zum Bus gerannt, auf der Fahrt Mails gelesen… » jusqu’à : « …In
S cient.

älteren Kulturen bestimmten der Lauf der Sonne und die Jahreszeiten das
gemeinsame und individuelle Leben. »
(de la ligne 1 à la ligne 14)

ANNALES CCIR 2018-2019 l 47

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S UJET

II. QUESTIONS (sur 40 points)


C
1. Question de compréhension du texte
Was unterscheidet unser Zeitgefühl von dem unserer Vorfahren?
IÉNA (100 mots + ou –10 % * ; sur 10 points)
I. V
2. Question de compréhension du texte
Aus welchen Gründen akzeptieren wir die Beschleunigung der Zeit?
(100 mots + ou –10 % * ; sur 10 points)

3. Question d’expression personnelle


„Seine Leistung verbessern, schneller arbeiten, schneller Informationen
sammeln, flexibler sein…“: ein Rezept für ein harmonisches und sinnvolles
Leben?
(300 mots + ou –10 % * ; sur 20 points)

* Le non-respect de ces normes sera sanctionné.


(Indiquer le nombre de mots sur la copie après chaque question.)

III. THÈME (sur 20 points)

E. Macron souhaite que la France respecte – enfin – ses engagements.


Si la France réduisait son déficit budgétaire, elle pourrait plus facilement
convaincre les Allemands de constituer un gouvernement économique de
la Zone euro.
III.
Macron a un autre objectif. Pour lui, l’Europe représente surtout les valeurs
Eco. techno. Khâgne

démocratiques. Il sait qu’A. Merkel partage ses convictions, mais qu’elle ne


veut pas mener seule ce combat. Avec le Brexit, Paris et Berlin savent que
la reconstruction du projet européen repose sur eux. Et Berlin a besoin de
Paris. La chancelière ne s’est pas fait que des amis dans le Sud de l’Europe
pendant la crise financière…

En novembre 2016, D. Trump a été élu ; Macron et Merkel ont compris que


cette élection allait tout changer. Jusque-là, les responsables américains
incarnaient les valeurs occidentales, ils les défendaient. Mais la situation est
LV1 – ALLEMAND

maintenant totalement différente. Plus personne, sur le vieux continent, ne


pense que Trump peut jouer le rôle de leader du monde libre.
Romain Guibert et Pascale Hugues, Le Point, 21 septembre 2017*.

* (Ces références ne sont pas à traduire.)


S cient.

48 l ANNALES CCIR 2018-2019

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C ORRIGÉ
Par Jean-Michel Hannequart, professeur en CPGE ECS au lycée François
IÉNA

1er du Havre.

C ORRIGÉ
I. VERSION

Le temps, c’est de l’argent ?

Avalé rapidement un café, couru jusqu’au bus, lu des mails pendant le trajet,
foncé complètement à bout de souffle de la biliothèque au terrain de sport,
dit un petit bonjour à ma grand-mère, et pour le dîner réchauffé les restes
de la veille. Entre toutes ces tâches que je me suis moi-même fixées, je n’ai
guère trouvé le temps de faire ce que je voulais vraiment faire : effectuer les
travaux domestiques en toute tranquillité ou lire un nouveau roman.
Bizarrement je ne suis pas la seule dans ce cas. Si je veux me retrouver
de façon improvisée avec des amis pour prendre un café, personne n’a le
temps. Sommes-nous tout simplement peu doués pour l’organisation ou
y a-t‑il derrière cela un phénomène de société ? Où est donc passé ce temps
dont plus personne ne dispose, mais dont tout le monde a tellement besoin ?
Le fait que nous organisions toute notre vie en fonction de l’heure, est une
évolution assez récente. Dans des civilisations plus anciennes, c’était le
cycle du soleil et les saisons qui déterminaient le rythme de la vie en commun
et celui de la vie individuelle.

III. THÈME Eco. techno. Khâgne

E. Macron wünscht, dass Frankreich – endlich – seinen Verpflichtungen


nachkommt (seine Verpflichtungen einhält). Würde Frankreich sein
Haushaltsdefizit senken (abbauen), könnte es die Deutschen leichter davon
überzeugen, eine Wirtschaftsregierung der Eurozone zu bilden.
Macron hat (verfolgt) ein anderes Ziel. Seiner Ansicht nach vertritt Europa
vor allem die demokratischen Werte (steht Europa vor allem für die demo-
kratischen Werte). Er weiß, dass A. Merkel seine Überzeugungen teilt, aber
dass sie diesen Kampf nicht allein führen will. Mit (nach) dem Brexit wissen
Paris und Berlin, dass der Wiederaufbau des europäischen Projekts auf ihren
Schultern liegt (lastet). Und Berlin braucht Paris (ist auf Paris angewiesen).
LV1 – ALLEMAND

Die Kanzlerin hat sich bei (während) der Finanzkrise nicht nur Freunde in
Südeuropa gemacht.
Im November 2016 ist D. Trump gewählt worden (wurde D. Trump gewählt).
Macron und Merkel haben verstanden, dass diese Wahl alles ändern würde.
Bis zu diesem Zeitpunkt verkörperten die amerikanischen Verantwortlichen
die westlichen Werte, sie verteidigten sie. Aber jetzt ist die Situation eine
völlig andere (nun hat sich die Situation völlig verändert). Niemand mehr
S cient.

auf dem alten Kontinent meint, Trump könne die Rolle des Anführers der
freien Welt spielen.

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S UJET

LV1 – ALLEMAND
Durée : 4 heures.

Les candidats ne doivent faire usage d’aucun document, dictionnaire


ELVi ou lexique ; l’utilisation de toute calculatrice et de tout matériel élec-
tronique est interdite. Si au cours de l’épreuve, un candidat repère ce
qui lui semble être une erreur d’énoncé, il la signalera sur sa copie
et poursuivra sa composition en expliquant les raisons des initiatives
qu’il sera amené à prendre.
En matière d’orthographe, les graphies antérieure et postérieure à la
réforme sont acceptées.

1. TRADUCTIONS

Durée de l’épreuve : 2 heures.

I. TRADUCTION DU FRANÇAIS EN ALLEMAND

J’ai longtemps été persuadé que l’on ne pouvait faire de vraies rencontres
que dans la rue. Voilà pourquoi j’attendais la fille de Stioppa sur le trottoir,
en face de son immeuble, sans la connaître. « Je t’expliquerai tout », m’avait-
elle dit au téléphone. […]

Oui, si j’avais voulu la rencontrer, c’est que j’espérais qu’elle me donnerait


des « explications ». Peut-être m’aideraient-elles à mieux comprendre mon
père, un inconnu qui marchait en silence à mes côtés, le long des allées du
Eco. techno. Khâgne

bois de Boulogne. Elle, la fille de Stioppa, et moi, le fils de l’ami de Stioppa,


nous avions certainement des points communs. Et j’étais sûr qu’elle en
savait un peu plus long que moi. 2
À la même époque, derrière la porte entrouverte de son bureau, mon père Dur
parlait au téléphone. Quelques mots de lui m’avaient intrigué : « la bande
des Russes du marché noir ».
Près de quarante ans plus tard, je suis tombé sur une liste de noms russes,
ceux de gros trafiquants de marché noir à Paris pendant l’occupation alle-
LV1 – ALLEMAND

mande. […]
Stioppa se trouvait-il parmi eux ? Et mon père sous une fausse identité
russe ? Je me suis posé une dernière fois ces questions avant qu’elles ne
se perdent sans réponses dans la nuit des temps.
Patrick Modiano, Souvenirs dormants, Gallimard 2017.
S cient.

50 l ANNALES CCIR 2018-2019

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S UJET
II. TRADUCTION DE L’ALLEMAND
AU FRANÇAIS

Es war kein Zufall, dass Fenia Xenopoulou just in dem Moment, als der
Rettungswagen auf den Platz einbog und die Sirene zu hören war, an
Rettung gedacht hatte. Sie hatte seit Tagen an nichts anderes gedacht, es ELVi
war ihr geradezu zur fixen Idee geworden, und darum dachte sie es auch
jetzt: Rettung! Er muss mich retten!
Sie saß beim Abendessen im Restaurant Menelas, das sich genau gegen-
über vom Hotel Atlas befand, zusammen mit Kai-Uwe Frigge, den sie, seit
einer kurzen Affäre vor zwei Jahren, privat Fridsch nannte. […] Frigge,
ein […] Mann Mitte vierzig, aus Hamburg stammend, seit zehn Jahren in
Brüssel, hatte […] einen beeindruckenden Karrieresprung gemacht: Nun war
er Kabinettschef in der Generaldirektion für Handel, damit der einflussreiche
Büroleiter von einem der mächtigsten Kommissare der Union.
Dass sich die beiden in dieser Stadt voll von erstklassigen Restaurants
ausgerechnet bei einem Griechen trafen, der sich dann als eher mittel-
mäßig erwies, war nicht der Wunsch von Fenia X. gewesen, sie hatte kein
Heimweh und keine Sehnsucht nach dem Geschmack und den Aromen der
heimatlichen Küche. Kai-Uwe Frigge hatte das vorgeschlagen: Er wollte
seiner griechischen Kollegin ein Zeichen von Solidarität geben, jetzt, da
nach dem Beinahe­Staatsbankrott Griechenlands und dem vierten teuren
EU-Rettungspaket, die „Griechen“ bei den Kollegen und in der Öffentlichkeit
völlig unten durch waren.
Er war sich eines Pluspunktes sicher, als er per Mail „Menelas?“ […] als
Treffpunkt vorschlug, und sie hatte „Okay“ geantwortet. Ihr war das egal
gewesen. Sie lebte und arbeitete schon zu lange in Brüssel, um sich noch
mit Patriotismus zu beschäftigen.
Was sie wollte, war: Rettung. Ihre eigene.
Robert Menasse, Die Hauptstadt, Suhrkamp 2017.
Eco. techno. Khâgne

2 . EXPRESSION ÉCRITE

Durée de l’épreuve : 2 heures.

Warum der Protest sich ausweiten könnte


LV1 – ALLEMAND

Seit der Bundestagswahl gilt Ostdeutschland wieder einmal als


Schmuddelecke der Republik. Doch das Unbehagen, das dort vorherrscht,
könnte sich noch weiter ausbreiten.

Immer wenn es ganz dick kommt, ist der Osten Deutschlands großes Thema.
Wie jetzt wieder nach der Wahl. Zwischen Fichtelberg und Kap Arkona hat
die AfD etwa doppelt so viele Stimmen wie im Westen geholt. Und weil
Meinungsforscher herausfanden, dass mehr als ein Viertel der Männer im
S cient.

Osten die Partei wählten, wird seit Tagen mit überwiegend hanebüchenem
Ausstoß am Ost-Mann herumpsychologisiert. Er ist jetzt der Problembär der
Republik, in deren Vorstellung er einsam und von allen Frauen verlassen in

ANNALES CCIR 2018-2019 l 51

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S UJET

seinem Plattenbau hockt und diesen nur verlässt, um Ausländer zu verprü-


geln, die Bundeskanzlerin anzubrüllen und falsche Parteien zu wählen. (…)

Zunächst zur Globalisierung. Als die Ostdeutschen die Mauer einrissen,


trafen sie auf eine nicht zuletzt im Wettstreit der Systeme zu einem
üppigen Sozialstaat ausgebaute Bundesrepublik mit Tariflöhnen, langem
ELVi
Arbeitslosengeld und guten Renten. Das ging noch etwa ein Jahrzehnt lang
gut, bis Deutschland zunehmend unter Druck geriet. Globale Warenströme
und entfesselte Finanzmärkte begannen, das Geschehen stärker zu
bestimmen als die Politik. Die hechelte, etwa mit der Agenda 2010, dem
enormen Tempo hinterher. Die Folgen sind in ganz Deutschland zu spüren,
doch werden diese im Westen bis heute von einer noch robusten Wirtschaft
mit vielen Altemativen sowie einer gefestigten Gesellschaftsordnung abge-
federt, während die Entwicklung im Osten auf eine instabile Gesellschaft
mitten im Umbruch traf sowie auf eine Wirtschaft, die nach der beispiellosen
Deindustrialisierung gerade erst wieder keimte. (…)

Der Aufruhr jetzt liegt auch daran, dass die Generation der zur Wende
Vierzigjährigen im Osten gerade ihre Rentenbescheide empfängt, die
auf Erwerbsbiographien aus ABM*, Minijobs und Zeitarbeit beruhen. Ihre
Kinder und Enkel wiederum sehen, dass sich das nicht ändert, vielmehr
geht es eiskalt weiter: Kürzlich feuerte ein Privatkonzern in Thüringen nach
der Übemahme einer Suchtklinik die Hälfte des Reinigungspersonals. Die
Patienten putzen seitdem selbst mit, was durchaus Teil der Therapie sein
kann; die über Beiträge aller Sozialversicherungspflichtigen finanzierten
Pflegesätze allerdings blieben gleich, den nun größeren Gewinn streicht
der Betreiber ein. Mit sozialer Marktwirtschaft hat das nichts mehr zu tun,
es regiert der nackte Kapitalismus – und zwar ziemlich genau so, wie es in
den Lehrbüchern im DDR-Staatsbürgerkunde-Unterricht geschrieben stand.

Zur Gängelung. Die DDR trat – es ist anzunehmen, bei Bewusstsein – der
Eco. techno. Khâgne

Bundesrepublik zu deren Bedingungen bei. Die Ost-Bürger handelten die


Regeln der neuen Gesellschaft nicht untereinander aus, sondem übernahmen
sie. Das trägt bis heute zu einem Gefühl der Fremdbestimmung bei. Denn
es bedeutete auch, dass ein über vierzig Jahre im Westen gewachsenes
System aus Vorschriften, Standards und Kontrollen im Osten vom ersten
Tag an ohne Wenn und Aber galt. Für ein am Boden liegendes Land und
seine Wirtschaft ist das ein enormes Hindernis, das der Aufbau-Boom nur
zeitweise überdeckte und das sich seit der Jahrtausendwende mit immer
neuen EU-Vorschriften auch noch potenziert. (…)
LV1 – ALLEMAND

Der Unmut ist offensichtlich so stark und die Antworten etablierter


Parteien so schwach, dass selbst radikales Vokabular und völlig
fehlender Anstand mancher AfD-Bewerber auch solide Mittelständler und
Kommunalpolitiker nicht davon abhielten, die Partei zu wählen. Traditionelle
Bindungen an Parteien oder auch nur an Kirchen und Vereine gibt es
im Osten ohnehin kaum. Dass zwischen Elbe und Oder immer wieder
Männer auffällig werden, liegt auch daran, dass sie in der Mehrheit sind.
S cient.

In manchen Ost-Landkreisen gibt es in der Altersgruppe der 18-bis 29-


Jährigen 25 Prozent Männerüberschuss. Gerade junge Frauen im Osten sind
mobil und ziehen der Arbeit hinterher. Männer dagegen sind eher sesshaft

52 l ANNALES CCIR 2018-2019

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S UJET
und kommen, auf sich allein gestellt, auf merkwürdige Ideen. „Ich werde so
lange zu Pegida gehen, bis ich einen Job und eine Frau gefunden habe“,
hat ein junger Teilnehmer mal bei einer Diskussion in Dresden erzählt. Wer
bitte sagt ihm, dass es so wohl nichts werden wird?

Durch den Aderlass an Frauen und überhaupt jungen Leuten fehlt es im


ELVi
Osten gerade auf dem Land auch an einer temperierenden Mitte, die
Aggressionen bremsen könnte. In einer solchen Gemengelage war dann
die Ankunft von Asylbewerbern samt der als Doktrin aufgefassten Ansage
„Wir schaffen das“ nur noch der buchstäbliche Tropfen, der das Fass zum
Überlaufen brachte. „Sie immer mit Ihren Flüchtlingen!“, bekam Sachsens
Integrationsministerin Petra Köpping von ostdeutschen Bürgern zu hören.
„Integrieren Sie doch erst mal uns!“ Das war egoistisch, selbstbezogen und
äußerst unchristlich, aber es war wohl auch: ein Schrei nach Wahrnehmung.
(…)

Ostdeutschland spielt im gesamtdeutschen Diskurs nur als Problemfall


eine Rolle. Das nervt auch diejenigen, denen nach der Wiedervereinigung
der Neubeginn geglückt ist. Dabei ist das die Mehrheit der Ostdeutschen.
Sie haben Firmen gegründet, umgeschult, noch mal ganz von vorn ange-
fangen. Sie haben die Chance der neuen Zeit oft unter großen Entbehrungen
genutzt. Doch von ihnen und auch den Erfahrungen insbesondere der harten
Nachwendezeit war bisher kaum die Rede. Stattdessen guckt der Westen
immer nur dann genau hin, wenn im Osten etwas seinen Erwartungen zuwi-
derläuft. Dann folgen Vorwürfe und Belehrungen. Undankbar seien sie, die
Ossis, teuer, nicht in der Demokratie angekommen. (…)

Der Fehler ist dabei offensichtlich: Es ist kein Ost-Thema, sondern geht
ganz Deutschland an. Die Entwicklung im Osten wirkt, vor allem bei den
Globalisierungsfolgen, wie eine Blaupause für das, was auch auf den Westen
zukommt und was, siehe Wahlergebnis, bereits jetzt zu spüren ist. Die AfD
Eco. techno. Khâgne

fängt dieses Unbehagen ein, Lösungen hat sie nicht. Höchste Zeit, dass die
anderen Parteien sie entwickeln und dann danach handeln.
Stefan Locke, FAZ, 02.10.2017.

* ABM = Arbeitsbeschaffungsmaßnahmen.

Répondez en Allemand aux questions suivantes :


(250 mots environ pour chaque réponse)

1. Wie erklärt der Autor den Erfolg der AfD im Osten Deutschlands?
LV1 – ALLEMAND

2. Wie sollten Ihrer Meinung nach die traditionellen Parteien auf das
beschriebene Unbehagen in Deutschland und in Europa eingehen?
S cient.

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ELVi
C
ORRIGÉ
Par Jean-Michel Hannequart, professeur en CPGE ECS au lycée François
1er du Havre.

I. TRADUCTION DE L’ALLEMAND
C ORRIGÉ

EN FRANÇAIS

Ça n’était pas un hasard, si Fenia Xenopoulou avait pensé à un sauvetage


juste au moment où l’ambulance s’était engagée sur la place et la sirène
avait retenti. Depuis des jours, elle n’avait pensé à rien d’autre, c’était devenu
pour elle une idée fixe, et c’est pourquoi elle pensait encore maintenant :
sauvetage ! Il doit me sauver.
Elle était assise pour le dîner dans le restaurant Menelas, qui se trouvait juste
en face de l’hôtel Atlas, en compagnie de Kai-Uwwe Frigge, qu’elle appelait
en privé Fridsch depuis une brève aventure deux ans plus tôt. Frigge, un
homme d’environ quarante cinq ans originaire de Hamburg et vivant depuis
dix ans à Bruxelles, avait fait un bond impressionnant dans sa carrière : il
était maintenant chef de cabinet à la direction générale du commerce et ainsi
le chef de bureau influent d’un des plus puissants commissaires de l’Union.
Le fait que leur rencontre avait lieu précisément dans un restaurant grec, qui
s’avéra être plutôt médiocre, ne correspondait pas à un vœu de Fenia X.,
elle n’avait aucunement le mal du pays, pas plus que la nostalgie des goûts
et des arômes de la cuisine du terroir. Kai-Uwe Frigge l’avait proposé : il
voulait manifester sa solidarité avec sa collègue grecque, à un moment où
après la presque faillite de la Grèce et le quatrième plan de sauvetage très
coûteux supporté par l’Union européenne les « Grecs » n’avaient plus du
tout la côte auprès de ses collègues et de l’opinion publique.
Il était assuré de marquer un point en proposant par mail le « Menelas ? » (…)
comme point de rencontre et elle avait répondu « okay ». Ça lui était égal.
Eco. techno. Khâgne

Elle vivait et travaillait depuis trop longtemps à Bruxelles pour se préoccuper


encore de patriotisme.
Ce qu’elle voulait, c’était un sauvetage. Le sien propre.

II. TRADUCTION DE FRANCAIS


EN ALLEMAND

Lange war ich überzeugt, dass wirkliche Begegnungen nur auf der Straße
möglich waren (dass man Menschen nur auf der Straße wirklich kennen
LV1 – ALLEMAND

lernen konnte). Deswegen wartete ich auf Stioppas Tochter auf dem
Bürgersteig gegenüber von ihrem Wohngebäude, ohne sie zu kennen. „Ich
werde dir alles erklären“, hatte sie mir am Telefon gesagt.
Ja, wenn ich sie hatte treffen wollen, dann deshalb, weil ich hoffte (dann in
der Hoffung), dass sie mir Erklärungen geben würde. Vielleicht würden sie
mir helfen, meinen Vater besser zu verstehen, einen Fremden, der schwei-
gend an meiner Seite durch die Alleen des Bois de Boulogne ging. Sie, die
Tochter von Stioppa, und ich, der Sohn von Stioppas Freund, hatten sicher
S cient.

einiges gemeinsam. Und ich war sicher, sie wusste etwas mehr als ich.
Zur selben Zeit sprach mein Vater hinter der halb geöffneten Tür seinem
Arbeitszimmer am Telefon. Einige Wörter, die er sagte (benutzte), hatten

54 l ANNALES CCIR 2018-2019

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mich neugierig gemacht: „die Russenbande vom Schwarzmarkt“. Fast
vierzig Jahre später bin ich auf eine Liste mit russischen Namen gestoßen,
denjenigen von groBen Schwarzmarkthändlern in Paris während der deut- ELVi
schen Besatzung. (…) Gehörte Stioppa dazu? Und mein Vater unter falscher
russischer Identität? Ich habe mir ein letztes Mal diese Fragen gestellt, bevor
sie unbeantwortet auf ewig (für immer) verhallen (verschwinden).

C ORRIGÉ
Eco. techno. Khâgne

LV1 – ALLEMAND
S cient.

ANNALES CCIR 2018-2019 l 55

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S UJET

LV1 – ESPAGNOL
Durée : 4 heures.

(La note sur 80 sera divisée par 4 pour obtenir la note sur 20, qui
IÉNA sera arrondie au dixième supérieur.)
Les candidats ne sont pas autorisés à modifier le choix, effectué
lors de l’inscription, de la première langue dans laquelle ils doivent
composer.
Les candidats ne doivent faire usage d’aucun document, dictionnaire
ou lexique ; l’utilisation de toute calculatrice ou de tout matériel
électronique est interdite.
Si au cours de l’épreuve, un candidat repère ce qui lui semble être
une erreur d’énoncé, il la signalera sur sa copie et poursuivra en
expliquant les raisons des initiatives qu’il sera amené à prendre.

S
UJET

La fuerza del presente

Todos los seres humanos y, por tanto, todas las generaciones, incluyendo
los llamados millennials, se definen por sus obras y no por sus palabras.
En ese sentido, esos jóvenes – corriendo el riesgo de generalizar como
ocurrió en mi caso – forman un amplio universo con innumerables perfiles,
personalidades y reacciones y se enfrentan a una serie de desafios, que
atañen incluso a su propia definición. Pero todo eso, las generalizaciones,
las diferencias y las culpas, incluso las malas interpretaciones, se acabaron,
Eco. techno. Khâgne

quedaron enterrados cuando la tierra se puso a temblar en México.

Frente a los fracasos y las hipocresías de la profunda crisis que sus ante-
cesores les hemos dejado, los millennials mexicanos demostraron ese 19
de septiembre, 12 días después del seísmo que golpeó Chiapas y Oaxaca y
32 años después de la tragedia de 1985, que han incorporado las lecciones
teóricas y prácticas para ser unos celosos defensores de las libertades I. V
individuales y del tiempo que les ha tocado vivir. Sin convocatorias, sin
llamamientos, sin consignas, los más jóvenes salieron a las calles y no lo
LV1 – ESPAGNOL

hicieron solo por las autopistas de la tecnología o por las alamedas de las
redes sociales, sino en persona, para reconquistar la condición humana y el
espíritu de toda una nación.

En este contexto, hay que recordar que, cuando en 2012 México se debatía II. Q
entre la necesidad de tener un Gobierno y la duda sobre lo que iba a hacer
el PRI en el poder, nació el movimiento #YoSoy132, que arrancó en una
S cient.

universidad contra un candidato, pero que, después fue absorbido por


el propio sistema político, hasta dejarlo como una explosión primaveral
bienintencionada de la parte más joven de la sociedad. En este momento, el
papel protagonista de los jóvenes no solo se basa en ir contra determinados

56 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 56 24/10/2018 14:46


S UJET
políticos o partidos, sino que ya se va definiendo en el entendimiento de
que nadie arreglará lo que ellos no hagan, asuman o arreglen.

Hoy los jóvenes de muchas partes del mundo nos han demostrado que
nuestros códigos, creencias, organización social y hasta incluso familiar
fueron los nuestros, pero no los suyos. Hoy con ejemplos como el de
IÉNA
México, los jóvenes se movilizan y lo hacen desde el principio de libertad
individual y de capacidad para elegir lo que quieren creer y defenderlo con
determinación y coraje. Hoy no solo los millennials, sino los jóvenes en
general, han sido capaces de acudir al grito de la solidaridad y ayudar a los
demás. Hoy han decidido tomar el pico y la pala para sacar de los escom-
bres a la sociedad que el viejo sistema enterró y han comprendido que los
Estados y las organizaciones han naufragado y han terminado por colapsar.

Ya no se trata de batallas en las redes sociales. Ahora es necesario salir a las


calles, tirar el cascajo y rescatar las sociedades. Los jóvenes deben seguir
siendo lo suficientemente maduros, como están demostrando, para ser
capaces de tener un mundo propio basado en el conocimiento y la comu-
nicación, con sus propios valores y sin necesidad de humillar, ni aniquilar
a los que representamos el viejo mundo.

En la parte que me toca, acepto y vivo con la responsabilidad alícuota de


ser uno de los autores de una catastrófica herencia. Para muchos, el mundo
que legamos a nuestros hijos es muy incierto, por ejemplo, el cambio climá-
tico, aunque en otros aspectos, sin estar bien, estamos mejor que antes,
por ejemplo en libertades democráticas consolidadas y en la conciencia
generalizada de la asignatura pendiente de un reparto más equitativo. Ahora
a los jóvenes les corresponde ejercer su derecho, su deber y el control de
este momento, que es el suyo, así como reconstruir las sociedades con la
convicción de que lograrán vivir en el mundo que siempre desearon. Un
mundo donde puedan disfrutar a plenitud de las virtudes de su ideología,
Eco. techno. Khâgne

su sexualidad, sus inclinaciones, el uso de su tiempo y la jerarquía de sus


valores. Ahora lo que les toca es hacer posible la transición y tomar defi-
nitivamente el poder.
Antonio Navalón, El Pais, 2/10/17.

I. VERSION (sur 20 points)

Traduire depuis « En la parte que me toca… » jusqu’à « …tomar definitiva-


LV1 – ESPAGNOL

mente el poder. »
(de la ligne 44 à la ligne 56)

II. QUESTIONS (sur 40 points)


S cient.

1. Question de compréhension du texte


Explicite en su contexto la afirmación siguiente del autor: "las generali-
zaciones, las diferencias y las culpas, incluso las malas interpretaciones,

ANNALES CCIR 2018-2019 l 57

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S UJET

se acabaron, quedaron enterrados cuando la tierra se puso a temblar en


México."
(de la ligne 6 à la ligne 8)
C
(100 mots + ou –10 % * ; sur 10 points)

IÉNA 2. Question de compréhension du texte


¿Cómo interpreta Antonio Navalón el nacimiento del movimiento
I. V
“#YoSoy132”, en 2012, en México?
(ligne 20)
(100 mots + ou –10 % * ; sur 10 points)

3. Question d’expression personnelle


¿En qué medida considera usted que se puede aplicar al mundo hispánico
la afirmación del autor según la cual los jóvenes “nos han demostrado que
nuestros códigos, creencias, organización social y hasta incluso familiar
fueron los nuestros, pero no los suyos?”
(de la ligne 28 à la ligne 30)
(300 mots + ou –10 % * ; sur 20 points)

* Le non-respect de ces normes sera sanctionné.


(Indiquer le nombre de mots sur la copie après chaque question.)

III. THÈME (sur 20 points)

L’oubli, mécanisme clé de la mémoire

C’est parce que les détails de nos souvenirs s’effacent que nous pouvons
agir, nous adapter au quotidien, acquérir de nouvelles connaissances.
Eco. techno. Khâgne

III.
Nous devrions bénir nos facultés d’oubli. Car une « bonne mémoire » doit
certes nous permettre de retenir durablement l’essentiel de nos savoirs et de
nos expériences. Mais elle doit aussi, et c’est primordial, parvenir à effacer
l’accessoire, le superflu. Les Grecs anciens, déjà, l’avaient pressenti. Cet
oubli « positif » rend notre mémoire performante, nous permet de forger des
concepts et d’adapter nos comportements aux situations nouvelles. Bref, il
nous rend plus intelligents !
À première vue, c’est paradoxal. Pourtant, plusieurs philosophes et psycho-
logues en ont eu l’intuition.
LV1 – ESPAGNOL

« L’oubli, sauf dans certains cas, n’est pas une maladie de la mémoire, mais
une condition de sa santé et de sa vie », écrivait Théodule Ribot, un des
pères de la psychologie en 1882. Publié dans Neuron le 21 *juin, un article
en offre une éclatante démonstration.
Florence Rosier, Le Monde, 21/08/17.

* en toutes lettres.
S cient.

58 l ANNALES CCIR 2018-2019

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C ORRIGÉ
Par Nicolas Léger, professeur en CPGE ECS et ECE à l’institution des
IÉNA

Chartreux, à Lyon.

C ORRIGÉ
I. VERSION

En ce qui me concerne, j’assume et je vis avec la responsabilité aliquote1


d’être l’un des auteurs d’un héritage catastrophique. Pour beaucoup, le
monde que nous léguons à nos enfants est très incertain, avec par exemple
le changement climatique, bien que, à d’autres égards, sans dire que tout va
bien, nous allions mieux qu’avant, avec, par exemple, des libertés démocra-
tiques renforcées et une prise de conscience générale du travail qu’il reste
à fournir2 pour une répartition plus équitable des richesses. Il revient3 main-
tenant aux jeunes d’exercer leur droit, leur devoir et le contrôle de cette
époque qui est la leur, ainsi que de reconstruire les sociétés, convaincus
qu’ils parviendront à vivre dans le monde dans lequel ils ont toujours
souhaité vivre. Un monde où ils pourront profiter pleinement des vertus de
leur idéologie, de leur sexualité, de leurs penchants4, de ce qu’ils font de
leur temps et de leur échelle de valeurs. C’est maintenant à eux de rendre
cette transition possible et de prendre définitivement le pouvoir.
1. Terme désuet signifiant « dans une certaine proportion ». Ici, « une part de la responsabilité » serait donc
une formulation plus claire.
2. L’expression « una asignatura pendiente » s’utilise pour des objectifs non atteints, des défaillances ou
lacunes.
3. On pourrait également penser à « il incombe aux jeunes » ou « c’est aux jeunes de… ».
4. Il s’agit ici de l’inclination, et non de l’inclinaison.
Eco. techno. Khâgne

III. THÈME

El olvido, mecanismo clave1 de la memoria

Porque los detalles2 de nuestros recuerdos se borran es por lo que podemos


actuar, adaptarnos a lo cotidiano, adquirir nuevos conocimientos.
Deberíamos alabar nuestras facultades de olvido. Porque una « buena
memoria » tiene, claro, que permitirnos recordar3 duraderamente lo esen-
LV1 – ESPAGNOL

cial de nuestros saberes y de nuestras experiencias. Pero también tiene,


y es primordial, que lograr4 borrar lo accesorio, lo superfluo. Ya lo habían
intuido los antiguos5 griegos. Este olvido « positivo » hace eficaz nuestra
memoria, nos permite forjar conceptos y adaptar nuestros comportamientos
a situaciones nuevas. Total, ¡ nos vuelve inteligentes !
A primera vista, es paradójico. Sin embargo, varios filósofos y psicólogos
lo intuyeron. « El olvido, salvo en algunos casos, no es una enfermedad
S cient.

de la memoria, sino una condición de la salud y la vida de uno », escribía


Théodule Ribot, uno de los padres de la psicología, en 1882. Publicado

ANNALES CCIR 2018-2019 l 59

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en Neuron el veintiuno de junio, un artículo ofrece una resplandeciente 6
demostración de ello.
IÉNA
1. En règle générale, una clave s’utilise dans un sens figuré, alors qu’una llave désigne l’objet.
2. Variante possible : los pormenores.
3. Il faut rappeler la construction transitive de recordar (algo), à ne pas confondre avec celle,
pronominale et prépositionnelle, d’acordarse de (algo).
4. Le verbe conseguir, lui aussi transitif, serait tout aussi valable.
C ORRIGÉ

5. Attention à la malheureuse confusion avec (un) anciano/a, nom commun signifiant
« une personne âgée ».
6. Variante possible : impactante.
Eco. techno. Khâgne
LV1 – ESPAGNOL
S cient.

60 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 60 24/10/2018 14:46


S UJET
LV1 – ESPAGNOL
Durée : 4 heures.

Les candidats ne doivent faire ussage d’aucun document, dictionnaire


ou lexique ; l’utilisation de toute calculatrice et de tout matériel élec- ELVi
tronique est interdite.
Si au cours de l’épreuve, un candidat repère ce qui lui semble être
une erreur d’énoncé, il la signalera sur sa copie et poursuivra sa
composition en expliquant les raisons des initiatives qu’il sera amené
à prendre.

1 . TRADUCTIONS

Durée de l’épreuve : 2 heures.

I. TRADUCTION DU FRANÇAIS EN ESPAGNOL

De retour à ton bureau, tu es convoqué par le conseiller. Les nouvelles


vont vite. Tu entres dans la pièce, prêt à remercier chaleureusement et
modestement l’homme qui t’a permis de rentrer aux services culturels et va
sans doute s’excuser de ne pouvoir t’offrir qu’un poste à contrat local – les
meilleurs, en réalité, même s’ils sont moins rémunérés et ne bénéficient pas
des avantages de l’expatriation, car leur durée n’est pas limitée : on peut les
renouveler indéfiniment. Sans attendre que tu t’asseyes, il t’annonce que tu
es congédié. Tes yeux s’écarquillent de stupeur.
« Quoi ? C’est un malentendu !
Eco. techno. Khâgne

– Au lieu de traduire ce que disait le ministre, monsieur Bulot, vous lui


avez coupé la parole et vous avez osé parler au nom de la France ! Vous
avez perdu tout sens de la hiérarchie. »
C’est irrévocable. Tu es prié de sortir à l’instant et de ne plus remettre
les pieds aux services culturels de l’ambassade de France. Le garde t’ac-
compagne, désolé : il t’aimait bien. Tu n’as même pas le temps de dire au
revoir à l’attachée audiovisuelle. Tu te retrouves sur la Cinquième Avenue,
sonné. Tu as toute liberté d’aller te promener dans le parc, maintenant.
Catherine Cusset, L’Autre qu’on adorait, Éditions Gallimard, 2016.
LV1 – ESPAGNOL

NB : On ne traduira pas le titre.

II. TRADUCTION DE L’ESPAGNOL


EN FRANÇAIS

– Soy la madre de Torres – dijo porque no se le ocurrió algo mejor.


S cient.

– Buenas tardes, señora. Aprovecho para agradecerle los dulces y las


frutas que nos ha enviado.
– Dejemos eso, no vine para cortesías. Vine a pedirle cuentas – dijo
Analía colocando la caja de sombreros sobre la mesa.

ANNALES CCIR 2018-2019 l 61

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S UJET

– ¿Qué es esto?
Ella abrió la caja y sacó las cartas de amor que había guardado todo ese
tiempo. Por un largo instante él paseó la vista sobre aquel cerro de sobres.
– Usted me debe once años de mi vida – dijo Analía.
– ¿Cómo supo que yo las escribí? – balbuceó él cuando logró sacar la
voz que se le había atascado en alguna parte.
ELVi
– El mismo día de mi matrimonio descubrí que mi marido no podía
haberlas escrito y cuando mi hijo trajo a la casa sus primeras notas, reconocí
la caligrafía. Y ahora que lo estoy mirando no me cabe ni la menor duda,
porque yo a usted lo he visto en sueños desde que tengo dieciséis años.
¿Por qué lo hizo?
– Luis Torres era mi amigo y cuando me pidió que le escribiera una
carta para su prima no me pareció que hubiera nada de malo. Así fue con
la segunda y la tercera; después, cuando usted me contestó, ya no pude
retroceder. Esos dos años fueron los mejores de mi vida, los únicos en que
he esperado algo. Esperaba el correo.
– Ajá.
– ¿Puede perdonarme?
– De usted depende – dijo Analía pasándole las muletas.
El maestro se colocó la chaqueta y se levantó. Los dos salieron al bullicio
del patio, donde todavía no se había puesto el sol.
Isabel Allende "Cartas de amor traicionado" en Cuentos de Eva Luna,
Plaza y Janés Editores, 1990.

NB : On ne traduira pas le titre.

2 . EXPRESSION ÉCRITE

Durée de l’épreuve : 2 heures.


Eco. techno. Khâgne

Piñera, la lucha por el centro

Las elecciones que se celebrarán el próximo domingo dejan en evidencia


cómo Chile se ha plegado a un proceso muy extendido en Occidente. La
reconfiguración del sistema de partidos que había organizado el juego del
poder desde finales del siglo pasado. Como en Italia o en Brasil, como en
Francia o en la Argentina, las etiquetas conocidas no sirven para identificar
a los actores de la actual vida pública chilena.
LV1 – ESPAGNOL

La novedad sobresaliente se verifica en el oficialismo. Nueva Mayoría, here-


dera de la Concertación nacida en 1988, se fracturó. Sus socios principales,
el Socialismo y la Democracia Cristiana, compiten ahora con candidatos
diferentes. Los demócrata-cristianos postulan a la senadora Carolina Goic,
a quien los últimos soncleos de opinión prometen el 6% de los votos.
El Partido Socialista de Michelle Bachelet, la presidenta, ofrece a alguien
ajeno a sus filas. Es Alejandro Guillier, también senador. Quillier, un perio-
dista independiente, ocupa el segundo lugar en la carrera. Una encuesta
S cient.

de la consultora Cadem le asigna el 23% de los votos.


La propuesta oficialista expresa el estilo combativo del segundo período de
Bachelet. Un lejano eco de la consigna “Avanzar sin transar” de los tiempos

62 l ANNALES CCIR 2018-2019

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S UJET
de Salvador Allende, que se proyectó en las reformas educativa y tributaria
de la administración actual. La génesis de la candidatura de Quillier corro-
bora esta orientación. Surgió en abril, de una votación secreta en la que el
Comité Central. frustró las aspiraciones del líder histórico, Ricardo Lagos.
Con la propuesta de Lagos quedó descartada también una estrategia: la de
preservar el centro a través de la negociación y el consenso.
ELVi
El problema de esta radicalización es que no consigue reabsorber las disi-
dencias que florecen a su izquierda. El domingo no sólo volverá a competir
el tenaz Marco Enriquez Ominami, un ex socialista que podría arañar el 5%
de la elección. El Frente Amplio postula a Beatriz Sánchez, también perio-
dista, quien podría obtener el 14% de los votos. El Frente representa una
opción estatista, que se sostiene en el movimiento estudiantil, decisivo en el
comportamiento de la izquierda durante la última década. Los líderes de esa
fuerza, Giorgio Jackson y Gabriel Boris, no pueden competir porque todavía
no tienen los 35 años de edad que se requieren para ejercer la presidencia.
Hacia la derecha también aparecen variantes ortodoxas. La principal es la de
José Antonio Kast. Abogado y militante católico, Kast abandonó en 2016 la
UDI pinochetista. Encarna una moral irreprochable, recostada sobre valores
ultra conservadores.
Es posible que Kast produzca un daño cuantitativo a Sebastián Piñera, que
es el favorito de esta competencia. Los sondeos le atribuyen 5% de las
preferencias. Piñera ronda el 45% de los votos. Se calcula que, si no llega a
50%, bastaría que supere a Guillier por 15 puntos para asegurarse el triunfo
en la segunda vuelta. Kast, sin embargo, colabora con Piñera: le facilita, por
comparación, su instalación en el centro del arco político.

La de Piñera es otra metamorfosis relevante del escenario chileno. El ex


presidente se empeña en aclarar que no pertenece a la derecha. La adver-
tencia solía justificarse en que nunca simpatizó con Augusto Pinochet. Pero
han aparecido nuevos motivos para este encuadramiento. El más notorio
Eco. techno. Khâgne

es la influencia de dos asesores que han migrado desde el marxismo hacia


un liberalismo progresista. Uno de ellos es Mauricio Rojas, economista al
que la dictadura obligó a exiliarse en Suecia, donde llegó a ser diputado
por el partido Popular Liberal. El otro es el escritor Roberto Ampuero, quien
pasó los años del exilio en la República Democrática Alemana y en Cuba,
donde rompió con el Partido Comunista. Ampuero fue ministro de Cultura
de Piñera.
La gravitación de estos conversos, como ellos rnismos se llaman, ha equi-
librado y, quizá, superado la de los Chicago boys que rodeaban a Piñera.
Un grupo liderado por Cristián Larroulet, del célebre Instituto de Libertad
LV1 – ESPAGNOL

y Desarrollo.
Este tránsito hacia el centra del candidato de Chile Vamos no se beneficia
sólo por la aparición de un tradicionalista como Kast. Piñera está realizando
un rescate subliminal. El de la política consensual de Lagos, a la que el
socialismo renunció. La campaña deja la sensación de que este Piñera es
heredero de Lagos más que de sí mismo.
La transfiguración, que resulta inexplicable sin el asesoramiento de Andrés
S cient.

Chadwick, el colaborador clave del ex presidente, no debería sorprender.


Piñera se integra a un modelo que ya tiene ejemplares de escala regional. El
más obvio es el colombiano Juan Manuel Santos, quien en vez de reflejarse

ANNALES CCIR 2018-2019 l 63

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S UJET

en su antecesor Álvaro Uribe, prefirió el espejo de Bill Clinton, Tony Blair,


Felipe González, Fernando Henrique Cardoso o el propio Lagos, a quienes
reunió en Bogotá en 2014, para relanzar la tercera vía. También el argentino
C
Mauricio Macri rechaza ser identificado como un líder de derecha. Sólo que,
en su caso, la tercera vía se llama gradualismo.
El identikit de Piñera se asemeja al de Macri, a quien el chileno visita varias
ELVi
veces al año. Ambos provienen del empresariado. Los dos tuvieron una
experiencia como dirigentes futbolísticos. Profesan un mismo desdén por
las burocracias partidarias. Son optimistas frente a la globalización. Aunque
la competitividad darwiniana ahora se compensa con el acompañamiento
de la mano del Estado.
Este nuevo orden, caracterizado por una representación atomizada y un
eclipse de las dogmáticas clásicas, no termina de comprenderse sin un
factor importantísimo. Cambia la política porque cambia el electorado.
Carlos Pagni, El país, 14 de noviembre de 2017.

Répondre en espagnol aux questions suivantes :


(250 mots environ pour chaque réponse)

1. Según el autor, ¿cuáles son las tendencias de reconfiguración del sistema


de partidos políticos chilenos?

2. ¿Cree usted que la tendencia ilustrada en el artículo da cuenta de un


movimiento generalizado en los países hispanohablantes? Justifique su
respuesta con dos ejemplos.
Eco. techno. Khâgne
LV1 – ESPAGNOL
S cient.

64 l ANNALES CCIR 2018-2019

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C ORRIGÉ
Par Frédérique Mabilais, professeure agrégée d’espagnol au lycée Jeanne-
ELVi

d’Arc, à Caen.

I. TRADUCTION DU FRANÇAIS EN ESPAGNOL

C ORRIGÉ
– Je suis la mère de Torres – dit-elle car il ne lui vint pas mieux à l’esprit.
– Bonjour Madame. J’en profite pour vous remercier pour les friandises
et les fruits que vous nous avez envoyés.
– Oublions cela, ce n’est pas une visite de politesse. Je suis venue pour
vous demander des comptes – dit Analía en posant la boîte à chapeaux sur
la table.
– Qu’est-ce que c’est ?
Elle ouvrit la boîte et en sortit les lettres d’amour qu’elle avait gardées
durant tout ce temps. Il promena un long moment son regard sur cette
montagne d’enveloppes.
– Vous me devez onze ans de ma vie – dit Analía.
– Comment avez-vous su que c’est moi qui les ai écrites? – balbutia-t‑il
quand enfin il parvint à retrouver sa voix qui était restée coincée quelque
part.
– Le jour même de mon mariage j’ai découvert que mon mari ne pouvait
pas les avoir écrites et quand mon fils a rapporté ses premières notes à la
maison, j’ai reconnu l’écriture. Et maintenant que je vous regarde, je n’ai pas
le moindre doute, parce que je vous ai vu en rêve depuis que j’ai seize ans.
Pourquoi avez-vous fait cela ?
Luis Torres était mon ami et quand il m’a demandé de lui écrire une
lettre pour sa cousine, je n’y ai rien vu de mal. Pareil pour la deuxième et la
troisième ; ensuite, quand vous m’avez répondu, je n’ai pas pu faire machine
arrière. Ces deux années ont été les meilleures de ma vie, les seules durant
lesquelles j’ai attendu quelque chose. J’attendais le courrier.
Eco. techno. Khâgne

– Ah.
– Vous pouvez me pardonner ?
– Cela dépend de vous – dit Analía en lui donnant ses béquilles.

Le maître mit sa veste et se leva. Ils sortirent tous les deux dans le
brouhaha de la cour où le soleil n’était pas encore couché.
Isabel Allende "Cartas de amor traicionado" en Cuentos de Eva Luna,
Plaza y Janés Editores, 1990.
LV1 – ESPAGNOL

II. TRADUCTION DE L’ESPAGNOL


EN FRANÇAIS

De vuelta a tu despacho, te convoca el consejero. Las noticias viajan


rápido. Entras en su despacho, listo para agradecer calurosa y modesta-
mente al hombre que te ha permitido ingresar los servicios culturales y que
probablemente va a disculparse por solo poder ofrecerte un puesto con
S cient.

contrato de trabajo en destino – en realidad los mejores, aunque pagan


menos y no se benefician de las ventajas de la expatriación, porque no se
limita su duración: se pueden renovar indefinidamente. Sin esperar que te

ANNALES CCIR 2018-2019 l 65

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sientes, él te anuncia que te despide. Tus ojos se abren de par en par por
el estupor.
ELVi « – ¿Qué ? ¡Es un malentendido!
– En vez de traducir lo que decía el ministro, el señor Bulot, ¡usted le
ha cortado la palabra y se ha atrevido a hablar en nombre de Francia! Ha
perdido usted el sentido de la jerarquía.»
Es irrevocable. Te ruega que salgas ahora mismo y que no vuelvas
C ORRIGÉ

más a poner los pies en los servicios culturales de la embajada de Francia.


El guardia te acompaña, afligido: le caías bien. Ni siquiera te da tiempo
para despedirte de la asesora audiovisual. Terminas en la Quinta Avenida,
sonado. Tienes completa libertad para dar un paseo por el parque, ahora.
Catherine Cusset, L’autre qu’on adorait, Éditions Gallimard, 2016.

NB : On ne traduira pas le titre.


Eco. techno. Khâgne
LV1 – ESPAGNOL
S cient.

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S UJET
LV1 – ITALIEN
Durée : 4 heures.

(La note sur 80 sera divisée par 4 pour obtenir la note sur 20, les
deux chiffres aprés la virgule arrondis au dixième supérieur.) IÉNA
Les candidats ne sont pas autorisés à modifier le choix de la première
langue dans laquelle ils doivent composer. Tout manquement à la
règle sera assimilé à une tentative de fraude.
Ils ne doivent faire usage d’aucun document, dictionnaire ou lexique ;
sauf en latin pour lequel un dictionnaire Latin-Français est autorisé ;
l’utilisation de toute calculatrice ou de tout matériel électronique
est interdite.

S UJET

Meglio in italiano!

Da “Jobs act” a “spending review”, da “mobbing” a “low cost”. Le parole


inglesi si insinuano sempre più nella nostra lingua senza adattamenti e senza
alternative. E il rischio di parlare l’itanglese è sempre più concreto.
Scegliendo l’itanglese, ci stiamo perdendo per strada molte parole italiane
utili a nominare concetti, oggetti e azioni della quotidianità (perché mai,
raccontando e promuovendo i prodotti del territorio, scriviamo sempre più
spesso food e wine invece di cibo e vino? Perché un pranzo leggero è un
light lunch? Perché dobbiamo compilare un form e non un modulo?)
L’inglese è svelto, comodo e cosmopolita. Allora dov’è il problema? E in
Eco. techno. Khâgne

che modo la questione dell’itanglese riguarda tutti noi?


Casi ed esempi dicono poco, se non vengono accostati ai dati. Sono questi
a dar conto dell’attuale pervasività dell’itanglese. Vi faccio una singola
anticipazione: la società di traduzioni aziendali Agostini Associati rileva un
aumento degli anglicismi del 773% tra il 2000 e il 2009, e ulteriori incrementi
del 223% nel 2010, del 343% nel 2011, del 440% nel 2014.
Ma proviamo ad accostare, a questo, un altro dato: secondo il Rapporto
EF EPI (English Proficiency Index) del 2016, l’Italia è solo ventunesima su
ventisei Paesi europei per conoscenza dell’inglese.
Ed eccoci a un punto rilevante: se ad alcuni, e forse a moiti, per pura incom-
petenza dell’inglese molte parole dell’itanglese risultano sfuocate, o del tutto
oscure e indecifrabili, vuol dire che, oltre a dimenticarci (o a non inven-
LV1 – ITALIEN

tare) utili parole italiane, scegliendo l’itanglese, ci perdiamo il vantaggio del


capirci bene quando comunichiamo. E questo è grave. È ancora il rapporto
EF EPI del 2016 a dirci che non solo in Italia ma in tutto il mondo il settore
dell’istruzione è ampiamente sotto media per conoscenza dell’inglese.
È assai probabile, dunque, che quando scrive soft skills, il nostro Ministero
S cient.

dell’Istruzione, dell’Università e della Ricerca scelga un termine che risulta


opaco a molti, ostacolando, e non promuovendo, la propensione dei docenti
a sviluppare le indispensabili competenze trasversali nei ragazzi.

ANNALES CCIR 2018-2019 l 67

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S UJET

I due fenomeni (la pervasività dell’itanglese e la modesta conoscenza


della lingua inglese) sembrerebbero contrastanti, ma in realtà non lo sono.
“A chi conosce a fondo una lingua straniera non viene nemmeno in mente
di esibirla fuori luogo come fanno troppi ignoranti”, scrive Tullio De Mauro.
E aggiunge che “correggere il grave, persistente analfabetismo nazionale in
materia di lingue straniere, inglese compreso, è una via più lunga, ma forse
IÉNA
più produttiva”.
Preoccuparsi delle questioni della lingua con cui ci si parla non è un fatto
di purismo, di estetica o di nostalgia del passato. È una questione cruciale.
E non è un problema marginale, ma un tema che riguarda il presente e il
futuro, a livello sia individuale sia collettivo.
Il motivo è semplice: tra parole e potere esistono molti legami.
Parole e potere hanno un legame per gli individui: essere padroni delle parole
è una condizione per essere padroni del proprio pensiero e del proprio
destino. III.
Parole e potere hanno un legame forte anche per la collettività: è il nostro
Ministero degli affari esteri a ricordarci che la lingua italiana, che gli stranieri
giudicano tanto attraente da farne la quarta (o quinta) più studiata al mondo,
è uno straordinario strumento di soft power (a oggi non abbiamo una tradu-
zione accreditata per questo concetto, ma potremmo dire “potere morbido”).
Tutelare e promuovere la lingua italiana, già cosí desiderabile e seduttiva, puó
aiutare il nostro Paese a rafforzare il proprio prestigio nel mondo.
Ma non solo. Promuovere l’italiano (e usarlo per i marchi, i nomi dei prodotti,
la pubblicità…) può aiutare anche le nostre imprese a tutelare le esportazioni,
contrastando il fenomeno dei prodotti contraffatti: quelli che si fingono italiani
proprio dotandosi di nomi e marchi che “suonano” italiani.

È un fenomeno imponente, che vale 60 miliardi di euro e oltre 300.000 posti


di lavoro nel solo settore agroalimentare.
Dunque, quando si tratta di parlarci e capirci fra noi, che condividiamo l’ita-
liano come lingua madre, la scelta dovrebbe essere ovvia: meglio in italiano.
Eco. techno. Khâgne

Un’altra cosa importante: la nostra lingua è un bene comune. È un patrimonio


di cultura, di bellezza, di storia e di storie, di idee e di parole che appartiene
a tutti noi, che vale, che ci identifica e che ci aiuta a esprimerci pienamente
come individui, come cittadini e come Paese. Dovremmo averne cura.
Da Annamaria Testa, MicroMega online, 7 settembre 2017.

I. VERSION (sur 20 points)

Traduire en français depuis « I due fenomeni… » jusqu’à « …del proprio


destino ».
LV1 – ITALIEN

II. QUESTIONS (sur 40 points)

1. Question de compréhension du texte


S cient.

Spiegate: “Scegliendo l’itanglese ci perdiamo il vantaggio del capirci bene


quando comunichiamo”.
(100 mots + ou –10 % * ; sur 10 points)

68 l ANNALES CCIR 2018-2019

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S UJET
2. Question de compréhension du texte
Spiegate: “Promuovere l’italiano può aiutare anche le nostre imprese”.
(100 mots + ou –10 % * ; sur JO points)

3. Question d’expression personnelle


In un mondo globalizzato, è sufficiente parlare inglese ? IÉNA
(300 mots + ou –10 % * ; sur 20 points)

* Le non respect de ces normes sera sanctionné.


(Indiquer le nombre de mots sur la copie après chaque question.)

III. THÈME (sur 20 points)

Finis les bains dans les fontaines de Rome

Pour les touristes de passage à Rome, c’est devenu un sport que de plonger
dans l’une des 40 fontaines du centre historique. « Et s’ils se contentaient
de plonger ! » dit un marchand de journaux, « mais ils oublient bouteilles
de bière et cartons de pizza ». Cela explique le décret de la maire Virginia
Raggi : interdit désormais de consommer des aliments, de se baigner, de
grimper sur les statues ou de s’asseoir sur les marches des fontaines. Mais
il ne suffit pas d’interdire, il faut faire appliquer les décrets. Il pourrait donc
y avoir quelque chose de spectaculaire mais d’inefficace dans ces mesures
annoncées par Virginia Raggi. Sans doute serait-il préférable de former les
touristes. L’afflux touristique en Italie est particulièrement préoccupant dans
certaines villes : c’est comme si les touristes de l’Europe du Nord, privés de
leurs vacances exotiques, s’étaient tous repliés sur la Péninsule, épargnée
jusqu’ici par le terrorisme.
Eco. techno. Khâgne

D’après Marcelle Padovani, L’Obs, 14 juin 2017.


LV1 – ITALIEN
S cient.

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IÉNA
C ORRIGÉ
Par Bernard-A. Chevalier, professeur d’italien.

I. VERSION
C ORRIGÉ

Les deux phénomènes (l’omniprésence de l’itanglais et la piètre connais-


sance de la langue anglaise) sembleraient contradictoires, mais en réalité
ils ne le sont pas. « Celui qui connaît parfaitement une langue étrangère
n’a même pas l’idée de l’exhiber à tout bout de champ comme le font trop
d’ignorants » écrit Tullio De Mauro. Et il ajoute que « corriger le sérieux et
persistant analphabétisme national en matière de connaissance des langues
étrangères, anglais compris, est une route plus longue, mais peut-être plus
productive ».
Se préoccuper de la langue que l’on parle n’est pas une affaire de purisme,
d’esthétique ou de nostalgie du passé. C’est une question fondamentale.
Et ce n’est pas un problème marginal mais un sujet qui concerne le présent
et le futur, tant au niveau individuel que collectif.
La raison est simple : il existe de nombreux liens entre les mots et le pouvoir.
Les mots et le pouvoir sont liés pour les individus : être maître des mots est
une condition pour être maître de sa pensée et de son destin.

III. THÈME

Finiti i bagni nelle fontane di Roma


Per i turisti di passaggio a Roma tuffarsi in una delle 40 fontane del centro
storico è diventato uno sport. « E se si accontentassero di tuffarsi ! » dice
un giornalaio « ma abbandonano lattine di birra e cartoni della pizza ». Il
Eco. techno. Khâgne

che spiega il decreto della sindaca* Virginia Raggi : vietato ormai consu-
mare alimenti, fare il bagno, arrampicarsi sulle statue o sedersi sui gradini
delle fontane. Ma vietare non basta : bisogna far applicare i decreti. Quindi,
nei provvedimenti annunciati da Virginia Raggi potrebbe esserci qualcosa
di spettacolare ma però inefficiente. Con ogni probabilità sarebbe meglio
formare i turisti. L’afflusso turistico in Italia è particolarmente preoccupante
in certe città : è come se i turisti dell’Europa Settentrionale, privi delle loro
vacanze esotiche, si fossero ripiegati tutti sulla Penisola, finora risparmiata
dal terrorismo.
Da Marcelle Padovani, l’Obs, 24 giugno 2017.

* On pouvait aussi écrire SINDACHESSA mais depuis que Rome et Turin ont des maires de sexe féminin,
la presse utilise plus volontiers SINDACA.
LV1 – ITALIEN
S cient.

70 l ANNALES CCIR 2018-2019

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S UJET
LV2 – ANGLAIS
Durée : 3 heures.

Les candidats ne sont pas autorisés à modifier le choix, effectué


lors de l’inscription, de la deuxième langue dans laquelle ils doivent IÉNA
composer.
Aucun document n’est autorisé. (sauf pour le latin ou le grec ancien);
l’utilisation de toute calculatrice ou de tout matériel électronique
est interdite.
Si au cours de l’épreuve, un candidat repère ce qui lui semble être
une erreur d’énoncé, il/a signalera sur sa copie et poursuivra en
expliquant les raisons des initiatives qu’il sera amené à prendre.

S UJET

If it’s broken, you can’t fix it

As devices go, smartphones and tractors are on the opposite ends of the
spectrum. And an owner of a chain of mobile-device repair shops and
a farmer of corn and soyabeans do not usually have much in common. But
Jason DeWater and Guy Mills are upset for the same reason. “Even we can
no longer fix the home burton of an iPhone,” says Mr DeWater, a former
musician who has turned his hobby of tinkering into a business based in
Omaha, Nebraska. “If we had a problem with our John Deere, we could fix it
ourselves. No longer,” explains Mr Mills whose farm in Ansley, a three-hour
drive to the west, spreads over nearly 4,000 acres.
Eco. techno. Khâgne

Messrs DeWater and Mills have more and more company. It includes not
just fellow repairmen and farmers, but owners of all kinds of gear, including
washing machines, coffee makers and even toys. All are becoming exceed-
ingly difficult to fix–which has given rise to a movement fighting for a “right
to repair”. In America the movement has already managed to get relevant
bills on the agenda of legislatures in a dozen states, including Nebraska.
Across the Atlantic, the European Parliament recently passed a motion
calling for regulation to force manufacturers to make their products more
easily repairable.
Some types of gear, such as photocopiers and medical equipment, have
LV2 – ANGLAIS

always been hard to mend because of their internal complexity. But what
has been the exception is now becoming the rule.

[…] Even a John Deere tractor comes with millions of lines of software code,
controlling everything from the engine to the armrests. Mobile devices, for
their part, are getting ever more densely packed to make them smaller and
S cient.

able to accommodate new components. When iFixit, a website for repair


information, analysed Samsung’s Galaxy Note 8, which started shipping on
September 15th, it found that the device was mainly held together with glue.
This gets rid of fasteners, but makes repairs more difficult. […]

ANNALES CCIR 2018-2019 l 71

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 71 24/10/2018 14:46


S UJET

Firms also withhold technical information, proprietary repair tools and spare
parts. Mr DeWater has to rely on manuals from iFixit, on self-made tools
and on refurbished or copied parts. He can also tap into a global network of
C
repair shops which exchange information about how to fix the latest mobile
devices. “We sometimes even ship a device to China if we know that a shop
there can fix it,” he says.
IÉNA
In the future, repairability is likely to become even more of an issue.
I. V
The Economist, Sept 30th 2017.

I. VERSION (sur 20 points)

Traduire le titre, puis à partir de “Messrs DeWater and Mills…” jusqu’à “…


is now becoming the rule.”
(de la ligne 10 à la ligne 21)

II. QUESTIONS (sur 40 points)

1. Question de compréhension du texte


Explain why ‘repairability’ is now such a big issue.
(150 mots + ou –10 % * ; sur 20 points)

2. Question de compréhension du texte


Is today’s consumer society really becoming more responsible?
III.
(250 mots + ou –10 % * ; sur 20 points)

* Le non-respect de ces normes sera sanctionné.


Eco. techno. Khâgne

(Indiquer le nombre de mots sur la copie après chaque question)

III. THÈME (sur 20 points)

1. La télévision diffusait depuis une semaine des images de heurts entre


manifestants et policiers.
2. Tout le monde a appris la nouvelle ce matin. Pas toi ?
3. Ne devraient-ils pas renforcer les contrôles aux frontières ?
4. On reproche aux réseaux sociaux de diffuser de fausses informations.
5. La fusillade de dimanche dernier a relancé le débat sur le contrôle des
LV2 – ANGLAIS

antécédents.
6. Si tu ne leur dis rien, tu ne sauras pas ce qu’ils en pensent. Allez, un peu
de courage !
7. A peine avait-il compris la situation qu’il se tourna vers le responsable.
8. Ils lui ont demandé de sortir, ne supportant plus ses accès de colère.
S cient.

9. Quand le Premier Ministre réussira à convaincre les députés de son parti,


la question sera réglée.
10. Il a cessé de parler, car il ne pouvait pas se faire entendre.

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C ORRIGÉ
Par Alain Goudot, professeur de chaire supérieure d’anglais en CPGE écono-
IÉNA

mique et commerciale au lycée Bellepierre, à Saint-Denis de la Réunion.

C ORRIGÉ
I. VERSION

Si c’est cassé, vous ne pouvez pas réparer

Messieurs DeWater et Mills font de plus en plus d’émules. Pas seulement


des réparateurs à leur image et des exploitants agricoles, mais aussi des
propriétaires de toutes sortes d’équipement, dont des lave-linge, des
cafetières électriques et même des jouets. Tous ces produits deviennent
extrêmement difficiles à réparer – ce qui a donné naissance à un mouvement
qui lutte pour le « droit de réparer ». Dans une douzaine d’États en Amérique,
y compris au Nebraska, le mouvement a déjà réussi à obtenir l’inscription
de projets de loi appropriés à l’ordre du jour des assemblées législatives.
Outre-Atlantique, le Parlement européen a déjà adopté une motion obligeant
les fabricants à concevoir des produits réparables plus facilement.
Certaines catégories de machines telles que les photocopieurs et appareils
médicaux ont toujours été difficiles à réparer en raison de leur complexité
interne. Mais ce qui était l’exception hier devient la règle aujourd’hui.

III. THÈME

1. TV had been broadcasting pictures of clashes between rioters and the


police for one week.
Eco. techno. Khâgne

2. Everyone heard about the news this morning. Didn’t you?


3. Shouldn’t they strengthen/tighten border controls?
4. Social networks are blamed for spreading fake information.
5. Last Sunday’s mass-shooting revived/rekindled the debate about back-
ground checks.
6. If you say nothing to them, you won’t be able to know what they think
about that. Come on, be brave!
7. No sooner/Hardly had he understood the situation than/when he turned
to the workers’ union leader.
8. They asked/urged him to leave as they could not bear his fits of anger
any longer/as they could no longer bear his fits of anger.
LV2 – ANGLAIS

9. When the Prime Minister succeeds in convincing his own party’s MPs,
the question will be settled/dealt with.
10. He stopped talking for he couldn’t make himself heard.
S cient.

ANNALES CCIR 2018-2019 l 73

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S UJET

LV2 – ANGLAIS
Durée : 3 heures.

Les candidats ne doivent faire usage d’aucun document, dictionnaire


ELVi ou lexique ; l’utilisation de toute calculatrice et de tout matériel élec-
tronique est interdite. Si au cours de l’épreuve, un candidat repère ce
qui lui semble être une erreur d’énoncé, il la signalera sur sa copie
et poursuivra sa composition en expliquant les raisons des initiatives
qu’il sera amené à prendre.

1 . TRADUCTIONS

Durée de l’épreuve : 1 heure 30.


2
I. TRADUCTION DU FRANÇAIS A L’ANGLAIS Dur
Les jambes toujours croisées, Jérôme Vatrigan prend un air las et s’en-
fonce abondamment dans son fauteuil.

– Monsieur Vatrigan, comment faites-vous… pour être aussi agaçant ?


– J’ai une méthode : il suffit d’observer sérieusement et surtout de s’abs-
tenir de penser. Je comprends mieux.
– À mon tour de poser une question. Où avez-vous appris à parler aussi
bien le français ?
– Je suis diplômée de l’École normale. « Normale Sup’ », vous
connaissez ?
Eco. techno. Khâgne

– Dame ! évidemment. Voyez-vous, je fréquente un bar au coin de la rue


d’Ulm et de la rue Gay-Lussac… On y voit passer vos petites camarades de
promotion. Elles sont souvent moches, pâlichonnes, abrégées ; entre nous,
elles ne sont pas venues dans le monde pour le troubler !
– Nous n’avançons pas beaucoup, monsieur Vatrigan… L’heure tourne.
Venons-en à votre livre. Je vais commencer cet entretien par une question
théorique : pensez-vous que…
– Monsieur ! Signoréé, je prendrais bien une assiette de vos fagiolini, là.

Il désigna la table d’à côté, qui venait d’être servie.


LV2 – ANGLAIS

Words in italics do not need to be translated


Jean Le Gall, Les Lois de l’apogée, Robert Laffont, 2016.

II. TRADUCTION DE L’ANGLAIS AU FRANÇAIS

I knew with certainty that I would never be a doctor. I stretched out in the
S cient.

sun, relaxing on a desert plateau just above our house. My uncle, a doctor,
like so many of my relatives, had asked me earlier that day what I planned
on doing for a career, now that I was heading off to college, and the question

74 l ANNALES CCIR 2018-2019

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S UJET
barely registered. If you had forced me to answer, I suppose I would have
said a writer, but frankly, thoughts of any career at this point seemed absurd.
I was leaving this small Arizona town in a few weeks, and I felt less like
someone preparing to climb a career ladder than a buzzing electron about
to achieve escape velocity, flinging out into a strange and sparkling universe.
ELVi
I lay there in the dirt, awash in sunlight and memory, feeling the shrinking
size of this town of fifteen thousand, six hundred miles from my new college
dormitory at Stanford and all its promise.

I knew medicine only by its absence – specifically, the absence of a father


growing up, one who went to work before dawn and returned in the dark to
a plate of reheated dinner.
Paul Kalanithi, When Breath Becomes Air, Vintage, 2017

2 . EXPRESSION ÉCRITE

Durée de l’épreuve : 1 heure 30

"This idea might be comical if it were not so dangerous," says Dr Cheryl


Hudson, a lecturer in US political history at the University of Liverpool, of
the higher education minister, Jo Johnson’s, recent demand that all British
universities guarantee free speech on campus or face fines.

Johnson’s move followed much-publicised attempts by student unions and


campaigners to ban high-profile speakers – including the feminist writer
Germaine Greer and the former Ukip leader Nigel Farage – from speaking
at universities because of their controversial opinions.
Eco. techno. Khâgne

A few days later came the revelation that Chris Heaton-Harris, a Tory MP
and whip, had written to all universities asking for details of what they were
teaching about Brexit.

As controversial as these developments are, they seem less alarming if


you compared them to America, where rightwing extremist provocateurs
are suing universities to be allowed to spout white supremacist rhetoric on
campus in the name of free speech.

Last month, the University of Florida spent $600,000 on security so that


a white nationalist, Richard Spencer, could safely give one of his speeches
LV2 – ANGLAIS

espousing the creation of a white "ethno-state", accompanied by supporters


sporting swastikas.

The university had tried to ban Spencer, but backed down when he
threatened a lawsuit based on the first amendment to the US constitution
protecting his right to free speech. […]
S cient.

In September, Spencer […] organised the Unite the Right rally, which
took white nationalist marchers carrying torches and chanting "Jews will

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S UJET

not replace us" on to the historic university campus of his alma mater, in
Charlottesville, Virginia, with the university authorities helpless to stop it. […]

In the US, highly offensive public speech with overtly racist, sexist or homo-
phobic content, or even hints of violence, is invariably protected by the first
amendment to the constitution. But some American academics believe you
ELVi have to draw a line somewhere – so now, ironically, it’s leftwingers trying
to keep rightwingers out.

"Some have this idea that the first amendment is like a sacred text and we
have to worship it… the university didn’t invite Nazis on to campus but they
went along with it, [saying] you just have to ignore them – but that’s exactly
how fascism got a grip in Germany in the thirties," says Thomas Auxter,
philosophy professor at the University of Florida and lead organiser of the
protest against Spencer’s visit.

Spencer had not been invited to speak by the university or any of it student
groups – he rented a hall on campus, which the university said it was obliged
to allow him to do as it has no restrictions on who can rent the facility. […]

Leigh Raiford, professor of African Arnerican studies at Berkeley, petitioned


to cancel classes as a way of boycotting Berkeley’s so-called Free Speech
Week, which was billed as featuring Yiannopoulos1; Steve Bannon, Donald
Trump’s former chief adviser; and Ann Coulter, an ultra-conservative social
and political commentator. Despite the university spending $1m on security,
the event, due to be held in September, fell apart before it even began.

Could there be similar ugly spectacles in Britain if Johnson has his way
on free speech in universities? Unlikely, says Matthew Williams, crimi-
nology professor at Cardiff University, who specialises in hate crime and
hate speech. While Williams does not favour speakers being barred from
campuses, neither does he want to end up with the kind of incendiary
Eco. techno. Khâgne

speeches and confrontational lawsuits causing chaos in America, if Johnson


pushes his agenda.

Williams is confident Britain can strike a balance, given its "strong and
sensible" laws against hate speech, which don’t exist in the US. These are
chiefly based on the Public Order Act of 1986, which made it an offence
to use threatening, abusive or insulting words or behaviour or display such
written material with the intent to stir up racial hatred, and which is deemed
likely to do so. […]

But Williams does say that Heaton-Harris’s letter to vice-chancellors struck


LV2 – ANGLAIS

him as "quite terrifying". […] He worries that routine teaching materials that
foster robust, open debate in class could appear overly-opinionated when
reviewed out of context by someone with a political motivation. Rather than
protecting students’ freedom of thought, it casts the shadow of "Big Brother"
over higher education, he says. […]
S cient.

Joanna Walters, The Guardian, November 7, 2017.

1. Milo Yiannopoulos is an "alt-right" agitator and former Breitbart senior editor.

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S UJET
Répondez en anglais aux questions suivantes :
(200 mots environ pour chaque réponse)

1. According to the author of the text, what are the challenges posed by
freedom of speech protection in the US and the UK? Answer the ques-
tion in your own words.
ELVi
2. "l’m not a free speech absolutist, I don’t believe all ideas deserve an
airing," says Leigh Raiford, professor of African American studies at
Berkeley. Do you agree? Illustrate your answer with relevant examples
from the English-speaking world.

Eco. techno. Khâgne

LV2 – ANGLAIS
S cient.

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ELVi
C
ORRIGÉ
Par Philippe Rayet, agrégé d’anglais, professeur honoraire en CPGE au Lycée
Notre-Dame-du-Grandchamp, à Versailles.

I. TRADUCTION DU FRANÇAIS A L’ANGLAIS


C ORRIGÉ

With his legs still crossed, Jérôme Vatrigan tried to look tired and sank back
deeper into his (arm)chair.
“Monsieur Vatrigan, how can you possibly be so… annoying?”
“I’ve got my own way for it: you only need to observe closely [conscien-
tiously] and above all to refrain from thinking.”
“I can understand better.”
“My turn [go] to ask a question. Where did you learn such good French?”
“I graduated from École normale. “Normale Sup’”. Heard of it?”
“Why yes [Indeed yes]! I’m a regular at a bar at [on] the corner of the rue
d’Ulm and the rue Gay-Lussac… Girls from your school patronize it regu-
larly. They’re often ugly pale little shrimps. Between you and me [Between
ourselves], they’ve (obviously) not come into this world to arouse anybody!”
“That doesn’t improve matters for us, monsieur Vatrigan… Time passes.
Let’s get to the point: your book. I’ll begin this interview with a theoretical
question: do you think that…”
“Sir! Signoréé, I’d really fancy some of your fagiolini, like those there.”
He pointed at [towards] the table next to them, where the people had just
been served.
Jean Le Gall, Les Lois de l’apogée, 2016.

II. TRADUCTION DE L’ANGLAIS AU FRANCAIS

J’avais la certitude que je ne serais jamais médecin. J’étais étendu au soleil,


lézardant sur un plateau aride qui surplombait directement notre maison.
Eco. techno. Khâgne

Mon oncle, qui était médecin comme [à l’instar de] tant d’autres membres
de ma famille, m’avait demandé, plus tôt dans la journée, comment j’envisa-
geais mon avenir professionnel [ce que je comptais faire plus tard sur le plan
professionnel] maintenant que j’allais partir à l’université, mais la question
m’avait à peine effleuré. Si j’avais été forcé d’y répondre [Si l’on m’avait forcé
à y répondre], j’aurais sans doute dit « écrivain », mais à ce moment-là, très
honnêtement, j’étais à mille lieues de penser à ce que je pourrais devenir.
J’allais quitter cette petite ville d’Arizona quelques semaines plus tard, et je
m’identifiais plus à un électron débordant d’énergie et sur le point [en passe]
d’atteindre sa vitesse de libération pour aller se précipiter dans un univers
étrange et éblouissant, qu’à un individu se préparant à gravir les échelons
LV2 – ANGLAIS

d’une vie professionnelle.


Allongé sur le sol poussiéreux, inondé de soleil et de souvenirs, j’avais
l’impression que cette ville de quinze mille habitants située à près de mille
kilomètres du dortoir de ma future université de Stanford et de toutes ses
promesses, était en train de rapetisser.
D’une vie de médecin, je ne connaissais que l’absence – tout particulière-
S cient.

ment celle d’un père qui, pendant mon enfance, partait au travail avant l’aube
pour ne rentrer qu’à la nuit tombée et dîner de plats réchauffés.
Paul Kalanithi, When Breath Becomes Air, 2017.

78 l ANNALES CCIR 2018-2019

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S UJET
LV2 – ALLEMAND
Durée : 3 heures.

Les candidats ne sont pas autorisés à modifier le choix, effectué


lors de l’inscription, de la deuxième langue dans laquelle ils doivent IÉNA
composer.
Aucun document n’est autorisé. (sauf pour le latin ou le grec ancien);
l’utilisation de toute calculatrice ou de tout matériel électronique
est interdite.
Si au cours de l’épreuve, un candidat repère ce qui lui semble être
une erreur d’énoncé, il/a signalera sur sa copie et poursuivra en
expliquant les raisons des initiatives qu’il sera amené à prendre.

S UJET

Das ende einer welt

Das Sportgeschäft Sport Lang in München Schwabing steht vor der


Schlielßung. Viele Münchner, die heute schon erwachsen sind, haben dort
ihren ersten Fußball gekauft, ihre ersten Skier. In Schwabing war, lange
bevor man auch im Warenhaus Karstadt im Zentrum der Stadt Sportartikel
kaufen konnte, das Geschäft Sport Lang das beste Beispiel für eine gute,
individuelle Beratung. Man nahm sich viel Zeit für seine Kunden und wenn
jemand kein Bayerisch verstand, dann wurde auch Hochdeutsch gespro-
chen. Bald 61 Jahre lang. Nun macht der bekannte Münchner Laden der
Familie Lang zu.
Eco. techno. Khâgne

„Ja“, sagt Filialleiter Manfred Hofmann, „das tut wirklich weh. Es hat so
viele nette treue Kunden gegeben und man hat halb Schwabing gekannt.“
Zugleich grüßt er einen Kunden, der durch die Tür kommt und schnell noch
einmal nach Winteranoraks schauen möchte.

Seit Wochen hängen Plakate mit der Aufschrift « Total-Räumungsverkauf »


über Eingangstür und Schaufenstern. Alles, was die Lager noch zu bieten
haben, und sogar das, was vor einem Jahr schon für den Winter bestellt
LV2 – ALLEMAND

worden ist, kann man nun zu stark reduzierten Preisen kaufen. Und die
Kunden fragen immer wieder: „Warum hört ihr auf?“

Der 59-jährige Filialleiter erklärt es. Immer und immer wieder. Die Zeiten
hätten sich einfach geändert. Die kleinen, mittelständischen Geschäfte seien
früher Leader im Sport gewesen. Doch die Wünsche der Kunden hätten sich
stark geändert. „Die meisten Käufer“, sagt Hofmann, „bestellen online.“
Zumindest das, was nicht anprobiert werden müsse. Und: Heute erwarten
S cient.

die Kunden Erlebnis-Geschäfte auf mindestens 1 000  Quadratmetern


Verkaufsfläche mit Kletterwänden und anderen Attraktionen.

ANNALES CCIR 2018-2019 l 79

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S UJET

Eines Tages, erinnert sich Hofmann, kam ein Kunde ins Geschäft. Sehr jung, III.
vielleicht Mitte 20. Lange habe Hofmann beraten, verschiedene Turnschuhe
angeboten. „Dann nahm der Mann sein Smartphone heraus, suchte die
Marke, die ihm gefiel, und wollte genau diesen Preis. Da können wir nicht
mithalten.“ In Süddeutschland machten aus diesem Grund, so Hofmann,
etwa 300 kleinere Sportgeschäfte zu.
IÉNA
„Wir haben keine Rolltreppe und der Laden ist nicht behindertengerecht“,
sagt Hofmann. Einige Gründe, die es schwer machen, konkurrenzfähig zu
bleiben. Dazu kommt, dass es in dem Viertel sehr schwierig ist, Parkplätze zu
finden. Die Folge: Die Umsätze gingen stark zurück. Alle sieben Mitarbeiter
wurden auf andere Sportgeschäfte verteilt.

Offiziell bis zum 30. Oktober läuft der Räumungsverkauf. Wann definitiv
Schluss ist, weiß man noch nicht. Doch eines ist sicher: Hofmann bleibt bis
zum letzten Tag. „Das habe ich meinem Chef versprochen.“
Nicole Graner, Nach einem Artikel, « Süddeutsche Zeitung », 11. Oktober 2017.

I. VERSION (sur 20 points)

Traduire le titre et les paragraphes 1 et 2, depuis : « Das Sportgeschäft Sport


Lang in München Schwabing steht vor der Schließung… » jusqu’à : « …der
durch die Tür kommt und schnell noch einmal nach Winteranoraks schauen
möchte. »
(de la ligne 1 à la ligne 13)

II. QUESTIONS (sur 40 points)


Eco. techno. Khâgne

1. Question de compréhension du texte


Aus welchen Gründen muss das Sportgeschäft « Sport Lang » schließen und
warum ist das schade?
(150 mots + ou –10 % * ; sur 20 points)

2. Question de compréhension du texte


Online-Käufe (Amazon, Zalando…), riesige Einkaufszentren: Ist das Ende
der kleinen Geschäfte im Stadtzentrum schon vorprogrammiert?
LV2 – ALLEMAND

(250 mots + ou –10 % * ; sur 20 points)

*Le non-respect de ces normes sera sanctionné.


(Indiquer le nombre de mots sur la copie après chaque question).
S cient.

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S UJET
III. THÈME (sur 20 points)

1. Asseyez-vous, s’il vous plaît. Notre directeur vous recevra dans quelques
minutes !
2. Malgré son jeune âge, le Président français est aujourd’hui respecté
dans le monde entier.
IÉNA
3. Mes parents ont acheté cette voiture électrique il y a un mois car son
prix a baissé.
4. Les populistes ont de plus en plus d’influence. Faut-il avoir peur d’eux ?
5. La plupart des jeunes veulent croire en l’Europe parce que c’est impor-
tant pour leur avenir.
6. Avant de chercher un emploi, elle a envie de découvrir d’autres pays.
7. Quand il était petit, il lisait beaucoup. Mais maintenant les livres l’inté-
ressent moins que son portable.
8. Tu n’as pas besoin de me remercier, je t’ai aidé volontiers.
9. Comme les conducteurs de bus font grève, nous pourrions aller en ville
à pied.
10. Depuis que je travaille dans cette entreprise internationale, je passe trois
jours par semaine en Autriche.

Eco. techno. Khâgne

LV2 – ALLEMAND
S cient.

ANNALES CCIR 2018-2019 l 81

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IÉNA
C ORRIGÉ
Par Jean-Michel Hannequart, professeur en CPGE ECS au lycée François
1er du Havre.
C ORRIGÉ

I. VERSION

La fin d’un monde

La fermeture du magasin de sport Sport Lang situé à Munich dans le quartier


de Schwabing est imminente. De nombreux Munichois, qui sont aujourd’hui
adultes, y ont acheté leur premier ballon de football, leurs premiers skis. Bien
avant que l’on puisse acheter des articles de sport dans le grand-magasin
Karstadt au centre-ville, le magasin Sport Lang représentait à Schwabing le
meilleur exemple de conseil individualisé et de qualité. On prenait beaucoup
de temps pour chaque client et si quelqu’un ne comprenait pas le bavarois,
alors on parlait l’allemand classique. Pendant près de 61 ans. Et voilà que
le célèbre magasin munichois appartenant à la famille Lang ferme.
« Oui, cela fait vraiment mal », dit Manfred Hoffmann, le gérant de la filiale.
« Nous avions tellement de clients sympathiques et fidèles et on connaissait
la moitié de Schwabing ». En même temps il salue un client qui entre et qui
voudrait rapidement regarder encore une fois les anoraks d’hiver.

III. THÈME

1. Setzen Sie sich bitte! Unser Direktor wird Sie in wenigen Minuten (gleich)
empfangen.
Eco. techno. Khâgne

2. Trotz seines jungen Alters wird der französische Präsident heute in der
ganzen Welt geachtet (respektiert).
3. Meine Eltern haben dieses Elektroauto vor einem Monat gekauft, denn
es ist billiger geworden (denn sein Preis ist gesunken).
4. Die Populisten haben immer mehr Einfluss. Muss (soll) man sich vor
ihnen fürchten?
5. Die meisten Jugendlichen wollen an Europa glauben, weil es für ihre
Zukunft wichtig ist.
6. Bevor sie einen Arbeitsplatz sucht, hat sie Lust, andere Länder zu
LV2 – ALLEMAND

entdecken.
7. Als er klein war, las er viel. Aber (doch) jetzt interessieren ihn Bücher
weniger als sein Handy.
8. Du brauchst mir nicht zu danken, ich habe dir gern geholfen.
9. Da die Busfahrer streiken, könnten wir zu Fuß in die Stadt gehen.
10. Seit ich in diesem internationalen Unternehmen arbeite, verbringe ich
drei Tage pro Woche in Österreich.
S cient.

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S UJET
LV2 – ALLEMAND
Durée : 3 heures.

Les candidats ne doivent faire usage d’aucun document, dictionnaire


ou lexique ; l’utilisation de toute calculatrice et de tout matériel élec- ELVi
tronique est interdite.
Si au cours de l’épreuve, un candidat repère ce qui lui semble être
une erreur d’énoncé, il la signalera sur sa copie et poursuivra sa
composition en expliquant les raisons des initiatives qu’il sera amené
à prendre.

1 . TRADUCTIONS

Durée de l’épreuve : 1 heure 30.

I. TRADUCTION DU FRANÇAIS EN ALLEMAND

Marie aimait son prénom. Moins banal qu’on ne le croyait. Quand elle disait
qu’elle s’appelait Marie, cela produisait son effet. « Marie », répétait-on
charmé.

Le nom ne suffisait pas à expliquer le succès. Elle se savait jolie. Grande et


bien faite, […] elle ne laissait pas indifférent […]

Marie avait 19 ans, son heure était venue. Une existence formidable l’atten-
dait, elle le sentait. Elle étudiait le secrétariat – il fallait bien étudier quelque
Eco. techno. Khâgne

chose. On était en 1971. « Place aux jeunes », entendait-on partout.

Elle fréquentait les gens de son âge aux soirées de la ville, elle n’en manquait
pas une. Il y avait une fête presque chaque soir. Après une enfance calme
et une adolescence ennuyeuse, la vie commençait.
« Désormais c’est moi qui compte, c’est enfin mon histoire, ce n’est plus
celle de mes parents, ni de ma sœur. » Son aînée avait épousé un brave
garçon l’été d’avant, elle était déjà mère. (…)
Amélie Nothomb, Frappe-toi le cœur, Albin Michel, 2017.
LV2 – ALLEMAND

II. TRADUCTION DE L’ALLEMAND


EN FRANÇAIS

Das Wetter ist schön, fast ein wenig zu schön für diese Jahreszeit. Der
Himmel ist wolkenlos und träge. Der Sommer hat Einzug gehalten. Amina
ist im Kindergarten, Youssef wird sie später abholen.
S cient.

Amal steht auf der Sonnenallee vor einem syrischen Supermarkt und sucht
Tomaten aus, als sie von einem Mann auf Arabisch angesprochen wird:
„Kennen wir uns nicht von irgendwoher?“

ANNALES CCIR 2018-2019 l 83

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S UJET

Sie schaut vorsichtig hoch. Die Sonnenallee hat sich in den letzten Jahren
zu einem Anziehungspunkt für Syrer entwickelt, die diese Straße scherzend
als die „syrische Straße“ bezeichnen.

„Ein sehr schlechter Spruch“, erwidert Amal, während sie die Augen verdreht
und sich wieder dem Gemüse zuwendet. „Aber ich kenne dich wirklich“,
ELVi
sagt Hammoudi und lacht. Amal schaut ihn an und muss ebenfalls lachen.
Sie weiß zwar nicht, wer er ist, aber sein Gesicht kommt ihr tatsächlich
irgendwie bekannt vor.

„Wir haben uns in Damaskus kennengelernt. In einem anderen Leben. Ich


hatte mal einen Schlüssel von dir abgeholt“, sagt Hammoudi und kann sich
selbst nicht erklären, weshalb er sich plötzlich an diese Frau erinnert.

Amal schaut ihn aufmerksam an, und nach einer Weile lacht sie laut auf
und sagt: „Stimmt, ich habe dich noch für den einen Geheimdienstleiter
gehalten.“
Olga Grjasnowa, Gott ist nicht schüchtern, Aufbau Verlag, Berlin 2017.

2 . EXPRESSION ÉCRITE

Durée de l’épreuve : 1 heure 30.

"Europa ist eine große Erzählung" – Kultur als Gesellschaftskitt?

(…) Europa ist das vorherrschende Thema unserer Zeit, auch auf der
Frankfurter Buchmesse. Die Ausgangsdiagnose: Europa ist in einem ziemlich
schlechten Zustand. Es befindet sich im Dauerkrisenmodus – Bankenkrise,
Eco. techno. Khâgne

Eurokrise, Flüchtlingskrise, anhaltender Vertrauensverlust in die politische


Elite, Brexit, Rechtsnationalismus, Separatismus, Nationalismus.
Demgegenüber steht eine neue Europa-Euphorie, die von immer mehr
Menschen getragen wird und eine Bewegung wie "Pulse of Europe"
hervorgebracht hat. In seiner Eröffnungsrede in Frankfurt sprach der fran-
zösische Präsident Emmanuel Macron, dass Deutschland und Frankreich
– das Gastland der Frankfurter Buchmesse – ein wichtiger Motor für die
Erarbeitung von Lösungen sein sollen. Und er sagte auch: Ohne Kultur gibt
es kein Europa.
LV2 – ALLEMAND

"Kultur als Gesellschaftskitt" – auch für Europa?

Kann also Kultur dazu beitragen, nationalstaatliche Interessen und die Logik
europäischer Zusammenarbeit miteinander zu versöhnen? Um diese Frage
ging es in einer Diskussionsrunde, die das Institut für Auslandsbeziehungen
(…) auf der Buchmesse zusammengebracht hatte. "Kann Kultur Europa
S cient.

retten?’’ Chris Dercon (Intendant der Berliner Volksbühne), Asiem El Difraoui


(ägyptisch-deutscher Politologe), Ulrike Guérot (Professorin für Europapolitik)
und Andreas Görgen (Leiter der Abteilung Kultur und Kommunikation im
Auswärtigen Amt) sollten Antworten auf diese Frage finden.

84 l ANNALES CCIR 2018-2019

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S UJET
Die Frage ist natürlich polemisch gestellt. So schlimm sei es um Europa gar
nicht bestellt, darauf weist Andreas Görgen entschieden hin, noch müsse
es nicht gerettet werden. "In Deutschland gibt es eine Riesentradition,
Kultur als Gesellschaftskitt zu begreifen, als könnte sie unsere Gesellschaft
zusammenhalten." Blicke man auf Deutschland, dann "war die größte kultu-
relle Leistung wahrscheinlich die Erfindung der kommunalen Freibäder in
ELVi
den Siebzigerjahren. Das waren und sind die Orte, an denen Gesellschaft
eingeübt wird, und an denen die Leute Gleiche sind." (…)

Das kulturelle Erbe Europas

Der ungeliebte Begriff der Leitkultur, möglicherweise einer europäischen


Leitkultur, drängt sich Moderator Sebastian Körber (…) auf. Ulrike Guérot
macht kurzen Prozess damit: Sie führt Theodor Adorno ins Feld, der schon
in den Fünfzigerjahren festgestellt habe, dass jeder Begriff von Leitkultur
protofaschistische Tendenzen habe, weil es immer darum ginge, ein Wir
gegen ein anderes Wir zu stellen. Die Aufgabe der Kultur in Europa sei, das
Erbe der Französischen Revolution zu bewahren.

"Der erste Weltkrieg war kein Krieg zwischen Nationen, sondern er war ein
Krieg zwischen Ungeist und Geist." Ulrike Guérot zitiert den expressionis-
tischen Maler Franz Marc, um auf die Parallele zur Jetztzeit hinzuweisen:
den Verrat, anfangs des 20. Jahrhunderts wie heute, an den Idealen
der Französischen Revolution, an Freiheit, Gleichheit, Brüderlichkeit.
Das verbindende kulturelle Erbe sei der erste Satz der europäischen
Menschenrechtserklärung: "Alle Menschen sind geboren frei und gleich in
ihren Rechten." Kultur, das sei die Fähigkeit, diese Solidarität von einer
Generation auf die andere zu übertragen. Gefordert sei jetzt die zivilisatori-
sche Leistung, das vereinte Europa als Antwort auf Auschwitz – nie wieder
Krieg, nie wieder Nationalismus – an eine Generation weiter zu vermitteln,
die nicht mehr mit Zeitzeugen sprechen könne.
Eco. techno. Khâgne

"Europa ist eine große Erzählung"

Zivilisation, Kultur – auch für Asiem El Difraoui geht es in erster Linie darum,
Freiräume zu erhalten. Europa und Kultur, das ist für ihn deckungsgleich.
"Europa ist nichts anderes als eine große Erzählung, die wir geschaffen
haben, und es ist wichtig, dass wir diese Erzählung offen halten", sagt der
Terrorismusforscher. lm südlichen Mittelmeerraum werde Europa als Kunst
– und Kultur-Großmacht wahrgenommen und als Freiraum, der auch die
LV2 – ALLEMAND

letzten Freiräume der Zivilgesellschaften in der arabischen Welt unterstützt


hat. Europa habe eine große Vorbildfunktion.

Immer neu zu hinterfragen: Heimat und ldentität

Eine kritische Existenzfrage ist für Europa die Einbindung der Nationalstaaten.
Heimat und Identität sind zentrale Begriffe in der Debatte um Europa,
S cient.

darauf weist Chris Dercon hin. Alle fünf bis zehn Jahre müssten sie neu
hinterfragt und mit Inhalten gefüllt werden. Das sei nicht abstrakt, philo-
sophisch, sondern kleinteilig wie ein Puzzle und konkret, im Gefühl des

ANNALES CCIR 2018-2019 l 85

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S UJET

Identitätsverlusts vieler einzelner Menschen, in ökonomischen Fragen. Eine


Zeitlang habe man geglaubt, die Zukunft sei in der Kombination von Europa
und Städten zu suchen, die die Bedeutung der Nationalstaaten schmälern
C
könnte. Das habe sich als falsch herausgestellt.
Sabine Peschel, Deutsche Welle, 12.10.2017.
ELVi
Répondre en ALLEMAND aux questions ci-dessous :
(Environ 200 mots pour chaque réponse)

1. Wie wird in dem Artikel die Rolle und Aufgabe der Kultur fur Europa
beschrieben?

2. Teilen Sie die Meinung des Joumalisten, dass die Kultur ein Bindemittel
fur die europäischen Gesellschaften sein kann? Argumentieren Sie mit
konkreten Beispielen.
Eco. techno. Khâgne
LV2 – ALLEMAND
S cient.

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C ORRIGÉ
Par Jean-Michel Hannequart, professeur en CPGE ECS au lycée François
ELVi

1er du Havre.

I. TRADUCTION D’ALLEMAND EN FRANCAIS

C ORRIGÉ
Marie mochte ihren Vornamen. Weniger banal, als man es glaubte. Wenn
sie sagte, dass sie Marie hieß, wirkte es (fiel sie auf). „Marie“, wiederholte
man entzückt.
Der Name genügte nicht, um den Erfolg zu erklären. Sie wusste, dass
sie hübsch, groß war und eine schöne Figur hatte, sie ließ niemanden
gleichgültig.
Marie war 19, ihre Stunde hatte geschlagen. Eine tolles Leben erwartete
sie, sie spürte es. Sie machte eine Ausbildung als Sekretärin, irgendeine
Ausbildung musste man wohl machen. Man schrieb das Jahr 1971. „Platz
machen für die Jugend“, war überall zu hören.
Sie verkehrte mit Gleichaltrigen bei den Abendparties in der Stadt, sie
versaümte keine (sie war stets dabei). Fast an jedem Abend fand ein Fest
statt. Nach einer ruhigen Kindheit und einer langweiligen Jugend fing das
Leben an. „Jetzt kommt es auf mich an, es ist endlich meine Geschichte,
nicht mehr die meiner Eltern oder meiner Schwester“. Ihre Schwester hatte
im vorhergehenden Sommer einen braven Kerl (Burschen) geheiratet, sie
war schon Mutter.

II. TRADUCTION DE FRANCAIS


EN ALLEMAND

Il fait beau, presque trop beau pour cette saison. Le ciel est sans nuage,
indolent. L’été s’est installé. Amina est au jardin d’enfants, Youssef ira la
Eco. techno. Khâgne

chercher plus tard.


Amal se trouve sur la Sonnenallee devant un supermarché syrien en train
de choisir des tomates, lorsqu’un homme l’aborde en arabe : « Nous nous
sommes déjà vus quelque part ? »
Elle lève les yeux prudemment. La Sonnenallee est devenue ces dernières
années un point de rencontre pour les Syriens qui par plaisanterie appellent
cette rue la « rue syrienne ».
« Une très mauvaise formule », réplique Amal en roulant des yeux et en se
retournant vers les légumes. « Mais je te connais vraiment », dit Hammoudi
LV2 – ALLEMAND

en riant. Amal le regarde et ne peut s’empêcher de rire elle aussi. Elle ne


sait certes pas qui il est, mais elle a l’impression d’avoir déjà vu ce visage.
« Nous nous sommes rencontrés à Damas. Dans une autre vie. J’étais venu
chercher une clé qui t’appartenait », dit Hammoudi sans pouvoir s’expliquer
à lui même, pourquoi il se souvient soudain de cette femme.
Anna le regarde avec attention, et après un moment elle éclate de rire et dit :
« C’est vrai, je t’ai pris pour l’un des chefs du service secret. »
S cient.

ANNALES CCIR 2018-2019 l 87

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S UJET

LV2 – ESPAGNOL
Durée : 3 heures.

Les candidats ne sont pas autorisés à modifier le choix, effectué


IÉNA lors de l’inscription, de la deuxième langue dans laquelle ils doivent
composer.
Aucun document n’est autorisé. (sauf pour le latin ou le grec ancien);
l’utilisation de toute calculatrice ou de tout matériel électronique
est interdite.
Si au cours de l’épreuve, un candidat repère ce qui lui semble être
une erreur d’énoncé, il/a signalera sur sa copie et poursuivra en
expliquant les raisons des initiatives qu’il sera amené à prendre.
I. V

S
UJET

Machismo, continuidad y repetición

La afirmación del machismo pasa por la negación de la realidad que él


II. Q
mismo crea, ésa es la forma de hacerse invisible en una sociedad que lo
señala en cada uno de sus actos. Desde el piropo como halago y el maltrato
como un tema de pareja, hasta el homicidio por celos o alcohol, todo forma
parte de lo que el machismo presenta como verdad para así mantener su
mentira. Da igual que sean 70 las mujeres asesinadas cada año y 700.000
las maltratadas, al final, para el machismo cada uno de esos casos es un
accidente o una excusa, y todos juntos ninguno.
Eco. techno. Khâgne

El problema de la violencia de género no son esos 700.000 hombres que


maltratan ni los 70 que matan, el problema de la violencia de género es
el machismo que los alimenta a todos ellos y al resto de la sociedad. Un
machismo que lleva a que el 3% de la población de la UE manifieste que
la violencia de género esta justificada en algunas ocasiones, y que un 1%
afirme que lo esta en todas las ocasiones (Eurobarómetro, 2010).

A partir de esas referencias creadas por la cultura, cada agresor desarrolla


su estrategia de violencia de manera diferente, aunque todos persiguen lo
LV2 – ESPAGNOL

mismo: controlar a las mujeres para que no se salgan del guion estable-
cido, corregirlas cuando consideran que se han desviado de sus dictados,
y castigarlas cuando la desviación alcanza cierta gravedad. La propia diná-
III.
mica de la violencia muestra claramente que cada agresor reacciona ante
el comportamiento y actitud de las mujeres, y frente a las circunstancias
que envuelven los hechos.

Y cuando el machismo y los machistas ven que la sociedad está cambiando


S cient.

al incorporar y defender la lgualdad como derecho, al observar que las


mujeres y el feminismo rompen con la injusticia de la desigualdad de la que
nacen sus privilegios, y al comprobar que se incorporan con normalidad

88 l ANNALES CCIR 2018-2019

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S UJET
a los espacios y funciones que les habían sido negados, interpretan que esa
nueva realidad es un ataque a sus posiciones y responden con su argumento
habitual, que es la violencia. [ . . ]

Los homicidios por violencia de género son la consecuencia de una historia


de violencia que los maltratadores van desarrollando en el tiempo, unas
IÉNA
veces de forma acelerada, otras más lenta. Se trata de un proceso en el
que van integrando elementos que refuerzan su decisión y aquellos otros
que de alguna manera la cuestionan, y la evolución final dependerá de la
mayor presencia de elementos a favor del homicidio o de factores críticos
con la idea de matar. Se trata, pues, de un proceso dinámico.
Miguel Lorente Acosta, El Mundo, 14/11/17.

I. VERSION (sur 20 points)

Traduire depuis : « aunque todos persiguen… » jusqu’à : « … que es la


violencia ».
(de la ligne 16 à la ligne 29)

II. QUESTIONS (sur 40 points)

1. Question de compréhension du texte


¿Cómo opera según el autor “la afirmación del machismo”?
(ligne 1)
(150 mots + ou –10 % * ; sur 20 points)

2. Question de compréhension du texte


Eco. techno. Khâgne

¿Qué comentario le sugiere a usted el fenómeno de la “violencia de género”


en el mundo hispánico?
(ligne 10)
(250 mots + ou –10 % * ; sur 20 points)

* Le non-respect de ces normes sera sanctionné.


(Indiquer le nombre de mots sur la copie après chaque question.)
LV2 – ESPAGNOL

III. THÈME (sur 20 points)

1. Si les entreprises n’avaient pas délocalisé leur siège social, la situation


serait plus claire.
2. Nous avons écouté les principaux protagonistes avant de prendre une
décision.
S cient.

3. Il est probable que les Français désapprouvent les mesures proposées


par le président.
4. C’est la première fois en trente ans que le gouvernement va avoir recours
à cet article.

ANNALES CCIR 2018-2019 l 89

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S UJET

5. Les investisseurs empêchèrent que les négociations se déroulent


correctement.
6. Dès que ce sera possible, nous vous donnerons une réponse.
C
7. De plus en plus de personnes s’inquiètent du réchauffement climatique.
Je te le répète.
8. Ils souhaiteraient davantage de résolutions pour lutter contre la
IÉNA
corruption.
9. Les tremblements de terre au Mexique ont provoqué de nombreux I. V
dommages.
10. Il avait suffi que les ventes augmentent pour relancer les embauches.

III.
Eco. techno. Khâgne
LV2 – ESPAGNOL
S cient.

90 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 90 24/10/2018 14:46


C ORRIGÉ
Par Nicolas Léger, professeur en ECS et ECE a l’Institution des Chartreux,
IÉNA

à Lyon.

C ORRIGÉ
I. VERSION

(…) bien qu’ils poursuivent1 tous le même but : contrôler les femmes pour
qu’elles ne s’éloignent pas du scenario établi, les corriger lorsqu’ils consi-
dèrent qu’elles n’ont pas respecté les ordres, et les punir lorsque cet écart
atteint une certaine gravité. La dynamique de la violence en elle-même
montre clairement que chaque agresseur réagit au comportement et à l’at-
titude des femmes, face aux circonstances qui entourent les faits.
Et quand le machisme et les machistes voient que la société est en train de
changer en intégrant et en défendant l’égalité en tant que droit, lorsqu’ils se
rendent compte que les femmes et le féminisme mettent fin à2 l’injustice de
l’inégalité qui donne naissance à leurs privilèges, lorsqu’ils réalisent qu’en
toute normalité elles occupent des places et des fonctions dont elles avaient
été privées, ils en concluent que cette nouvelle réalité est une atteinte à leur
rang et ils y répondent par leur argument habituel, (c’est-à‑dire) la violence.
1. Aunque + indicatif correspond à bien que + subjonctif en français.
2. Variantes possibles : viennent à bout, mettent un terme.

III. THÈME

1. Si las empresas no hubieran deslocalizado su sede social, la situación


estaría más clara.
2. Hemos escuchado1 a los principales protagonistas antes de tomar una
Eco. techno. Khâgne

decisión.
3. Es probable que los franceses reprueben las medidas propuestas por
el presidente.
4. Es la primera vez en treinta años que el gobierno2 va a recurrir a este
artículo.
5. Los inversores impidieron que las negociaciones se desarrollaran3
correctamente.
6. En cuanto sea posible4, le(s) daremos una respuesta.
7. Cada vez más personas se preocupan por el calentamiento climático.
LV2 – ESPAGNOL

Te lo repito.
8. Desearían más resoluciones para luchar contra la corrupción.
9. Los terremotos en México causaron numerosos daños.
10. Había bastado con que las ventas aumentaran para reactivar 5 las
contrataciones.
1. Un prétérit simple (escuchamos) est évidemment possible.
2. Variante, plus idiomatique : por primera vez en treinta años, el gobierno…
3. Cette phrase présente un cas classique de concordance de temps. Variante : los inversionistas
S cient.

impidieron que se desarrollasen…


4. Le subjonctif présent est obligatoire dans cette subordonnée de temps avec sens futur.
5. Variante possible : (volver a) estimular.

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S UJET

LV2 – ESPAGNOL
Durée : 3 heures.

Les candidats ne doivent faire usage d’aucun document, dictionnaire


ELVi ou lexique ; l’utilisation de toute calculatrice et de tout matériel élec-
tronique est interdite. Si au cours de l’épreuve, un candidat repère ce
qui lui semble être une erreur d’énoncé, il la signalera sur sa copie
et poursuivra sa composition en expliquant les raisons des initiatives
qu’il sera amené à prendre.
2
1. TRADUCTIONS Dur

Durée de l’épreuve : 1 heure 30.

I. TRADUCTION DU FRANÇAIS EN ESPAGNOL

À ceux qui me posent la question, j’explique donc, patiemment, que je suis


né au Liban, que j’y ai vécu jusqu’à l’âge de vingt-sept ans, que l’arabe
est ma langue maternelle, que c’est d’abord en traduction arabe que j’ai
découvert Dumas et Dickens et Les Voyages de Gulliver, et que c’est dans
mon village de la montagne, le village de mes ancêtres, que j’ai connu mes
premières joies d’enfant et entendu certaines histoires dont j’allais m’ins-
pirer plus tard dans mes romans. Comment pourrais-je l’oublier ? Comment
pourrais-je jamais m’en détacher ? Mais, d’un autre côté, je vis depuis vingt-
deux ans sur la terre de France, je bois son eau et son vin, mes mains
caressent chaque jour ses vieilles pierres, j’écris mes livres dans sa langue,
Eco. techno. Khâgne

jamais plus elle ne sera pour moi une terre étrangère.


Moitié français, donc, et moitié libanais ? Pas du tout ! L’identité ne se
compartimente pas, elle ne se répartit ni par moitiés, ni par tiers, ni par
plages cloisonnées.
Amin Maalouf, Les Identités meurtrières, Éd. Bernard Grasset, 1998.

NB : On ne traduira pas le titre.

III. TRADUCTION DE L’ESPAGNOL


LV2 – ESPAGNOL

EN FRANÇAIS

Conecto el disco duro que me dio Mauro a mi ordenador portátil. Compruebo
que hay cientos de archivos colocados en distintas carpetas. Viruca sin duda
era metódica. Los tiene separados por cursos y luego por temas. Están los
exámenes, los trabajos: comentarios de texto y redacciones personales. Voy
directamente al curso que me interesa. A segundo B, del que soy tutora.
S cient.

Mauro tenia razón, todos los exámenes están escaneados. Y están llenos
de correcciones minuciosas, pero no con el bolígrafo rojo, sino azul o verde.
Supongo que el rojo le resultaba demasiado agresivo, demasiado opresor,
demasiado punitivo. Me fijo en la letra de Viruca. Es una caligirafía clara,

92 l ANNALES CCIR 2018-2019

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S UJET
legible, de trazos firmes. No soy ninguna experta en ese tipo de análisis, así
que no voy a sacar ninguna conclusión sobre su personalidad. Pero sí que
siento que, poco a poco, día a día me voy acercando más a ella. Ya sé cómo
era su aspecto físico, cómo la veían alumnos y profesores, ya sé lo mucho
que la quería su exmarido, y también que tenían problemas económicos
graves. Y ahora sé cómo escribía y voy a empezar a ver cómo pensaba.
ELVi
Carlos Montera, El desorden que dejas, Éd. Espasa, 2016.

NB : On ne traduira pas le titre.

2 . EXPRESSION ÉCRITE

Durée de l’épreuve : 1 heure 30

El aparente reflujo populista en América Latina

La derrota del kirchnerismo en las presidenciales de Argentina de 2015, la


del chavismo en las legislativas en Venezuela ese mismo año y la de Evo
Morales en el referéndum de Bolivia empezaron a crear esa falsa sensación,
la de que el populismo se encontraba, y se encuentra, en decadencia y en
retirada en una región donde la mayoría de las elecciones están trayendo
derrotas de gobiernos cercanos o vinculados al “socialismo del siglo XXI”.
Las dificultades crecientes del Gobierno de Nicolás Maduro en Venezuela
desde 2016, o la ajustada victoria de Lenín Moreno en Ecuador en 2017, no
han hecho sino confirmar esta sensación, más allá de que se haya producido
la abrumadora reelección de Daniel Ortega en Nicaragua.

En realidad, lo que está aconteciendo en el panorama político latinoame-


ricano es la cuesta abajo de una “cierta” forma de gobernar. En 2015, la
Eco. techno. Khâgne

victoria de Mauricio Macri frente al peronista Daniel Scioli empezó a abrir


una nueva etapa en la región, marcada por el arribo de gobiernos de
centroderecha. Una tendencia que la victoria de Jimmy Morales frente a la
"socialdemócrata" Sandra Torres en Guatemala, y el triunfo en las legis-
lativas venezolanas de la Mesa de Unidad Democrática ante el Partido
Socialista Unido de Venezuela, PSUV, no hicieron sino reforzar esta idea.

Como apunta el politólogo Steven Levitsky: “(Este) retroceso… tiene dos


causas principales (siendo) el primero… el desgaste natural después de
LV2 – ESPAGNOL

haber gobernado por tres o cuatro periodos presidenciales (…). Después


de tres periodos, los gobiernos pierden los reflejos políticos; se distancian
de la gente, y muchas veces, crece la corrupción. Aun cuando no son muy
corruptos (como en el caso de la Concertación en Chile), la gente se cansa.
Tarde o temprano, el desgaste afecta a todos los gobiernos. Doce años
(Argentina) o trece años (Brasil) en el poder es mucho. Nada es permanente
en la democracia. Nadie gobierna para siempre”.
S cient.

El populismo, en su versión adscrita al “socialismo del siglo XXI”, está atra-


vesando un claro retroceso, mucho más marcado a partir de 2013 tras
haber experimentado indudables progresos desde 2005. Hugo Chávez

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S UJET

estuvo durante seis años (1999-2005) muy solo en América Latina, más
allá de su alianza con la Cuba de Fidel Castro. A mediados de la pasada
década, el proyecto chavista empezó a ganar aliados en la región: Evo
C
Morales en Bolivia en 2005, Daniel Ortega en Nicaragua en 2006 y Rafael
Correa en Ecuador en 2007. Hasta 2009 esa propuesta "antiimperialista"
y anti-neoliberal de Chávez (plasmada en el ALBA, en Petrocaribe etcétera)
ELVi
siguió expandiéndose con nuevos aliados como Manuel Zelaya en Honduras
o Fernando Lugo en Paraguay. Además, contaba con la comprensión de
Lula da Silva en Brasil y con l a cercanía de la Argentina kirchnerista.

Las últimas derrotas, o claros retrocesos, indican el inicio del declive de este
tipo de alternativas, frente al giro o predominio de los partidos, movimientos
y líderes de centroderecha y la emergencia de otra clase de liderazgos
demagógicos y populistas ahora ajenos a la tendencia adscrita al “socia-
lismo del siglo XXI”. Unos nuevos populistas que, como describe Flavia
Freidenberg en su estudio ya clásico, La tentación populista, reúnen una
serie de caracteristicas muy marcadas: “El populismo (es) un estilo de lide-
razgo que se caracteriza por la relación directa, personalista y paternalista
entre líder-seguidor, en la que el líder no reconoce mediaciones organizativas
o institucionales, habla en nombre del pueblo y potencia discursivamente la
oposición de éste con “los otros”; donde los seguidores están convencidos
de las cualidades extraordinarias del líder y creen que gracias a ellas y/o
al intercambio clientelar que tienen con él (tanto material como simbólico)
conseguirán mejorar su situación personal o la de su entorno”.

El populismo vinculado al “socialismo del siglo XXI” puede haber detenido


su expansión o estar en la actualidad en retroceso, pero el populismo en
general, el ahora emergente adscrito a posiciones más unidas a plantea-
mientos de la derecha del espectro político, tiene ante sí oportunidades
óptimas para desarrollarse, ya que las condiciones políticas y socio-eco-
nómicas que explicaron el anterior auge populista (el de la pasada década)
Eco. techno. Khâgne

se siguen dando, de una forma u otra, en la actual coyuntura.


Llorente y Cuenca, D + i desarrollando ideas, Madrid, 14 de septiembre de 2017.

Répondez en espagnol aux questions suivantes :


(200 mots environ pour chaque réponse)

1. Según el autor, ¿en qué medida el reflujo populista es ‘solo’ aparente?

2. Comente las frases “Nada es permanente en la democracia. Nadie


LV2 – ESPAGNOL

gobierna para siempre” (lineas 26 y 27). Justifique con dos ejemplos


relativos a los países de habla hispana.
S cient.

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C ORRIGÉ
Par Frédérique Mabilais, professeure agrégée d’espagnol au lycée Jeanne-
ELVi

d’Arc, à Caen.

I. TRADUCTION DU FRANÇAIS A L’ESPAGNOL

C ORRIGÉ
A la gente que me hace la pregunta, pues le explico con paciencia que nací
en el Líbano, que viví allí hasta los veintisiete años, que el árabe es mi lengua
materna, que primero fue traducidos al árabe como descubrí a Dumas
y Dikens y Los viajes de Gulliver, y que fue en mi pueblo de montaña, el
pueblo de mis antepasados, donde experimenté mis primeras alegrías de
niño y escuché ciertas historias que iban a inspirar más tarde mis novelas.
¿Cómo podría olvidarlo? ¿Cómo podría apartarme un día de ello? Pero, de
otro lado, llevo veintidós años en tierra francesa, bebo su agua y su vino,
cada día mis manos acarician sus piedras viejas, escribo mis libros en su
idioma, nunca más será para mí una tierra extranjera.
Entonces, ¿mitad francés y mitad libanés? ¡En absoluto! La identidad
no se divide, no se reparte, ni por mitades, ni por tercios, ni por zonas
compartimentadas.
Amin Maalouf, Les identités meurtrières, Ed. Bernard Grasset, 1998.

II. TRADUCTION DE L’ESPAGNOL


AU FRANCAIS

Je branche le disque dur que m’a donné Mauro à mon ordinateur portable. Je
me rends compte qu’il y a des centaines d’archives rangées dans différents
dossiers. Viruca était méthodique, sans aucun doute. Elles sont classées par
cours, puis par thématiques. Il y a les examens, les travaux : des commen-
taires de texte et des rédactions personnelles. Je vais directement au cours
Eco. techno. Khâgne

qui m’intéresse. A celui de terminale B dont je suis la professeure principale.


Mauro avait raison, tous les examens sont scannés. Et sont couverts de
corrections minutieuses, mais pas au stylo rouge : au stylo bleu ou vert.
Je suppose que le rouge lui semblait trop agressif, trop oppresseur, trop
punitif. J’observe l’écriture de Viruca. C’est une calligraphie claire, lisible,
aux tracés fermes. Je ne suis pas du tout experte dans ce type d’analyse,
je ne vais donc en tirer aucune conclusion sur sa personnalité. Mais, en
revanche, je sens que, petit à petit, jour après jour, je m’approche un peu
plus d’elle. Je sais déjà comment elle était physiquement, comment élèves
LV2 – ESPAGNOL

et professeurs la voyaient, je sais déjà à quel point son ex mari l’aimait, et


aussi qu’ils avaient de graves soucis financiers. Et je sais à présent comment
elle écrivait et je vais commencer à voir comment elle pensait.
Carlos Montero, El desorden que dejas, Ed. Espasa, 2016.
S cient.

ANNALES CCIR 2018-2019 l 95

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S UJET

LV2 – ITALIEN
Durée : 3 heures.

Les candidats ne sont pas autorisés à modifier le choix, effectué


IÉNA lors de l’inscription, de la deuxième langue dans laquelle ils doivent
composer.
Aucun document n’est autorisé. (sauf pour le latin ou le grec ancien);
l’utilisation de toute calculatrice ou de tout matériel électronique I. V
est interdite.
Si au cours de l’épreuve, un candidat repère ce qui lui semble être
une erreur d’énoncé, il/a signalera sur sa copie et poursuivra en
expliquant les raisons des initiatives qu’il sera amené à prendre.

S
UJET
II. Q

Tra i giovani è dialetto-mania

In una società in cui i giovani sono sempre più spesso e sempre prima
chiamati a staccarsi dalle proprie radici, per cercare fortuna in un altrove
spesso indefinito, il sapore di casa passa (anche) attraverso l’apprendimento
e l’uso del dialetto.
Se infatti la forza centrifuga messa in moto dal binomio crisi-globalizzazione
porta i giovani a viaggiare, a emigrare e a cercare formazione e lavoro
lontano da casa, il lessico famigliare diventa luogo d’incontro e scambio
con i propri simili.
L’Italia, patria di dialetti dal Medioevo, scopre oggi di aver fatto nascere una
Eco. techno. Khâgne

generazione di giovani che amano e usano i dialetti dei quali sono custodi
e cultori.
La tendenza è stata messa a fuoco da una recente ricerca condotta per
conto di Baci Perugina che sta per lanciare un’edizione in dialetto dei classici
III.
aforismi che si trovano nei cioccolatini.
Su un campione di 3.500 italiani di età compresa tra i 18 e i 65 anni, il 67%
di coloro che si sono definiti "Incuriositi dal dialetto" ha detto di volerlo
imparare "Per rafforzare il legame con la propria famiglia", mentre il 72% si
è detto "Incuriosito dai dialetti di altre regioni".
Una tendenza del tutto in linea con quello che sta accadendo in Rete negli
ultimi tempi. Youtuber, blogger, Pagine Facebook o Instagram centrate
sull’uso del dialetto, sulle tradizioni locali e sulle infinite declinazioni del
LV2 – ITALIEN

concetto di "Essere lontani da casa, ma fieri della propria cultura". Si tratta


di casi esemplari della capacità di brandizzare il dialetto.
Il dialetto così diventa luogo di comicità e occasione per scherzare su modi
e manie che differenziano l’Italia. C’è lo studente meridionale fuori sede che
si fa mandare i pacchi di viveri dal sud o il milanese stressato, ma anche il
S cient.

romano delle borgate o il napoletano fiero della sua cultura popolare.
Un’Italia caleidoscopica che, per fortuna, non si sta perdendo, ma che
anzi viene esportata nei luoghi nuovi d’insediamento del nostro popolo di

96 l ANNALES CCIR 2018-2019

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S UJET
migranti. La "Little ltaly" di New York è stata maestra in questo, ma oggi di
"Little Italy" in giro per il mondo, ce ne sono tante, dall’Indonesia alle Canarie,
dalla Svizzera alla Repubblica Dominicana.
Un ritorno alle origini voluto e fruito da una generazione costretta a tagliare
il cordone ombelicale per essere competitiva con il resto del pianeta, ma
fiera di quell’italianità squisitamente municipale che ci rende unici al mondo.
IÉNA
Da Barbara Masaro, Panorama, 23 novembre 2017.

I. VERSION (sur 20 points)

Traduire en français depuis : « La tendenza è stata messa a fuoco… » jusqu’à :


« … ma fieri della propria cultura. »
(de la ligne 12 à la ligne 22)

II. QUESTIONS (sur 40 points)

1. Question de compréhension du texte


Spiegate : « Un’Italia caleidoscopica ».
(150 mots + ou –10 % * ; sur 20 points)

2. Question de compréhension du texte


Vivere all’estero rinforza il sentimento di appartenenza al Paese di origine ?
(250 mots + ou –10 % * ; sur 20 points)

*Le non-respect de ces normes sera sanctionné.


(Indiquer le nombre de mots sur la copie après chaque question.)
Eco. techno. Khâgne

III. THÈME (sur 20 points)

1. En hiver, il fait plus froid à Ferrare qu’à Paris.


2. S’il y avait moins d’emplois précaires, l’économie italienne serait plus
forte.
3. Madame la maire, présentez-nous vos mesures contre la pollution !
4. Pietro Ferrero a laissé son entreprise en 2011 à son fils.
5. L’art des pizzaiolos napolitains est entré au patrimoine mondial imma-
tériel de l’Unesco.
6. Il faut que la Calabre valorise ses sites archéologiques.
LV2 – ITALIEN

7. On lira des articles sur les élections italiennes en mars 2018.


8. Ce village, dont la population diminuait, revit grâce à des familles de
migrants.
9. Si l’exposition sur le Titien a lieu à Brescia, iras-tu la voir ?
S cient.

10. On n’imaginait pas que l’Italie serait éliminée de la Coupe du Monde de


football.

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IÉNA
C ORRIGÉ
Par Bernard-A. Chevalier, professeur d’italien.

I. VERSION
C ORRIGÉ

Grâce à une recherche récente menée pour le compte de Baci Perugina qui
va lancer une édition en dialecte des célèbres aphorismes que l’on trouve
dans ses chocolats, cette tendance s’est retrouvée sous les projecteurs.
Sur un échantillon de 3 500 italiens d’âge compris entre 18 et 65 ans, 67 %
de ceux qui se sont définis « Curieux du dialecte » ont dit vouloir l’apprendre
« Pour renforcer le lien avec leur famille », tandis que 72 % se sont déclarés
« Curieux des dialectes des autres régions ».
Cette tendance est parfaitement en accord avec ce qui se passe sur le Net
ces derniers temps. Youtuber, blogger, Pages Facebook ou Instagram axées
sur l’usage du dialecte, sur les traditions locales et sur les innombrables
déclinaisons du concept « Être loin de chez soi, mais fier de sa culture ». Il
s’agit là d’exemples significatifs de la capacité à commercialiser le dialecte.
Note : Brandizzare est un terme récent d’origine américaine : brand. Il s’agit de : La trasformazione
di qualcosa in un marchio commerciale.

III. THÈME

1. D’inverno fa più freddo a Ferrara che a Parigi.


2. Se ci fossero meno lavori precari, l’economia italiana sarebbe più forte.
3. Signora sindaca*, ci presenti i Suoi provvedimenti contro l’inquinamento !
4. Pietro Ferrero ha lasciato la sua azienda al figlio nel 2011.
5. L’arte dei pizzaioli napoletani è entrata nel patrimonio culturale mondiale
Eco. techno. Khâgne

immateriale dell’ Unesco.


6. Occorre che la Calabria promuova i suoi siti archeologici.
7. Si leggeranno articoli sulle elezioni del marzo 2018.
8. Quel paese, la cui popolazione diminuiva, rivive grazie alle famiglie di
migranti.
9. Se la mostra sul Tiziano si terrà a Brescia, andrai a vederla ?
10. Nessuno avrebbe pensato che l’Italia sarebbe stata eliminata dai mondiali
di calcio.
* Note : On pouvait aussi écrire SINDACHESSA mais depuis que Rome et Turin ont des maires de sexe
féminin, la presse utilise plus volontiers SINDACA.
LV2 – ITALIEN
S cient.

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S UJET
HISTOIRE, GÉOGRAPHIE ET GÉOPOLITIQUE
DU MONDE CONTEMPORAIN
Durée : 4 heures.

Tout verbiage doit être évité et il est expressément recommandé de


ne pas dépasser huit pages. Il sera tenu compte des qualités de plan ESCP
Europe
et d’exposition, ainsi que de la correction de la langue. Il est rappelé
que la carte-réponse est à remplir (en collant l’étiquette code barre
supplémentaire). Les documents d’accompagnement ci-joints sont
essentiellement là pour aider le candidat dans sa réflexion sur le sujet
posé et sa représentation cartographique. Il n’est fait usage d’aucun
document ; l’utilisation de toute calculatrice et de tout matériel élec-
tronique est interdite.
Si au cours de l’épreuve un candidat repère ce qui lui semble être
une erreur d’énoncé, il la signalera sur sa copie et poursuivra en
expliquant les raisons des initiatives qu’il sera amené à prendre.

HISTOIRE, GÉOGRAPHIE ET GÉOPOLITIQUE


S UJET

S
États-Unis-Chine : rivalités de pouvoir et d’influence

CARTE : En utilisant vos connaissances et si nécessaire les documents


ci-joints, construisez une carte appuyant et illustrant vos propos. La légende
ne devra pas faire plus d’une page. Il est rappelé que la carte est obligatoire.
Elle doit également comporter un titre.

Sommaire

Document 1. Caricature parue dans le journal autrichien Kleine Zeitung,


reprise dans Courrier international, février-mars 2011, p. 13.
Document 2. Classement des 10 principales banques mondiales en 2015.
Diplomatie, n° 29, octobre-novembre 2015, p. 21.
Document 3. Classement des 10 premières entreprises chinoises en fonc-
tion de leur chiffre d’affaires. Diplomatie, n° 29, octobre-novembre 2015,
p. 45.
Document 4. Classement des 10 premières entreprises américaines en
fonction de leur chiffre d’affaires. Diplomatie, octobre-novembre 2015, p. 36.
S cientifique

Document 5. Classement des 10 plus grandes entreprises au monde selon


leur capitalisation boursière (au 31 mars 2014), Diplomatie, octobre-no-
vembre 2015, p. 36.
Document 6. Le soft power des États-Unis au Moyen-Orient, revue CARTO,
janvier­-février 2016, n° 33, p. 44.
Document 7. Les dépenses mondiales d’armement (2005-2015), in Laurent
Carroué, Atlas de la mondialisation, Paris, 2018, p. 24.
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S UJET

D
OCUMENTS

Document 1. Caricature parue dans le journal autrichien Kleine Zeitung,


reprise dans Courrier international, février-mars 2011, p. 13.
ESCP
Europe
HISTOIRE, GÉOGRAPHIE ET GÉOPOLITIQUE

Document 2. Classement des 10 principales banques mondiales en 2015.


Diplomatie, n° 29, octobre-novembre 2015, p. 21.
S cientifique

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S UJET
Document 3. Classement des 10 premières entreprises chinoises
en fonction de leur chiffre d’affaires. Diplomatie, n° 29,
octobre-novembre 2015, p. 45.

ESCP
Europe

Document 4. Classement des 10 premières entreprises américaines


en fonction de leur chiffre d’affaires. Diplomatie,
octobre-novembre 2015, p. 36.

HISTOIRE, GÉOGRAPHIE ET GÉOPOLITIQUE

Document 5. Classement des 10 plus grandes entreprises au monde


selon leur capitalisation boursière (au 31 mars 2014), Diplomatie,
octobre-novembre 2015, p. 36.
S cientifique

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S UJET

Document 6. Le soft power des États-Unis au Moyen-Orient,


revue CARTO, janvier-­février 2016, n° 33, p. 44.

ESCP
Europe
HISTOIRE, GÉOGRAPHIE ET GÉOPOLITIQUE
S cientifique

102 l ANNALES CCIR 2018-2019

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S UJET
Document 7. Les dépenses mondiales d’armement (2005-2015),
in Laurent Carroué, Atlas de la mondialisation, Paris, 2018, p. 24.

ESCP
Europe

HISTOIRE, GÉOGRAPHIE ET GÉOPOLITIQUE


S cientifique

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ESCP
Europe
C
ORRIGÉ
Par Alain Nonjon, professeur de chaire supérieure.

Sujet rassurant
– Son cadre est bien fixé avec la liberté donnée par l’absence de chronologie
C ORRIGÉ

qui invite à saisir l’épaisseur de l’Histoire de relations particulières dès la fin


du xixe et l’appel californien.
– Son actualité est une évidence chaque jour renforcée car dès que la Chine
prétend affirmer son hégémonie, elle rencontre frontalement les États-Unis
de Donald Trump dont le « greater america » correspond de fait à restaurer
pour les États-Unis les capacités à être premiers au grand dam des Chinois.

Sujet délicat
– Car les caricatures abondent : la Chine maîtresse du monde sans point
d’interrogation afin de susciter voire d’amplifier des peurs et le déclin améri-
cain est une antienne psalmodiée depuis les années 60… une idée congelée
ressortie quand on n’a rien à dire.
– Car les concepts sont précis et nécessitent un rare sens de la nuance
« influence et rivalités ».
HISTOIRE, GÉOGRAPHIE ET GÉOPOLITIQUE

– Car les raccourcis sont hasardeux : le G2 ou le condominium États-Unis.


– Chine sont vite (trop) installés par les observateurs par souci de créer
artificiellement une chinamérique… chimérique.
– Car les rivalités sont constantes, alimentées par Donald Trump dans sa
diplomatie imprévisible sans boussole (nous intégrerons d’ailleurs dans
ce corrigé des événements postérieurs au concours, l’été 2018 ayant été
très meurtrier, pour donner un espace de réflexion supplémentaire aux
candidats).
– Car les interprétations sont faussées par des a priori : les États-Unis grande
puissance inexorable du xxie siècle comme il y a déjà eu un xxe américain ; et
la Chine conjuguant un nationalisme exacerbé et une volonté de puissance
démesurée dont l’exercice serait continu et triomphant.

Un rappel s’impose
« Rivalités » : terme qui évoque explicitement la compétition, la concurrence,
les conflits. L’étymologie confirme cette idée de conflictualité puisqu’il s’agit
de résoudre les différends fusse par la force entre deux pays qui accèdent
chacun à l’eau sur un même rivage.
« Influence » définit de plus en plus l’action multiforme de quelqu’un sur
quelque chose ou quelqu’un d’autre. S’ajoute parfois une connotation un
peu mystérieuse : influencer c’est tirer les ficelles, manipuler parfois quand
ce n’est pas instrumentaliser. Mais souvent influencer c’est faire adopter un
point de vue, orienter un choix un mode de vie. On rappellera le raccourci
subtil de M. Foucher dans son Atlas de l’influence française : « L’influence,
S cientifique

elle, a quelque chose de plus que la présence. Être influent, c’est venir avec
une valise pleine d’idées et laisser la valise sur place ! »
Cela renvoie à la capacité à s’organiser, à être persuasif pour convaincre…
sans vaincre par la force nécessairement. La complexité du mot influence
pour les candidats était de décrire les multiples facettes des capacités d’un
pays à séduire à une époque où l’american way of life et très contesté et le
rêve chinois appartient plus aux assemblées du PCC qu’au quotidien des
Chinois.

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Problématique : les rivalités de pouvoir Chine/États-Unis dépassant des
ESCP
rivalités de système désormais ne sont-elles pas que le produit de perfor-
Europe
mances statistiques concurrentes, d’ambitions territoriales conflictuelles
ou au travers des évolutions perçoit-on une course au leadership interna-
tional et à l’élaboration d’un nouvel ordre économique international ? La
Chine a-t‑elle réellement l’ambition et les moyens d’organiser le monde alors

C ORRIGÉ
que les États-Unis ne semblent pas avoir renoncé malgré leur repli à être la
« nation responsable » de son ordonnancement ?

Proposition de plan

I. États-Unis/Chine : une confrontation inexorable


aux origines multiples

A. Des héritages conflictuels


– Le communisme chinois s’est défini face aux États-Unis : dès la guerre
civile où les États-Unis ont soutenu le Guomindang, dans l’isolement de
la Chine face à la reconnaissance effective de Taïwan jusqu’en 1971 et
Mao n’a jamais manqué une occasion de stigmatiser le « tigre en papier de

HISTOIRE, GÉOGRAPHIE ET GÉOPOLITIQUE


l’impérialisme américain » et de désigner les apports occidentaux comme
contre révolutionnaires pendant la révolution culturelle.
– Ce n’est pas l’entrée de la Chine à l’ONU en 1971 qui fera oublier le
face-à‑face car à  chaque occasion (bombardement de l’ambassade
chinoise à Belgrade le 8 mai 1999 ou coopération américano taïwanaise
ou intervention en Irak 2003) le régime de Pékin sait trouver des mots forts
pour stigmatiser l’ennemi héréditaire (« néo impérialisme, unilatéralisme
belliqueux »). Le Japon est toujours là pour rappeler les différends sino
américains en Mer de Chine, dans les partenariats avec des pays de l’Asie
Pacifique, dans l’approche de la nucléarisation de la région.
– En arrière-plan, il y a pour la Chine la volonté de reprendre la main après
avoir dominé pendant deux millénaires et avoir raté le tournant de la révo-
lution industrielle du xixe siècle et subi un siècle d’humiliation. C’est dans
cette perspective que la Chine rejoint le concert international, s’active
au conseil de sécurité (8 % du budget de l’ONU) et surtout met l’accent
sur les nouvelles technologies susceptibles de forger les tendances de
demain (intelligence artificielle, big data, blockchain). La Chine a l’obses-
sion dans de nombreux domaines de passer du stade de copieur au statut
d’innovateur et de leader… Pour autant lorsqu’elle rêve de grande renais-
sance c’est avant tout dans la quête interne d’une société harmonieuse,
d’un environnement international équilibré et avec comme priorité du moins
affichée de faire de la coopération la base même de la sécurité… Pas sûr
que les Américains l’entendent de cette oreille, et que la place centrale
souhaitée par la Chine en Asie Pacifique ne soit pas au regard du passé
S cientifique

ressentie comme une provocation. Le contexte de « fin du rêve américain »


ne peut que radicaliser les tensions.
– Enfin de tout temps, accommodements n’a jamais voulu dire fin des affron-
tements. G. W. Bush en 2000 validait lui-même l’expression de « concurrence
stratégique » en des termes d’actualité puisque la Chine prétend de plus en
plus faire jeu égal avec la « superpuissance américaine » ne serait-ce que
dans ses performances commerciales et économiques. Pour C. Deblock,

ANNALES CCIR 2018-2019 l 105

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« Pékin veut apparaître non seulement comme un acteur incontournable
mais aussi comme un hégémon silencieux ». Il en a les moyens.
ESCP
Europe B. Des performances économiques sources d’affrontements
potentiels et ouverts
– Pour ceux qui lisent tout dans les statistiques : les performances de la
Chine relèvent des superlatifs. Depuis 2014 en termes de parité de pouvoir
C ORRIGÉ

d’achat la Chine devance les États-Unis et les Américains ont du mal


à accepter ce déclassement. Le MAGA « make great America again » est
un constat amer de Donald Trump face à une Chine qui pour lui, ne joue
pas le jeu. (Déjà la violence des taxes commerciales pour désormais près
de 150 mds de $ d’échanges et 200 mds de $ de déficit de moins). Le
rattrapage chinois a été d’une extrême rapidité (un quart de siècle) d’un
spectre très large au niveau sectoriel (des tonnes d’acier aux nanogrammes
des NTIC). La Chine peut ferrailler avec les États-Unis dans ses chasses
gardées (automobiles aux smartphones) et elle se positionne comme premier
marché quantitatif à l’importation comme à l’exportation. Sa capture des
marchés lui assure une première place d’exportateur justement au moment
où les États-Unis cumulent les déficits extérieurs, l’excédent chinois dégagé
avec les États-Unis a augmenté de 10 % en 2017, atteignant 276 milliards
HISTOIRE, GÉOGRAPHIE ET GÉOPOLITIQUE

de dollars (226,3 milliards d’euros), son plus haut niveau des dix dernières
années.
Le déclin relatif des États-Unis trouve dans la montée en puissance de la
Chine une explication naturelle commode et c’est dans l’excès mais assez
calé sur le ressenti de l’opinion publique américaine que Donald Trump
pourra évoquer que les emplois sidérurgiques perdus sont ceux que la Chine
a volés et il pourra accuser la responsabilité de la sous-évaluation du yuan
dans les déficits sans prendre en compte les responsabilités américaines
(déficit accru même quand le yuan se réévaluait).
– Pour ceux qui aiment les projections : l’affrontement paraît tout aussi inévi-
table. Quand les États-Unis ont su faire éclore les GAFA et multiplié les data
Center c’était pour eux une façon de « capturer les esprits « (Y Études). Or le
paysage des NTIC place désormais la Chine parmi le leaders. En termes de
croissance des investissements technologiques, la Chine occupe le 1er rang
de 2010 à 2016. Les Gafa et les NATX ont trouvé à qui parler avec les BATX
(Alibaba, Baidu, Tencent, Xiaomi), et les palmarès intègrent ces entreprises
profitant d’un protectionnisme sur le marché chinois (770 M de personnes
connectées à Internet dont 97 % via leur téléphone) de l’esprit conciliant des
autorités (déplafonnement des paiements mobiles peu de corsetage au nom
de la défense des données privées) et d’une diversification réussie. Jack
Mack cofondateur en 1999 du groupe Alibaba en prenant une semi-retraite
en 2018 à 54 ans annonce non pas la fin d’une ère, « mais le début d’une
ère », Le groupe est devenu un major de l’internet présent non seulement
dans le commerce en ligne, les services de paiement électronique Alibay
S cientifique

mais aussi dans l’informatique en nuage ainsi que dans les divertissements
et les médias, apparaissant aujourd’hui comme un mélange – et un concur-
rent – des géants technologiques américains Amazon, eBay et Google.
Huaewei concurrent de Apple et Samsung conquiert le marché africain et
refait son handicap initial.
– Pour les adeptes de la sinodépendance du monde : il suffit d’évoquer
le boom de l’acier, (127MT en 2000 et 808 en 2016 pour 78,5 pour les

106 l ANNALES CCIR 2018-2019

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États-Unis) de l’automobile (30 % de la production mondiale en ayant
supplanté les États-Unis dès 2009) ou l’irruption dans l’aéronautique
ESCP
(premier vol du C919 en 2017) pour annoncer des lendemains de tensions
Europe
sino-américaines. Encore plus spectaculaire et agressive, la vision d’une
Chine qui s’affirme face à la Nasa et à l’Agence spatiale européenne (ESA)
comme une grande puissance aérospatiale. Baidu en 2020 concurrencera
le GPS états-unien avec un support de 35 satellites et en 2016 la Chine

C ORRIGÉ
a confirmé ses nouvelles ambitions en lançant le premier satellite mondial
à communication quantique qui permet de transférer l’information instan-
tanément et de façon sécurisée épaulée par le premier supercalculateur du
monde. Les hiérarchies sont bousculées, les rivalités sont exaspérées car
la frontière technologique avait toujours été préservée par les Américains.
Le plan « made in China 2025 » entend faire de la Chine un centre mondial
des technologies. Leader en 2020, la Chine comptera 200 millions de cher-
cheurs soit autant que la population active américaine ! Le constat semble
sans appel !

C. La superposition de rivalités de toutes natures jusqu’à des luttes


d’influence par le recours à des soft power conquérants
Les rivalités se déploient sur de nombreux fronts. Le catalogue inventorié

HISTOIRE, GÉOGRAPHIE ET GÉOPOLITIQUE


par S. Collin est des plus évocateurs : « Au début des années 2010, la liste
des points de tension et de désaccord entre la Chine et les États-Unis était
longue : droits de l’homme, Tibet, déséquilibre commercial, propriété intel-
lectuelle, espionnage technologique, cyberattaques, liberté de circulation
maritime et aérienne dans les mers de Chine, ventes d’armes américaines
à Taïwan ou encore modernisation militaire de la Chine. À cela s’ajoutent
aujourd’hui quelques grands dossiers internationaux vis-à‑vis desquels les
deux pays affichent certaines divergences : la lutte contre le réchauffement
climatique, la question nucléaire nord-coréenne, ainsi que la situation en
Syrie et plus globalement la situation géopolitique dans le monde arabe.
(…) On distinguera donc :
– Des rivalités commerciales : Peter Navarro, l’auteur de Death by China
(« La Mort par la Chine », 2011, non traduit), mandaté par Washington le
4 mai 2018, a demandé une baisse de pas moins de 200 milliards de dollars
(environ 169 milliards d’euros) de l’excédent commercial chinois vis-à‑vis
des États-Unis d’ici à 2020… l’actualité a tranché : taxes appliquées par
Donald Trump sur l’acier importé à 25 % et l’aluminium à 10 % avec pour
motif la sécurité nationale soit 34 mds de $ impactés. La surenchère est
à la manœuvre puisque ce sont 250 milliards de produits chinois importés
aux États-Unis qui pourraient désormais être touchés, dès août 2018 et
plus de 400 dès septembre 2018. La Chine a dénoncé ces dérives parlant
de « comportement irrationnel et d’hégémonisme commercial » non sans
répliquer par des taxes de même ampleur sur des produits américains.
Façon donc de clore le discours de G. Bush qui en 2009 avait indiqué que
S cientifique

son pays « accueillait favorablement l’émergence d’une Chine forte pacifique


et prospère ». Il y a toujours eu au Congrès des majorités pour interpeller
le dumping social monétaire chinois, la mauvaise qualité des produits et
ignorer que le « lowerprice every day » de Walmart n’était possible que par
des importations massives en provenance de Chine.
– Des rivalités technologiques militaires : la destruction, le 11 janvier 2007,
d’un satellite météorologique par un missile chinois, est comprise

ANNALES CCIR 2018-2019 l 107

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à Washington comme une mise en garde au moment même où la Maison
Blanche est affaiblie. Elle est aussi interprétée comme le franchissement
ESCP
par l’armée chinoise d’un seuil important dans sa capacité à neutraliser
Europe
l’avantage technologique des États-Unis en cas de confrontation sur Taïwan.
– Des rivalités technologiques civiles : même si la Chine est toujours au
banc des accusés pour copie et contournement, les législations sur les
brevets, les achats de Hummer par Sichuan Tengzhong heavy industrial
C ORRIGÉ

machinery ou l’acquisition de personal computing de IBM en 2005 par


Lenovo donnent l’impression aux Américains que l’avenir industriel des
États-Unis se situait… à Pékin. La propriété intellectuelle devient facteur
d’affrontement : sur 36 États qui figurent dans le rapport pour le special 301
au banc des accusés 12 sont considérés comme des « États voyous » dont
la Chine.
– Des rivalités monétaires : paradoxalement le yuan est peu présent dans
les liquidités internationales (moins de 4 % car le dollar reste maître des
transactions et évaluations) mais il hante les autorités américaines par sa
sous-évaluation, par des accords de swaps que la Chine multiplie, par
les lignes de crédits en yuans que préfèrent des pays hostiles aux États-
Unis comme le Venezuela, par les facilités de prêts qui l’accompagnent en
Afrique… Quelles que soient les marques de bonne volonté de la Chine
HISTOIRE, GÉOGRAPHIE ET GÉOPOLITIQUE

pour normaliser la situation du yuan comme monnaie internationale moins


politique, les États-Unis regimbent. A fortiori, lorsqu’en juin 2018 le yuan se
déprécie de 3 % par rapport au dollar, certains y voient la « main invisible de
l’État chinois » qui indirectement compense les taxes américaines… avec
risque il et vrai de volatilité.
– Des rivalités dans le soft power car la voix de l’Amérique est moins
entendue face au instituts Confucius, (516 dans 142 pays en 2017). La Radio
chine international diffuse largement ou l’agence de presse Xinhua sur les
pays anglophones parvient à concurrencer la firme en pôle position CNN. On
va plus loin, d’une diplomatie des ursidés (dite du panda) qui avait conduit
en 1972 à offrir un couple de pandas à Richard Nixon pour officialiser la
normalisation des relations ou pour jeter un sort (tous les récipiendaires
comme Nixon Heath ou Tanaka ont perdu le pouvoir peu de temps après
réception des pandas !)
– Des rivalités tous azimuts jusque dans le domaine du réchauffement
climatique où le premier et le deuxième pollueur et émetteur de gaz à effet
de serre qui avaient traîné les pieds à Copenhague, anticipé ensemble la
Cop21, se trouvent frontalement opposés quand Donald Trump ne valide
pas l’accord de Paris et synthétise le problème du réchauffement climatique
comme un complot chinois alors que pour Liu Zhenmin, ministre chinois des
affaires étrangères chinois « En tant que plus grande économie développée
du monde, le soutien des États-Unis est essentiel ».
– Des rivalités indirectes : le problème de Taiwan fait surgir souvent des
rivalités indirectes comme lorsque la Chine exige des compagnies aériennes
S cientifique

privées, qu’elles cessent d’indiquer Taïwan comme un pays individuel sur


leurs billets sous peine d’un boycott des consommateurs chinois. Réponse
immédiate de l’administration Trump « une aberration orwellienne révélatrice
d’une propension croissante du Parti communiste chinois à imposer ses
vues politiques sur les citoyens américains et les compagnies p ­ rivées ». Sur
Weibo, le Twitter chinois, sous contrôle étroit de la censure, les internautes
chinois ont ­riposté en appelant à l’indépendance d’Hawaï ou de l’Alaska.

108 l ANNALES CCIR 2018-2019

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– Des Rivalités stratégiques : dans la nouvelle ère inaugurée par le président
chinois, Xi Jinping, en octobre 2017, Pékin compte bien récolter les fruits
ESCP
géopolitiques de sa position dominante dans le commerce mondial. À l’in-
Europe
verse, Donald Trump espère, lui, monnayer l’hyperpuissance militaire de
son pays – quitte à faire payer ceux qui hébergent des bases américaines.
Ces objectifs sont rarement convergents et difficile de ne pas voir dans la
guerre commerciale un affrontement plus large entre deux prétendants à un

C ORRIGÉ
leadership mondial.

II. Le face-à‑face devient de plus en plus un affrontement direct


sur des territoires, sur des richesses potentielles,
sur des enjeux d’un NOI (Nouvel Ordre International)

A. Des affrontements sur des territoires de proximité


En Asie la Chine essaie de rompre « l’encerclement stratégique » qu’elle
croit être la logique des interventions américaines et en Amérique Latine
– le backyard latino américain – elle déverrouille « la diplomatie du dollar ».
– Les Philippines deviennent un partenaire courtisé par la Chine : cette
ancienne colonie américaine a toujours été en Asie Pacifique une base

HISTOIRE, GÉOGRAPHIE ET GÉOPOLITIQUE


d’appui des EU. Désormais alliance rime avec prise de distance. Avec le
président Duterte la Chine est parvenue à avancer ses pions. Alors que les
États-Unis restitue 3 cloches volées à l’Église de Balangiga… et que – plus
significatif – des manœuvres militaires (Balikatan c’est-à‑dire « épaule contre
épaule ») se déroulent sur le sol philippin, depuis son élection en mai 2016
Rodrigo Duterte prend ses malgré un traité de défense mutuelle depuis
1951. C’est pour mieux se tourner vers Moscou et Pékin (avec qui Manille
entretient pourtant un contentieux territorial en mer de Chine méridionale). La
semi volte-face philippine n’est pas fortuite. M. Duterte n’a guère goûté les
critiques qu’il a essuyées il y a quelques mois de la part de Barack Obama
à propos de la guerre quotidienne livrée aux trafiquants de drogue (plus de
7 000 morts) et des droits de l’Homme.
– La Mer de Chine crispe les positions des deux puissances. Donald Trump
s’est proposé d’être médiateur dans le contentieux Vietnam/Chine mais
la Chine a donné une fin de non-recevoir. La Chine a affirmé haut et fort
devant James Mattis secrétaire d’État à la défense des États-Unis « qu’elle
n’abandonnerait pas un pouce de ses territoires historiques » et la liberté
de navigation que prétend défendre Donald Trump n’est pas un visa pour
des rééquilibrages territoriaux de la Chine avec des puissances riveraines.
Le détroit de Taïwan porte encore les stigmates des tensions america-
no-chinoises sur la 23e province chinoise : déjà en 1958-1959, Foster Dulles
avait parlé de « riposte massive » devant les visées chinoises… et en 2005 la
Chine avait édicté une loi antisécession prévoyant l’utilisation de « moyens
non pacifiques », doux euphémisme pour contraindre Taiwan à ne pas
S cientifique

emprunter les chemins de l’indépendance.


– En Amérique Latine, arrière-cour américaine, les Chinois sont de plus en
plus présents. Ils viennent d’installer une centrale électrique à Cochanbamba
en Bolivie, et sont aux aguets pour les ressources en lithium (la Chine produit
la moitié des véhicules électriques mondiaux). La Chine est maintenant
le principal partenaire commercial des trois des plus grandes économies
d’Amérique du Sud : le Brésil, le Chili et le Pérou. Ces pays exportent prin-
cipalement des matières premières vers la Chine telles que le cuivre, le

ANNALES CCIR 2018-2019 l 109

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minerai, le fer, l’huile et le soja. La Chine accorde également à ces pays
un crédit quasi illimité pour l’importation de marchandises chinoises, ce
ESCP
qui pour l’Argentine en temps de crise majeure est un atout risqué mais
Europe
immédiat. Quand l’Alliance Pacifique se met en place, le tropisme vis-à‑vis
de la Chine, du Chili ou de l’Équateur rompt avec la logique continentale
méridienne classique et rencontre les nostalgies de la « diplomatie du méri-
dien » des États-Unis.
C ORRIGÉ

B. Des confrontations potentielles sur des espaces riches


de promesses
– L’Afrique résume à elle seule les ambitions croisées des États-Unis et de la
Chine. Les États-Unis ont délégué à des pays européens comme la France
le soin d’être gendarmes dans cette partie du monde. Mais 3 facteurs ont
contribué à leur retour : le pactole pétrolier et plus généralement le coffre-
fort de matières premières que représente le continent africain. Pour se
dégager du Moyen-Orient quoi de plus naturel que d’investir dans le Golfe
de Guinée ou dans les riches potentiels miniers de l’Afrique australe. Pour
contrer le terrorisme naissant dans l’arc de crise du Sahel, l’intervention
américaine paraissait de rigueur du moins en déléguant à des pays alliés
comme la France mandatée au Mali ou en République centrafricaine comme
HISTOIRE, GÉOGRAPHIE ET GÉOPOLITIQUE

hier au Katanga. Enfin pour accompagner la renaissance africaine et en


tirer des dividendes, les États-Unis se sont rapprochés par des accords de
libre-échange (accords Agoa) ou même une aide (lutte conte le sida) autant
philanthropique que mercantile. Cette démarche rencontre frontalement une
tentation hégémonique plus que néocoloniale chinoise (pas d’administration
de territoire par la Chine). Les Chinois et leurs 10 000 entreprises en Afrique
affichent leurs ambitions. Ils participent à l’essor des NTIC via Huawei et ont
une influence décisive au Kenya et en Tanzanie sur les réseaux militaires.
Ils financent des lignes de crédit au risque d’un surendettement des pays
(6 pays africains sont surendettés en 2018) et 2 ont fait défaut (Mozambique
et Congo Brazzaville). La Chine veut se rapprocher des méthodes de club de
Paris, la conditionnalité démocratique en moins ! La Chine devient un fournis-
seur d’armements majeur en Angola, en Éthiopie et au Soudan. La diaspora
chinoise s’accroît (plus de 1 million de ressortissants) et la contrepartie
de cette intervention chinoise est des plus claires : seul un pays reconnaît
encore Taïwan au dernier forum sino-africain de 53 participants africains (le
Swaziland) preuve du recul de l’influence américaine.
– L’espace aérien devient aussi une zone de confrontation. Si Donald Trump
a réactivé le projet de G. W. Bush de se poser sur Mars, les Chinois ne sont
pas en reste en faisant de la maîtrise de la lune un objectif plus proche que
l’on ne l’imagine. La Chine y déploie un intérêt pour la face cachée lunaire,
en envoyant un robot fin 2018 dans le bassin Pôle sud aitken pour y collecter
des échantillons et les ramener sur Terre et « change 5 » en 2019. La Chine
investit des milliards d’euros dans son programme spatial, coordonné par
S cientifique

l’armée. Le pays espère avoir une station spatiale habitée d’ici à 2022, alunir
régulièrement et envoyer à terme des humains sur la Lune. La nouvelle
frontière spatiale est-elle désormais chinoise ?
– Le cyberespace n’échappe pas aux convoitises. Pour Foreign affaires
dans sa livraison de septembre-octobre 2018, le Net vit la fin de la domi-
nation américaine. C’est en Asie, « que [son] avenir est le plus susceptible
d’être écrit car les deux premiers marchés se trouvent en effet sur ce

110 l ANNALES CCIR 2018-2019

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continent : la Chine avec près de 780 millions d’internautes et l’Inde avec
plus de 480 millions ». C’est la Chine qui apparaît comme la cyberpuissance
ESCP
capable d’imposer sa loi. Non seulement la deuxième puissance écono-
Europe
mique mondiale conteste le monopole des géants américains de la Silicon
Valley, en favorisant des champions nationaux – comme Baidu moteur de
recherche national, Alibaba géant du e-commerce et Tencent créateur du
réseau social Wechat et Xiaomi fabricant de portables N° 1 sur le marché

C ORRIGÉ
indien –, mais elle revendique un autre modèle de gouvernance, moins
décentralisé, plus autoritaire, plus impérieux dans sa volonté de contrôler
le Net. L’utopie des pionniers, celle du World Wide Web, a laissé la place
au « World War Web » sino-américain. Si on analyse les budgets militaires
de la Chine, force est de constater que leurs prétentions dépassent le cadre
régional. Selon le Stockholm International Peace Research Institute (Sipri),
les dépenses militaires chinoises représenteraient plus de quatre fois celles
de l’ensemble des pays voisins de l’Association des nations de l’Asie du
Sud-Est (Association of Southeast Asian Nations – Asean). Elles seraient
même supérieures aux dépenses militaires combinées du Japon, de l’Inde
et de la Corée du Sud !

C. Des confrontations au niveau de l’influence culturelle

HISTOIRE, GÉOGRAPHIE ET GÉOPOLITIQUE


et du soft power
– Non que les États-Unis soient rétrogradés dans ce domaine, mais du
moins la Chine fait-elle son entrée. China daily livre des informations forma-
tées au même titre que le Quotidien du peuple qui ne se contente pas d’une
diffusion nationale. La Radio chine international offre à 160 pays et en 53
langues un « traitement » de l’information. La Chine a bien compris que les
discours valent les armes les plus sophistiquées. Depuis la remise en cause
par Donald Trump du traité de partenariat pacifique, la Chine offre une alter-
native « désintéressée », le RCEP partenariat économique régional global.
Le plaidoyer de Xi Jinping à Davos en janvier 2018 a valeur de message
fédérateur à l’heure où le protectionnisme de Donald Trump démantèle un
à un les acquis d’une gouvernance mondiale. La Chine devient un recours
surtout en mettant en place des programmes pharaoniques comme les
routes de la soie, qui vendent une mondialisation des biens sous couvert
de mondialiser les liens.
– Les routes de la soie combinent toute cette complexité des influences
recherchées par la Chine. Il n’est pas fortuit de voir que les Instituts Confucius
longeant les routes de la soie et complétant par la capture des esprits, la
captation des marchés, 135 Instituts Confucius établis dans 51 pays le long
de « la Ceinture et la Route ». L’échec de beaucoup de tentatives relève
autant de l’économique que du culturel c’est-à‑dire de la résistance des
pays d’accueil à voir le dragon chinois s’emparer de richesses fusse par
le deal infrastructures contre minerais ou énergie. Ainsi la suspension en
Malaisie d’un investissement chinois de 23 mds de $ au prétexte que ce
chantier aurait des liens avec le scandale financier du fonds IMDB (IMalaysia
S cientifique

development Berhad). D’après la société américaine de conseil RWR advi-


sory Group ce sont 234 projets chinois soit 14 % des chantiers recensés
qui feraient l’objet de polémiques, manque de transparence, fiabilité des
travaux, financement, contreparties et absence de prise en compte des
populations locales… ce réquisitoire est à la mesure de la clairvoyance de
certains acteurs dans la volonté de la Chine par les routes de la soie de
dicter de nouvelles règles économiques militaires et sécuritaires au monde.

ANNALES CCIR 2018-2019 l 111

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– En matière de soft power la stratégie ne peut qu’être à long terme. Guo
Bai directeur du Digital Belt and road fait remarquer qu’elle s’inscrit dans le
ESCP
jeu de go (wei qi) populaire en Chine et explicité par H. Kissinger : composer
Europe
avec l’adversaire en se positionnant sur les places vacantes sans possibilité
de conflits ouverts. À la fin de la partie il est difficile de discerner le véritable
vainqueur… l’immense influence culturelle américaine à l’international n’est
pas remise en question par la Chine mais les investissements en capital dans
C ORRIGÉ

les BATX lui permette de relever le défi culturel et de préparer un hégémon…


(les NTIC représentent déjà 7 % du PIB chinois).
Ce maillage d’influences et de rivalités invite donc à s’interroger sur le sens
à donner à l’exercice de la puissance « des 2 Titans » (J. Mearsheimer) repré-
sentant près de 40 % de l’économie mondiale.

III. Deux tentations impériales à la croisée des chemins


et qui croisent le fer

A. La tentation est forte de vouloir acter un G2 ou un condominium


– Puissance responsable, la Chine attendrait son heure et se contenterait
de suppléer les États-Unis dans une complémentarité efficace. C’est ce que
HISTOIRE, GÉOGRAPHIE ET GÉOPOLITIQUE

croyaient les Américains à l’époque de G. Bush d’une multipolarité où les


États-Unis restaient seule puissance globale de l’avis même des experts
chinois. Ainsi pendant la crise asiatique de 1997 la Chine ne jouant pas
sur la dévaluation du yuan avait pondéré la crise ce que ne pouvait faire le
Japon et le yen englué dans une récession déflationniste depuis la fin des
années 80 et des rancœurs liées au boom Heisei. De même en appuyant
la création d’un G20 en 2009, la Chine met ses réserves au service d’une
recrédibilisation du système financier mondial. Enfin, en entrant dans les
processus de pacification en Afrique (devancée par l’Inde), de l’ONU ou,
dans la sécurisation de la zone de piraterie somalienne, la Chine devient
un élément pondérateur au chevet d’une gouvernance malade. En 2004,
elle va même jusqu’à proposer un moratoire en mer de Chine pour faire
du commerce le pacificateur des conflits potentiels territoriaux. On était
même en droit de se demander si en abandonnant son Tiers-mondisme
militant elle n’allait pas plutôt rejoindre le groupe du G8 plutôt que de rester
fidèle au groupe des 77 ! La complémentarité États-Unis/Chine n’est-elle
pas structurellement installée avec le financement de la dette américaine,
avec l’accélération de IDE chinois aux États-Unis (109 mds de $ cumulés
dont 45,6 la seule année 2016) avec les chaînes de production de Apple
à moindre coût en Chine… (un cinquième de son CA en Chine). Avec
B. Obama le réalisme de la politique étrangère a débouché sur un « smart
power », la claire reconnaissance du fait que les États-Unis avaient perdu
ou plutôt ne pouvaient assumer leur rôle de shérif du monde. Le « leading
from behind » ou la politique minimaliste étrangère de B. Obama traduisent
S cientifique

une inflexion par rapport à 1991 où la superpuissance américaine est à son


acmé. L’option partenariat s’est substituée à l’impératif d’hégémonie.
– Concomitamment la Chine de puissance régionale responsable a semblé
vouloir gravir les échelons qui la conduiraient à être une grande puis-
sance « forte de ses propres caractères » selon Xi Jinping. En 2035-2049
(centenaire de la proclamation de la République populaire de Chine) une
« Chine moderne prospère et forte » se sera hissée au « premier rang du
monde ». La feuille de route est assez simple : progresser dans la légitimité

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internationale par des réalisations concrètes fédératrices innovantes, un
engagement militaire mondial moins sélectif et relayer une gouvernance
ESCP
à l’américaine défaillante. Ainsi la BAII (banque asiatique d’investissement
Europe
dans les infrastructures) a été rapidement capitalisée, proposée et acceptée
à des partenaires comme la Grande-Bretagne et elle constitue clairement
une volonté politique de la Chine de contrebalancer les institutions du FMI
et de la banque mondiale. À l’exception des États-Unis, les grands pays

C ORRIGÉ
y ont adhéré et le maillage de la planète par des infrastructures maritimes et
terrestres connues sous le nom de OBOR one belt one road a pu se pour-
suivre pour quelque 100 mds de $ par an. Les États-Unis parlent d’« OPA
chinoise sur le monde » d’autant plus que même les Japonais n’ont pas
attaqué la BAII qui rentrerait dans une logique de coopération plus que de
concurrence avec la BAD (banque asiatique de développement) présidée
par le Japon.
– Le refus de dévaluer le yuan (qui n’empêche pas des corrections) est
recentré sur des objectifs internationaux pour faire de cette devise une
monnaie internationale comme les autres, crédible avec des accords de
swaps avec des pays peu enclins à utiliser le dollar (Venezuela par exemple
Argentine) ou même auprès de banques européennes. Moins politique, le
yuan suit plus les fluctuations des marchés comme la monnaie dominante

HISTOIRE, GÉOGRAPHIE ET GÉOPOLITIQUE


le dollar (encore plus de 65 % des transactions) et la Chine poursuit ses
acquisitions de bons du trésor américains au travers de ses 3 500 mds de $
de liquidités de réserve.
– La Chine peut donner des leçons de gouvernance en opposant au
consensus de Washington le consensus de Pékin échappant aux seules lois
du marché et plus proche des intérêts immédiats des PED. SI le consensus
libéral de Washington égraine des mesures drastiques (dix préceptes qui
résument ce paradigme : discipline budgétaire, bonnes priorités dans les
dépenses publiques (infrastructure, éducation), réformes fiscales, libérali-
sation financière, taux de changes compétitifs, libéralisation commerciale,
ouverture aux investissements étrangers, privatisation des entreprises
publiques, déréglementation, protection des droits de propriété) le consensus
de Pékin titre d’un ouvrage paru aux États-Unis d’ailleurs, et étalonnant la
progression du modèle chinois. Pour F. Lenglet « Exit la privatisation, la libé-
ralisation, la démocratie, valeurs que les États-Unis ont promues, non sans
morgue, pendant des décennies. Bienvenue à l’autoritarisme, à l’étatisme,
au protectionnisme, qui ont fait la fortune de la Chine, dont la trajectoire
éblouissante signe le divorce entre la croissance et la liberté. Il n’y a pas
que les écrans plats et les jouets qui sont "made in China", la doctrine l’est
tout autant : si les idées économiques ont une influence proportionnelle au
taux de croissance qu’elles délivrent, alors nous n’avons pas fini d’entendre
parler du modèle chinois ».
Toutefois deux lectures s’opposent : la Chine se contente-t‑elle de rénover
une gouvernance ou se substitue-t‑elle à une gouvernance néolibérale
S cientifique

imposée par les États-Unis ? Tout paraît installer un affrontement potentiel


États-Unis/Chine (ne parlons pas de 3e guerre mondiale éternelle rengaine
de géopoliticiens en mal de sensationnel).

B. Au-delà des influences et rivalités s’installe un face-à‑face tendu


« L’Amérique d’abord, la Chine première ». Ces deux slogans sont peu
conciliables.

ANNALES CCIR 2018-2019 l 113

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– Pas de fauteuil pour 2 dans les combats internationaux. Lorsque la Chine
a anticipé la Cop21 et attaqué frontalement les gaz à effet de serre, elle avait
ESCP
trouvé les États-Unis pour partager des engagements… Depuis Donald
Europe
Trump les 2 discours sont irréconciliables. Donald Trump ayant d’ailleurs
fait du réchauffement climatique un complot chinois contre les emplois
américains. Désormais et ce n’est pas le moindre des paradoxes, la Chine
devient à la fois un acteur du « air apocalypse » (les gradiants de la pollution
C ORRIGÉ

franchissent allègrement tous les seuils en Chine, 50 % des rivières polluées,
Pékin avait 227 jours seulement d’air de bonne qualité en 2017) mais aussi
un porte parole des énergies renouvelables, des parcs éoliens des villes
écologiques (même si Dongtan est un échec). La Chine est un pays dont
l’autoritarisme peut être utilisé pour interdire la circulation voire la production
sidérurgique un certain temps s’il s’agit de préserver la qualité de l’air. De
même, difficile d’imaginer un consensus sur le numérique puisque Pékin fait
cavalier seul pour contrôler ses sites d’informations et créer une muraille
numérique. « La défense par la Chine de la notion de cybersouveraineté
– qui prône le respect de la souveraineté nationale dans le cyberespace et
va à l’encontre de la libre circulation de l’information – est sans doute l’une
des premières illustrations de la volonté chinoise d’influencer l’évolution de
l’ordre mondial. » S. Colin.
HISTOIRE, GÉOGRAPHIE ET GÉOPOLITIQUE

– Comment ne pas également dire que les priorités ne sont peut-être


porteuses d’un hypothétique partenariat pour les 2 pays. Les États-Unis
tournent le dos à une gouvernance mondiale et font cavaliers seuls en détri-
cotant la politique de B. Obama et les accords internationaux passés ; « Pour
Donald Trump le multilatéralisme ce sont des lilliputiens qui veulent ligoter
le Gulliver américain » (H. Védrine). Les Chinois ont également des priorités
différentes : s’ils s’attachent à corriger les excès du modèle quantitativiste
adopté et derrière « la société harmonieuse » et la disparition du hukou il
y a une volonté de planifier une marche un peu plus crédible vers « une
société développée et ses responsabilités ». La possibilité de Xi Jinping de
prétendre à un mandat à vie et sa pensée érigée au rang de slogans à valeur
constitutionnel le sont là pour sécuriser, stabiliser le régime et asseoir une
influence plus pérenne et singulière. Certes selon la formule de F. Godement
« la Chine veut s’approprier le monde mais ne pas l’administrer ». Donald
Trump pourrait dire la même chose mais il y a une tradition des États-Unis
gendarme du monde, nation responsable qui fixe le cap, « de nation qui
voit plus haut que les autres » (Madeleine Allbright) qui ne peut du jour au
lendemain être abandonnée. C’est ce qui fait dire que le post-américain est
encore devant nous, que le xxie peut être encore américain comme le xxe
l’avait été pour H. Luce, et que le soft power militant américain a encore de
beaux jours devant lui…
– Enfin la Chine ne surjoue-t‑elle pas sa puissance économique et géopo-
litique. À la lecture de Domenach la Chine inquiète depuis des années. En
parcourant Isabelle Attané elle est à bout de souffle avec des inégalités
S cientifique

paroxysmales, une démographie qui plombe ses évolutions (d’ici 2050 son
réservoir de main-d’œuvre perdrait 250 M d’actifs alors que dans le même
temps le nombre de personnes âgées va doubler surpassant à lui seul
la population européenne). Vieille avant d’être riche, le rêve de puissance
émergente peut être écornée. Dans le même temps les États-Unis même
si l’espérance de vie y baisse depuis 2 ans restent portés par une forte
croissance à crédit et les bombes à retardement des crédits étudiants sont
loin d’anticiper un retour à la case crise de 2008.

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C. Un partage du monde se dessine-t‑il au-delà des rivalités ?
– Même si États-Unis et la Chine cohabitent dans l’Apec, ils s’emploient ESCP
parfois à faire valoir de concert leurs thèses face au terrorisme. Il est peu Europe
probable que la situation actuelle milite en faveur d’un partage négocié de
responsabilités. La période de convergence des années Bush n’est qu’un
vague souvenir, chaque acteur voyant aujourd’hui l’influence de son homo-

C ORRIGÉ
logue comme une entrave à ses projets L’étonnante discrétion de la Chine
dans l’évolution du dossier coréen est là pour montrer que les Chinois
ont laissé faire, ont toléré la réinstallation de Kim Jong un dans une légiti-
mité internationale juste pour, par la suite en bénéficier, dans de nouveaux
accords avec la Corée, économiques et militaires et ainsi éviter ce que
craint la Chine par-dessus tout : la réunification de la péninsule coréenne. De
même, la discrétion de la Chine, le débat sur les sanctions à l’encontre de
l’Iran ne s’explique que par la volonté de Pékin de préserver des livraisons
de pétrole plus que de la volonté de proposer une alternative aux injonctions
américaines. La volonté de Donald Trump de mener une bataille contre
l’Union européenne dont il espère le démantèlement autant qu’un rôle d’allié
plus sincère n’a pas interdit l’exacerbation des tensions Chine/États-Unis
avec l’abandon du « pivot asiatique ». Le nombre de produits visés par des

HISTOIRE, GÉOGRAPHIE ET GÉOPOLITIQUE


sanctions ne cesse de progresser et de se diversifier dans leur contenu.
– N’oublions jamais que Xi Jinping veut faire accéder la Chine au statut de
grande puissance et désormais première puissance mondiale. Il ne s’agit pas
pour lui de se contenter de progrès quantitatifs pour partager un leadership
mais de s’affirmer pas ses propres moyens et avec une voie (x) différente.
Sans en être aux tensions extrêmes de 2004 dans le détroit de Taïwan on
ne peut nier que la mer de Chine cristallise toutes les rancœurs surtout
quand Donald Trump se fait le défenseur contre les Chinois de l’avis de
la Cour de Justice internationale sur les Rochers de Liancourt philippins.
On peut raisonnablement penser que les États-Unis et la Chine ne vivent
pas de la même façon les tentatives de Kabila de ne pas transmettre le
pouvoir à son vainqueur légitime car la Chine a des contrats sur le cobalt
et les matières premières qui peuvent difficilement lui faire défaut. Mais les
évolutions sont rapides et surprenantes. « L’asymétrie dans les rapports de
puissance et la prééminence des États-Unis restent dans un avenir prévi-
sible des facteurs de stabilité car elles maintiennent la relation avec ce pays
au sommet des préoccupations de politique étrangère et de sécurité de
la RPC et la forcent quoiqu’elle dise ou laisse dire à brûler ses tentations
belliqueuses en particulier face au Japon, à Taïwan ou en mer de Chine méri-
dionale »… cette conclusion de J.-P. Cabestan qui date de octobre 2015,
n’est-elle pas dépassée ?
– En effet l’actualité récente est marquée par une double évolution celle
des États-Unis qui sont « sans boussole », multiplient des prises de position
contradictoires conforme à ce que Donald Trump croit être une politique du
deal (comparable à celle qui lui a permis de devenir un milliardaire) dont il
S cientifique

sortirait toujours vainqueur. Les Chinois sont eux dans une phase critique
où il va falloir donner un sens à leur puissance. On ne peut être première
puissance exportatrice, en termes de PNB à Parité de Pouvoir d’achat,
sans avoir des finalités claires à cette ascension économique. Le PCC doit
se demander si la légitimité des résultats suffit par rapport à une légitimité
historique et politique de parti libérateur qui commence à être contestée.
Un nationalisme intransigeant et pointilleux comme celui de Xi Jinping peut

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ne pas être la meilleure réponse. Mais quelles que soient les prétentions
de la Chine et des États-Unis, on peut penser que les confrontations sont
ESCP
inévitables ; les rivalités sont et demeureront légions et les influences se
Europe
feront dans un face-à‑face plus qu’elles ne se combineront. L’attention
apportée dans les 2 camps à la modernisation des armées par des budgets
en expansion, des choix forts (marine pour la Chine pour se projeter, armée
de l’espace pour Donald Trump pour gagner face aux Russes et Chinois la
C ORRIGÉ

bataille du ciel) peuvent entraîner des affrontements. Le retour au système


tributaire Ming peut susciter des retours dans le giron américain (alliances
de revers) mais l’imprévisibilité de Donald Trump peut aussi jouer a contrario
(annonce d’un déploiement de défense antimissiles en Corée du Sud tout
en pactisant avec la Corée du Nord).

Conclusion

L’analyse des rivalités et des influences de l’hyperpuissance en déclin


américaine et de la superpuissance en devenir chinoise débouche sur une
question synthétisant les évolutions. Les États-Unis ne sont-ils pas engagés
dans une nouvelle politique de containment pour maintenir leur hégémonie
et brider la Chine comme jadis l’URSS ? Pour Long Guiqiang économiste
HISTOIRE, GÉOGRAPHIE ET GÉOPOLITIQUE

influent du conseil d’État : la « question d’une nouvelle guerre froide se pose ».


La recrudescence des rivalités n’est-elle pas liée à l’aboutissement du « rêve
chinois, “réjuvénation” de la nation selon la rhétorique officielle et de la
grande renaissance nationale » ? au fait qu’abandonnant la réserve de Deng
Xiao Ping (attendre son heure et dissimuler sa force), Xi Jinping a clairement
affirmé que l’ambition de la Chine était d’être au premier rang mondial. Se
découvrant, il exposait la Chine à ce nouveau discours américain. De toute
façon, la Chine ne peut se contenter « de rêver d’être le propriétaire du
monde sans avoir à l’administrer ? » F. Godement circonscrit les enjeux : la
Chine pourra-t‑elle longtemps refuser tout exercice d’une hégémonie en
intervenir militairement au-delà de ses frontières et se contenter dans un
monde chaotique d’une situation proche de celle des Royaumes combat-
tants (ve et iiie siècles avant J.-C.) où aucun ordre ne s’impose et où la Chine
peut tracer sa route sans chercher à imposer un système. Ce « rêve chinois »
est peut-être une façon zélée de se dérober mais jusqu’à quand ?
S cientifique

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S UJET
HISTOIRE, GÉOGRAPHIE ET GÉOPOLITIQUE
DU MONDE CONTEMPORAIN
Durée : 4 heures.

Il sera tenu compte des qualités de plan et d’exposition, ainsi que de


la correction de la langue. ESSEC
Aucun document n’est autorisé. L’utilisation de toute calculatrice et
de tout matériel électronique est interdite.
Si au cours de l’épreuve un candidat repère ce qui lui semble être
une erreur d’énoncé, il la signalera sur sa copie et poursuivra en
expliquant les raisons des initiatives qu’il sera amené à prendre.

S UJET

La construction européenne confrontée à la question de la nation


(1951-2018)

HISTOIRE, GÉOGRAPHIE ET GÉOPOLITIQUE


D OCUMENTS

Remarque importante : les documents et la carte sont destinés à aider à la


réflexion dans le cadre de la dissertation. Ils n’ont pas à faire l’objet d’un
commentaire spécifique.

Document 1. Chronologie indicative sommaire

1951 : le traité instituant la CECA crée une Haute Autorité pour le charbon
et l’acier
1965-1966 : De Gaulle pratique la « politique de la chaise vide » à Bruxelles
1973 : accords d’Helsinki
1979 : sommet européen de Dublin ; Margaret Thatcher affirme « I want my
money back »
1985 : premiers accords initiant la Convention de Schengen
1990 : réunification allemande
1991 : le Conseil de l’Europe adopte une « convention cadre pour la protec-
tion des minorités nationales »
1992 : le Conseil de l’Europe adopte la « Charte européenne des langues
régionales et minoritaires » (signée mais non ratifiée par la France)
S cientifique

1993 : les « critères de Copenhague » précisent les conditions selon lesquelles


les pays d’Europe centrale et Orientale pourront devenir membres de l’Union
européenne
1999 : l’Euro devient la monnaie unique de onze pays européens
2005 : « non » français et néerlandais au projet de Constitution européenne
2008 : le Kosovo déclare son indépendance ; l’UE lui reconnaît le statut de
« candidat potentiel » pour un futur élargissement de l’Union européenne

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S UJET

2013-2014 : crise ukrainienne et annexion de la Crimée par la Russie


2016 : référendum sur le maintien du Royaume-Uni dans l’Union européenne
2017 : le Parlement de Catalogne vote la proclamation de l’indépendance
de la « République catalane »

Document 2. Jürgen Habermas, Le Monde, 25.02.2014


ESSEC
Pour une démocratie supranationale demeurant ancrée dans des États-
nations, nous n’avons besoin d’aucun « peuple européen », mais d’individus
éclairés, ayant appris qu’ils sont à la fois, réunis en de mêmes personnes,
citoyens d’un État et citoyens européens. Ces citoyens peuvent tout à fait,
en participant à leurs vies publiques nationales respectives, participer à une
formation de la volonté politique à l’échelle de l’Europe entière.

Document 3. Michel Foucher, L’Obsession des frontières, Perrin, 2007

La réorganisation géopolitique du continent [européen] après l’effacement


de la méta-frontière stratégique et idéologique [le rideau de fer] a rendu
possible une reconfiguration en Europe (…). Après avoir provoqué l’éclate-
ment des ensembles fédéraux, la bifurcation de 1989 a été immédiatement
HISTOIRE, GÉOGRAPHIE ET GÉOPOLITIQUE

encadrée par l’aspiration d’un « retour en Europe » des nations émancipées.


La double adhésion à l’Union européenne et à l’Alliance atlantique imposait
une condition préalable impérative : la signature de traités bilatéraux assurant
la reconnaissance mutuelle des frontières héritées et garantissant les droits
démocratiques des minorités nationales.

Document n° 4. Alain Duhamel, « La montée des nationalismes »,


Libération, 19.02.2014

Nous voici de nouveau face à une montée des nationalismes. Après un


demi-siècle de construction d’une Europe démocratique, pacifique, acquise
à l’économie de marché, voici depuis une décennie un mouvement inverse
qui se produit. L’Europe est menacée de déconstruction. (…) Ses échecs
et ses déceptions ne doivent cependant pas faire perdre de vue l’essen-
tiel. Même si l’Europe a dissous son élan initial dans la crise, elle est par
nature, elle reste aujourd’hui le principal rempart face à des nationalismes
qui ont crucifié les peuples européens durant des siècles et qui effectuent
aujourd’hui leur éternel retour.

Document n° 5 (texte et carte). L. Davezies et Ph. Rekacewicz,


« Régions contre États-nations », Le Monde diplomatique, février 2004

« La montée en puissance de l’Europe contribue à affaiblir les États-nations


qui la constituent et à attiser revendications autonomistes et conflits régio-
S cientifique

naux. Ceux-ci, qui n’ont pas tous une expression violente, peuvent se
diviser entre les « conflits pré-nationaux » qui sont anciens et liés au non-
achèvement des nations européennes, et les « conflits post-nationaux, qui
anticipent un achèvement de l’Europe. »

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S UJET
ESSEC

HISTOIRE, GÉOGRAPHIE ET GÉOPOLITIQUE


S cientifique

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ESSEC
C
ORRIGÉ
Par Alain Nonjon, professeur de chaire supérieure.

Introduction
C ORRIGÉ

La construction européenne dans sa trajectoire depuis la création de la


CECA en 1951, la mise en place d’un marché commun à 6 au traité de
Rome, la création d’une communauté européenne en 1992, la dynamique
d’élargissement à l’Est (2004) jusqu’à l’apparition d’un risque de dislocation
en 2018 est hantée par la « question de la nation ». Existe-t‑il une nation euro-
péenne si on définit la nation comme une communauté d’hommes distincte
ayant conscience de leur unité, de leur identité collective et voulant vivre
ensemble, dans chaque pays respectif. Mais aussi y a-t‑il compatibilité
entre le projet initial européen fédéraliste et le respect des États-nations ?
C’est aux deux extrêmes de la période que la question a été la plus d’ac-
tualité : dans les années 1950-1960, quand avaient lieu les débats sur la
supranationalité de la CECA (et qu’on débattait du contenu minimal d’une
Europe politique – plan Fouchet 1961) et, dans la dernière décennie, quand
HISTOIRE, GÉOGRAPHIE ET GÉOPOLITIQUE

la construction post-nationale la plus aboutie, l’Union européenne, se heurte


au retour en force des nationalismes et des populismes qui instrumentalisent
les déficits de l’Union européenne (notamment démocratiques et redistri-
butifs) pour en faire la trame d’une dislocation programmée de l’Europe
(Brexit 2016).
Toute l’histoire de la construction européenne se résume-t‑elle à une ques-
tion : comment des nations souveraines pourraient envisager de déléguer
tout ou partie de leur prérogative pour exister sur le plan international,
à une institution d’un type nouveau qui représente une valeur et des valeurs
communes et une puissance ajoutée pour tous ? Question délicate qui reçoit
des réponses à géométrie variable en fonction des conjonctures, des événe-
ments extérieurs, des alternances politiques, et de leadership.

I. L’Europe jusqu’aux années 1970 paraît paradoxalement au chevet des


« États-nations » mais aussi perçue comme construction post-nationale

A. L’Union européenne est porteuse d’un projet de paix entre les nations
– La construction européenne n’a de cesse d’éloigner les guerres fratri-
cides  des États-nations (1914/1918, 1940/1945 = aboutissements de
23 guerres franco-allemandes) et de dépasser le souvenir traumatisant
d’une « Europe grand espace de l’État national socialiste » (Josef Goebbels).
« L’Europe n’a pas été faite, nous avons eu la guerre » (Robert Schuman).
Elle est animée d’un désir de paix (Robert Cooper la définit comme « un
empire coopératif dédié à la démocratie, à la liberté… et à la paix »). Elle se
S cientifique

légitimise souvent jusqu’à aujourd’hui, du moins par la paix aux yeux des
Européens.
– L’Europe veut croire au « doux commerce » (Montesquieu « l’effet naturel
du commerce est de porter à la paix ») qui élimine le thumos avec son statut
de puissance commerciale : l’Europe est une puissance statistique plus
que militaire… La force de l’Europe est son marché de plus de 500 millions
de consommateurs et ses capacités commerciales (30 % du commerce

120 l ANNALES CCIR 2018-2019

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mondial). L’Europe veut croire à la générosité, au soft power : c’est un
« empire normatif » (Zaki Laïdi), une façon d’expurger le risque de guerre
entre nations. ESSEC
– Les guerres balkaniques n’ont pas empêché l’adhésion progressive de
certains États balkaniques avec de francs succès comme la Slovénie. Et
l’Union européenne a mis tout son poids dans le TPI (Slobodan Milošević).
Dans le même sens, l’adhésion des pays du CAEM s’est faite sans trauma

C ORRIGÉ
particulier pour ces États respectés dans leur identité, leur pluralisme, leur
convergence : avec l’Europe, l’Est retrouve un « occident kidnappé » pour
Vaclav Havel et l’Europe consolide la partition ou le divorce de velours entre
la République tchèque et la Slovaquie.

B. L’Union européenne peut apparaître initialement – surtout au regard


d’aujourd’hui – surtout comme un véritable « sauvetage européen »
de l’État-nation
– La construction européenne offre certaines garanties aux États-nations : un
label démocratique (conseil de l’Europe), un respect des différences (Europe
et langues régionales), des moyens de pression collectifs qui servent les
intérêts particuliers (approvisionnements énergétiques avec la Russie, avec
l’apparente garantie d’un partenariat oriental stratégique, NCM conduites

HISTOIRE, GÉOGRAPHIE ET GÉOPOLITIQUE


en respectant des spécificités nationales : ex des paysans français après la
renégociation de Blair House). Pour J. Monnet, le mouvement était garant
de plus d’intégration mais au bénéfice des États. Pour R. Schuman, « La
communauté européenne doit créer l’ambiance pour une compréhension
mutuelle, dans le respect des particularités de chacun ; elle sera la base
solide d’une coopération féconde et pacifique. Ainsi s’édifiera une Europe
nouvelle, prospère et indépendante » (1950).
– Les politiques structurelles adoptées renforcent au départ les membres de
la communauté européenne. La PAC permet de réformer les structures et de
spécialiser des agriculteurs dans un pays comme la France qui a toujours
privilégié une politique des prix. L’autosuffisance alimentaire de l’Europe
en 1972 est à cet égard un succès. L’Europe est vue comme un « multipli-
cateur de puissance », un accélérateur de concentrations dans l’industrie, de
coopérations fructueuses (Euréka, Erasmus). Ce, d’autant plus, que les États
membres gardent très longtemps leur pouvoir de décision, leurs domaines
réservés : ils sont les « seigneurs des traités », surtout avec la règle de l’una-
nimité dans certains domaines précis stratégiques.
– De toute façon, l’Union européenne n’est que le produit des décisions et
des volontés des États qui, à tout moment, ont pu exprimer leurs craintes
(la France et la règle de l’unanimité), leur originalité (la Grande-Bretagne
et le peak and choice avec les aménagements de Fontainebleau en 1984),
leur rythme (l’Europe à géométrie variable) au risque même de dénaturer la
finalité de la construction (Europe à la carte ou Europe auberge espagnole
où chacun trouve ce qu’il apporte). Il est pourtant vrai que les peuples ont
S cientifique

été de moins en moins consultés (depuis le premier élargissement et ce


alors que l’UE passait de 9 à 28 membres). Ni la Grèce (1981), ni l’Espagne
ou le Portugal (1986) n’ont organisé de référendum. Trois pays qui sortaient
d’une dictature il est vrai…

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C. Mais la construction européenne est arrimée à un projet
d’inspiration fédéraliste susceptible de dissoudre les États-nations
ESSEC
– Le projet européen est issu de quatre démarches a priori peu recevables
pour les chantres d’États-nations fort dans sa souveraineté et son identité :
1) une démarche américaine pour éviter la soviétisation du continent avec
mise sous tutelle plus ou moins directe (plan Marshall, UEO, OECE, UEP) ;
C ORRIGÉ

2) une démarche de J. Monnet pour créer les États unis d’Europe, un projet
collectif peu apte à conforter les puissances nationales ;
3) une démarche des pères fondateurs pour instaurer la paix via « le mariage
des peuples » selon l’expression de Ernst Jünger, créer une communauté
de destin entre les peuples de l’Ouest en utilisant l’économie comme pivot
pour contourner les obstacles politiques, mais avec pour objectif une Europe
fédérale ;
4) une identification des valeurs européennes progressivement matérialisée
par un hymne européen, un drapeau européen et très tard une monnaie
européenne !
5) La démarche de « construction d’ensemble » projetée par R. Schuman
apparaît certes effacer les conflits mais aussi marginaliser le rôle des États
– définis comme autorité unique et souveraine qui s’étend sur un territoire
HISTOIRE, GÉOGRAPHIE ET GÉOPOLITIQUE

délimité par des frontières. La création d’institutions non élues au suffrage


universel, et le transfert de pans de souveraineté malgré les règles de subsi-
diarité font rapidement craindre une dilution des États-nations (abandon de
fonctions régaliennes : impôts, monnaie, et après Maastricht une politique
étrangère et défense). La démarche fonctionnaliste initiée à partir de la décla-
ration Schuman prévaut : celle qui veut qu’une Europe politique et fédérale
ne peut résulter que d’une Europe économique. En créant des institutions
fonctionnelles dans des domaines économiques limités, on crée des soli-
darités, on élargit les domaines d’intervention et de coopération, et par un
effet d’entraînement (spill-over effect), les autorités intégrées se substituent
progressivement aux États et l’Europe fédérale est l’aboutissement de ce
processus. L’idée d’une Europe fédérale est au cœur du projet de CED,
en échec en 1954, dont l’article 38 prévoyait la constitution à terme d’une
Europe fédérale ou confédérale.
– Des rapports Tindemans (1975) et Spinelli (1984) parmi tant d’autres sont
clairement orientés vers une supranationalité :
1) le rapport Tindemans avec le renforcement du Parlement européen qu’il
espère élu au suffrage universel, l’extension du vote majoritaire au Conseil,
l’élargissement des compétences de la Communauté européenne dans les
domaines monétaires, énergétiques, sociaux et régionaux, et, en matière
de politique étrangère, l’obligation juridique des États membres de parvenir
à une position commune, éventuellement par recours au système majoritaire.
2) C’est le même esprit dans le rapport Spinelli, dont l’idée de base est la
création d’une assemblée constituante pour que l’Europe se dote d’une
vraie constitution. Le Parlement européen aurait joué un rôle majeur dans
S cientifique

l’élaboration de ce texte avec la volonté de court-circuiter l’influence des


États membres. Et en bout de ligne un gouvernement supranational. Cette
démarche fédéraliste s’appuie sur la conviction qu’il existe des valeurs euro-
péennes, une exception culturelle qui la protège. Pour Tzetan Todorov :
rationalité, justice, démocratie, liberté individuelle, laïcité, tolérance, pensée
critique, doute, vertus philosophiques qui rendent les Européens toujours
insatisfaits de l’état des choses à la différence des Américains. (NB : cette

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identité est cependant ouverte, mouvante, construite et renouvelée dans le
sens d’une bien plus grande diversité : nouveaux peuples, nouvelles langues,
passés différents.) ESSEC
L’Europe a parfois créé les conditions pour être vécue comme contraire
aux États-nations. Pour Béatrice Giblin (Le paradoxe français), l’Europe
a été l’aiguillon des nationalismes régionaux français « quand elle donnait
l’impression de favoriser les régions pour affaiblir les États-nations, plus

C ORRIGÉ
préoccupés de la défense de leurs intérêts nationaux que de faire avancer
l’Union européenne » (Maastricht crée même un comité des régions consul-
tatif et on parle de plus en plus de l’Europe des régions). La défense des
langues régionales va dans le même sens. De là, les oppositions précoces
du général de Gaulle à tout fédéralisme, à toute mutualisation de souve-
raineté dans le cadre d’une Europe politique. La France se veut favorable
à une simple coopération intergouvernementale (plans Fouchet 1961-1963),
dont l’objet principal soit avant tout la coopération en matière de défense,
d’affaires étrangères, de coopération scientifique et technique, alors que les
cinq autres pays membres de la CEE sont favorables à l’octroi de compé-
tences politiques. La France ne cesse de proclamer sa volonté de concevoir
la construction européenne comme un « levier d’Archimède de la France »
et de Gaulle précise : « J’entends une Europe formée d’hommes libres et

HISTOIRE, GÉOGRAPHIE ET GÉOPOLITIQUE


d’États indépendants, organisée en un tout susceptible de contenir toute
prétention éventuelle à l’hégémonie et d’établir entre les deux masses rivales
l’élément d’équilibre dont la paix ne se passera pas. » Le cadre limitatif d’une
Europe en tant que fédération d’États-nations est bel et bien fixé.

II. L’Europe, dès la décennie 1980, organise une somme de transferts


ou de pertes de souveraineté symboliques d’un dépérissement
potentiel des États-nations

A. Les fondamentaux européens libéraux et monétaristes interpellés


– Le grand marché libéral créé en 1993 est vécu comme porteur de dérégle-
mentations excessives, de dévaluation des frontières (Schengen), d’agression
contre des systèmes sociaux nationaux (amendement Bolkestein dit « du
plombier polonais » adopté en 2006 en faisant l’impasse sur les risques
de dumping social et ultérieurement des travailleurs détachés). Au travers
de la radicalité de certaines expériences libérales (Thatchérisme) et sans
prendre en compte une troisième voie possible entre libéralisme sauvage et
étatisme figé, les eurosceptiques font du grand marché l’acte de décès des
États-nations. Les trois piliers de Maastricht sont autant d’abandons partiels
de souveraineté provoquant d’ailleurs des votes d’adhésion très timides (le
oui français en 1993). L’Europe aurait été bâtie non pour les peuples, mais
pour les entreprises, et l’abolition des frontières se fait au service d’une
mondialisation débridée. Le procès en ultralibéralisme de l’Europe est vite
S cientifique

intenté : l’Europe, championne du libre-échange avec 90 % de marchés


publics ouverts à la concurrence contre 32 % aux États-Unis et 28 % au
Canada, est réduite à une UE incapable de contrer la déferlante chinoise
depuis l’adhésion de la Chine à l’OMC. Les négociations du TTIP et du CETA
sont l’occasion de critiques sur des intérêts nationaux environnementaux
bradés sur l’autel du profit.
– La monnaie unique est assimilée à l’installation d’une « Europe allemande »
(le IVe Reich), l’ordolibéralisme antinature pour certains États jacobins

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centralisateurs et interventionnistes est l’expression d’un mark fort et d’un
diktat allemand. Le pacte de stabilité et de croissance est vécu comme un
ESSEC carcan imposé (déficit public = 3 % du PIB, dette 80 % du PIB) et bloquant
toute marge de manœuvre de relance. Comme le souligne le sociologue
Wolfgang Streek, « l’Allemagne en est arrivée à tenir l’Union européenne
pour une extension d’elle-même, où ce qui est bon pour l’Allemagne est par
définition bon pour les autres (…). Proches en cela des États-Unis, les élites
C ORRIGÉ

allemandes projettent ce qu’elles estiment évident, naturel et raisonnable sur


leur monde extérieur, et s’étonnent que l’on puisse voir le monde autrement
qu’elles. »
– L’Atlantisme de l’Europe dans l’attente d’une Europe de la défense est
critiqué car il la positionne comme subdéléguée des États-Unis au grand
dam de ceux qui ont œuvré pour des choix de défense autonome (cf. le
nucléaire français). Les valeurs spécifiques de chaque État-nation – défini
comme un État-nation – est un État dont les frontières englobent une popu-
lation formant une même nation. Ne se diluent-elles pas dans un Occident
coalisé sous la houlette des États-Unis ? C’est une inquiétude récurrente
des souverainistes.
– Les « dérives » d’une Europe de plus en plus éloignée des citoyens servent
de réquisitoires anti européens contre un pouvoir lointain, apatride, tech-
HISTOIRE, GÉOGRAPHIE ET GÉOPOLITIQUE

nocratique : le « Moloch bureaucratique » de Bruxelles (Helmut Kohl), « la


commission hors sol » (Jean Quatremerr, L’Europe des salauds) vécue
comme une administration supranationale à défaut d’être un gouvernement,
33 000 eurocrates non élus, imposant leur loi à 500 millions de citoyens
de 28 États avec leurs injonctions absurdes et tatillonnes décalées, des
affaires dans un milieu où greed is good, des conflits d’intérêts potentiels
(José Manuel Barroso chez Goldman Sachs), des crises (démission de la
commission Santer où on confondait gestion administrative et innovation
dans les politiques structurelles et intérêts privés) ne peuvent que créer de
multiples crispations des États-nations. La chaise vide et le compromis du
Luxembourg sont les premiers actes de résistance d’États-nations face à la
supranationalité. Les votes négatifs à Maastricht, les votes négatifs au traité
constitutionnel (France en 2005 et à toute démarche d’approfondissement
du traité de Lisbonne, Irlande, Danemark) montrent que nombreux sont ceux
qui pensent que l’UE ne se détermine qu’en fonction de la mondialisation,
des Nations unies ou de l’Occident et donc doit être rejetée.

B. Les contours indéfinis du projet européen renforcent les suspicions


– L’Europe : « une formidable espérance, un destin partagé, une ambition
pour tous » (Pascal Lamy) difficile à borner. La question des frontières se
pose : jusqu’où ? De l’Atlantique à l’Oural ? Une question qui a permis de
croire un moment à une intégration de la Géorgie et de l’Ukraine au risque
de provoquer la Russie et de légitimer la guerre de 2008 en Ossétie et l’an-
nexion de la Crimée. La Turquie est de moins en moins européocompatible
par ses valeurs et sa gestion du « problème kurde » et ses dérives vers un
S cientifique

nouveau sultanat.
Quelle Europe ? Le débat n’est jamais clos entre les institutionnalistes,
soucieux d’aller le plus vite possible vers une Constitution, et les fonction-
nalistes, qui veulent une Europe des petits pas, progressive par secteurs
bien balisés.
– Quel objectif ? Une fédération ? Une confédération ? Une fédération
d’États-nations ? Quel degré de subsidiarité ? Les débats sur les transferts

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de souveraineté partiels sont permanents avec des crises comme l’appel de
Cochin (Jacques Chirac face à Valérie Giscard d’Estaing qu’il accuse d’être
« vendu au parti de l’étranger » pour des transferts monétaires à un FME). ESSEC
L’aménagement de représentations équilibrées (traités de Nice) donne lieu
à des bras de fer entre États (le couple franco-allemand et les petits États).
L’hétérogénéité des États-nations complexifie la possibilité de consensus.
La France est ainsi considérée comme l’un des plus anciens États-Nations.

C ORRIGÉ
Le peuple français est un et toute référence à un peuple corse ou guyanais
peut heurter ainsi le sentiment d’identité nationale. L’Espagne par contre
reconnaît trois autres nations : la Catalogne, le Pays basque et la Galice aux
côtés de la nation espagnole. La Grande-Bretagne rassemble de même
diverses nations (Angleterre, Écosse, Irlande du Nord, Pays de Galles…).
– « Objet juridique non identifié », l’Union est aussi, suivant la formule de
Jacques Delors, un « objet politique non identifié ». Le concept de commu-
nauté donc prévaut mais sans contenu balisé et, même s’il permet à l’Union
européenne d’exercer son rôle international de puissance douce normative,
il est loin de mettre fin au débat entre fédéralisme ou fédération d’États-
nations, ou simple marché libéral qui hante l’Union européenne. Jacques
Delors résumait le dilemme ainsi : « l’Union européenne est une Ferrari dotée
d’un moteur de 2CV » (et la voiture est conduite par 22 États qui ne sont pas

HISTOIRE, GÉOGRAPHIE ET GÉOPOLITIQUE


d’accord sur la destination et la vitesse rajoute Jean Quatremer). En 60 ans
donc et 7 traités proposés il n’y a toujours pas de construction d’ensemble
dégagée conformément aux vœux de R. Schuman en 1950.
– Pour Maxime Lefebvre (L’Europe et les nations), « Les formules du fédé-
ralisme initié avec l’euro (monnaie unique et pas commune), et la Cour de
Justice ne sont pas adaptées », car chaque État membre est attaché à sa
souveraineté, garante de la liberté collective et de l’identité particulière de
la nation qu’il incarne. « La formule confédérale est quant à elle trop faible »
pour créer une identité commune, sans être une transition vers la fédéra-
tion ou vers la désintégration, qui a été crainte sous les coups de boutoirs
de la Grande-Bretagne dès 1975 et réactivée par les réponses possibles
aux crises des dettes souveraines. Les débats sur la finalité de l’Europe
sont-ils vraiment nécessaires ? Pour Jürgen Habermas, même « aux yeux
du porte-parole de la Deutsche Bank, […] le débat entre les partisans de la
confédération d’États et de l’État fédéral est académique » et on rappellera
volontiers Winston Churchill « il faut se méfier de l’innovation inutile, surtout
si elle résulte d’un raisonnement dans l’abstrait ».

C. Des évolutions et des raccourcis qui crispent des néonationalismes


frileux
– L’Europe est-elle condamnée à une fuite en avant avec les élargissements,
donc à terme à une obésité qui l’empêche d’avancer ? Charles de Gaulle
réclamait en son temps (adhésion rejetée de la Grande-Bretagne) un ordre
strict « se consolider, s’approfondir avant que de s’élargir ». Une façon de
S cientifique

préserver une Europe à la française face aux Britanniques.


L’Europe à plusieurs vitesses, en cercles ou à la carte n’est-elle pas une
conséquence d’adhésions de confort plus que de convictions ? Et une façon
de faire prévaloir des intérêts nationaux ?
L’Europe, super-État intrusif, ne procède-t‑elle pas d’une volonté d’imposer
sa loi aux États et n’est-elle pas une Europe allemande ? Autant de questions
qui malmènent la réalité mais qui sont fréquemment posées.

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– Les stigmatisations de l’Europe se multiplient au rythme des progrès des
eurosceptiques. L’UE corsèterait les budgets dans les normes du pacte de
ESSEC stabilité même si cela n’a pas empêché la France d’enfreindre les normes
du déficit budgétaire sans discontinuer depuis 2002 (sauf en 2006 et 2007).
L’Europe impose un diktat fiscal même si les États gardent la main sur la
fiscalité directe, et l’harmonisation de la TVA est plus que difficile. La propor-
tion du droit communautaire envahit les droits nationaux (part comprise
C ORRIGÉ

entre 60 et 70 % des textes nouveaux dans tous les États membres et
elle est vécue comme une confiscation des responsabilités des parlements
nationaux). Pourtant, sur vingt ans, la proportion de lois venant de Bruxelles
s’établit à 20 % (12 % en France et 35 % en Espagne) avec une tendance
à une diminution en dépit des compétences nouvelles.
– Les clichés sur l’Union européenne et l’opacité du fonctionnement de
l’Union européenne nourrissent les rancœurs.
L’Union européenne, ce serait avant tout des règles de rang supranational,
c’est-à‑dire qui surplombent et encadrent l’action des États-membres et
qui ne seraient pas respectées, donc l’Union européenne n’existerait pas…
Un raisonnement qui exclue les effets de modernisation, de rationalisation,
de convergence des économies européennes depuis 1957.
L’Union européenne serait une zone de libre-échange sauvage ? Elle est
HISTOIRE, GÉOGRAPHIE ET GÉOPOLITIQUE

plutôt une zone de libre-échange organisée, rien de plus. Selon Jean-Louis


Bourlanges, 98 % des financements des politiques restent nationaux (éduca-
tion, aménagement du territoire, recherche, droit du travail…).
L’Union européenne dépouillerait les parlements nationaux de leurs préro-
gatives ? C’est oublier le rôle des COSAC depuis 1989, c’est-à‑dire la
réunion périodique des organes des parlements spécialisés dans les affaires
européennes.
L’Union européenne prendrait des mesures ridicules (affaire Findus) en fonc-
tion d’une pseudo-norme communautaire sur l’interdiction de la circulation
de carrioles tirées par des chevaux sur les routes nationales, ce qui auraient
conduit les équidés à l’abattoir (pur fantasme !).
L’Union européenne interdirait les aides nationales : en 2014, 101 milliards
d’euros ont été autorisés dont 15,5 pour la France et seul 1,8 milliard d’euros
a été jugé illégal.
L’Union européenne serait une passoire mais, depuis 2016 et après trois ans
de blocage, les États membres ont décidé d’augmenter fortement les droits
antidumping et antisubvention.
– Cependant, ces caricatures de l’Europe se sont installées car l’Union euro-
péenne n’est pas pédagogue, pas assez proche des citoyens, peu encline
à clarifier, expliquer ses dysfonctionnements comme ses fonctionnements.

III. L’Europe est de plus en plus bousculée par la question de la nation

Se peut-il que l’Union entrave les États sans leur apporter aucune puissance
S cientifique

collective ajoutée ?

A. Le réquisitoire des néonationalismes


– Les populismes, les néonationalismes effectuent leur retour. Pour Bertrand
Badie, « Le néonationalisme d’aujourd’hui, c’est la privation du droit des
autres, c’est le repli et l’enfermement » et il n’est pas étranger à la contes-
tation de la mondialisation. L’Europe est un bouc émissaire commode.

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Les apôtres de la démondialisation, de l’anti-mondialisme ou d’un simple
patriotisme économique font de l’Europe une actrice condamnée à cause de
sa passivité (pas de préférence industrielle, pas assez de protection). Elles ESSEC
se nourrissent de la critique de l’Europe pour prospérer en Italie (mouve-
ment 5 étoiles) en Allemagne (Alternative à l’Europe), en Hongrie (Jobik),
en Grande-Bretagne (Ukip) ou contribuer au rassemblement national en
France. Ils désignent tous leur cible : l’UE est contraire aux intérêts natio-

C ORRIGÉ
naux. D’ailleurs, le non-respect des règles édictées par l’UE viendrait du
fait qu’elles sont inadaptées à des cas nationaux. Par exemple, l’Irlande et
le Luxembourg transgressent les règles de la concurrence non faussée en
pratiquant de longue date un dumping fiscal agressif ; les pays d’Europe du
Sud, victimes de la crise et d’une désindustrialisation accélérée transgressent
les règles du Pacte budgétaire ; l’Allemagne, qui doit faire face au défi du
vieillissement de sa population, dégage une épargne incompatible avec les
équilibres macroéconomiques de la zone euro et fait fi du ratio maximal
d’excédent courant autorisé par Bruxelles. Enfin, les pays d’Europe centrale,
qui ont dû faire face à l’afflux de centaines de milliers de migrants en 2015,
ont également transgressé de nombreuses règles sur la libre circulation des
personnes et l’accueil des réfugiés dans l’espace Schengen.
– Les agressions (caricaturées) contre les États-nations, relayées par l’Union

HISTOIRE, GÉOGRAPHIE ET GÉOPOLITIQUE


européenne, sont de plus en plus identifiées : immigration quand l’UE adopte
des clés de répartition calculées à partir de quatre critères (PIB, popula-
tion, taux de chômage et nombre d’asiles déjà accordés). L’adoption de
ce règlement à la majorité qualifiée heurte les pays de l’Est (la Hongrie va
jusqu’à un référendum en octobre 2016 où seule la participation insuffisante
ne permet pas une validation). Face à la « polycrise » de 2008 (économique,
institutionnelle et de projet), les failles de la solidarité sont légions et la polé-
mique sur le retour sur investissement des banques qui ont prêté à la Grèce
en faillite soulève l’insolence des intérêts particuliers et sonne le réveil des
égoïsmes nationaux. La mondialisation s’accélérant, il y a une accélération
des tribalismes et des replis : « Un peu d’internationalisme éloigne de la patrie,
beaucoup y ramènent » (Jean Jaurès).
– Le catalogue des impuissances de l’Europe sert de réquisitoire : face à la
finance (optimisation fiscale toujours possible malgré les menaces sur les
Gafa et les contradictions de la politique anti-paradis fiscaux, en oubliant
Londres), face au terrorisme (atermoiements du PNR dans le transport
aérien), face aux menaces de tous ordres (migrations économiques sahé-
liennes accrues et déstabilisation de la périphérie méditerranéenne en cours
à partir du trou noir libyen dans lequel l’Europe a quelques responsabilités).
Les nationalismes se ressourcent dans un euroscepticisme qui est de plus
en plus rythmé par les abstentions aux élections, les joutes au Parlement
européen, les menaces d’ostracisation de certains pays (Hongrie, Pologne,
Grèce pour des raisons soit de libertés fondamentales, soit d’inconséquences
économiques).
S cientifique

B. La dislocation de l’Union européenne, et le retour aux cloisonnements


des États-nations instrumentalisés par des populismes
– En 2016, le Brexit est plus qu’une énième incartade britannique. Il ouvre
une crise de légitimité de l’Union européenne : il coalise une nébuleuse d’in-
térêts acharnés à démontrer ce que coûte l’Union européenne : durant toute
la campagne, un argument majeur du camp du « Leave » était de promettre

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qu’en cas de « Brexit » les 350 millions de livres sterling (435 millions d’euros)
qui étaient envoyées chaque semaine pour le budget de l’Union européenne
ESSEC seraient utilisées pour financer la NHS, le système de santé publique du
Royaume-Uni. Ce retrait du Royaume-Uni se fait contre la City, contre l’avis
du Premier ministre en place qui pensait avoir négocié des conditions plus
favorables au maintien. En 1975, déjà, la Grande-Bretagne ne voulait pas
suivre le régime général et exigeait des dérogations qui pouvaient mettre
C ORRIGÉ

en péril la dynamique communautaire. Mais cette fois avec un coût de 50 à


100 milliards d’euros, d’ici à mars 2019, la sortie paraît quasi (malgré Tony
Blair) irréversible.
– L’effet domino menace : face à l’effet d’aubaine du Brexit et des aspirations
catalanes, combien de régionalismes vont prendre le relai ? Le Pays Basque
ramené dans le giron par la répression ? Les revendications padanes de la
ligue du Nord allant jusqu’à un sécessionnisme en Italie ? Et celles des iden-
titaires corses ou d’indépendance du Parti bavarois ?… À porter son regard
sur la carte des fractures européennes, on se demande où sont encore les
lignes de force des convergences ? La balkanisation est-elle programmée ?
Et que dire lorsque des régions peuvent bloquer des choix européens ? Par
exemple quand, à l’initiative du social-démocrate Paul Magnette, la Wallonie
paralyse pendant plusieurs jours la signature du traité CETA, l’accord de
HISTOIRE, GÉOGRAPHIE ET GÉOPOLITIQUE

libre-échange entre l’Union européenne et le Canada. (Les Wallons ont fini


par obtenir ce qu’ils attendaient de l’État fédéral belge.)
– Les nationalismes servent de prétexte. Certains pays européens y trouvent
un moyen de transgresser des évolutions européennes : remise en cause
de Schengen, frontières matérielles renforcées, dissidences…
– La Russie elle-même exploite les nationalismes pour défaire de l’exté-
rieur l’Europe. En réclamant un fédéralisme ukrainien plus respectueux des
droits des minorités et des spécificités de certains territoires (Donbass),
en accélérant le processus de réintégration de la Crimée, Vladimir Poutine
poursuit son rêve de déconstruction de l’Europe. Sans ambiguïté, Françoise
Thom (Comprendre le poutinisme, 2018) formule ce constat sans appel :
« À Moscou, on se prend à rêver de réintégrer autour de Moscou l’espace
ex-soviétique mais aussi de récupérer les États européens lorsque l’Union
européenne aura achevé de se défaire et lorsque les partis souverainistes
pro-russes en plein essor auront pris le pouvoir en Europe. On espère que
cette mainmise sur l’Europe occidentale dans le cadre du grand partenariat
eurasien résoudra les éternels problèmes d’intendance de la Russie. »

C. La construction européenne est-elle encore à l’heure des choix ?


– Il n’y a pas à être étonné des évolutions en cours. Dès le départ, les débats
sur la nature de l’Europe et le degré d’intégration ont divisé. Très tôt des
États membres, l’Allemagne depuis toujours, l’Allemagne depuis la réunifi-
cation (1990), ont semblé regarder bien au-delà de l’Union. Ils ne sont pas
au service de l’Europe, mais s’en sont servi comme outil marchand, comme
S cientifique

une zone de libre-échange. D’autres ont vu dans la générosité de l’Europe


une parade à leur gestion laxiste (Grèce). Les nouveaux membres ont été
certes attirés par la prospérité de l’Union, mais aussi et peut-être d’abord par
la prétendue garantie de sécurité que leur apportait l’OTAN. L’impuissance
militaire, l’inconsistance diplomatique de l’Union conviennent également
à ceux qui se contentent du supposé bouclier américain face aux grandes
peurs du passé et au retour de l’histoire : c’est le cas des Pays baltes qui

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voient la Russie de plus en plus comme une menace (russophones, livraisons
énergétiques, manœuvres militaires). « Les différences entre la latinité et la
germanité, entre le nord et le sud, entre l’est et l’ouest, entre les grands et les ESSEC
petits pays sont toujours bien présentes malgré l’approfondissement de la
construction européenne depuis plus d’un demi-siècle. » (Maxime Lefebvre,
op. cit.)
– La question des réformes des institutions et du fonctionnement de l’UE

C ORRIGÉ
se pose de plus en plus. Certains dans leur ivresse de changement et de
rupture rappellent un peu les propositions cyniques et dérisoires de Bertolt
Brecht au lendemain des émeutes de Berlin en 1953 : « ne serait-il pas plus
simple alors pour le gouvernement de dissoudre le peuple et d’en élire
un autre ? » D’autres tentent de reconstruire une gouvernance européenne
capable de davantage prendre en compte la pluralité des intérêts en jeu
et de redonner confiance en l’Europe. Le président français, Emmanuel
Macron, a jeté les pistes d’une réflexion sur une relance de la construction
européenne. Renforcer l’axe franco-allemand, créer un budget de la zone
euro et des listes transnationales aux Européennes, harmoniser les fisca-
lités sur les sociétés pour éviter les dumping entre pays, élargir Erasmus
et construire une Europe de la défense. L’ampleur de la tâche, pas encore
validée par Angela Merkel, situe à elle seule les difficultés de l’Europe.

HISTOIRE, GÉOGRAPHIE ET GÉOPOLITIQUE


Seule certitude : l’Europe est la dernière utopie pacifiste du monde moderne
et pour cela l’aventure peut (ou doit) continuer. Pour Thomas Piketty, le
« T-Dem », pour un traité de démocratisation de l’Europe est une des solu-
tions. L’Union euroépenne et la zone euro ne peuvent fonctionner sans
véritable démocratie budgétaire. Un Parlement de la zone euro peut légitimer
démocratiquement la monnaie unique au lieu de concentrer tous les pouvoirs
sur le Conseil Ecofin, « une machine à fabriquer des oppositions identitaires »
selon l’économiste, car elle fonctionne comme une confrontation des intérêts
nationaux. Selon l’Alternative pour l’Allemagne (AFD), la radicalisation des
positions contre l’islam, les migrants et la politique d’abandon de Merkel
n’a pas d’autre issue que le départ de l’Europe. Refuser l’euro, Bruxelles,
Schengen et les oukases européens et allemands laisse-t‑il le choix à l’ex-
front national d’un maintien dans la construction européenne ?
– Réinventer l’Union européenne, c’est là un défi majeur d’autant plus que
l’extérieur regarde cyniquement et avec jubilation l’éclatement de l’Eu-
rope. « Les peuples, les gens, veulent leur propre identité et le Royaume-Uni
voulait sa propre identité. » « D’autres vont partir » car « les gens sont en
colère » déclarait Donald Trump, alors candidat à  la présidence des
États-Unis. Installé au pouvoir, il ne peut que par ses provocations anti euro-
péennes « sortir de sa torpeur l’Union européenne endormie et lui donner
l’envie d’exister par elle-même ». Poutine n’est guère plus amène en criti-
quant les indépendantistes (Kosovo et Catalogne) et se plaint du suivisme
d’une Europe aux ordres des États-Unis dans les sanctions émises. Partout,
l’Europe n’est plus le modèle de construction reconnu, avec pour l’ONU
S cientifique

sa « gestion criminelle » des migrants en Libye, ses renoncements dans les


promesses faites à la Turquie, ses atermoiements en Syrie, ses lenteurs
dans la constitution d’un pôle de défense et d’un ordre multilatéral en quête
de timonier… On en vient désormais à des comportements étranges : des
régions qui elles réclament le maintien de l’adhésion à l’UE (l’Écosse après
le Brexit) et croient à sa survie.

ANNALES CCIR 2018-2019 l 129

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 129 24/10/2018 14:46


Conclusion

ESSEC L’Europe a des marges pour résister si on évalue correctement la nécessité


de l’Europe et si on est capable de trouver une nouvelle ambition euro-
péenne. La tâche est complexe si l’on se réfère à la prophétie de Edgar
Morin car « tout ce qui divise l’Europe la forme, tout ce qui la forme la divise ».
Mais, sans patriotisme de civilisation et transcendance des particularités,
C ORRIGÉ

sans frontière clairement définies, sans objet politique circonscrit, il n’y aura
pas de « commonwill » européen… autant dire que la « question de la nation »
reste entière dans une Europe qui tente de se réinventer.
HISTOIRE, GÉOGRAPHIE ET GÉOPOLITIQUE

S
S cientifique

130 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 130 24/10/2018 14:46


S UJET
MATHÉMATIQUES
Durée : 4 heures.

La présentation, la lisibilité, l’orthographe, la qualité de la rédaction,


la clarté et la précision des raisonnements entreront pour une part EMLYON
importante dans l’appréciation des copies.
Les candidats sont invités à encadrer dans la mesure du possible les
résultats de leurs calculs.
Ils ne doivent faire usage d’aucun document : l’utilisation de toute
calculatrice et de tout matériel électronique est interdite. Seule l’uti-
lisation d’une règle graduée est autorisée.
Si au cours de l’épreuve, un candidat repère ce qui lui semble être
une erreur d’énoncé, il la signalera sur sa copie et poursuivra sa
composition en expliquant les raisons des initiatives qu’il sera amené
à prendre.

S UJET

MATHÉMATIQUES
S cientifique

ANNALES CCIR 2018-2019 l 131

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S UJET

EMLYON

Tournez la page S.V.P.


MATHÉMATIQUES
S cientifique

132 l ANNALES CCIR 2018-2019

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S UJET
EMLYON

MATHÉMATIQUES

Tournez la page S.V.P.


S cientifique

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S UJET

C
EMLYON
MATHÉMATIQUES
S cientifique

(*)

134 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 134 24/10/2018 14:46


C ORRIGÉ
Par Jean-Louis Roque, professeur au lycée Pasteur à Neuilly-sur-Seine, et
EMLYON

external lecturer à l’ESSEC Business School.

Problème 1

C ORRIGÉ
Partie 1

Notons, juste comme cela, que, pour tout k 2 N, la fonction u 7! (sin u)k est ouvertement
continue sur le segment [0, ⇡/2] et que, par conséquent, l’intégrale Wk existe bien et au
sens propre du terme. Le lecteur délicatement cultivé aura d’ailleurs ici reconnu les
intégrales de John Wallis.
1. On trouve sans peine et sans sédatif

W0 = et W1 = 1.
2

2.a. Nous décidons de partir de Wk+2 que nous découpons sous la forme
Z ⇡/2
Wk+2 = sin k+1 u sin u du,
0

pour permettre aux renards du by parts de considérer les deux fonctions

U : u 7! sin k+1 u et V : u 7! − cos u.

Ces deux applications sont assurément de classe C 1 sur notre segment et nous avons sans
surprise

8u 2 [0, ⇡/2], U 0 (u) = (k + 1) sin k u cos u et V 0 (u) = sin u,

à telle enseigne que, par intégration par parties, nous assénons que
Z ⇡/2
⇥ ⇤⇡/2
Wk+2 = U V 0 − U 0 (u)V (u) du.
0

Seulement voilà, comme



= sin 0 = 0,
cos
2
et parce que k + 1 est strictement positif(*), le crochet d’intégration est nul et nous en
sommes donc à Z ⇡/2
Wk+2 = (k + 1) sin k u cos 2 u du,
MATHÉMATIQUES

la sortie du scalaire k + 1 se passant, nanolinéairement, de tout commentaire.


C’est alors grâce à la plus pythagoricienne des formules de trigonométrie et à la linéarité
de l’intégration, que nous nous revendiquons
S cientifique

� �
Wk+2 = (k + 1) Wk − Wk+2 ,

ce qui n’est vraiment pas loin de nous déplaire.

(*) Il faut toujours se méfier comme de la peste des sournois 00 qui peuvent parfois polluer certains calculs !

ANNALES CCIR 2018-2019 l 135

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b. C’est très facile et surtout immensément nautique en procédant par induction sur b
EMLYON l’entier k après avoir déduit du a la relation de récurrence

2k + 1
8k 2 N, W2k+2 = ⇥W2k .
2k + 2 5.a
qua
C ORRIGÉ

 Nous revenons sur le côté bateau de ces fameuses intégrales de Wallis en précisant que
ces dernières étaient étudiées, en exercice, par tous les professeurs de terminale de France
et de Navarre, il n’y a finalement pas si longtemps ! nou
Partie 2

3. Soit k 2 N. L’application
et d
tk ,
t 7! p
1 − t2 à te
pro
est, sans l’ombre d’un doute, continue sur le semi-ouvert [0, 1[ et son intégrale est donc
impropre une fois. Oui mais voilà, la fonction u 7! sin u réalisant une genuine bijection
de classe C 1 , croissante de surcroît, de l’intervalle [0, ⇡/2[ sur son homologue [0, 1[, le la t
théorème de changement de variable assure que les deux intégrales s’éc
Z 1 Z ⇡/2
tk sin k u
p dt et p cos u du,
1 − t2 1 − sin 2 u
0 0
et il
sont de même nature et qu’elles sont carrément égales en cas de convergence. Remarquons b
alors et tout bêtement que l’on a tour à tour que

sin k u sin k u sin k u


8u 2 [0, ⇡/2[, p cos u = p cos u = cos u = sin k u,
1 − sin u2 2
cos u | cos u|
L’in
la positivité de cos u dans la zone ciblée… ouv
Il est alors temps de changer de question. de l

4.a. Soit x 2 R. La nouvelle fonction

ext + e−xt ,
t 7! p
1 − t2 pui
au t
étant également continue sur notre semi-ouvert, son intégrale est impropre une fois en 1 liné
et comme il semble bien que

ext + e−xt 1 ,
MATHÉMATIQUES

p ⇠ (ex + e−x ) · p
1 − t2 t!1
t<1
1 − t2
pui
tout cela dans une franche atmosphère de positivité, le test des équivalents et la précédente alor
question lorsque k = 0, assurent tranquillement l’existence de I(x). La parité de la
S cientifique

fonction I — vraiment paire de chez paire ! — se voit, quant à elle, comme le nez au
milieu de la figure.

136 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 136 24/10/2018 14:46


b. Toujours grâce à la précédente et aussi à la toute première, nous avons gentiment

I(0) = 2W0 = ⇡. EMLYON

5.a. Notons φ la fonction concernée, à savoir u 7! eu + e−u . Elle a largement toutes les
qualités requises pour le projet taylorlagrangien et comme

C ORRIGÉ
8k 2 N, 8u 2 R, φ(k) (u) = eu + (−1)k e−u ,

nous avons d’une part

8k 2 N, φ(k) (0) = 1 + (−1)k ,

et d’autre part
8u 2 [0, xt], φ(2n+1) (u) = eu − e−u ,
à telle enseigne que, due to the positivity of t and x, on a aisément et sans autre forme de
procès
8u 2 [0, xt], |φ(2n+1) (u)| = eu − e−u 6 eu 6 ext 6 ex ,
la toute dernière inégalité reposant sur t 6 1. Notre magique inégalité va donc devoir
s’écrire
� X2n
� (xt)k �� x2n+1 x
� xt
�e + e−xt − 1 + (−1)k ) �6 e ,
k! (2n + 1)!
k=0

et il ne reste plus qu’à procéder à une évidente séparation « pair-impair ».


b. Soit n 2 N. La récente question 3 et la linéarité de l’intégration font déjà de concert
que
Z 1⇣
2(xt)2k ⌘ dt .
Xn X n
2x2k
I(x) − W2k = ext + e−xt − p
(2k)! 0 (2k)! 1 − t2
k=0 k=0

L’intégrale située au right hand side est celle d’une combinaison linéaire de fonctions
ouvertement positives et, en conséquence, elle est absolument convergente ce qui permet
de la trianguler et de récupérer
� � Z 1�
2(xt)2k �� dt ,
Xn Xn
� 2x2k � � xt
�I(x) −
� W2k �� 6 �e + e−xt − �p
(2k)! 0 (2k)! 1 − t2
k=0 k=0

puisque les bornes d’intégration n’ont pas eu l’audace de nous contrarier. C’est maintenant
au tour de la précédente inégalité taylorienne de prendre le relais. Au prix d’une bénigne
linéarisation, elle révèle que
Z 1� Z
2(xt)2k �� dt
Xn
� xt x2n+1 x 1 dt ,
�e + e−xt − �p 6 e p
MATHÉMATIQUES

0 (2k)! 1 − t2 (2n + 1)! 0 1 − t2


k=0

puisque l’intégration est croissante vu que les bornes n’ont pas changé d’âne ! Il reste
alors plus qu’à ne pas avoir oublié que
S cientifique

Z 1
= W0 = .
dt ⇡
p
0 1−t 2 2

ANNALES CCIR 2018-2019 l 137

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 137 24/10/2018 14:46


c. Quelques lignes plus haut, nous avons vu passer la vraie valeur des intégrales W2k
EMLYON et après quelques légers aménagements, la précédente va aisément se métamorphoser en
� n
X �
�1 x2k �� x2n+1 ex
� I(x) −
�⇡ � 6 · .
2 k!
2k 2 (2n + 1)! 2
k=0
C ORRIGÉ

Il est officiellement acquis, en première année de prépa, que

xn
−−−−! 0,
n! n!+1
et comme sa sous-suite impaire se doit de l’imiter nous déduisons par squeeze que
n
X x2k 1
−−−−! I(x),
2 k!2 n!+1 ⇡
2k
k=0

ce qui, lorsque l’on connaît ses sérielles définitions, nous permet de changer de partie.

Partie 3

6. Soit x appartenant à R+ . Nous espérons ne blesser personne en affirmant que

e−xt 1 ,
8t 2 [0, 1[, 06 p 6p
1 − t2 1 − t2
et vu tout ce que nous savons, c’est par comparaison en signe positif que nous déduisons
déjà l’existence de l’intégrale située au cœur du débat. Comme l’intégration est croissante
quand les bornes le veulent bien, et puisque nous connaissons bien W0 , nous pouvons
hardiement envisager la suite.
7.a. C’est une simple formalité. On peut d’ailleurs s’amuser à vérifier que la partie gauche
est valable pour tout v appartenant au semi-ouvert [0, 1[, alors que sa voisine de droite est
correcte dès que v appartient au segment [0, −1 ], où est le nombre d’or de Phidias, et
comme il est bien connu que
1
6 −1 ...
2
b. Voici une nouvelle intégrale impropre en 1 dont l’existence peut, entre autres, être
facilement déduite du 4.a. Cela étant, la fonction u 7! 1 − u réalisant une bijection de
classe C 1 décroissante de l’intervalle ]0, 1] sur l’intervalle [0, 1[, la conclusion semble
inéluctable puisque, à bien y regarder

ex(1−u) e−xu .
8u 2]0, 1], p = ex p p
MATHÉMATIQUES

1 − (1 − u)2 u 2−u

c. Soit à nouveau x appartenant à R+ et annonçons également un réel u situé dans le (*)


semi-ouvert ]0, 1]. Étant donné que
S cientifique

u ⇥ ⇤
2 0, 1/2 ,
2

138 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 138 24/10/2018 14:46


notre récente formalité, très licitement radicalisée révèle que

1 EMLYON
61+ ,
u
16 r
u 2
1−
2

et il s’en déduit très positivement que

C ORRIGÉ
ex e−xu ex e−xu ex e−xu ex p
p · p 6p · r 6 p · p + p · e−xu u.
2 u 2 p u 2 u 2 2
u 1−
2

Nous laissons alors à notre dévoué lecteur le soin de justifier l’existence(*) de l’impropre
au point 0
Z 1 −xu
e
p du,
0 u
par exemple en évoquant l’équivalence

e−xu 1
p ⇠ p ,
u u!0
u>0
u

et le reste n’est que littérature, linéarité de l’intégration, croissance quand les bornes sont
bien disposées et un tout petit peu de la question précédente.
8.a. Si nous notons X une telle variable nous savons officiellement que l’une de ses
densités fX est définie sur R par

2
e−t
8t 2 R, fX (t) = p .

Nous sommes alors tenus de savoir que les deux intégrales


Z +1 2 Z +1 2
e−t e−t
p dt et t2 p dt,
−1 ⇡ −1 ⇡

existent et valent respectivement 1 et V(X), et comme tout cela survient dans une saine
parité des familles, nous n’avons aucun mal à certifier l’existence des deux intégrales que
mentionne le texte ainsi que les égalités
Z +1 p Z +1 p
⇡ ⇡,
et
2 2
e−t dt = t2 e−t dt =
0 2 0 4
MATHÉMATIQUES

puisqu’il est précisé que la variance de X est égale à 1/2.

(*) Il est vrai que, dans ses lignes, le texte a allègrement bombardé nombre d’impropres, sans franchement poser les bonnes
questions !
S cientifique

ANNALES CCIR 2018-2019 l 139

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b. Si nous savons bien compter, c’est la deuxième fois que le texte présente un �N
EMLYON changement de variable à l’envers, Dagobert ! Comme nous l’avons déjà fait plus haut, cho
nous le remettons à l’endroit, à savoir
Soi
t2
u= ,
x
C ORRIGÉ

ce qui nous amène à signaler que la fonction t 7! t2 /x réalise une bijection de classe C 1 ce
et croissante de ]0, x] sur ]0, 1] à telle enseigne qu’après quelques premiers agissements
Z Z
1
e−xu 2 x
t e−t p ,
2 dt
p du = p
0 u x 0 t2 la l

et comme pour les réels t 2 ]0, x], il se trouve que 9. S


nou
p
t2 = |t| = t,

nous pouvons, d’ores et déjà, revendiquer


Z 1
e−xu 2
Z x
2
pui
p du = p e−t dt. (1)
0 u x 0

Quant à la copine tou


Z 1 p
No
−xu
e u du,
0
B
on parvient mutatis mutandis à
Z Z
1 p 2 x
2
e−xu u du = p t2 e−t dt (2)
0 x x 0
B
le lecteur valeureux étant chargé de l’intendance. Nous rappelons alors l’évidente B
proposition reliant deux éminents concepts analytiques que voilà.
limite et équivalence
Soit ! un point de la droite achevée R et f une application numérique définie au voisinage
de !. On suppose que f a une limite finie non nulle λ au point !. On a alors l’équivalence Il n
B
f (x) ⇠ λ.
x!!
voi

Autre chose, si λ = 0, il est fortement conseillé de s’abstenir !


de
La récente a et notre lemme providentiel font que
MATHÉMATIQUES

Z x p Z x p
⇡ ⇡,
et
2 2
e−t dt ⇠ t2 e−t dt ⇠
0 x!+1 2 0 x!+1 4 ce q
que
parce que, comme aurait dit ma grand-mère, si ⇡ était nul, ça se saurait !
S cientifique

Tout ce qui précède devrait alors suffire à justifier les deux équivalences demandées.

140 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 140 24/10/2018 14:46


� Nous souhaitons revenir sur la formulation de cette question. Il y était écrit quelque
chose du genre. EMLYON
Soit x 2 R⇤+ . À l’aide du … montrer

... ⇠ ... et ... ⇠ ...


x!+1 x!+1

C ORRIGÉ
ce qui ne veut strictement rien dire, puisque dans la phrase

... ⇠ ... et ... ⇠ ...


x!+1 x!+1

la lettre x est muette, autant dire un vrai ghost !


9. Soit encore une fois un réel x positif ou nul. Histoire d’alléger un peu l’atmosphère,
nous procédons aux quatre baptêmes que voici
Z 1 Z 1
ext e−xt
J(x) = p dt et K(x) = p dt,
0 1 − t2 0 1 − t2

puis
Z 1 Z 1
ex e−xu ex p
r(x) = p p du et s(x) = p e−xu u du,
2 0 u 2 2 0

tous ces protagonistes étant depuis peu au cœur de notre activité.


Nous allons maintenant mettre en avant quelques points cruciaux, les uns après les autres.
B Grâce à la linéarité de l’intégration, nous pouvons sûrement écrire

I(x) = J(x) + K(x).

B Il a ensuite été établi à la question 6 que l’application K est bornée.


B Nous avons un peu plus tard découvert à la 7.c que

0 6 J(x) − r(x) 6 s(x). (3)

Il nous faut maintenant aborder les problématiques locales.


B On déduit très mentalement des équivalences de la précédente question qu’au
voisinage de +1
s(x) = o(r(x)),
de sorte que via le récent point (3) on peut déjà affirmer que
MATHÉMATIQUES

J(x) ⇠ r(x),
x!+1

ce qui, en ressortant la précédente et grâce à un chouia de transivité, révèle plus précisément


que r
S cientifique

⇡.
J(x) ⇠ ex
x!+1 2x

ANNALES CCIR 2018-2019 l 141

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 141 24/10/2018 14:46


B Comme nous n’avons pas égaré nos classiques prépondérances, la toute dernière
EMLYON information apporte le scoop
J(x) −−−−! +1,
x!+1

ce qui, au travers de la bornitude de K, nous apprend qu’au voisinage de +1


C ORRIGÉ

K(x) = o(J(x)),

à telle enseigne qu’in fine


r
x ⇡.
I(x) ⇠ J(x) ⇠ e
x!+1 x!+1 2x

Partie 4

10.a. Vu le rappel effectué par le texte — qui au passage n’est pas une simulation de loi
mais une simulation d’une variable aléatoire suivant une loi — on peut avoir le sentiment
que le concepteur attendait quelque chose du genre
function r = estime (lambda)
n = 105 ;
z = 0;
for k = 1 : n
X = grand (1, 1,0 poi 0 , lambda) ;
Y = grand (1, 1,0 poi 0 , lambda) ;
if (X == Y ) then z = z + 1 ;
end
r = z/n ;
endfunction

Cela étant, si le texte nous avait rappelé que l’instruction

grand (1, n,0 poi 0 , lambda)

simule une matrice ligne aléatoire dont les entrées sont n variables aléatoires suivant la
loi de Poisson de paramètre λ et si l’on ne déteste pas faire des sommes de booléens le
code suivant fait également l’affaire.
function r = estime (lambda)
n = 105 ;
X = grand (1, n,0 poi 0 , lambda) ;
Y = grand (1, n,0 poi 0 , lambda) ;
MATHÉMATIQUES

r = sum (X == Y )/n ;
endfunction

(*)
b. Après avoir utilisé à bon escient le Hawk-Eye, nous estimons à quelque millimètres
S cientifique

près que
1
p(X = Y ) ⇡ p .
2 λ⇡

142 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 142 24/10/2018 14:46


11. Commes les variables de Poisson prennent leurs valeurs dans N, nous pensons
n’effrayer personne en assénant que
EMLYON
+1
[ � �
[X = Y ] = [X = k] \ [Y = k] ,
k=0

et en faisant remarquer que les événements formant cette réunion sont deux à deux

C ORRIGÉ
disjoints. La σ-additivité de la probabilité couplée à l’indépendance des variables X
et Y nous amènent alors, like a flower et effectivement, à
+1 2k
X
p(X = Y ) = e−2λ
λ .
k!2
k=0

12.a. C’est sans la moindre aide extérieure, que l’on trouve grâce à la 5.c que
I(2λ) .
p(X = Y ) = e−2λ

b. L’équivalence trouvée à la question 9 est formelle. Elle implique quasi mentalement
que
1
p(X = Y ) ⇠ p ,
λ!+1 2 λ⇡

et nous devons reconnaître que le Hawk-Eye a plutôt bien fonctionné !

Problème 2

Partie 1

1.a. Une « application » dont on ne précise pas l’ensemble d’arrivée n’est pas vraiment
très sensée. Nous allons plus précisément commencer par établir que ' est une application
linéaire de R[X] dans lui-même, où, à la surprise générale, R[X] est l’espace vectoriel
formé de tous les polynômes réels et comme à notre habitude, nous y prenons en deux
temps.
B Soit P appartenant à R[X]. Nous permettons de rappeler que les polynômes réels
forment un espace vectoriel stable par la multiplication polynomiale et par la dérivation,
à telle enseigne que
1
X(1 − X)P 0 + XP 2 R[X],
n
et nous pouvons d’ores et déjà affirmer que ' applique bien R[X] dans lui-même.
B La linéarité de ' repose, quant à elle, essentiellement sur celle bien connue de la
dérivation et ainsi déjà � �
' 2 L R[X] .

b. Soit k 2 [[0, n]]. Après avoir respecté la polynomiale attitude(*), en respectant les
deux situations k = 0 et k > 1, qui par miracle se recollent, on trouve finalement
MATHÉMATIQUES

k ⇣ k ⌘ k+1
'(X k ) = X k + 1 − X ,
n n
(*) Nous parlons d’un comportement polynomial exemplaire consistant, par exemple, à ne pas écrire kX k−1 lorsque k=0…
S cientifique

ANNALES CCIR 2018-2019 l 143

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 143 24/10/2018 14:46


et nous décelons tout particulièrement que
EMLYON
'(X n ) = X n .

c. Comme B engendre le sous-espace E et qu’il semble impossible de ne pas avoir


constaté que
C ORRIGÉ

8k 2 [[0, n]], '(X k ) 2 E,


nous sommes censés en déduire que ' stabilise E, ce qui donne naissance au fameux
endomorphisme de E, généralement noté '˜ ou ', ¯ que ' induit sur le stable E et c’est
précisément cet induit que le texte veut désormais nous faire étudier. C’est donc lui que
nous noterons ' à partir de maintenant et nous oublirons définitivement l’ancien.
2.a. Tout a été dit quelques lignes plus haut et la matrice A ne demande plus qu’à éclore.
Here you are !
2 3
0
1
61 7
6 n
2
7
6 n−1
7
6 n n
7
6 .. 7
6 n−2 . 7
6 n
7
6 .. .. 7
A=6 . . 7
6 .. 7
6
6 . k
n
7
7
6 .. 7
6
6 n−k
n
. 7
7
6 .. 7
4 . n−1
n
5
1
n 1

C’est une matrice carrée d’ordre n + 1 et nous précisons que les éléments omis sont tous
égaux à zéro. Il s’agit donc d’une matrice trigonale inférieure. Ses n dernières colonnes
étant de visu de hauteurs différentes, en l’occurrence les hauteurs n, n − 1, . . . , 1, il faut
impérativement savoir qu’elles forment une famille libre et que, par conséquent, le rang
de A est supérieur ou égal à n. Seulement voilà, because le « 0 » sur sa diagonale, la
trigonale A est non inversible et il ressort de tout cela que

rg A = n.

3.a. La traduction vectorielle de la précédente égalité s’écrit bien sûr

rg ' = n
MATHÉMATIQUES

et le théorème du rang assure alors que

dim Ker ' = dim E − rg ' = (n + 1) − n = 1, (*)


S cientifique

à telle enseigne que


Ker ' 6= {0},

144 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 144 24/10/2018 14:46


chronique d’une non-injectivité de ' plus ou moins pressentie…
b. Il est écrit que ⇥ ⇤ EMLYON
X (1 − X)P 0 + nP = 0,
et comme X n’est pas le polynôme nul et que R[X] est presque notoirement intègre(*),
il devrait en résulter que

C ORRIGÉ
(1 − X)P 0 + nP = 0, (4)
et comme n n’est pas nul, il est inéluctable que P (1) = 0 et 1 est déjà une racine de P .
Notons alors m l’ordre de multiplicité de cette racine. Grâce à la formule de Leibniz, la
dérivation m fois de l’égalité (4) donne mentalement

(1 − X)P (m+1) + (n − m)P (m) = 0,

et l’évaluation en 1 de cette dernière donne m = n puisque, multiplicité oblige, nous


sommes censés savoir que
P (m) (1) 6= 0.
En bref, il existe un polynôme réel Q tel que

P = (X − 1)n Q,

et comme P est un polynôme non nul de E, le polynôme Q est fatalement constant et la


messe semble dite à jamais et C n’a rien à faire ici.
c. Vu ce que nous venons d’apprendre à l’instant c’est sans aucun état d’âme que nous
déclarons la micro famille � �
(X − 1)n ,
base du noyau de ' et nous faisons remarquer que cela donne une nouvelle démonstration
de ce que
dim Ker ' = 1.

4. Le côté trigonal de la matrice canonique de ' révèle que


nk o
Spec ' = | k 2 [[0, n]] ,
n

et l’endomorphisme ' possède dorénavant n + 1 valeurs propres différentes alors qu’il


opère sur un espace vectoriel dont la dimension est justement n + 1. Une importante
condition suffisante stipule alors que ' est non seulement diagonalisable mais aussi que
tous ses espaces propres sont des droites vectorielles même si cette dernière propriété ne
nous a pas été demandée…
5.a. Soit k appartenant à [[0, n]]. La polynomiale attitude dont nous avons parlé quelques
MATHÉMATIQUES

lignes plus haut oblige à une organisation en trois parties.

(*) Il est vrai que le vocabulaire n’est pas totalement officiel mais la propriété doit être connue. Lorsque le produit de deux polynômes
est nul, l’un des facteurs est obligatoirement nul.
S cientifique

ANNALES CCIR 2018-2019 l 145

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 145 24/10/2018 14:46


B Si 1 6 k 6 n − 1, nous avons dim
EMLYON que
Pk0 = kX k−1 (1 − X)n−k − (n − k)X k (1 − X)n−k−1 ,

et un calcul totalement inoffensif amène alors à


Par
k
C ORRIGÉ

'(Pk ) = Pk . 6.a
n
est
B Si k = 0, on trouve presque plus facilement que

'(P0 ) = 0,
Au
mais ça nous le savions déjà.
b
B Si enfin k = n, on trouve encore aisément que
sen
'(Pn ) = Pn ,

et comme cela arrive parfois les trois cas se recollent très sympathiquement car voilà qu’in
fine et à
k
8k 2 [[0, n]], '(Pk ) = Pk .
n

b. À bien y regarder, la précédente avancée nous apprend que la famille


don
(P0 , . . . , Pn ), cro

est formée de vecteurs propres de ' attachés aux valeurs propres, déjà signalées différentes,
qui constituent le spectre de '. D’après une superbe liberté, il s’agit d’une véritable famille
libre dans E qui, parce qu’elle est formée de n + 1 vecteurs est, selon la caractérisation
des bases en dimension finie, est une genuine base de E. À la suprise générale, la matrice et n
de ' dans cette base propre est diagonale et il s’agit très précisément de Cel
2 3 esp
0
6 1
7
6 n
7
6 2
7
6 n
7
6 .. 7
6 . 7
6 .. 7 Ens
D=6
6 . 7.
7 par
6 k 7
6 n 7
6 .. 7
6
6 . 7
7
4 5
MATHÉMATIQUES

n−1
n
1

ce q
� Il semble que nous venons de redémontrer la diagonalisabilité de '.
S cientifique

c. Nous avons signalé plus haut — et fort heureusement ! — que les sous-espaces
propres de ' sont tous des droites vectorielles, c’est-à-dire des sous-espaces vectoriels de

146 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 146 24/10/2018 14:46


dimension 1 et au vu et au su de ce que nous venons d’apprendre, il devient inexorable
que EMLYON
8k 2 [[0, n]], E k (') = Vect (Pk ).
n

Partie 2

C ORRIGÉ
6.a. L’événement [Z2 = 1] se réalise si, et seulement si, le numéro tiré au second tirage
est différent de celui obtenu au premier et l’on trouve en conséquence que

1.
p(Z2 = 1) = 1 −
n

Autant dire alors que Z2 suit la loi de Bernoulli de paramètre (n − 1)/n.


b. Soit j appartenant à [[1, k]]. Attention, pour que cette probabilité conditionnelle ait un
sens, nous devons nous assurer de ce que

p(Yk = j) 6= 0,

et à cet effet, nous remarquons, par exemple, que l’événement

E = {(1, 2, . . . , j, j, . . . , j )},
| {z }
k−uplet

dont la signification devrait sauter aux yeux, est inclus dans [Yk = j], ce qui, via la
croissance de la probabilité, entraîne

1
6 p(Yk = j),
nk
et ne peut que nous réconforter.
Cela étant dit, et comme la signification de l’événement [Yk = j] est limpide, nous
espérons ne blesser personne en écrivant que

n−j.
p[Y (Zk+1 = 1) =
k =j] n
Ensuite, d’après la formule des probabilités totales, le système complet étant à deviner
par l’impétrant, nous revendiquons

k
X
p(Zk+1 = 1) = p(Yk = j)p[Y (Zk+1 = 1),
MATHÉMATIQUES

k =j]
j=1

ce qui, depuis peu, doit également s’écrire

k ⇣
j⌘
S cientifique

X
p(Zk+1 = 1) = 1− p(Yk = j).
j=1
n

ANNALES CCIR 2018-2019 l 147

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 147 24/10/2018 14:46


Après une bénigne linéarisation sommatoire, voilà que rév
EMLYON
k
X k
1X
p(Zk+1 = 1) = p(Yk = j) − j p(Yk = j),
n j=1
Ce
j=1

et comme d’une part, nous avons complètement


C ORRIGÉ

k
X
p(Yk = j) = 1,
C
lors
j=1

et que, à côté de cela, le physio se réclame de e


k
X
j p(Yk = j) = E(Yk ),
à te
j=1

nous pouvons envisager la suite.


 Juste pour causer un petit peu, on peut noter que l’égalité que nous venons de prouver et s
est encore d’actualité lorsque k = 0. term
c. La question précédente et la linéarité de l’espérance amènent de concert à
c’es
k
1X
p(Zk+1 = 1) = 1 − E(Zj ),
n j=1
7. S
et personne n’a oublié que l’espérance d’une variable aléatoire de Bernoulli n’est autre gén
que la probabilité qu’elle prenne la valeur 1. So… va d
d. La récente question c a mis en place une belle relation de récurrence forte pour la a
suite � �
p(Zk = 1) k2N⇤ ,
et c’est naturellement par induction forte que nous allons procéder. la d
B Lorsque k = 1, nous le savons depuis une fort belle lurette.
B Supposons alors que, pour un entier k 2 N⇤ , la propriété soit établie du rang 1
jusqu’au rang k. La relation du c produit alors l’égalité
b
k ⇣ con
1 X 1 ⌘j−1
p(Zk+1 = 1) = 1 − 1− , B
n n
j=1 not
et nous devons reconnaître ici une somme de termes consécutifs d’une suite géométrique
MATHÉMATIQUES

de raison
1 don
1 − 6= 1,
n des
et la fameuse mnémotechnie
S cientifique

premier terme écrit − premier terme non écrit


1 − raison

148 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 148 24/10/2018 14:46


révèle alors que
k ⇣
X 1 ⌘j−1 ⇣ ⇣ 1 ⌘k ⌘ EMLYON
1− =n 1− 1− .
j=1
n n

Ce n’est alors plus qu’une formalité que d’atterrir providentiellement sur


⇣ 1 ⌘k

C ORRIGÉ
p(Zk+1 = 1) = 1 − .
n

 C’est encore une fois pour causer que nous signalons la validité de notre récente d
lorsque k = 0.
e. Soit k 2 N. Nous avons déjà fait valoir à l’issue de la dernière question b que
1
p(Zk+1 = 1) = 1 − E(Yk ),
n
à telle enseigne que � �
E(Yk ) = n 1 − p(Zk+1 = 1) ,
et si l’on en croit la terrible conclusion de notre dernière induction, l’histoire devrait se
terminer sur � �
E(Yk ) = n 1 − p(Zk+1 = 1) ,
c’est-à-dire sur ⇣ ⇣ 1 ⌘k ⌘
E(Yk ) = n 1 − 1 − .
n
7. Soit k 2 N. Le lecteur cultivé aura à coup sûr reconnu en Gk la très fameuse fonction
génératrice de Laplace et Van Dantzig de la variable aléatoire Yk . Nous rappelons, et cela
va d’ailleurs se confirmer rapidement, que c’est un très puissant outil.
a. Il suffit de demander. On trouve aisément que
X n−1 2
G0 = 1 ; G1 = X ; G2 = + X
n n
la dernière provenant de la question 6.a et de l’égalité

Y2 = 1 + Z2 .

b. Soit k appartenant à N et i appartenant à [[0, n]]. Comme la définition de Y0 est


conventionnelle, nous préférons nous organiser en deux temps.
B Si k et i sont supérieurs ou égaux à 1, nous ressortons le système complet qui a fait
notre bonheur à la récente question 6.b, à savoir la famille

[Yk = j]16j6k ,
MATHÉMATIQUES

dont on rappelle qu’elle est formée d’événements de probabilité non nulles. La formule
des probabilités totales est alors formelle. Nous avons
k
X
S cientifique

p(Yk+1 = i) = p(Yk = j)p[Y (Yk+1 = i),


k =j]
j=1

ANNALES CCIR 2018-2019 l 149

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 149 24/10/2018 14:46


ce qui peut également s’écrire
EMLYON
k
X
p(Yk+1 = i) = p(Yk = j)p[Y (Zk+1 = i − j),
k =j]
j=1

la raison essentielle étant l’égalité


C ORRIGÉ

Yk+1 = Yk + Zk+1 .

Pour des raisons typiquement bernouliennes, il va rester au maximum deux termes et de


façon plus précise et grâce surtout à la toute proche question conditionnelle 6.b, il ne
devrait subsister que
n−i+1 i
p(Yk+1 = i) = p(Yk = i − 1) + p(Yk = i),
n n
et ce, bien sûr si i − 1 > 1, alors que ne surnage que
1
p(Yk+1 = 1) = p(Yk = 1),
n
dans le cas contraire. Seulement voilà, comme nous avons pris, dans ce premier temps, la
précaution de supposer l’entier k non nul, il se trouve que

p(Yk = 0) = 0,

ce qui nous autorise finalement deux recollements selon lesquels on a déjà


n−i+1 i
8k 2 N⇤ , 8i 2 [[1, k]], p(Yk+1 = i) = p(Yk = i − 1) + p(Yk = i).
n n

B Il reste alors à gérer les cas k > 1 et i = 0, puis k = 0 et i = 0 qui, au vu et au su


des conventions faites, ne méritent pas un acharnement forcené !
c. Soit à nouveau k 2 N. Il ressort de la précédente avancée et de la linéarité de la
sommation que
n n
1X 1X
Gk+1 = i p(Yk = i)X i + (n − i + 1)p(Yk = i − 1)X i .
n i=0 n i=0

Le physio nous murmure déjà à l’oreille que


n
X
i p(Yk = i)X i = XG0k ,
MATHÉMATIQUES

i=0

c’est déjà une bonne chose, et quant à la seconde somme, après avoir subi un évident
changement d’indice, elle serait prête à devenir
n−1 (*)
S cientifique

X
(n − i)p(Yk = i)X i+1 ,
i=−1

150 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 150 24/10/2018 14:46


somme qui, pour des raisons qui crèvent l’écran et que notre dévoué lecteur aura bien
comprises, ne demande qu’ à évoluer vers
EMLYON
n
X
(n − i)p(Yk = i)X i+1 .
i=0

C ORRIGÉ
Le physio reprend alors du poil de la bête en assénant tout bêtement — mais un chouia
linéairement — que
n
X
(n − i)p(Yk = i)X i+1 = nXGk − X 2 G0k .
i=0

Toutes ces révélations, mises bout à bout, amènent en définive — et sans sourciller ! — à
ce qui nous est demandé et tout le monde est content.
d. En y regardant de plus près, nous venons d’apprendre que

8k 2 N, Gk+1 = '(Gk ),

en ayant tout de même précisé que toutes nos fonctions génératrices appartiennent, de
visu, à Rn [X], et une très nautique récurrence géométrique, que le lecteur a dû subir
maintes fois, stipule qu’effectivement

8k 2 N, Gk = 'k (G0 ),

et nous pouvons passer à la huitième !


8.a. Soit une nouvelle fois k 2 N. Comme les fonctions génératrices — surtout quand
les variables aléatoires concernées ne prennent qu’un nombre fini(*) de valeurs entières
naturelles — sont rencontrées fréquemment en classe prépa, nous nous contenterons de

Gk (1) = 1 et G0k (1) = E(Yk ).

b. On suppose que pour la 6174ième fois, nous allons annoncer k 2 N. Cela étant fait,
nous ressortons l’égalité polynomiale du très récent 7.c et nous décidons de la dériver une
fois. Nous obtenons sans surprise

1� �
G0k+1 = (1 − 2X)G0k + X(1 − X)G00k + Gk + XG0k ,
n

et l’évaluation au point 1 de cette dernière conduit, via les poncifs de la toute proche a à
l’espérée
1 ⇣ 1⌘
MATHÉMATIQUES

E(Yk+1 ) = − E(Yk ) + 1 + E(Yk ) = 1 − E(Yk ) + 1,


n n
la dernière égalité se passant de tout commentaire.

(*) Dans le cas contraire, on se confronte à de sérieux problèmes techniques !


S cientifique

ANNALES CCIR 2018-2019 l 151

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 151 24/10/2018 14:46


� �
EMLYON c. Nous venons d’apprendre que la suite E(Yk ) est arithmético-géométrique et c’est
très mentalement que l’on trouve que son point fixe est égal à n. Nous sommes alors
supposés savoir que
⇣ 1 ⌘k � �
8k 2 N, E(Yk ) − n = 1 − E(Y0 ) − n ,
n
C ORRIGÉ

et comme E(Y0 ) = 0, nous retrouvons — et c’est heureux ! — la même expression que


celle obtenue à la précédente 6.e.
9.a. Après avoir chaleureusement remercié Isaac Newton, nous clamons tous en chœur
que
Xn ✓ ◆
n
Pj = 1.
j=0
j

b. Encore un énorme merci à Isaac ainsi qu’à un inoffensif changement d’indice !


c. Soit pour une 6174ième fois, un entier naturel k. Comme G0 = 1, la linéarité de
l’opérateur 'k , et l’immédiate 9.a nous apprennent à l’unisson que

Xn ✓ ◆
n k
' (G0 ) =
k
' (Pj ).
j=0
j

Seulement voilà, il a été dit à la question 5 que

j
8j 2 [[0, n]], '(Pj ) = Pj ,
n
et comme il est impossible d’ignorer proprement que
⇣ j ⌘k
8j 2 [[0, n]], 'k (Pj ) = Pj ,
n
nous en sommes déjà à
n ✓ ◆⇣ ⌘k
X n j
'k (G0 ) = Pj .
j=0
j n

C’est maintenant à la récente question b de prendre le relais pour parvenir à

Xn ✓ ◆⇣ ⌘k Xn ✓ ◆
n j n−j
'k (G0 ) = (−1)i−j X i ,
j=0
j n i=j
n − i

et après avoir correctement réversé ces deux sommations, on arrive au nirvana, en


MATHÉMATIQUES

l’occurrence
✓ ◆✓ ◆ !
n − j ⇣ j ⌘k
Xn X i
i−j n
' (G0 ) = (−1) (*)
k
X i,

S cientifique

i=0 j=0
j n i n

ce qui nous permet d’aborder la toute dernière question.

152 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 152 24/10/2018 14:46


d. Les troisfactorialistes(*) savent parfaitement que lorsque 0 6 j 6 i 6 n, on a tout
bêtement ✓ ◆✓ ◆ ✓ ◆✓ ◆
n n−j n i EMLYON
= ,
j n−i i j
à telle enseigne que
✓ ◆⇣ ⌘ !

C ORRIGÉ
Xn ✓ ◆Xi
n i−j i j k
' (G0 ) =
k
(−1) X i,
i=0
i j=0
j n

et comme depuis peu,


n
X
'k (G0 ) = Gk = p(Yk = i)X i ,
i=0

une simple identification polynomiale certifie que


✓ ◆Xi ✓ ◆⇣ ⌘
n i j k
8i 2 [[0, n]], p(Yk = i) = (−1)i−j ,
i j=0 j n

ce qui confirme que parfois, la loi peut être dure…

MATHÉMATIQUES

(*) Nous parlons des adeptes de la formule dite des « trois factorielles » !
S cientifique

ANNALES CCIR 2018-2019 l 153

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 153 24/10/2018 14:46


S UJET

MATHÉMATIQUES Code sujet : 281

Durée : 4 heures.

La présentation, la lisibilité, l’orthographe, la qualité de la rédaction,


ESSEC la clarté et la précision des raisonnements entreront pour une part
importante dans l’appréciation des copies.
Les candidats sont invités à encadrer dans la mesure du possible les
résultats de leurs calculs.
Ils ne doivent faire usage d’aucun document. L’utilisation de toute
calculatrice et de tout matériel électronique est interdite. Seule l’uti-
lisation d’une règle graduée est autorisée.
Si au cours de l’épreuve, un candidat repère ce qui lui semble être
une erreur d’énoncé, il la signalera sur sa copie et poursuivra sa
composition en expliquant les raisons des initiatives qu’il sera amené
à prendre.

S
UJET
MATHÉMATIQUES
S cientifique

Tournez la page S.V.P.

154 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 154 24/10/2018 14:46


S UJET
ESSEC

MATHÉMATIQUES
S cientifique

ANNALES CCIR 2018-2019 l 155

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 155 24/10/2018 14:46


S UJET

ESSEC
MATHÉMATIQUES
S cientifique

Tournez la page S.V.P.

156 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 156 24/10/2018 14:46


S UJET
ESSEC

MATHÉMATIQUES
S cientifique

ANNALES CCIR 2018-2019 l 157

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 157 24/10/2018 14:46


S UJET

ESSEC
MATHÉMATIQUES
S cientifique

Tournez la page S.V.P.

158 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 158 24/10/2018 14:46


S UJET
ESSEC

MATHÉMATIQUES
S cientifique

ANNALES CCIR 2018-2019 l 159

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 159 24/10/2018 14:46


ESSEC
C ORRIGÉ
Par Jean-Louis Roque, professeur au lycée Pasteur à Neuilly-sur-Seine, et
le
sup

external lecturer à l’ESSEC Business School.

Partie 1 con
C ORRIGÉ

Nous nous permettons d’ajouter trois informations qui, le moment venu, seront bien plus pas
que providentielles ! gén

0.a. Nous rappelons une fois pour toutes que si (un ) est une suite réelle, on a l’équivalence 3. S
logique B
un −−−−! 0 , |un | −−−−! 0,
n!+1 n!+1

et nous le redirons plus !


B
0.b. Soit r > 0 et a 2 A(r). Alors, pour tout p 2 N, la suite
pas
n 7! np an , B
nat
appartient encore et mentalement à A(r).
0.c. Soit à nouveau r > 0 et a 2 A(r). Alors, pour tout p 2 N, la suite
✓ ◆ et c
n
n 7! an ,
p

appartient elle aussi à A(r), car selon une équivalence binomiale standard, nous avons
con
✓ ◆
n np+k
8k 2 N, nk |an | rn ⇠ |an | rn ,
p n!+1 p!

et que, lorsque les signes le veulent bien, il y a sur le marché un précieux test d’équivalence. et c
1. Soit x appartenant au segment [−r, r] et k un entier naturel. Comme il semble difficile sig
de s’opposer à En
8n 2 N, 0 6 nk |an ||x|n 6 nk |an |rn ,
�O
l’appartenance de a à A(r) et le test de comparaison en signe positif, confirment déjà la un
convergence de la série
X 4.a
nk |an ||x|n . stri
n>0
MATHÉMATIQUES

Soit maintenant r0 un réel supérieur ou égal à r et a une suite appartenant à A(r0 ). Il suffit
d’appliquer le début de la question à r0 en lieu et place de r pour se convaincre de
X d’o
8x 2 [−r0 , r0 ], 8k 2 N, nk |an ||x|n converge,
S cientifique

n>0

et quand on choisit légitimement x = r…


2. Soit r et r0 deux réels vérifiant 0 < r 6 r0 et soit a une suite appartenant à B(r0 ). Étant
donné qu’à l’évidence, nous avons très positivement

8n 2 N, 0 6 |an |rn 6 |an |r0 n ,

160 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 160 24/10/2018 14:46


le squeezing process affirme dans un premier temps que a appartient à B(r). Si l’on
suppose ensuite que a appartient à A(r) la série ESSEC
X
k n
n |an |r
n>0

converge pour chaque k 2 N et tout particulièrement lorsque k = 0. Il reste alors à ne

C ORRIGÉ
pas avoir oublié une certaine condition nécessaire de convergence affirmant que le terme
général d’une série convergente se doit de tendre vers 0.
3. Soit r appartenant à R⇤+ . Nous allons appliquer tout bêtement la méthode de plongement.
B Nous avons tout d’abord et par définition l’inclusion

A(r) ⇢ RN .

B Comme la suite nulle est un membre éminent de A(r), ce dernier n’est assurément
pas vide.
B Soit a et b appartenant à A(r) et soit λ un nombre réel. Soit également k un entier
naturel quelconque. Si l’on en croit l’inégalité du triangle, nous devons avoir

8n 2 N, 0 6 nk |an + λbn |rn 6 nk |an |rn + |λ|nk |bn |rn ,

et comme il est dit que les deux séries


X X
nk |an |rn et nk |bn |rn
n>0 n>0

convergent, il en est de même de


X
nk |an + λbn |rn ,
n>0

et ce, grâce au théorème de linéarité de la théorie des séries et au test de comparaison en


signe positif.
En bref, a + λb appartient à A(r), et la boucle est bouclée.
� On peut également établir que B(r) est un sous-espace vectoriel de RN et c’est même
un petit peu plus simple…
4.a. Soit à nouveau r 2 R⇤+ et k 2 N. Pour chaque n entier naturel non nul, un (k) est
strictement positif et l’on a tranquillement

un+1 (k) r⇣ 1 ⌘k+1 ,


MATHÉMATIQUES

= 1+
un (k) n n

d’où il ressort immédiatement que


S cientifique

un+1 (k)
−−−−! 0.
un (k) n!+1

ANNALES CCIR 2018-2019 l 161

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 161 24/10/2018 14:46


La suite est assez standard. Du fait de cette limite nulle, il existe un entier n0 > 1, tel que B

ESSEC
Co
un+1 (k) 1 pas
8n > n0 , 6 ,
un (k) 2

et la très classique récurrence sous-géométrique nous amène sans surprise à


la p
C ORRIGÉ

8n > n0 , 0 6 un (k) 6
1
un0 (k), con
2n−n0
la positivité ambiante des uns et des autres ayant eu, plusieurs fois, son pesant d’arachide.
On doit avoir appris en classe de première scientifique que
pui
1
−−−−! 0,
2n−n0 n!+1

and by squeeze en
un (k) −−−−! 0. cou
n!+1

� Les idées que nous venons d’utiliser sont assez célèbres dans la littérature mathématique.
On les doit au français Jean Le Rond d’Alembert. 5. S
on
À bien y regarder, nous venons d’établir que
⇣1⌘
nk ↵n rn = o 2 , et l
n
la positivité de la suite ↵ lui ayant évité la valuation. La fin de l’histoire est assez nautique.
La série de Riemann de paramètre 2 est convergente et à terme positif, il existe sur le marché
un précieux test de prépondérance en signe positif et il résulte effectivement de tout cela Éta
que
↵ 2 A(r).
la s
b. Soit r > 0. Pour la première partie de la question, c’est encore une fois les souvenirs
de nos seize ans qui nous permettent d’affirmer que

1.
β(λ) 2 B(r) , r <
λ qui
La seconde partie va demander une petite organisation.
B Supposons que β(λ) appartienne à A(r). Il en résulte en particulier que la série
géométrique via
X
(λr)n
Pa
MATHÉMATIQUES

n>0

converge, la positivité de λ ayant encore une fois épargné une valuation, et c’est ici le Pou
passage en première année de prépa qui nous conduit à
S cientifique

1.
r<
λ 6. S

162 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 162 24/10/2018 14:47


B Supposons réciproquement que r < 1/λ et soit k un entier naturel quelconque.
Comme on ne change pas une équipe qui gagne, nous allons, comme à la précédente, ESSEC
passer par un n2 -shot. Après avoir observé que

8n 2 N, nk+2 (λr)n = nk+2 en ln(λr) ,

la providentielle stricte négativité du réel ln(λr) et une prépondérance classique bien

C ORRIGÉ
connue doivent gentiment nous amener tout d’abord à
⇣1⌘
nk (λr)n = o 2 ,
n
puis à la convergence de la série X
nk (λr)n
n>0

en suivant le même argument riemannien que celui développé supra. Le résultat des
courses est donc
1
β(λ) 2 A(r) , r < .
λ

5. Soit r appartenant à l’ouvert ]0, ⇢[ et k un entier naturel. Comme a appartient à B(⇢)


on sait que
|an |⇢n −−−−! 0,
n!+1

et la tricky écriture suggérée par le texte révèle que


⇣ ⇣ r ⌘n ⌘
nk |an |rn = o nk .

Étant donné que


r
0< < 1,

la seconde partie de la question précédente oblige la convergence de la série
X ⇣ r ⌘n
nk ,

n>0

qui induit celle de X


nk |an |rn
n>0

via le test de prépondérance en signe ouvertement positif.

Partie 2
MATHÉMATIQUES

Pour alléger un peu le système et si cela ne dérange personne, nous noterons désormais

I = ]−R , R[.
S cientifique

6. Soit x appartenant à I.

ANNALES CCIR 2018-2019 l 163

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 163 24/10/2018 14:47


B Si x = 0, la convergence souhaitée ne mérite pas grand chose ! Au
ESSEC B Si x est non nul on a |x| 2 ]0, R[ et comme a est située dans B(R), la question 5 est
que
formelle. La suite a appartient à A(|x|) et voilà donc, en particulier, que la série
X
|an x|n
n>0 con
C ORRIGÉ

qu’
converge et comme nous savons que toute série absolument convergente est convergente…
7.a. Soit n appartenant à N. Il est plus que prudent de s’organiser un peu.
B Si n = 0, puisque r est donné strictement positif, r−1 est parfaitement sensé et Le
l’inégalité voulue est donc plus que lumineuse. dés
B Si n > 1, nous nous intéressons à la fonction monôme u : t 7! tn qui est évidemment
de classe C 1 sur R et qui satisfait à

8t 2 R, u0 (t) = ntn−1 .
c
Nous pouvons donc lui appliquer l’inégalité des accroissements finis entre x et x + h et L’in
comme l’on a l’inclusion
[x, x + h] ⇢ [−r, r],
il s’avère que
c’e
8t 2 [x, x + h], |u0 (t)| = n|t|n−1 6 nrn−1 ,
seg
et il ne fait plus aucun doute que
Fai
|(x + h) − x | 6 nr
n n n−1
|h|.

b. Il faut bien sûr conserver les dispositions de la question précédente et nous y ajoutons la f
un entier naturel m. Grâce à la linéarité de la sommation, nous avons Soi
m m m un
X X X
an (x + h)n − an xn =
� �
an (x + h)n − xn , l’ou
n=0 n=0 n=0 8.a
et après une légitime triangulation, voilà déjà que la s
�X � X
� m m
X � m
� �
� n�
|an |�(x + h)n − xn �.
(x + �6
n
� an h) − an x est
n=0 n=0 n=0

Le récent a permet maintenant d’aller plus loin, à savoir


�X � Ma
� m m
X � m
X
� n� me
(x + � 6 |h|
n
n|an |rn−1 ,
MATHÉMATIQUES

� a h) − a x
d’in
n n
n=0 n=0 n=0

inégalité qui, pour mieux se rapprocher du bout de la route, sera écrite b


clas
�X �
� m Xm
� |h| Xm
S cientifique

� an (x + h) −
n n�
an x � 6 n|an |rn . (⇤)
� r n=0
n=0 n=0

164 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 164 24/10/2018 14:47


Au vu et au su des positions géographiques des deux réels x et x + h et si l’on en croit la
question 6, les deux séries ESSEC
X X
an (x + h)n et an xn
n>0 n>0

convergent, alors que la position stratégique de r et la question 5 font que a 2 A(r), et

C ORRIGÉ
qu’en particulier X
n|an |rn converge également.
n>0

Le passage à la limite, quand m tend vers +1 dans la toute proche inégalité (⇤), est
désormais légitime et il donne effectivement
+1
X
� �
�fa (x + h) − fa (x)� 6 |h| n|an |rn .
r n=0

c. Soit x appartenant à [−r, r] et soit h un réel tel que x+h appartienne encore à [−r, r].
L’inégalité précédente et le squeezing process entraînant

fa (x + h) −−−−! fa (x),
h!0

c’est-à-dire la continuité de fa en x, et comme ce dernier est n’importe quel élément du


segment [−r, r], la continuité de fa sur [−r, r] est d’ores et déjà acquise.
Faisons le point. Nous venons en réalité d’établir que pour chaque réel r vérifiant

0 < r < R,

la fonction fa est continue sur [−r, r].


Soit maintenant x appartenant à l’ouvert I. Comme |x| < R, on peut facilement insérer
un réel r entre |x| et R, et comme fa est continue sur [−r, r], elle l’est a fortiori sur
l’ouvert ]−r, r[ et en particulier au point x puisqu’il appartient à cet ouvert.
8.a. Soit n appartenant à N. Toujours d’après la question 5 la suite a appartient à A(⇢) et
la série X
n|an |⇢n
n>0

est tout particulièrement convergente, ce qui, nécessairement se doit d’entraîner

(nan ) 2 B(⇢)

Maintenant que la suite (nan ) appartient à l’ensemble B(⇢) la question 7.c, convenable-
ment adaptée à qui de droit, assure la continuité de ga sur ]−⇢, ⇢[ et par la technique
MATHÉMATIQUES

d’insertion utilisée à la fin de la même question 7.c, elle l’est aussi sur I.


b. Soit n un entier naturel non nul. La fonction polynomiale Sn est indéniablement de
classe C 1 sur R et d’après la formule d’Isaac Barrow, nous avons tour à tour
Z x
S cientifique

h ix
8x 2 R, Sn0 (t)dt = S n (t) = Sn (x) − Sn (0) = Sn (x) − a0 ,
0 0

ANNALES CCIR 2018-2019 l 165

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 165 24/10/2018 14:47


et cela est même un petit peu plus que ce qui nous est demandé ! lors
ESSEC c. Soit n 2 N⇤ et x à nouveau situé dans [−r, r]. La question 8.a ayant révélée la
continuité de ga sur ] − R, R[ et celle des polynômes étant légendaire, l’intégrale
Z x� �
ga (t) − Sn0 (t) dt
dès
C ORRIGÉ

0
pui
est parfaitement légitime et vu les définitions des uns et des autres on devrait avoir
Z x� Z x +1
X

ga (t) − Sn0 (t) dt = kak tk−1 dt.
0 0 k=n+1
et c
La triangulation d’une intégrale exigeant un peu de prudence, nous nous organisons un
�S
peu.
liné
B Si x est positif ou nul, nous avons déjà obl
�Z x � Z x� X
+1 � d
� � � �
� g (t) − S 0
(t) dt�6 �


kak tk−1 �dt. rév
� a n �
0 0 k=n+1

B En revanche si x est négatif le triangle se transforme en


ce q
�Z x � Z 0� X
+1 �
� � � � � k−1 �
� g (t) − S 0
(t) dt�6 � ka t �dt.
� a n � k
0 x k=n+1

Mais, pour chaque t appartenant à [0, x], la série


No
X
k−1
kak t
k>n+1

est depuis longtemps absolument convergente, et nous pouvons donc la trianguler(*) à et q


son tour à telle enseigne que de
con
� X
+1 � +1
X +1
X
� � d
� kak tk−1 � 6 k|ak ||t|k−1 6 k|ak |rk−1 ,
k=n+1 k=n+1 k=n+1

la dernière inégalité ne devant casser aucune patte de palmipède. Étant donné que le
Il r
dernier majorant ne dépend plus de t, c’est grâce cette fois à la croissance de l’intégration,
quand les bornes le veulent bien, que nous nous réclamons de l’inégalité
MATHÉMATIQUES

�Z x � +1
X Z x
� � � �
� (t) 0
(t) � 6 k−1

0
ga − Sn dt� kak r
0
dt,
et v
k=n+1
S cientifique

(*) Il est évidemment hors de question de trianguler les semi-convergentes, et pour cause…

166 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 166 24/10/2018 14:47


lorsque le réel x est positif ou nul et de sa cousine
�Z x � +1 Z ESSEC
� � � � X 0
� g (t) − S 0
(t) dt� 6 ka r k−1
dt,
� a n � k
0 k=n+1 x

dès lors que x est négatif. Il se trouve que les deux cas peuvent gentiment se recoller

C ORRIGÉ
puisque, à bien y regarder, nous avons in fine
�Z x � +1
X
� � � �
8x 2 [−r, r], � g (t) − S 0
(t) dt� 6 |x| kak rk−1 ,
� a n �
0 k=n+1

et comme |x| 6 r…
� Signalons que, dans l’argumentation ci-dessus, il y a eu quelques nanos chouias de
linéarité — entrées et sorties de constantes — sur lesquels nous ne sommes pas sentis
obligés d’insister.
d. Soit à nouveau n 2 N⇤ et x 2 [−r, r]. En linéarisant un peu, la question précédente
révèle que
�Z x Z x � +1
X
� �
� g (t)dt − S 0
(t)dt�6 kak rk ,
� a n �
0 0 k=n+1

ce que la récente question b métamorphose en


�Z x � +1
X
� �
� ga (t)dt + a0 − Sn (x)�� 6 kak rk .

0 k=n+1

Nous permettons de rappeler que d’une part et depuis une belle lurette, nous savons que

Sn (x) −−−−! fa (x),


n!+1

et que, d’autre part, les restes de toutes les séries convergentes du monde, sont des suites
de limite nulle. Le passage à la limite quand n tend vers +1 dans l’inégalité précédente
conduit alors tanquillement à l’égalité espérée.
d. Soit x appartenant à l’ouvert I et soit — insertion, insertion !— un réel r vérifiant

|x| < r < R.

Il résulte de la question précédente appliquée à ce providentiel r que


Z x
MATHÉMATIQUES

fa (x) = a0 + ga (t)dt,
0

et voilà donc en définitive que


Z
S cientifique

x
8x 2 I, fa (x) = a0 + ga (t)dt.
0

ANNALES CCIR 2018-2019 l 167

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 167 24/10/2018 14:47


Depuis la question a ci dessus, la fonction ga est continue sur l’intervalle I et d’après le B

ESSEC théorème de Darboux, la fonction app


Z ma
x
x 7! ga (t)dt,
0

est l’une de ses primitives sur l’intervalle en question, tout comme d’ailleurs et constante
C ORRIGÉ

oblige, la copine Z not


x
fa : x 7! a0 + ga (t)dt.
0

Les primitives d’une fonction continue sont assurément de classe C 1 et la dérivation d’une
primitive est aussi désopilante que la quadrature du carré ! So…
et c
 L’hypothèse faite au début de cette deuxième partie est certes a 2 B(R). Mais à bien
y regarder, notre argumentation a uniquement reposé sur la propriété plus faible selon
laquelle
8r 2 ]0, R[, a 2 A(r).
il s
Nous aurons bientôt l’occasion de profiter de cet avantage !
c
9.a. Nous avons déjà répondu à cette question et nous l’avons même légérement dopée
lors de notre chapeau 0.c.
 À bien y regarder, en décalant l’affaire en ajoutant un entier naturel k dans la bagarre, et
en profitant de l’avantage dont nous venons de causer, les conclusions de cette huitième
question peuvent se reformuler de la façon suivante. Lorsqu’une suite b appartient à A(r) 10.
pour tout r 2 ]0, R[, la fonction

+1
X
ub : x 7! bn xn−k et i
n=k

est de classe C 1 sur I et


b
si, x
+1
X
8x 2 I, u (x) =
0
(n − k)bn x n−(k+1)
.
n=k+1

Cette remarque va nous servir lors de la prochaîne question. et q

b. Nous allons, par récurrence sur k 2 N, établir que


En
8k 2 N, f est de classe C k sur I, réu
MATHÉMATIQUES

et que
+1 ✓ ◆
X n et n
8k 2 N, 8x 2 I, fa(k) (x) = k! an xn−k .
k
n=k
S cientifique

B Si k = 0, il semble que ce soit fait depuis longtemps.

168 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 168 24/10/2018 14:47


B Supposons maintenant la propriété acquise pour un certain k 2 N. Comme a
appartient depuis longtemps à A(r) pour tout r 2 ]0, R[, et vu que nous avons suffisamment ESSEC
martelé qu’il en est de même de la suite
✓ ◆
n
n 7! an ,
k

C ORRIGÉ
notre récente reformulation assure que la fonction fa est de classe C 1 sur I et que
(k)

+1
X ✓ ◆
n
8x 2 I, (fa(k) )0 (x) = k! (n − k) an xn−(k+1) ,
k
n=k+1

et comme il est anodin de se convaincre de


✓ ◆ ✓ ◆
8n > k + 1, k!(n − k)
n
= (k + 1)!
n ,
k k+1

il semble bien que l’affaire soit bouclée.


c. Soit n 2 N. On trouve sans problème que
(n)
fa (0) .
an =
n!

10.a. La parfaite connaissance des séries exponentielles officielles nous révèle que

8x 2 R, f↵ (x) = ex ,

et il ne doit plus faire aucun doute que

8k 2 N, f↵(k) (1) = e.

P
b. Le serial geometer n’ignore pas que la série (λx)n ne converge que si, et seulement
si, x appartient à l’intervalle
i 1 1h
J= − , ,
λ λ
et que, par conséquent,
1 .
8x 2 J, fβ (x) =
1 − λx
En outre et si l’on en croit la question 4.b, toutes les conditions de la question 9.b sont
réunies si l’on choisit
MATHÉMATIQUES

1
R= ,
λ
et nous apprenons ainsi que
+1 ✓ ◆
X
S cientifique

n n n−k (k)
8x 2 J, 8k 2 N, k! λ x = fβ (x).
k
n=k

ANNALES CCIR 2018-2019 l 169

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 169 24/10/2018 14:47


Seulement voilà, une très classique récurrence de Cotonou met en lumière que c
ESSEC on
(k) k!λk ,
8x 2 J, 8k 2 N, fβ (x) =
(1 − λx)k+1

ce qui, à quelques aménagement près, ne peut que nous satisfaire.


C ORRIGÉ

� Le lecteur cultivé aura reconnu la fameuse formule du binôme négatif, malheureusement pui
disparue de nos programmes… vra
Partie 3 Il n

11. Nous signalons que l’hypothèse (H) a, entre autres, la vertu d’entraîner que 12.
pla
bn −−−−! 0, b
n!+1
laq
puisque, si ⇢ est un réel strictement supérieur à 1, on a

1 1 et a
8n 2 N, bn = (bn ⇢n )⇥ et −−−−! 0.
⇢n ⇢n n!+1

a. Soit N 2 N. Comme fa est depuis peu de classe C 1 sur ]−R, R[ et comme ici R est
strictement plus grand que 1, on peut largement lui appliquer le théorème de Taylor reste
intégral entre les bornes 1 et 0, à l’ordre N , ce qui s’écrit exactement ce q

N
X Z
(0 − 1)p 0
(0 − t)N (N +1)
fa (0) = fa(p) (1) + fa (t)dt,
p=0
p! 1 N!
et q
et qui, à bien y regarder, ressemble étrangement à notre projet !
c
b. Soit à nouveau N 2 N. Il y a une chose que nous n’avons pas eu encore l’occasion
d’utiliser, en l’occurrence la positivité de la suite a. Elle induit lumineusement la
croissance sur [0, R[ de la fonction fa ainsi que de toutes ses dérivées successives, à
telle enseigne que
À c
8t 2 [0, 1], 0 6 fa(N +1) (t) 6 fa(N +1) (1),

de telle manière que, après une sempiternelle histoire de croissance intégrale et de bornes
bien disposées,
Z (N +1) on
1
tN (N +1) fa (1)
06 f (t)dt 6 = bN +1 .
N! a (N + 1)!
MATHÉMATIQUES

Oui mais voilà, la fine remarque que nous avons faites dans le chapeau de la question 11
oblige ce q
bN +1 −−−−! 0,
S cientifique

N !+1

et par squeeze…

170 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 170 24/10/2018 14:47


c. Quand on fait la synthèse de ce qui s’est passé lors des deux précédentes questions,
on ne peut passer à côté de ESSEC
N
X
(−1)p bp −−−−! fa (0) = a0 ,
n!+1
p=0

C ORRIGÉ
puisqu’une suite ouvertement bornée, en l’occurrence N 7! (−1)N +1 , ne peut pas
vraiment changer le cours de l’histoire d’une tendance vers zéro…
Il ne reste plus qu’à ne pas avoir occulté ce que sont une série convergente et sa somme.
12.a. Il est infiniment possible d’appliquer la question 11.a à la fonction fa en lieu et
(s)

place de fa et nous n’avons plus rien à ajouter.


b. Soit N 2 N. Nous avons déjà signalé la croissance sur [0, R[ de fa grâce à
(N +s+1)

laquelle
8t 2 [0, 1], 0 6 fa(N +s+1) (t) 6 fa(N +s+1) (1),
et avec exactement la même argumentation qu’à la question 11.b, il semble bien que
Z (N +s+1)
1
tN (N +s+1) fa (1) ,
06 f (t)dt 6
0 N! a (N + 1)!

ce qui ne peut que nous séduire, puisqu’à la surprise générale,

⇢N +s+1 (N + s + 1)!
⇥ = 1,
(N + s + 1)! ⇢N +s+1

et qu’un nombre positif est égal à sa valeur absolue…


c. C’est déjà une conséquense de l’hypothèse (H) qui nous révèle que

(N +s+1)
fa (1) N +s+1
⇢ −−−−! 0. (1)
(N + s + 1)! n!+1

À côté de cela, comme

(N + s + 1)!
8N 2 N, = (N + 2) · · · (N + s + 1),
(N + 1)! | {z }
s facteurs

on déduit d’un classique équivalent polynomial que


MATHÉMATIQUES

(N + s + 1)! 1 1 Ns ,
· N +s+1 ⇠ ·
(N + 1)! ⇢ N !+1 ⇢s+1 ⇢N

ce qui peut également s’écrire


S cientifique

(N + s + 1)! 1 1 Ns .
· N +s+1 ⇠ ·
(N + 1)! ⇢ N !+1 ⇢s+1 eN ln ⇢

ANNALES CCIR 2018-2019 l 171

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 171 24/10/2018 14:47


Étant donné que ln ⇢ est un réel strictement positif, c’est encore via une de ces sacrées et c
prépondérances classiques que nous pouvons, in fine, revendiquer
ESSEC Par
(N + s + 1)! 1
· N +s+1 −−−−! 0. (2) 14.
(N + 1)! ⇢ N !+1
d’a
L’encadrement de la question précédente et la conjonction des limites (1) et (2)
C ORRIGÉ

déclenchent alors un énorme squeeze qui nous permet d’envisager la suite.


d. C’est exactement comme à la question 11. Nous clamons cette fois et sans autre
explication que la série b
X (p+s)
fa (1)
(−1)p 15.
p!
p>0

converge et que
+1
X (p+s)
fa (1)
(−1)p = fa(s) (0),
p=0
p! est
et comme d’une part et lumineusement et v

(p+s) (p+s)
fa (1) fa (1) (p + s)! (p + s)!
8p 2 N, = · = bp+s ,
p! (p + s)! p! p!
La
et que d’autre part et selon la question 9.c

fa(s) (0) = s!as ,

nous pouvons asséner sans autre forme de procès que b

+1
X ✓ ◆
p+s
as = (−1)p bp+s ,
p=0
s
et c
la célèbre formule des « trois factorielles » n’étant pas totalement étrangère à l’affaire. Le pas
changement d’indice p = n − s se charge alors du bouquet final. La
13.a. Il suffit d’ouvrir les yeux pour déclarer que fa est polynomiale de degré inférieur
ou égal à d.
b. Il résulte du récent a que

8n > d, bn = 0, la d
liné
et donc n’importe quel réel ⇢ > 1 peut faire le job et pourquoi pas la constante de Kaprekar
MATHÉMATIQUES

⇢ = 6174.

c. Soit s appartenant à [[0, d]]. D’après ce que nous venons d’apprendre et la toute proche à te
question 12.d, nous avons 16.
✓ ◆
S cientifique

+1
X n
as = (−1)n−s bn
n=s
s

172 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 172 24/10/2018 14:47


et comme pour n > d > s, nous savons que bn = 0…

Partie 4 ESSEC
P
14.a. Loi de probabilité discrète oblige, nous savons que la série an converge et a
d’ailleurs 1 pour somme. Une certaine condition nécessaire de convergence oblige alors

C ORRIGÉ
an −−−−! 0 i.e. a 2 B(1).
n!+1

b. Nous proposons tout bêtement R = 1 et la partie 2 se charge du reste.


15.a. Soit t 2 R. La série exponentielle officielle
X tn
n!
n>0

est convergente et a pour somme et . Il s’ensuit à quelque constante près que GX (t) existe
et vaut et−1 et si l’on résume, la fonction GX est déjà définie sur R tout entier et l’on a

8t 2 R, GX (t) = et−1 .

La classe C 1 de GX sur R s’impose alors exponentially et l’on a mentalement


(s)
8s 2 N, GX (1) = 1.

b. Il est officiellement reconnu que

⇢n
8⇢ 2 R, −−−−! 0,
n! n!+1

et comme l’hypothèse (H) exige un réel ⇢ strictement supérieur à 1, nous ne plaisantons


pas cette fois avec Kaprekar et nous proposons plus sérieusement ⇢ = 2. Soit alors n 2 N.
La formule de réciprocité rencontrée en 12.d stipule que
+1
X ✓ ◆ +1
k 1 1 X (−1)k−n ,
an = (−1)k−n =
n k! n! (k − n)!
k=n k=n

la dernière égalité procédant d’une légitime troisfactorialisation et d’un picochouia de


linéarité, et après un rapide changement d’indice, voilà que

e−1 ,
MATHÉMATIQUES

an =
n!
à telle enseigne que X suit la loi de Poisson de paramètre 1.
16.a. On trouve immédiatement que
S cientifique

8n 2 N, an = pq n .

ANNALES CCIR 2018-2019 l 173

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 173 24/10/2018 14:47


En outre, comme pour tout t réel, la série géométrique
ESSEC X
(qt)n
n>0

ne converge que si, et seulement si, |qt| < 1, la fonction GX est déjà définie sur l’ouvert
C ORRIGÉ

i 1 1h
− ,
q q

puisque l’appartenance de p à l’ouvert ]0, 1[ induit en particulier la stricte positivité de q.


Le serial geometer affirmant autoritairement que
i 1 1h
8t 2 − , ,
p ,
GX (t) =
q q 1 − qt

la classe C 1 de GX — fonction rationnelle — est au rendez-vous et c’est via une


récurrence de Cotonou que l’on parvient à
i 1 1h pq s s! .
8t 2 − , ,
(s)
8s 2 N, GX (t) =
q q (1 − qt)s+1

Il y a maintenant plusieurs raisons permettant de justifier que 1 appartient au domaine de


définition de la fonction GX . On peut le déduire manuellement de l’évidente 0 < q < 1,
mais on peut également s’appuyer sur la 14.b et cela étant, il apparaît simplement que
⇣ q ⌘s
(s)
8s 2 N, GX (1) = s! .
p

b. La vérification souhaitée repose, tout bêtement, sur égalité

q 2p − 1 .
1− =
p p

En ce qui concerne la réalisation de l’hypothèse (H) c’est ici un peu plus tricky que dans
l’exemple précédent. Maintenant que q/p est strictement inférieur à 1 et vu la positivité
ambiante nous avons également
p
> 1,
q
inégalité stricte qui permet, comme dans un trou de souris(*), de considérer un réel ⇢
vérifiant
1<⇢< .
p
q
MATHÉMATIQUES

Un tel choix réalisant la providentielle


⇢q
0< < 1,
p
(*)
S cientifique

(*) On parle parfois de stratégie d’insertion.

174 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 174 24/10/2018 14:47


nous avons bien
bn ⇢n −−−−! 0, ESSEC
n!+1

chronique d’une hypothèse (H) attendue. Soit encore une fois n 2 N. Comme l’on ne
change pas une équipe qui gagne, nous ressortons encore une fois la 12.d qui révèle cette
fois que

C ORRIGÉ
✓ ◆⇣ ⌘ +1 ✓ ◆
q k ⇣ q ⌘n X k ⇣ q ⌘k−n
+1
X k
an = (−1)k−n = − ,
n p p n p
k=n k=n

la dernière égalité reposant sur une habile mise en facteur. C’est alors que dans la sublime
formule du binôme négatif obtenue lors de l’exemple 10.b que nous choisissons λ = 1 et

x=− ,
q
p

et ce dernier étant assurément situé dans l’ouvert ]−1, 1[, nous récupérons immédiatement
⇣ q ⌘n ⇣ q ⌘−(n+1)
an = ⇥ 1+ = pq n ,
p p

le calcul final ne présentant pas vraiment d’obstacle. Autant dire maintenant que

X + 1 ,−! G(p).

17.a. Il est indéniable que

8s 2 [[0, d]], deg Hs = s.

La famille en question est donc intérieure à Pol d et formée de polynômes non nuls dont
les degrés sont deux à deux distincts(*). Il s’agit donc déjà d’une famille libre de Pol d .
Comme elle est en outre de longueur d + 1 et que ce dernier est précisément la dimension
de Pol d , la conclusion passe par le théorème de caractérisation des bases en dimension
finie.
 Le lecteur aware aura à coup sûr repéré les fameux polynômes de Gregory-Newton.
b. Bien sûr et as usual, nous opérons en deux temps.
B Soit P un polynôme de degré inférieur ou égal à d. La composition x 7! P (x + 1)
est également polynomiale de degré ouvertement inférieur ou égal à d et il en est donc de
même de la fonction
x 7! P (x + 1) − P (x).
MATHÉMATIQUES

Notre opérateur applique donc bien Pol d dans lui-même.


B Soit P et Q deux polynômes de degré inférieur ou égal à d et soit λ un nombre réel.

(*)
S cientifique

On fait outragement tout un foin de l’échelonnement en degrés ! Il est cependant indéniable que les familles échelonnées
représentent une infime part de la caste des familles de polynômes non nuls à degrés différents…

ANNALES CCIR 2018-2019 l 175

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 175 24/10/2018 14:47


Soit x 2 R. C’est tout bêtement les définitions des opérations sur les fonctions qui D
ESSEC légitiment l’égalité suivante
e
(P + λQ)(x + 1) − (P + λQ)(x) = P (x + 1) + λQ(x + 1) − P (x) − λQ(x), de
nat
qui sera mieux disposée en l’écrivant f
val
C ORRIGÉ

� �
(P + λQ)(x + 1) − (P + λQ)(x) = P (x + 1) − P (x) + λ Q(x + 1) − Q(x) ,

puisqu’elle s’écrit alors exactement


� �
(P + λQ)(x) = (P ) + λ (Q) (x),
la d
et comme cela est d’actualité pour tous les x 2 R… som
� Le lecteur cultivé aura sûrement reconnu le célèbre opérateur de Gregory-Newton.
c. Il n’y a aucune difficulté dans cette question et nous insistons à nouveau sur un point
important. Parmi les polyômes de Gregory-Newton, il n’y a qu’un, en l’occurence H0 ,
qui ne s’annule pas en 0.
et i
d. Nous commençons par doper, via une gentille récurrence finie, les conclusions de la tou
précédente. Nous laissons en effet au lecteur le soin de vérifier que
8
< Hk−s si s 6 k,
8s 2 [[0, d]], 8k 2 [[0, d]], s
(Hk ) =
:
0 si s > k. pui

Soit alors P un élément de Pol d . Base de Gregory-Newton oblige, il existe une famille
de scalaires
(↵0 , . . . , ↵d ),
telle que g
lors
d
X
P = ↵k Hk .
k=0

Soit alors s appartenant à [[0, d]]. Grâce à la linéarité de s


, nous revendiquons
d
X d
X d’o
s
(P ) = ↵k s
(Hk ) = ↵k Hk−s ,
k=0 k=s

le bout du bout reposant sur une subtile gestion de notre récent dopage. Il reste à évaluer
en 0, à tenir compte de la remarque que nous avons faite à la fin de la précédente, pour La
débarquer sur calc
MATHÉMATIQUES

s
(P )(0) = ↵s ,
et nous avons donc effectivement à te
d
X
S cientifique

P = s
(P )(0)Hs .
s=0

176 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 176 24/10/2018 14:47


 Dans la littérature, cette belle égalité s’appelle « formule de Gregory-Newton ».
e. Soit k appartenant à [[0, d]]. Il suffit, en toute légitimité, d’appliquer la belle formule ESSEC
de Gregory-Newton au monôme ek , qui est de degré k, puis d’évaluer en chaque entier
naturel n 2 N.
f. Soit une dernière fois k 2 [[0, d]]. La variable X k ne prenant qu’un nombre fini de
valeurs est tout à fait en droit d’espérer et nous avons

C ORRIGÉ
d
X d X
X d
E(X k ) = nk an = s
(ek )(0)Hs (n)an
n=0 n=0 s=0

la dernière égalité profitant tranquillement de la question précédente. Inversons alors les


sommations, ce qui nous permet de découvrir l’égalité
d
X d
X
E(X k ) = s
(ek )(0) Hs (n)an ,
s=0 n=0

et il suffit d’écarquiller un peu les mirettes pour accepter que, pour tout s 2 [[0, d]], on a
tour à tour
d
X Xd (s)
n(n − 1) · · · (n − s + 1) fa (1)
Hs (n)an = an =
n=0 n=s
s! s!

puisque, dans la présente situation polynomiale, nous avons


d
X
8x 2 R, fa (x) = an xn .
n=0

g. Grâce à la toute récente question f , et après avoir rapidement calculé les s


(ek )
lorsque (s, k) 2 [[0, 2]]2 , on parvient, sans paracétamol, à

3,
b0 = 1 ; b1 = 1 ; b1 + 2b2 =
2
d’où il ressort immédiatement que

1.
b0 = 1 ; b1 = 1 ; b2 =
4
La magique formule d’inversion de la question 13.c révèle alors, après quelques mièvres
calculs, que
MATHÉMATIQUES

1 1 1
a0 = ; a1 = ; a2 = ,
4 2 4
à telle enseigne que X suit la loi binomiale
S cientifique

B(2, 1/2).

ANNALES CCIR 2018-2019 l 177

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 177 24/10/2018 14:47


S UJET
Code sujet : 280
MATHÉMATIQUES
Durée : 4 heures.

La présentation, la lisibilité, l’orthographe, la qualité de la rédaction,


HEC la clarté et la précision des raisonnements entreront pour une part
importante dans l’appréciation des copies.
Les candidats sont invités à encadrer dans la mesure du possible les
résultats de leurs calculs.
Ils ne doivent faire usage d’aucun document : l’utilisation de toute
calculatrice et de tout matériel électronique est interdite. Seule l’uti-
lisation d’une règle graduée est autorisée.
Si au cours de l’épreuve, un candidat repère ce qui lui semble être
une erreur d’énoncé, il la signalera sur sa copie et poursuivra sa
composition en expliquant les raisons des initiatives qu’il sera amené
à prendre.

S
UJET
MATHÉMATIQUES
S cientifique

1/5 Tournez la page S.V.P.

178 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 178 24/10/2018 14:47


S UJET
HEC

MATHÉMATIQUES
S cientifique

2/5

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S UJET

HEC
MATHÉMATIQUES
S cientifique

3/5 Tournez la page S.V.P.

180 l ANNALES CCIR 2018-2019

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S UJET
HEC

MATHÉMATIQUES
S cientifique

4/5

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Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 181 24/10/2018 14:47


S UJET

C
HEC Pré

1.a
clas
ass

son
Vu
ici

et c

l’ex
b
àn
pas
deu
don

C’e
nég

grâ
MATHÉMATIQUES
S cientifique

5/5 2. S
con

La r
abs

182 l ANNALES CCIR 2018-2019

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C ORRIGÉ
Par Jean-Louis Roque, professeur au lycée Pasteur à Neuilly-sur-Seine, et
HEC

external lecturer à l’ESSEC Business School.

Préliminaire

C ORRIGÉ
p
1.a. Soit k 2 N. La fonction u 7! u réalisant ouvertement une bijection croissante de
classe C 1 de l’intervalle ]0, +1[ sur lui même, le théorème de changement de variable
assure que les deux intégrales
Z Z
+1
1 +1
tk e−t dt et
2
u(k−1)/2 e−u du, (1)
0 2 0

sont de même nature, la seconde ayant un indéniable parfum eulerien !


Vu que la fonction d’Euler est officiellement définie sur R⇤+ et puisque (k + 1)/2 est
ici strictement positif, nous déduisons l’existence de
⇣k + 1⌘
,
2
et comme Z +1 ⇣k + 1⌘
u(k−1)/2 e−u du = ,
0 2
l’existence souhaitée est in the pocket.
b. Il est curieux de séparer ici A0 des autres Ak et nous ne le ferons donc pas. Soit donc
à nouveau k 2 N. Le thèorème de changement de variable évoqué supra ne se contente
pas d’évoquer la même nature des intégrales de la ligne (1). Il raconte également que les
deux cousines ont la même valeur dès lors qu’elles ont décidé d’exister et il n’en faut
donc pas plus pour revendiquer

1 ⇣ k + 1 ⌘.
Ak =
2 2
C’est maintenant qu’il ne faut pas avoir oublié les dires du professeur qui ne peut avoir
négligé de mentionner les égalités
⇣1⌘ p
= ⇡ ; (1) = 1 ; 8x > 0, (x + 1) = x (x),
2
grâce auxquelles nous dévoilons aisément que
MATHÉMATIQUES

p p
⇡ 1 ⇡.
A0 = ; A1 = ; A2 =
2 2 4
S cientifique

2. Soit x 2 R. Les fonctions t 7! e−t cos (2xt) et t 7! te−t sin (2xt) sont assurément
2 2

continues sur [0, +1[ et il ne fait absolument aucun doute que

et 0 6 te−t | sin (2xt)| 6 te−t .


2 2 2 2
8x 2 [0, +1[, 0 6 e−t | cos (2xt)| 6 e−t

La récente question a, le test de comparaison en signe positif et le théorème de convergence


absolue devraient alors nous permettre de passer tranquillement à la partie suivante.

ANNALES CCIR 2018-2019 l 183

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 183 24/10/2018 14:47


Partie 1 nou
HEC L’in
3.a. La fonction sin est de classe C 1 sur R et l’on a sans sourciller

| sin 0 | = | cos | 6 1.

Soit alors u 2 R. Nous sommes en droit d’appliquer l’inégalité des accroissements finis éga
C ORRIGÉ

à la fonction sinus entre les réels 0 et u, ce qui, parce que sin 0 ne vaut pas grand chose,
se traduit exactement par
| sin u| 6 |u|.

� L’inégalité des accroissements finis n’est autre que celle de Taylor-Lagrange à l’ordre exp
zéro et par conséquent, même si cela peut paraître capillotracté, nous avons bien utilisé qu’
une formule de Taylor… fait
b. Soit u et v deux nombres réels. À l’heure à laquelle tout le monde se pose la question
de ce que devraient apprendre les élèves au collège et au lycée, on pourrait suggérer de
réapprendre par cœur les fondamentaux de la trigonométrie, parmi lesquels se trouvent
les quatre formules de Simpson
pui
u+v u − v, disp
cos u + cos v = 2 cos
2
cos
2 mir
u+v v − u,
cos u − cos v = 2 sin sin
2 2
u+v u − v,
sin u + sin v = 2 sin
et c
cos
2 2
u+v u − v. exis
sin u − sin v = 2 cos sin
2 2

Cela devrait peut-être nous éviter de devoir rappeler un jour à des post ados majeurs et
vaccinés que D’u
cos 2 u + sin 2 u = 1.

En ce qui concerne la justification demandée, il est officiellement conseillé de savoir que,


pour tout couple (a, b) de nombres réels, on a
chr
cos (a − b) = cos a cos b + sin a sin b et cos (a + b) = cos a cos b − sin a sin b, enti
�L
d’où il ressort mentalement que
l’ap
alor
2 sin a sin b = cos (a − b) − cos (a + b),
4.a
et il reste alors à faire les choix l’in
MATHÉMATIQUES

avo
u+v v − u.
a= et b =
2 2
la c
S cientifique

c. Quand on maîtrise les problématiques liées aux fonctions définies par des intégrales, b
on sait que cette continuité doit être abordée via la définition, et c’est la raison pour laquelle fera

184 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 184 24/10/2018 14:47


nous annonçons a et x dans R et que nous nous penchons sur la quantité F (x) − F (a).
L’intégration étant linéaire, nous avons déjà HEC
Z +1 � � 2
F (x) − F (a) = cos (2xt) − cos (2at) e−t dt,
0

égalité que la seconde formule de Simpson métamorphose en

C ORRIGÉ
Z +1
2
F (x) − F (a) = 2 sin ((x + a)t) · sin ((a − x)t)e−t dt,
0

expresssion faisant apparaître une intégrale dont la convergence absolue ne peut échapper
qu’à ceux — ou celles — qui souffrent de diplopie communicative ! On peut donc tout à
fait légitimement trianguler l’affaire et voilà donc maintenant que
Z +1
2
|F (x) − F (a)| 6 2 | sin ((x + a)t)| · | sin ((a − x)t)|e−t dt,
0

puisque les bornes en ont décidé ainsi et que les quantités déjà positives sont, as usual,
dispensées de valuation. L’inégalité taylorienne du récent a et une ouverture ciblée des
mirettes devraient alors nous amener sans ambages à
2 2
8t 2 [0, +1[, | sin ((x + a)t)| · | sin ((a − x)t)|e−t 6 |x − a|te−t ,

et comme l’intégration est linéaire, croissante quand les bornes le veulent bien, et que A1
existe et vaut 1/2, il ne devrait pas être insurmontable d’asséner que

|F (x) − F (a)| 6 |x − a|. (2)

D’un certain squeezing process nous déduisons que

F (x) −−−−! F (a),


x!a

chronique d’une continuité de F au point a, et donc d’une continuité de F sur R tout


entier, puisque a est, depuis la genèse, n’importe quel nombre réel.
� L’inégalité (2) étant étant d’actualité pour tous les couples (a, x) de nombres réels,
l’application F fait partie des fonctions dites « lipschitziennes » sur R et sa continuité est
alors très culturelle…
4.a. Soit u appartenant à R. La fonction sin étant de classe C 2 sur R, on peut lui appliquer
l’inégalité de Taylor-Lagrange à l’ordre 1 entre 0 et u, et comme sin 00 = − sin , nous
MATHÉMATIQUES

avons
| sin 00 | = | sin | 6 1,
la conclusion est limpide.
S cientifique

b. Qu’on se le dise, nous n’admettrons rien du tout. L’existence de la fameuse intégrale


fera partie intégrante de nos préoccupations !

ANNALES CCIR 2018-2019 l 185

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 185 24/10/2018 14:47


Soit x et h deux nombres réels. C’est la linéarité de l’intégration qui légitime, dans un
HEC
premier temps, l’égalité
Z +1
2
F (x + h) − F (x) + 2hG(x) = A(t)e−t dt. (3)
0

où, histoire d’alléger un peu la situation, nous nous sommes permis de noter A la fonction
C ORRIGÉ

t 7! cos (2(x + h)t) − cos (2xt) + 2ht sin (2xt).

Soit alors t appartenant à R. Étant officiellement entendu que

cos (2(x + h)t) = cos (2xt) cos (2ht) − sin (2xt) sin (2ht),

nous pouvons mentalement envisager l’égalité

A(t) = cos (2xt) · (cos (2ht) − 1) + sin (2xt) · (2ht − sin (2ht)),

grâce à laquelle

|A(t)| 6 (1 − cos (2ht))| cos (2xt)| + |(2ht − sin (2ht)) · sin (2xt)|,

l’évidente valuation
| cos (2ht) − 1| = 1 − cos (2ht)
et l’inégalité triangulaire standard n’étant sûrement pas étrangères à l’affaire. Toujours
fidèles à la politique de l’allégé « 0 % », nous décidons cette fois de

B(t) = (1 − cos (2ht))| cos (2xt)| + |(2ht − sin (2ht)) · sin (2xt)|,

et nous laissons à notre dévoué lecteur le soin de réutiliser la standard pour parvenir
tranquillement à
2 2 2
B(t)e−t 6 3e−t + 2|h|te−t ,
à telle enseigne qu’au bout du tunnel
2 2 2 2
0 6 |A(t)|e−t 6 B(t)e−t 6 3e−t + 2|h|te−t .

Les intégrales A0 et A1 du liminaire ayant, depuis longtemps, la bonne idée d’exister,


selon le théorème de linéarité, il en est de même de
Z +1
� −t2 2�
3e + 2|h|te−t dt,
0

ce qui permet au test de comparaison en signe positif de déclarer la convergence des deux
intégrales
MATHÉMATIQUES

Z +1 Z +1
B(t)e−t dt et
2 2
|A(t)|e−t dt.
0 0
(*)
L’existence de la seconde autorise enfin la triangulation(*) de l’intégrale de la ligne (3)
S cientifique

(*) Nous rappelons, au risque de radoter, qu’il est hors de question de trianguler les semi-convergentes…

186 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 186 24/10/2018 14:47


et voilà donc maintenant que
Z +1 HEC
2
|F (x + h) − F (x) + 2hG(x)| 6 |A(t)|e−t dt,
0

puisque les bornes sont dans le sens du vent, et nous profitons de la bonne brise pour
déduire de la croissance de l’intégration que

C ORRIGÉ
Z +1 Z +1
2 2
|A(t)|e−t dt 6 B(t)e−t dt,
0 0

ce qui n’est pas vraiment pour nous déplaire…


c. Soit derechef x et h appartenant à R. On peut commencer par majorer gentiment la
fonction B en profitant au maximum des inégalités

| sin | 6 1 ; | cos | 6 1 ; 1 − cos > 0,

qui devraient rapidement nous convaincre de

8t 2 R+ , B(t) 6 |2ht − sin (2ht)| + 1 − cos (2ht).

Oui mais voilà, étant donné qu’il semble improbable de n’avoir jamais rencontré
l’inégalité(*)
u2 ,
8u 2 R, 1 − cos u 6
2
alors que selon la récente a

u2 ,
8u 2 R, |u − sin u| 6
2
il sera difficile de s’opposer à

8t 2 R+ , B(t) 6 4h2 t2 .
p
Comme l’intégrale A2 des prolégomènes existe et vaut ⇡/4, et comme nous avons
toujours le vent en poupe, nous sommes en mesure de déduire de ce qui précède que
p
|F (x + h) − F (x) + 2hG(x)| 6 ⇡ h2 ,

et il ne reste plus qu’à proposer p


C= ⇡
MATHÉMATIQUES

qui est bien un réel strictement positif, comme le savait déjà Archimède…

(*) Si, par le plus pur des hasards, ce n’était pas le cas, sachez que l’on peut la déduire de la question 3.a, modulo la formule
8a2 R, 1−cos 2a = 2 sin 2 a.
S cientifique

ANNALES CCIR 2018-2019 l 187

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 187 24/10/2018 14:47


5.a. Soit une dernière fois x et h deux nombres réels. On déduit trèsmentalement de la la d
précédente que nou
HEC
F (x + h) − F (x) + 2hG(x) = o(h),
ce qui est une des façons — celle du développement limité à l’ordre 1 — de justifier la
dérivabilité de F au point x ainsi que l’égalité
il e
C ORRIGÉ

F 0 (x) = −2G(x).
N
Comme cela vaut pour n’importe quel réel x, la fonction F est bien dérivable sur R et à l’
l’on a l’égalité fonctionnelle pen
F 0 = −2G. exe

b. Soit x 2 R. Nous venons d’apprendre que


Z +1
2
F 0 (x) = −2 te−t sin (2xt)dt, est
0
dan
et nous nous intéressons alors fortement aux fonctions De

u : t 7! sin (2xt) et v : t 7! e−t .


2
Par

Att
Elles sont sans l’ombre d’un doute de classe C 1 sur R+ et l’on a d’une part
que
u0 (t) = 2x cos (2xt) et v 0 (t) = −2te−t ,
2
8t 2 R+ ,

alors que d’autre part


6. P
u(t)v(t) −−−−! 0 et u(0)v(0) = 0, pen
t!+1

a
le produit d’une fonction bornée par une fonction de limite nulle… Il résulte ainsi du
théorème d’intégration impropre par parties et d’un nanochouia de linéarité que
Z +1
2
F 0 (x) = −2x e−t cos (2xt)dt,
0 à te
clas
ce qui devrait amplement nous combler. l’éq
 Nous rappelons au docile lecteur qu’il n’a pas le droit de pratiquer l’intégration par
parties comme nous venons de le faire. Il devra officiellement partialiser, pratiquer la by
parts sur l’intégrale partielle — qui est une intégrale sur un segment — puis légitimer un nou
passage à la limite et nous lui confions la tâche ingrate…
c. À la lecture du projet, nous décidons de sortir de notre chapeau la fonction
MATHÉMATIQUES

2
x 7! ex F (x) chr
que nous baptisons φ. Elle est sans aucun doute dérivable sur R et l’on a sans surprise b
S cientifique

2 2
8x 2 R, φ0 (x) = 2xex F (x) + ex F 0 (x) = 0,

188 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 188 24/10/2018 14:47


la dernière égalité reposant sur la toute dernière question. Comme R est un intervalle,
nous déduisons que φ est une application constante et comme
HEC
p
⇡,
φ(0) = F (0) = A0 =
2

il est grand temps de changer de partie !

C ORRIGÉ
 Nous rebondissons sur l’argument « R est un intervalle » que nous venons de mentionner
à l’instant. Il est absolument crucial. En effet, contrairement à ce que d’aucuns pourraient
penser, une dérivée nulle sur une partie quelconque de R n’entraîne pas la constance. Par
exemple, la fonction µ de John Machin définie sur R⇤ par

1,
8x 2 R⇤ , µ(x) = arctan x + arctan
x

est dérivable à dérivée nulle, mais elle n’est pas constante. Citons, pour l’anecdote, que
dans les années 1980, à un concours parisien, 98% des candidats l’ont déclarée constante !
De quoi rêver n’est-il pas…

Partie 2

Attention, et pour qu’il n’y ait pas d’ambiguïté, il nous semble préférable de préciser
que D est l’ensemble des réels qui ne sont pas des multiples entiers de 2⇡, c’est-à-dire

D = R r 2⇡Z.

6. Pour éviter de nous répéter, nous annonçons ici un entier n 2 N qui nous servira
pendant toute la deuxième partie.
a. Les aficionados de la fonction sin ne peuvent ignorer que l’on a l’équivalence logique

u
8u 2 R, sin 6= 0 , u 2 D,
2

à telle enseigne que selon les théorèmes généraux, la fonction 'n est carrément de
classe C 1 sur D et nous n’allons pas nous en plaindre. En outre, si l’on en croit
l’équivalence standard
sin ⇠ ⇠ ⇠,
⇠!0

nous devrions avoir rapidement

1
'n (u) −−−−! n + ,
MATHÉMATIQUES

u!0 2

chronique d’un prolongement par continuité en 0 annoncé.


b. Il est indéniable que l’on a l’équivalence logique
S cientifique

8u 2 R, u2D , u + 2⇡ 2 D, (a)

ANNALES CCIR 2018-2019 l 189

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 189 24/10/2018 14:47


et nous rappelons que que
HEC 8x 2 R, sin (x + ⇡) = − sin x,

de telle manière que, presque mentalement

8u 2 D, 'n (u + 2⇡) = 'n (u). (b)


C ORRIGÉ

Les deux propriétés (a) et (b) stipulent, par définition, que 'n est 2⇡-périodique sur D et L
comme, depuis peu, elle se prolonge par continuité en 0, elle va périodiquement le faire
également en tous les 2k⇡ où k appartient à Z et il se trouve que ce sont précisément les
points qui nous manquaient…
et n
 Le texte a décidé de noter encore 'n la fonction prolongée, et vu tout ce que nous
savons, la nouvelle fonction 'n est donc définie sur R par b
de c
8 1 sin (2n + 1)u/2
>
>
> · si u 2 D, B
<2 sin u/2
8u 2 R, 'n (u) =
>
>
:n + 1
>
sinon.
2
Oui
c. Soit u appartenant à R. Nous devons nous organiser un poquitı́n.
B Si u appartient à D, il est clair qu’il en est de même de −u, et au vu et au su de la
première facette de 'n et de l’imparité de la fonction sin nous réclamons
et l
'n (−u) = 'n (u).

B Si u n’appartient pas à D, il en est bien sûr de même de −u et l’on a encore

'n (−u) = 'n (u),


B
puisque les deux lascars sont égaux à n + 0.5 !
7.a. Soit u un nombre réel. Le parfum « géométrique » de la situation nous incite à ne
pas perdre la raison…
B Si eiu 6= 1, la géomnémotechnique ce q
premier terme écrit − premier terme non écrit  Il
1 − raison c
stipule que
n
X eiu − ei(n+1)u einu − 1 ,
MATHÉMATIQUES

eiku = = eiu ⇥ iu
1−e iu e −1
k=1

la dernière égalité procédant d’une simple mise en facteur. C’est maintenant grâce à l’une la f
des formules dites de l’angle moitié, à savoir la q
S cientifique

x ix/2
8x 2 R, eix − 1 = 2i sin e
2

190 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 190 24/10/2018 14:47


que l’on parviendra sans problème à
n HEC
X sin (nu/2)
eiku = ei(n+1)u/2 .
sin (u/2)
k=1

Si, en revanche, eiu = 1, notre somme est égale à n.

C ORRIGÉ
B

 Le lecteur sans complexe est supposé savoir que

8u 2 R, eiu 6= 1 , u 2 D,

et nous saurons nous en souvenir.


b. Soit à nouveau u 2 R. La nouvelle somme en question n’est autre que la partie réelle
de celle de la question précédente et par conséquent
B Si u 2 D, nous avons
n
X sin (nu/2)
cos (ku) = cos ((n + 1)u/2).
sin (u/2)
k=1

Oui mais voilà, une quasi officielle formule trigonométrique relate que

1 1
sin (nu/2) cos ((n + 1)u/2) = sin ((2n + 1)u/2) − sin (u/2),
2 2
et l’on récupère effectivement
n
X 1.
cos (ku) = 'n (u) −
2
k=1

B Si u 2
/ D, nous avons cette fois
n
X
cos (ku) = n,
k=1

ce qui ne peut que nous satisfaire.


 Il est bon de noter que cette relation permet de retrouver la parité de la fonction 'n .
c. Soit k 2 N⇤ . Comme il s’agit d’un nombre non nul, il ne fait aucun doute que
Z 2⇡ h sin ku i2⇡
cos ku du = = 0,
MATHÉMATIQUES

0 k 0

la fonction sinus s’annulant à l’est comme nous le savons bien. En conséquence, d’après
la question précédente et la linéarité de l’intégration, nous avons
S cientifique

Z 2⇡ Z 2⇡
du
'n (u)du = = ⇡.
0 0 2

ANNALES CCIR 2018-2019 l 191

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 191 24/10/2018 14:47


8. Soit x 2 R. L’intégrabilité de sur n’importe quel segment de R repose sur sa et c
HEC continuité, et si, dans l’intégrale
Z x+T
(u)du,
x
la d
on envisage le changement de variable affine u = x + v, que le lecteur n’aura aucun mal
C ORRIGÉ

fini
à légitimer, on tombe exactement sur ce qui nous est demandé !
10.
 Il s’agit d’une propriété bien connue de l’intégrale des fonctions périodiques. L’intégrale
troi
sur une période ne dépend pas de la période en question…
9.a. Soit x 2 R. Nous prenons nos deux séries l’une après l’autre.
B Nous avons d’une part
� �
8k 2 N⇤ , e✓k f (x + 2k⇡) = exp −✓(x2 + k(2x⇡ − 1) + 4k2 ⇡ 2 ) . ce q

Un argument polynomial providentiel indiquant que a


qui
−✓(x2 + k(2x⇡ − 1) + 4k2 ⇡ 2 ) −−−−! −1,
k!+1

il en ressort dans une première foulée que

e✓k f (x + 2k⇡) −−−−! 0, Soi


k!+1
que
et dans une seconde, que
f (x + 2k⇡) = o(e−✓k ).
Comme ✓ est strictement positif, la série géométrique
X la 2
e−✓k , don
k>1

est convergente et à terme général positif et, selon le test de prépondérance en signe positif,
la série X
f (x + 2k⇡),
et n
k>1
b
est effectivement convergente.
B C’est maintenant à la surprise générale, que la cousine
X
f (x − 2k⇡),
k>1 éga
MATHÉMATIQUES

déclare sa convergence mutatis mutandis…


b. Soit x appartenant à R. Nous avons
est
+1 +1
S cientifique

X X
H(−x) = f (−x + 2k⇡) + f (−x) + f (−x − 2k⇡),
k=1 k=1

192 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 192 24/10/2018 14:47


et comme f est ouvertement paire, cela se métamorphose en
+1 +1 HEC
X X
H(−x) = f (x − 2k⇡) + f (x) + f (x + 2k⇡) = H(x),
k=1 k=1

la dernière égalité procédant d’une simple ouverture des mirettes. Nous rappelons pour

C ORRIGÉ
finir que, lorqu’une fonction paire est dérivable sur R sa dérivée est impaire and so…
10. Nous annonçons un entier naturel non nul N qui nous sera utile jusqu’à la fin de la
troisième partie et nous demandons à notre lecteur de se convaincre que l’on a en réalité
N
X
8x 2 R, HN (x) = f (x + 2k⇡),
k=−N

ce qui est une plus jolie façon d’envisager les choses.


a. Nous mentionnons maintenant la continuité ambiante et la linéarité de l’intégration
qui ne peuvent sûrement pas s’opposer à l’égalité
Z 2⇡ N
X Z 2⇡
HN (x) cos nx dx = f (x + 2k⇡) cos nxdx.
0 k=−N 0

Soit alors k appartenant à [[−N, N ]]. Grâce au changement de variable affine x = u−2k⇡,
que le lecteur n’aura aucun mal à légaliser, on trouve aisément que
Z 2⇡ Z 2(k+1)⇡
f (x + 2k⇡) cos nx dx = f (u) cos nu du,
0 2k⇡

la 2⇡-périodicité de la fonction cos n’étant pas totalement étrangère à l’affaire, et voilà


donc au bout du compte que
Z 2⇡ N
X Z 2(k+1)⇡
HN (x) cos nx dx = f (u) cos nu du,
0 k=−N 2k⇡

et nous n’avons plus qu’à demander à Michel Chasles de faire correctement son travail.
b. À bien y regarder, la question précédente vient de révéler que
Z 2⇡ Z 2(N +1)⇡ Z 0
HN (x) cos nx dx = f (u) cos nu du + f (u) cos nu du,
0 0 −2N ⇡

égalité qui, parce que l’intégrande


MATHÉMATIQUES

u 7! f (u) cos nu

est manifestement paire, devient dans la foulée


S cientifique

Z 2⇡ Z 2(N +1)⇡ Z 2N ⇡
HN (x) cos nx dx = f (u) cos nu du + f (u) cos nu du.
0 0 0

ANNALES CCIR 2018-2019 l 193

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 193 24/10/2018 14:47


Il est alors temps de s’intéresser à l’intégrale impropre
HEC Z +1 Z +1
f (u) cos nu du i.e.
2
e−✓u cos nu du.
0 0

Comme le réel ✓ est strictement positif son existence repose mentalement sur les arguments
du préliminaire et nous pouvons alors effectivement revendiquer
C ORRIGÉ

Z 2⇡ Z +1
HN (x) cos nx dx −−−−! 2 f (u) cos nu du.
0 N !+1 0

c. Il y a ici un peu de turbulence ! Tout d’abord, vu ce que nous allons être amenés à
faire, il n’est pas du tout nécessaire de laisser x gambader dans l’immensité de R, mais
il paraît plus sage de le confiner au segment [0, 2⇡]. Ensuite, il y a une légère faute de
frappe car on a en réalité
+1
X 2
⇡2
8x 2 [0, 2⇡], |H(x) − HN (x)| 6 2 e−4✓k ,
k=N

et dans ces conditions, la preuve de notre affaire repose sur des considérations totalement
élémentaires et nous laissons donc à notre dévoué lecteur, le soin de s’en dépatouiller.
d. La linéarité de l’intégration indique dans un premier temps que
Z 2⇡ Z 2⇡ Z 2⇡ � �
H(x) cos nx dx − HN (x) cos nx dx = H(x) − HN (x) cos nx dx,
0 0 0

et d’après l’inégalité triangulaire intégrale et un chouia de croissance nous en déduisons


que
�Z 2⇡ Z 2⇡ � Z 2⇡
� � � �
� H(x) cos nx dx − H (x) cos nx dx �6 �H(x) − HN (x)�dx,
� N �
0 0 0

parce que | cos | 6 1 et que les bornes d’intégration vont dans notre sens. Grâce à
la précédente et aux mêmes sempiternels arguments nous pouvons même aller très
tranquillement jusqu’à
�Z 2⇡ Z 2⇡ � +1
X
� � 2 2

� H(x) cos nx dx − HN (x) cos nx dx��6 4⇡ e−4✓k ⇡
0 0 k=N

Le reste d’une série convergente étant légendairement de limite nulle, il s’avère par squeeze
que
MATHÉMATIQUES

Z 2⇡ Z 2⇡
HN (x) cos nx dx −−−−! H(x) cos nx dx,
0 N !+1 0

et si l’on en croit la récente b et l’unicité de la limite, nous pouvons déjà revendiquer


(*)
S cientifique

Z 2⇡ Z +1
H(x) cos nx dx = 2 f (u) cos nu du.
0 0

194 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 194 24/10/2018 14:47


Cela étant, nous avons déjà évoqué le parfum de consanguinité entre cette dernière
intégrale et ses consœurs de genre F (x) des prolégomènes, et via le changement de HEC
variable affine
u= p ,
t

que notre dévoué lecteur rendra très légitime, il se trouve que

C ORRIGÉ
Z +1 Z +1 ⇣ n ⌘ dt
e−t cos p t p ,
2
2 f (u) cos nu du = 2
0 0 ✓ ✓
ce qui, après avoir allumé allègrement les quinquets, devient tour à tour
Z +1
2 ⇣ n ⌘ r⇡ ⇣ n2 ⌘
2 f (u) cos nu du = p F p =
⇥ ⇥ exp − ,
0 ✓ 2 ✓ ✓ 4✓

à notre plus grande satisfaction !


11. Soit n 2 N. Le texte annonce un réel x et il utilise la même lettre comme variable
ghost(*) pour noter l’intégrale an et cela risque de faire des étincelles. C’est la raison
pour laquelle, et si cela ne dérange personne, nous préférerons écrire
Z 2⇡
an = H(u) cos nu du.
0

a. Il suffit encore d’un argument linéariste pour nous retrouver devant


N
X Z 2⇡ ⇣ N
X ⌘
a0 + 2 an cos nx = H(u) 1 + 2 cos nx cos nu du,
n=1 0 n=1

et selon une classique trigonométrique selon laquelle

8(a, b) 2 R2 , 2 cos a cos b = cos (a + b) + cos (a − b),

et la jolie égalité de la question 7.b, tout cela devrait devenir


N
X Z 2⇡ � �
a0 + 2 an cos nx = H(u) 'N (u + x) + 'N (u − x) du.
n=1 0

Il ne reste alors plus qu’à effectuer the linear road dans l’autre sens !
b. La première intégrale du right hand side de la précédente réclame, à cors et à cris, le
changement de variable affine
u = v − x,
MATHÉMATIQUES

alors que la seconde exige le changement

u = v + x,

(*)
S cientifique

C’est le nom que nous donnons aux variables dites « muettes » qui, malgré leur extrême efficacité dans l’art de la notation, ne
sont que des dénis de réalité !

ANNALES CCIR 2018-2019 l 195

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 195 24/10/2018 14:47


et après les avoir traditionnellement légitimés le lecteur téméraire devrait parvenir alor
HEC aisément à
N
X Z x+2⇡ Z 2⇡−x cett
a0 + 2 an cos nx = H(v − x)'N (v)dv + H(v + x)'N (v)dv
n=1 x −x
C ORRIGÉ

C’est alors le moment de se remémorer les 2⇡-périodicités des fonctions H et 'N ainsi pui
que la délicieuse question 8 et de refaire un bout de route in return et le futur devrait dire
ressembler à
N
X Z 2⇡ � � et il
a0 + 2 an cos nx = H(v + x) + H(v − x) 'N (v)dv.
n=1 0

Il faut maintenant que nous vous fassions une confidence. Nous vous rappelons qu’il y a
en réalité deux fonctions 'N , celle de la genèse qui était définie sur D et son prolongement vu
par continuité à R. Dans l’intégrale que nous venons de rencontrer, en l’occurrence
Z 2⇡ � � Seu
H(v + x) + H(v − x) 'N (v)dv, défi
0
B
figure le solide prolongement 'N alors que si l’on s’aventure à l’écrire avec la version de
la genèse, elle devrait ressembler à
⇣ 1⌘
Z sin N + v la 2
voi
2⇡ � � 2
H(v + x) + H(v − x) ⇥ dv.
v
0 2 sin
2

Compte tenu de tout ce que nous savons, cette dernière est faussement impropre et comme
il est bien connu qu’une intégrale faussement impropre est égale à l’intégrale propre de et c
la fonction prolongée, nous devons accepter l’idée selon laquelle d
⇣ 1⌘
� sin N + 2 v
Z 2⇡ Z 2⇡
� � �
H(v+x)+H(v−x) 'N (v)dv = H(v+x)+H(v−x) ⇥ dv,
v
0 0 2 sin
2

et il est alors temps de passer à la question suivante. et, v


c. Nous allons procéder en trois temps, et quelques mouvements !
B La continuité de Kx sur l’ouvert ]0, 2⇡[, n’est qu’une affaire ouverte de théorèmes
MATHÉMATIQUES

généraux, puisque la continuité de H sur R a du être docilement admise.


B Il se trouve maintenant que nous n’avons pas admis que la continuité de H sur R.
est
Nous avons dû carrément accepter sa classe C 1 — sa simple dérivabilité aurait d’ailleurs
suffi — et selon le tandem Taylor-Young, nous avons au point x et lorsque v est au
S cientifique

voisinage de 0
H(v + x) = H(x) + vH 0 (x) + o(v),

196 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 196 24/10/2018 14:47


alors qu’en −x
H(v − x) = H(−x) + vH 0 (−x) + o(v), HEC
cette dernière s’écrivant également

H(v − x) = H(x) − vH 0 (x) + o(v),

C ORRIGÉ
puisque, depuis la question 9.b la fonction H est paire et sa dérivée H 0 est impaire. Autant
dire alors que
H(v + x) + H(v − x) − 2H(x) = o(v),
et il en résulte immédiatement que

Kx (v) −−−−! 0,
v!0
v>0

vu que de façon très standard


v
sin ⇠ v.
2 v!0
Seulement voilà, le texte a décidé de Kx (0) = 0, et la continuité de Kx en 0 est
définitivement in the pocket.
B Remarquons désormais que

8v 2 ]0, 2⇡[, Kx (2⇡ − v) = Kx (v),

la 2⇡-périodicité et la parité de H, étant totalement responsables de cet état de choses et


voilà donc, grâce à notre deuxième temps, que

Kx (v) −−−−! 0,
v!2⇡
v<2⇡

et comme le texte a dit que Kx (2⇡) = 0…


d. La question 7.c, écrite en version faussement impropre, révèle que
⇣ 1⌘
Z 2⇡ sin N + v
2
⇡= dv,
v
0 2 sin
2
et, via la toute récente question b, c’est tout à fait linéairement que la quantité

N
X
a0 + 2 an cos nx − 2⇡H(x)
MATHÉMATIQUES

n=1

est définitivement égale à l’intégrale


Z ⇣
2⇡
H(v + x) + H(v − x) − 2H(x) 1⌘
S cientifique

⇥ sin N + v dv.
v 2
0 2 sin
2

ANNALES CCIR 2018-2019 l 197

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 197 24/10/2018 14:47


Au risque de radoter, il s’agit encore d’une fausse impropre sur l’ouvert ]0, 2⇡[ et Com
HEC
la question précédente est justement là pour nous apprendre que le prolongement par
continuité de son intégrande au segment [0, 2⇡] est précisément
⇣ 1⌘
v 7! Kx (v)⇥ sin N +
2
v, et a
con
C ORRIGÉ

et nous n’avons plus rien à ajouter. S


12.a. C’est l’inénarrable lemme de Riemann-Lebesgue que le lecteur affûté a forcément joli
rencontré un jour de sa vie. Nous en rappelons les grandes lignes. On commence par
annoncer comfortably(*) un réel strictement positif λ et l’on se précipite sur les deux
fonctions La
cos λt ,
u : t 7! g(t) et v : t 7! −
λ 13.
dont la classe C sur le segment [0, 1] est incontestable et dont les dérivées vérifient
1

8t 2 [0, 1], u0 (t) = g 0 (t) et v 0 (t) = sin λt.

Une intégration par parties plus loin et quelques envolées nautiques nous propulsent alors
vers
�Z 1 � 
g(t) sin λt dt� 6 ,
� �

0 λ
où  n’est autre que la constante
Z 1
 = |g(1)| + |g(0)| + |g 0 |.
0

et il ne reste plus maintenant qu’à bénir le squeezing process.


� Le texte est assez obligé d’admettre le lemme de Riemann-Lebesgue pour une fonction g
qui n’est que continue, car la preuve en est beaucoup plus difficile que celle du cas de la
classe C 1 , bien plus difficile en réalité ! Nou
b. Si l’on en croit le lemme de Riemann-Lebesgue version boosted et les récentes l’év
question c et d, il ne fait aucun doute que var
la p
N
X aux
a0 + 2 an cos nx − 2⇡H(x) −−−−! 0, été
N !+1
n=1

ce que l’aware serial transforme déjà illico en


MATHÉMATIQUES

+1
X
a0 + 2 an cos nx = 2⇡H(x).
n=1

(*)
S cientifique

Nous appelons hypothèse de confort toute supposition faites par nos soins qui doit nous apporter un réel bien-être tout en ne
gênant aucunement la problématique. C’est, en mathématique, une pratique stratégique très courante !

198 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 198 24/10/2018 14:47


Comme nous avons aperçu un peu plus haut que, pour tout n 2 N, on a
r ⇣ n2 ⌘ HEC
an =

⇥ exp − ,
✓ 4✓
et au vu et au su de la définition de H(x), il suffit de quelques légers aménagements pour
conclure en beauté.

C ORRIGÉ
 Si l’on ose faire des sommes sur Z, le right hand side de la formule de Poisson peut très
joliement s’écrire X 2
e−✓(x+2k⇡) .
k2Z

La classe !
13.a. Après mûre réflexion, voici ce que nous suggérons.
function v = jeu (p)
i = 1;
v = 1;
s = 1;
j = 1;
while rand ( ) > p
i = i+1;
j = j +1;
if j > s then v = −v ; // changement de main
s = s+2;
j = 1 ; // réinitialisation du compteur
end ;
end ;
if v == 1 then disp (00 A vainqueur ) ; else disp (00 B vainqueur ) ;
00 00

end ;
endfunction

Nous illustrons le fonctionnement de notre trouvaille grâce à ce tableau décrivant


l’évolution des variables i, v, s, j, au cours du temps et nous y avons même ajouté une
variable a censée comptabiliser le nombre de participations de A aux différents lancers de
la pièce. Nous avons signalé en gras les valeurs de la variable j strictement supérieures
aux seuils s qui provoquent les changement de main et les colonnes correspondantes ont
été dédoublées pour des raisons qui tombent sous le sens.

var init fA fB fB fB fA fA fA fA fA
MATHÉMATIQUES

i 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10

v 1 1 −1 −1 −1 −1 1 1 1 1 1 1 −1

s 1 1 3 3 3 3 5 5 5 5 5 5 7

j 1 2 1 2 3 4 1 2 3 4 5 6 1
S cientifique

a 0 1 1 1 1 2 3 4 5 6

ANNALES CCIR 2018-2019 l 199

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 199 24/10/2018 14:47


fB fB fB fB fB fB fB fA fA fA pA

HEC 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 20

−1 −1 −1 −1 −1 −1 −1 1 1 1 1 1

7 7 7 7 7 7 7 9 9 9 9 9
C ORRIGÉ

2 3 4 5 6 7 8 1 2 3 4 5

6 6 6 6 6 6 6 7 8 9 10

b. Il est limpide que à l’issue du processus, la variable i contient le nombre total de


lancers de la pièce.
c. La variable v ne prend que les deux valeurs 1 et −1. Elle est initialisée à la valeur 1
et ensuite, elle prend la valeur 1 chaque fois que A joue et la valeur −1 lorsque c’est B
qui est aux manettes. Elle bascule donc à chaque changement de main.
d. Voilà la complétion !

function v = jeu (p)


i = 1;
v = 1;
s = 1;
j = 1;
a = 1;
while rand ( ) > p
i = i+1;
j = j +1;
if v == 1 then a = a + 1 ;
end ;
if j > s then v = −v ; // changement de main
s = s+2;
j = 1 ; // réinitialisation du compteur
end ;
end ;
if v == 1 then disp (00 A vainqueur ) ; else disp (00 B vainqueur ) ;
00 00

end ;
endfunction

Nous donnons quelques explications. Dans le code, nous avons ajouté une nouvelle
variable a dont le rôle est évidemment lumineux. À la ligne 6 du code nous initialisons a
MATHÉMATIQUES

à la valeur 1 et à la ligne 10 on l’incrémente d’une unité chaque fois que A joue et puis
c’est tout !
e. Nous allons classiquement utiliser la loi faible des grands nombres en choisissant
de répéter 20000 fois l’expérience. Voici donc notre code qui va, l’on s’en doute bien,
S cientifique

(*)

200 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 200 24/10/2018 14:47


utiliser la fonction jeu
m = 20000 ; HEC
f = 0;
p = input(0 Probability of head please ? 0 ) ;
for k = 1 : m
if jeu == 1 then f = f + 1 ;

C ORRIGÉ
end ;
disp(f /m)

14.a. Le contraire de l’événement H [ K est assurément l’événement


« La pièce donne un face à tous ses lancers »,
et nul ne peut ignorer qu’il s’agit là d’un événement de probabilité nulle car il a été supposé
que p est situé dans l’ouvert ]0, 1[. C’est en effet l’exemple le plus percutant, donné par
tous les professeurs de France et de Navarre, d’un événement tout à fait possible ayant une
probabilité nulle et ce, en liaison avec les variables aléatoires suivant une loi gémétrique,
quand il a fallu justifier qu’une variable géométrique est presque sûrement à valeurs réelles.
Il en résulte alors effectivement que

pp (H [ K) = 1.

Quant à la somme X + Y , il s’agit tout bêtement du temps d’attente du premier pile(*)


et nous retombons sur la loi géométrique de paramètre p dont nous venons de parler à
l’instant et toute cette question n’est en réalité qu’une question de cours.
b. Notons ⇡1 l’événement « Le premier lancer amène un pile ». Il est clair que

⇡1 ⇢ H,

et la croissance de la probabilité assure alors que

pp (⇡1 ) 6 pp (H) 6 1,

la dernière égalité se passant probablement de tout commentaire. Cela s’écrit sans ambages

p 6 pp (H) 6 1,

et la conclusion passe par un gentil squeeze.


15.a. Nous allons nous intéresser au tranches « horaires » de jeu de nos deux acolytes,
lorsqu’ils jouent bien sûr, et nous mentionnons que, pour un joueur et un instant donnés,
il n’y a que deux raisons pour qu’il ne joue pas :
ou bien ce n’est pas son tour ;
MATHÉMATIQUES

B ou bien la partie est terminée.


Nous noterons avec la lettre « t » les tranches horaires de A, et avec la lettre « u » celles
de l’ami B.
S cientifique

(*) Il faut bien comprendre que l’on se fiche pas mal de qui lance la pièce. Tant que « pile » n’est pas sorti, la pièce est lancée !

ANNALES CCIR 2018-2019 l 201

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 201 24/10/2018 14:47


C’est ainsi que pour les premières tranches, dans un ordre naturellement croissant, nous
HEC avons
t0 = {1}
u0 = {2, 3, 4}
t1 = {5, 6, 7, 8, 9}
u1 = {10, 11, 12, 13, 14, 15, 16}
C ORRIGÉ

t2 = {17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 25}


u2 = {26, 27, 28, 29, 30, 31, 32, 33, 34, 35, 36}
Le lecteur observateur aura sûrement capté que toutes ces tranches on un nombre impair
d’éléments et que leur dernier gugusse est un carré parfait !
Il faut alors impérativement trouver à quoi ressemblent tn et un lorsque n est un entier
naturel quelconque et comme c’est un petit jeu très amusant et pas vraiment revêche, nous
le laissons au dévouement de notre lecteur qui, à la surprise générale, débusquera que,
pour tout n 2 N,

tn = 4n2 + 1, 4n2 + 2, . . . , 4n2 + 4n + 1 ,

alors que �
un = 4n2 + 4n + 2, 4n2 + 4n + 3, . . . , 4n2 + 8n + 4 ,
ce qui peut également s’écrire

tn = [[4n2 + 1, 4n2 + 4n + 1]] et un = [[4n2 + 4n + 2, 4n2 + 8n + 4]].

 Les nombres d’éléments de tn et un sont respectivement

4n + 1 et 4n + 3,

qui sont bien des nombres impairs, alors que, si l’on écoute le potache de la classe de
quatrième, leurs derniers gugusses respectifs sont

(2n + 1)2 et (2n + 2)2 ,

qui sont assurément des carrés parfaits.


Cela étant, l’inclusion demandée est limpide et d’ailleurs, si l’on parle bien de rangs
possibles, il semble bien que ce soit même une égalité.
b. Nous nous organisons un poquitı́n.
B Tout d’abord, pour chaque entier naturel n, nous notons naturellement Hn l’évé-
nement
MATHÉMATIQUES

« A gagne durant la tranche tn ».

B Ensuite, comme la tranche tn s’est révélée de longueur 4n + 1, pour chaque entier i


situé entre 1 et 4n + 1, nous notons Hn,i l’événement (*)
S cientifique

« A gagne au i ième
coup de la tranche tn ».

202 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 202 24/10/2018 14:47


B Enfin, et comme cela se pratique assez souvent, nous notons
HEC
q = 1 − p.

Tout cela étant dit, et compte tenu des game rules, nous espérons ne froisser personne en
proclamant que

C ORRIGÉ
+1
[ 4n+1
[
H= Hn et 8n 2 N, Hn = Hn,i ,
n=0 i=1

les ensembles à chaque fois réunis, étant ouvertement deux à deux disjoints(*). La σ-
additivité de la probabilité entraîne alors que

+1
X
pp (H) = pp (Hn ),
n=0

alors que son additivité toute bête amène quant à elle à

4n+1
X
8n 2 N, pp (Hn ) = pp (Hn,i ).
i=1

Soit alors n 2 N et i 2 [[1, 4n + 1]]. La réalisation de l’événement Hn,i nécessite ni plus


ni moins que
B l’obtention de « faces » sur la totalité des tranches horaires précédentes, ce qui, à
bien savoir compter, représente 4n2 lancers ;
B l’obtention à nouveau de « faces » sur les i − 1 lancers suivants ;
B l’obtention enfin d’un « pile » au lancer d’après.
Si l’on en croit la tacite indépendance des lancers on devrait alors se ravir déjà de
2
pp (Hn,i ) = p q 4n +i−1
.

Maintenant, parce que q est différent de 1 et que les sumgeometers connaissent sur le bout
des doigts la mnémotechnique

premier terme écrit − premier terme non écrit


1 − raison

c’est via un chouia de linéarité que nous réclamons les égalités


MATHÉMATIQUES

2 1 − q 4n+1 2 2
pp (Hn ) = p q 4n = q 4n − q 4n +4n+1 ,
1−q

(*)
S cientifique

Il est vrai que les probabilistes parlent de réunions — ou même d’unions — « disjointes » mais un ami pointilleux m’a fait un
jour remarquer que, sur le plan de la correction de la langue, c’est quand même pousser le bouchon un peu loin !

ANNALES CCIR 2018-2019 l 203

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 203 24/10/2018 14:47


la toute dernière procédant de quelques bénins aménagements, à telle enseigne qu’apparaît
HEC enfin la sublimissime
+1
X � 4n2 2 �
pp (H) = q − q 4n +4n+1 ,
n=0

qui ne peut que nous remplir de joie. Ce n’est alors que du pur mutatis mutandis que de
parvenir à
C ORRIGÉ

+1
X � 4n2 +4n+1 2 �
pp (K) = q − q 4n +8n+4 ,
n=0

et au vu et au su de ce qui va suivre, il est préférable de changer un peu l’aspect des choses,


puisque, à bien y regarder
+1 ⇣
X ⌘ +1 ⇣
X ⌘
et pp (K) =
2 2 2 2
pp (H) = q (2n) − q (2n+1) q (2n+1) − q (2n+2) .
n=0 n=0

 Nous pouvons aisément déduire de ce qui précède que


+1 ⇣
X ⌘
2 2
pp (H) + pp (K) = q (2n) − q (2n+2) ,
n=0

et le lecteur maîtrisant souverainement les séries télescopiques en ressortira sans broncher


que
pp (H) + pp (K) = 1,
ce qui donne une nouvelle preuve de la première avancée de la question 14.a.
16.a. Nous partons de la formule sommatoire de Poisson écrite sous la forme
✓X
+1 ◆ ✓X ◆
2 1 p 2
e−n /4✓
cos nx − = ⇡✓ e−✓(x+2k⇡) , (4)
n=0
2
k2Z

grâce à l’audace dont nous avons fait preuve à l’époque et nous y choisissons tout d’abord

x=⇡

puis ✓ pour qu’il réalise le miracle


2 2
8n 2 N, e−n /4✓
= qn ,

ce qui revient mentalement à choisir


MATHÉMATIQUES

1 .
✓=−
4 ln q
Ces deux choix sont évidemment légal pour le premier et également pour le second vu la
position idyllique de q. Selon les east-west properties du cosinus, particulièrement
S cientifique

(*)
8m 2 Z, cos m⇡ = (−1)m ,

204 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 204 24/10/2018 14:47


le premier membre de la récente égalité (4) devient miraculeusement(*)
✓X
+1 ◆ HEC
1
− ,
2
(−1)n q n
n=0
2

et la stricte positivité du second is as plain as the nose on your face !

C ORRIGÉ
Il est alors grand temps de passer à la toute dernière question.
b. Nous rappelons un important lemme de théorie des séries.
lemme de groupement deux par deux
P
Soit (un )n2N une suite réelle. Si la série un converge, il en est de même de la série
X
(u2n + u2n+1 ),
n>0

et l’on a l’égalité
+1
X +1
X
un = (u2n + u2n+1 ).
n=0 n=0
La preuve de ce lemme est plutôt élémentaire et nous la laissons donc au…
Contre toute attente, nous choisissons de définir (un ) par
2
8n 2 N, un = (−1)n q n .
Vu la P
position paradisiaque géographique de q nous pouvons clamer la convergence de la
série un puisque sans sourciller, nous mettons en avant les arguments suivants.
B On a incontestablement
8n 2 N, 0 6 |un | 6 q n .

B Les séries géométriques sont totalement maîtrisées.


B Il existe sur le marché un test de comparaison en signe positif.
B Les séries absolument convergentes sont convergentes.
Notre gentil lemme et une intervention musclée du physio font alors que
+1
X +1 ⇣
X ⌘
2 2 2
(−1)n q n = q (2n) − q (2n+1) = pp (H),
n=0 n=0

à tel point que, selon la précédente


1.
pp (H) >
2
MATHÉMATIQUES

Ce jeu avantage donc le joueur A.


� De toute façon, comme A joue en premier, on pouvait se douter qu’il en était avantagé,
mais là, nous en avons la preuve formelle !
S cientifique

(*) Nous plaisantons ! Nous avons tout fait pour !

ANNALES CCIR 2018-2019 l 205

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 205 24/10/2018 14:47


S UJET

MATHÉMATIQUES II
Durée : 4 heures. Code sujet : 283

HEC/
La présentation, la lisibilité, l’orthographe, la qualité de la rédaction,
ESCP la clarté et la précision des raisonnements entreront pour une part
Europe importante dans l’appréciation des copies.
Les candidats sont invités à encadrer dans la mesure du possible les
résultats de leurs calculs.
Ils ne doivent faire usage d’aucun document ; l’utilisation de toute
calculatrice et de tout matériel électronique est interdite. Seule l’uti-
lisation d’une règle graduée est autorisée.
Si au cours de l’épreuve, un candidat repère ce qui lui semble être
une erreur d’énoncé, il la signalera sur sa copie et poursuivra sa
composition en expliquant les raisons des initiatives qu’il sera amené
à prendre.

S
UJET
MATHÉMATIQUES II
S cientifique

1/5
Tournez la page S.V.P.

206 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 206 24/10/2018 14:47


S UJET
HEC/
ESCP
Europe

MATHÉMATIQUES II

2/5
S cientifique

ANNALES CCIR 2018-2019 l 207

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 207 24/10/2018 14:47


S UJET

HEC/
ESCP
Europe
MATHÉMATIQUES II

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Tournez la page S.V.P.
S cientifique

208 l ANNALES CCIR 2018-2019

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S UJET
HEC/
ESCP
Europe

MATHÉMATIQUES II

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S cientifique

ANNALES CCIR 2018-2019 l 209

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 209 24/10/2018 14:47


BC

HEC/
ESCP
C
Europe

Pa
C ORRIGÉ

1.a)

séri

Pou

D’o

ce q

b) I

2.a)

Or

D’o

On
Voi
MATHÉMATIQUES II

b) D

•S

5/5
S cientifique

210 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 210 24/10/2018 14:47


BCE 2018 - Option Scientifique Corrigé de l’épreuve de Mathématiques II

C ORRIGÉ BCE - Concours 2018 - Option scientifique


Par FrancisCorrigé
HEC/
ESCP
de professeur au
Raccaglia, l’épreuve de Mathématiques II
lycée Thiers, à Marseille.
Europe

Partie I. Séries télescopiques


1 1  1

C ORRIGÉ
1.a) Posons, pour tout n ∈ N∗ , un = . Pour la convergence, on peut dire que un ∼ 2 et que est une
n(n + 1) n n2

série de Riemann de référence convergente. D’où par comparaison un est convergente .

1 1
Pour ce qui est du calcul de la somme, on remarque que pour tout n ∈ N∗ , un = − .
n n+1
N +1
1  1 1  1 1
N
 N N N N
D’où pour tout N ∈ N∗ , un = − = − = 1− . Ainsi quand N → +∞, un → 1,
n=1 n=1
n n=1
n + 1 n=1
n n=2
n N + 1 n=1
+∞
 1
ce qui prouve que =1 .
n=1
n(n + 1)

b) Il s’agit de la loi certaine de paramètre 1 .

 +∞
2.a) Puisque fn est une densité, fn (x)dx = 1. Or
−∞
 +∞  0  n
n+1
 1
fn (x)dx = (1 + (n + 1)x)dx + cn dx + (n + 1)(1 − x)dx
1
−∞ − n+1 0 n
n+1

 b
g(b) + g(a)
Or si g est une fonction affine, g(x)dx = (b − a) (aire d’un trapèze).
a 2
 0   1
1 1
n
n+1 n
D’où (1 + (n + 1)x)dx = , cn dx = cn et (n + 1)(1 − x)dx =
1
− n+1 2(n + 1) 0 n+1 n
n+1
2(n + 1)

On en déduit alors que pour tout n ∈ N∗ , cn = 1 .


Voici la représentation graphique de f3 :

y = f3 (x)

x
−1 −0.25 0.75 1

1
MATHÉMATIQUES II

b) D’après la définition de fn , Fn (x) = 0 lorsque x  − n+1 et Fn (x) = 1 pour x  1.


   x  x
1 (1 + (n + 1)x)2
1
• Si x ∈ − n+1 , 0 , Fn (x) = (1 + (n + 1)t)dt = (1 + (n + 1)t)2 = .
1
− n+1 2(n + 1) − 1 2(n + 1)
n+1

1
S cientifique

ANNALES CCIR 2018-2019 l 211

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BCE 2018 - Option Scientifique Corrigé de l’épreuve de Mathématiques II BC

   x
1 c) P
• Si x ∈ 0, n+1
n
, Fn (x) = Fn (0) + dt = + x.
HEC/ 0 2(n + 1)
      x de
ESCP
x
1 n (n + 1)
• Si x ∈ n+1
n
, 1 , Fn (x) = Fn n+1n
+ (n + 1)(1 − t)dt = + + − (1 − t)2 . bor
2(n + 1) n + 1 2
Europe
n n

 x
n+1 n+1
réel
Or − (n+1)
2 (1 − t)
2
n
= − (n+1) 2 1
2 (1 − x) + 2(n+1) . Finalement, Fn (x) = 1 −
(n+1) 2
2 (1 − x) . En résumé :
n+1
C ORRIGÉ

 1

 0 si x  − n+1

  

 (1+(n+1)x)2 1


 2(n+1) si x ∈ − n+1 ,0

   d) E
Fn (x) = 1
2(n+1) + x si x ∈ 0, n+1 n




   Dan
 (n+1) 2
1 − 2 (1 − x) si n+1 ,1

 n

 Or
1 sinon.
•S

1
La fonction fn étant continue sur R car elle l’est en particulier aux points − n+1 , 0, n+1 ,
n
1 et sur R privé de ces points •S
par les théorèmes généraux, Fn est alors C 1 sur R puisque c’est une primitive de fn sur R .
•S
c) Étudions le comportement de la suite (Fn (x))n suivant les valeurs de x un réel quelconque fixé.
1
• Si x < 0, alors pour n assez grand, x  − n+1 , d’où Fn (x) = 0 et Fn (x) → 0 quand n → +∞. •S
1
• Si x ∈ [0, 1[, alors pour n assez grand x  n+1 ,
n
d’où Fn (x) = 2(n+1) + x et ainsi Fn (x) → x quand n → +∞. • Si
• Si x  1, Fn (x) = 1 d’où Fn (x) → 1 quand n → +∞. .

Donc pour tout x réel lim Fn (x) existe et l’on a :


n→+∞
 4.a)

 0 si x < 0


lim Fn (x) = x si x ∈ [0, 1[ Le
n→+∞ 



1 sinon. som

On peut donc affirmer que Yn −→ Y où Y suit la loi uniforme sur [0, 1] .


L
b) L
le r
√1

3.a) Posons Zn = n+1 .
Xn+1
Pour cela, montrons 1 que pour tout ε > 0, P([|Zn |  ε]) → 0 quand n → +∞.
Or P([|Zn |  ε]) = P([|Xn+1 |  (n + 1)ε]) = P([|X|  (n + 1)ε]). Et : c) i.
n

P([|X|  (n + 1)ε]) = 1 − P([|X| < (n + 1)ε]) = 1 − (F ((n + 1)ε) + F (−(n + 1)ε)) k=1

puisque X est à densité. On


Quand n → +∞, (n + 1)ε → +∞ d’où par composition, F ((n + 1)ε) → 1 et F (−(n + 1)ε) → 0 ce qui prouve le résultat
Xn+1 P σn
annoncé : −→ 0 quand n → +∞ .
n+1
Or
Xn+1
b) La suite constante de variables aléatoires égale à X1 converge en loi vers X et la suite − converge en probabilité
n+1 ζ(2
Xn+1
vers 0. Le théorème de Slutzky permet alors d’affirmer que X1 − converge en loi vers X .
n+1 2
3
MATHÉMATIQUES II

1. Ici le fait que la variable soit à densité et que celle-ci soit bornée n’est pas déterminant. La propriété est vraie lorsque la suite (Xn )n vari
est équidistribuée. 4

2
S cientifique

212 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 212 24/10/2018 14:48


BCE 2018 - Option Scientifique Corrigé de l’épreuve de Mathématiques II

c) Pour tout n ∈ N∗ , X1 et − Xn+1n+1


sont indépendantes par le théorème des coalitions. f étant une densité de probabilité
 
de Xn+1 , on sait 2 , d’après le cours que t → | − (n + 1)|f −1 t
est une densité de probabilité de − Xn+1
n+1
. f étant
HEC/
n+1
ESCP
bornée, on sait que la formule de convolution donne alors une expression d’une densité de Dn au point x pour tout x
réel : Europe

 +∞  +∞
f (t)(n + 1)f (−(n + 1)(x − t))dt = (n + 1) f (t)f ((n + 1)(t − x))dt = fDn (x).

C ORRIGÉ
−∞ −∞

d) En montrant que fDn = fn lorsque X suit la loi uniforme sur [0, 1], on retrouvera le résultat de la question 2.c).
 1
Dans ce cas, pour tout x ∈ R, fDn (x) = (n + 1) f ((n + 1)(t − x))dt.
0
1 1
Or f ((n + 1)(t − x)) = 1 si et seulement si t − x ∈ [0, n+1 ] i.e. t ∈ [x, x + n+1 ] et vaut 0 sinon. Ainsi :
1
• Si x < − n+1 , fDn (x) = 0.
   1
x+ n+1
1
• Si x ∈ − n+1 , 0 , fDn (x) = (n + 1) dt = 1 + (n + 1)x.
0
   1
x+ n+1
• Si x ∈ 0, n+1
n
, fDn (x) = (n + 1) dt = 1.
x
   1
• Si x ∈ n+1 , 1
n
, fDn (x) = (n + 1) dt = (n + 1)(1 − x).
x

• Si x  1, fDn (x) = 0. On a donc bien l’égalité recherchée ce qui permet de retrouver le résultat de la question 2.c)
.

Xn Xn+1
4.a) On sait d’après le cours que suit la loi 3 normale (0, n12 ) et − 1
suit la loi normale (0, (n+1) 2 ).
n n+1
Xn Xn+1
Le théorème des coalitions prouve que et − sont indépendantes donc par stabilité de la loi normale pour la
n n+1
Xn Xn+1  
somme, − suit la loi normale de paramètre 0, n12 + (n+1) 1
.
n+1
2
n

b) Le très célèbre argument du télescopage montre que, pour tout n  1, Tn = X1 − Xn+1 n+1
. On peut alors appliquer
le résultat de la question 3 puisque la densité de probabilité usuelle de la loi normale centrée réduite est bornée par
1
√ .

c) i. Par stabilité de la loi normale pour la somme et indépendance de Un , Tn suit la loi normale de paramètres 0 et
1 1
n
+ . Notons σn2 cette variance.
k2 (k + 1)2
k=1

T
On a alors n qui suit la loi normale centrée réduite, donc qui converge en loi vers cette loi, d’où si l’on montre que
 σn
2
σn → π3 − 1 quand n → +∞, alors grâce au théorème de Slutzky 4 on obtient le résultat proposé par l’énoncé.
 n 
1 1  1 1
 n n

Or σn2 = + = 2 + − 1. En utilisant un résultat admis dans le préliminaire,
k2 (k + 1)2 k2 (n + 1)2
k=1 k=1 k=1
π2 π2
ζ(2) = 6 , on obtient bien que σn2 → 3 − 1 quand n → +∞.
 
1t−b
2. si a = 0, t → |a|
f est une densité de probabilité de aX + b si f en est une de X.
a
3. D’après le cours, si V suit la loi normale centrée réduite et a est un réel non nul, aV suit une loi normale d’espérance a × 0 et de
MATHÉMATIQUES II

variance a2 × 1 d’après les propriétés de l’espérance et de la variance. 


π2
4. On considère la suite (σn )n comme une suite de variables aléatoires constantes qui convergent en probabilité vers 3
− 1.

3
S cientifique

ANNALES CCIR 2018-2019 l 213

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 213 24/10/2018 14:48


BCE 2018 - Option Scientifique Corrigé de l’épreuve de Mathématiques II
BC

ii. Dans le 4.b), les variables Un ne sont pas indépendantes ce qui est un argument déterminant pour obtenir la b) S
HEC/ conclusion du 4.c). Or
ESCP
Europe
Partie II. Ain

1D (k) 1
n
 
5.a) Par définition, hn (D) = = .
k k
C ORRIGÉ

k=1 k∈[[1,n]]∩D

 n
√ √ 1
Or k ∈ [[1, n]]∩D ⇐⇒ il existe r ∈ [1, n]∩N tel que k = r2 i.e. k = r2 avec r ∈ [[1,  n]]. D’où hn (D) = .
r=1
r2

 n
√ ce q
+∞
√ 1  1
b) Quand n → +∞,  n → +∞ d’où par composition de limite 2
→ .
r=1
r n=1
n2
c) P
+∞
 1D (n) π2
Donc (hn (D))n∈N∗ est convergente et sa limite, la somme , vaut .
n=1
n 6

1
c) Il est immédiat que si m est un entier naturel non nul tel que m 6 ∈ N∗ alors m ∈ D ∩ T . La
Supposons que m ∈ D ∩ T .

√ √ m √
Alors il existe p ∈ N∗ tel que m = p3 , d’où m = p p et = p.
p
√ √
Or m est un entier d’où p est un rationnel ce qui montre que p ∈ D ie p = q 2 où q est un entier. On
1
Finalement m = q 6 ce qui montre que m 6 ∈ N∗ .

d) O
d) Montrons que hn (D ∪ T ) = hn (D) + hn (T ) − hn (D ∩ T ) (1) en utilisant le fait que 5 D ∪ T = D  (T \D).
que
En effet, on a
 1 que
hn (T ∪ D) = hn (T ) +
k
k∈(D\T )∩[[1,n]] L’é
et  1  1  1
= −
k k k
k∈(D\T )∩[[1,n]] k∈D∩[[1,n]] k∈D∩T ∩[[1,n]]

D’où on a bien la relation (1).


On sait que hn (T ) → ζ(3), hn (D) → ζ(2) et d’après la question précédente, hn (T ∪ D) → ζ(6) lorsque n → +∞. Cela Mo
prouve la convergence de (hn (T ∪ D))n∈N∗ vers ζ(2) + ζ(3) − ζ(6) quand n → +∞.
1
+∞ ln
 1D∪T 2
Autrement dit : existe et vaut ζ(2) + ζ(3) − ζ(6). 6.c)
n=1
n

1 1
On
6.a) On vérifie sans difficulté que t → 2n−1 − 2t−1 est croissante sur [n, n + 1].
1 1 1 1 1 1
D’où pour tout t ∈ [n, n + 1], 2n−1 − 2t−1 ≤ 2n−1 − 2n+1 et 2n−1 − 2n+1 = 4n22−1 . Or 4n2 − 1 ≥ (2n − 1)2 , d’où
1 1 2
finalement on a, 2n−1 − 2t−1 ≤ (2n−1) 2.

 n+1  
1 1 2 2
Il ne reste plus qu’à intégrer de n à n + 1 : − dt  i.e un  .
n 2n − 1 2t − 1 (2n − 1)2 (2n − 1)2
MATHÉMATIQUES II

e) E
5.  signifie union disjointe
uk

4
S cientifique

214 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 214 24/10/2018 14:48


BCE 2018 - Option Scientifique Corrigé de l’épreuve de Mathématiques II

b) Soit i ∈ [[1, n]], 1I (i) = 1 si et seulement si i = 2k − 1.


Or 1  2k − 1  n ⇐⇒ k ∈ 1, n+1
  

.
HEC/
2
ESCP

n+1
2 
1 1 k+1
1 Europe
Ainsi hn (I) = . Mais = uk + dt, d’où
2k − 1 2k − 1 k 2t − 1
k=1

C ORRIGÉ
2 
n+1
2 
n+1
2 
n+1
  n+1
k+1
1 2 +1 1
hn (I) = uk + dt = uk + dt
k 2t − 1 1 2t − 1
k=1 k=1 k=1

 n+1   n+3 
ce qui correspond à l’égalité demandée puisque 2 +1= 2 .

 n+3   
c) Par définition, n+3
2 −1< 2  2 ,
n+3
d’où n < 2 n+3
2 − 1  n + 2 puis
   
1 n+3 2
1 2 −1 1+
n 2 n

La fonction ln étant croissante sur ]0, +∞[,


      
1 n+3 2
0  ln 2 −1  ln 1 +
n 2 n

    
1 n+3 2
On sait que pour tout x > −1, ln(1 + x)  x, d’où 0  ln 2 −1  .
n 2 n

2 1  1
d) On a l’équivalence, ∼ et la série est convergente. D’où l’encadrement de un obtenu dans la
(2n − 1)2 2n2 2n2
question 6.a) permet avec le théorème de convergence des séries par comparaison des termes généraux, d’en conclure

que un est convergente.

L’égalité de la question 6.b) s’écrit aussi, pour tout n ∈ N∗ ,

2 
n+1
         
1 n+3 1 1 n+3 1
uk = hn (I) − ln 2 − 1 = hn (I) − ln(n) − ln 2 − 1 − ln(n)
2 2 2 2 2 2
k=1

1   n+3   1
Montrons que ln 2 2 − 1 − ln(n) → 0 quand n → +∞.
2 2
1   n+3   1 1     
ln 2 2 − 1 − ln(n) = ln n1 2 n+3 − 1 d’où le résultat annoncé d’après l’encadrement de la question
2 2 2 2
6.c).
2 
n+1

1
On peut alors écrire que, pour tout n ∈ N∗ , uk = hn (I) − ln(n) + o(1) d’où on en déduit l’égalité,
2
k=1

 √ 
lim hn (I) − ln( n) = δ.
n→+∞
MATHÉMATIQUES II

e) En intégrant la première majoration obtenue dans la question 6.a) entre k et k + 1, on voit que pour tout k ∈ N∗ ,
1 1
uk  − .
2k − 1 2k + 1

5
S cientifique

ANNALES CCIR 2018-2019 l 215

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 215 24/10/2018 14:48


BCE 2018 - Option Scientifique Corrigé de l’épreuve de Mathématiques II BCE

  1
1 1
N
 N

HEC/ D’où pour tout n et N tel que n + 1  N , uk  −
2k − 1 2k + 1
. Cette dernière somme vaut kβ
ESCP 1 1 1
k=n+1 k=n+1

− (« télescopage » ) qui tend vers quand N → +∞. D’où on obtient la majoration suivante
Europe 2n + 1 2N + 1 2n + 1
+∞
 1 1 1 qui
par passage à la limite : uk  . On peut alors conclure en remarquant que  .
2n + 1 2n + 1 2n − 1
On
k=n+1


C ORRIGÉ

f) Pour tout n ∈ N , d’après les calculs effectués dans la question 6.d) :


2        la
n+1
+∞ +∞
 √ 1 n+1 1 
δ= uk + uk = hn (I) − ln( n) − ln 2 − 1 − ln(n) + uk
2 2 2
2 +1 2 +1
k=1 k= n+1 k= n+3

b) O
+∞      
√  1 n+3 1
d’où δ − (hn (I) − ln( n)) = uk − ln 2 − 1 − ln(n) . en p
2 2 2
2 +1
k= n+3

En utilisant l’encadrement de la question 6.c) :


8.a)
     
1 1 n+3 1
− − ln 2 − 1 − ln(n)  0
n 2 2 2

+∞  
 1 1 n+1 n+1
et 0  uk   n+1   en utilisant que  − 1. Les
2 2 −1 n−2 2 2
k= n+1
2 +1
1 √ 1 Util
Finalement, on obtient bien l’encadrement : −  δ − (hn (I) − ln( n))  .
n n−2
Fina

2
 1 √ √ √
g) i) La ligne (3) affecte à s − ln( 3) soit h3 (I) − ln( 3). Puis jusqu’à n = 7, s reçoit h5 (I) − ln( 5) et
2k − 1
√ k=1 b) D
h7 (I) − ln( 7).
k im

ii) Pour la ligne (6), il faut aussi ajouter le ln du rang précédent, n − 2, puis retrancher celui du rang n ce qui donne :
s=s+1/n+log((n-2)/n)/2 .

Mai
iii) Si l’on se donne une précision ε, à l’exécution de la fonction delta avec ε comme paramètre pour le calcul approché
√ 1 1
de δ, on remarque que lorsque la boucle while se termine, s contient hn (I) − ln( n) et  ε, d’où −  −ε.
n−2 n posi
L’encadrement de la question f) montre que la valeur renvoyée par cette fonction correspond à une valeur approchée
de δ à ε près. véri

Partie III. c) C
Mar
 
1 1 1 1
n−1
 n−1
 n
 n
 xk sn
7.a) i) Pour tout n  2, sk − = sk − sk−1 = s1 + − β.
k=1
kβ k + 1β k=1

k=2

k=2
kβ n
 
1 1
n−1 n n
sn   xk  xk
D’où, + sk − = x1 + = .

k=1
kβ k + 1β kβ
k=2

k=1
MATHÉMATIQUES II

ii) D’une part


sn |sn |
→ 0 quand n → +∞ car β nα  M nα−β qui tend vers 0 quand n → +∞. D’autre part, et e
nβ n

6
S cientifique

216 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 216 24/10/2018 14:48


BCE 2018 - Option Scientifique Corrigé de l’épreuve de Mathématiques II

1 1 1   β
− = β 1 − (1 + k1 )−β et d’après les équivalences usuelles du cours (1 + k1 )−β − 1 ∼ − , d’où,
kβ k + 1β k k→+∞ k HEC/
 
 1 1

 |s | ESCP
sk −  ∼ β k
 kβ k + 1β  k→+∞ k β+1 Europe
1
qui est majoré par βM β−α+1 , qui est proportionnel au terme général d’une série de Riemann convergente.
k
On peut alors affirmer grâce au théorème de convergence par comparaison des séries à termes positifs que
1 1
 n

C ORRIGÉ
xk
sk − est convergente. Ainsi admet une limite finie quand n → +∞ ce qui signifie que
(k + 1)
kβ β kβ
k=1
 xn
la série converge.

n1

b) On pose pour tout k ∈ N∗ , xk = (−1)k . On voit que sn vaut −1 si n est impair et 0 sinon. D’où, pour tout x > 0,
 (−1)n
en prenant M = 1 et α = 0, on peut appliquer la question a) avec β = x et en déduire que converge.
nx
n1

8.a) Sn est une variable aléatoire finie d’où etSn aussi ce qui prouve l’existence de son espérance et
  n   n 
 
E(etSn ) = E exp tXk =E etXk
k=1 k=1
 n
 n
   
Les variables aléatoires exp(tXk ) sont indépendantes d’après le théorème des coalitions, d’où E etXk = E etXk .
k=1 k=1
 
Utilisons le théorème de transfert pour calculer ces dernières espérances : E etXk = 12 e−t + 12 et .
 tS   1 −t 
Finalement E e n = 2 (e + et ) .
n

+∞ k
+∞
 
t (−1)k tk
b) D’après le cours, pour tout t réel, et = et e−t = . D’où, en effectuant la somme, les termes pour
k! k!
k=0
k=0
k impair des deux sommes se simplifient et il reste deux fois les termes pairs :
+∞ +∞
 t2n 1   t2n
et + e−t = 2 i.e. et + e−t =
n=0
(2n)! 2 n=0
(2n)!
+∞
t2
 t2n
Mais e 2 = . Il suffit alors d’établir que pour tout n entier naturel non nul et t réel positif strictement
n=0
2n (n!)
2n
t2n t2n 
positif,  n i.e. (2n)!  2n (n!) i.e. k  2n ce qui est immédiat puisque chaque facteur k du produit
(2n)! 2 (n!)
k=n+1
1 t2
vérifie k  2. On a donc bien l’inégalité 2 (et + e−t )  e 2 .

c) Classiquement, P([Sn > s]) = P([etSn > ets ]) par stricte croissance de la fonction x → etx sur R et l’inégalité de
Markov donne :

1 n t2
E(etSn ) 2 (e + et ) (e 2 )n
−t
P([etSn > ets ])  i.e. P([Sn > s])  
ets ets ets
MATHÉMATIQUES II

t2  2 
(e 2 )n
et en remarquant que = exp n t2 − ts on obtient la majoration demandée.
ets

7
S cientifique

ANNALES CCIR 2018-2019 l 217

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 217 24/10/2018 14:48


BCE 2018 - Option Scientifique Corrigé de l’épreuve de Mathématiques II
BC

 2    c)
+∞
HEC/ d) L’étude de la fonction t →
 exp n t − ts sur ]0, +∞[ montre qu’elle atteint son minimum pour t = exp − ns et 
 2 2  2
ESCP que ce minimum vaut exp − 2n . D’où P([Sn > s])  exp − 2n . De plus −Sn suit la même loi que Sn car pour
s s
n=
6
Europe k ∈ N∗ , −Xk suit la même loique X k et les Xk sont indépendantes . La majoration que l’on vient d’obtenir s’applique
à −Sn : P([−Sn > s])  exp − 2n s2
. D’

Pour finir, on remarque que P([|Sn | > s]) = P([Sn > s] ∪ [−Sn > s]) et par l’inégalité de Boole,
 2 N
P([Sn > s] ∪ [−Sn > s]) ≤ P([Sn > s] + P([−Sn > s]) d’où P([|Sn | > s])  2 exp − 2ns
.
C ORRIGÉ

11.a
9.a) Pour tout k ∈ N∗ , Sk est une variable aléatoire et Bk,α = {x ∈ R/|x| > kα } est un borélien comme réunion de
deux intervalles, d’où [Sk ∈ Bk,α ] est un événement. La réunion dénombrable d’événements est un événement et de
même pour l’intersection dénombrable. Donc Cα est effectivement un événement . Po
la
 2α   
1 V(
b) D’après le résultat établi en 8.d), P([|Sn | > nα ])  2 exp − n2n i.e. P([|Sn | > nα ])  2 exp − 2n1−2α . Par
 1
 1
croissance comparée, 2 exp − 2n1−2α = o n2 d’où par comparaison des termes généraux positifs,
n→+∞
 et
P([|Sn | > nα ]) converge .
n1

 +∞  b)
 alo
7
c) D’après le cours, Cα étant l’intersection d’une suite décroissante d’événements, P(Cα ) = lim P [|Sk | > k α ] .
n→+∞
 +∞  k=n

Il s’agit ainsi de prouver que P [|Sk | > k ] → 0 quand n → +∞.
α

k=n
 N
 N
 
Or tout N  n, P [|Sk | > k α ]  P ([|Sk | > k α ]), d’où par passage à la limite, d’o
k=n k=n
ce
 +∞  +∞
 
P [|Sk | > k α ]  P ([|Sk | > k α ])
k=n k=n c) i
pu
puisque cette somme infinie est convergente.
+∞ On

Quand n → +∞, P ([|Sk | > k α ]) → 0 comme le reste d’une série convergente, donc par encadrement, sib
k=n
 +∞ 

P [|Sk | > k ]
α
→ 0 et ainsi on a bien P(Cα ) = 0. ii)
k=n
50

+∞

10.a) Si ω n’appartient pas Cα , alors il existe un n ∈ N∗ tel que ω ∈
/ [|Sk | > k α ] i.e. pour tout k  n, |Sk (ω)|  k α . iii)
k=n
la
 Xn (ω) lim
On applique alors la question 7.a) avec xk = Xk (ω) et β = 1 pour conclure que converge i.e. ω ∈ C. On a
n
n1

donc bien établi que Cα ⊂ C .


12.a

b) D’après la question 9, P(Cα ) = 1 et par croissance de la probabilité, P(C) = 1. est

6. Sn est une fonction continue du vecteur(X1 , ..., Xn ) dont la loi est déterminée par les loi marginales donc identiques à celle de
(−X1 , ..., −Xn )
MATHÉMATIQUES II

7. On démontre dans cette question le théorème de Borel-Cantelli.

8
S cientifique

218 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 218 24/10/2018 14:48


BCE 2018 - Option Scientifique Corrigé de l’épreuve de Mathématiques II

c) Fixons ε > 0. Si ω ∈ C, alors il existe N ∈ N∗ , tel que pour tout n  N , |K(ω) − Kn (ω)|  ε et donc ω ∈
/
+∞

[|K − Kn | > ε] d’où ω ∈
/ E(ε). Ainsi P(C)  P(E(ε)) ce qui implique que P(E(ε)) = 0. HEC/
n=N ESCP
 +∞   +∞ 
  Europe
D’après le cours P(E(ε)) = lim P [|K − Kn | > ε] . Or P [|K − Kn | > ε]  P ([|K − KN | > ε]) d’où
N →+∞
n=N n=N
8
lim P ([|K − KN | > ε]) = 0 ce qui montre la convergence en probabilité de Kn vers K .
N →+∞

C ORRIGÉ
 
1 1 1
n
 n

11.a) Par linéarité de l’espérance, E(Hn ) = E(Bk ) = .
k 2 k
k=1 k=1

Pour la variance, on sait que la variance d’une somme de variables indépendantes admettant des variances est égale à
la somme de celles-ci, d’où
    n 
V(Bk ) 1  1
n n
Bk
V(Hn ) = V = = . On sait que la série harmonique diverge d’où lim E(Hn ) = +∞
k k2 4 k2 n→+∞
k=1 k=1 k=1

1 π2
n

et → ζ(2) quand n → +∞, donc V(Hn ) → quand n → +∞.
k2 24
k=1

b) A partir d’un certain rang n0 , on a E(Hn ) − r > 0. On a aussi [Hn  r] = [E(Hn ) − Hn  E(Hn ) − r]. Appliquons
alors l’inégalité de Bienaymé-Tchébichev :

V(Hn )
P (|Hn − E(Hn )|  E(Hn ) − r]) 
(E(Hn ) − r)2
  
→0 quand n→+∞

d’où P (|Hn − E(Hn )|  E(Hn ) − r]) → 0 quand n → +∞. Or [E(Hn )−Hn  E(Hn )−r] ⊂ [|Hn − E(Hn )|  E(Hn ) − r]
ce qui prouve que lim P ([E(Hn ) − Hn  E(Hn ) − r]) = 0 i.e. lim P ([Hn  r]) = 0 .
n→+∞ n→+∞

c) i) L’instruction à compléter est la suivante : y(i,1)=y(i,1)+(grand(1,1,’bin’,1,0.5)+2*floor(k/2)-k)/k;


puisque 2*floor(k/2)-k prend la valeur 0 si k est pair et −1 sinon.
On peut remarquer que l’instruction y(i,1)=y(i,1)+(grand(1,1,’bin’,1,0.5)*(-1)ˆ k)/k; était aussi une pos-
sibilité mais pas choisie par l’énoncé.

ii) Ils sont obtenus par des instructions du type histplot(10,simul(n,p)) avec n prenant respectivement les valeurs
50, 100 et 200 et p une valeur assez grande par exemple 1000.

iii) On remarque que les deux derniers histogrammes sont très similaires ce qui semble indiquer que quand n est grand
la distribution des valeurs sera toujours proche d’une distribution qui indique une convergence vers une distribution
limite donc une convergence en loi.

Kn  1 Kn  1 − 21I (k)
n
 n n
 n
B Bk
12.a) Pour tout n  1, k
= + , d’où − hn (I) = + . Or 1 − 21I (k) = 1 si k
k 2 2k k 2 2k
k=1 k=1 k=1 k=1

Kn  (−1)k
n
 n
B
est pair et −1 sinon c’est à dire vaut (−1)k . Donc on a bien l’égalité k
− hn (I) = + .
k 2 2k
k=1 k=1

8. On a démontré dans cette question que la convergence presque sure implique la convergence en probabilité
MATHÉMATIQUES II

9
S cientifique

ANNALES CCIR 2018-2019 l 219

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 219 24/10/2018 14:48


BCE 2018 - Option Scientifique Corrigé de l’épreuve de Mathématiques II

Kn 1
b) On a vu que (Kn )n1 converge en loi vers K donc d’après le cours 9 , converge en loi vers K. D’après la question
HEC/ +∞  2 2
+∞
(−1) (−1) 1 (−1)
 k  n k  k−1
ESCP 7.b),
k
converge d’où −
2k

2 k
quand n → +∞. Ceci peut aussi s’interpréter de la
Europe k=1 k=1 k=1  n
 (−1)k

manière suivante : la suite de variables aléatoires certaines − converge en probabilité vers la variable
2k
k=1 n1
+∞ 
1  (−1) k−1
aléatoire certaine .
2
C ORRIGÉ

k
k=1
On applique alors le théorème de Slutsky,
+∞ 
Kn  (−1)k L 1 1  (−1)k−1
n
− −→ λK + µ où λ = et µ = quand 10 n → +∞.
2 2k 2 2 k
k=1 k=1

L L x
9. on utilise la propriété, si Kn −→ K et f est une fonction continue sur R alors f (Kn ) −→ f (K). Ici f : x → .
2
MATHÉMATIQUES II

+∞
 (−1)k−1
10. on peut montrer que = ln(2)
k
k=1

10
S cientifique

220 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 220 24/10/2018 14:48


S UJET
ÉCONOMIE, SOCIOLOGIE ET HISTOIRE
DU MONDE CONTEMPORAIN
Durée : 4 heures.

Tout verbiage doit être évité et il est expressément recommandé de ne


pas· dépasser huit pages, sauf justification par la qualité du résultat. ESSEC
Il sera tenu compte des qualités de plan et d’exposition, ainsi que de
la correction de la langue.
Aucun document n’est autorisé. L’utilisation de toute calculatrice et
de tout matériel électronique est interdite.

É CONOMIQUE
UJET

La mondialisation est-elle irréversible ?

C ORRIGÉ
Par Frédéric Besset, professeur à Intégrale, à Paris.

ÉCONOMIE, SOCIOLOGIE ET HISTOIRE


La mondialisation est un processus coextensif à l’histoire humaine : la
migration des australopithèques hors de la vallée du Rift en Afrique en est
une illustration précoce. Depuis 1945 cependant, c’est le processus de la
révolution industrielle qui s’étend à l’ensemble de la planète, y compris
depuis 30 à 50 ans aux anciennes colonies européennes. Une nouvelle
division du processus productif, l’internationalisation des marchés, de vastes
mouvements migratoires Sud-Nord mais aussi internes au Sud géopoli-
tique dessinent un monde de plus en plus global. Cette uniformisation a été
accélérée par la disparition de l’« autre monde » communiste en 1989/1991
et la résorption d’une part grandissante de l’infra-monde sous-développé
par l’émergence. Pour autant la mondialisation ainsi définie ne s’étend pas
sans à-coup ni de manière linéaire : la crise des subprimes de 2007/2008 ou,
de manière plus structurelle, l’hypothèque écologique du développement
suggèrent l’existence de force de freinage qui ralentissent la mondialisation.
Réversible, la mondialisation ne serait qu’une époque de l’histoire écono-
mique mondiale. On peut même imaginer que comme à la fin de la Belle
Époque – mais pas nécessairement à travers une séquence catastrophique
guerre-crise-guerre – un processus de « démondialisation » (J. Sapir, 2011),
de rétro-mondialisation soit à l’œuvre alors même que dominent les signes
É conomique

d’une « globalization » triomphante pour reprendre le terme forgé par T. Levitt


en 1981 dans la Harvard Business Review. Certains auteurs tels J. Stiglitz (La
Grande Désillusion (2002) ; Un autre monde : contre le fanatisme du marché
(2006), Alain Chavet (Un autre monde. Protectionnisme contre prédation,
2011), Jacques Sapir (La Démondialisation, 2011) appellent de leurs vœux
la fin de la mondialisation.

ANNALES CCIR 2018-2019 l 221

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Dès lors les obstacles que la mondialisation rencontre, voire son
possible retournement – réarmement douanier, réaffirmations iden-
ESSEC titaires… – loin de ramener la planète à un illusoire « état initial » ne
dessineraient-ils pas plutôt les contours d’une mondialisation maîtrisée,
plus acceptable par les peuples ?
C ORRIGÉ

I. Depuis 1945 le processus de mondialisation interconnecte les


différents marchés et conduit à l’exportation des idées et modes
de vie de l’Occident, dans sa déclinaison états-unienne plus
qu’européenne dans la seconde moitié du xxe siècle

A. Depuis 1945 trois grandes séquences ont accéléré mais aussi


modelé la mondialisation
1) La pax americana post Seconde Guerre mondiale a  créé sur les
décombres des nationalismes européens un système de sécurité collective
et de développement façonné par les E.-U. et leurs alliés : agences fédé-
rales à compétences extraterritoriales (US Aid, SEC, CDC…), ONU et ses
annexes (FMI, HCR, FAO…), OTAN et autres pactes (OEA…), ONG et think
tanks (fondations Rockefeller (1913) ou Ford (1936), Société du Mont-Pèlerin
(1947))… L’adoption de l’american way of life en Europe de l’Ouest protégée
de la menace communiste en a résulté : les FMN américaines diffusent
leurs spectacles (films, musiques), leurs produits (hygiène, agro-alimentaire,
informatique…) mais aussi leurs méthodes (tayloro-fordisme, sloanisme…).
ÉCONOMIE, SOCIOLOGIE ET HISTOIRE

2) À partir des années 1960 la mondialisation gagne de larges parties du Tiers


Monde (A. Sauvy, Trois mondes, une planète, 1952) via deux phénomènes
en résonance : l’extinction du modèle colonial notamment là où il a subsisté
le plus longtemps, en Afrique noire ; le déploiement d’une NDIPP (nouvelle
division internationale du processus productif, B. Lassudrie-Duchêne) à la
place de l’ancienne DIT, qui assure l’industrialisation d’un certain nombre de
pays en voie de développement notamment en Asie, tandis que l’Amérique
latine reste fidèle au modèle cépaliste d’industrialisation par substitution
aux importations jusqu’aux années 1980. La « crise » des années 70 indé-
pendamment de l’épiphénomène des « chocs » pétroliers est une crise de
croissance de la mondialisation : relativisation du poids des E.-U, rattrapage
européen et japonais, premiers émergents en Asie du Sud-Est, contestation
interne à l’Occident (H. Marcuse, G. Debord…) de la consommation de
masse et des conditionnements de la société industrielle.
3) À partir des années 1980 une vague de démocratisation emporte les
dictatures (Brésil, 1985 ; Corée du Sud, 1990…) et finit par s’étendre à tout
le bloc de l’Est (1989-1991). La chute du communisme met fin à la mondia-
lisation marxiste que l’URSS avait tenté de promouvoir depuis la révolution
bolchevique de 1917 d’abord contenue dans un seul pays, étendue ensuite
à l’ensemble de l’ex-empire russe (Polonais ou Ouzbeks) puis étendue à de
É conomique

larges parties de la planète (Yougoslavie, Chine, Cuba, Guinée-Conakry…)


sous divers labels. En résulte la « fin de l’histoire » théorisée par F. Fukuyama,
universitaire américain d’origine japonaise – lui-même allégorie de la mondia-
lisation – c’est-à‑dire de manière contre-intuitive la fin de l’idée même que
l’histoire puisse avoir une fin, ce qui était au cœur de la doxa marxiste. La
réunification de l’Allemagne (1990) précède celle de l’Europe par la chute
de l’URSS (1991) et l’élargissement à l’Est de l’UE à partir de 2004.

222 l ANNALES CCIR 2018-2019

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B. La mondialisation a jusqu’à présent résulté de décisions politiques
mais aussi d’innovations technologiques
ESSEC
1) Les États-Unis exportent le libre-échangisme via le GATT et ses cycles de
négociations multilatérales (Tokyo Round : 1974-1979) comme à travers des
traités bilatéraux (ALENA de 1989, traité de San Antonio, 1992 ; accords avec
le Chili en 2010…). Parallèlement au désarmement tarifaire global, certaines

C ORRIGÉ
régions du monde créent des marchés communs (AELE, AFTA, MERCOSUR/
SUL) voire uniques dans le cas de l’Union européenne (1986/1993) qui se
dote en plus d’une monnaie unique (1999/2001) adoptée par la majorité de
ses membres (19/28 en 2018). De manière pittoresque la Russie tente de
ressusciter sa zone d’influence via un marché commun (CEI, 1992). L’OMC
créée en 1995 et qui compte 164 pays en 2018 se dote d’un Organe de
règlement des différends (ORD) favorisant une approche multilatérale des
contentieux.
2) Le désarmement tarifaire est la clé d’une désintégration verticale du
processus de production permettant d’en réaliser chaque étape sur un terri-
toire différent en maximisant les avantages ricardiens, essentiellement celui
du coût de la main-d’œuvre. Porto Rico, le Mexique, Singapour, Hong Kong,
Madagascar etc. se couvrent peu à peu de zones d’assemblage (Export
Processing Zones) dont la première concentration est celle des maquiladoras
mexicaines (Ciudad Juarez…) dès les années 1970 suite au traité PRONAF
(1965). Il est révélateur que la Chine populaire ait commencé en 1979 son
initiation à l’économie de marché par ce type d’ateliers de montage (les

ÉCONOMIE, SOCIOLOGIE ET HISTOIRE


Zones Économiques Spéciales comme celle de Shenzen). La Chine, mais
aussi d’autres pays principalement situés en Asie, opèrent une « longue
marche » industrielle remontant les filières pour passer du « made in » au
« made by ». La Corée du Sud sous-traitant de l’industrie japonaise dans
les années 1970 (bobinage électrique, fibres synthétiques…) devient une
génération plus tard le prototype du pays non seulement émergent mais
même convergent, membre de l’OCDE (1996) et du G20.
3) Cette extension continue des territoires de la mondialisation n’a été rendue
possible que par un paradigme technologique porteur : les ondes hertziennes
ont permis la radio et la télédiffusion à l’échelle mondiale (rôle de Voice
of America qui sape le communisme en Europe orientale, couronnement
d’Elisabeth II suivi en Eurovision en 1952…) ; d’où la promotion d’un modèle
culturel et de normes comportementales (72 % des héroïnes des 115 tele-
novelas brésiliennes diffusés dans le Tiers-monde entre 1965 et 1999 n’ont
pas d’enfant…). Dans un autre registre, le pétrole et ses sous-produits de
raffinage (fuel, essence, diesel, kérosène…) finalement très bon marché
– hors le bref intervalle entre le premier choc pétrolier et le contre-choc
de 1985 – ont permis la fantastique odyssée du moteur à explosion, du
triporteur Tata qui transporte les familles indiennes depuis un demi-siècle
jusqu’au porte-conteneurs géant « overpanamax » (plus de 50 000 EVP) et
au jet gros porteur long-courrier (13 000 km d’allonge) dont le Boeing 747
É conomique

est depuis 1970 le modèle resté sans équivalent jusqu’à l’apparition en 2008
de l’A380. Troisième exemple, la pétrochimie a engendré aussi toute une
civilisation de produits en plastique jetables, bon marché, à la diffusion
ubiquitaire : le prototype en est le sac plastique de polyéthylène, véritable
oriflamme de la mondialisation puisqu’aucun autre objet n’a été fabriqué
à davantage d’exemplaires par l’Homme.

ANNALES CCIR 2018-2019 l 223

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 223 24/10/2018 14:48


C. Depuis le début du xxie siècle loin de s’essouffler la mondialisation
semble triompher en une véritable assomption du marché assortie
ESSEC d’un déferlement d’une nouvelle révolution industrielle
1) Il est paradoxal de supposer une réversibilité de la mondialisation depuis
le début d’un siècle qui a vu la Chine admise à l’OMC dix ans (2001) avant
la Russie (2011), l’Arabie Saoudite intégrer le G20 – créé en 1999 et qui
C ORRIGÉ

supplante le G7/G8 –, la France mais aussi de manière plus exotique


l’Albanie rejoindre le commandement intégré de l’OTAN (2007), l’UE intégrer
la Croatie (2013) et sur un mode presque burlesque la FIFA confier l’orga-
nisation de la coupe du monde de football au Qatar (2022)… Les instances
même de la mondialisation semblent phagocyter les uns après les autres tous
les pays que leur propre histoire avait maintenus à l’écart. Ces organisations
planétaires – blocs douaniers, alliances militaires, ligues sportives – cessent
d’être des clubs d’Occidentaux et s’internationalisent au sens propre après
avoir été des pseudopodes de la civilisation transatlantique. Leurs dirigeants
ne sont plus systématiquement issus du sérail américano-européen : l’OMC
est dirigée par un Brésilien (Roberto Azevedo), l’Église catholique par un
Argentin (Jorge Mario Bergoglio) ; le président des EU entre 2008 et 2016,
Barack Hussein Obama est né d’un père kenyan et a grandi en Indonésie
qu’il connaît beaucoup mieux que l’Italie ou l’Angleterre…
2) Par ailleurs, loin d’être ralentie la mondialisation semble catalysée
par le déferlement des Nouvelles Technologies de l’Information et de la
Communication. Non seulement l’informatique en réseau à l’origine du World
ÉCONOMIE, SOCIOLOGIE ET HISTOIRE

Wide Web a fait naître une nouvelle génération de multinationales (les GAFA,
NATU américaines et BATX chinoises) fournisseurs de services numériques
mais aussi des constructeurs des infrastructures de l’internet qui peuvent
être des groupes chinois comme Huaweï. À la différence des médias hert-
ziens de la 2e révolution industrielle, les médias numériques dit « sociaux »
engendrent un modèle participatif où les utilisateurs mettent en ligne leur
propre contenu : à la mondialisation des organisations interétatiques qui
remontent au xixe s. (Union Postale Internationale (1874), CIO (1894)…),
des agences onusiennes (HCR) et des firmes multi- puis transnationales
du xxe siècle (Coca Cola, BP…), s’ajoutent au début du xxie s. une couche
supplémentaire et ultime, littéralement démocratique, avec ces milliards
de consciences interconnectées à volonté – il existe 2 milliards de compte
Facebook et 50 % de la population mondiale dispose d’un téléphone mobile
– et mues par des motivations indépendantes des cultures et des apparte-
nances : le désir, le profit, l’empathie.
3) Il en résulte des conséquences aussi bien micro/macro-économiques que
géopolitiques que l’on pourrait décrire comme un véritable emballement de la
mondialisation. Les formes d’entreprise du  xxe siècle disparaissent au profit
de nouvelles organisations commerciales : des marques historiques de la
distribution spécialisée en France comme Darty ou la FNAC sont menacées
à très court terme par les géants du e-commerce. De nouveaux monopoles
É conomique

apparaissent : Amazon est le premier libraire mondial (400 000 références


en français) et dans certains pays le seul. Mais simultanément des millions
d’auto-entrepreneurs dans le monde ont créé des micro-entreprises grâce
au Web, véritable incubateur d’un capitalisme individuel sans frontière. Le
décollage de l’Afrique depuis 15 ans est pour une large part la conséquence
du déploiement du réseau des téléphones mobiles, véritable « couteau
suisse » du développement (communication là où n’existe pas de téléphone

224 l ANNALES CCIR 2018-2019

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filaire, géolocalisation dans des régions sans cartes ni panneaux routiers
fiables, paiement là où la monnaie fiduciaire n’inspire aucune confiance).
Les cybertechnologies ont été par ailleurs le liquide amniotique de la jeune ESSEC
génération à l’origine des « révolutions arabes » qui bouleversent depuis
2010 les équilibres politiques de la Tunisie à la Syrie en passant par Bahreïn
avec des succès variables. Elles facilitent l’activité militante des dissidents
de tous poils voire l’existence de sociétés civiles qui sans s’opposer direc-

C ORRIGÉ
tement à l’État prospèrent loin de son emprise comme en Iran, à Cuba ou
en Arabie Saoudite.

II. Depuis le début du xxie siècle la mondialisation apparaît engendrer


ses propres forces de frottement qui la ralentissent à mesure
qu’elle avance à travers une série de crises qualifiées à juste titre
de systémiques

A. Une crise financière puis économique, conjoncturelle en première


analyse, mais au fond structurelle, semble non seulement accompagner
la mondialisation depuis 2007 mais pour une large part en être la
résultante
1) La crise des subprimes née dans le secteur très spécialisé de l’immobi-
lier hypothécaire américain a contaminé l’ensemble du système financier
mondial via la titrisation des créances y compris les créances irrecouvrables
en ce sens fictives, véritables « actifs toxiques » polluant le bilan des banques

ÉCONOMIE, SOCIOLOGIE ET HISTOIRE


du monde entier. Le report de la spéculation vers des marchés censés
moins risqués comme celui des dettes souveraines des États de la zone
euro a déterminé à partir de 2010 une grave crise de liquidité pour les pays
dits PIGS (Portugal, Irlande, Grèce, Espagne), des PDEM qui en quelques
mois ont dû se financer aux conditions prohibitives des pays émergents des
années 1990. Les détenteurs de produits dérivés comme les CDS (Credit
Default Swap) ont intérêt à ce que se réalise le défaut de paiement de
débiteurs dont ils ne détiennent pas la dette. De financière, la crise devient
économique par la rétroaction des mesures d’austérité et de la flambée du
chômage sur le pouvoir d’achat des ménages et sur l’investissement des
entreprises.
2) Mais depuis 2008 (faillite de Lehman Brothers le 15 octobre 2008), la crise
qui atteint surtout l’Occident n’est pas liée qu’à « l’exubérance irrationnelle »
(A. Greenspan) de la finance sans frontière. Elle est aussi la conséquence
d’un retournement de la NDIPP ; naguère favorable aux firmes multinatio-
nales occidentales – c’est largement encore le cas d’ailleurs pour un certain
nombre d’entre elles – dont elle permet d’optimiser les coûts de production,
la NDIPP s’accompagne désormais de la création de champions nationaux
au Sud dont la concurrence sur les marchés locaux émergents mais aussi
sur les marchés triadiques fait souffrir les industriels et les économies du
É conomique

Nord. Lorsque Mittal ferme des hauts fourneaux en Lorraine (Gandrange…),


c’est pour en ouvrir en Russie ou en Inde même, rapprochant ses unités de
production de ses marchés en expansion où se trouve désormais l’essen-
tiel de la demande d’acier. Hier bornée aux produits d’entrée de gamme
(textile basique) ou aux produits semi-finis (acier polonais, ciment mexi-
cain…), la concurrence des émergents – à l’enseigne de celle du Japon
durant les années 70, facteur de crise à lui tout seul – attaque à présent les
rentes technologiques de l’Occident et ses cœurs de métiers historiques :

ANNALES CCIR 2018-2019 l 225

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la pharmacie (Ranbaxy), l’aéronautique/aérospatiale (COMAC, Commercial
Aircraft Corporation of China), la banque et l’enseignement supérieur dont
ESSEC les hauts lieux glissent ou essaiment vers l’Asie (Big Four de la banque en
Chine dont ICBC, 1re banque mondiale).
3) Pourtant la fin de la « grande divergence » (K. Pomeranz) – l’élite des
émergents est à présent convergente (S. Brunel) – et le western disease qui
en est le corollaire ou la contrepartie ne ralentit la mondialisation que par
C ORRIGÉ

ses conséquences et les réactions qu’elle provoque. En soi le Wealth shift


théorisé par la Banque mondiale pour décrire le glissement de richesses
dans un monde où de plus en plus la dette est au Nord (20 trillons de dollars
pour les EUA, 260 % du PIB du Japon, un an de l’activité économique de la
France) et la croissance (économique mais aussi démographique) au Sud,
est l’accomplissement même des promesses de la mondialisation. La crise
des uns est la prospérité des autres qui se substituent à eux sur les marchés
de biens et services et qui les financent contre de fructueux intérêts garan-
tissant au minimum les capitaux contre le risque inflationniste. C’est vrai
en tout cas à court terme : à plus longue échéance, que le rattrapage Sud
Nord devienne un écart sinon Sud/Nord du moins entre superpuissances
émergentes et PDEM historiques, que les débiteurs et les clients deviennent
insolvables et c’est l’ensemble des mécanismes d’échanges, de circulation
des capitaux comme des composants (70 % du commerce de la RPC repose
sur les commandes des donneurs d’ordres étrangers à leurs sous-traitants
locaux) qui péricliterait.
ÉCONOMIE, SOCIOLOGIE ET HISTOIRE

B. Cette crise dont l’ombre portée se projette sur tout le début du


siècle – les crises régionales des années 1990 (crise du peso en 1994,
1re crise financière du xxie s. selon M. Camdessus, directeur du FMI)
en étaient comme le lever de rideau – suscite des contre-mesures
et des réactions qui, elles, peuvent entraver les processus de
mondialisation voire en prendre délibérément le contre-pied
1) Forte est la tentation du protectionnisme notamment dans la mesure
où le libre-échange actuel quoique généralisé apparaît aussi asymétrique.
Non seulement un certain nombre d’émergents à régime autoritaire jouent
du dumping monétaire (yuan sous-évalué) et social (absence de protection
sociale dispendieuse pour les employeurs) mais ils ne pratiquent pas la
réciprocité dans l’ouverture de leurs marchés intérieurs aux fournisseurs
occidentaux. Ni Vinci ni Colas ne peuvent espérer construire des routes en
Chine ; le Kremlin annule unilatéralement des concessions pétrolières dans
l’Extrême-Orient russe attribuées à BP pour des raisons environnementales
peu crédibles. L’entrée de la Chine à l’OMC en 2001 apparaît à bien des
observateurs comme un marché de dupes. Loin d’être la propriété d’ac-
tionnaires privés ne disposant que de leurs ressources propres, les grands
groupes émergents sont souvent les faux-nez d’un state-owned capitalism,
un capitalisme d’État : c’est avec l’argent de la municipalité de Shanghai
É conomique

que Geely rachète Volvo en 2010, un mécanisme impensable au sein de


l’UE par exemple où il aurait été assimilé par la Commission à une forme
de distorsion concurrentielle via une subvention publique… Dès lors, la
tentation d’un réarmement douanier apparaît avec un protectionnisme non
plus éducateur comme celui pratiqué par les late comers du xixe s. et les
émergents du  xxe s-xxie s. mais « de sauvegarde » (J. Sapir), préservant l’em-
ploi, le savoir-faire, l’environnement. Entre 1980 et 2007, la part de l’emploi

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industriel en France est passée de 24 à 14 % même si la transformation
sectorielle de l’économie en est la cause principale indépendamment de
la mondialisation. ESSEC
2) Depuis 2001 les négociations multilatérales du nouveau cycle dit
Millenium Round de l’OMC sont en panne. Non seulement la conférence
interministérielle de Doha en 2010 a été un échec (le Sud refusant la libé-
ralisation des services, le Nord celle des produits agricoles) mais certains

C ORRIGÉ
États naguère apôtres du libre-échange intégral restaurent des droits de
douane : ainsi Barak Obama sur les pneus chinois grâce à la clause super
301 du Trade Act de 1974. Son successeur Donald Trump se lance dans
une guerre commerciale avec ses partenaires chinois et européens, taxant
par exemple l’acier et l’aluminium chinois. Plus largement, les pays déve-
loppés prennent conscience de leur dangereuse dépendance pour certains
produits ou composants, ce qui les conduit à des stratégies nationales : les
EU développent la production domestique d’hydrocarbures de schiste pour
diminuer leur dépendance au pétrole notamment importé du Moyen Orient ;
cette énergie exceptionnellement bon marché (le gaz est 4 fois moins cher
aux EU qu’en Europe) confère à l’industrie US (chimie, automobile…) en
pleine renaissance un avantage concurrentiel. Face aux dérèglements de
l’économie-casino, les États ont aussi, certes avec parcimonie, réintroduit
des formes de régulations : interdiction de la vente d’actions à découvert,
réintroduction du Glass-Steagall Act aux EU, union bancaire (2013) et
lutte contre le blanchiment d’argent en Europe conduisant peu à peu à la
fin du sanctuaire fiscal helvétique (affaire Cahuzac). À une autre échelle,

ÉCONOMIE, SOCIOLOGIE ET HISTOIRE


des entreprises relocalisent – marginal, le mouvement n’est plus cepen-
dant anecdotique – leur production : pour se rapprocher de leurs clients
– Rossignol dans les Alpes –, améliorer leur image – Essilor –, contrer les
risques de siphonage technologique – Canon rapatrie sa production de
copieurs de la Chine vers l’Archipel – ou tirer la conséquence de la hausse
des coûts salariaux. Dans ce dernier cas, cela peut se traduire par un simple
rebond de la mondialisation vers de nouveaux fronts de délocalisation – les
ateliers textiles du Guangdong migrent vers le Bangladesh ou le Cambodge,
où le salaire ouvrier mensuel est de l’ordre de 100 dollars US – mais aussi
par un retour des usines dans le pays où sont conçus les produits (cas des
PC d’Apple à nouveau fabriqués en Californie du nord).
3) La prise de conscience des effets négatifs de la mondialisation suscite
également des résistances sociales et politiques. Depuis la fin des
années 1990 les sommets du G8 suscitent régulièrement l’organisation
de contre-sommets protestataires dont ceux particulièrement violents de
Seattle (1999) et Rome (2001). L’année 2001 est à la fois celui de l’entrée
de la Chine à l’OMC et du premier forum alter-mondialiste organisé à Porto
Allegre (Brésil). Des organisations se sont structurées au Sud, protestant,
comme Via Campesina, contre la prédation foncière (land grabbing) et la
pression exercée sur les producteurs par l’oligopsone des grands groupes
É conomique

agroalimentaires. Paradoxalement ces lobbies sont eux-mêmes l’expression


d’une forme de mondialisation en tant qu’ils fédèrent des paysans du monde
entier (la Confédération paysanne de José Bové est membre du forum
Via Campesina). Au Nord, des organisations comme ATTAC (Association
pour la taxation des transactions financières et pour l’action citoyenne)
dénoncent à grand renfort de pamphlets (L’Horreur économique de Viviane
Forrester) et de manifestations les effets de la ségrégation socio-spatiale

ANNALES CCIR 2018-2019 l 227

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de la mondialisation. Recyclant les nostalgiques du communisme, des
partis d’extrême-gauche (Les Insoumis, Die Linke) font de la mondialisation
ESSEC – en réalité pour eux un synonyme du libéralisme économique – un bouc-
émissaire. Mais ils ne sont pas les seuls : des formations nationalistes
récusent la dilution identitaire et les abandons de souveraineté que la
mondialisation implique : c’est le cas de « Ukip ! » au Royaume-Uni (créé
en 1993, le parti milite pour le referendum de 2016 qui acte le Brexit) ou
C ORRIGÉ

du néo-bolivarisme dans certains pays latino-américains (Bolivie, Équateur


et surtout Venezuela…). C’est l’ensemble des partis dits protestataires
y compris ceux situés à l’extrême droite qui réclament un retour des fron-
tières dont ils espèrent une protection des « nationaux » contre les migrants
et les délocalisations (à des degrés divers : FN/Rassemblement national,
Aube Dorée, le Fidesz hongrois). Indépendamment des externalités néga-
tives économiques de la mondialisation, celle-ci suscitent la diffusion de
stéréotypes culturels voire de modèles comportementaux qui apparaissent
délétères et inacceptables dans de larges parties du monde. Non sans hypo-
crisie la Chine présente sa « Grande muraille cybernétique » et ses armées
de honkers comme une mesure de prévention contre le nouvel opium de
la pornographie.

C. Curieusement, c’est la réussite même de la mondialisation qui


conduit à sa décélération dans la mesure même où elle se généralise
et uniformise espaces et sociétés
1) L’accomplissement même de la mondialisation en menace la pérennité.
ÉCONOMIE, SOCIOLOGIE ET HISTOIRE

Ainsi le différentiel salarial dans l’industrie se comble peu à peu diminuant


le dénivelé des coûts de main-d’œuvre qui entretenait la mondialisation
dans son étage manufacturier. Quelle main-d’œuvre sous-payée l’industrie
manufacturière mondiale emploiera après l’émergence de l’Afrique ou de
l’Asie du Sud ? Au Brésil, le salaire minimum a crû de 80 % depuis 6 ans ;
en Chine l’armée de réserve du prolétariat – les masses rurales des ming-
gongs – est en train de s’épuiser. Dans un tout autre domaine, les indices
synthétiques de fécondité sont presque partout en baisse, laissant redouter
un monde en manque d’hommes à la fin du  xxie siècle où la transition démo-
graphique sera partout achevée. Dès 2060, la population humaine devrait
stagner. Le taux de fécondité totale est aujourd’hui de 2,4 environ (mais la
majorité des pays de la planète sont en dessous du seuil de renouvellement
de la population) vs 3,04 entre 1990 et 1995 et 6 en 1979. Dans le détail l’ISF
est passé de 6 dans les années 1960 au Brésil à moins de 2 aujourd’hui.
Même en Afrique subsaharienne l’ISF de 6,7 en 1980 est aujourd’hui infé-
rieure à 5 en moyenne (voire à 4 au Kenya et en Côte d’Ivoire). Enfin la
diffusion des représentations culturelles occidentales achève un processus
de folklorisation des cultures locales que Sylvie Brunel nomme « disney-
landisation » (La Planète disneylandisée. Chroniques d’un tour du monde,
2006). La dilution des identités locales dans une identité mondiale de plus
É conomique

en plus prégnante ne laisserait plus de nouveaux territoires à conquérir à la


mondialisation. Et pourrait engendrer des mécanismes de repli identitaire
dont l’islamisme est une manifestation paradoxale. Il est en effet en même
temps refus de la modernité et manifestation même de cette modernité dans
sa dimension révolutionnaire.
2) Par ailleurs, la mondialisation en universalisant un modèle de production
et de consommation de masse vient buter contre une limite non seulement

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physique mais quasiment philosophique : elle suppose possible la perpé-
tuation de la promesse du capitalisme d’une croissance indéfinie voire
infinie dans un monde aux ressources physiques limitées. La mondialisa- ESSEC
tion agricole se nourrit de l’uniformisation des mœurs alimentaires : tous
les humains, les 10 à 12 milliards d’humains du milieu du siècle veulent
manger la même chose, une alimentation riche en protéines animales (lait
+ viande) et en sucres rapides. Du coup d’immenses superficies de terres

C ORRIGÉ
arables sont mobilisées pour produire des biocarburants consommés dans
des tracteurs qui moissonnent les champs de soja destinés à nourrir des
bovins (1 kg de viande = 100 litres d’eau + 1 litre de combustible) dont la
contribution au réchauffement climatique pèse d’ores et déjà l’équivalent des
rejets du transport aérien. Le « mur écologique » est une des limites immé-
diates de la mondialisation déterminant l’option politiquement explosive
(risque révolutionnaire) de la décroissance (c’est-à‑dire de rationnement) ;
sa prise de conscience, avant même que ne se réalisent les externalités
négatives inscrites dans la croissance économique, exerce d’ores et déjà
des phénomènes de freinage de la mondialisation (mouvement « locavore »,
projet de taxation du carbone, etc.).
3) Enfin l’horizon politique de la mondialisation n’est pas exempt de para-
doxes. D’une part les opinions publiques dans une démocratie authentique
doivent être prises en compte à plus ou moins longue échéance… Y compris
lorsqu’elles réclament plus de protection contre la mondialisation (les
migrants, les travailleurs détachés dans l’Union européenne, les importations
jobs killers…) et votent par exemple pour une sortie de l’UE comme c’est le

ÉCONOMIE, SOCIOLOGIE ET HISTOIRE


cas des Britanniques (citoyens de la 6e puissance économique mondiale).
D’autre part, la démocratisation d’apparence des dictatures peut déboucher
sur des formes de « démocrature » (Max Liniger-Goumaz : La Démocrature,
dictature camouflée, démocratie truquée (1992)), régimes où la liturgie
démocratique est respectée mais où les droits fondamentaux sont souvent
violés (Russie, Turquie, nombre de régimes africains…) : la mondialisation
aboutit à des sortes de villages Potemkine où une modernité cosmétique
ripoline des sociétés au fond profondément hostiles à l’étranger et à ses
mœurs. D’autre part, les changements de régime imposés de l’étranger (Irak,
Centrafrique, Afghanistan) ou bien consécutifs à une révolution (Égypte,
Syrie…) peuvent aboutir à des formes d’anarchie ou de libanisation (guerre
civile à clivage confessionnel : Syrie) qui discréditent la démocratie en l’as-
sociant à une forme de « tyrannie de la majorité », de domination d’une
communauté sur les autres (chiites en Irak).

III. Pour autant la rétroaction sur la mondialisation de ces différents


mécanismes d’inertie voire de résistance varie selon leur nature
et les théâtres où ils se déploient

A. La mondialisation fournit des solutions aux problèmes qu’elle suscite :


É conomique

elle ouvre ainsi certaines issues à ses propres apories


1) La démographie est une bonne illustration de ces mécanismes de retour-
nement des contraintes. La généralisation à terme d’un modèle malthusien
permettrait ainsi de continuer la croissance per capita tout en diminuant
l’empreinte écologique globale d’une humanité moins nombreuse, sinon
qu’aujourd’hui du moins qu’à son apogée du milieu du  xxie s. Ainsi vers 2100,
si on prolonge les tendances actuelles – ce qui est toujours une conjecture

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hasardeuse –, la population chinoise devrait être retombée à 900 millions.
À une autre échelle, les handicaps d’hier peuvent devenir demain des atouts :
ESSEC les centaines de millions d’enfants – inactifs au sens économique – de
l’Afrique des années 1980-1990 fournissent une vingtaine d’années plus tard
de jeunes adultes qui travaillent et consomment assurant la croissance du
continent : c’est le dividende démographique. Longtemps, le sous-peuple-
ment africain a eu pour conséquences des pratiques agricoles extensives
C ORRIGÉ

fondées par exemple sur le pastoralisme et l’écobuage, source d’une très


faible productivité agricole et d’une détérioration des sols par surpécoration
et déforestation sauvage (disparition des mangroves) ; la croissance démo-
graphique conduit à l’adoption de pratiques plus intensives qui concentrent
le finage agricole sur les terres les plus productives tout en sanctuarisant
les écosystèmes plus précieux comme « actifs écologiques » que comme
terres arables à rendement marginal. Autre exemple, le modèle « 4-2-1 » des
familles chinoises à enfant unique où chaque enfant risque d’avoir à assurer
les vieux jours de ses deux parents et de quatre grands-parents implique
aussi de manière plus optimiste qu’il peut compter pour son éducation
(transfert de connaissances) nécessairement de plus en plus coûteuse et
ses premiers pas dans la vie (transfert de patrimoine) sur 6 adultes…
2) La mondialisation est aussi et peut-être d’abord celle des informations et
des idées. Les stratégies de dumping social qui suscitent critiques et retour
des barrières douanières au Nord ne peuvent ainsi être que provisoires :
d’une part naissent des mouvements revendicatifs qui ne peuvent plus être
ignorés ou réprimés comme avant (grève en 2013 dans les sweatshops du
ÉCONOMIE, SOCIOLOGIE ET HISTOIRE

Bangladesh) ; d’autre part les actifs mieux informés des opportunités migrent
de plus en plus aisément vers les emplois les mieux rémunérés. Les migra-
tions de masse des Africains vers l’Europe sont aussi l’effet du décollage de
l’Afrique (cf. Stephen Smith, La Ruée vers l’Europe, 2018). S’agissant cette
fois de la limite écologique de la mondialisation, on peut raisonnablement
espérer que les populations des pays émergents y deviennent de plus en
plus sensibles et dépassent assez vite le stade d’insouciance irresponsable
que les Occidentaux ont traversé durant l’essentiel de leur histoire écono-
mique. Considérées comme futiles lorsque le développement reste encore
frugal et la consommation l’apanage d’une petite élite, les habitudes de
recyclage, de sobriété voire de transitions énergétiques (véhicules propres,
bâtiments isolés, essor des énergies renouvelables…) se répandent vite
lorsque les classes éclairées – dans tous les sens du terme – deviennent
plus nombreuses, à la fois par une forme de snobisme et par « l’heuristique
de la peur » dont parle Hans Jonas. Les firmes issues des pays émergents
immergées dans la même « infosphère » que leurs concurrentes triadiques
développent rapidement le green marketing et mettent en avant le triple P
– people, planet, profit. (John Elkington)
3) Une des limites les plus évidentes de la mondialisation consiste dans le
rejet de la pression migratoire Sud Nord (Soudanais en Israël, Somaliens
É conomique

en Italie) voire Sud-Sud (Haïtiens en République dominicaine) y compris


des PVD/PMA vers les émergents (Surinamiens, Boliviens au Brésil) par les
populations des pays d’accueil. Ce rejet se traduit par l’érection de murs de
séparation et de filtration (Israël, États-Unis, Grèce, Espagne (Ceuta))… Les
hommes circulent moins facilement que les produits qui eux-mêmes circulent
moins facilement que les capitaux dont la circulation n’atteint cependant pas
la fluidité de celle des idées… Mais la mondialisation qui crée le problème

230 l ANNALES CCIR 2018-2019

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finit aussi par le dénouer : le différentiel de développement international se
réduit, quitte à ce qu’il s’accroisse entre les régions d’un même pays (cas du
Mexique) internalisant les mouvements migratoires (cf. au Brésil et en Chine). ESSEC
Par ailleurs, les populations s’habituent à un cosmopolitisme croissant et
tolèrent de mieux en mieux l’étranger en renonçant à l’illusoire entre-soi de la
période antérieure : impensable, il y a 20 ans, l’immigration chinoise, philip-
pine voire, anecdotiquement, européenne acquiert une visibilité nouvelle

C ORRIGÉ
dans un Japon en plein « hiver démographique ». Les aléas de la mondiali-
sation peuvent même conduire à de singuliers retournements de situation
à vertu pédagogique : les Polonais nombreux dans les années 1990-2000
à émigrer en Irlande retournent en masse dans leur pays depuis la crise
des PIGS car la Pologne hors zone euro se portent désormais mieux que
l’ex-« dragon celtique ». L’inversion des bassins d’émission et de réception
est un cas plus rare mais qui correspond à la situation de l’Espagne havre
de nombreux Colombiens à l’époque de son boom économique mais que
les jeunes diplômés ont aujourd’hui tendance à fuir pour tenter leur chance
à Bogota où la situation économique est florissante depuis la quasi-éradi-
cation des FARC et l’entrée en masse des capitaux chinois.

B. Loin de s’inverser, la mondialisation connaît un phénomène


de mutation scalaire : elle se développe plus vite au niveau
continental qu’au niveau à proprement parler planétaire ; l’éventuel
ralentissement global étant plus que compensé par une intégration
croissante des espaces régionaux, des territoires juxtaposés

ÉCONOMIE, SOCIOLOGIE ET HISTOIRE


1) La mondialisation apparaît comme une régionalisation. Les ORC, orga-
nisations régionales commerciales, se mettent en place logiquement entre
États contigus les uns aux autres, partageant des frontières en général
terrestres (rôle de l’insularité dans le faible enthousiasme européen des
Britanniques ?) ; du coup géographiquement les ORC juxtaposent des
régions continentales à quelques lacunes ou exceptions près – l’essentiel
de l’Europe (UE), l’Amérique du Nord (NAFTA (ALENA)/TLC), l’Amérique du
Sud (Mercosur) – ou bien plus fréquemment des sous-régions : Amérique
centrale (MCCA), péninsule arabique (CCG), Afrique australe (SADC), Afrique
de l’Ouest (CEDEAO), Asie du Sud (SAARC), Asie du Sud-est (ASEAN). En
ce domaine la rareté est plutôt synonyme de qualité : les multiples « zones »
africaines dont les limites se chevauchent (2,5 appartenances par pays !),
elles-mêmes contenues dans une UA léthargique ne sont a contrario nulle-
ment un signe de vitalité de la mondialisation. De manière générale, les
tentatives de marchés communs de plus vaste envergure ont souvent échoué
(AFTA de GH Bush refusé à Mar del Plata en 2005, accord de libre-échange
transatlantique EU/UE avorté en 2017), sont en sommeil (CEI, APEC, CCG).
Depuis une dizaine d’années alors que le libre-échange multilatéral stagne,
ces zones d’intégration marchande régionales se sont multipliées et surtout
approfondies : l’UE s’est doublée d’une union monétaire (19 membres de la
É conomique

zone euro), la CEDEAO s’est dotée d’une force d’interposition (l’ECOMOG),


l’ASEAN s’est prolongée d’un forum diplomatique permettant des consulta-
tions entre ses 10 membres et les 3 géants régionaux (ASEAN + 3 (Japon,
Corée du Sud, Chine)).
2) La mondialisation apparaît aussi comme une archipélisation : elle connecte
d’abord entre elles de manière extrêmement serrée les mailles d’un « oligo-
pole métropolitain mondial » (Dollfuss), parfois davantage reliées entre elles

ANNALES CCIR 2018-2019 l 231

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(par des dessertes aériennes, des flux financiers, des échanges univer-
sitaires) qu’à leur arrière-pays respectif. Cette déconnection relative des
ESSEC métropoles et du reste du réseau urbain domestique (Mexico et le réseau
urbain du Mexique) étant particulièrement un stigmate du sous-dévelop-
pement ; à l’inverse les « villes globales » (Sassen) triadiques (Londres, Los
Angeles) ou non (Shanghai) ont pour spécificité entre autres d’être aussi bien
reliées les unes aux autres qu’à leur sous-réseau domestique. Un des cas
C ORRIGÉ

particuliers de cette concaténation urbaine est celui des grands ports d’une
des régions-cœurs de l’économie mondiale : ainsi le Northern range euro-
péen du Havre à Hambourg en passant par Londres, Anvers et Rotterdam ;
ainsi en Asie la formidable ponctuation des plus grands hubs portuaires
mondiaux : Yokohama, Tianjin, Pusan, Singapour, Shanghai… Enfin à la
– grande – échelle régionale les agglomérations ont tendance à former des
nappes urbaines coalescentes soit des conurbations si elles sont modestes
(Pudgetopolis, San Diego-Tijuana, Métropole Côte d’Azur, Ghangzhou-
Shenzen), soit des mégalopoles lorsqu’elles forment un arc continental
(Tokaïdo, Megalopolis (Gottmann), Lotharingie industrielle européenne…).
3) La mondialisation est transfrontalière : elle exploite les dénivelés de déve-
loppement (de rémunération, de coût du travail, de coût de la vie), de taux
de change, les gradients réglementaires de part et d’autre des frontières.
À cet égard et pour cette raison, il est très peu probable, que les fron-
tières selon le cauchemar récurrent des souverainistes, s’effacent diluant
toutes les identités nationales tant leur existence matérialise les contrastes
dont la mondialisation se nourrit. Ainsi y a-t‑il des frontières actives qui
ÉCONOMIE, SOCIOLOGIE ET HISTOIRE

deviennent de véritable sas migratoires et manufacturiers : c’est le cas de


la « Border » USA/Mexico qui s’élargit en une véritable région transfronta-
lière (Mexamerica de Joël Garreau) faite de synergies économiques et de
syncrétismes culturels articulés en synapses urbaines (twin cities Laredo/
Nuevo Laredo). Culturellement plus homogène mais politiquement peut-
être encore plus sensible, la frontière entre la RAS de Hong Kong et la RPC
où sont implantés les ateliers d’assemblage des donneurs d’ordres de HK
c’est-à‑dire bien souvent de la diaspora chinoise notamment taïwanaise.
D’autres exemples s’imposent : en UE, le Luxembourg apparaît par sa
situation centrale et sa faible superficie comme un véritable pays-frontière,
une triple frontière (avec la France, l’Allemagne, la Belgique) qui se serait
constituée en un État souverain : l’industrie bancaire (Clearstream…) et les
sièges sociaux de FTN (Amazon Europe) y illustrent la vitalité de la mondia-
lisation. En complète opposition, l’enclave russe de Kaliningrad est plus
un isolat qu’un relais ou un territoire sas. Mais même la frontière la plus
fermée du monde, la sinistre DMZ entre les deux Corée tend à s’animer
un peu aujourd’hui avec de faibles contingents de touristes et surtout des
maquiladoras sud-coréennes implantées au Nord. Enfin il y a des frontières
discontinues, c’est-à‑dire séparées par des détroits ou des bras de mer
mais qui pour cette raison même connaisse une fertilisation mondialisante :
É conomique

Espagne/Gibraltar, Johore-Riau-Singapour, Taiwan-Fujian…

C. En réalité la décélération ou la poursuite voire l’amplification


de la mondialisation varient en fonction des secteurs de l’activité
humaine comme des territoires géographiques où elle se déploie
1) On peut craindre un emballement de la mondialisation noire ou grise, celui
des mafias, des hackers, des trafiquants, des marchands déterritorialisés

232 l ANNALES CCIR 2018-2019

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(sièges sociaux sur des plateformes dans les eaux internationales) qui préci-
sément grâce à la mondialisation l’emporteraient sur les États et/ou les
autorités internationales qui en émanent : c’est le scénario que J. Attali ESSEC
appelle la « somalisation » du monde à travers l’expansion de « l’anti-monde »
(Bertrand Badie).
2) On peut imaginer le scénario d’un New Deal de la mondialisation abou-
tissant au déploiement de régulation transnationale (de type convention de

C ORRIGÉ
l’Antarctique sanctuarisant des territoires, convention de Washington sanc-
tuarisant la faune et le flore, accords de Kyoto sanctuarisant l’atmosphère…)
dont des agences mondiales, à tout le moins fédérales au niveau des grands
blocs continentaux seraient les gardiennes. La mer, les commodities, les
migrations, les paradis fiscaux, le 7e continent du cyberespace seraient les
principaux domaines où s’appliquerait cette mondialisation règlementaire.
La taxe de solidarité sur les billets d’avion créée par Jacques Chirac et
appliquée par 9 pays dont la France en est un bel exemple ; elle finance
l’Unitaid pour lutter contre les trois fléaux infectieux majeurs que sont le
sida, le paludisme, la tuberculose.
3) Existe aussi la possibilité d’une dissociation de la mondialisation en deux
logiques : les PDEM attaqués dans leur rente, menacés dans leur hégémonie
seraient tentés sinon par une renationalisation de leur économie ou à tout
le moins par l’accentuation de leur coopération réciproque (scénario de
l’entre-soi triadique) ; à l’inverse, les pays émergents auraient intérêt à pour-
suivre une mondialisation dont le bilan est pour eux encore largement positif
et qui se traduit pour eux par une multilatéralisation de l’ordre mondial. Leurs

ÉCONOMIE, SOCIOLOGIE ET HISTOIRE


populations seraient aussi politiquement mieux disposées et culturellement
plus adaptées à la mobilité généralisée et à l’absence relative de protection
que la mondialisation impose.

É conomique

ANNALES CCIR 2018-2019 l 233

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S UJET
ÉCONOMIE, SOCIOLOGIE ET HISTOIRE
DU MONDE CONTEMPORAIN
Durée : 4 heures.

Tout verbiage doit être évité et il est expressément recommandé de ne


ESCP pas dépasser huit pages, sauf justification par la qualité du résultat.
Europe
Il sera tenu compte des qualités de plan et d’exposition, ainsi que de
la correction de la langue.
Il n’est fait usage d’aucun document ; l’utilisation de toute calcula-
trice et de tout matériel électronique est interdite.

S
UJET

Doit-on considérer que la désindustrialisation constitue


un processus inéluctable dans un pays développé ?

Vous illustrerez votre propos par des exemples historiques


empruntés au programme.

C
ÉCONOMIE, SOCIOLOGIE ET HISTOIRE

ORRIGÉ
Par Frédéric Besset, professeur à Intégrale, à Paris.

Entre 1975 et 2015, la part de l’industrie dans le PIB d’un pays comme la


France 4e puis 5e puissance économique mondiale, a baissé de 9 points
de 19 % à 10 %. La part relative de l’industrie dans la production a été
ainsi divisée par près de deux. Quoique de manière moins marquée, l’en-
semble des pays développés – aussi nommé de manière révélatrice « pays
industrialisés » – ont connu une évolution analogue, parfois dès le xixe siècle
comme ce fut le cas pour le Royaume-Uni au tournant des xixe et xxe siècles.
(Préambule)

La désindustrialisation est un processus à plusieurs entrées. Elle objective


d’une part une baisse de l’emploi industriel comme de la part du secteur
secondaire dans la valeur ajoutée totale ; cette baisse peut être relative et
imputable à l’accroissement de la production servicielle plus que proportion-
nelle à celle de la production manufacturière. Elle sanctionne d’autre part de
manière beaucoup plus inquiétante une perte de savoir-faire et de créativité
dans le domaine de l’industrie, soit la fabrication de biens manufacturés
É conomique

qu’il s’agisse de produits finis ou de biens intermédiaires, semi-finis. Le


sujet suggère que la désindustrialisation pourrait être une fatalité, une dyna-
mique historique pour les pays développés sinon la contrepartie même de
leur développement. (Définition de « désindustrialisation » et de « processus
inéluctable »)

Le caractère inévitable ou non de la désindustrialisation des pays


avancés ne dépend-il pas du positionnement dans la chaîne de valeur
234 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 234 24/10/2018 14:48


E
des systèmes manufacturiers voire de choix de société en amont
davantage que d’une quelconque nemesis économique ?
ESCP
Europe
I. La désindustrialisation est un processus périodiquement à l’œuvre
et qui s’est récemment accéléré pour les pays développés
dans le cadre de la mondialisation

C ORRIGÉ
A. Trois facteurs ont historiquement diminué de manière relative
ou absolue la part de l’industrie dans la production nationale
des pays développés depuis le xixe siècle
1. La loi de Engel : depuis le milieu du xixe siècle, le statisticien Ernst Engel
a démontré que la hausse du revenu par tête se traduisait notamment
par un accroissement plus que proportionnel des dépenses de loisirs, de
santé, d’éducation. En France la dépense publique d’éducation représente
0,1 % du PIB au début du xixe siècle, 1 % à la fin du xixe siècle, 5 % à partir
de 1975… C’est la loi de dématérialisation de la consommation qui
pousse les économies les plus avancées vers la tertiarisation pour satisfaire
la nouvelle demande : en 1945 les États-Unis, économie dominante, sont le
premier pays à atteindre un taux d’actifs tertiaire de 50 %. Alors qu’en 1960,
les Américains consacraient 50 cents à l’achat de biens pour chaque dollar
dépensé, ils n’en consacrent plus que 33 en 2016…
2. La destruction créatrice de Schumpeter. « Le nouveau ne sort pas de
l’ancien, mais apparaît à côté de l’ancien, lui fait concurrence jusqu’à le

ÉCONOMIE, SOCIOLOGIE ET HISTOIRE


ruiner » (Théorie de l’évolution économique). Ainsi à Lyon à la fin du xixe siècle
et plus encore après la Grande Guerre l’industrie traditionnelle de la soierie
et du velours ou la sidérurgie sont en difficulté et laissent la place à un
nouveau tissu industriel où domine l’électricité (Société des Forces motrices
du Rhône), l’automobile (Berliet qui fournit les 2/3 des poids lourds français
en 1913), la chimie (SCUR, Progil), les fournitures pour la photographie et
le cinéma (société Lumière & fils). Mais des décalages dans le temps et
dans l’espace peuvent séparer le passage d’une génération à l’autre
d’industries. Si la ville de Pittsburgh abandonne la sidérurgie dans les
années 1990 pour devenir une technopole tournée vers la pharmacie et la
robotique, certaines régions peinent à se reconvertir : c’est le cas notamment
en France du bassin de la Loire entre Saint-Étienne et Firminy quand à partir
des années 1970 l’exploitation houillère puis la mécanique y périclitent ;
aucune autre industrie ne s’y installe…
3. La théorie de l’avantage comparatif de Ricardo (en 1817) adossée
au milieu du xxe siècle au théorème HOS (Heckscher-Ohlin-Samuelson)
d’allocation optimale des ressources par l’échange incite aux recours aux
importations en provenance des pays à bas coûts salariaux pour les indus-
tries de main-d’œuvre. À partir des années 1960, une nouvelle division
internationale du processus productif (NDIPP) se met en place qui, par
É conomique

des exonérations de droits de douane, favorise l’assemblage des biens


manufacturés dans le pays à bas salaires, situé au sud de la ligne de Brandt :
le premier accord de ce type est en 1965 le PRONAF (programme national
frontalier) permettant la création des usines maquiladoras au Mexique.
L’industrialisation du Mexique s’accélère alors. Le pays intègre l’OCDE
en 1994 et en 2015, 25 % de ses actifs travaillent dans l’industrie qui fournit
1/3 du PIB. Simultanément, aux États-Unis en lien avec tout un faisceau de
facteurs, la part de l’industrie dans la valeur ajoutée passe de 25 % en 1970 à

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12,5 % en 2013. En 1989, le premier documentaire de Michael Moore Roger
and me… se penche douloureusement sur la ville de Flint, berceau de General
ESCP
Motors en 1908, où disparaissent en quelques années 30 000 emplois pour
Europe
la plupart délocalisés au Mexique.

B. La désindustrialisation au xxe siècle ne se produit pas au même


rythme et aux mêmes époques du développement des pays avancés
C ORRIGÉ

1. D’abord parce que le décollage ou take-off au sens de Rostow ne se


produit pas partout au même moment. Selon WW. Rostow, auteur en 1960
des Étapes de la croissance économique, l’Angleterre décolle dès 1780,
la France en 1830 tandis que l’Allemagne, qui fait partie des pays dits de
la seconde vague d’industrialisation, doit attendre 1850. Le décalage se
perpétue pour les étapes suivantes : les États-Unis atteignent l’ère de la
consommation de masse, la 5e et dernière étape du schéma rostowien, dès
les années 1920 lors des Roaring twenties, l’Europe occidentale doit attendre
les Trente Glorieuses. Un décollage plus tardif est un facteur protecteur
contre la désindustrialisation. A. Gerschenkron (Economic backwardness
in historical perspective, 1962) montre que les pays industrialisés qui se sont
développés après les pays pionniers, comme c’est le cas à diverses époques
des États-Unis (après 1870), du Japon après 1890, de l’URSS des années 20
et 30, ont bénéficié de la tutelle d’un État stratège, d’un protectionnisme
éducateur listien, de l’accès gratuit ou à faible coût à des innovations étran-
gères (le circuit transistorisé inventé aux EU en 1947 par les laboratoires Bell
profite à l’industriel japonais Sony qui s’en sert pour fabriquer les premiers
ÉCONOMIE, SOCIOLOGIE ET HISTOIRE

postes de radio portables, appelés par métonymie transistors…).


2. À l’inverse, le Royaume Uni est le pays pionnier de l’industrie comme
de… la désindustrialisation. Alors qu’elle représente 30 % de la production
industrielle mondiale en 1870 – soit plus que la Chine en 2018, 1re production
industrielle avec 20 % du total mondial –, ce chiffre tombe à 12 % en 1913 !
Le phénomène s’accélère après la Première Guerre mondiale donnant nais-
sance aux premières politiques publiques de réhabilitation des black belts des
Midlands de l’ouest. À peine freinée au début des molles Trente glorieuses
britanniques, la désindustrialisation reprend dès les années 1960, dix ans
avant la crise pétrolière. Des facteurs idiotiques semblent l’avoir aggravée :
l’atomisation de l’industrie qui ne réalise pas assez d’économies d’échelle,
la force de freinage que représente un syndicalisme précoce et organisé
relayé par le parti travailliste, le poids de la City qui encourage la surévalua-
tion de la livre et draine les capitaux vers les investissements à l’étranger,
États-Unis en tête !
3. C’est surtout depuis les années 1970 que la désindustrialisation semble
toucher l’ensemble du monde développé. Sans inquiéter outre mesure les
décideurs qui y voient le corollaire inévitable de la tertiarisation voire une
bonne nouvelle ce que reflète l’expression de « société post-industrielle »
forgée par Alain Touraine en France (1969) et Daniel Bell aux États-Unis
(1973). Les chocs pétroliers renchérissent les coûts de production dans
É conomique

l’industrie des pays occidentaux tout en ralentissant la demande. Ils s’ac-


compagnent d’une prise de conscience des contraintes environnementales
(Rachel Carson et son Silent Spring, syndrome de Minamata au Japon, pluies
acides en RFA…) et sociales de l’industrie, source de pollution (au DDT, au
mercure, à la lignite…) et de conflits de classes. C’est aussi le début d’une
concurrence industrielle en provenance d’Asie et en particulier du Japon.
Les Honda Civic puis Accord connaissent de fabuleux succès sur le marché

236 l ANNALES CCIR 2018-2019

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américain déclassant les lourds véhicules mal finis et énergivores de Detroit,
Motown. Mais l’automobile est loin d’être la branche la plus affectée, notam-
ESCP
ment en Europe. Souffrent davantage les industries de main-d’œuvre (en
Europe
France Lip – le premier horloger du pays – fait faillite en 1977 ; le groupe
textile Boussac – Marcel Boussac était la 1re fortune de France – en 1978) :
« toute entreprise située dans un pays à haut niveau de vie, et dans le secteur
manufacturier, et employant une large part de main-d’œuvre peu qualifiée,

C ORRIGÉ
est vouée à la faillite ou à la délocalisation. » théorise Michel Albert ; ou l’in-
dustrie lourde : en 1979, la sidérurgie lorraine en difficulté est quasiment
nationalisée par le gouvernement Barre qui y licencie 30 000 personnes ;
en 1986 les chantiers navals de la Normed (La Ciotat, La Seyne-sur-Mer,
Dunkerque) déposent leur bilan…

C. Depuis le tournant du xxe-xixe s. la désindustrialisation semble être


corrélée à la fois à une nouvelle étape de l’émergence des NPI (nouveaux
pays industrialisés) et à l’emprise croissante du néo-libéralisme
1. En 20 ans de 1995 à 2015, la part de l’industrie dans le PIB de l’UE (péri-
mètre 28) est passée de 19,6 % à 15,9 %, (près de 20 % en moins) dont 11,2
pour la France et 9,8 % pour le RU. Un pays comme la Suède à la forte culture
industrielle a perdu ¼ de ses emplois industriels de 1990 à 2015 ; en 2016 la
société Ericsson fondée en 1878 supprime 22 % de ses effectifs dans le pays.
Aux EU, l’élection de D. Trump en 2016 a été rendue possible par le vote
des swing states de la rust belt – Michigan, Pennsylvanie (qui a perdu 40 %
de ses emplois industriels entre 1990 et 2016 !), Ohio – constellés de friches

ÉCONOMIE, SOCIOLOGIE ET HISTOIRE


industrielles et d’électeurs au chômage… 8 millions d’emplois industriels
ont été détruits entre 1980 et 2015 aux E.U-A. où le secteur secondaire ne
pèse plus que 12,2 % du PIB. Très emblématique est la descente aux enfers
d’un groupe comme General Motors qui a vendu dans son histoire séculaire
15 % des voitures et camions produits sur la planète et qui était en 1974 le
premier employeur des États-Unis (650 000 salariés). Mais en 2009, le groupe
a été placé sous la protection de la loi sur les faillites après avoir supprimé
le tiers de ses effectifs entre 2005 et 2008 notamment à cause de la crise
des subprimes mais aussi en raison d’une baisse de long terme des ventes.
En 2017, GM convalescent n’emploie plus que 180 000 salariés après la
cession de certaines de ses marques majeures comme Opel.

Tableau 1 : Évolution de l’emploi dans l’industrie manufacturière


dans quelques grands pays développés pour la période 1991-2010
(en %)

Pays Baisse de l’emploi en % (par ordre décroissant)


Royaume-Uni – 41,1 %
Japon – 32,3 %
Allemagne – 30,7 %
É conomique

États-Unis – 28,7 %
France – 28,6 %
Suède – 24,2 %
Italie – 16,7 %
Espagne – 9,1 %
Source : base de données AMECO, Commission européenne

ANNALES CCIR 2018-2019 l 237

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 237 24/10/2018 14:48


2. Depuis le milieu des années 1990, la financiarisation de l’économie
s’est accélérée. Des fonds d’investissements sont entrés au capital des
ESCP
grands groupes industriels. Leur stratégie n’est plus celle de l’entrepreneur
Europe
qui vise le long terme et accepte de faibles retours sur investissement. Des
rendements à deux chiffres sont l’exigence standard des actionnaires de
ces fonds ; or, l’industrie est un métier de gagne-petit où 5 % de rentabi-
lité constitue une bonne performance. Par ailleurs les fonds prennent le
C ORRIGÉ

contrôle des entreprises par des mécanismes de LBO (leverage buy out)
qui consistent à financer l’achat de la société par un emprunt supporté par
l’entreprise elle-même qui ainsi s’endette. C’est ce qui est arrivé au leader
français des aciers spéciaux, Ascometal, qui, repris en 2013 par le fonds
d’investissement américain Apollo, dépose son bilan en 2014. Même lors-
qu’ils ne sont pas directement détenus par des fonds d’investissements
les groupes industriels sont désormais contraints de créer de la valeur pour
l’actionnaire (paradigme du shareholder value) ; or le temps de référence
des marchés financiers n’est pas celui des cycles de développement
des produits dont la durée excède une décennie dans certaines branches
comme l’aéronautique ou la pharmacie. De 2009 à 2016 les entreprises du
CAC 40 ont versé en moyenne 67 % de leurs bénéfices à leurs actionnaires
dont un quart du total pour deux entreprises industrielles que sont TOTAL
et SANOFI. D’une part, la distribution de dividendes devient indépendante
de la conjoncture car il faut fidéliser l’actionnaire, y compris aux dépens
de l’investissement, au risque d’une sclérose technologique ; d’autre part
la contrainte du dividende pousse à dégager du cash flow par la restruc-
ÉCONOMIE, SOCIOLOGIE ET HISTOIRE

turation permanente de la chaîne de valeur (via l’externalisation voire la


délocalisation) et par la compression de la masse salariale y compris en
période de bénéfices. Une entreprise comme Apple, 1re société à atteindre la
barre symbolique des 1 000 milliards de dollars en juillet 2018, y est parvenue
notamment en procédant à des rachats massifs de ses propres actions. La
finance tend même à grignoter le cœur de métier des entreprises indus-
trielles : dans l’automobile, les activités d’assurance et de crédit (GMAC
pour GM ; DIAC pour Renault…) représentent désormais jusqu’à 40 % du
résultat net des constructeurs.
3. Enfin, les émergents ne sont plus de simples bases de délocalisations des
activités d’assemblage comme dans les années 70-80. Un pays comme le
Mexique par exemple a bénéficié de l’instauration de l’ALENA depuis 1994
pour devenir le 7e producteur mondial d’automobiles juste derrière l’Inde et la
Corée du Sud, même s’il ne dispose pas de marques nationales : seul 1 véhi-
cule sur 5 est destiné à son marché intérieur. Mais le Mexique c’est encore
le made in… La Chine quant à elle est passée du made in au made by ;
les sous-traitants d’hier ont développé leur propre marque : Lenovo l’ex-
Legend qui assemblait les PC d’IBM dans les années 1990 a racheté la
division « ordinateurs personnels » du géant d’Armonk (NJ) en 2005 puis
en 2014 la division « serveurs ». IBM est ainsi devenu principalement une
É conomique

entreprise de services du numérique (ESN). Le principal concurrent du géant


suédois des télécoms Ericsson est aujourd’hui Huawei, celui du constructeur
français du TGV Alstom, récemment racheté par Siemens, est le chinois
CRCC (China Railway Construction Corporation), numéro un mondial de
la construction de matériel ferroviaire qui construit des chemins de fer en
Afrique et au Moyen Orient mais aussi au Canada…

238 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 238 24/10/2018 14:48


II. Pour autant s’il est historiquement avéré et encore largement
en cours dans les pays développés, le processus de désindustrialisation
ESCP
n’est ni inexorable ni nécessairement dramatique
Europe
A. La désindustrialisation peut être combattue de manière
volontariste par des politiques actives directes et indirectes de l’État
et/ou des acteurs publics locaux de type collectivités territoriales

C ORRIGÉ
1. On distingue généralement trois types de politique industrielle directe : la
politique industrielle de type horizontal, de type vertical et le soutien aux
changements structurels. Les politiques industrielles de type horizontal ne
visent pas une industrie spécifique ou une activité économique particulière.
C’est par exemple le cas du soutien à la recherche et au développement
(R&D) – cf. le Crédit impôt-recherche (ou impôt-innovation) en France –
ou aux petites et moyennes entreprises (PME) : aux États-Unis le Small
Business Act réserve depuis 1953 certains marchés publics aux PME.
Les politiques industrielles de type vertical visent au contraire une industrie
ou un secteur particulier. C’est par exemple le cas du soutien à l’industrie
informatique ou à l’industrie aéronautique. Elles sont typiquement mises
en œuvre en France ou au Japon après la Seconde Guerre mondiale dans
le cadre d’économies de rattrapage (colbertisme high-tech) : programme
franco-allemand pour l’avion de transport militaire TRANSALL en 1958 ou
plan Calcul en France (création de la société CII et de l’INRIA) en 1966 qui,
jusqu’à son arrêt en 1975, vise à créer sous le nom d’UNIDATA un Airbus
de l’informatique européenne. À noter que des considérations stratégiques

ÉCONOMIE, SOCIOLOGIE ET HISTOIRE


(indépendance militaire) sous-tendent ces programmes publics qui visent
aussi à maximiser la souveraineté des États qui les financent.
2. Les politiques industrielles de soutien aux changements structurels
visent généralement à porter des industries en démarrage. Elles sont
très anciennes si on y assimile par exemple le protectionnisme éducateur
listien du xixe siècle : Friedrich List (1789-1846) préconise non seulement
une politique de taxation douanière différenciée des produits manufacturés
importés (en fonction de leur contenu technologique) mais il est à l’ori-
gine d’une réflexion sur les « tactiques d’environnement » qui anticipe
les réflexions d’un Paul Romer au xxe s. : la puissance publique favorise
les entreprises industrielles indirectement par la recherche, l’éducation,
les infrastructures de transports, l’administration… Un exemple contem-
porain de ces politiques de soutien à l’innovation industrielle est la loi
française dite de « modernisation du service public d’électricité » qui à partir
de l’An 2000 a permis par une politique de soutien au prix de l’électricité
éolienne de faire surgir une filière française de production représentant
en 2017 18 000 emplois et 600 entreprises (dont certaines très innovantes
comme EOLFI spécialiste de l’eolien off shore). Une autre application de
ces politiques de soutien vise au contraire des industries en déclin : c’est
le cas dans le cadre de la CEE des plans DAVIGNON (1977) ou TAJANI
É conomique

(2013) d’appui au secteur sidérurgique. Le secteur automobile n’est pas


une industrie en déclin mais il est confronté à un changement structurel
global lié au renouvellement du paradigme technologique – émergence de
nouvelles motorisations notamment électriques –, règlementaire – normes
anti-pollution de plus en plus restrictives – et concurrentiel – émergence
d’une offre en provenance des PED, hier la Corée du Sud, demain la Chine
populaire (Geely, Dongfeng…) : les États occidentaux montent alors au tour

ANNALES CCIR 2018-2019 l 239

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 239 24/10/2018 14:48


de table de leurs entreprises porte-drapeau, provisoirement comme le fait
l’État américain avec GM en 2009 ou de manière plus pérenne l’État français.
ESCP
Celui-ci est déjà détenteur de quelque 20 % du capital de Renault-Nissan
Europe
possède depuis 2013 via sa banque publique d’investissement (BPI France)
12 % du capital de PSA. Dans ce dernier cas, l’initiative semble couronnée
de succès avec un puissant renforcement du groupe PSA, il est vrai avec
l’apport d’un actionnaire étranger le Chinois Dong Feng. Mais, générale-
C ORRIGÉ

ment, les économistes sont très critiques par rapport aux politiques de
soutien visant à maintenir des activités dans une industrie en déclin : Philippe
Aghion par exemple souligne que l’aide aux canards boiteux dégrade les
finances publiques, retarde le renouvellement schumpeterien des secteurs
concernés et souffre d’une tare originelle : la dichotomie entre objectif poli-
tique du gouvernement (maintenir l’emploi…) et stratégie d’entreprise qui
peut exiger des restructurations ou le retrait de certains marchés. Dans le
cas des politiques de soutien à des industries en phase de démarrage, la
littérature économique présente un certain nombre d’arguments plus favo-
rable à l’intervention publique. Les pays émergents ne se privent pas d’y
recourir via un véritable capitalisme d’État, manifeste par exemple en RPC.
3. De manière indirecte la puissance publique en Occident peut ensemencer
l’industrie dans les territoires en créant des institutions propices (politique
pro business, flexibilité du marché du travail, exonérations fiscales, allè-
gements réglementaires, sécurité publique et climat de confiance entre
l’administration et les entrepreneurs, infrastructures de transport ou de
recherche, aménités immatérielles…). Il est parfois difficile de dissocier
ÉCONOMIE, SOCIOLOGIE ET HISTOIRE

ce qui relève de la qualité de la gouvernance et ce qui est déterminé par


l’histoire ou l’identité locale. Marshall explique l’agglomération initiale des
activités industrielle par la présence d’avantages comparatifs – ressources
naturelles, facilités de communication ou protection d’une cour princière –
mais « lorsqu’une industrie a ainsi choisi une localité, elle a des chances d’y
rester longtemps, tant sont grands les avantages que présente pour les gens
adonnés à la même industrie qualifiée, le fait d’être près les uns des autres »
(Principes d’économie politique, 1890). C’est le cas notamment dans les
clusters ou « grappes industrielles » théorisés par Michael Porter dans
les années 1980. Porter analyse la réussite du plus emblématique de ces
clusters, la Silicon Valley (2,5 millions d’habitants au nord de la Californie,
11 % des brevets déposés aux EU, 12e puissance économique poten-
tielle !) qui réunit une masse critique de ressources dès les années 1940 :
des bases et centre de recherche militaire comme l’Ames Research Center
créé en 1939, des universités (en vaisseau amiral : Stanford, université la plus
sélective des EU), des entreprises dont la 1re, Hewlett-Packard, est fondée
en 1939 par deux étudiants de Stanford, des fonds de capital-risque (160
en 2015 !) ; ce modèle a été reproduit ou décliné aux EU (Silicon Mountain
de Denver) puis dans le reste du monde développé. Ainsi : la Silicon Fen
britannique (firmes comme Autonomy, Abcam, Xaar…) développée à la
É conomique

suite du rapport Mott en 1969 autour de l’université de Cambridge ; le Pays


basque espagnol qui au début des années 1990 expérimente le concept
de pôle de compétitivité avec l’appui direct de Michael Porter autour de la
sidérurgie et de la machine-outil. Douze pôles de compétitivité représentent
désormais plus de 55 % du PIB basque espagnol. En France, le technopôle
de Paris Sud-Orsay (aujourd’hui Paris-Saclay) : il naît de l’implantation
dans les années 1950-1960 du complexe militaro-industriel : CNRS

240 l ANNALES CCIR 2018-2019

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à Gif-sur-Yvette, Commissariat à l’Énergie Atomique (CEA) à Saclay, Centre
d’essai des propulseurs (CEPr) de la Direction Générale des Armements
ESCP
(DGA) à Saclay, ONERA (recherche aérospatiale) à Palaiseau, INRA (agri-
Europe
culture) à Jouy-en-Josas, INSTN (sciences et techniques du nucléaire)
à Orsay. Les grands programmes gaullistes jouent un rôle structurant ; en
témoigne la création de l’INRIA (informatique et automatismes) en 1967
à Rocquencourt afin d’accompagner le lancement du « Plan calcul ». Puis

C ORRIGÉ
dans un second temps, une véritable « cité scientifique » apparaît : la décon-
centration de l’agglomération parisienne pensée par les équipes de Paul
Delouvrier aboutit à l’installation de Grandes Écoles – HEC (Jouy-en-Josas,
1964), Supelec (Gif-sur-Yvette, 1975), Polytechnique (Palaiseau, 1976) – et
de grands équipements de recherche (Synchrotron SOLEIL (CEA/CNRS),
laser à ultra-haute puissance CILEX…). Pour autant, paradoxalement, la
concentration de ce potentiel exceptionnel sur un espace restreint s’est très
largement faite au coup par coup sans réelle logique d’ensemble, ni stratégie
cohérente. Troisième étape au début du xxie siècle, remobilisant la logique
volontariste des Trente Glorieuses, le président Sarkozy décide en 2007 de
créer sous le nom de Paris Saclay un cluster scientifique de rang mondial
notamment grâce à de grandes opérations d’aménagement du territoire
(lancement du Grand Paris Express, avec par exemple la ligne de métro
automatique 18 Orly-Versailles via le plateau de Saclay) ou au regroupement
d’une vingtaine d’établissement d’enseignement supérieur dans la nouvelle
université de Paris-Saclay. Cette concentration exceptionnelle d’activités
de recherche-développement explique la présence de très grandes firmes

ÉCONOMIE, SOCIOLOGIE ET HISTOIRE


– souvent transnationales, françaises et étrangères : Alstom, Areva, Bull,
Cap Gemini, Danone, Dassault Système, Ericsson, General Electric, Hitachi,
Nokia, Nexter, Oracle, Peugeot, Renault, Safran, Sanofi, Siemens, Thales
ou Valeo.

B. En réalité ce n’est pas le secteur industriel qui disparaît en tant


que tel des pays du Nord mais l’échelon de fabrication, l’étape
manufacturière pure selon le schéma de la firme fabless (sans usine)
inaugurée par la firme américaine Nike dans les années 1970
1. Réorganisation de la structure physique (fin de l’usine cathédrale), juri-
dique (réseau de sous-traitants indépendants plutôt que filiales) voire
managériale (fin des organigrammes pyramidaux mimant la hiérarchie
militaire) de la firme industrielle. « Tertielisation » qui maintient dans les pays
avancés les activités péri-productives du secteur manufacturier (gestion,
direction, marketing, distribution) et abandonne au pays ateliers (ou aux
régions ateliers des pays emergents comme le Guangdong) le bas de la
chaîne de valeur : au dos des I-phones d’Apple figure la mention « Designed
in California, assembled in China » ce qui traduit la concentration de la
ressource humaine et du savoir-faire sur le haut de la chaîne de valeur (Apple
à Cupertino…) là où l’avantage ricardien demeure maximal. Même un produit
É conomique

aussi emblématique du luxe français que le Carré Hermès – pour lequel la


notion de savoir-faire noble et traditionnel est abondamment mobilisée par
le marketing de la marque – connaît une étape de production (il est vrai
mineure) à… Madagascar (où le salaire moyen mensuel représente 12 %
du prix d’un seul foulard).
2. Deux révolutions organisationnelles adjacentes ont transformé l’ar-
chitecture voire la philosophie de la firme industrielle. 1re  révolution : le

ANNALES CCIR 2018-2019 l 241

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toyotisme qui repose ultimement sur l’externalisation de la fabrication des
pièces détachées rendue possible par une conception modulaire favori-
ESCP
sant les économies d’échelles (les constructeurs automobiles notamment
Europe
multimarque deviennent des « assembleurs » ; cf. VAG et ses 12 marques
produites dans 50 usines réparties dans 14 pays !) réduisant les coûts par la
mobilisation de banque d’organes communs. Élargissement géographique
de l’organisation fluide toyotiste du Tokaido (Toyota est aussi une ville au
C ORRIGÉ

sud est de Nagoya) à l’Asie du Sud-est puis aux deux rives du Pacifique.
2e  révolution, le « wintelisme » (double monopole du soft – systèmes d’ex-
ploitation Windows de Microsoft – et du hardware – microprocesseur Intel
qui équipe 80 % des PC et tablettes produits dans le monde) : au-delà même
du secteur de l’informatique un produit, une famille de produits s’impose
comme une norme, un standard : monopole en Occident des moteurs de
recherches et réseaux sociaux américains (Facebook, Instagram, Twitter)
– à condition de les considérer comme des entreprises industrielles, plants
de maïs transgéniques BT stériles de Monsanto (racheté par Bayer en 2017)
ou Bic Mac de Mac Donald’s (à l’origine d’un indice Big Mac de coût de la
vie imaginé par The Economist en 1986 !) et non plus seulement en marque.
Planétaires, ces nouveaux monopoles ou oligopoles industriels sont bien
plus puissants que la Standard Oil au moment de son démantèlement par
les lois anti trust américaines. Le wintélisme en subsidiaire la question du
lieu de création physique du produit : les concurrents doivent acheter les
brevets, courir derrière…
3. De manière dialectique la délocalisation manufacturière par les
ÉCONOMIE, SOCIOLOGIE ET HISTOIRE

baisses de coûts qu’elle engendre permet le maintien en vie et l’essor


des entreprises industrielles au Nord. Exemple-phare de l’entreprise
Petit Bateau née en 1920 et une des rares à subsister en France dans le
secteur de la bonneterie où elle emploie 2 000 salariés dans l’Hexagone :
deux échelons de délocalisation selon la gamme (Maroc-Tunisie/Chine-
Vietnam) ont sauvé l’entreprise du dépôt de bilan et près de 1 100 emplois
dans l’agglomération de Troyes dans le dessin des collections, la logistique,
l’informatique (cf. la thèse de Michael Porter : il n’y a pas de secteur à faible
technologie mais seulement des entreprises de faible technologie…). Image
vieillotte et positionnement sur le vêtement pour enfant (or baisse de la
natalité in PDEM…) transformé par l’appel à une grande agence de publi-
cité EuroRSCG (Havas) et par la création de gammes pour adultes. Grand
succès : marque phénix, transgénérationnelle qui renouvelle sans cesse son
offre grâce à des séries courtes et à la souplesse de l’appareil productif
maghrébin. L’internationalisation des ventes a suivi celle de la production :
45 % des ventes à l’export, y compris au RU et au Japon où Petit Bateau est
positionné comme une marque de luxe… Mais s’impose aussi la perspec-
tive d’une inversion du phénomène de délocalisation en raison de cinq
facteurs convergents. Le premier est la hausse des coûts salariaux dans
les pays-ateliers et l’épuisement des réservoirs de main-d’œuvre rurale
É conomique

docile. Le second est la prolifération des normes environnementales


renchérissant les coûts de production : succès croissant au Nord de l’idée
de barrière douanière différentielle en fonction de l’empreinte carbone du
processus de fabrication des produits importés ; le troisième, apparenté au
précédent, est la hausse des coûts énergétiques dégradant la rentabilité
du schéma d’éclatement des lieux de production et la maritimisation de la
logistique industrielle. Le quatrième la prise de conscience par les grandes

242 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 242 24/10/2018 14:48


firmes occidentales de leur dépendance dangereuse à des sous-trai-
tants tentés par le siphonage technologique : le Japonais Canon a ainsi
ESCP
rapatrié toute sa production de copieurs dans l’Archipel après des déboires
Europe
en Chine. Le cinquième est l’intégration par le discours marketing d’une
dimension patriotique voire éthique à l’acte d’achat par le consommateur :
American Apparel fabrique depuis 1999 ses T-shirts près de Los Angeles
et orne ses visuels publicitaires du slogan « Sweatshop free ». Enfin le sens

C ORRIGÉ
même des IDE manufacturiers pourraient basculer : d’une part les nouvelles
délocalisations sont ou seront Sud-Sud : le chinois Haier fondé en 1984
a déjà des usines dans cinq pays africains : Tunisie, Nigéria, Égypte, Algérie
et Afrique du Sud ; d’autre part s’accroissent vigoureusement les investisse-
ments industriels Sud/Nord pour contourner le protectionnisme triadique
(sur le modèle des transplants japonais des années 1980) ou acquérir un
savoir-faire, une tradition, une marque : les acquisitions dans l’automobile de
Volvo par Geely, de Jaguar par Tata non seulement ne diminuent pas mais
accroissent par l’injection de capitaux l’emploi industriel de ces marques
en Suède ou en Grande-Bretagne.

C. Et si la notion d’industrie n’était plus au plan méthodologique en


tant que telle pertinente pour décrire les activités économiques du
xxie siècle, particulièrement d’ailleurs dans les pays développés ?

1. Traditionnellement, depuis Colin Clark (1947), la répartition des activités


est le plus souvent analysée en fonction d’une trilogie élaborée entre 1930
et 1950 et qui reflète les structures économiques et productives nées de la

ÉCONOMIE, SOCIOLOGIE ET HISTOIRE


Seconde révolution industrielle : le primaire regroupe alors la production de
matières premières (mines, agriculture, forêts) et le secondaire leur trans-
formation par l’industrie manufacturière. Dans le système de Colin Clark, le
tertiaire fonctionne comme une « poubelle » statistique et conceptuelle dans
laquelle on classe par défaut tout ce qui n’est pas primaire et secondaire.
Du fait des profondes mutations des systèmes productifs, il représente
aujourd’hui 70 à 80 % de l’emploi et du PIB dans les pays hautement
développés. Par exemple, un établissement classé dans l’automobile et
considéré comme industriel peut être soit un siège social, soit un centre
de recherche, soit une usine de montage ou un centre de stockage et
de distribution logistique. De même, à l’inverse, le pôle directionnel de
la Défense (92) – qui accueille les sièges sociaux des grandes entreprises,
donc dans les fonctions de gestion – voit ceux-ci ventilés entre les branches
industrielles (tour TOTAL) ou les services (banque, assurances…) selon le
rattachement de l’entreprise à tel ou tel secteur.
2. C’est pourquoi en France par exemple – mais des réflexions similaires
ont éclos dans l’ensemble des pays avancés – à la suite des travaux d’uni-
versitaires, en particulier de géographes (J. Scheibling ou Laurent Carroué,
La France. Les mutations des systèmes productifs, 2013) ou d’économistes
spatiaux (Pierre Veltz, La société hyperindustrielle. Le nouveau capitalisme
É conomique

productif, 2017), l’Insee a  développé depuis plusieurs décennies une


approche de l’emploi par 15 grandes fonctions réparties en deux grandes
sphères : la sphère de la production (divisée en production concrète
– y compris agricole – en en production abstraite (gestion, recherche…)) et
la sphère de la reproduction (qui comprend par exemple l’administration, la
maintenance, l’éducation…). Pour sa part, Laurent Davezies (La république
et ses territoires : la circulation invisible des richesses, 2008) dont les travaux

ANNALES CCIR 2018-2019 l 243

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 243 24/10/2018 14:48


portent sur les moteurs de la production et de la circulation de la richesse
dans les territoires, a développé les concepts d’« économie productive » et
ESCP
d’« économie résidentielle » en identifiant quatre grands types de territoires
Europe
selon l’origine du type dominant de revenus qui l’irrigue : « territoires à base
productive », « territoires à base publique », « territoires à base sociale » et
« territoires à base résidentielle ». Ainsi la richesse créée dans les territoires
à base productive est-elle dépensée dans les territoires à base résidentielle :
C ORRIGÉ

les cadres supérieurs britanniques viennent s’établir dans le Lubéron ou


le Gers qui deviennent des économies résidentielles vivant des richesses
créées ailleurs et avant.

III. La désindustrialisation ne frappe pas l’Occident de manière isotrope :


des variables culturelles semblent rendent certains territoires ou même
États plus résilients que d’autres

A. Les pays hyper-industriels répondant à un modèle germano-nippon


1. L’Allemagne, l’Autriche (cf. les fabricants d’armes de point Glock ou
Steyr-Mannlicher, les producteurs de motocyclettes comme KTM…), la
Suisse (un peu les spécialités françaises en plus internationalisées encore :
Nestlé, Novartis, Richemont…), le nord de l’Italie ou « Padanie » (Lombardie,
Ligurie (Fiat)…) mais aussi dans le monde scandinave le Danemark
(cf. tableau infra) et la Suède (Volvo, Saab, Scania…) quelques PECO
(république Tchèque (40 % de la population active comme du PIB dans
ÉCONOMIE, SOCIOLOGIE ET HISTOIRE

l’industrie), Estonie (énergies, électronique, NTIC (Skype)…) en Europe, le


Japon naturellement en Asie augmenté de la Corée du Sud qui est un pays
émergé plus qu’émergent. Tous ces pays avancés ont conservé voire déve-
loppé un tissu industriel dense, mature, prospère.
2. Ce modèle repose sur un tissu industriel dense et riche notamment
d’ETI (établissement de taille intermédiaire, jusqu’à 500 salariés). Cf. le
Mittelstand allemand, composés de grosses ETI orientées vers l’export
et faisant beaucoup de recherches. Ce tissu comporte évidemment aussi
des FMN de grande classe (VAG, Matsushita, ABB). Les sociétés ont un
fort consensus et font bloc derrière leurs champions nationaux (peu de
grèves, voire des efforts exceptionnels de productivité comme récemment
en RFA où les coûts de productions se sont stabilisés au niveau du début
du xxie siècle depuis les réformes menées par l’ancien DRH de Volkswagen,
Peter Hartz) que les banques (Siemens/Deutsche Bank) soutiennent dans
leurs stratégies de croissance.
3. L’émergence des NPI est pour ces ensembles plus une chance qu’une
contrainte : l’Allemagne affiche une insolente santé économique (3,6 % de
chômage début 2018) grâce à ses exportations de biens d’équipement (Man
fournit les turbines des porte-conteneurs construits en Asie) ou d’automo-
biles vers les pays émergents (les cadres dirigeants du parti communiste
É conomique

chinois roulent en Audi A8). Le savoir-faire, l’image de marque des groupes


industriels en question sont peu délocalisables (prestige du Made in Japan
ou du Standort Deutschland…) et plutôt alors vers d’autres pays développés
que vers la Chine (Corée du Sud pour le Japon, Tchéquie pour la RFA…).
Certes, depuis 20 ans ces pays au capitalisme souvent très autochtone
ont dû accepter une ouverture et l’arrivée d’acteurs étrangers (rachat de
Nissan par Renault, plutôt un partenariat d’ailleurs, de Mannesmann par
l’anglais Vodafone)…

244 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 244 24/10/2018 14:48


Tableau 2 : Un petit pays fertile en grandes firmes industrielles,
le Danemark
ESCP
Petit pays de 9 millions d’habitants, le Danemark compte un grand nombre Europe
d’entreprises industrielles typiques. À lui seul un pays comme la France
compte 200 filiales de groupes industriels danois !

C ORRIGÉ
Sociétés Activité Siège social Palmarès
Bang & Hi-Fi, TV Struer Existe depuis 1925
Olufsen
Bodum Articles Copenhague Le design, soft power
ménagers, du Danemark ?
cafetières
Lego Jouets Billund 7 boîtes de Lego
vendues chaque
seconde dans
le monde…
Velux Fenêtres Horsholm Cas d’antonomase :
de toit velux est devenu
un nom commun !
Vestas Éoliennes Randers N° 1 mondial
des éoliennes

ÉCONOMIE, SOCIOLOGIE ET HISTOIRE


B. Des pays avancés où la place de l’industrie est moindre qu’il s’agisse
d’un choix, d’une stratégie assumée ou d’une faiblesse structurelle
1. Le Royaume-Uni, la France, l’Italie ont une industrie qui comporte de
remarquables champions nationaux (Montedison, Leonardo, Fiat, Benetton
pour l’Italie par exemple). La France a certainement le meilleur palmarès de
la catégorie car elle comporte des champions mondiaux (n° 1 mondiaux de
leurs secteurs : Technip, Michelin, LVMH, ENGIE…) comparables aux grands
groupes allemands et plus nombreux qu’eux ! Le Royaume-Uni s’est réindus-
trialisé dans le high-tech (BAe, Astra Zeneca…), l’agroalimentaire (Diageo),
le pétrole (BP) après avoir subi le british disease qui est d’abord une crise
d’obsolescence industrielle des années 1920 à 1970 surtout. L’ouverture
dès les années 1980 aux IDE américains, japonais (usine Nissan à Newcastle
e.g.) et à présent émergents permet le maintien des emplois industriels
quitte à ce que les entreprises passent sous pavillon étranger. L’Italie brille
à l’inverse de la France par un riche tissu de PME familiales notamment dans
l’économie de districts marshalliens de la Tre Italia, la 3e Italie (Marches,
Ombrie, Toscane, Émilie, Vénétie), identifiée par Arnaldo Bagnasco en 1977
(avec des « artisans mondiaux ») ; en revanche il manque à la Péninsule des
mastodontes internationaux : c’est l’inverse du modèle français !
É conomique

2. Historiquement plus fragile que l’industrie germano-nipponne, cette


industrie est très exposée à la concurrence des pays émergents soit par
les délocalisations du textile (Lejaby), des sous-traitants automobiles (Molex)
ou de la sidérurgie (fermeture des hauts fourneaux lorrains de Gandrange
par l’Indien Mittal) soit directement par la concurrence « Made by » des
nouveaux producteurs du Sud. En effet ces nations sont spécialisées dans
des gammes (moyen de gamme pour l’automobile française) ou des types

ANNALES CCIR 2018-2019 l 245

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 245 24/10/2018 14:48


des productions (bien de consommation plutôt que bien d’équipement) qui
correspondent plus à l’offre des émergents qu’à leur demande ! S’y ajoutent
ESCP
des problèmes spécifiques à chaque pays : poids du secteur financier
Europe
qui vampirise capitaux et talents pour le RU, problème de compétitivité
pour l’Italie (réputation, fiabilité…) et en partie pour la France (coût de la
main-d’œuvre, aucun produit français réellement incontournable aux yeux
des importateurs étrangers…) dont les exportations de biens manufacturés
C ORRIGÉ

sont écrasées par l’euro fort (perte de 20 % des parts de marché mondial de
la France depuis 2000 à 2012 de 6,3 à 5,2 % des exportations mondiales).
3. Il faudrait ajouter à cette catégorie un groupe de pays tout à fait singuliers
parmi les pays développés : la Norvège, l’Australie et le Canada conjuguent
en effet extrême développement social (ils caracolent en têtes du classement
de l’IDH par exemple) et industrie extractive dominante (charbon, gaz, fer,
pétrole…) démentant la fameuse « malédiction des matières premières ». Il
y existe cependant des groupes manufacturiers purs notamment canadiens
(Bombardier).

C. Les États-Unis d’Amérique constituent un monde industriel en soi.


Le pays-continent présente un véritable concentré de la situation de
l’industrie des PDEM
1. Un pays où à certains égards l’emploi industriel peut sembler quasi anec-
dotique si on s’en tient à la lecture brute des statistiques (autour de 10 % de
la population selon les contours donnés à la catégorie statistique). GM qui
a dû déposer son bilan en juin 2009 avant d’être sauvé par le gouvernement
ÉCONOMIE, SOCIOLOGIE ET HISTOIRE

fédéral (reprise de USD 27 MDS de dette) ne compte plus que 180 000 sala-


riés, contre 244 000 en 2008 et près d’un million en 1978 ! Des régions
entières (Appalaches, Vieux Sud, villes mono-industrielles de la Côte Est
ou des Grands lacs (e.g. Gary (Indiana) ancienne ville sidérurgique déchue
en bordure du lac Michigan)) ont beaucoup souffert du déménagement
productif ou même de la faillite des entreprises industrielles. Plus que n’im-
porte quel pays développés, RU compris, les EU sont allés vers un vaste
secteur tertiaire aujourd’hui à la fois protéiforme (grande distribution,
banques, logistique, enseignement supérieur, loisirs, médias…) et hégé-
monique dont Amazon est désormais le vaisseau amiral.
2. C’est sans doute un effet d’optique. Les Américains ont d’abord exter-
nalisé précocement toutes les fonctions péri-productives du sein de leurs
firmes industrielles faisant proliférer les entreprises tertiaires (de transport
ou de comptabilité…) et ils ont simultanément pris l’initiative des délocalisa-
tions d’abord dans l’arrière-cour de l’Oncle Sam (Porto-Rico, Mexique) puis,
outre-Pacifique en Asie (Philippines, Corée du Sud, Chine à présent dont la
chaîne de supermarchés Walmart (n° 1 mondial de la grande distribution) – si
elle était un pays serait le 9e  client mondial ! S’il n’y a presque plus – mais
c’est à voir ! – d’« industries » aux EU, il y a – ô combien ! – une indus-
trie américaine (Boeing, Mars, Pfizer, Caterpillar, Ralph Lauren, General
É conomique

Electric… et l’essentiel des blue chips !) dont la base manufacturière est en


partie déterritorialisée. Et cette industrie américaine se réinstalle à présent
aux EU montrant que le processus de désindustrialisation – dans les limites
définies ci-avant – est réversible : en premier lieu, la baisse spectaculaire
du coût de l’énergie depuis 10 ans que les hydrocarbures de schiste sont
systématiquement exploités (le gaz est 4 fois moins cher au E.-U. qu’en
Asie !) favorise par exemple les secteurs gros consommateurs d’énergie

246 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 246 24/10/2018 14:48


comme le caoutchouc ou la chimie mais aussi l’automobile : Toyota a ainsi
annoncé une montée en puissance de ses usines du Kentucky et de l’In-
ESCP
diana, où sont assemblées des berlines Camry et des camionnettes Sienna,
Europe
destinées à être réexportées vers la Corée du Sud. Honda et Nissan font
fabriquer aux États-Unis des véhicules qui seront exportés vers l’Asie ! En
second lieu, le tissu économique connaît depuis le début du xxie s. aux
États-Unis une régénération schumpétérienne sans équivalent ailleurs

C ORRIGÉ
dans le monde ; les entreprises industrielles high-tech sont dépendantes
d’environnement technologique unique dont elles peuvent difficilement se
passer. Tesla a ainsi choisi le Nevada pour construire en association avec
son partenaire Panasonic la plus grande usine de batteries électriques au
monde.
3. En réalité les États-Unis face à la menace de siphonage des marchés
(perte des débouchés) comme du tissu productif (perte des emplois bien
payés pourvoyeurs de job tertiaires indirects) venue des émergents mettent
en œuvre toute une panoplie de réponses qui ne se limitent pas à la seule
surenchère technologique, au dumping monétaire ou, depuis l’ère Trump,
au réarmement douanier : importance de « l’économie des fonctionna-
lités » qui consiste à tertiariser l’industrie en vendant non plus un produit
physique (un réacteur d’avion) mais des heures d’utilisation, de réparation,
de mise à niveau (retrofit) de ce produit (cf. la révolution entamée chez GE
ou chez Xerox dès les années 1990) ; importance plus grande encore de
« l’économie de l’immatériel » (Daniel Cohen) qui consiste à produire à un
coût quasi marginal : Microsoft ou Pfizer n’ont quasiment pas de coût de

ÉCONOMIE, SOCIOLOGIE ET HISTOIRE


fabrication pour chaque fichier d’un même logiciel téléchargé ou chaque
boîte de médicament commercialisé ; seule la « première unité », le prototype
supporte les frais de recherche et de marketing.

La désindustrialisation est un processus incontestable dans les pays avancés


mais pas pour autant inéluctable. Non pas que la société industrielle des
années 1960 puisse fleurir à nouveau autour du Rhin ou de l’Hudson River,
mais l’industrie se réinvente et essaime ses usines dans le monde en déve-
loppement ce qui a amorcé de manière vertueuse le processus d’émergence
en distribuant revenus et savoir-faire aux nouveaux actifs du Sud. L’idée
même d’une désindustrialisation suppose a contrario que l’industrie ou l’in-
dustrialisation conserve ne varietur ses mêmes contours et fonctions. Or le
processus de transformation de la matière en objets a profondément muté et
continuera à le faire jusqu’à ce qu’apparaissent demain des usines portables
ou à domicile grâce à la démocratisation de l’impression 3 D. On ne peut
nier pourtant que certaines sociétés, certains territoires au sein du monde
industriel conservent une affinité plus grande avec les processus d’ingéniérie
technologique : l’Alsace plus que la Provence, la Slovénie plus que Chypre,
la Suède plus que le Portugal… Derrière les dynamiques de désindustriali-
sation/réindustrialisation des PDEM, il y a un socle anthropologique.
É conomique

Dans son dernier essai (2018), Il faut dire que les temps ont changé…
l’économiste Daniel Cohen analyse l’avènement de la société digitale
après la société agraire et la société industrielle. La désindustrialisation
que connaissent les pays avancés (et peut-être demain l’ensemble de la
planète) est aussi le deuil d’une forme de cohésion sociale – au prix d’une
forte discipline collective – comme de la croissance économique que l’éco-
nomie des services, où l’homme s’occupe de l’homme, n’est pas susceptible

ANNALES CCIR 2018-2019 l 247

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 247 24/10/2018 14:48


de fournir faute de gains de productivité possibles. Seule la numérisation de
l’humain – de son identité, de ses goûts, de ses passions… – est susceptible,
ESCP
au prix de notre intimité voire de notre liberté, de réenclencher la dynamique
Europe
vertueuse des rendements d’échelle croissants.
C ORRIGÉ

S
ÉCONOMIE, SOCIOLOGIE ET HISTOIRE
É conomique

248 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 248 24/10/2018 14:48


S UJET
MATHÉMATIQUES
Durée : 4 heures.

La présentation, la lisibilité, l’orthographe, la qualité de la rédaction,


la clarté et la précision des raisonnements entreront pour une part EMLYON
importante dans l’appréciation des copies.
Les candidats sont invités à encadrer dans la mesure du possible les
résultats de leurs calculs.
Ils ne doivent faire usage d’aucun document : l’utilisation de toute
calculatrice et de tout matériel électronique est interdite. Seule l’uti-
lisation d’une règle graduée est autorisée.
Si au cours de l’épreuve, un candidat repère ce qui lui semble être
une erreur d’énoncé, il la signalera sur sa copie et poursuivra sa
composition en expliquant les raisons des initiatives qu’il sera amené
à prendre.

S UJET

MATHÉMATIQUES
É conomique

ANNALES CCIR 2018-2019 l 249

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S UJET

EMLYON

Tournez la page S.V.P.


MATHÉMATIQUES
É conomique

250 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 250 24/10/2018 14:48


S UJET
EMLYON

MATHÉMATIQUES
É conomique

Tournez la page S.V.P.

ANNALES CCIR 2018-2019 l 251

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 251 24/10/2018 14:48


S UJET

EMLYON
MATHÉMATIQUES
É conomique

252 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 252 24/10/2018 14:48


S UJET
EMLYON

MATHÉMATIQUES
É conomique

ANNALES CCIR 2018-2019 l 253

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 253 24/10/2018 14:48


EMLYON C ORRIGÉ
Première épreuve de mathématiques, voie économique, de l’EML 2018.
Par Bénédicte Bourgeois, professeure agrégée de mathématiques au lycée
CorrigéNotre-Dame
par Bénédicte Bourgeois, agrégée de mathématiques
du GrandChamp, ; correctrice aux concours BCE.
à Versailles.

EXERCICE 1
C ORRIGÉ

1. (a) On sait que v = f (e1 ) + e1 .


Par lecture de la première colonne de la matrice A, f (e1 ) = −2e2 + e3 .
Par suite,
(
v = e1 − 2e2 + e3 .

(b) Montrons tout d’abord que la famille C = (u, v, e1 ) est une famille libre de R3 :
On considère trois réels a, b, c tels que au + bv + ce1 = 0

 a+b+c = 0
au + bv + ce1 = 0 ⇔ −a − 2b = 0

b = 0
On a alors de manière immédiate :

au + bv + ce1 = 0 ⇔ a = b = c = 0

La famille C est une famille libre de R3 ; de plus, elle est composée de 3 vecteurs et R3 est de
dimension 3.
C est une base de R3 .

(c) Soit P la matrice de passage de la base B à la base C :


La matrice P a pour colonnes les coordonnées des vecteurs de la base C exprimées dans la base
B:
 
1 1 1
P = −1 −2 0.
0 1 0

Plusieurs méthodes sont possibles pour déterminer la matrice P −1 ; on peut utiliser la méthode
de Gauss mais aussi le fait que cette matrice est la matrice de passage de la base C à la base B. (
Il suffit alors d’exprimer les vecteurs de la base B en fonction de ceux de la base C pour pouvoir
l’écrire.
Comme u = e1 − e2 , alors e2 = e1 − u. (
En reportant dans l’expression de v trouvée en première question puis en réduisant, il vient :
e3 = −2u + v + e1 .
On peut alors écrire : 3. (
 
0 −1 −2
−1 
P = 0 0 1 .
1 1 1
MATHÉMATIQUES

2. (a) On dispose de deux méthodes pour déterminer la matrice de f dans la base C ; l’une utilise la
formule de changement de base pour la matrice d’un endomorphisme mais cette formule étant
demandée en question 2-d, il n’est pas judicieux d’y avoir recours ici. Nous utiliserons donc une
méthode directe : on détermine les images par f des vecteurs de la base C :
É conomique

f (u) = f (e1 − e2 ) = f (e1 ) − f (e2 )

254 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 254 24/10/2018 14:48


f (u) = 2e1 − 2e2 = 2u
En procédant de même, on trouve :
EMLYON
f (v) = f (e1 − 2e2 + e3 ) = −v

f (e1 ) = −2e2 + e3 = v − e1
On peut alors écrire la matrice de f dans la base C :

C ORRIGÉ
 
2 0 0
A = 0 −1 1 .
0 0 −1

(b) La matrice A étant triangulaire, ses valeurs propres, qui sont aussi celles de l’endomorphisme f ,
sont ses coefficients diagonaux.

Sp(f )={−1; 2}.

Pour savoir si l’endomorphisme f est diagonalisable, il nous faut déterminer ses sous-espaces
propres.
 
E2 (f ) = w ∈ R3 /f (w) = 2w
En posant w = (x, y, z) dans la base C, on a :

f (w) = 2w ⇔ y = z = 0

E2 (f ) = {(x, 0, 0), x ∈ R} = Vect(u)


On procède de même pour déterminer le sous-espace propre associé à la valeur propre −1 :
 
E−1 (f ) = w ∈ R3 /f (w) = −w

E−1 (f ) = {(0, y, 0), y ∈ R} = Vect(v)


Ces deux sous-espaces sont de dimension 1 ; par suite :

dim E−1 (f ) + dim E2 (f ) = 2 = dim R3

L’endomorphisme f n’est pas diagonalisable.

(c) Puisque, d’après la question précédente, 0 n’est pas valeur propre de f , alors
L’endomorphisme f est bijectif.

(d) Il s’agit d’une formule du cours :


A = P A P −1 .

3. (a) On détermine la matrice de l’endomorphisme g dans la base B en calculant les images des vecteurs
e1 , e2 , e3 par g :

g(e1 ) = (1, 0, −1); g(e2 ) = (1, 2, 1); g(e3 = (−1, 0, 1)


On peut donc écrire :
MATHÉMATIQUES

 
1 1 −1
B=  0 2 0 .
−1 1 1
É conomique

ANNALES CCIR 2018-2019 l 255

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 255 24/10/2018 14:48


(b) On montre par un simple produit matriciel que B 2 = 2B ; cette question n’est là que d’une part (b) O
EMLYON pour une autovérification et d’autre part pour servir de base à la question suivante. l
(c) D’après la question 3-b, le polynôme P = X 2 − 2X est un polynôme annulateur de la matrice B.
Les valeurs propres possibles de B - et donc  de g - sont les racines de ce polynôme soit 0 et 2.
 x+y−z = 0
3
• Soit (x, y, z) ∈ R , g(x, y, z) = (0, 0, 0) ⇔ 2y = 0

−x + y + z = 0 (c) O
C ORRIGÉ

Ce système admet une infinité de solutions donc 0 est bien valeur propre de g.

E0 (g) = {(x, 0, x), x ∈ R} = Vect(e1 + e3 )


Le vecteur e1 + e3 est non nul donc la famille (e1 + e3 ) est libre ; elle engendre E0 (g) donc elle en
constitue une base.
 X
 x + y − z = 2x
• g(x, y, z) = 2(x, y, z) ⇔ 2y = 2y c

−x + y + z = 2z
Ce système admet une infinité de solutions donc 2 est bien valeur propre de g.
 
E2 (g) = (x, y, −x + y), (x, y) ∈ R2 = Vect(e1 − e3 ; e2 + e3 )
Les deux vecteurs de la famille (e1 − e3 ; e2 + e3 ) ne sont pas colinéaires donc cette famille est libre ;
elle engendre E2 (g) donc c’est une base de E2 (g).
O
(d) La question 3-c nous fournit les dimensions des sous-espaces propres de g :

dim E0 (g) + dim E2 (g) = 1 + 2 = dim R3


(d) P
L’endomorphisme g vérifie la condition nécessaire et suffisante de diagonalisation. d
g est diagonalisable. O
Y
4. (a) Montrons que E est un sous-espace vectoriel de M3 (R) : n
• Par définition, E est inclus dans M3 (R). C
• La matrice nulle appartient clairement à E donc E est non vide.
• ∀(M, N ) ∈ E 2 , ∀k ∈ R, B(kM + N ) = kBM + BN = kM A + N A.
∀(M, N ) ∈ E 2 , ∀k ∈ R, B(kM + N ) = (kM + N )A
E est donc stable par combinaison linéaire.
Ainsi, E est un sous-espace vectoriel de M3 (R).
S
E est un espace vectoriel.
O
(b) Soit M une matrice de E. Supposons que M est inversible. On a alors :
B = M AM −1
Or on sait que la matrice A est inversible puisque f est bijectif (question 2-c) ; donc, par produit,
M AM −1 est inversible. Donc B serait aussi inversible ; ceci est impossible car 0 est valeur propre
de g donc de B. On aboutit donc à une contradiction. L
n
La matrice M n’est pas inversible. s
MATHÉMATIQUES

5. (a) Cette question ne demande aucun calcul ; elle repose entièrement sur une propriété du cours : Une
matrice et sa transposée ont le même rang.
 
rg t (A − λI) = rg(t A − λt I) = rg(t A − λI)
É conomique

256 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 256 24/10/2018 14:48


(b) On déduit de la question précédente qu’une matrice et sa transposée ont les mêmes valeurs propres ;
les valeurs propres de t A sont donc −1 et 2.
EMLYON
Les matrices B et t A ont une valeur propre commune : 2 .

   
x a
(c) On pose X = y  et Y =  b . On peut alors calculer N :

C ORRIGÉ
z c
 
ax bx cx
N = X Y = ay by cy 
t

az bz cz

X et Y sont des vecteurs propres donc ils ont chacun au moins un coefficient non nul. Par
conséquent, au moins un des coefficients de la matrice N est non nul.
La matrice N est non nulle.

BN = B(X t Y ) = (BX)t Y = (2X)t Y = 2N


N A = (X t Y )A = X t (t AY ) = 2X t Y = 2N
On peut donc conclure :
BN = N A donc N appartient à E .

(d) Pour montrer que dim(E) ≥ 2, il suffit de trouver une famille libre de E comportant au moins
deux vecteurs.
On a montré à la question 5-c que si X est un vecteur propre de B associé à la valeur propre 2, si
Y est un vecteur propre de t A associé à la valeur propre 2, alors N = X t Y est une matrice non
nulle de E.
Considérons une base (X1 , X2 ) de E2 (B) déduite de la question 3-c. On pose :
   
1 0
X1 = 1 X2 = 1
0 1
 
a
Soit Y =  b  un vecteur propre de t A associé à la valeur propre 2.
c
On peut alors calculer les matrices :
   
a b c 0 0 0
N1 = X1 Y = a
t
b c N2 = X2t Y = a b c

0 0 0 a b c

Les matrices N1 et N2 sont deux matrices non nulles de E d’après la question précédente et elles
ne sont pas colinéaires. La famille (N1 , N2 ) est une famille libre de E contenant 2 vecteurs. Par
suite,
MATHÉMATIQUES

dim E ≥ 2.
É conomique

ANNALES CCIR 2018-2019 l 257

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 257 24/10/2018 14:48


Première épreuve de mathématiques, voie économique, de l’EML 2018.
Corrigé par Bénédicte Bourgeois, agrégée de mathématiques ; correctrice aux concours BCE..

EXERCICE 2 O
EMLYON dé
Pa
M
Partie I : Etude de la fonction f . La
C ORRIGÉ

1. La fonction f est dérivable sur R+∗ .


5. Et
x−1
∀x > 0 f  (x) =
x
f est donc strictement décroissante sur ]0; 1] et strictement croissante sur [1; +∞[. O
Par opérations sur les limites, lim f (x) = +∞. Pa
 x→0 
ln x
Comme ∀x > 0, f (x) = x 1 − , on a, par croissance comparée, lim f (x) = +∞.
x x→+∞
On peut alors dresser le tableau de variation de la fonction f : O

0 La
x  1 +∞
signe f  (x)  − 0 + En
+∞ +∞ ]0
f (x)  
1 C
et
2. La fonction f est continue et strictement décroissante sur ]0; 1[ ; elle réalise une bijection de ]0; 1[ sur
f (]0; 1[) =]1; +∞[. Puisque 2 ∈]1; +∞[, alors l’équation f (x) = 2 admet une unique solution dans
l’intervalle ]0; 1[. 6. a.
La fonction f est continue et strictement croissante sur ]1; +∞[ ; elle réalise une bijection de ]1; +∞[
sur f (]1; +∞[) =]1; +∞[. Puisque 2 ∈]1; +∞[, alors l’équation f (x) = 2 admet une unique solution
dans l’intervalle ]1; +∞[.

On a de plus, f (1) = 1 donc 1 n’est pas solution de l’équation f (x) = 2. On peut conclure :

L’équation f (x) = 2 admet exactement deux solutions a et b telles que 0 < a < 1 < b.

3. On calcule :
f (2) = 2 − ln 2 donc f (2) ≤ 2
f (4) = 4 − 2 ln 2 = 2(2 − ln 2) donc f (4) ≥ 2
Par suite, on a f (2) ≤ f (b) ≤ f (4) et puisque la fonctionf est croissante sur ]1; +∞[,

2 ≤ b ≤ 4. b.

Partie II : Etude d’une suite.

4. On démontre le résultat demandé par récurrence.


On note, pour tout entier naturel n, Pn la propriété :« un existe et un ≥ b ».
Pour n = 0, comme u0 = 4, la propriété est vérifiée de manière immédiate au rang 0.
MATHÉMATIQUES

1
É conomique

258 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 258 24/10/2018 14:48


On suppose que pour un entier naturel n, un existe et un ≥ b. Comme 2 ≤ b ≤ 4 et la fonction ln est
définie sur ]0; +∞[, ln un + 2 existe donc un+1 existe.
Par croissance de la fonction ln sur ]0; +∞[, un+1 ≥ 2 + ln b. EMLYON
Mais b vérifie f (b) = b − ln b = 2. Il en résulte que b = 2 + ln b et, par suite, un+1 ≥ b.
La propriété est donc établie au rang n + 1 ; on a ainsi prouvé par un raisonnement par récurrence que :
Pour tout entier naturel n, un existe et un ≥ b.

C ORRIGÉ
5. Etudions les variations de la suite (un ) :
∀n ∈ N un+1 − un = ln un + 2 − un = 2 − f (un )
Or d’après ce qui précéde, un ≥ b et d’après les variations de f , on a f (un ) ≥ f (b) soit f (un ) ≥ 2.
Par suite,
∀n ∈ N un+1 − un ≤ 0
La suite (un ) est décroissante.
On aurait aussi pu démontrer ce résultat par un raisonnement par récurrence.

La suite (un ) est décroissante et minorée par b donc elle converge vers un réel L tel que L ≥ b ≥ 2.
En prenant la limite des deux membres dans un+1 = ln un + 2, par continuité de la fonction ln sur
]0; +∞[ et unicité de la limite, il vient :
L = ln L + 2
Cette égalité est équivalente à f (L) = 2, équation qui, d’après la question I-2 admet deux solutions a
et b. Comme on a L ≥ b > a, on en déduit que L = b.
La suite (un ) converge vers b.

6. a. Soit n un entier naturel. On définit la fonction g par


∀x ∈ [b; un ] g(x) = 2 + ln x
La fonction g est continue sur [b; un ] et dérivable sur [b; un ] .
1 1
∀x ∈ [b; un ] g  (x) =g  (x) ≤
x 2
On peut donc appliquer l’inégalité des accroissements finis :
1
∀n ∈ N g(un ) − g(b) ≤ (un − b)
2
Ce qui peut aussi s’écrire :
1
∀n ∈ N un+1 − b ≤ (un − b).
2

b. On procède par récurrence.


1
On note, pour tout entier naturel n, Qn la propriété :« 0 ≤ un − b ≤ n−1 ».
2
• Initialisation :
Pour n = 0, u0 − b = 4 − b et comme 2 ≤ b ≤ 4, on a bien 0 ≤ u0 − b ≤ 2 ce qui établit Q0 .
• Hérédité :
1 1
Soit n ∈ N tel que 0 ≤ un − b ≤ n−1 , alors en multipliant par , on a :
2 2
1 1
0 ≤ (un − b) ≤ n
2 2
MATHÉMATIQUES

Il suffit alors d’utiliser la question précédente pour obtenir :


1 1
0 ≤ (un+1 − b) ≤ n
2 2
ce qui établit Qn+1 .
É conomique

On a donc prouvé par un raisonnement par récurrence que :

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Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 259 24/10/2018 14:48


1
∀n ∈ N, 0 ≤ un − b ≤ .
EMLYON 2n−1
b

7. a. Function u = suite (n)


u=4
for k = 1 : n
C ORRIGÉ

u = log (u) +2
end
endfunction
b. On complète la ligne 3 de la fonction Scilab proposée :
while 1/2 ∧ (n-1) > epsilon
Partie III : Etude d’une fonction définie par une intégrale.

8. D’après l’étude faite en partie I, la fonction f est minorée par 1 sur ]0; +∞[ donc elle ne s’annule pas
sur cet intervalle. 12. L
1 D
La fonction t → est donc continue sur ]0; +∞[ et elle admet des primitives sur cet intervalle ; soit
f (t) l
F une primitive de cette fonction sur ]0; +∞[.
V
La fontion φ est alors bien définie sur ]0; +∞[ et

∀x > 0 φ(x) = F (2x) − F (x)

En tant que primitive de f sur ]0; +∞[, F est dérivable sur ]0; +∞[ donc φ est aussi dérivable sur
13. a
]0; +∞[.
2 1
∀x > 0 φ (x) = 2F  (2x) − F  (x) = −
f (2x) f (x)
On remplace f (x) par sa valeur et on calcule :

−2 ln x + ln 2x ln 2 − ln x
∀x > 0, φ (x) = = .
(x − ln x)(2x − ln 2x) (x − ln x)(2x − ln 2x)
b


9. On étudie le signe du dénominateur de φ (x) :

∀x > 0 f (x)f (2x) > 0



Par suite φ (x) est du signe de son numérateur ln 2 − ln x.
La fonction φ est croissante sur ]0; 2] et décroissante sur [2, +∞[.

10. D’après l’étude de la fonction f faite dans la partie I :


1 O
∀t > 0 f (t) ≥ 1 donc 0 ≤ ≤1
f (t)

On intègre entre x et 2x, avec x > 0, et on obtient :


 2x  2x
1
0≤ ≤ dt
x f (t) x 14. a
Et après transformation :
MATHÉMATIQUES

∀x > 0, 0 ≤ φ(x) ≤ x.

11. a. Si on fait tendre x vers 0 par valeurs supérieures dans l’inégalité de la question 10, on obtient, par
limite par encadrement, lim φ(x) = 0.
x→0
On peut alors conclure :
É conomique

260 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 260 24/10/2018 14:48


La fonction φ est prolongeable par continuité en 0 en posant φ(0) = 0.

b. On a déterminé l’expression de φ (x) à la question 8. EMLYON


En utilisant les négligeabilités usuelles en 0 :

ln 2 = o(ln x) x = o(ln x) 2x = o(ln 2x)


0 0 0

Il vient :

C ORRIGÉ
− ln x
φ (x) ∼
0 (ln x)(ln 2x)
Soit après simplification :
−1
φ (x) ∼
0 ln 2x
On peut conclure :
lim φ (x) = 0.
x→0

12. La fonction φ admet un maximum en 2.


D’après la question précédente, sa courbe représentative admet une tangente horizontale à l’origine et
la droite d’équation y = ln 2 est asymptote horizontale au voisinage de +∞.
Voir courbe en annexe.

Partie IV : Etude d’une fonction de deux variables .

13. a. La fonction H est de classe C 2 sur U =]0; +∞[×R donc elle admet des dérivées partielles d’ordre 1
par rapport à x et à y sur U :
∀(x, y) ∈ U, ∂1 (H)(x, y) = x − y − 2; ∂2 (H)(x, y) = −x + ey .
Remarque : :
Le sujet comporte une erreur ; en raison de la question 13-b, l’ouvert U a dû être modifié. Cependant,
cette coquille ne semble avoir pénalisé aucun candidat.
b. La fonction H admet des points critiques en tout (x, y) de U tel que les deux dérivées partielles
d’ordre 1 s’annulent simultanément.
 
∂1 (H)(x, y) = 0 x−y−2=0

∂2 (H)(x, y) = 0 −x + ey = 0
Le système s’écrit aussi
 
∂1 (H)(x, y) = 0 x − ln x = 2

∂2 (H)(x, y) = 0 y = ln x

Or d’après la question I-2, l’équation f (x) = 2 admet deux solutions a et b.

La fonction H admet deux points critiques en (a; ln a) et (b; ln b).


On notera que ces deux points critiques sont dans l’ouvert U tel que nous l’avons défini.

14. a. La fonction H est de classe C 2 sur U donc elle admet des dérivées partielles d’ordre 2 .
MATHÉMATIQUES

2 2
∀(x, y) ∈ U, ∂1,1 (H)(x, y) = 1; ∂2,2 (H)(x, y) = ey
La fonction H étant de classe C 2 sur U , on peut appliquer le théorème de Schwarz.
2 2
∀(x, y) ∈ U, ∂1,2 (H)(x, y) = ∂2,1 (H)(x, y) = −1
É conomique

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Prem
Co

En (a, ln a), la matrise hessienne de H est :


EMLYON 
1 −1

∇2 H(a, ln a) =
−1 a

b. Soit λ un réel ; λ est valeur propre de la matrice Ma si et seulement si : 1.


C ORRIGÉ

λ2 − (a + 1)λ + a − 1 = 0

Le discriminant de l’équation est ∆ = (a + 1)2 − 4(a − 1) = a2 − 2a + 5 = (a − 1)2 + 4. Comme ce


discriminant est strictement positif, l’équation admet deux racines réelles distinctes donc la matrice
Ma admet deux valeurs propres distinctes.
En utilisant les formules de cours donnant la valeur de la somme et du produit des racines d’une
équation du second degré, il vient :
S = a + 1 ; P = a − 1.

c. On sait d’après la partie I que 0 < a < 1 donc le produit des racines est négatif ; les deux valeurs
propres sont de signes contraires. On peut alors conclure :
La fonction H ne présente pas d’extremum local en (a; ln a).

15. On effectue le même raisonnement pour étudier un éventuel extremum de H en (b; ln b) :


En (b, ln b), la matrise hessienne de H est :
 
1 −1
∇2 H(b, ln b) =
−1 b

Soit λ un réel ; λ est valeur propre de la matrice Mb si et seulement si :

λ2 − (b + 1)λ + b − 1 = 0

Le discriminant de l’équation est ∆ = (b + 1)2 − 4(b − 1) = b2 − 2b + 5 = (b − 1)2 + 4. Comme ce


discriminant est strictement positif, l’équation admet deux racines réelles distinctes donc la matrice
Mb admet deux valeurs propres distinctes.
En utilisant les formules de cours donnant la valeur de la somme et du produit des racines d’une
équation du second degré, il vient :
S = b + 1 ; P = b − 1.

On sait d’après la partie I que b > 1 donc le produit des racines est strictement positif ; les deux valeurs
propres sont de même signe et comme la somme est aussi strictement positive, les deux valeurs propres
sont aussi strictement positives . On peut alors conclure :

La fonction H présente un minimum local en (b; ln b).


MATHÉMATIQUES
É conomique

262 l ANNALES CCIR 2018-2019

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Première épreuve de mathématiques, voie économique, de l’EM LYON 2018
Corrigé par Bénédicte Bourgeois, agrégée de mathématiques ; correctrice aux concours BCE.

EXERCICE 3

EMLYON
Partie I : Etude d’une première variable aléatoire.

1. (a) On note pour tout entier k non nul, Pk (respectivement Fk ), l’événement « On obtient Pile (res-
pectivement Face) au k-ième lancer ».

C ORRIGÉ
On a alors :
[X = 0] = P1 ∩ P2 [X = 1] = (P1 ∩ F2 ∩ P3 ) ∪ (F1 ∩ P2 ∩ P3 )
[X = 2] = (P1 ∩ F2 ∩ F3 ∩ P4 ) ∪ (F1 ∩ P2 ∩ F3 ∩ P4 ) ∪ (F1 ∩ F2 ∩ P3 ∩ P4 )
On calcule la probabilité de ces événements :

P ([X = 0]) = P (P1 ∩ P2 )

Par indépendance des événements P1 et P2 :


4
P (P1 ∩ P2 ) = P (P1 ) × P (P2 ) =
9
On a de même :
P ([X = 1]) = P [(P1 ∩ F2 ∩ P3 ) ∪ (F1 ∩ P2 ∩ P3 )]
Par incompatibilité des événements :

P ([X = 1]) = P (P1 ∩ F2 ∩ P3 ) + P (F1 ∩ P2 ∩ P3 )

Par indépendance :
8
P ([X = 1]) = P (P1 )P (F2 )P (P3 ) + P (F1 )P (P2 )P (P3 ) =
27
En raisonnant de même, on trouve enfin :
4
P ([X = 2]) =
27

(b) On généralise la démarche mise en oeuvre dans les questions précédentes :

[X = n] = (P1 ∩F2 ∩...∩Fn+1 ∩Pn+2 )∪(F1 ∩P2 ∩F3 ∩...∩Fn+1 ∩Pn+2 )∪...∪(F1 ∩F2 ∩Fn ∩...∩Pn+1 ∩Pn+2 )

Les événements étant deux à deux incompatibles :

P ([X = n]) = P (P1 ∩F2 ∩...∩Fn+1 ∩Pn+2 )+P (F1 ∩P2 ∩F3 ∩...∩Fn+1 ∩Pn+2 )+P (F1 ∩F2 ∩Fn ∩...∩Pn+1 ∩Pn+2 )

Tous ces événements ayant la même probabilité :

∀n ∈ N P ([X = n]) = (n + 1)P (P1 ∩ F2 ∩ ... ∩ Fn+1 ∩ Pn+2 )

Et enfin par indépendance :


 2  n
2 1
∀n ∈ N P ([X = n]) = (n + 1)
3 3
D’où finalement après simplification :

1
MATHÉMATIQUES
É conomique

ANNALES CCIR 2018-2019 l 263

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4
∀n ∈ N, P ([X = n]) = (n + 1) .
EMLYON 3n+2

Partie II : Etude d’une expérience en deux étapes.

2. (a) La variable aléatoire U prend la valeur du numéro de la boule obtenue. Elle prend donc ses valeurs
dans N.
C ORRIGÉ

(b) Si l’événement [X = n] est réalisé, on a donc obtenu n Face ; on place alors dans l’urne des boules
numérotées de 0 à n et on pioche au hasard une boule dans l’urne.
Pour tout entier naturel n, la loi conditionnelle de U sachant [X = n] est la loi uniforme sur [[0; n]].
On a donc
1
∀n ∈ N, ∀k ∈ N, 0 ≤ k ≤ n P[X=n] ([U = k]) =
n+1
∀n ∈ N, ∀k ∈ N, k > n P[X=n] ([U = k]) = 0

(c) On applique la formule des probabilités totales avec le système complet d’événements {[X = n], n ∈ N} :
+∞

∀k ∈ N P ([U = k]) = P[X=n] ([U = k])P ([X = n])
n=0

En utilisant le résultat obtenu à la question précédente :


+∞
 1 3. (
P ([U = k]) = P ([X = n])
n+1
n=k

(b
On remplace P ([X = n]) par sa valeur trouvée en question 1-b :
+∞
 1 4
∀k ∈ N P ([U = k]) = (n + 1) n+2
n+1 3
n=k

+∞
 4
∀k ∈ N P ([U = k]) =
3n+2
n=k (
4 3
∀k ∈ N P ([U = k]) = ×
3k+2 2
2
∀k ∈ N, P ([U = k]) = .
3k+1


(d) La variable U admet une espérance si et seulement si la série kP ([U = k]) converge absolu- 4. On
k∈N
ment ; comme c’est une série à termes positifs, la variable U admet une espérance si et seulement
si la série kP ([U = k]) converge. ∀(
k∈N
N
 N
  k−1
2 1
∀N ≥ 0 kP ([U = k]) = k
9 3
k=0 k=0
 
1
Cette série est convergente d’après le cours sur les séries usuelles puisque   < 1.
MATHÉMATIQUES

3
Pa
+∞
 2 9
kP ([U = k]) = ×
9 4
k=0
É conomique

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1
La variable U admet une espérance et E(U ) = .
2
EMLYON
La variable U admet une variance
 si et seulement si elle admet un moment d’ordre 2, c’est-à-dire
si et seulement si la série k 2 P ([U = k]) converge.
k∈N

N
 N


C ORRIGÉ
∀N ≥ 0 k 2 P ([U = k]) = [k(k − 1) + k]P ([U = k])
k=0 k=0

N
 N  k−2 N
2  1
∀N ≥ 0 k 2 P ([U = k]) = k(k − 1) + kP ([U = k])
27 3
k=0 k=0 k=0
On reconnait de nouveau une série de référence convergente :
+∞
 2 27
k 2 P ([U = k]) = × + E(U )
27 4
k=0

Ainsi U admet un moment d’ordre 2 et E(U 2 ) = 1.


La variable U admet une variance et d’après la formule de Koenig-Huygens :
3
V (U ) = E(U 2 ) − (E(U ))2 = .
4

3. (a) Par définition, U est toujours inférieure ou égale à X donc la variable V = X − U prend ses
valeurs dans N.

(b) On a :
∀n ∈ N, ∀k ∈ N P[X=n] ([V = k)] = P[X=n] ([U = n − k])
On peut donc conclure :

Pour tout entier naturel n, la loi conditionnelle de V sachant [X = n] est la loi uniforme sur [[0; n]].

(c) Puisqu’on vient de montrer que pour tout entier naturel n, les lois conditionnelles de U et de V
sachant [X = n] sont les mêmes, alors les variables U et V suivent la même loi.
Ainsi,
2
Pour tout entier naturel k, P ([V = k]) = .
3k+1

4. On compare, pour tous entiers naturels k et i, P ([U = k]) × P ([V = i]) et P ([U = k] ∩ [V = i])) :

∀(k, i) ∈ N2 P ([U = k] ∩ [V = i])) = P ([U = k] ∩ [X = i + k])) = P ([X = k + i]) × P[X=k+i] ([U = k])

4 1 4
∀(k, i) ∈ N2 P ([U = k] ∩ [V = i])) = (k + i + 1) × = k+i+2
3k+i+2 k + i + 1 3

2 2 4
∀(k, i) ∈ N2 P ([U = k]) × P ([V = i]) = × = k+i+2
3k+1 3i+1 3
MATHÉMATIQUES

Par conséquent :
Les variables U et V sont indépendantes.
É conomique

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5. Comme les variables U et V sont indépendantes, alors leur covariance est nulle. (
EMLYON Cov(U,V)= 0.

Cov(X, U ) = Cov(V + U, U )) = Cov(V, U ) + Cov(U, U )


Cov(X, V ) = 0 + V (U )
8. (
C ORRIGÉ

3
Cov(U,V)= .
4

Partie III : Etude d’un jeu.

6. Simulation informatique.
(a) On écrit une fonction scilab qui simule la variable aléatoire X :
function x = simule _ X()
x=0
nb _ piles = 0
while nb _ piles < 2
if rand () < 2/3 then (
nb _ piles = nb_ piles + 1
else
x = x+1
end
end
endfunction

(b) La fonction proposée simule 10 000 parties et renvoie la proportion de parties gagnées par le joueur
A.
Comme le nombre N est grand, cette proportion nous fournit une approximation de la probabilité
que le joueur A gagne le jeu.

(c) Le jeu est équilibré si et seulement la probabilité que le joueur A gagne est égale à 0.5. Par lecture
graphique, on obtient :
p ≈ 0.8.

7. Etude de la variable alétaoire Y .


(a) La variable Z compte le nombre d’expériences (lancers de la pièce) réalisées de manière indépen-
dante les unes des autres, jusqu’à l’obtention du premier succès : obtenir pile (la pièce amène pile (
avec la probabilité p).
Z suit donc la loi géométrique de paramètre p.
1 1−p
E(Z) = ; V (Z) = .
p p2
MATHÉMATIQUES

(b) On a clairement Y = Z − 1 et par suite :


1−p 1−p
E(Y ) = E(Z) − 1 = ; V (Y ) = V (Z) = .
p p2
É conomique

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(c)
∀n ∈ N [Y ≥ n] = F1 ∩ F2 ∩ ... ∩ Fn
EMLYON
Ces événements étant deux à deux indépendants :
∀n ∈ N P ([Y ≥ n]) = (1 − p)n .

8. (a) On applique la formule des probabilités totales avec le système (quasi) complet d’événements

C ORRIGÉ
{[X = n], n ∈ N} :
+∞

P ([X ≤ Y ]) = P ([X = n] ∩ [X ≤ Y ])
n=0
+∞

P ([X ≤ Y ]) = P ([X = n] ∩ [Y ≥ n])
n=0

Les variables aléatoires X et Y étant indépendantes :


+∞

P ([X ≤ Y ]) = P ([X = n]) × P ([Y ≥ n])
n=0

(b) On utilise les résultats des questions antérieures pour remplacer dans la formule de la question
8-a :
+∞
 4
P ([X ≤ Y ]) = (n + 1) n+2 × (1 − p)n
3
n=0

En opérant le glissement d’indice k = n + 1, on obtient :


+∞
 4
P ([X ≤ Y ]) = k (1 − p)k−1
3k+1
k=1

On transforme en :  k−1
+∞
4 1−p
P ([X ≤ Y ]) = k
9 3
k=1

Puis en utilisant les formules sur les sommes des termes de séries géométriques convergentes :
4 9
P ([X ≤ Y ]) = ×
9 (2 + p)2

4
P ([X ≤ Y ]) = .
(2 + p)2

1
(c) Le jeu est équilibré si et seulement si la probabilité qu’a le joueur A de gagner est égale à . En
2
utilisant la question précédente :
1 4 1
P ([X ≤ Y ]) = ⇔ =
2 (2 + p)2 2
1
P ([X ≤ Y ]) = ⇔ (2 + p)2 = 8
2
MATHÉMATIQUES

1 √
P ([X ≤ Y ]) = ⇔ p = 8 − 2
2
É conomique

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MATHÉMATIQUES Code sujet : 298

Durée : 4 heures.

La présentation, la lisibilité, l’orthographe, la qualité de la rédaction,


EDHEC la clarté et la précision des raisonnements entreront pour une part
importante dans l’appréciation des copies.
Les candidats sont invités à encadrer dans la mesure du possible les
résultats de leurs calculs.
Ils ne doivent faire usage d’aucun document : l’utilisation de toute
calculatrice et de tout matériel électronique est interdite. Seule l’uti-
lisation d’une règle graduée est autorisée.
Si au cours de l’épreuve, un candidat repère ce qui lui semble être
une erreur d’énoncé, il la signalera sur sa copie et poursuivra sa
composition en expliquant les raisons des initiatives qu’il sera amené
à prendre.

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S UJET
EDHEC

MATHÉMATIQUES

6/6
É conomique

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CO

EDHEC
C ORRIGÉ
Par Bernard Delacampagne, professeur de mathématiques au lycée
4.a

CORRIGÉ EDHEC E
Madeleine-Michelis, à Amiens. ANNÉE 2018 M

Exercice 1
C ORRIGÉ

a b
1. Rappelons que la matrice   est inversible si et seulement si ad  bc  0 ; pour la
c d
1 2 Ai
matrice A    , on a :
3 6
ad  bc  1  6  2  3  0
Donc A n’est pas inversible.

2. En notant I la matrice identité de 2    , un réel  est valeur propre de A si et seulement



si la matrice A  I est non inversible ; on a : 
1   2  
A  I   
 3 6 0

Il vient : 0
A  I est non inversible  1    6     2  3 0  6  7   2  6 0      7  0 Ce
   0 ou  7 b.
Donc les valeurs propres de A sont 0 et 7.
Le sous-espace propre E 0  A  associé à la valeur propre 0 s’obtient en résolvant le système Il v
x
AX  0X , où X    ; on a : c. L
 y
1 2 x   0  x  2y  0
AX  0X         x  2y  0x 2y
3 6 y 0 3x  6y  0
Ainsi :
 2y     2     2  
E0  A       y   / y     Vect    
/ y
 y    1   1 
Le sous-espace propre E 7  A  associé à la valeur propre 7 s’obtient en résolvant le système
x
AX  7X , où X    ; on a :
 y
On
 1 2  x   7x   x 2y 7x 6x  2y 0
AX  7X          3x  y 0
 3 6 y
    7y 3x  6y  7y  3x  y  0
Co
y 3x
Ainsi :
E
MATHÉMATIQUES

 x    1  1
E7  A    / x     x   / x     Vect    
 3x     3   3 Im
de
3. f est une application linéaire, car on a :
     M, N    2    
2
f  M  N  A  M  N   f  M   f  N 
É conomique

AM  AN 
De plus, puisque A et M appartiennent à 2    , f  M   AM appartient à 2    .
Donc f est bien un endomorphisme de 2    .

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274 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 274 24/10/2018 14:48


CORRIGÉ EDHEC E ANNÉE 2018

x y
4.a. Posons M    et notons 0 la matrice nulle de 2    ; on a :
z t
EDHEC
1 2 x y   x  2z y  2t   0 0 
M  Ker  f   f  M   0  AM  0   0    
3 6 z t   3x  6z 3y  6t   0 0 
 x  2z  0
 y  2t 0
  x  2z 0  x 2z

C ORRIGÉ
  
 3x  6z  0  y  2t  0  y 2t
 3y  6t  0
Ainsi a-t-on :
 2z 2t     2 0   0 2  
Ker  f    /  z, t    2  z   t  /  z, t    
2

 z t     1 0  0 1  
  2 0   0 2  
 Vect   , 
 1 0 0 1 
  2 0   0 2    2 0 
 ,   est donc une famille génératrice de Ker  f  , libre car   et
 1 0 0 1   1 0
 0 2    2 0   0 2  
  ne sont pas colinéaires, donc   1 0  ,  0 1   est une base de Ker  f  .
 0 1     
Cette base ayant deux éléments, Ker  f  est bien de dimension 2.
b. Le théorème du rang s’écrit :
dim  Ker  f    dim  Im  f    dim  2    
Il vient donc, d’après la question précédente :
dim  Im  f    dim  2      dim  Ker  f   4  2  2
c. Les calculs donnent :
1 21 0 1 0
f E
 1 AE
 1      E1  3E3
3 60 0 3 0
1 2  0 1  0 1
f E
 2 AE
 2      E2  3E4
 3 6   0 0   0 3
 1 2  0 0   2 0 
f E3 AE
 3      2E1  6E3
 3 6  1 0   6 0 
1 2 0 0  0 2
f E
 4 AE
 4      2E2  6E4
3 60 1 0 6
On sait que :
Im  f   Vect  f  E1  , f  E 2  , f  E 3  , f  E 4  
Comme f  E3   2f  E1  et f  E 4   2f  E 2  , il reste :
Im  f   Vect  f  E1  , f  E 2    Vect  E1  3E 3 , E 2  3E 4 
 E1  3E3 , E 2  3E 4  est donc une famille génératrice à deux éléments de Im  f  ; puisque
MATHÉMATIQUES

Im  f  est de dimension 2 d’après la question précédente,  E1  3E 3 , E2  3E4  est une base


de Im  f  .
É conomique

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ANNALES CCIR 2018-2019 l 275

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CORRIGÉ EDHEC E ANNÉE 2018 CO

5.a. Les vecteurs de base de Im  f  sont E1  3E 3 et E 2  3E 4 d’après la question 4.c.


EDHEC
Puisque f est linéaire, il vient, compte-tenu des calculs de la question précédente :
f  E1  3E 3  f  E1   3f  E 3  E1  3E3  3  2E1  6E 3  7E1  21E3  7  E1  3E 3  Pu
Et :
f  E2  3E4  f  E 2   3f  E 4  E 2  3E 4  3  2E 2  6E 4  7E 2  21E 4  7  E 2  3E4  So
b. D’après la question 4.a, puisque Ker  f   0 , 0 est une valeur propre de f et :
C ORRIGÉ

dim  E 0  f    dim  Ker  f    2 Pu


ass
D’après la question précédente, puisque E1  3E3  0 et que f  E1  3E 3   7  E1  3E 3  , 7 est
une valeur propre de f, associée au vecteur propre E1  3E 3 ; de même, puisque E 2  3E 4  0
et f  E 2  3E 4   7  E 2  3E 4  , E 2  3E 4 est une vecteur propre associé à la valeur propre 7.
1.a
On a donc, puisque E1  3E 3 et E 2  3E 4 ne sont pas colinéaires :
A
dim  E 7  f    2
On a toujours :
Pu
dim  E 0  f    dim  E 7  f    dim  2      4
Il en résulte que :
dim  E 0  f    dim  E 7  f    4 b.
Donc les valeurs propres de f sont 0 et 7 et f est diagonalisable. d’é

6.a. X appartient à 2,1    , donc t


X appartient à 1,2    , donc le produit X t X
appartient à 2    . La
Par définition de f, on a : la
f  X t X   AX t X
des
Puisque  est une valeur propre de A et X un vecteur colonne propre associé, on a :
AX  X
Il vient donc :
f  X t X   X t X Pu
x
t
Il reste à vérifier que X X  02    ; en posant X    , on a :
 y Pu
x  x 2 xy  du
 
 X t X   x y  2 
 y  yx y 
Il e
Donc :
X t X  02     x 2  y2  0  x  y  0  X  02,1  
Puisque X est un vecteur propre de A, X  02,1    , donc X t X  02    . c. X
Donc X t X est un vecteur propre de f associé à la valeur propre  , donc  est bien une
valeur propre de f.
x y Il e
MATHÉMATIQUES

b. Posons M    ; on a :
z t 
x  y  1 2  x y  x  2z y  2t 
C1    , C2    , f  
M  AM
    ,
z
  t
   3 6  z t  3x  6z 3y  6t 
É conomique

3/18

276 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 276 24/10/2018 14:48


CORRIGÉ EDHEC E ANNÉE 2018

 1 2  x   x  2z   1 2   y   y  2t 
 AC1       , AC 2     
 3 6  z   3x  6z   3 6   t   3y  6t 
EDHEC
Puisque M une matrice de 2    vecteur propre de f associé à la valeur propre  , on a :
f  M   M
Soit encore, compte-tenu des calculs précédents :
AC1  C1 et AC2  C 2

C ORRIGÉ
Puisque M est non nulle, C1 ou C2 est non nulle, donc C1 ou C2 est un vecteur propre de A
associé à la valeur propre  , donc  est bien une valeur propre de A.

Exercice 2
1.a. D’après la formule des probabilités totales appliquée au système complet d’événements
A 0 , A1 , A 2  , il vient :
P  X 1
 P  P1  P  A 0  PA0  P1   P  A1  PA1  P1   P  A 2  PA2  P1 
Puis, puisque la pièce est choisie au hasard, et compte tenu de la nature des trois pièces :
1 1 1 1 1 1 3 1
P  X  1      0  1    
3 2 3 3 6 3 6 2
b. En utilisant encore la formule des probabilités totales appliquée au système complet
d’événements A 0 , A1 , A 2  , il vient, pour tout entier n supérieur ou égal à 2 :
PX  P  A 0  PA0  X n   P  A1  PA1  X n   P  A 2  PA2  X  n 
 n
1
La loi de X conditionnellement à A 0 est la loi géométrique de paramètre p  puisque c’est
2
la loi du temps d’attente du premier pile lors de lancers indépendants, au cours de chacun
1
desquels la probabilité d’obtenir pile est p  , donc on a :
2
n 1 n 1 n
1 1 11 1
PA0  X n p 1  p 
n 1
 1        
2 2 22 2
Puisque la pièce numérotée 1 donne "face" à coup sûr, on a :
PA1  X
 n 0
Puisque la pièce numérotée 2 donne "pile" à coup sûr, le premier pile apparait forcément lors
du premier lancer, donc on a, n étant supérieur ou égal à 2 :
PA2  X
 n 0
Il en résulte bien que, pour tout entier n supérieur ou égal à 2 :
n n
11 1 1 11
P  X 
n    0  0   
3 2 3 3 32
c. X étant une variable aléatoire prenant pour valeurs tous les entiers naturels, on a :


 P  X n
n 0
1

Il en résulte que :
MATHÉMATIQUES

 
PX  1   P  X 
0  1   P  X 
n  1 P X  n
n 1 n 2
É conomique

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ANNALES CCIR 2018-2019 l 277

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CORRIGÉ EDHEC E ANNÉE 2018 CO


n
1 1 1 con
La série   étant la série géométrique de raison , convergente puisque  1 , il
EDHEC n 0
2 2 2
vient, par linéarité de la somme d’une série convergente et d’après le résultat de la question qu
précédente : esp
  Il v
 1  1   1   1   1   1  1
  

  
n n 0 1
1 1 1 3 1
P X
 n       1    2  
C ORRIGÉ

         
3  2 3  2 2 2 3  1 1 2  3 2 6
n 2 n 2  n 0 
 2 
On obtient finalement, d’après le résultat de la question 1.a :
1 1 2 1 On
P  X  0  1    
2 6 6 3
D’
2. X admet une espérance si et seulement si la série  nP  X  n 
n0
est absolument
l’e
convergente, c’est-à-dire ici convergente puisque son terme général est positif ou nul ; on a, Ko
d’après la question 1.b, pour tout entier n supérieur ou égal à 2 :
n n 1 n 1
1 1 1 1 1 1 1
nP  X 
 n n   n    n 
3 2 3 2 2 6 2
4.


n 1
1 1 sim
La série n  étant la série géométrique dérivée de raison , convergente puisque
n 0
2 2
5.a
1
 1 , il en résulte, par linéarité de la somme d’une série convergente, que la série qu
2
l’é
 nP  X  n  est convergente, et donc que X admet une espérance.
n0
Il vient alors : Il e
  

  
n 1
1 1 1
E  X  nP  X 
n 
P X 
1  nP  X 
n  n 
2 6 2 Ai
n 0 n 2 n 2

 
1 1

 1 1 
 1
n 1
1
11
1 1 1 b.
   n   1      1    4  1  1
2 6 2 2  2 6 1 2
 2 6 qu
 n 1   1    l’é
 2 

3. D’après le théorème de transfert, X  X  1 admet une espérance si et seulement si la série Il e


 n  n  1 P  X 
n  est absolument convergente, c’est-à-dire ici convergente puisque son
n 0
Ai
terme général est positif ou nul ; on a, d’après la question 1.b, pour tout entier n supérieur ou
égal à 2 :
n n2 2 n 2
1 1 1 1 1 1 1
n  n  1 P  X n   n  n  1    n  n  1      n  n  1   6.a
3 2 3  2   2  12 2 ent
MATHÉMATIQUES

 n  n 1  12 


n 2
1 On
La série étant la série géométrique dérivée seconde de raison ,
2
n 0
L’é
É conomique

5/18

278 l ANNALES CCIR 2018-2019

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CORRIGÉ EDHEC E ANNÉE 2018

1
convergente puisque  1 , il en résulte, par linéarité de la somme d’une série convergente,
2
EDHEC
que la série  n  n  1 P  X  n  est convergente, et donc que X  X  1 admet une
n 0
espérance.
Il vient alors :
 

 
n 1

C ORRIGÉ
1 1 1 2 16 4
E  X  X  1   n  n  1 P  X 
n  n  n  1      
12 2 12  1 3 12 3
n 0 n 2
 1  
 2
On a l’égalité :
2
X X  X  1  X
D’après les questions 2 et 3, X et X  X  1 admettent une espérance ; par linéarité de
l’espérance, X 2 admet une espérance, donc X admet une variance, et on a, par la formule de
Koenig-Huygens :
4 4
V  X   E  X 2    E  X    E  X  X  1   E  X    E  X     1  1 
2 2

3 3

4. L’échange des mots "pile" et "face" est sans effet sur la pièce numérotée 0, et échange
simplement les pièces numérotées 1 et 2, donc Y suit la même loi que X.

5.a. Puisque j est un entier supérieur ou égal à 2, la réalisation de l’événement  Y  j signifie


que le premier "face" est arrivée au j-ème lancer, donc pas au premier, ce qui signifie que
l’événement  X  1 est réalisé ; on a donc :
 Y j   X 1
Il en résulte que :
 X 1   Y j  Y j
Ainsi a-t-on, pour tout entier j supérieur ou égal à 2 :
P  X  1   Y  j  P  Y  j
b. Puisque i est un entier supérieur ou égal à 2, la réalisation de l’événement  X  i  signifie
que le premier "pile" est arrivée au i-ème lancer, donc pas au premier, ce qui signifie que
l’événement  Y  1 est réalisé ; on a donc :
 X i   Y 1
Il en résulte que :
 X i   Y 1  X i 
Ainsi a-t-on, pour tout entier i supérieur ou égal à 2 :
P  X  i    Y  1  P  X  i 

6.a. X et Y prenant pour valeurs tous les entiers naturels, X  Y prend pour valeurs des
entiers naturels.
MATHÉMATIQUES

On a :
 X  Y  0    X  0   Y  0
L’événement  X 0   Y 0 est impossible car sa réalisation signifierait qu’on obtient que
É conomique

6/18

ANNALES CCIR 2018-2019 l 279

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CORRIGÉ EDHEC E ANNÉE 2018 CO

des "pile" et que des "face".


On a :
EDHEC  X  Y 2  X 2   Y 0   X 1   Y 1   X 0   Y 2
L’événement  X 2   Y 0 est impossible car on ne peut avoir le premier "pile" au
deuxième lancer et que des "face".
L’événement  X 1   Y 1 est impossible car on ne peut avoir le premier "pile" et le
C ORRIGÉ

premier "face" au premier lancer.


L’événement  X 0   Y 2 est impossible car on ne peut avoir le premier "face" au
deuxième lancer et que des "pile".
Le traitement des questions suivantes prouvera, certes bien tardivement …, que X  Y prend
effectivement toutes les autres valeurs entiers naturels.
Donc X  Y prend bien toutes les valeurs entières positives sauf 0 et 2.
b. On a, par incompatibilité : b.
pré

P  X  Y 1 P  X 1   Y 0   X 0   Y 1  for
P  X 1   Y 0  P  X 0   Y 1 aff
Puisque  Y 0   X 1 et  X 0   Y 1 , il vient :
 X 1   Y 0  Y 0 et  X 0   Y 1  X 0
Il vient donc, d’après les questions 1.c et 4 : 1.
1 1 2 com
P  X  Y  1  P  Y 0 P  X  0  
3 3 3 aé
c. P1 , F1 étant un système complet d’événements, on a, pour tout entier naturel n
supérieur ou égal à 3 :
 X  Y  n    P1   X  Y  n    F1   X  Y  n 
  X  1   Y  n  1   Y  1   X  n  1
d. D’après la question précédente, et par incompatibilité, on a, pour tout entier naturel n Pu
supérieur ou égal à 3 :
P  X  Y n  P  X 1   Y n  1  P  Y 1   X n  1
n étant supérieur ou égal à 3, n  1 est supérieur ou égal à 2, donc, d’après les questions 5.a et On
5.b, on a :
P  X 1   Y n  1 P  Y n  1 et P  Y 1   X n  1 P  X n  1
Il vient donc, puisqu’en outre X et Y suivent la même loi d’après la question 4 : Pu
P  X  Y  n   P  Y  n  1  P  X  n  1  2P  X  n  1
n  1 étant supérieur ou égal à 2, on obtient enfin, d’après la question 1.b, pour tout entier
naturel n supérieur ou égal à 3 :
n 1 n 1
11 21 Do
P  X  Y  n  2      
3 2 3 2
MATHÉMATIQUES

7.a. Le script Scilab permettant le calcul et l’affichage de la valeur prise par la variable Il e
aléatoire X lors de l’expérience réalisée dans cet exercice est donc complété de la manière
suivante :
To
É conomique

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280 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 280 24/10/2018 14:48


CORRIGÉ EDHEC E ANNÉE 2018

piece=grand(1,1,'uin',0,2)
x=1
if piece= =0 EDHEC
then lancer=grand(1,1,'uin',0,1)
while lancer= =0
lancer=grand(1,1,'uin',0,1)
x= x+1

C ORRIGÉ
end
else
if piece= =1 then x=0
end
end
disp(x)

b. Le cas où l’on joue avec la pièce numérotée 2 n’est pas pris en compte dans le script
précédent, car si la pièce choisie n’est ni la pièce numérotée 0 ni la pièce numérotée 1, c’est
forcément la pièce numérotée 2, et dans ce cas X vaut forcément 1, et c’est bien ce qui sera
affiché puisque x a été initialisé à 1 dans la deuxième ligne de ce script.

Exercice 3

1. f est continue sur , 0 comme fonction constante nulle, et sur  0,  comme produit et
composée de fonctions qui le sont, donc f est continue sur  , sauf peut-être en 0.
a étant un réel strictement positif, f est positive ou nulle sur  , car :
x  x
2

 e 2a  0 si x  0
a
f x  

0  0 si x  0
0
Puisque f est nulle sur , 0 ,  f  x  dx converge et on a :

0 0
 f  x  dx 

0 dx 0

On a, pour tout réel positif ou nul x :
x x x

 
 t 
2 2 2
t x
t  2a 
f  t  dt  e dt 
 e 2a  1  e 2a
a  
0 0 0
Puisque a étant un réel strictement positif, on a :
 x  2
x 
lim
x  0  f  t  dt  lim 1  e 2a   1
x   
 

Donc  f  x  dx converge et on a :
0

 f  x  dx  1
0
MATHÉMATIQUES


Il en résulte que  f  x  dx converge et qu’on a :

 0 
 f  x  dx   f  x  dx   f  x  dx  0  1  1
  0
Tout ce qui précède assure que la fonction f est une densité.
É conomique

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ANNALES CCIR 2018-2019 l 281

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CORRIGÉ EDHEC E ANNÉE 2018 CO

2. Par définition de la fonction de répartition FX de X, on a, pour tout réel x :


x
EDHEC FX  x    f  t  dt

Il vient donc, pour tout réel x  0 : On
x
FX  x 
 
0 dt 0
 Il r
Et, d’après le calcul du 1, pour tout réel x  0 :
C ORRIGÉ

0 x

 
2 2 2
t x x
t  2a  
FX  x 
 0dt  e dt  0  1  e 2a  1  e 2a c. X
a
 0

Ainsi la fonction de répartition FX de X est-elle définie par : Pu



2
x

1  e 2a si x  0
FX  x    So

0 si x  0

3.a. Puisque a un réel strictement positif, on a, pour tout réel x :


On
 X2 
FY  x  P  Y  x  P   x  P  X 2  2ax 
 2a 
Il en résulte, puisque X 2  0 , que pour tout réel x  0 : Pu
FY  x   0
Et que, pour tout réel x  0 :

FY  x   P  2ax  X  2ax  FX    
2ax  FX  2ax  Ai
Soit, compte-tenu de la question 2 :
2ax

FY  x  1  e 2a
 0 1  e  x
Ainsi FY est-elle définie par : Il e
1  e x si x  0
FY  x   
0 si x  0
On reconnaît la fonction de répartition d’une variable aléatoire Y suivant la loi exponentielle
de paramètre 1. 5.a
b. Un script Scilab demandant la valeur de a à l’utilisateur et permettant de simuler la
variable aléatoire X est donc :
Pu
a=input('donner la valeur de a') Xp
Y=grand(1,1,'exp',1)
X=sqrt(2*a*Y)
disp(X) b.
Hu
4.a. La fonction g est définie sur  , qui est centré en 0, et on a, pour tout réel x :
  x 2 x2
 
g   x  
 x  e 2a x 2e 2a g   x 
2
MATHÉMATIQUES

Donc la fonction g est paire. 6.a


b. Z suivant la loi normale de paramètres 0 et a, son moment d’ordre 2 est défini par par
l’expression intégrale : Pu
É conomique

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282 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 282 24/10/2018 14:49


CORRIGÉ EDHEC E ANNÉE 2018

 x2  2

 
1 1 2  x2a
E  Z2  

x 2e 2a
dx  x e dx
 a 2  2 a EDHEC
On sait que :
E  Z   0 et V  Z   a
Il résulte de la formule de Koenig-Huygens que :
E 
Z2  V  Z   E  Z  a
2

C ORRIGÉ

c. X possède une espérance si et seulement si  xf  x  dx converge.

0
Puisque f est nulle sur , 0 ,  xf  x  dx converge et on a :

0 0
 
 x  dx
xf  
0 dx

0
Sous réserve de convergence, on a :
  2

 
x
x 2  2a
xf  x  dx  e dx
0 0 a
On sait, d’après la question précédente, que :
 2  x2

 
x
1  1 
x 2 e 2a dx  x 2e 2a
dx  a
 2 a 2 a 
Puisque g est paire, il en résulte que :
 x2  x2

 
 
x 2e 2a
dx  2 x 2e 2a
dx a 2a

 0

Ainsi  xf  x  dx converge et on a :
0
  2

 
x
1  a 2a 2a a
xf  x  dx 
x 2e 2a
dx  
0 a 0 2a 2 2
Il en résulte que X possède une espérance et que :
 0  a a
E  X   xf  x  dx   xf  x  dx   xf  x  dx 
0 
  0 2 2

5.a.Y suit la loi exponentielle de paramètre  1 , donc on a :


1
EY   1

Puisque X 2  2aY et que Y admet une espérance, X 2 admet par linéarité une espérance, donc
X possède un moment d’ordre 2 et on a :
E  X 2  E
  2aY  2aE  Y   2a
b. D’après la question précédente, X admet une variance, et d’après la formule de Koenig-
Huygens, il vient :
a 4a  a  4    a
V  X   E  X 2    E  X    2a 
2
 
2 2 2
MATHÉMATIQUES

6.a. Sn est un estimateur de a comme fonction de X1 , X 2 , …, X n ne dépendant pas du


paramètre a à estimer.
Puisque les variables aléatoires X1 , X 2 , …, X n suivent la même loi que X, elles admettent
É conomique

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ANNALES CCIR 2018-2019 l 283

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CORRIGÉ EDHEC E ANNÉE 2018 CO

toutes, d’après la question 5.a un moment d’ordre 2, donc, par linéarité de l’espérance, Sn
admet une espérance, et on a :
EDHEC
 1 n  1 n 1 1 Il e
E  Sn   E   X 2k    E  X k2    nE  X 2    2a a
 2n k 1  2n k 1 2n 2
Donc Sn est un estimateur sans biais de a.
b. Y suit la loi exponentielle de paramètre  1 , donc on a : b.
C ORRIGÉ

1
V  Y   1
2 con
Puisque X  2aY et que Y admet une variance, X admet une variance, on a :
2 2

V  X 2  V 2aY  4a 2 V  Y   4a 2 
P
c. Puisque les variables aléatoires X1 , X 2 , …, X n suivent la même loi que X, elles admettent 
On
toutes, d’après la question 5.a une variance, donc Sn admet une variance, et on a :
 1 n  1  n 
V  Sn   V   X 2k   2 V   X 2k 
 2n k 1  4n  k 1 
En
Puisque les variables aléatoires X1 , X 2 , …, X n sont indépendantes et suivent la même loi que
X, les variables X12 , X 22 , …, X 2n sont indépendantes et suivent la même loi que X 2 , donc :
1 n 1 1 a2
2 
V  Sn   V  X 2k   2  nV  X 2    4a 2 
4n k 1 4n 4n n Po
Puisque Sn est un estimateur sans biais de a, le risque quadratique de Sn est :
a2
ra  S n   V Sn  
n On
On a alors :
2
a
ra  Sn  lim
lim   0
n n  n

Donc Sn est un estimateur convergent de a. Do

con
7.a. Sn admettant une variance, l’inégalité de Bienaymé-Tchebychev pour la variable
aléatoire Sn s’écrit :
V  Sn 

  0 P Sn  E  Sn      2 Pa
Soit encore, compte-tenu des résultats de la question 6 :
1.a
a2
  0 P  S n  a    
n 2
On a alors : Si
  0 P  Sn  a     1  P  Sn  a     1  P  Sn  a   
Si
Car :
le s
S n  a      Sn  a     P  Sn  a     P  Sn  a   
Do
MATHÉMATIQUES

Il vient donc, d’après ce qui précède :


2 b.
a
  0 P  Sn  a     1 
n 2 s’a
Puisque a est inférieur ou égal à 1, on a :
É conomique

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284 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 284 24/10/2018 14:49


CORRIGÉ EDHEC E ANNÉE 2018

a2 1

n 2 n2
EDHEC
Il en résulte que :
1
  0 P  S n  a     1  2
n
 1 1
b. Par définition, Sn  ,Sn   est un intervalle de confiance de a au niveau de

C ORRIGÉ
 10 10 
 1 1
confiance 1  si P  Sn   a  Sn    1   , c’est-à-dire ici, en prenant  0, 05 , si
 10 10 
 1 1
P  Sn   a  Sn    0, 95
 10 10 
On peut écrire :
 1 1  1 1  1
P  Sn   a  Sn    P    Sn  a    P  Sn  a  
 10 10   10 10   10 
1
En prenant   , on sait, d’après la question précédente, que :
10
 1 100
P  Sn  a    1 
 10  n
 1 1
Pour avoir P  Sn   a  Sn    0, 95 , il suffit donc de choisir n tel que :
 10 10 
100
1  0,95
n
On a :
100 100 100
1  0,95   0, 05  n   n  2 000
n n 0, 05
 1 1
Donc S 2000  ,S 2000   est un intervalle de confiance pour a avec un niveau de
 10 10 
confiance au moins égal à 95%.

Problème
Partie 1 : étude de f

1.a. On a :
 t   t 2  0  1  t 2  1  ln 1  t 2   0
Si x  0 , f  x   0 par positivité de l’intégrale d’une fonction positive sur le segment  0, x  .

 ln 1  t  dt  0
0
Si x  0 , f  x  2
par positivité de l’intégrale d’une fonction positive sur
x

le segment  x,0 , donc f  x   0 .


Donc f est négative sur   et positive sur   .
MATHÉMATIQUES

b. Le fonction t  ln 1  t 2  est continue sur  , et f est la primitive de cette fonction sur 


s’annulant en 0, donc f est de classe C1 sur  et on a, pour tout réel x :
É conomique

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ANNALES CCIR 2018-2019 l 285

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 285 24/10/2018 14:49


CORRIGÉ EDHEC E ANNÉE 2018 CO

f '  x   ln 1  x 2 
4.a
EDHEC c. D’après la question 1.a, on a :
 ln 1  x 2   0
x   f '  x On
Donc f est croissante sur  .

2.a. La fonction f est définie sur  , qui est centré en 0, et on a, pour tout réel x :

C ORRIGÉ

ln 1  t 2  dt
x
f  
x  1
0
1
Par le changement de variable u   t , qui est de classe C sur  et pour lequel du  dt , il D’
vient :
   du   ln 1  u  du f  x 
x x
f   x   ln 1    u 
2 2
0 0 int
Donc f est impaire.
b. D’après la question 1.b, il vient par dérivation, pour tout réel x : b.
2x
f ''  x  
1 x2
Puisque 1  x 2  0 sur  , f ''  x  est du signe de x sur  , donc f ''  x  s’annule en changeant
de signe en 0, étant négative sur   et positive sur   . D’
Donc f est concave sur   , convexe sur   , et la courbe représentative de f admet pour
seul point d’inflexion le point O  0, 0  .

3.a. On a, pour tout réel t : Do


b a 1  t   b at 2  a  b 2

a 2
 2 
1 t 1 t 1 t2 Pu
Donc il vient, pour tout réel t, par identification des coefficients :
t2 b t2 at 2  a  b   a 1
 a 1
2
a 2
 2
 2  
1 t 1 t 1 t 1 t a  b  0 b  1 c.
Les réels a et b cherchés sont donc a  1 et b  1 .

 ln 1  t  dt
x
f x
b. Calculons  2
à l’aide d’une intégration par parties ; on pose :
0
On
2t
 t  ln 1  t 2 
u u'  t  
1 t2
v'  t   1 vt  t
Do
u et v sont de classe C1 sur  , donc il vient, par intégration par parties et d’après la question
précédente :
x x x

   1  1  t  dt
2t 2  1 
ln 1  t 2  dt  t ln 1  t 2   dt x ln 1  x 2   2
x
f  x  Pu
0
0
0 1 t2 0
2

x x x

   1  t dt
1 1
 x ln 1  x 2   2 2
dt x ln 1  x 2   2x  2
1 dt 2 2
Et
0 0 1 t 0
Ainsi a-t-on montré que, pour tout réel x, on a : d.
MATHÉMATIQUES


1

f  x   x ln 1  x   2  2 2
 1  t2
dt
0 Lo
la q
É conomique

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286 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 286 24/10/2018 14:49


CORRIGÉ EDHEC E ANNÉE 2018




1
4.a. dt est une intégrale impropre uniquement en  .
0 1 t2 EDHEC
On a :
1 1

1  t 2  t 2



1

C ORRIGÉ
dt est une intégrale de Riemann convergente car de paramètre   2  1 .
1 t2



1
D’après le critère d’équivalence des intégrales des fonctions positives, dt est une
1 1 t2



1
intégrale convergente, donc dt est une intégrale convergente.
0 1  t2
b. D’après la question 3, on a :
x

 1  t dt
1
f  
x  x ln 1  x 2   2  2  0
2

 1  t dt
1
D’après la question 4.a, lim
x 
0
2 x 

est finie ; puisque lim x ln 1  x 2   2   , on a : 
x

 1  tdt  
1
2 2
o x ln 1  x 2   2

0
Donc :

f  x   x ln 1  x 2   2


Puisque
 2 o ln 1  x

 2
  , il vient enfin :
f  x   xln 1  x 2 

c. On a, pour tout réel x strictement positif :
  1   1   1 
ln 1  x 2  ln  x 2 1  2   ln  x 2   ln 1  2   2lnx  ln  1  2 
  x   x   x 
On a :
 1 
lim 2 ln x   et lim ln  1  2   0
x  x 
 x 
Donc :
 1 
ln 1  2   o  2 ln x 
 x  
Puis :
ln 1  x 2   2 ln x

Et enfin, d’après la question 4.b :
f  x   2xlnx

d. Puisque f est impaire d’après la question 2 ;a, on a, pour tout réel x :
MATHÉMATIQUES

f x  f   x 
Lorsque x est au voisinage de  ,  x est au voisinage de  , donc, d’après l’équivalent de
la question précédente, on a :
É conomique

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CORRIGÉ EDHEC E ANNÉE 2018 CO

f   x    2 x ln   x  Pa


EDHEC Il en résulte que :


7.a
f  x   2xln   x 


5.a. On a vu à la question 1.b que f est de classe C1 sur  et que, pour tout réel x : La
x  ln 1  x 2 
f ' 
C ORRIGÉ

b.
f ' est de classe C2 sur  , comme composée de la fonction x  1  x 2 , de classe C2 sur  ,
à valeurs dans * , par la fonction logarithme népérien, de classe C2 sur * .
Donc f est de classe C3 sur  .
b. On sait, d’après l’énoncé les questions précédentes que, pour tout réel x : 8.a
2x
f  x   ln 1  t 2  dt , f ' 
x  ln 1  x 2  et f ''  x  
x

0 1 x2
En dérivant, il en résulte que, pour tout réel x :
1  x 2  2x 2 2 1  x 
2
2x
f    x 
3
 2  
On
1  x 2  1  x 2 
2 2
1 x2
On déduit de tout ceci que :
f  0   f '  0   f ''  0   0 et f  3   0   2 Et
c. La formule de Taylor admise dans l’énoncé s’écrit :
x1 x2 x3 3
f x f  0   f '  0   f ''  0   f    0   o  x 3  Il v
0 1! 2! 3!
Il reste donc, en utilisant les valeurs obtenues à la question précédente :
x3 x3
f x  2  o  x3    o  x3  Pa
0 3! 3 ent
Ceci assure bien que :
x3
f  x  Do
0 3

b.
6. Le script Scilab complété pour qu’il calcule et affiche, à l’aide de la méthode de Monte-
Carlo, une valeur approchée de f 1 , est le suivant :
On
U=grand(1,100 000,‘unf’,0,1)
V=log(1+U.^2)
f=mean(V) Pa
disp(f) nat

 ln 1  t  dt
1
f 1
Bien qu’aucune explication ne soit attendue ici, remarquons que 2
et qu’il Ai
0

f 1 E ln 1  U
en résulte, d’après le théorème de transfert, que  2
 où U est une variable La
aléatoire suivant la loi uniforme sur  0,1 . Une valeur approchée de f 1 peut donc être thé
MATHÉMATIQUES

obtenue en prenant la moyenne sur un grand nombre  ici 10 000  de réalisations d’une
9.a
variable aléatoire suivant la même loi que ln 1  U 2
.
É conomique

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CORRIGÉ EDHEC E ANNÉE 2018

Partie 2 : étude d’une suite

7.a. Si on remplace n par 0 dans l’expression générale de u n , on obtient : EDHEC


1 1


u 0  ln 1  t 2  dt 1dt   
0
 t 0 
1
1
0 0

La valeur donnée à u 0 est donc cohérente avec l’expression générale de un .

C ORRIGÉ
b. On a :
1 1

  ln 1  t  dt   ln 1  t  dt  f 1
1
u1  2 2

0 0

8.a. Par définition de u n et par linéarité de l’intégrale, on a, pour tout entier naturel n :

  ln 1  t   ln 1  t   dt
1 1 1

  ln 1  t    ln 1  t 
n 1 n n 1 n
2 2 2 2
u n 1  u n  dt  dt 
0 0 0
1

  ln 1  t   ln 1  t  1 dt
n
2 2

0

On a, pour tout réel t de  0,1 et pour tout entier naturel n :


t 2  0  1  t 2  1  ln 1  t 2   0  ln 1  t 2   
n
0
Et :
0  t 2  1  1  1  t 2  2  0  ln 1  t 2   ln 2  1  ln 1  t 2   1  0
Il vient donc, pour tout réel t de  0,1 et pour tout entier naturel n :

 ln 1  t   ln 1  t   1  0
n
2 2

Par négativité de l’intégrale d’une fonction négative sur le segment  0,1 , on a, pour tout
entier naturel n :
u n 1  u n  0
Donc la suite  u n n est décroissante.
b. Par définition de u n , on a, pour tout entier naturel n :
1

  ln 1  t  dt
n
2
un
0
On a vu à la question précédente que :
 ln 1  t 
n
t   0,1 2
0
Par positivité de l’intégrale d’une fonction positivesur le segment  0,1 , on a, pour tout entier
naturel n :
un  0
Ainsi la suite  u n n est-elle minorée par 0.
La suite  u n n est décroissante d’après la question précédente, minorée par 0, donc le
théorème de la convergence monotone assure que la suite  u n n est convergente.
MATHÉMATIQUES

9.a. On a déjà vu à la question précédente que, pour tout entier naturel n :


un  0
É conomique

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CORRIGÉ EDHEC E ANNÉE 2018 CO

On a vu, à la question 8.a, que pour tout réel t de  0,1 , on a :


EDHEC 0  ln 1  t 2   ln 2
Il
Il en résulte que pour tout réel t de  0,1 et pour tout entier naturel n : qu

 ln 1  t 
n
  ln 2 
2 n

Les inégalités de la moyenne (ou une intégration d’inégalités) donnent alors :


C ORRIGÉ

  ln 1  t  dt  1  0 ln
n
2  ln 2 
n n
un
 2
c. P
0
Ainsi a-t-on montré que, pour tout entier naturel n :
0  un   ln2 
n

n
b. On a :
1  ln 2  1  lim  ln 2  0
n

n 
k

Il résulte alors de l’encadrement de la question précédente et du théorème d’encadrement ter


que la suite  u n n converge vers 0. tou
La série de terme général  ln 2  converge comme série géométrique de raison ln 2 avec
n

1  ln 2  1 ; il résulte de l’encadrement de la question précédente et du critère de


comparaison pour les séries à termes positifs que la série de terme général un converge.
d.
10.a. On a vu à la question 8.a, pour tout réel t de  0,1 et pour tout entier naturel n :

 ln 1  t   0 et ln 1  t 2   ln 2
n
2

Il vient donc, pour tout réel t de  0,1 : On


1 1
ln 1  t   ln 2  1  ln 1  t   1  ln 2  0  0 
2 2

1  ln 1  t 2  1  ln 2
Puis, pour tout réel t de  0,1 et pour tout entier naturel n :
Il e
 ln 1  t    ln 1  t 
n n
2 2

0
1  ln 1  t 2  1  ln 2
Par positivité de l’intégrale d’une fonction positive sur  0,1 , et par intégration d’une inégalité Ce
sur  0,1 , il vient :

 ln 1  t   ln 1  t 
1 1 1

  
n n
2 2
1 un
 ln 1  t 
n
0 dt  dt  2
dt  e.
1  ln 1  t 2
 1  ln 2 1  ln 2 1  ln 2
0 0 0
Ainsi a-t-on bien montré que : qu

 ln 1  t 
1


n
2
un
0 dt 
1  ln 1  t 2  1  ln2
0
MATHÉMATIQUES

b. D’après la question 9.b, on sait que :


lim u n  0
n 
Il vient donc :
É conomique

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290 l ANNALES CCIR 2018-2019

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CORRIGÉ EDHEC E ANNÉE 2018

un
0 lim
1  ln 2 n 

Il résulte alors de l’encadrement de la question précédente et du théorème d’encadrement EDHEC


que :
 ln 1  t 
1


n
2

lim dt  0
n  1  ln 1  t 2 

C ORRIGÉ
0

c. Par définition de u k et par linéarité de l’intégrale, on a, pour tout entier naturel n non nul :
n 1 n 1 n 1
 
 u      ln 1  t  dt  
    ln 1  t   dt
 1
2
k  1
2
k
k
0 0
k 0 k 0 k 0
n 1

  ln 1  t 
k
2
est la somme des n premiers termes de la suite géométrique de premier
k 0

terme 1 et de raison ln 1  t 2  , différente de 1 pour t appartenant à  0,1 ; on a donc, pour


tout entier naturel n non nul :

   
n 1
1  ln 1  t 2 
1 n

uk  dt
1  ln 1  t 2 
k 0 0

d. Par linéarité de l’intégrale, le résultat de la question précédente s’écrit :

   ln 1  t 
n 1 1 1


n
2
1
uk  dt  dt
1  ln 1  t 2  1  ln 1  t 2 
k 0 0 0

On sait, d’après la question 10.b, que :


 ln 1  t 
1


n
2

lim dt  0
n  1  ln 1  t 2 
0
Il en résulte que :
n 1

 
1
1
lim uk  dt
n 
k 0
0 1  ln 1  t 2 
Ce qui prouve que :


 
1
1
uk  dt
0 1  ln 1  t 2 
k 0
e. Compte-tenu du résultat de la question précédente, la modification du script présenté à la

question 6. pour donner une valeur approchée de u
k 0
k est la suivante :

U=grand(1,100 000,‘unf’,0,1)
V=(1-log(1+U.^2)).^(-1)
MATHÉMATIQUES

S=mean(V)
disp(S)
É conomique

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S UJET

ÉCONOMIE
Durée : 2 heures 30.

Il n’est fait usage d’aucun document ; l’utilisation de toute calcu-


SCBS latrice et de tout matériel électronique est interdite. Si au cours
de l’épreuve, un candidat repère ce qui lui semble être une erreur
d’énoncé, il la signalera sur sa copie et poursuivra sa composition
en expliquant les raisons des initiatives qu’il sera amené à prendre.
T ECHNOLOGIQUE

S UJET

Les enjeux de l’ubérisation de l’économie

Vous rédigerez une note de synthèse de l’ensemble documentaire fourni


en 500 mots environ.

D OCUMENT

Document 1 Doc

Comment l’ubérisation de l’économie révolutionne la concurrence

« Les "barbares" sont à nos portes, mais ils n’ont pas encore gagné la guerre. »
Dans son essai Humaniser l’économie de partage, paru le 31 mars, Nicolas
Rousselet, PDG des Taxis G7 et Taxis Bleus, ne s’avoue pas vaincu face
à Uber, Drivy et consorts, même s’il déplore que « leur credo, l’ubérisa-
tion, soit devenu une religion moderne ». Utilisé la première fois en 2014 par
Maurice Lévy, président de Publicis, ce terme décrit le surgissement dans
les années 2010 de plateformes numériques mettant en relation directe des
clients et des prestataires, concurrençant les entreprises établies de longue
date en proposant un service simple et accessible. Comment expliquer cet
assaut inattendu ? Par la disparition de barrière d’entrée sur le marché, la
démocratisation des Smartphones et la multiplication des fonds de capi-
tal-risque, permettant aux start-up de se développer à toute vitesse. Le
CAC 40 n’est pas tout entier sur la sellette pour autant. « Ce n’est pas un
T echnologique

phénomène général, insiste Arthur de Grave, rédacteur en chef de OuiShare.


Les cibles sont souvent des acteurs protégés pendant longtemps, sans alter-
native, malgré des clients insatisfaits. » Aujourd’hui, les vieilles endormies sont
ÉCONOMIE

forcées de se réinventer. « La révolution digitale et collaborative oblige chacun


à améliorer sa proposition de valeur », reconnaît Nicolas Rousselet, dont les
chauffeurs de taxi ont gagné en amabilité depuis qu’Uber a envahi le marché.
À la SNCF, le président Guillaume Pepy a recruté Barbara Dalibard avec une
mission : « Transformer le modèle pour s’assurer de notre compétitivité face
à de nouveaux acteurs », explique la directrice générale de SNCF Voyageurs.
Elle a donc racheté le site de covoiturage 123envoiture pour rivaliser face au

292 l ANNALES CCIR 2018-2019

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S UJET
leader BlaBlaCar, et investi dans la plateforme d’autopartage OuiCar. Mais
réagir ne suffit pas. « Il faut être dans le peloton de tête de ceux qui innovent,
affirme Barbara Dalibard. On ne sait pas quel business fonctionnera. Mais si
nous sommes absents, nous serons "cornerisés". » Ainsi, persuadée qu’un
acteur lancerait tôt ou tard un train ou un bus low cost, la SNCF a voulu
être la première : Ouigo est né, puis Ouibus. […] Ce ne sont plus les usines
SCBS
qui font la puissance, mais le nombre de clients ou de membres identifiés.
« C’est une économie sans frottement, car on passe facilement d’un service
à l’autre, donc les utilisateurs se concentrent sur le meilleur site, précise
Jean-David Chamboredon, président du fonds Isai. Les modèles qui néces-
sitent une masse critique pour concilier offre et demande, comme BlaBlaCar,
tendent donc vers un monopole. Ou des oligopoles, comme dans la musique
avec Apple, Spotify et Deezer. » Cette concentration est-elle néfaste pour le
consommateur ? Laure Wagner, porte-parole de BlaBlaCar, s’en défend : « Ce
qui était plus inquiétant, c’était le monopole public de la SNCF. Sur BlaBlaCar,
il y a une multitude d’offres, ce n’est pas nous qui fixons les prix. » Et si la
qualité du service venait à baisser, l’absence de frottement jouerait alors
contre ces plateformes. « Leur point faible, c’est la confiance des utilisateurs,
insiste Nicolas Colin, associé fondateur de TheFamily. Si elle manque, ces
derniers peuvent reprendre leurs droits. ». Les « barbares » ne sont donc pas
indétrônables, comme le prouve la déliquescence de Myspace. […]
Claire Bouleau, 3 avril 2016, Challenges.fr

Document 2

Taxis. VTC1. Uber : la licence au cœur des conflits


depuis plus de 20 ans

Qu’est-ce qu’une licence de taxi ?

Il s’agit d’une autorisation de stationnement (ADS). Après avoir réussi


l’examen du certificat de capacité professionnelle – pour un coût de 2000
à 3 000 euros – et obtenu la carte professionnelle, le chauffeur de taxi doit,
pour pouvoir exercer son activité, soit être titulaire d’une autorisation de
stationnement (il est alors artisan, comme 80 % des taxis français), soit
exercer comme locataire (11 %) ou salarié (2 %) dans une société privée,
comme G7 ou Taxis Bleus pour les plus connus. […] La licence permet
à ses détenteurs de prendre à la volée des clients, donne accès aux bornes
de taxis dans la rue et dans les aéroports, et ouvre l’utilisation des voies
de bus. […] Les licences sont attribuées gratuitement. Mais, les nouvelles
T echnologique

attributions étant quasi-inexistantes, les listes d’attente s’allongent. Il faut


parfois attendre plusieurs années avant d’obtenir une licence gratuite. Du
coup, les aspirants taxis se dirigent vers un marché secondaire, où les
licences se vendent et s’achètent comme des petits pains, sur des sites
ÉCONOMIE

spécialisés. Ce marché est géré par le syndicat des taxis. […]

Pourquoi les licences de taxi sont-elles si chères ?

Comme dans tout marché où la demande est beaucoup plus forte que l’offre,
les prix grimpent. Selon les régions et les villes, les licences s’échangent

ANNALES CCIR 2018-2019 l 293

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S UJET

entre 30 000 euros (dans des zones rurales) et 350 000 euros (en Côte


d’Azur). […] Pour Jacques Delpa, il n’y a pas que cet « effet rareté » qui entre
en compte dans ces prix exorbitants. Car, en théorie, un prix correspond
à la « somme future des revenus ». Or, « selon tous les calculs de revenus
possibles, même les plus optimistes, rien ne permet de conclure qu’une
licence puisse valoir 200 000 euros (soit 40 fois sa valeur de 1973, ndlr) »,
SCBS
assure-t‑il. Selon lui, ces prix « cristallisent surtout la fraude fiscale et sociale
future » des chauffeurs de taxis, qui ont des compteurs qui n’enregistrent
pas toujours les transactions, qui sont majoritairement payées en argent
liquide. […] Doc

Marine Rabreau, 3 juillet 2015, LeFigaro.fr


1
VTC : véhicule de tourisme avec chauffeur.

Ce que dit la loi du 1er octobre 2014

La profession de taxi est réglementée. D’une part, le chauffeur doit remplir


des conditions strictes (casier judiciaire vierge, pas d’infraction routière
sanctionnée de 6 points ou plus sur son permis, réussite à un examen).
D’autre part, il doit être titulaire d’une licence. […] Les VTC sont soumis
à des obligations plus légères, mais doivent tout de même justifier d’un
casier vierge, d’une assurance professionnelle et de 250 heures de forma-
T echnologique

tion pour obtenir leur carte. […] Les taxis conservent le monopole de la
« maraude », c’est-à‑dire qu’ils peuvent être hélés à la volée dans la rue.
À l’inverse, les VTC ne peuvent charger un client que sur réservation. Une
ÉCONOMIE

différence qui s’estompe dans les villes où les VTC sont nombreux, ce qui
peut réduire le délai d’attente à une ou deux minutes. La loi Thévenoud
imposait initialement un délai de quinze minutes entre la réservation et la
prise en charge, mais cette disposition a été annulée en Conseil d’État. […]
De même, le Conseil constitutionnel a retoqué le privilège réservé aux taxis
de la tarification horokilométrique(1). Les VTC peuvent l’adopter, ou choisir

294 l ANNALES CCIR 2018-2019

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S UJET
une tarification forfaitaire. En revanche, les Sages ont validé la disposition
de la loi qui encadre les systèmes de géolocalisation. Concrètement, le
client ne pourra avoir simultanément sur son Smartphone l’information sur
la localisation des véhicules et leur disponibilité. […]
Bertille Bayart, 25 juin 2015, LeFigaro.fr
(1)
horokilométrique : relatif au temps passé et à la distance parcourue. SCBS

Document 4

Ubérisation, emplois précaires, auto-entrepreneurs :


l’OIT tire la sonnette d’alarme

L’organisation internationale du travail (OIT) jette un pavé dans la grande


mare des « emplois atypiques ». En France, on parle souvent « d’ubérisation »
du monde de l’emploi pour qualifier les évolutions du salariat classique vers
des formes de travail plus précaires. Des évolutions qui inquiètent l’OIT, qui
estime dans son dernier rapport, qu’il est « nécessaire d’améliorer la qualité
des emplois atypiques par des réformes au niveau réglementaire ». En clair,
mettre des garde-fous en faveur des salariés beaucoup plus stricts, face
à l’essor de toutes les formes d’emploi précaires. L’étude constate une
augmentation à l’échelle mondiale des formes atypiques d’emploi (FAE),
y compris des hausses du travail temporaire, quel qu’il soit : travail à temps
partiel, travail intérimaire, sous-traitance, auto-entrepreneuriat et relations
de travail déguisées… Si les recherches montrent que ces formes d’emploi
peuvent « donner accès au marché du travail » et peuvent « offrir une certaine
souplesse aux travailleurs et aux employeurs », le rapport met aussi en garde
sur le fait que les FAE s’accompagnent souvent d’une plus grande insécu-
rité pour les travailleurs et de conséquences potentiellement graves pour
leur santé. […] L’étude relève d’abord que le vivier de travailleurs précaires
(contrats courts, intérim…) est constitué d’une main-d’œuvre qui, de toute
façon, aurait eu du mal à accéder au marché du travail autrement. À part
certains cas – des femmes qui souhaiteraient s’occuper de leurs enfants
à mi-temps ou des travailleurs qui suivraient une formation en parallèle –
ces formes de travail sont souvent subies. Autre inquiétude soulevée par le
rapport, les emplois précaires ne mènent pas forcément à une installation
pérenne sur le marché du travail. En France, en 1982, le taux de conversion
des CDD en CDI au bout d’un an était de un sur deux. Il était de un sur quatre
entre 2003 et 2008. Pour baisser à un sur cinq depuis la crise. L’étude se
concentre également sur les différences de salaire entre les jobs tempo-
raires et les contrats permanents : les salariés hommes précaires gagnent
T echnologique

11 % de moins que les employés classiques, contre 6 % de moins pour les
femmes dans la même configuration. […] Dans certains cas, en particulier
quand les arrangements contractuels ont perturbé la relation de travail, « il
ÉCONOMIE

est clairement établi que les travailleurs ont du mal à exercer leurs droits
fondamentaux au travail, ou à avoir accès aux prestations de sécurité sociale
et à la formation professionnelle », relève le rapport. « Les emplois atypiques
vont de pair avec l’insécurité, un niveau de salaire faible, des horaires plus
longs », détaille ainsi l’organisation. « Ces travailleurs reçoivent souvent
plus de pression pour être immédiatement réactifs aux demandes en flux
tendu des entreprises (…) pour faire des heures supplémentaires, travailler

ANNALES CCIR 2018-2019 l 295

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 295 24/10/2018 14:49


S UJET

pendant les vacances, refuser les congés maladie ou ne pas prendre les
repos auxquels ils ont le droit ». Une étude américaine, citée par le rapport
montre que ces travailleurs sont aussi ceux qui travaillent le plus en horaires
décalés, comme la nuit, ou le week-end.
Conséquences ? Un stress plus élevé, davantage d’accidents profession-
nels, une déstabilisation de la vie personnelle […] En 2016, l’Observatoire
SCBS
des inégalités recensait en France 3,2 millions de travailleurs précaires, soit
12,3 % des emplois, contre seulement 8 %, en 1991.
Héloïse de Neuville, 15 novembre 2016, Challenges.fr

Document 5

Ubérisation de l’économie :
une nouvelle arme de destruction créatrice massive ?

Évolution des créations autoentrepreneurs VTC vs Défaillances Taxi (Nombre


et employés) en France

Document 6

Faut-il réguler les plateformes numériques ?

[…] L’irruption de l’économie des plateformes offre un bon cas d’école. La


capacité des plateformes numériques à échapper à l’impôt, à contourner
les contraintes du droit du travail, à faire un usage parfois peu transparent
des données qu’elles recueillent, ainsi que la réputation qui leur est faite
T echnologique

de « manipuler » les résultats de recherche par des algorithmes opaques


et de maximiser leurs revenus en favorisant les résultats qui leur sont les
plus favorables remettent sans cesse sur le devant de la scène la question
ÉCONOMIE

d’une régulation sectorielle spécifique à ces acteurs (…). Trois arguments


avancés en faveur d’une régulation économique des plateformes paraissent
discutables. Le premier argument est la taille des plateformes qui découle
des effets de réseaux(1) à l’œuvre dans le numérique. Sans avoir besoin de
déployer des stratégies d’éviction anticoncurrentielles, les plateformes qui
réussissent sur leur marché sont de grande taille, cette caractéristique étant
consubstantielle à leur efficacité (…). Nombre de plateformes sont d’une

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S UJET
taille beaucoup plus grande que les agents économiques avec lesquels
elles traitent : que l’on songe aux hôtels face aux plateformes de réser-
vation comme Booking ou Expédia, aux chauffeurs face à Uber, ou aux
comparateurs de prix face à Google. Toutefois la grande taille d’un opéra-
teur, y compris lorsqu’elle conduit à la détention d’une position dominante,
n’est pas suffisante pour justifier une intervention publique. En droit de
SCBS
la concurrence, seul l’abus de position dominante est sanctionné […]. Le
deuxième argument en faveur de la régulation est la difficulté à faire jouer les
mécanismes de marché habituels. Sur les marchés traditionnels, une entre-
prise qui pratique des prix élevés est menacée par l’arrivée de concurrents
capables d’offrir des produits ou des services concurrents à un prix plus bas,
d’une qualité supérieure, ou dotés de caractéristiques répondant mieux aux
besoins et aux préférences des acheteurs. Cette capacité existe aussi dans
le monde numérique […]. Cependant, un nouvel entrant offrant un service
à prix plus bas se heurte à la taille du réseau déjà opéré par les plateformes
en place […]. Par exemple, une plateforme de réservation hôtelière en ligne
peut venir concurrencer une plateforme dominante en proposant des prix
moins élevés, mais elle doit alors convaincre hôteliers et consommateurs
de recourir à ses services alors que l’autre côté du marché n’est pas encore
présent. Ce mécanisme pousse les agents des deux côtés du marché (hôtels
et consommateurs dans le cas des plateformes de réservation hôtelière)
à utiliser les services d’une seule plateforme (celle sur laquelle est présent
le plus grand nombre d’agents de l’autre face) : ce comportement de « single
homing »(2) rend les mécanismes habituels de concurrence moins efficaces
que sur les marchés classiques où les effets de réseau ne jouent pas. Quand
la mobilité entre plateformes est grande ou quand le multi-homing est la
règle, le marché dispose de toute la fluidité concurrentielle nécessaire : c’est
le cas des VTC ou des plateformes de musique et vidéos. […] Le troisième
argument, l’accumulation de données par certaines plateformes, entrées
les premières sur leurs marchés, pourrait dans certains cas constituer une
source de barrières à l’entrée, ces données n’étant pas reproductibles par de
nouveaux entrants. Cet argument doit toutefois être considéré avec réserve :
aucune des plateformes entrées séquentiellement sur leurs marchés respec-
tifs n’a été freinée par un problème d’accès aux données détenues par ses
concurrents en place. À titre d’illustration, en matière de service reposant
sur des données de géolocalisation, toutes les plates-formes répertoriant
les services de proximité (hôtels, restaurants, commerces), comme celles
proposant des services de transport, ont pu déployer leur offre sans avoir
recours aux données détenues par les premiers entrants. […] Une plateforme
qui rend un meilleur service parce qu’elle a un meilleur algorithme attire
rapidement les utilisateurs qui apportent du même coup leurs données. […]
Des arguments nettement plus solides justifient d’appliquer aux activités
T echnologique

numériques le seul droit commun de la concurrence. Tout d’abord, même


lorsque les plateformes numériques sont concernées, les cas d’abus d’ex-
ploitation (prix excessifs, par exemple) sont peu fréquents. […] Ensuite, les
ÉCONOMIE

stratégies des plateformes se déploient en grande partie sur des marchés


concurrentiels, comme celui de la publicité. Dès lors, il est possible d’ap-
préhender les comportements des plateformes sur ces marchés à l’aide des
outils usuels du droit de la concurrence. Enfin, « le numérique » n’est pas un
secteur. Les technologies numériques irriguent l’ensemble de l’économie
et de très nombreux services – qu’ils soient classiques mais bouleversés

ANNALES CCIR 2018-2019 l 297

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 297 24/10/2018 14:49


S UJET

par les technologies numériques (comme les taxis l’ont été par les VTC), ou
complètement nouveaux (comme le guidage des automobilistes en temps
réel dans les embouteillages) – s’appuient sur une technologie de plate-
C
forme où jouent pleinement les effets de réseaux. […]
Maya Bacache-Beauvallet et Anne Perrot, notes du CAE n° 44, Novembre 2017
SCBS (1)
Effet de réseau : situation dans laquelle la satisfaction que retire l’utilisateur d’un produit, d’un
service, d’une plateforme,… augmente avec le nombre d’utilisateurs (ex : consommateurs, développeurs
d’applications, joueurs de jeu vidéo,…). Il s’agit donc d’une externalité positive réciproque de consommation.
(2)
Single-homing : fait d’être rattaché à une seule plateforme numérique ; contraire de multi-homing.
T echnologique
ÉCONOMIE

298 l ANNALES CCIR 2018-2019

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C ORRIGÉ
Par Frédéric Larchevêque, professeur de chaire supérieure au lycée Jules
SCBS

Michelet, à Vanves.

I. A la découverte de l’ensemble documentaire

C ORRIGÉ
L’ensemble documentaire comprend 6 documents pour un volume total
équivalent à celui de la session précédente d’environ 2 600 mots. Parmi
les 6 documents, on compte quatre textes et deux tableaux de données
chiffrées. L’ensemble documentaire est comme chaque année précédé
d’un titre, « Les enjeux de l’ubérisation de l’économie ».

L’importance du titre de l’ensemble documentaire


Le titre de l’ensemble documentaire constitue la première information sur
l’objet de la note à rédiger. Il constitue donc une aide précieuse pour
identifier la problématique et sélectionner plus rapidement les principaux
répertoires d’idées au cours de sa lecture.

L’importance de la première lecture de l’ensemble documentaire


Lors de la découverte de l’ensemble documentaire, il convient d’éviter le
piège d’une lecture trop analytique. Cette première lecture doit permettre de
préciser l’objet de la note et d’identifier les principaux répertoires d’idées.
Il ne s’agit donc pas d’essayer de tout relever, de tout comprendre, mais
de restituer le sens général de ce que chaque document apporte comme
informations principales.

Le document 1, Comment l’ubérisation de l’économie révolutionne la


concurrence, définit le phénomène dit de l’ubérisation de l’économie. Une
telle définition est importante à relever car la consigne y fait directement
référence.
Ce premier document présente aussi 3 facteurs explicatifs de son émer-
gence : moins de barrières à l’entrée sur les marchés, démocratisation des
Smartphones et financement accru.
Enfin, ce document montre que l’émergence des plateformes numé-
riques remet en cause les positions acquises des acteurs traditionnels
de nombreux marchés et les conduit à réagir de différentes façons pour
améliorer leur offre (amabilité des taxis par exemple). En même temps,
l’ubérisation de l’économie crée les conditions d’une plus forte concen-
tration des marchés.
T echnologique

Le second document, Taxis, VTC, Uber : la licence au cœur des conflits


depuis plus de 20 ans, présente un exemple particulier de marché bous-
culé par ce nouveau type d’entrant, le marché des chauffeurs de taxi.
ÉCONOMIE

Concrètement, l’exercice de la profession de taxi est réglementé : exigence


d’un certificat d’aptitude professionnelle et surtout délivrance d’une licence
qui donne le droit de prendre des clients à la volée sur la voie publique.
Les licences sont certes gratuites, mais leur nombre est limité par l’admi-
nistration qui les délivre. La demande étant supérieure à l’offre, les prix sont

ANNALES CCIR 2018-2019 l 299

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donc devenus très élevés (rationnement du marché, plus fraudes fiscales
et sociales par sous déclaration des courses).
SCBS
Le document 3, Évolution du prix de la licence des taxis parisiens, est
composé d’un graphique et d’un texte associé. Le graphique montre l’évo-
lution du prix de la licence des taxis parisiens. Il a atteint 240 000 euros à son
maximum pour redescendre à 200 000 euros, puis le rapport Thévenoud
C ORRIGÉ

(avril 2014) visant à assurer la cohabitation entre les taxis et les VTC inscrit


sur une application type Uber l’a fait remonter. Mais cela a été de courte
durée puisque depuis l’adoption de la loi Thévenoud (1er octobre 2014)
le prix de la licence est de nouveau orienté à la baisse (165 000 euros en
janvier 2016).
La partie texte explique l’orientation à la baisse du prix de la licence des
taxis. Certes, les conditions réglementaires d’accès et d’exercice de la
profession de taxi sont différentes de celle des VTC, mais l’entrée sur le
marché de ces derniers représente une concurrence nouvelle qui rend
moins rentable l’exercice du métier de chauffeur de taxi.

Le quatrième document, Ubérisation, emplois précaires, auto-entre-


preneurs : l’OIT tire la sonnette d’alarme, aborde les enjeux sociaux de
l’ubérisation de l’économie en rapportant les conclusions d’une étude de
l’Organisation internationale du travail (OIT).
D’un point de vue général, le rapport de l’OIT met en avant une tendance à la
précarisation de l’emploi offert par les plateformes. Il en découle plusieurs
constats, parmi lesquels : des formes d’emploi atypiques majoritairement
subies, des problèmes de santé et de sécurité pour ces travailleurs, un
faible accès à la formation professionnelle et à la protection sociale, un
risque d’enfermement dans la précarité, des conditions de travail difficiles
(travail en flux tendu, en flux décalé, travail de nuit), etc.

Le document 5, Ubérisation de l’économie : une nouvelle arme de destruc-


tion créatrice, est un tableau de données chiffrées qui illustre les effets
quantitatifs sur l’emploi de l’ubérisation de l’économie en prenant l’exemple
de la concurrence des taxis par les VTC. L’expression du titre « destruc-
tion-créatrice » apparaît justifiée. L’entrée sur le marché des VTC a eu pour
résultat de détruire des entreprises de taxis et donc des emplois. Mais
cela s’accompagne de créations d’emplois par les VTC nettement plus
importantes.

Le dernier document, Faut-il réguler les plateformes numériques ?, était


à la fois le plus long et le plus technique. De trop nombreux candidats l’ont
peu exploité, soit qu’ils l’ont mal compris, soit qu’ils l’ont négligé, pensant
T echnologique

à tort avoir déjà réuni l’ensemble des informations.


Comme son titre l’indiquait, il aborde la question de la pertinence d’une
régulation spécifique des plateformes numériques, autrement dit de l’éco-
ÉCONOMIE

nomie ubérisée.
Les arguments en faveur d’une régulation sectorielle des plateformes numé-
riques sont nombreux, mais tous ne sont pas indiscutables.
Parmi les arguments recevables : les stratégies d’évitement fiscal, le
contournement du droit du travail, les risques d’intrusion dans la vie privée
et l’usage peu transparent des algorithmes.

300 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 300 24/10/2018 14:49


Trois arguments souvent avancés sont en revanche discutables :
– la concentration des marchés de plateformes. L’économie des plate-
formes est une économie d’entreprises de grande taille expliquée par les SCBS
effets de réseau, mais les positions dominantes ainsi créées ne sont pas
illégales en soi, seul l’abus de position dominante doit être sanctionné. Et
l’outil de régulation existe déjà avec la politique de la concurrence ;
– la fluidité du marché en question. Sur les marchés de plateformes la

C ORRIGÉ
concurrence ne se ferait pas de manière habituelle par les prix, le bascule-
ment d’une plateforme vers une autre pouvant être freinée par les effets de
réseau (simple homing). Dans la pratique pourtant, les utilisateurs migrent
facilement d’une plateforme vers une autre ;
– une concurrence entravée par la constitution d’une barrière à l’entrée
générée par le fait que les utilisateurs ne voudraient pas perdre leurs
données accumulées en partant sur une autre plateforme. Cet argument
ne paraît pas vérifié. L’entrée d’une nouvelle plateforme sur le marché
n’a jamais été entravée dès lors que son offre est de qualité (meilleur
algorithme).
Enfin, un dernier argument opposé à une régulation spécifique et sectorielle :
le numérique est une technologie transversale susceptible de s’appliquer
à tous les secteurs de l’économie.

Bien identifier l’objet de la note de synthèse en s’appuyant sur le titre


de l’ensemble documentaire
Cette lecture « découverte » permet de préciser l’objet sur lequel portera
sa note de synthèse. Rappelons que s’il n’est pas obligatoire de ne poser
qu’une seule question, il est important de reformuler le titre plutôt que de le
reprendre tel quel. L’ubérisation de l’économie désigne le développement
des plateformes numériques dans de nombreux secteurs de l’économie
et notamment celui des taxis. Ces nouveaux acteurs remettent en cause
la position des acteurs traditionnels de nombreux marchés de biens et
services (SNCF, entreprises de taxis, hôteliers, etc.). Le déploiement des
plateformes a des effets sur le marché du travail et notamment sur les
conditions d’emploi et les conditions de travail. Enfin, ces plateformes
sont l’objet de certaines critiques à l’origine d’un appel à une régulation
spécifique de leurs activités. Pourtant, tous les arguments n’apparaissent
pas recevables.
Ce travail nous conduit à reformuler la consigne de la note sous la forme de
la problématique suivante : quels sont les enjeux économiques, sociaux
et juridiques de l’ubérisation de l’économie qui incarne un mouvement
de destruction-créatrice ? Dans quelle mesure, l’État doit-il exercer
son rôle de régulateur ?
T echnologique

L’ensemble documentaire dans le programme


L’ensemble documentaire était très transversal puisqu’il abordait des
ÉCONOMIE

notions présentes dans trois modules du programme, les modules 1 (Les


fondements de l’économie de marché), 2 (Les conditions et les finalités de
la croissance) et 4 (Déséquilibres économiques et politique économique).

ANNALES CCIR 2018-2019 l 301

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 301 24/10/2018 14:49


Les principaux points du programme abordés
SCBS   Module I Les fondements de l’économie de marché
   1.2 Le fonctionnement de l’économie de marché
   1.2.1 Les comportements d’offre et de demande
   1.2.2 La formation et le rôle du prix de marché
   1.2.3 Les structures de marché et les stratégies des firmes
C ORRIGÉ

  Module II Conditions et finalités de la croissance


   2.1 Les facteurs de production
    2.1.1 Le facteur travail, l’évolution de la population active et des
qualifications
   2.1.3 Le progrès technique
  Module IV Déséquilibres économiques et politique économique
  4.1 L’intervention des autorités publiques dans l’allocation des
ressources
   4.1.1 L’intervention dans le système productif
   4.3 L’intervention des autorités publiques dans la régulation
   4.3.2 Le chômage et la politique de l’emploi

II. Les critères d’évaluation de la note de synthèse

• Respecter les trois exigences fondamentales énoncées dans le règle-


ment de l’épreuve :
– La note de synthèse ne doit pas dépasser le nombre de mots indi-
qués dans la consigne, 500 mots à 10 % près en plus ou en moins.
La fourchette à respecter est donc comprise entre 450 et 550 mots. Il est
obligatoire d’indiquer le nombre de mots utilisés au début ou à la fin de sa
note de synthèse. Si le jury n’exige pas un décompte aussi précis qu’en
contraction de texte, il sanctionne lourdement les dépassements qui déna-
turent l’exercice. Attention aux notes de synthèse trop courtes, inférieures
à 450 mots. Outre le fait de ne pas respecter le format de la note à rédiger,
le candidat passe nécessairement sur de nombreuses idées importantes ;
– L’objectivité et la neutralité du propos (la synthèse n’est pas une
dissertation qui cherche à convaincre d’une position personnelle) : le
candidat exprime exclusivement les idées de l’ensemble documentaire. Il
n’ajoutera donc aucun argument ou exemple qui auraient pu être étudiés
en classe. Par ailleurs, l’emploi du « je » ou du « nous », notamment pour
annoncer le plan de sa note, est interdit, car la note de synthèse est un
compte rendu impersonnel ;
– La reformulation personnelle des idées et arguments relevés (la
synthèse n’est pas un résumé) : le candidat ne peut se contenter de
T echnologique

reprendre des morceaux de phrase des textes sous la forme d’un « copier-
coller » ou de paraphraser les documents. Par ailleurs, il ne saurait se
contenter d’exprimer les idées dans l’ordre des documents. Il convient de
ÉCONOMIE

sélectionner les idées principales, de les reformuler sans commettre de


contre sens.

• Les compétences principales attendues d’une bonne copie :


– Le respect des règles de l’exercice : une courte introduction qui annonce
l’objet de la note, un développement structuré en deux ou trois parties,
une rapide conclusion sans répétition ni ouverture, une expression écrite
302 l ANNALES CCIR 2018-2019

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soignée, tant du point de vue du respect des règles de grammaire et d’or-
thographe que de la syntaxe ;
– La détermination précise de l’objet de la note : on s’inspire du titre de SCBS
l’ensemble documentaire que l’on précise à la première lecture ;
– Un recensement exact et une reformulation pertinente des idées de l’en-
semble documentaire permettent d’évaluer la bonne compréhension des
textes à travers l’absence d’oublis majeurs, l’absence de contre-sens ou

C ORRIGÉ
de faux sens et enfin l’emploi d’un vocabulaire adapté ;
– La production d’un agencement personnel et hiérarchisé des idées dans
un plan cohérent et apparent. La note de synthèse doit avoir du sens pour
constituer un compte rendu efficace de l’ensemble documentaire. De ce
point de vue, la consigne de la note constitue une aide indispensable.

• Ces compétences sont évaluées à partir de certaines capacités :


– La capacité à prendre en compte le titre pour cerner efficacement l’objet
de la note ;
– La capacité à identifier avec exactitude les idées principales (les princi-
paux répertoires d’idées) de l’ensemble documentaire ;
– La capacité à hiérarchiser les idées en ne mettant donc pas sur le même
plan celles qui sont essentielles et celles plus accessoires sur lesquelles on
pourra passer pour rester dans le nombre de mots imparti ;
– La capacité à reformuler sans paraphrase les idées identifiées, notam-
ment par un usage approprié du vocabulaire économique ;
– La capacité à proposer un plan cohérent, clairement annoncé de façon
impersonnelle ;
– La capacité à organiser et à relier l’ensemble des idées sélectionnées
en utilisant les connecteurs logiques.

III. Lecture active et repérage des principaux répertoires d’idées


de l’ensemble documentaire

Vous ne disposez pas du temps nécessaire pour produire un recensement


totalement rédigé des idées principales de l’ensemble documentaire.
Vos différents entraînements (en devoir, en colle d’économie) vous ont
permis de tester la méthode qui vous convient le mieux : prise de note,
confection d’un tableau par répertoire d’idées, système de numéros, surli-
gnement efficace et usage d’un jeu de couleurs, etc.
Chacun doit, dans tous les cas, trouver sa méthode et s’y tenir pour accroître
les effets d’expérience. En tous les cas, il est important de rendre sa lecture
active en cherchant à classer les idées principales dans de grands réper-
toires d’idées (constat, causes, conséquences, solutions, difficultés, limites,
T echnologique

etc.).

Les principaux répertoires d’idées de cet ensemble documentaire sur


ÉCONOMIE

l’ubérisation de l’économie
1er répertoire d’idées : le phénomène de l’ubérisation de l’économie
Le doc. 1 et la fin du doc. 6 proposent une définition de l’ubérisation de
l’économie ainsi que les trois facteurs explicatifs de son surgissement
à partir de 2010.

ANNALES CCIR 2018-2019 l 303

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 303 24/10/2018 14:49


2e répertoire d’idées : l’économie numérique (ou ubérisation) crée un
mouvement de destruction-créatrice sur certains marchés de biens
SCBS et services
Les plateformes numériques remettent en cause les positions acquises
des acteurs traditionnels du marché, autrefois protégés par des barrières
à l’entrée (doc. 1). Les entreprises du secteur sont obligées de réagir par
des stratégies appropriées (SNCF et BlablaCar) pour améliorer leur offre et
C ORRIGÉ

ainsi la justifier.
Le doc. 2 présente l’exemple de l’accès à la profession de chauffeur de taxis
protégé par des barrières réglementaires (certificat d’aptitude à l’exercice de
la profession + détention d’une licence pour exercer la profession).
Le doc. 3 montre l’évolution du prix de la licence de chauffeur de taxis et
par ce biais illustre la remise en cause de la rente de situation des taxis
du fait de l’irruption des VTC Uber et autres sur le marché du transport
de personnes. La licence a atteint le prix de 220 000 euros à Paris avant
l’irruption des plateformes numériques sur le marché, mais a sensiblement
baissé depuis (165 000 en janvier 2016).

3e répertoire d’idées : ubérisation de l’économie et effets pour les


consommateurs
La tendance à la concentration des marchés de plateformes numériques
représente un enjeu pour les consommateurs (doc. 1) dont les gains ne
sont pas si certains.
La concurrence des taxis par les VTC a permis l’augmentation de l’offre
qui auparavant était rationnée par le jeu de la réglementation publique et
sa qualité, notamment par une amélioration constatée de l’amabilité des
chauffeurs de taxi (doc. 1 et doc. 5). Mais en même temps, il existe des
risques de confidentialité des données personnelles des utilisateurs et de
manipulation par des algorithmes peu transparents (doc. 6). Par ailleurs,
les docs 1 et 6 évoquent le risque d’une concurrence insuffisante entre les
plateformes numériques et le risque d’enfermement des utilisateurs dans
un unique écosystème.

4e répertoire d’idées : les enjeux de la réglementation des plateformes


numériques
L’ubérisation de l’économie ouvre le débat de la réglementation publique
et de ses instruments les plus pertinents.
Doc. 3 : une réglementation spécifique par la loi Thévenoud (2014) pour
amener les professions de taxis et de VTC à coexister en créant les condi-
tions d’une concurrence équilibrée. Aux premiers, le monopole préservée de
la maraude, aux seconds, l’obligation de travailler sur réservation préalable.
Doc. 6 : un débat sur la pertinence d’une régulation spécifique des plate-
T echnologique

formes numériques. Ne faut-il pas plutôt employer l’instrument transversal


qu’est la politique de la concurrence ?
ÉCONOMIE

5e répertoire d’idées : une dégradation de la qualité des emplois paral-


lèle à l’essor des plateformes numériques
Les documents 4 et 5 mettent en avant les créations d’emplois importantes
(exemple du marché ubérisé des taxis), mais aussi une dégradation de la
qualité de l’emploi préoccupante à bien des égards (précarité, problèmes
de santé et de sécurité des travailleurs, absence d’accès à la formation

304 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 304 24/10/2018 14:49


professionnelle et à la protection sociale complète, bas niveau des salaires,
faible taux de passage de l’emploi précaire au CDI, etc.). Pour l’OIT, cette
situation justifierait une réglementation sociale renforcée. SCBS

Construire son plan détaillé sur la base des répertoires d’idées


identifiées

C ORRIGÉ
Nous avons donc identifié 5 répertoires d’idées. Il nous faut donc les répartir
dans notre note. L’idéal est d’en avoir un nombre limité à 4 pour pouvoir
construire un plan classique en deux parties et deux sous parties chacune.
Nous en avons donc a priori une en trop. Regardons les choses de plus près.
La consigne porte donc sur l’ubérisation de l’économie. Or, notre premier
répertoire d’idées est en fait la définition de cette notion. Il paraît donc
opportun de retenir tous les éléments de définition du phénomène de l’ubéri-
sation de l’économie pour lancer notre note. Cette façon de faire présente un
double avantage, d’une part son articulation logique avec la problématique
et d’autre part, sa conformité avec la consigne du sujet.
Dès lors, nous avons bien 4 répertoires d’idées. Leur agencement peut
prendre la forme suivante qui nous paraît faire sens par rapport à la consigne.

Partie I L’économie ubérisée, un enjeu de destruction-créatrice pour


les entreprises et les consommateurs
  A – Une remise en cause des acteurs traditionnels du marché
  B – Une offre de marché de plus en plus concentrée

Partie II L’économie uberisée, un enjeu de régulation économique et


sociale
 A – Les effets de l’ubérisation sur le marché du travail et l’opportunité
d’une régulation sociale
 B – Un débat ouvert sur l’opportunité d’une régulation des acteurs du
numérique

IV. Proposition d’une note de synthèse rédigée en 548 mots

Introduction, rappel de méthode


Courte et précise, l’introduction remplit deux fonctions essentielles.
Elle énonce d’abord avec précision le problème central soulevé dans
l’ensemble documentaire, puis elle propose au lecteur un guide clair
du plan de la note. L’introduction débute par une entrée en matière
qui reprend une idée, un exemple, une donnée chiffrée en lien avec le
problème abordé par l’ensemble documentaire.
T echnologique

Le développement de l’économie dite ubérisée est porté par une réduction


ÉCONOMIE

des barrières à l’entrée sur les marchés, la démocratisation des Smartphones


et un financement accru.
Le terme « ubérisation » désigne l’irruption sur de nombreux marchés de
plateformes numériques qui permettent aux deux faces du marché, l’offre
et la demande, de se rencontrer et d’interagir.
Quels sont les principaux effets économiques et sociaux de l’ubérisation de
l’économie ? Faut-il réguler de façon spécifique les plateformes numériques ?

ANNALES CCIR 2018-2019 l 305

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 305 24/10/2018 14:49


L’uberisation de l’économie crée un mouvement de destruction-créatrice (I)
qui ouvre un débat sur la pertinence de nouvelles régulations (II)
SCBS

Le développement, rappel de méthode


Le lecteur doit repérer aisément le plan choisi lorsqu’il découvrira votre
note de synthèse. Il convient donc de l’organiser en deux ou trois parties
C ORRIGÉ

clairement annoncées par une phrase courte. Le plan proposé corres-


pond à un réagencement ordonné des idées qui permet de rendre
compte avec exactitude de l’ensemble documentaire. Il est important
que votre note de synthèse soit porteuse de sens.

Partie I L’économie ubérisée, un phénomène de destruction-créatrice

A. Une remise en cause des acteurs traditionnels


L’entrée sur leur marché des plateformes oblige les acteurs traditionnels
à se remettre en cause. Le choc concurrentiel s’avère d’autant plus violent
que certains bénéficiaient de protections réglementaires comme en atteste
la transformation du marché des chauffeurs de taxis par les VTC et la baisse
importante du prix des licences des taxis.
Les entreprises sont sommées de justifier la valeur qu’elles apportent aux
consommateurs pour survivre.

B. Une offre de plus en plus concentrée


Le principal objectif des plateformes est d’atteindre la taille critique car
leur attractivité dépend du nombre d’utilisateurs. Ces derniers se dirigent
vers l’application qui offre le plus de possibilités. Il en résulte une tendance
à la concentration des marchés qui pose la question du bien-être des
consommateurs.
Certes, la concurrence des taxis par les VTC a permis l’augmentation de
l’offre, auparavant rationnée par la réglementation, et l’amélioration de la
qualité du service. De plus, pour certains, les plateformes sont dépendantes
des consommateurs qui peuvent toujours migrer d’une plateforme à une
autre. Mais d’autres évoquent la formation de barrières à l’entrée entravant
la fluidité du marché.

Partie II L’économie ubérisée, un enjeu de régulation économique


et sociale

A. Les effets de l’ubérisation sur le marché du travail


T echnologique

Le bilan quantitatif apparaît positif. Certes, les plateformes détruisent


des emplois dans les entreprises traditionnelles, mais en créent aussi de
nouveaux. Entre 2008 et 2016, les VTC ont permis la création de nombreux
ÉCONOMIE

emplois.
Le bilan qualitatif est en revanche inquiétant. Les emplois créés se déve-
loppent en marge du salariat et sont souvent précaires. Outre leur insécurité,
ils offrent un accès limité à la protection sociale et à la formation profession-
nelle. Les rémunérations sont aussi plus faibles et le risque d’enfermement
dans la précarité est réel. L’OIT appelle à une régulation sociale du secteur.

306 l ANNALES CCIR 2018-2019

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B. La question posée d’une régulation des acteurs du numérique
La loi Thévenoud a eu pour objectif d’organiser la coexistence des taxis et
SCBS
des VTC en créant les conditions d’une concurrence plus équilibrée. Mais,
les arguments avancés en faveur d’une régulation spécifique des plate-
formes numériques sont contestés. Leur grande taille ne suffit pas à justifier
leur régulation car elle leur est consubstantielle et seul l’abus de position

C ORRIGÉ
dominante est sanctionné. La fluidité concurrentielle est plus forte qu’on ne
l’imagine et le « multi-homing » semble l’emporter. Enfin, le passage d’une
plateforme à une autre est toujours rendu possible si le service proposé
aux consommateurs est meilleur. Au final, le droit de la concurrence paraît
suffisant pour réguler les comportements des entreprises du numérique.

Conclure, rappel de méthode

La conclusion de la note de synthèse doit être courte. Il n’est pas


question, comme dans une dissertation, de faire le résumé des idées
énoncées dans le développement ou bien encore de chercher à ouvrir
des perspectives. Une bonne conclusion ne dépasse pas deux ou trois
lignes et consiste à répondre, dans l’esprit de l’ensemble documentaire,
au problème posé. Il peut être adroit d’utiliser une idée importante qui
n’aura pas eu sa place dans le développement.

Si une régulation sectorielle des plateformes ne paraît pas appropriée, les


motifs d’une régulation des acteurs du numérique sont nombreux : lutter
contre l’évasion fiscale, limiter les risques de manipulation par les algo-
rithmes, protéger les données personnelles.

T echnologique
ÉCONOMIE

ANNALES CCIR 2018-2019 l 307

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S UJET

ÉCONOMIE
Durée : 2 heures 30.
D
Doc
Il est recommandé de ne pas dépasser 10 pages.
ESSEC Les candidats ne doivent faire usage d’aucun document ; l’utilisation
de toute calculatrice et de tout matériel électronique est interdite.
Si au cours de l’épreuve, un candidat repère ce qui lui semble être
une erreur d’énoncé, il la signalera sur sa copie et poursuivra sa
composition en expliquant les raisons des initiatives qu’il sera amené
à prendre.

S
UJET

La théorie du ruissellement des richesses dans l’économie

À partir du dossier documentaire suivant, vous ferez une note de synthèse


de 500 mots environ (à plus ou moins 10 %) sur la théorie du ruissellement
des richesses dans l’économie.

Composition du dossier documentaire :


– Document 1 : Fiscalité : Macron applique-t‑il la (controversée) théorie du
ruissellement ?, europe1.fr et goodbanque.com, 25 septembre 2017
– Document  2 : « Le mythe du ruissellement économique », La Croix,
1er août 2017
– Document 3 : Un concept néolibéral très critiqué, Réforme de l’ISF : c’est
quoi cette "théorie du ruissellement" qu’appliquerait le gouvernement ?
Claire Cambier, LCl.fr, 29 septembre 2017
– Document 4 : Le ruissellement ne fonctionne pas, vive le ruissellement !
Eve-Lyne Couturier, IRIS (Institut de recherche et d’informations socioé-
conomiques), 21 juin 2015
– Document  5 : Évolution du rapport interdécile (France 1970-2016),
Observatoire des inégalités, 15 septembre 2017
– Document 6 : Niveau de vie mensuel moyen des 10 % les plus riches
(France 1970-2016), Observatoire des inégalités, 15 septembre 2017
– Document 7 : L’Évolution des écarts de revenus mensuels entre les 10 %
plus riches et les 10 % les plus pauvres, par personne (France 1970-2016),
Observatoire des inégalités, 15 septembre 2017
T echnologique
ÉCONOMIE

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S UJET
D OSSIER DOCUMENTAIRE

Document 1

Fiscalité : Macron applique-t‑il la (controversée) théorie ESSEC


du ruissellement ?

En favorisant fiscalement les Français les plus aisés en espérant qu’à


terme, tout le monde en profite, le gouvernement met en œuvre une
doctrine économique, qui a parfois montré ses limites par le passé.
L’expression n’est jamais utilisée par le gouvernement, plutôt par ses détrac-
teurs. Le budget 2018 qui sera présenté mercredi en Conseil des ministres,
serait-il en partie inspiré de « la théorie du ruissellement » ? Une doctrine
économique selon laquelle – pour aller vite –, concéder des largesses
– fiscales ou autres – aux citoyens les plus aisés profite in fine à l’ensemble
de la population, les plus défavorisés compris. Déjà appliquée par le passé,
par l’Américain Ronald Reagan et la Britannique Margaret Thatcher notam-
ment, cette théorie a parfois montré ses limites.

La « théorie du ruissellement », c’est quoi ?

Le principe est simple : plus les personnes riches ont de d’argent, plus elles
vont pouvoir, par des investissements ou par de la consommation, en faire
profiter les autres. « Quand on crée des emplois à très hauts revenus, ça finit
par bénéficier à tout le monde », formule pour europe1.fr Nicolas Bouzou,
économiste, fondateur du cabinet Asterès. « Par exemple, un ingénieur en
intelligence artificielle chez Google sera certes très bien payé, mais il va
consommer au restaurant, dans des hôtels, il va avoir des employés de
maison. Ça crée donc des emplois moins qualifiés. On estime que concer-
nant l’économie du numérique aux États-Unis, un emploi à forte valeur
ajoutée entraîne la création de quatre emplois moins qualifiés », poursuit
l’auteur de Le Travail est l’avenir de L’homme (ÉD. de L’observatoire).

« L’épargne gonfle l’investissement »

« L’argument est, en général, le suivant : les plus fortunés ont, en moyenne,


une propension marginale à épargner supérieure à celle des plus pauvres. Le
surcroît de richesse qui peut leur être accordé (via, en général, une réduction
d’impôt) viendra donc alimenter davantage l’épargne nationale que si cette
même richesse avait été distribuée à des ménages moins favorisés », expli-
quait de son côté début août dans La Croix Gaël Giraud, économiste en chef
T echnologique

de l’Agence Française de Développement, qui lui n’est pas convaincu par


la doctrine. « Or l’épargne gonfle l’investissement. Et l’investissement d’au-
jourd’hui, c’est la croissance de demain, et donc, notamment, les emplois
ÉCONOMIE

de demain. Lesquels procureront un salaire, y compris aux moins fortunés »,


poursuivait ce directeur de recherche CNRS. (…)

Deux mesures fiscales dans cette logique

Le volet fiscal du budget 2018 semble pourtant bien correspondre


à cette logique. La baisse de l’impôt sur la fortune (ISF), par le biais de la

ANNALES CCIR 2018-2019 l 309

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S UJET

non-taxation du patrimoine financier, mais aussi la mise en place d’une taxe


forfaitaire – et non plus évolutive – sur les revenus des capitaux de 30 %,
vont à l’évidence profiter aux ménages les plus aisés. Selon le gouverne-
ment, ces deux mesures coûteront 5 milliards d’euros à l’État : 3,5 milliards
de recettes en moins de l’ISF, 1,5 milliard de moins avec le prélèvement
forfaitaire unique (PFU). Coûteux, en effet.
ESSEC

« Un effet de souffle fiscal en faveur de l’investissement »

L’objectif avoué de cette fiscalité avantageuse pour les plus favorisés est
d’encourager les investissements sur le sol français et de faire revenir des
capitaux sur le territoire. « Nous voulons provoquer un effet de souffle fiscal
en faveur de l’investissement, de l’emploi et de la croissance », a assuré
en juillet le Premier ministre Édouard Philippe aux Échos. « Nous voulons
donner confiance aux acteurs économiques, avec de la visibilité et des
engagements précis. » Avec dans l’idée que toute l’économie française, et
donc à terme tout le monde, profite de ces investissements. (…)

La théorie du ruissellement, c’est efficace ?

« Si on continue de l’appliquer, c’est que cela fonctionne ». On entre là dans


un débat d’économistes. Il n’y a donc pas de réponse définitive à cette
question. « Cette théorie est parfaitement valide aujourd’hui », tranche
Nicolas Bouzou. « Ça fait consensus, si on continue de l’appliquer, c’est
que cela fonctionne ». L’économiste cite l’exemple de la Suède à la fin des
années 1970. « Le gouvernement en place a baissé très sensiblement les
taxes sur les hauts revenus, et le pays est entré dans une phase de pros-
périté sans précédent ». (…)

« Une politique qui creuse les inégalités »

Mais là où la théorie du ruissellement est la plus attaquée, c’est sur les


inégalités qu’elle génère. « C’est une politique qui creuse les inégalités »,
a asséné Michel Sapin sur Europe 1. Et c’est précisément sur ce point
que les réformes fiscales voulues par Emmanuel Macron sont critiquées.
Europe l.fr et goodbanque.com, 25 septembre 2017

Document 2
T echnologique

Le Mythe du ruissellement économique

Gaël Giraud, économiste en chef de l’Agence Française de Dévelop-


pement, directeur de recherche CNRS, professeur à l’École Nationale
ÉCONOMIE

des Ponts et Chaussées.


Lorsque, durant les années 1980, Margaret Thatcher et Ronald Reagan
réduisirent de manière considérable la fiscalité des plus fortunés, l’argument
le plus souvent invoqué par certains économistes tenait en une métaphore :
le « ruissellement » de richesse descend des plus favorisés vers les plus
pauvres. Il est certain que ces largesses fiscales ont fortement contribué

310 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 310 24/10/2018 14:49


S UJET
à l’envol de la dette publique, tant aux États-Unis qu’en Angleterre. Ont-elles
alimenté la croissance économique de ces deux pays ? Rien n’est moins
sûr car la relative prospérité nord-américaine de cette décennie fut tirée,
d’abord, par l’explosion des dépenses publiques orchestrées par le secré-
tariat d’État à la défense de l’administration Reagan. Quant à Albion – qui
quémandait le secours du Fonds Monétaire International au début des
ESSEC
années 1970 –, elle doit en grande partie son retour à meilleure fortune
au pouvoir d’attraction des capitaux induit par la dérégulation financière
de la City. De l’aveu du FMI, nous n’avons aucune preuve empirique de la
théorie du ruissellement. Quelle analyse économique sous-tend donc cette
métaphore que certains voudraient ressusciter aujourd’hui ?

Épargne, épargne, croissance, emploi…

L’argument est, en général, le suivant : les plus fortunés ont, en moyenne,


une propension marginale à épargner supérieure à celle des plus pauvres.
Le surcroît de richesse qui peut leur être accordé (via une réduction d’impôt)
viendra donc alimenter davantage l’épargne nationale que si cette même
richesse avait été distribuée à des ménages moins favorisés. Or l’épargne
gonfle l’investissement. Et l’investissement d’aujourd’hui, c’est la crois-
sance de demain, et donc, notamment, les emplois de demain. Lesquels
procureront un salaire, y compris aux moins fortunés. CQFD ?
Cette « preuve » est fausse. Certes, les plus fortunés ont une propension
à consommer inférieure à celle des plus pauvres : pour un euro de revenu
supplémentaire, le centile le plus riche, en France, dépensera en moyenne
moins de 70 centimes et épargnera donc au moins 30 centimes. Tandis
que le décile le plus pauvre dépensera la quasi-totalité de cet euro (voire
davantage car il pourra plus facilement s’endetter, en principe). Mais la part
de vérité du ruissellement s’arrête là.

Une épargne qui alimente diverses bulles

Primo, le surcroît d’épargne rendu possible par l’enrichissement des plus


riches ne vient pas, ou plus, alimenter l’investissement. Si cette relation était
automatique, l’économie mondiale ne serait pas piégée, comme elle l’est
aujourd’hui, par un sous-investissement chronique : jamais les catégories
sociales les plus favorisées n’ont autant épargné qu’aujourd’hui, et pour-
tant, depuis plus d’une décennie, l’investissement agrégé en fonction du
revenu national ne cesse de baisser dans la plupart des pays de l’OCDE.
En zone euro, d’après le FMI, il a chuté de 24 % en 2007 à 19,9 % du PIB
en 2016. Que devient, par conséquent, l’épargne surabondante ? Elle est
T echnologique

réinvestie dans des paris d’argent sur les marchés financiers et immobiliers,
où elle alimente diverses bulles : celle des dérivés financiers, par exemple,
dont le notionnel libellé en euro atteint, à lui seul, la somme extravagante de
ÉCONOMIE

80 trillions. Celle des centres-villes gentrifiés de nos capitales, également.

Un manque d’investissement dans les économies occidentales

Secundo, l’investissement n’a pas besoin d’épargne pour se financer.


L’affirmation contraire s’appuie sur l’idée – aussi répandue que fausse – selon

ANNALES CCIR 2018-2019 l 311

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S UJET

laquelle ce sont les dépôts (l’épargne) qui font les crédits. Dit autrement, une
banque, pour prêter de l’argent, aurait besoin de l’emprunter elle-même
quelque part. Au contraire, les banques commerciales (qui sont telles parce
qu’elles ont reçu de l’État une délégation du pouvoir régalien de frapper
monnaie) créent du crédit tous les jours. Et équilibrent leurs comptes ex
post en empruntant auprès de la Banque Centrale (à taux réel négatif, en
ESSEC
zone euro, aujourd’hui) la monnaie nécessaire pour apurer leurs transac-
tions avec leurs contreparties et pour satisfaire aux ratios prudentiels qui
encadrent leur pouvoir de création monétaire. (…)

Des investissements qui ne créent pas toujours d’emplois

Tertio, depuis le début des années 1990, on assiste à l’apparition de


reprises de croissance du revenu national (d’abord aux États-Unis puis,
de plus en plus souvent, en Europe) qui ne s’accompagnent pas d’une
hausse d’emplois. Il en va ainsi, par exemple, des investissements financés
entre 2001 et 2007 en faveur de projets immobiliers dépourvus de sens en
Andalousie. Les villes fantômes que ces crédits ont engendrées n’ont pas
créé d’emplois !
La Croix, 1er août 2017

Document 3

Un concept néolibéral très critiqué

Pourtant de nombreux économistes contestent son efficacité. Edwin Le


Héron, économiste et professeur des universités à Sciences Po Bordeaux,
en fait partie. Selon lui, ce « concept pas très académique » aggraverait
même les inégalités sociales. « Il est vrai que les riches consomment et
Doc
engendrent donc toute une logique industrielle, le problème c’est que cela
crée une économie particulière autour du "super riche", nous indique-t‑il.
Une personne extrêmement fortunée va acheter des produits haut de
gamme, qui demandent une certaine expertise donc dire que ça crée des
emplois non-qualifiés c’est complètement faux ».
Même paradoxe au niveau des services : leur chauffeur ne sera pas
monsieur tout le monde, « il faut qu’il présente bien », idem pour le vendeur
de produits de luxe. « Ces "super­riches" veulent des employés qui partagent
un minimum leurs codes sociaux », insiste-t‑il. Et si tout le monde ne peut
pas en profiter, c’est encore plus vrai dans les campagnes : « Ça peut
profiter à des salariés vivant à Paris, mais en plein milieu de la Corrèze,
T echnologique

ça ne créera pas d’emploi, or la pauvreté est en grande partie rurale. » Le


fameux ruissellement serait donc plutôt inégalitaire.
Thibault Gajdos, chercheur au CNRS, va également dans ce sens, dans
ÉCONOMIE

une tribune publiée dans Le Monde, il estime que le président est « bien mal
informé » : « la totale déconnexion entre l’évolution des plus hauts revenus
et ceux du reste de la population est désormais bien documentée », écrit-il.
Et de poursuivre, chiffres à l’appui : « Thomas Piketty et ses collègues ont
établi qu’entre 1983 et 2014, les 1 % les plus riches avaient capté 20 %
de la croissance économique, soit autant que les 50 % les moins riches.
C’est évidemment moins spectaculaire qu’aux États-Unis, où les 1 % les

312 l ANNALES CCIR 2018-2019

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S UJET
plus riches ont capté 50 % de la croissance, ne laissant que des miettes
aux 50 % les plus pauvres. Mais cela suffit à démontrer l’inanité de cette
"théorie du ruissellement". »
Qu’en est-il alors du potentiel d’investissement ? « On ne peut pas davan-
tage croire que cette réforme soit destinée à inciter les plus riches à investir
dans l’économie », lance d’emblée Thibault Gajdos. Et ce pour deux raisons :
ESSEC
« l’essentiel de leur patrimoine est d’ores et déjà financier » – selon les
données du World Wealth & lncome Database (WID), il est constitué, en
moyenne, de 30 % de biens immobiliers et de 70 % d’actifs financiers –,
deuxièmement « on ne comprend pas très bien pourquoi les liquidités et
biens de valeur (œuvres d’art, voitures, bijoux…) bénéficieront aussi de
cette exonération ». Un argument qui fait mouche, jusque dans les rangs
du parti En Marche. C’est ainsi que pour Joël Giraud, rapporteur du budget
à la commission des finances de l’Assemblée Nationale, l’exonération des
yachts de luxe, des lingots d’or ou encore des voitures de sport, « ce n’est
pas possible, des symboles de ce genre doivent être beaucoup plus taxés ».
Edwin Le Héron va encore plus loin : « L’épargne n’a jamais créé de l’in-
vestissement, c’est de l’idéologie néolibérale bas de gamme, ironise-t‑il.
Pour investir, il faut une raison. » Autrement dit, une bonne idée. Quand
quelqu’un veut monter une entreprise, il ne va pas frapper à la porte d’un
"super-riche" et se tournera plutôt vers une banque. Plutôt remonté contre
les pratiques du gouvernement, l’économiste pointe du doigt un procédé
cynique. « C’est finalement se dire qu’en donnant un euro à un riche, il en
fera 10 euros alors qu’un euro à un pauvre restera un euro à cause de sa
prétendue faible productivité. » Avec une telle pensée, « les riches resteront
riches et les pauvres resteront pauvres ».
« Réforme de l’ISF : c’est quoi cette “théorie du ruissellement” qu’appliquerait le gouvernement ? »,
Claire Cambier, LCl.fr, 29 septembre 2017

Document 4

Le ruissellement ne fonctionne pas, vive le ruissellement !

Le FMI a tranché. La fameuse doctrine de l’économie de ruissellement


(trickledown économies) ne fonctionne pas. Donner des avantages aux
plus riches pour qu’ils redynamisent l’économie par leurs choix judicieux
aurait été un échec sur plus de 30 ans. Il semblerait, au contraire, que
c’est en misant sur l’augmentation des revenus des 20 % les plus pauvres
qu’on parvient à avoir véritablement un effet positif sur la croissance, et ce,
tant dans les sociétés en voie de développement que dans les économies
T echnologique

avancées. (…)
En décembre dernier, c’était l’OCDE qui nous annonçait que moins d’iné-
galités était synonyme de plus de croissance économique. Elle invitait
d’ailleurs les politiciens à ne pas seulement essayer d’améliorer le sort des
ÉCONOMIE

plus démunis, mais de viser plus large, par exemple en mettant en place
des politiques qui avantagent les 40 % les plus pauvres de la société. Selon
elle, ce n’est pas en évitant l’indigence qu’on arrive à stimuler l’économie,
mais en permettant un réel enrichissement de la base.
L’an dernier, contre toute attente, un dense livre sur l’économie a connu un
succès international. Le Capital au  xxie siècle de Thomas Piketty démontrait

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S UJET

clairement comment la part de richesse accaparée par les plus riches va en Doc
augmentant aux dépens de ce que possède le reste de la société. Comment
en est-on arrivé là ? Par des choix politiques et économiques.
Selon lui, le choix que les pays industrialisés ont fait après la Deuxième
Guerre mondiale, d’imposer plus fortement les plus nantis a contribué
grandement à réduire les inégalités en améliorant la situation financière de
ESSEC
l’ensemble de la population. C’est ensuite que ça se gâte, quand les Reagan
et Thatcher sont arrivés au pouvoir avec d’autres ambitions économiques.
Plutôt que de favoriser des mesures sociales, un État fort ou un système de
taxation progressiste, ils misent sur une réduction de services, un retrait de
l’État de son rôle social et une réduction de la charge fiscale des nantis. Le
ruissellement peut ensuite s’opérer. Ces choix, censés aider tout le monde
par le ruissellement, n’ont profité qu’aux plus riches, nous dit Piketty.
Eve-Lyne Couturier, IRIS (Institut de recherche et d’informations socioéconomiques),
21 juin 2015

Document 5

Évolution du rapport interdécile (France 1970-2016)

Doc

Revenus après impôts directs et prestations sociales.


Lecture : en 2015, le niveau de vie minimum des 10 % les plus riches était
T echnologique

3,5 fois supérieur au niveau de vie le plus élevé des 10 % les plus pauvres.
ÉCONOMIE

314 l ANNALES CCIR 2018-2019

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S UJET
Document 6

Niveau de vie mensuel moyen des 10 % les plus riches


(France 1970-2016)

ESSEC

Observatoire des inégalités, 15 septembre 2017

Document 7

L’Évolution des écarts de revenus mensuels entre les 10 %


les plus riches et les 10 % les plus pauvres, par personne
(France 1970-2016)
T echnologique
ÉCONOMIE

Observatoire des inégalités, 15 septembre 2017

ANNALES CCIR 2018-2019 l 315

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ESSEC
C
ORRIGÉ
Par Frédéric Larchevêque, professeur de chaire supérieure au lycée Jules
Michelet, à Vanves.

I. À la découverte de l’ensemble documentaire


C ORRIGÉ

L’ensemble documentaire comporte 7  documents dont 4  textes et


3 graphiques pour un total de 2 500 mots environ, titres et sources des
documents compris.
Comme chaque année, la consigne indique l’objet sur lequel doit porter
la note. Il s’agissait cette année de concevoir une note sur « la théorie du
ruissellement des richesses dans l’économie ».

L’importance du titre de l’ensemble documentaire


La consigne du sujet constitue la première information sur l’objet de la note
à rédiger. Mais comme la théorie, ou plutôt doctrine, dite du ruissellement
n’est pas en soi une notion du programme, il convenait d’être attentif aux
éléments de définition proposés dans l’ensemble documentaire. Une défi-
nition précise de la doctrine du ruissellement des richesses constituait le
passage obligé pour identifier la problématique et sélectionner plus rapide-
ment les principaux répertoires d’idées au cours de sa lecture.

L’importance de la première lecture de l’ensemble documentaire


Lors de la découverte de l’ensemble documentaire, il convient d’éviter le
piège d’une lecture trop analytique. Cette première lecture doit permettre de
préciser l’objet de la note et d’identifier les principaux répertoires d’idées. Il
ne s’agit donc pas d’essayer de tout relever, de tout comprendre, mais de
sélectionner le sens général de ce que chaque document apporte comme
information principale.
Le premier document (Fiscalité : Macron applique-t‑il la (controversée)
théorie du ruissellement ?) définit la doctrine du ruissellement des
richesses, met en avant différents arguments théoriques et empiriques en
sa faveur, puis montre en quoi la politique fiscale actuelle du gouvernement
français s’en inspire.
La théorie du ruissellement est une doctrine selon laquelle l’enrichissement
des plus riches de la société finit par bénéficier à l’ensemble de la popula-
tion, y compris les plus pauvres.
Arguments avancés :
– les riches peuvent investir et consommer davantage ce qui bénéficie à l’en-
T echnologique

semble de la population ;
– le niveau élevé des plus riches est créateur d’emplois peu qualifiés ;
– les plus riches ont une propension marginale à épargner plus élevée, ce qui
permet de mettre à disposition de l’économie une épargne plus abondante
ÉCONOMIE

pour financer l’investissement et donc à terme stimuler la croissance.


Empiriquement, le cas suédois semble avaliser cette théorie, mais au prix
toutefois d’une progression des inégalités.
La politique fiscale actuellement mise en œuvre sous la présidence Macron
serait influencée par le modèle suédois : baisse de l’ISF, instauration d’une
taxe forfaitaire sur les revenus des capitaux en lieu et place d’un impôt

316 l ANNALES CCIR 2018-2019

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progressif sur les revenus du capital (5 M d’économie pour les plus aisés).
L’objectif est d’améliorer l’attractivité de la France pour les investisseurs
étrangers et nationaux. ESSEC
Le second document (Le Mythe du ruissellement économique) explique
que la doctrine du ruissellement s’est imposée au cours des années 1980
d’abord en Angleterre puis aux États-Unis. La question est posée : accorder
des baisses d’impôt aux plus riches a-t‑il permis de relancer la croissance ?

C ORRIGÉ
Faiblesse de l’argument empirique : la reprise dans ces pays repose sur
bien d’autres facteurs (dérégulation de la finance, relance des dépenses
militaires), mais le creusement des déficits publics est en revanche établi.
De plus, malgré cette politique, le sous-investissement coexiste avec une
épargne abondante. Sans la mentionner explicitement, le document fait ici
référence à la thèse de Larry Summers d’un manque de demande source
d’entrée de l’économie dans une phase de stagnation séculaire.
Les arguments théoriques avancés pour défendre la doctrine sont également
contestables :
– l’épargne abondante n’alimente pas l’investissement productif, mais plutôt
des placements financiers et immobiliers spéculatifs (bulles spéculatives et
instabilité financière) ;
– l’épargne n’est pas plus un préalable à l’investissement que les dépôts
bancaires ne sont le préalable du crédit ;
– la reprise économique des années 1990 n’a pas été riche en emplois
pérennes.
Le document 3 (Un concept néolibéral très critique) développe deux
types de critiques à l’encontre de la doctrine du ruissellement : – une critique
sociale, sa mise en œuvre crée une catégorie de super riches coupée du
reste de la société (travaux de Piketty sur l’accroissement des inégalités
du fait d’un partage devenu très inégal des fruits de la croissance) ; – une
critique économique, avec le démenti de l’idée selon laquelle, l’épargne
des plus riches serait profitable à l’ensemble de la population, via l’inves-
tissement et l’emploi de personnes peu qualifiées. Les revenus des plus
riches financent l’acquisition de biens de luxe et leur épargne alimente des
placements financiers et immobiliers beaucoup plus que l’investissement
productif.
Le document 4 (Le Ruissellement ne fonctionne pas, vive le ruisselle-
ment !) résume le bilan de cette politique mise en place au cours des années
en rupture avec les choix d’une société plus homogène construite après
la Seconde Guerre mondiale. Le FMI et l’OCDE concluent à l’échec de la
doctrine du ruissellement et appellent à la mise en œuvre d’une politique
de croissance plus inclusive, condition nécessaire pour renouer avec la
croissance.
Le graphique du document 5 (Évolution du rapport interdécile – France
T echnologique

1970-2016) montre que si les inégalités de revenu disponible s’étaient


beaucoup réduites entre 1970 et le début des années 1990 en France, ce
mouvement s’est interrompu avec même une légère remontée des inégalités.
ÉCONOMIE

Le graphique du document 6 (niveau de vie mensuel moyen des 10 %


les plus riches – France 1970-2016) montre que le niveau de vie mensuel
moyen des plus riches a beaucoup augmenté sur la période 2003-2011
(+ 700 euros environ). Il avait baissé ensuite, mais depuis 2013, on observe
de nouveau des gains significatifs.

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Le graphique du document 7 (Évolution des écarts de revenus mensuels
entre les 10 % plus riches et les 10 % les plus pauvres par personne
ESSEC – France 1970-2016) montre que l’écart entre le niveau de vie mensuel
moyen des 10 % les plus riches et celui des 10 % les plus pauvres s’est
fortement accru entre 2003 et 2011. De + 3 700 euros par mois en 2003,
l’écart s’est accru de près de 4 400 euros en 2011. Il a diminué ensuite pour
passer sous la barre des 4 000 euros en 2013. Depuis 2014, l’écart a repris
C ORRIGÉ

sa progression.

Bien identifier l’objet de la note de synthèse en s’appuyant sur le titre de


l’ensemble documentaire
Cette lecture « découverte » permet de mieux définir l’objet de la note de
synthèse. Rappelons que s’il n’est pas obligatoire de ne poser qu’une seule
question, il est important de reformuler le titre plutôt que de le reprendre
tel quel. La doctrine du ruissellement des richesses repose sur l’idée qu’en
favorisant les classes aisées par des politiques de baisse d’impôt, il en
ressortira une croissance créatrice d’emplois bénéfique à l’ensemble de
la population, y compris les plus pauvres. Elle incarne un véritable chan-
gement de paradigme économique et social en rupture avec le modèle
des années 1945 d’un État social soucieux d’instaurer une société plus
homogène. L’ensemble documentaire présente à la fois les bases de cette
doctrine et les critiques qui lui sont adressées.
Ce travail nous conduit à reformuler la consigne de la note sous la forme
de la problématique suivante : La théorie du ruissellement des richesses,
mise en œuvre depuis le début des années 1980, est-elle validée par la
réalité et la théorie économiques ? Ou bien : La théorie du ruissellement
des richesses, mise en œuvre depuis le début des années 1980, a-t‑elle
effectivement eu pour effet de relancer l’investissement, la croissance
et l’emploi au bénéfice de l’ensemble de la population ?

L’ensemble documentaire dans le programme


L’ensemble documentaire abordait une thématique très transversale. Même
si elle portait à titre principal sur le module IV, Déséquilibres économiques
et politique économique, elle empruntait aussi des notions au module II,
Conditions et finalités de la croissance.

Les principaux points du programme abordés


  Module II – Conditions et finalités de la croissance
   2.1 Les facteurs de production
    2.1.2 Le capital et l’investissement : formes et déterminants
  Module IV – Déséquilibres économiques et politique économique
T echnologique

  4.2 L’intervention des autorités publiques dans la redistribution


des richesses
    4.2.2 La correction des inégalités
ÉCONOMIE

II. Lecture active et repérage des principaux répertoires d’idées


de l’ensemble documentaire

Vous ne disposez pas du temps nécessaire pour produire un recensement


totalement rédigé des idées principales de l’ensemble documentaire.
318 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 318 24/10/2018 14:49


Vos différents entraînements (en devoir, en colle d’économie) vous ont
permis de tester la méthode qui vous convient le mieux : prise de note,
confection d’un tableau par répertoire d’idées, système de numéros, surli- ESSEC
gnement efficace et usage d’un jeu de couleurs, etc.
Chacun doit, dans tous les cas, trouver sa méthode et s’y tenir pour accroître
les effets d’expérience. En tous les cas, il est important de rendre sa lecture
active en cherchant à classer les idées principales dans de grands réper-

C ORRIGÉ
toires d’idées (constat, causes, conséquences, solutions, difficultés, limites,
etc.).

Les principaux répertoires d’idées de cet ensemble documentaire


sur la théorie du ruissellement des richesses dans l’économie
1er répertoire d’idées : la mise en pratique de la théorie du ruissellement
représente un changement de paradigme économique
Les documents 1 et 2 fournissent une définition de la théorie du ruisselle-
ment des richesses qui désigne le fait d’accroître les revenus des plus riches
(nommés implicitement « les plus productifs ») par la baisse de la fiscalité
progressive dans le but de dynamiser la croissance économique aux retom-
bées favorables à l’ensemble de la population, y compris les plus pauvres.
Cette doctrine se met en place aux États-Unis et au Royaume-Uni à partir
de la fin des années 1970 avec les élections respectives de R. Reagan et
M. Thatcher.

Le document 4 décrit plus précisément les éléments de ce changement


de paradigme. Thatcher et Reagan ont remis en cause l’État social fondé
sur des prélèvements progressifs qui s’était mis en place après la Seconde
Guerre mondiale pour lui substituer un État libéral fondé sur la théorie du
ruissellement.
Le socle théorique de la théorie du ruissellement : les plus riches ont une
propension marginale à épargner plus élevée que la population la plus
pauvre.
Donc, le fait de favoriser les plus riches en baissant les impôts progressifs
a pour premier effet d’accroître l’épargne disponible.
L’idée est que cette épargne va pouvoir financer l’investissement et donc
préparer la croissance de demain, dont les revenus et les emplois (nombreux)
vont contribuer, par effet de ruissellement, à l’amélioration de la situation
de toute la population.
Accessoirement, la hausse de leur revenu permet aux plus aisés de
consommer davantage, notamment des services domestiques créateurs
d’emplois de services à la personne (emplois peu qualifiés).
T echnologique

2e répertoire d’idées : un modèle inspirant les politiques économiques


(Doc. 2)
– aux États-Unis et au RU, deux pays qui ont les premiers mis en œuvre
cette doctrine pour reconstruire leur économie ;
ÉCONOMIE

– en Suède où la fiscalité des plus aisés a été réduite avec pour effet le
redressement de l’économie. L’exemple suédois est mis en avant par les
défenseurs de la doctrine du ruissellement ;
– en France enfin où le gouvernement actuel semble avoir repris à son
compte ce raisonnement en accordant aux plus aisés la suppression de
l’ISF (l’assiette de l’IFI qui remplace l’ISF est limitée aux biens immeubles si

ANNALES CCIR 2018-2019 l 319

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 319 24/10/2018 14:49


bien que tout ce qui est bien meuble, y compris les biens de luxe, n’est pas
fiscalisé) et la création d’une taxe forfaitaire sur les revenus des capitaux
ESSEC à la place d’une imposition progressive (gain pour les plus aisés évalué
à environ 5 M d’euros). Le but de cette politique est d’améliorer l’attractivité
fiscale de la France pour les investisseurs étrangers et nationaux.

3e répertoire d’idées : la réalité empirique fragilise le bien-fondé de la


C ORRIGÉ

théorie du ruissellement (Doc. 2)


La reprise économique aux États-Unis ou au Royaume-Uni n’est pas due
à l’efficacité de la doctrine du ruissellement, mais à d’autres motifs :
– aux États-Unis, davantage par le creusement de l’endettement public et
la hausse de la dépense publique, notamment militaire ;
– au RU, davantage par la dérégulation de la finance dont la place financière
de Londres (City) est devenue le centre.
L’abondance d’épargne générée par le modèle du ruissellement ne se
traduit pas par une reprise de l’investissement productif. La réalité est
plutôt l’excès d’épargne et la stagnation, voire le recul de l’investissement
(exemple de la zone euro où le taux d’investissement a baissé de 4 points
de PIB entre 2007 et 2016). L’épargne se transforme en placements finan-
ciers et immobiliers spéculatifs, d’où des bulles spéculatives.
La hausse du revenu des plus riches ne s’accompagne pas non plus de
créations abondantes d’emplois peu qualifiés : d’abord, la croissance
a été relativement pauvre en emplois depuis les années 1990, ensuite, la
demande de produits haut de gamme des plus riches est créatrice d’em-
plois plutôt qualifiés.

4e répertoire d’idées : un modèle théorique contesté sur le fond


Même s’il est exact que la propension marginale à épargner des plus
riches fait que leur supplément de revenu est épargné, cette épargne plus
abondante est très loin de se transformer en davantage d’investissements
productifs.
– L’investissement n’a pas besoin d’une épargne préalable. De la même
manière que les crédits à l’économie font les dépôts (et pas l’inverse),
l’investissement crée les revenus qui vont alimenter l’épargne (Doc. 2) ;
– L’investissement est dynamique lorsqu’il y a des projets que les banques
sont les plus à même de financer, beaucoup plus que les riches. (Doc. 3)

5e répertoires d’idées : le creusement contemporain des inégalités


Piketty montre qu’en France entre 1983 et 2014 les 1 % les plus riches ont
capté 20 % des revenus de la croissance, autant que les 50 % les moins
riches. C’est significatif, même si la tendance est plus lourde encore aux
États-Unis (Doc. 3).
T echnologique

Les documents 5, 6 et 7 mettent en évidence la situation des inégalités


en France sur la période 1970 – 2016 :
– Interruption de la baisse des inégalités mesurées par le rapport interdécile
ÉCONOMIE

D9/D1 depuis le début des années 1990. Le ratio était passé de 4,5 à 3,5
pour remonter à 3,6 ;
– Le niveau de vie mensuel moyen des plus riches a progressé, y compris
pendant la période de crise (+ 700 euros par mois entre 2003 et 2011 pour
les 10 % des ménages les plus riches) ;

320 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 320 24/10/2018 14:49


– Les écarts de revenus mensuels D9/D1 ont progressé de + 3 700 euros
en 2003 à 4 400 euros en 2011 pour redescendre à 4 000 euros et remonter
depuis fin 2013. ESSEC

6e répertoire d’idées : des solutions pour dynamiser la croissance


Fort de son constat d’échec de la théorie du ruissellement, le FMI préco-
nise une hausse des revenus des 20 % les plus pauvres dans toutes les

C ORRIGÉ
économies.
L’OCDE préconise une amélioration relative de la situation des 40 % les
plus pauvres.
Les deux organisations appellent à une croissance plus inclusive pour créer
les conditions d’une croissance plus forte.

Construire son plan détaillé sur la base des répertoires d’idées identifiées
Nous avons donc identifié 6 répertoires d’idées. Il nous faut donc les répartir
dans notre note. L’idéal est d’en avoir un nombre limité à 4 pour pouvoir
construire un plan classique en deux parties et deux sous parties chacune.
Nous en avons donc a priori deux en trop. Regardons les choses de plus
près pour procéder aux ajustements nécessaires.
La consigne du sujet porte sur « la théorie du ruissellement des richesses
dans l’économie ». Or, notre premier répertoire d’idées comprend la défini-
tion de cette notion ainsi que le contexte de son émergence. Il paraît donc
opportun de retenir ces éléments pour lancer notre note. Cette façon de
faire présente un double avantage, d’une part son articulation logique avec
la problématique et d’autre part, sa conformité avec la consigne du sujet.
Il nous reste 5 répertoires d’idées, mais le 6e est en fait très réduit. On le
retient donc comme conclusion. Il reste donc 4 répertoires d’idées à orga-
niser de façon logique par rapport à la consigne dans un plan en 2 parties
comprenant chacune deux sous parties. Leur agencement peut prendre la
forme suivante qui nous paraît faire sens par rapport à la consigne.

Partie I La mise en pratique de la théorie du ruissellement a eu pour


effet d’accroître les inégalités…
  A – La doctrine du ruissellement et sa mise en œuvre
  B – Le creusement des inégalités

Partie II – La doctrine du ruissellement est plus une idéologie qu’une


véritable théorie
  A – Des bases théoriques très fragiles
  B – Une doctrine infirmée par la réalité
T echnologique

Conclusion : le FMI et l’OCDE partagent ce constat d’échec et proposent


de mieux distribuer les richesses pour relancer la croissance.
ÉCONOMIE

ANNALES CCIR 2018-2019 l 321

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III. Proposition d’une note de synthèse rédigée en 530 mots

ESSEC
Introduction, rappel de méthode

Courte et précise, l’introduction remplit deux fonctions essentielles.


Elle énonce d’abord avec précision le problème central soulevé dans
C ORRIGÉ

l’ensemble documentaire, puis elle propose au lecteur un guide clair


du plan de la note. L’introduction débute par une entrée en matière
qui reprend une idée, un exemple, une donnée chiffrée en lien avec le
problème abordé par l’ensemble documentaire.

Introduction
La remise en cause de l’État social, mis en place après la Seconde Guerre
mondiale, pour lui substituer au cours des années 1980 un État libéral fondé
sur la théorie du ruissellement, constitue un changement de paradigme
complet.
Cette théorie postule qu’une baisse du niveau d’imposition des plus riches
crée une dynamique économique susceptible de bénéficier à terme à toute
la population.
Pour autant, 30 ans plus tard, peut-on dire que cette doctrine est validée
par la réalité et la théorie économiques ?
La mise en œuvre de la théorie du ruissellement a eu comme effet d’accroître
les inégalités (I) sans que ses promesses ne soient validées (II).

Le développement, rappel de méthode

Le lecteur doit repérer aisément le plan choisi lorsqu’il découvrira votre


note de synthèse. Il convient donc de l’organiser en deux ou trois parties
clairement annoncées par une phrase courte. Le plan proposé corres-
pond à un réagencement ordonné des idées qui permet de rendre
compte avec exactitude de l’ensemble documentaire. Il est important
que votre note de synthèse soit porteuse de sens.

I. La théorie du ruissellement a eu pour effet d’accroître les inégalités

A. La doctrine du ruissellement
La théorie du ruissellement a pour socle le fait admis que la propension
T echnologique

à épargner des plus riches est plus élevée que celle des pauvres. Elle en
déduit que le fait d’accroître le revenu des plus aisés en baissant leurs
impôts aura pour effet d’accroître l’épargne et donc l’investissement et la
croissance, dont les fruits vont finir par ruisseler jusqu’aux plus pauvres.
ÉCONOMIE

Ce modèle s’est mis en place sous Reagan et Thatcher au cours des


années 1980 et a inspiré les réformes menées en Suède et aujourd’hui la
politique fiscale menée actuellement en France. Le gouvernement Philippe
assume par exemple la suppression de l’ISF pour redonner confiance aux
investisseurs.

322 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 322 24/10/2018 14:49


B. Le creusement des inégalités
L’application de cette doctrine a eu pour effet d’accroître les inégalités.
ESSEC
Aux États-Unis, comme en France à un moindre degré, une minorité aisée
a accaparé l’essentiel de la croissance ces 30 dernières années. Si bien
qu’en France, les inégalités mesurées par le rapport interdécile D9/D1 ont
recommencé à augmenter après leur baisse rapide des années 1970. Même

C ORRIGÉ
la crise n’a pas freiné l’enrichissement des plus riches.

II. Les promesses de la doctrine du ruissellement n’ont pas été validées

A. Des bases théoriques très fragiles


Le postulat selon lequel l’épargne des plus riches serait investie dans
l’économie est très contestable. L’épargne n’est pas le préalable à l’inves-
tissement. La relation est inverse, c’est l’investissement qui crée les revenus
qui vont alimenter l’épargne de la même façon que les dépôts bancaires ne
font pas les crédits, mais bien le contraire.
L’investissement est dynamique lorsqu’il y a des projets que les banques
sont les plus à même de financer, beaucoup plus qu’en s’adressant aux
riches.

B. Une doctrine infirmée par la réalité


Aux États-Unis, par exemple, la reprise des années 1980 s’explique davan-
tage par le creusement de l’endettement public et la hausse de la dépense
publique, notamment militaire, que par le ruissellement.
Loin des prédictions, l’investissement productif a plutôt tendance à stagner
et la réalité est plutôt l’excès d’épargne placé dans des produits financiers
et l’immobilier avec à la clé une forte instabilité financière. La promesse de
créations abondantes d’emplois a également été déçue. Non seulement, la
croissance a été relativement pauvre en emplois depuis les années 1990,
mais, la demande de produits haut de gamme des plus riches est créatrice
d’emplois qualifiés.

Conclure, rappel de méthode

La conclusion de la note de synthèse doit être courte. Il n’est pas


question, comme dans une dissertation, de faire le résumé des idées
énoncées dans le développement ou bien encore de chercher à ouvrir
des perspectives. Une bonne conclusion ne dépasse pas deux ou trois
lignes et consiste à répondre, dans l’esprit de l’ensemble documentaire,
au problème posé. Il peut être adroit d’utiliser une idée importante qui
T echnologique

n’aura pas eu sa place dans le développement.


ÉCONOMIE

Le FMI et l’OCDE partagent ce constat d’échec de la doctrine du ruisselle-


ment et proposent de mieux distribuer les richesses pour créer les conditions
d’une croissance plus inclusive donc plus forte.

ANNALES CCIR 2018-2019 l 323

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 323 24/10/2018 14:49


S UJET

DROIT
Durée : 1 heure 30.

Aucun document n’est autorisé. L’utilisation de toute calculatrice et


SCBS de tout matériel électronique est interdite.
Si au cours de l’épreuve, un candidat repère ce qui lui semble être
une erreur d’énoncé, il la signalera sur sa copie et poursuivra sa
composition en expliquant les raisons des initiatives qu’il sera amené
à prendre.

S
UJET

PREMIÈRE PARTIE : SITUATION JURIDIQUE

Cas « Restaurant Dompedro »

Vous étudierez les situations suivantes, à l’appui de la documentation


juridique fournie en annexe, en apportant des réponses argumentées
en droit et en fait.

Monsieur Dompedro s’est installé il y a plus de 15 ans dans le quartier


de Montparnasse dans le 15e arrondissement de Paris où il a ouvert son
restaurant. Celui-ci est une adresse bien connue des riverains ouverte tous
les midis sauf le dimanche. Monsieur Dompedro est en cuisine et sa femme
est chef de salle. Elle a sous sa responsabilité plusieurs serveurs.

Ce restaurant est implanté dans un quartier vivant, à proximité d’une station


de métro et de nombreux bureaux. La clientèle des Dompedro est constituée
pour majorité, de salariés qui travaillent dans le quartier et viennent déjeuner
rapidement un plat fait maison. En effet, Monsieur Dompedro privilégie la
qualité et la fraîcheur de ses produits et propose chaque jour un menu
unique différent. Celui-ci, d’un prix de 12 euros comprend une entrée, un
plat, un dessert et un café. Ce rapport qualité prix est très apprécié, surtout
dans ce quartier, où les prix affichés peuvent être très élevés.

Situation 1
T echnologique

Pour satisfaire au mieux sa clientèle, le restaurant Dompedro veut renou-


veler son offre. Monsieur et Madame Dompedro mettent donc en place une
nouvelle formule fraîcheur en septembre (nouvelle carte, nouvelle présen-
tation). Cette dernière fonctionne et attire de nombreux nouveaux clients.
Forts de leur succès, le couple a du mal à s’en sortir, en cuisine comme
en salle. Ils décident donc d’embaucher un serveur supplémentaire et un
commis de cuisine, même s’ils ne sont pas certains que cette augmentation
DROIT

de clientèle soit pérenne.

324 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 324 24/10/2018 14:49


S UJET
En effet, elle ne peut pas être comparée aux augmentations cycliques prin-
tanières au cours desquelles les clients affluent en terrasse.
Monsieur et Madame Dompedro sont soucieux de respecter les règles de
droit de leur profession mais veulent les articuler au mieux avec les besoins
économiques de leur entreprise.
1. Présentez le type de contrat de travail adapté aux besoins du restau-
SCBS
rant Dompedro. Le commis de cuisine a travaillé au Dompedro pendant
62 jours non consécutifs, du 16 septembre au 9 décembre. Le regain de
clientèle n’est plus aussi florissant après quelques mois et des désaccords
professionnels entre Monsieur Dompedro et son commis sont apparus. Le
propriétaire du restaurant ne souhaite pas donner suite à leur relation de
travail et s’interroge sur la faisabilité de son projet.

2. Comparez la situation du cuisinier à celle décrite dans l’arrêt de la Cour de


cassation en date du 23 janvier 2008 pour en déduire les droits de ce salarié.

Situation 2

En janvier, Monsieur et Madame Dompedro constatent que la diminution de


la clientèle qu’ils avaient entrevue en décembre s’accentue. Elle commence
à se faire ressentir sur le chiffre d’affaires. Inquiets de cette situation, ils
décident de mener leur enquête. Quelle n’est pas leur surprise quand ils
découvrent que certains de leurs clients les plus fidèles les ont délaissés
au profit du nouveau restaurant solidaire associatif qui a ouvert à quelques
mètres du Dompedro début décembre. Ce dernier, ayant pour but la réin-
sertion professionnelle de jeunes déscolarisés, propose un menu à 9 euros
qui semble difficile à concurrencer. En effet, contrairement au restaurant
solidaire, Monsieur et Madame Dompedro supportent chaque mois des
charges fiscales et des frais fixes lourds rendant impossible une baisse de
prix de leur menu.

Mais leur colère monte lorsqu’un client leur rapporte les propos tenus régu-
lièrement par le gestionnaire du restaurant associatif, qui mettraient en doute
le caractère frais des produits utilisés par les Dompedro. Furieux et inquiets
pour leur réputation, ils découvrent que le site internet de l’association qui
présente le restaurant, indique : « notre ambition : vous permettre de manger
vraiment frais en plein cœur du 15e  à Paris ! ».

Craignant que la situation ne s’aggrave, le couple décide d’intenter une


action contre le restaurant solidaire.

3. Proposez une résolution du cas pratique ci-dessus : Conseillez Monsieur et


T echnologique

Madame Dompedro sur le recours envisageable et les conditions d’action


de ce dernier.

Documentation juridique :
• Annexe 1 : Convention collective des hôtels, cafés, restaurant.
• Annexe 2 : Article 01242-1 du Code du travail.
• Annexe 3 : Cour de Cassation, chambre sociale, 23 janvier 2008.
DROIT

ANNALES CCIR 2018-2019 l 325

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S UJET

DEUXIÈME PARTIE : VEILLE JURIDIQUE

Rappel du thème de veille juridique pour la session 2018 : « Les obligations


de l’entreprise dans ses relations avec les acteurs du marché. »

À partir de la veille juridique que vous avez réalisée au cours


SCBS
de l’année 2017, vous répondrez à la question suivante au travers
de quatre exemples, dont vous prendrez le soin de justifier le choix,
et en ne dépassant pas deux pages au total :

L’évolution de l’obligation d’information entre entreprise


et acteurs du marché modifie-t‑elle leurs relations ?

ANNEXES

Annexe 1 : Convention collective nationale des hôtels, cafés-restaurants


(HCR) du 30 avril 1997 (extraits)

Dernière modification du texte le 5 février 2007 – Document généré le


26 octobre 2016.

Article  14 :

Les contrats à durée déterminée sont établis conformément à la législa-


tion en vigueur. Les conditions d’emploi des extras et des saisonniers sont
précisées comme suit :

1. Extra

L’emploi d’extra qui, par nature, est temporaire est régi par les dispositions
légales en vigueur.
Un extra est engagé pour la durée nécessaire à la réalisation de la mission.
Il peut être appelé à être occupé dans un établissement quelques heures,
une journée entière ou plusieurs journées consécutives [… ].
Un extra qui se verrait confier par le même établissement des missions
pendant plus de 60 jours dans un trimestre civil pourra demander la requa-
lification de son contrat en contrat à durée indéterminée. […]
Un contrat devra être établi pour chaque vacation. Toutefois, si plusieurs
vacations sont effectuées au cours d’un mois civil, l’employeur pourra établir
un seul bulletin de paye récapitulatif qui devra ventiler toutes les vacations
T echnologique

sans que la nature juridique du contrat s’en trouve modifiée. [… ]

2. Saisonniers

Le travailleur saisonnier est un salarié employé conformément aux dispo-


sitions légales en vigueur, […] dans les établissements permanents ou
saisonniers pour des tâches normalement appelées à se répéter chaque
DROIT

année à dates à peu près fixes en fonction du rythme des saisons ou des
modes de vie collectifs. […]
Les contrats de travail à caractère saisonnier peuvent être conclus :

326 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 326 24/10/2018 14:49


S UJET
a) Pour toute la durée de la saison correspondant aux dates d’ouverture et
de fermeture de l’entreprise ;
b) Pour une période comprise dans le cadre d’une saison avec une durée
minimum de 1 mois ;
c) Pour une période correspondant à un complément d’activité saisonnière
en précisant les dates de début et de fin de la période.
SCBS
Les contrats à caractère saisonnier peuvent comporter une clause de recon-
duction pour la saison suivante. [… ]
Les contrats saisonniers conclus pendant 3 années consécutives à partir de
la date d’application de la convention collective et couvrant toute la période
d’ouverture de l’établissement pourront être considérés comme établissant
avec le salarié une relation de travail d’une durée indéterminée sur la base
des périodes effectives de travail.

Annexe 2 : Article 01242-1 du Code du travail (extrait)

En application du 3° de l’article L. 1242-2, les secteurs d’activité dans


lesquels des contrats à durée déterminée peuvent être conclus pour les
emplois pour lesquels il est d’usage constant de ne pas recourir au contrat
à durée indéterminée en raison de la nature de l’activité exercée et du carac-
tère par nature temporaire de ces emplois sont les suivants :
[… ]
4° L’hôtellerie et la restauration, les centres de loisirs et de vacances ; […]
6° Les spectacles, l’action culturelle, l’audiovisuel, la production cinémato-
graphique, l’édition phonographique ; […]
8° L’information, les activités d’enquête et de sondage ; […]

Annexe 3 : Cour de cassation, chambre sociale, 23 janvier 2008


(extraits)

Attendu que s’il résulte de la combinaison des articles susvisés du code


du travail que dans les secteurs d’activité définis par décret ou par voie de
convention ou d’accord collectif étendu, certains des emplois en relevant
peuvent être pourvus par des contrats de travail à durée déterminée lorsqu’il
est d’usage constant de ne pas recourir à un contrat à durée indéterminée,
en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature tempo-
raire de ces emplois, et que des contrats à durée déterminée successifs
peuvent, en ce cas, être conclus avec le même salarié, l’accord-cadre, qui
a pour objet […] de prévenir les abus résultant de l’utilisation de contrats
à durée déterminée successifs, impose de vérifier que le recours à l’uti-
lisation de contrats successifs est justifié par des raisons objectives qui
T echnologique

s’entendent de l’existence d’éléments concrets établissant le caractère par


nature temporaire de l’emploi ; [… ]

Attendu que pour débouter Mme X… de ses demandes tendant à la requa-
lification de ses contrats en contrat de travail à durée indéterminée et au
paiement d’indemnités de rupture et de congés payés, la cour d’appel
a retenu que la société SAM monégasque des ondes appartenait au secteur
DROIT

de l’audiovisuel, visé à l’article D. 121-2 du code du travail, dans lequel


l’employeur peut recourir à des contrats à durée déterminée dits d’usage ;
que la salariée avait occupé au sein de cette société un emploi de journaliste

ANNALES CCIR 2018-2019 l 327

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 327 24/10/2018 14:49


S UJET

pigiste […] ; que dans ces conditions, en ce qui concerne son emploi de
journaliste pigiste, il était d’usage constant de ne pas recourir à un contrat
à durée indéterminée eu égard au caractère par nature temporaire des
C
programmes télévisés ;

Qu’en se déterminant ainsi par des motifs inopérants tirés du caractère


SCBS
temporaire des programmes de télévision sans rechercher si l’emploi de
journaliste pigiste occupé par la salariée dans le secteur de l’audiovisuel
faisait partie de ceux pour lesquels il est d’usage constant de ne pas recourir
au contrat à durée indéterminée et si l’utilisation de contrats à durée déter-
minée successifs était justifiée par l’existence d’éléments concrets et précis
établissant le caractère par nature temporaire de cet emploi, la cour d’appel
n’a pas donné de base légale à sa décision [… ].
T echnologique
DROIT

328 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 328 24/10/2018 14:49


C ORRIGÉ
Par Pascal Simon-Doutreluingne, professeur au lycée René Cassin, à
SCBS

Strasbourg.

PREMIÈRE PARTIE : SITUATION JURIDIQUE

C ORRIGÉ
Remarques préliminaires :

Les compétences recherchées étaient :


– une restitution précise des connaissances théoriques ;
– une analyse pertinente des différentes annexes pour les confronter au
cas ;
– un respect de la forme de la réponse (syllogisme).
Il était donc indispensable d’utiliser la démarche du syllogisme pour répondre
aux différentes demandes :
– réponses justifiées en fait (travail de qualification des faits : compréhension
et analyse du contexte en déterminant la pertinence des faits par rapport
à la recherche de solution) ;
– réponses justifiées en droit (connaître et maîtriser son cours pour identifier
quelle règle de droit est nécessaire à la solution proposée).

La formulation du sujet SCBS (anciennement ESC Troyes) confirme la struc-


ture de son questionnement :
– des questions différentes dans leurs forme et fond ;
– une certaine progressivité ;
– une utilisation d’annexe comme appui aux réponses.

Éléments de correction :

Remarques liminaires :

Il s’agissait ici d’identifier la règle de droit applicable à une situation donnée


puis le type de contrat de travail adapté à une situation donnée. Le candidat
devra trier dans ses connaissances : CDI, CDD (les conditions de recours
au CDD sont considérées comme connues des candidats). Le secteur de
l’hôtellerie-restauration à propos des contrats saisonniers et des contrats
d’extra présentent des spécificités mais qui ne devaient pas être maitrisées.
Il pouvait donc s’agir d’un « secteur économique comme un autre ».

NB : comme évoqué plus haut la question sur la 1re situation ne relevait


T echnologique

pas de l’application d’un syllogisme : « Présentez le type de contrat… » puis


« Comparez la situation… ».

Situation 1

Pour satisfaire au mieux sa clientèle, le restaurant Dompedro veut renouveler


son offre. Monsieur et Madame Dompedro mettent donc en place une nouvelle
DROIT

formule fraîcheur en septembre (nouvelle carte, nouvelle présentation). Cette


dernière fonctionne et attire de nombreux nouveaux clients. Forts de leur succès,
le couple a du mal à s’en sortir, en cuisine comme en salle. Ils décident donc

ANNALES CCIR 2018-2019 l 329

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 329 24/10/2018 14:49


d’embaucher un serveur supplémentaire et un commis de cuisine, même s’ils ne
sont pas certains que cette augmentation de clientèle soit pérenne.
SCBS En effet, elle ne peut pas être comparée aux augmentations cycliques printanières
au cours desquelles les clients affluent en terrasse.
Monsieur et Madame Dompedro sont soucieux de respecter les règles de droit de
leur profession mais veulent les articuler au mieux avec les besoins économiques
de leur entreprise.
C ORRIGÉ

Le problème juridique et les points de droit

Deux questions vous étaient ainsi posées :


– Quel type de contrat serait le plus adapté pour une activité de restauration ?
– Quelle rupture de ce contrat peut être envisagée pour tenir compte des
intérêts du restaurateur ?

L’utilisation des annexes (cadre légal, conventionnel et jurisprudentiel)


permettait largement de répondre à ces questions sans risque de se tromper :
– Le code du travail (annexe 2) qui envisage le type de contrat saisonnier
dans un secteur où son usage est reconnu ;
– L’annexe 1 (convention collective nationale des hôtels, cafés, restaurants
du 30 avril 1997) qui prévoit l’emploi saisonnier et la sanction d’une requali-
fication du contrat de travail en CDI en cas de manquement aux obligations
légales et conventionnelles, notamment le nombre de jours travaillés par
trimestre.
– L’arrêt du 23 janvier 2008 de la chambre sociale de la cour de cassation
qui précise qu’un contrat saisonnier doit correspondre à « l’existence d’élé-
ments concrets et précis établissant le caractère par nature temporaire de
[l’emploi saisonnier] ».

Réponses aux questions


Question 1 : D’après l’article D. 1242-1 du code du travail, Monsieur Dompedro
exerçant dans le secteur de la restauration peut recourir à un contrat à durée
déterminé dans les limites fixées par la convention collective et l’arrêt de
la cour de cassation, soit « pas plus de 60 jours dans un trimestre civil » et
l’embauche pour un emploi réellement saisonnier.

Question 2 : Le commis ayant effectué plus de 60 jours entre le 16 septembre


et le 9 décembre (soit moins d’un trimestre), Monsieur Dompedro devra
envisager :
– s’il n’y a pas de requalification en CDI, un CDD ne peut être rompu avant
son terme sauf faute grave et dans ce cas, le désaccord ne pourrait être un
juste motif ;
T echnologique

– s’il y a requalification, le restaurateur devra donc établir un motif reposant


sur une cause réelle et sérieuse, en tentant d’établir une perte de confiance
du fait du désaccord.

Remarques liminaires :

Il s’agissait là de la résolution d’un cas pratique avec application d’un


DROIT

syllogisme.
Il faut prendre réellement garde à la formulation des questions pour éviter
que le jury ne sanctionne une réponse non appropriée à la question.

330 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 330 24/10/2018 14:49


Situation 2

En janvier, Monsieur et Madame Dompedro constatent que la diminution de la SCBS


clientèle qu’ils avaient entrevue en décembre s’accentue. Elle commence à se
faire ressentir sur le chiffre d’affaires. Inquiets de cette situation, ils décident
de mener leur enquête. Quelle n’est pas leur surprise quand ils découvrent que
certains de leurs clients les plus fidèles les ont délaissés au profit du nouveau

C ORRIGÉ
restaurant solidaire associatif qui a ouvert à quelques mètres du Dompedro début
décembre. Ce dernier, ayant pour but la réinsertion professionnelle de jeunes
déscolarisés, propose un menu à 9 euros qui semble difficile à concurrencer.
En effet, contrairement au restaurant solidaire, Monsieur et Madame Dompedro
supportent chaque mois des charges fiscales et des frais fixes lourds rendant
impossible une baisse de prix de leur menu.

Mais leur colère monte lorsqu’un client leur rapporte les propos tenus
régulièrement par le gestionnaire du restaurant associatif, qui mettraient en doute
le caractère frais des produits utilisés par les Dompedro. Furieux et inquiets pour
leur réputation, ils découvrent que le site internet de l’association qui présente le
restaurant, indique : « notre ambition : vous permettre de manger vraiment frais
en plein cœur du 15e  à Paris ! ».

Craignant que la situation ne s’aggrave, le couple décide d’intenter une action


contre le restaurant solidaire.

Les faits

Les fluctuations de la situation économique et financière de l’entreprise


« Restaurant DOMPEDRO » amènent l’entrepreneur à étudier la concurrence.
Il se rend compte que, non seulement un nouveau restaurant associatif
a ouvert non loin de son établissement, mais que celui-ci propagerait des
informations portant atteintes à sa réputation. Il estime que la baisse sensible
du chiffre d’affaires qu’il a noté, en est la conséquence.

Le problème juridique et les points de droit

L’activité commerciale d’un restaurant associatif peut-elle être constitutive


d’un acte de concurrence déloyale ?

La concurrence déloyale, qui repose notamment sur le paracommercialisme


et le dénigrement, est sanctionnée par la responsabilité civile extracontrac-
tuelle (anciennement délictuelle) à l’article 1240 du code civil. C’est l’action
en concurrence déloyale qui repose sur un préjudice (réalité du dommage
subi en termes de réduction d’activité, de notoriété), un lien de causalité
T echnologique

entre l’activité de l’association (qui est le fait générateur – le prix bas, et la


communication) et la réalité du dommage.

La solution (proposition)
Monsieur Dompedro devra prouver les éléments établissant la responsabilité
civile extracontractuelle, à savoir : un dommage, un fait générateur et un lien
de causalité. À ces conditions, il pourra obtenir la cessation du comporte-
DROIT

ment déloyal et réparation de ses préjudices matériel et moral.

ANNALES CCIR 2018-2019 l 331

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 331 24/10/2018 14:49


Il faudra ainsi prouver que malgré son objet associatif non-lucratif, l’asso-
ciation pratique une concurrence déloyale en pratiquant des prix bas et, par
SCBS ailleurs, que les rumeurs propagées sont constitutives d’un dénigrement.

DEUXIÈME PARTIE : VEILLE JURIDIQUE


C ORRIGÉ

L’évolution de l’obligation d’information entre entreprise


et acteurs du marché modifie-t‑elle leurs relations ?

Les candidats pouvaient utiliser plusieurs problématiques potentielles autour


de relations qui seraient simplifiées ou d’agents qui se trouveraient respon-
sabilisés car détenteurs d’une plus grande liberté (1re partie). On pouvait citer
le renforcement de l’information précontractuelle ou la jurisprudence autour
de la promesse d’embauche.

À l’inverse (2e partie) le candidat pouvait arguer que cette évolution ne


modifie en rien les relations qui restent fondamentalement des relations
économiques, comme par exemple la loyauté du franchiseur envers son
franchisé ou la réglementation sur les relations entre sociétés-mères et les
sous-traitants.

Cet effort de structuration permet d’éviter l’accumulation d’exemples sans


« justification ».
T echnologique
DROIT

332 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 332 24/10/2018 14:49


S UJET
DROIT
Durée : 1 heure 30.

Il est recommandé de ne pas dépasser 10 pages.


Les candidats ne doivent faire usage d’aucun document ; l’utilisation ESSEC
de toute calculatrice et de tout matériel électronique est interdite.
Si au cours de l’épreuve, un candidat repère ce qui lui semble être
une erreur d’énoncé, il la signalera sur sa copie et poursuivra sa
composition en expliquant les raisons des initiatives qu’il sera amené
à prendre.

S UJET

PREMIÈRE PARTIE :
MISE EN SITUATION JURIDIQUE

Cas OCD

Oasis Concept Design (OCD) est une agence parisienne de communication


et marketing digital spécialisée dans la conception de site Web, la refonte de
site Internet et l’évolution des systèmes de communication digitale de ses
clients. OCD maîtrise également la création de contenu Web et la gestion
des réseaux sociaux en accompagnant ses clients pour réaliser une commu-
nication digitale efficace et rentable.
OCD est réputée pour son expertise Web, son efficacité technique et en
particulier la création de sites Internet au graphisme clair et aéré pour un
rendu visuel très professionnel.
La force de vente d’OCD constitue un autre atout de l’entreprise : les
commerciaux privilégient des conseils et un contact rapprochés pour être
toujours à l’écoute de leurs clients. Le directeur commercial d’OCD, René
Demogue, souhaite bénéficier de votre expertise et vous demande d’étudier
certains dossiers délicats en donnant un avis motivé et synthétique sur les
difficultés juridiques qu’ils soulèvent.

Questions :
T echnologique

1. René Demogue a prêté une importante somme d’argent en espèces à l’un


de ses amis, Victor Lustig. Cette somme d’argent devrait permettre à celui-ci
de mener à bien son projet de création d’une société de conseil informa-
tique qui lui tient particulièrement à cœur. La remise des fonds a eu lieu
lors d’un déjeuner auquel participait l’un de leurs amis communs, François
Gény. Quelques mois plus tard, les relations entre René et Victor se sont
détériorées. Désireux de récupérer son argent, René téléphone à Victor pour
demander de rembourser la somme prêtée mais celui-ci refuse catégorique-
DROIT

ment, en prétextant qu’il ne lui doit rien. Aucun contrat n’a été signé entre
les deux hommes. René dispose toutefois d’une lettre écrite et signée par

ANNALES CCIR 2018-2019 l 333

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 333 24/10/2018 14:49


S UJET

Victor qui se termine par la phrase suivante : « Je te remercie, cher René,
de bien vouloir me faire l’avance de ces 20 000 euros dont j’ai tant besoin
pour ma future société de conseil ».
C
René Demogue peut-il espérer obtenir le remboursement de la somme
prêtée à Victor Lustig ?
ESSEC
2. Un litige oppose René Demogue à la société de transport Yescar. René
avait en effet organisé un rendez-vous à Rouen avec l’un de ses clients
pour finaliser et conclure un important contrat portant sur la création d’un
nouveau site Web. Mais l’autocar de la société Yescar que devait prendre
René est parti avec 3 heures de retard. Le rendez-vous a été annulé et le
contrat a finalement été attribué à un concurrent d’OCD. Yescar a adressé
aux passagers une lettre d’excuses précisant que ce retard exceptionnel
est le résultat de l’état d’ébriété du conducteur de l’autocar qu’il a fallu
remplacer à la hâte par l’un de ses collègues. René Demogue voudrait
assigner la société Yescar en responsabilité.

René Demogue peut-il engager la responsabilité contractuelle de la


société Yescar ?

3. Suite à sa mésaventure avec la société Yescar, René Demogue a décidé


d’acheter une nouvelle voiture pour son usage personnel, via un site de vente
en ligne professionnel. La commande a été confirmée le 25 février 2018 et
le véhicule lui a été livré le 10 avril 2018. Mais René Demogue a constaté
que les sièges de l’arrière du véhicule sont inamovibles alors que tous les
véhicules de ce type présentés par le vendeur, notamment sur Internet,
disposent de sièges amovibles. René Demogue vous fait part de sa décep-
tion : passionné de sports extrêmes, il souhaitait utiliser son véhicule pour
transporter du matériel technique souvent volumineux…

René Demogue peut-il arguer de sa qualité de consommateur pour


obtenir le remplacement du véhicule ?

SECONDE PARTIE : VEILLE JURIDIQUE

« L’obligation de bonne foi de l’entreprise à l’égard de ses partenaires »

Vous préciserez les implications de cette obligation dans un bref dévelop-


pement en illustrant vos propos par plusieurs exemples issus notamment
T echnologique

de votre activité de veille juridique.


DROIT

334 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 334 24/10/2018 14:49


C ORRIGÉ
Par Pascal Simon-Doutreluingne, professeur au lycée René Cassin, à
ESSEC

Strasbourg.

PREMIÈRE PARTIE :

C ORRIGÉ
MISE EN SITUATION JURIDIQUE

Cas OCD

Oasis Concept Design (OCD) est une agence parisienne de communication et


marketing digital spécialisée dans la conception de site Web, la refonte de site
Internet et l’évolution des systèmes de communication digitale de ses clients.
OCD maîtrise également la création de contenu Web et la gestion des réseaux
sociaux en accompagnant ses clients pour réaliser une communication digitale
efficace et rentable.
OCD est réputée pour son expertise Web, son efficacité technique et en particulier
la création de sites Internet au graphisme clair et aéré pour un rendu visuel très
professionnel.
La force de vente d’OCD constitue un autre atout de l’entreprise : les commerciaux
privilégient des conseils et un contact rapprochés pour être toujours à l’écoute
de leurs clients. Le directeur commercial d’OCD, René Demogue, souhaite
bénéficier de votre expertise et vous demande d’étudier certains dossiers
délicats en donnant un avis motivé et synthétique sur les difficultés juridiques
qu’ils soulèvent…

Remarques préliminaires :

Les compétences recherchées étaient :

– une restitution précise des connaissances théoriques ;


– une analyse pertinente des différentes annexes pour les confronter au
cas ;
– un respect de la forme de la réponse (syllogisme).

Il était donc indispensable d’utiliser la démarche du syllogisme pour répondre


aux différentes demandes :
– réponses justifiées en fait (travail de qualification des faits : compréhension
et analyse du contexte en déterminant la pertinence des faits par rapport
à la recherche de solution) ;
– réponses justifiées en droit (connaître et maîtriser son cours pour identifier
quelle règle de droit est nécessaire à la solution proposée).
T echnologique

NB : les réponses proposées dans les rubriques « Problématique et points


de droit » sont ici assez précises pour que vous puissiez envisager l’étendue
de la réponse.

1 – René Demogue a prêté une importante somme d’argent en espèces à l’un


de ses amis, Victor Lustig. Cette somme d’argent devrait permettre à celui-ci de
mener à bien son projet de création d’une société de conseil informatique qui lui
DROIT

tient particulièrement à cœur. La remise des fonds a eu lieu lors d’un déjeuner
auquel participait l’un de leurs amis communs, François Gény. Quelques mois

ANNALES CCIR 2018-2019 l 335

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 335 24/10/2018 14:49


plus tard, les relations entre René et Victor se sont détériorées. Désireux de
récupérer son argent, René téléphone à Victor pour demander de rembourser la
ESSEC somme prêtée mais celui-ci refuse catégoriquement, en prétextant qu’il ne lui doit
rien. Aucun contrat n’a été signé entre les deux hommes. René dispose toutefois
d’une lettre écrite et signée par Victor qui se termine par la phrase suivante : « Je
te remercie, cher René, de bien vouloir me faire l’avance de ces 20 000 euros
dont j’ai tant besoin pour ma future société de conseil ».
C ORRIGÉ

René Demogue peut-il espérer obtenir le remboursement de la somme prêtée


à Victor Lustig ?

Éléments de correction :

Remarques liminaires :
La formulation extrêmement générale de la question amène un effort de
rigueur dans la réponse : le candidat n’est pas guidé dans ce qui doit être
une démonstration rigoureuse pour proposer une solution à Loïc Julien. Il
faut alors envisager un certain nombre d’hypothèses et particulièrement
soigner le travail de qualification des faits.
Ces différentes hypothèses sont souvent sources de confusion.

Les faits

Il y a eu la remise d’une somme de 20 000 euros, entre deux amis sans


autre écrit qu’une lettre mentionnant l’intention d’emprunter cette somme
« me faire l’avance de ces 20 000 euros ». La remise des fonds s’est faite
en présence d’un tiers.
Le bénéficiaire du prêt refuse le remboursement au motif « qu’il ne doit plus
rien ».

Le problème juridique et les points de droit

La question porte sur les possibilités offertes au prétendu préteur de recou-


vrer la somme : quel(s) mode(s) de preuve est (sont) admissible(s) pour
prouver un prêt de 20 000 euros.
Il s’agit donc de lui indiquer quels modes de preuve (articles 1358 du code
civil et suivants) seront pertinents pour obtenir gain de cause et donc de
rappeler :
– Le principe « Hors les cas où la loi en dispose autrement, la preuve peut
être apportée par tout moyen » ;
– L’exception « l’acte juridique portant sur une somme ou une valeur excé-
T echnologique

dant un montant fixé par décret doit être prouvé par écrit sous signature
privée ou authentique. »

…qui comporte elle-même une série de restriction : « Les règles prévues


à l’article précédent reçoivent exception en cas d’impossibilité matérielle
ou morale de se procurer un écrit, s’il est d’usage de ne pas établir un écrit,
ou lorsque l’écrit a été perdu par force majeure. » et « Il peut être suppléé
DROIT

à l’écrit par l’aveu judiciaire, le serment décisoire ou un commencement de


preuve par écrit corroboré par un autre moyen de preuve. »

336 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 336 24/10/2018 14:49


La solution (proposition)
Monsieur DEMOGUE aurait dû prévoir la rédaction d’un contrat de prêt
ESSEC
pour prouver l’acte juridique consistant en la remise d’une somme d’argent
contre remboursement.
Il devra alors utiliser la lettre (commencement de preuve par écrit) et le témoi-
gnage pour prouver ce qu’il avance. Au surplus, il invoquera l’impossibilité

C ORRIGÉ
morale de prouver par écrit, ayant prêté à son ami.

2 – Un litige oppose René Demogue à la société de transport Yescar. René avait
en effet organisé un rendez-vous à Rouen avec l’un de ses clients pour finaliser et
conclure un important contrat portant sur la création d’un nouveau site Web. Mais
l’autocar de la société Yescar que devait prendre René est parti avec 3 heures
de retard. Le rendez-vous a été annulé et le contrat a finalement été attribué à un
concurrent d’OCD. Yescar a adressé aux passagers une lettre d’excuses précisant
que ce retard exceptionnel est le résultat de l’état d’ébriété du conducteur de
l’autocar qu’il a fallu remplacer à la hâte par l’un de ses collègues. René Demogue
voudrait assigner la société Yescar en responsabilité.

René Demogue peut-il engager la responsabilité contractuelle de la société


Yescar ?

Remarques liminaires :
La formulation extrêmement précise de la question ne pouvait induire une
autre réponse que sur les caractéristiques et conditions d’application de la
responsabilité contractuelle et les possibilités d’exonération.

Les faits

Un salarié de la société OCD n’a pu se rendre à la signature d’un contrat


avec un client, du fait d’un retard important du bus qui le transportait. Le
client déçu se retourne vers un autre fournisseur pour faire affaire.
Ce retard est causé par un remplacement inopiné du conducteur incapable
de conduire.

Le problème juridique et les points de droit

La question portait expressément sur la responsabilité contractuelle : Quelles


sont les conditions pour engager la responsabilité contractuelle d’un pres-
tataire de service et obtenir réparation d’un dommage matériel ?
Le transporteur avait une obligation contractuelle envers la société OCD qu’il
n’a pu exécuter comme prévu. L’article 1103 du code civil est le fondement
de toute responsabilité civile contractuelle. Par ailleurs, à l’article 1231-1
T echnologique

du même code « Le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de
dommages et intérêts soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit
à raison du retard dans l’exécution, s’il ne justifie pas que l’exécution a été
empêchée par la force majeure. »
Enfin, le préjudice de perte de chance ne se répare pas intégralement. Il
se limite à la somme, correspondant à la seule chance perdue, et dont le
montant est souverainement apprécié par les juges du fond.
DROIT

ANNALES CCIR 2018-2019 l 337

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 337 24/10/2018 14:49


La solution (proposition)
Monsieur DEMOGUE pourra exiger outre le remboursement du prix du billet
ESSEC
de bus l’indemnisation de sa perte de chance : celle relevant du préjudice
relevant de la probabilité raisonnable de finaliser le contrat avec ce futur
client.
La société de transport devra donc pour éviter cette indemnisation établir
C ORRIGÉ

une cause d’exonération (peu probable) ou pour le moins réduire au


maximum le montant de cette réparation.

3 – Suite à sa mésaventure avec la société Yescar, René Demogue a décidé


d’acheter une nouvelle voiture pour son usage personnel, via un site de vente
en ligne professionnel. La commande a été confirmée le 25 février 2018 et le
véhicule lui a été livré le 10 avril 2018. Mais René Demogue a constaté que les
sièges de l’arrière du véhicule sont inamovibles alors que tous les véhicules de
ce type présentés par le vendeur, notamment sur Internet, disposent de sièges
amovibles. René Demogue vous fait part de sa déception : passionné de sports
extrêmes, il souhaitait utiliser son véhicule pour transporter du matériel technique
souvent volumineux…

René Demogue peut-il arguer de sa qualité de consommateur pour obtenir le


remplacement du véhicule ?

Remarques liminaires :
La formulation extrêmement précise de la question « la qualité de consom-
mateur » revenait à une question de cours sans réelle difficulté : quelle est
la définition légale du consommateur ?

Les faits

René DEMOGUE acquiert une voiture pour se déplacer et pratiquer sa


passion sportive. Il trouve son bonheur sur un site internet professionnel.
Mais il se rend compte que contrairement à  tous les autres modèles
présentés, celui qu’il a acheté ne permet pas d’abaisser les sièges arrière
et il ne peut alors ranger son matériel de sport.

Le problème juridique et les points de droit

La question était simple et directe : Monsieur DEMOGUE a-t‑il la qualité de


consommateur ?
L’article liminaire du code de la consommation définit le consommateur
comme « toute personne physique qui agit à des fins qui n’entrent pas dans
le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agri-
T echnologique

cole ; […] »

La solution (proposition) :
Monsieur DEMOGUE peut être considéré comme un consommateur et
pourra alors réclamer le remplacement du véhicule (garantie légale de
conformité) ou exiger le remboursement (délai de rétraction).
DROIT

338 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 338 24/10/2018 14:49


SECONDE PARTIE : VEILLE JURIDIQUE

« L’obligation de bonne foi de l’entreprise à l’égard de ses partenaires » ESSEC

Le sujet portait sur la bonne foi de l’entreprise dans ses relations avec ses
partenaires.
Après avoir rappelé ce que pouvaient être ces derniers, l’introduction pouvait

C ORRIGÉ
utilement rappeler que le nouvel article 1104 élargit aujourd’hui le périmètre
d’application du principe de bonne foi, en disposant que « les contrats
doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi. Cette disposition
est d’ordre public ».
Il y a donc une bonne fois contractuelle (principe fondateur depuis 1804)
mais aussi précontractuelle. Cette distinction pouvant faire l’objet de deux
parties.
Enfin, l’introduction pouvait évoquer aussi la notion proche de loyauté et
ainsi envisager les éléments utiles de la veille juridique.

On peut citer notamment les affaires concernant :

– L’emballage du « savon tradition Alep » dans l’arrêt de la chambre commer-


ciale de la Cour de cassation du mercredi 1er mars 2017 ;
– Le prix d’accès à une salle de sport non exact dans l’arrêt de la chambre
criminelle de la Cour de cassation du 11 juillet 2017 ;
– Le respect des droits d’auteur par un site de téléchargement et partage
en ligne d’œuvres protégées dans l’affaire rendue par la Cour de Justice de
l’UE le 14 juin 2017 ;
– Enfin, le fait qu’employeur n’est plus en droit de demander la nullité du
contrat de travail faute d’avoir vérifié la véracité des informations avant l’em-
bauche, dans l’affaire jugée par la chambre sociale de la cour de cassation,
le 9 juin 2017.
T echnologique
DROIT

ANNALES CCIR 2018-2019 l 339

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 339 24/10/2018 14:49


S UJET

MATHÉMATIQUES
Code sujet : 285
Durée : 4 heures.

La présentation, la lisibilité, l’orthographe, la qualité de la rédaction,


ESCP la clarté et la précision des raisonnements entreront pour une part
Europe
importante dans l’appréciation des copies.
Les candidats sont invités à encadrer dans la mesure du possible
les résultats de leurs calculs. Ils ne doivent faire usage d’aucun
document : l’utilisation de toute calculatrice et de tout matériel
électronique est interdite. Seule l’utilisation d’une règle graduée est
autorisée.
Si au cours de l’épreuve, un candidat repère ce qui lui semble être
une erreur d’énoncé, il la signalera sur sa copie et poursuivra sa
composition en expliquant les raisons des initiatives qu’il sera amené
à prendre.
L’épreuve est constituée de quatre exercices indépendants.

S
UJET
MATHÉMATIQUES
T echnologique

1/4 Tournez la page S.V.P.

340 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 340 24/10/2018 14:49


S UJET
ESCP
Europe

MATHÉMATIQUES

2/4
T echnologique

ANNALES CCIR 2018-2019 l 341

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 341 24/10/2018 14:49


S UJET

ESCP
Europe
MATHÉMATIQUES

3/4
Tournez la page S.V.P.
T echnologique

342 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 342 24/10/2018 14:49


S UJET
ESCP
Europe

MATHÉMATIQUES

4/4
T echnologique

ANNALES CCIR 2018-2019 l 343

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CO

ESCP
Europe
C ORRIGÉ
Par Bernard Delacampagne, professeur de mathématiques au lycée
Pui
b. O

CORRIGÉ ESCP Europe T à Amiens.


Madeleine-Michelis, ANNÉE 2018
Pou
EXERCICE 1
C ORRIGÉ

Do
0 , donc les matrices
1.a. Avec les notations de l’énoncé, les matrices de vérifient ad  bc  c.(i
de  ne sont pas inversibles.
1 1 Pui
b. Pour la matrice   , on a :
 1 1  Ne
a  d  1  1  0 et ad  bc  1 1  1 1  0
 1 1 
Pour la matrice   , on a :
 1 1  Pui
a  d  1  1  0 et ad  bc  1 1   11  0
1 1  1 1  Il v
Donc les matrices   et   appartiennent à .
  1  1   1 1 
c. On a :
 1 1  1 1  2 0   1 1 1 1  2 2  Le
     et    
 1 1  1 1  0 2   1 1 1 1  2 2 
2 0  On
La matrice   n’appartient pas à , car on a :
 0 2 
(ii)
ad  bc 2  2   0 4 , donc ad  bc  0
 2 2 
La matrice   n’appartient pas à , car on a :
 2 2 
a  d  2  2  4 , donc a  d  0 3.a
Ainsi, la somme et le produit de deux matrices de  n’appartiennent pas nécessairement aus
à .
d. On a :
 a b   a b   a 2  bc ab  bd  Il v
M2     2 
 c d   c d   ac  cd bc  d  A
Puisque M appartient à , on a :
ad  0 et ad  bc  0
Il en résulte que :
a 2  bc  a 2  ad  a  a  d   a  0  0
ab  bd  b  a  d   b  0  0
MATHÉMATIQUES

ac  cd  c  a  d   c  0  0 Ain
T echnologique

bc  d  ad  d  d  a  d   d.0  0
2 2 A2
Ainsi vient-il, en notant 0 la matrice carrée nulle d’ordre 2 : b. O
M2  0
On en déduit donc, pour tout entier n  2 , que :
 Mn M 2
M n  2 0M n  2  0

2.a. Pour la matrice A, on a :


ad  bc 1 5  2  2   9

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344 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 344 24/10/2018 14:49


CORRIGÉ ESCP Europe T ANNÉE 2018

Puisque ad  bc  0 , A est inversible.


b. On a : ESCP
 1 2   1 0   2 2  Europe
K  A  3I     3   
 2 5   0 1   2 2 
Pour la matrice K, on a :
a  d 2  2 0 et ad  bc  2  2  2  2  0

C ORRIGÉ
Donc la matrice K appartient à .
c.(i) Puisque K A  3I , on a, pour tout entier naturel n :
 K  3I 
n n
A
Puisque A et 3I commutent pour la multiplication des matrices, la formule du binôme de
Newton s’applique et donne :
n n

A n  K  3I  
n
k 0
n k
 k K  3I  
 
n k

k 0
n
3n  k  K k
k
Puisque K appartient à , on a, d’après la question 1.d, pour tout entier k  2 :
Kk  0
Il vient donc, pour tout entier naturel n non nul :
1

An 

k 0
n
3n  k   K k 
k
 
n
0
 
n
3n   K 0  3n 1   K 
1
 
3n I  3n 1 nK

Le résultat précédent reste vrai si n  0 , car :


30 I  310K  I A0
On a donc, pour tout entier naturel n :
An  3n I  3n 1 nK
(ii) Il résulte de la question précédente qu’on a, pour tout entier naturel n :
 1 0  n 1  2 2   3n  2n3n 1 2n3n 1 
An  3n I  3n 1 nK 
3n   3 n   
0 1  2 2   2n3 3  2n3n 1 
n 1 n

3.a. On a, d’après la question précédente, en remplaçant n par 2, ou par un calcul direct, tout
aussi rapide :
 3 12 
A2   
 12 21
Il vient donc :
 3 12   1 2 1 0  3     12  2 
A 2  A   I  0          0   0
 12 21   2 5   0 1    12  2  21  5   
3      0   3    9
12  2  0    6
 
 
12  2  0    6
21  5    0   21  5  9
MATHÉMATIQUES

Ainsi a-t-on montré l’existence d’un unique couple  α,β    6, 9  pour lequel
T echnologique

A 2  A   I est la matrice nulle.


b. On a, d’après la question précédente :

2/15

ANNALES CCIR 2018-2019 l 345

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 345 24/10/2018 14:49


CORRIGÉ ESCP Europe T ANNÉE 2018 CO

2 1 
A 2  6A  9I 0  6A  A 2 9I  A  6I  A  9I  A  I  A  I
ESCP 3 9 
Europe 1 2 1 1.a
La dernière égalité ci-dessus assure que A est inversible et que A  I  A .
3 9
c. Puisque K A  3I , il vient, d’après la question précédente :
2 1 2 1 2 1 1 1 1
A 1  I  A  I   K  3I   I  K  I  I  K b. O
C ORRIGÉ

3 9 3 9 3 9 3 3 9
La fin de cette question semble hors-programme, puisqu’elle utilise des puissances négatives
de matrices ; en voilà néanmoins une solution possible :
Il e
Lorsque n  * , on a :
n pou
1 1 
A
 n
A 

1  n
 I  K  , avec n  
3 9 
*

c. P
1 1
Puisque I et K commutent pour la multiplication des matrices, la formule du binôme de
3 9
Newton s’applique et donne :
n n On

 
n  n k k nk
1 1   n   1   1   n  k 1
 k   1  
n k
A 
 I K    I   K
 K
3 9  k 0
 k  3   9  k 0
  3
Il v
Puisque K appartient à , on a toujours, pour tout entier k  2 :
Kk  0
Il vient donc, pour tout n  * : Ce
1
La

nk n  n 1
 n  k 1  n   1   n   1 
An  k   1   Kk      K0      K 3n I  n3n 1 nK

la c
k 0
  3  0  3   1  3
Ainsi la formule trouvée à la question 2.c(i) pour tout n   est encore valable pour tout
n. 2.a

4.a. D’après la question 3.a, on sait que :


A 2  6A  9I  0
2
Donc le polynôme X  6X  9 est un polynôme annulateur de A. b. P
3 est la seule racine de ce polynôme, car celui-ci s’écrit, pa r identité remarquable :
X 2  6X  9   X  3
2

Ca
Puisque toute valeur propre de A est racine de tout polynôme annulateur de A, la seule valeur
propre possible  de A est   3 .
x
b. Cherchons s’il existe des matrices non nulles X    telles que AX  3X ; on a :
 y
 1 2  x  x  x  2y
 3x 2x  2y 0
AX 3X   
  3     xy u, v
  2 5 y
  y
   2x 5y 3y   5x 5y 0
1
  est par exemple une matrice non nulle vérifiant AX  3X , donc 3 est effectivement
1
MATHÉMATIQUES

valeur propre de A, et l’ensemble des vecteurs propres associés à cette valeur propre 3
T echnologique

 x  
est   / x    . Ain
x
  

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346 l ANNALES CCIR 2018-2019

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CORRIGÉ ESCP Europe T ANNÉE 2018

EXERCICE 2
ESCP
1.a. On a, par définition de I0 : Europe
e
e  t 2  e2 1 e2  1

1
t dt   I0
 2 1 2 2
 
2
b. On a, comme produit de nombres positifs ou nuls sur 1, e :

C ORRIGÉ
t  1, e  t  ln t   0
n

Il en résulte, par positivité de l’intégrale d’une fonction positive sur le segment 1, e que,
pour tout entier naturel n, on a :
In  0
c. Par définition de I n , et par linéarité de l’intégrale, on a, pour tout entier naturel n :

 
e e e e
 t  ln t  dt   t  ln t  dt   t  ln t   t  ln t  dt 
 t  ln t   ln t  1 dt
n 1 n n 1 n n
I n 1  I n 
1 1 1 1

On a, puisque t  ln t   0 et ln t  1  0 sur 1, e :


n

t  1, e  t  ln t   ln t  1  0
n

Il vient donc, par négativité de l’intégrale d’une fonction négative sur le segment 1, e :
n   In 1  In  0
Ceci prouve que la suite  I n n 0 est décroissante.
La suite  I n  n 0 est décroissante, minorée par 0 d’après la question 1.b, donc le théorème de
la convergence monotone assure que la suite  I n n 0 est convergente.

2.a. Compte-tenu de la formule de dérivation  u n   nu ' u n 1 , on obtient, pour tout t  1,e :


'

 lnt 
n
1
fn'  t
  n  1  ln t 
  n  1
n

t t
b. Par définition de I n , on a, pour tout entier naturel n :
e
I n 1   t  ln t 
n 1
dt
1

Calculons I n 1 à l’aide d’une intégration par parties, en posant, pour tout réel t de 1, e :
 ln t 
n

 t  f
n t  ln t  u '  t
 f n'  t  n  1
n 1
u
t
1
v t  t
'
vt  t2
2
u, v, u et v étant continues sur 1, e , il vient :
' '

 ln t   1 t 2 dt
e e e n

 
1 n 1 
dt   t 2  ln t     n  1
t  ln t 
n 1
I n 1 
 2  t 2
MATHÉMATIQUES

1 1 1

1 2 n 1 e 1 2 n 1
t  ln t  
n

2 1
 e  dt e  In
T echnologique

2 2 2
Ainsi a-t-on, après multiplication par 2 de cette égalité, pour tout entier naturel n :
2I n 1   n  1 In  e 2   

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ANNALES CCIR 2018-2019 l 347

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CORRIGÉ ESCP Europe T ANNÉE 2018 CO

c. En donnant à n la valeur 0 dans l’égalité   de la question précédente, on a :


ESCP e2
2I1  I 0 
Europe Do
Compte-tenu de la valeur de I0 calculée à la question 1.a, il vient :
1 2 1  2 e2  1  e2  1
I1
2
 e  I0 
2
e 
2 

4 On
C ORRIGÉ

d. Puisque la suite  I n  n 0 est décroissante, on a, pour tout entier naturel n : ent


I n 1  In
Il résulte de la relation   qu’on a, pour tout entier naturel n :
2In 1   n  1 I n 1   n  3 I n 1  2In 1   n  1 I n  e 2  2I n   n  1 In   n  3 I n
L’inégalité de droite donne, pour tout entier naturel n :
e2
 In
n3
L’inégalité de gauche donne, pour tout entier naturel n : 3.a
e2
I n 1 
n3
Et donc, en remplaçant n par n  1 , pour tout entier naturel n : En
e2
In 
n2
Ainsi a-t-on établi, pour tout entier naturel n, l’encadrement suivant : En
e2 e2
 In 
n3 n2
e. On a : Soi
e2 e2
lim
 lim  0
n  n  3 n  n  2

L’encadrement de la question précédente et le théorème d’encadrement assurent que suite


b. D
 In n 0 converge et que :
lim I n  0
n 
En
En multipliant l’encadrement de la question précédente par n, on obtient, pour tout entier
naturel n :
ne 2 ne 2
 nI n  On
n3 n2
On a :
ne 2 ne2 ne 2
lim lim  lim  e 2 e 2 puis, de même, lim  e2
n  n  3 n  n n  n  n  2
L’e
L’encadrement précédent et le théorème d’encadrement assurent que la suite  nIn  n 0 con
converge et que :
lim nI n  e 2
n 
MATHÉMATIQUES

f. On sait que : 4. M
e2  1
T echnologique

I0 
2
En utilisant la relation   , on obtient, pour tout entier naturel k :

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348 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 348 24/10/2018 14:49


CORRIGÉ ESCP Europe T ANNÉE 2018

e 2   k  1 I k
I k 1 
2 ESCP
Donc, pour tout entier naturel k non nul : Europe
e 2  kI k 1
Ik 
2
On peut alors complèter le script Scilab, afin qu’il calcule et affiche I n pour une valeur de n

C ORRIGÉ
entrée par l’utilisateur, de la manière suivante :

n=input('donner une valeur à n:')


I=(exp(2)-1)/2
for k=1:n
I=(exp(2)-k*I)/2
end
disp(I)

3.a. Rappelons l’encadrement obtenu à la question 2.d, pour tout entier naturel n :
e2 e2
 In 
n 3 n2
En remplaçant n par n  1 dans cet encadrement, et en le multipliant par 2, il vient :
2e 2 2e 2
 2In 1 
n4 n 3
En ajoutant ces deux encadrements, on obtient, pour tout entier naturel n :
2e 2 e2 2e 2 e2
  2I n 1  I n  
n 4 n 3 n 3 n 2
Soit, après simplification, et pour tout entier naturel n :
 3n  10  e2  2I  I   3n  7  e 2
 n  3  n  4  n+1 n
 n  2  n  3 
b. D’après la relation   de la question 2.b, on a, pour tout entier naturel n :
w n  n  e2  nI n   n  2In 1  I n 
En multipliant l’encadrement de la question 3.a par n, on obtient, pour tout entier naturel n :
n  3n  10  e 2 n  3n  7  e 2
 w n  2I n 1  In  
 n  3 n  4  n
 n  2  n  3
On a :
n  3n  10  e 2 3n 2 e 2 n  3n  7  e2
lim  lim lim
 3e 2 3e 2 puis, de même, lim  3e2
n   n  3  n  4  n  n 2 n  n   n  2  n  3 

L’encadrement précédent et le théorème d’encadrement assurent que la suite  w n n 0


converge et que :
lim w n  3e 2
n 
MATHÉMATIQUES

4. Montrons par récurrence la propriété Pn , définie pour tout entier naturel n, par :
T echnologique


 n

 1  2 
n k
n!  2
In  e  1
2 n 1
 k! 
 k 0 

6/15

ANNALES CCIR 2018-2019 l 349

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 349 24/10/2018 14:49


CORRIGÉ ESCP Europe T ANNÉE 2018 CO

Initialisation : On
ESCP P0 est vraie car on a, d’après la question 1.a :


Europe  0

 1  2  1   2   1 2
0 k 0
0!  2
201 
e
k!
 1  e 2
 2 0!
 1

 2
 e  1 I0 Do
 k 0    Il e
Hérédité :
C ORRIGÉ

On suppose Pn vraie, pour une valeur de l’entier naturel n, c’est-à-dire :


b.


 n

 1  2 
n k
n!  2
In  e  1 tira
2n 1  k! 
 k 0 
On montre que Pn 1 est vraie, c’est-à-dire : L’é



 2   1
n 1
deu
 1  n  1!  2
n 1 k

I n 1  e
2n  2  k! 
 k 0  L’é
On a, d’après la relation   et l’hypothèse de récurrence : tira



 2   1
n
e 2 n  1  1 n!  2
n k
e2 n  1
I n 1   In    e c. D
2 2 2 2 2n 1  k! 
 k 0  on


 n

e  1  n  1!  2  2   1 
2 n 1 k

  e On
2 2n  2  k! 
 k 0 


 n

 1  n  1!  e2  2   e 
n 1 k 2
2n  2 Et
  1
2 n 2
 k! 2  1  n  1! 
n 1

 k 0 


 n

     e2    e 2    1
n 1 k n 1
 1 n  1 !  2  2 Il e

2n  2  k!  n  1! 
 k 0 


 n 1

 1  n  1!  e2  2   1
n 1 k

 Do
2n  2  k!  Il e
 k 0 
Ceci assure que Pn 1 est vraie.
D’après le principe de récurrence, on peut conclure que, pour tout entier naturel n, on a :


n

 1 n!  2  2   1 
n k
2.a
In  e
2n  1  k! 
 k 0 
On
EXERCICE 3
MATHÉMATIQUES

En
1.a. A l’issue de la première expérience, l’urne contient une boule rouge si on a tiré une boule
blanche (remise avec une boule blanche supplémentaire), et deux boules rouges, si on a tiré
T echnologique

une boule rouge (remise avec une boule rouge supplémentaire), donc on a bien :
X1     1, 2

7/15

350 l ANNALES CCIR 2018-2019

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CORRIGÉ ESCP Europe T ANNÉE 2018

On a :
1 1
P  X
1  P  B1
1 et P  X
1  P  R
2 1
ESCP
2 2 Europe
Donc X1 suit la loi uniforme sur 1, 2 .
Il en résulte, d’après les formules du cours appliquées avec n  2 , que :
n 1 3 n2 1 3 1
E  X1    et V   X1   

C ORRIGÉ
2 2 12 12 4
b. L’événement  X 2  1 est réalisé si on a tiré deux boules blanches lors des deux premiers
tirages, donc on a :
 X2  1  B1  B2
L’événement  X 2  2 est réalisé si on a tiré une boule blanche et une boule rouge lors des
deux premiers tirages, donc on a :
 X 2  2    R 1  B 2    B1  R 2 
L’événement  X 2  3 est réalisé si on a tiré deux boules rouges lors des deux premiers
tirages, donc on a :
 X 2  3  R 1  R 2
c. D’après la question précédente, tous les cas de tirages de deux boules ayant été envisagés,
on a :
X 2    1,3
On a :
1 2 1
P  X 2 1 P  B1  B2  P  B1  PB1  B2    
2 3 3
Et :
1 2 1
P  X 2 3 P  R1  R 2  P  R1  PR1  R 2    
2 3 3
Il en résulte, puisque X 2    1,3 , que :
1 1 1
P  X 2 
2  
1  P  X 2 
1  P  X 2 
3 
1  
3 3 3
Donc X 2 suit la loi uniforme sur 1, 3 .
Il en résulte, d’après les formules du cours appliquées avec n  3 , que :
n 1 4 n2 1 8 2
E X2    2 et V  X2   
2 2 12 12 3

2.a. Puisque X1  X 2 , on a :
P  X1  2   X 2  1  P     0
On a également, puisque X 2  X1  1 :
P  X1  1   X 2  3  P     0
MATHÉMATIQUES

En utilisant les lois marginales de X1 et de X 2 , on en déduit successivement que :


1 1
P  X1  1   X 2  1   0 
T echnologique

3 3
1 1
P  X1  2    X 2  3   0 
3 3
8/15

ANNALES CCIR 2018-2019 l 351

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CORRIGÉ ESCP Europe T ANNÉE 2018 CO

1 1 1
P  X1  1   X 2  2 
 0 
ESCP 2 3 6
1 1 1
Europe P   X1  2    X 2  2     
3 6 6 4.a
La loi conjointe du couple  X1 , X 2  est donc donnée par le tableau :
rou
bou
C ORRIGÉ

X2
1 2 3 P  X1  x 
X1
1 1 1 Po
1 0
3 6 2 bla
1 1 1 rajo
2 0
6 3 2
1 1 1
P  X 2  y 
3 3 3 b.

b. On a :
X
cov 
X1 , X 2  E  X1X 2   E  X1  E  X 2  tou
On a déjà vu, aux questions 1.a et 1.c que :
3
E  X1   et E  X 2   2
2
On a :
1 1 1 1
E  X1X 2    xyP  X1  x    X 2  y   11  1  2   2  2   2  3 
xX1    3 6 6 3
yX 2   
c. M
1 1 2 10
   2
3 3 3 3
Il vient donc : Ini
10 3 10 1 P1
cov  X1 , X 2    2  3 
3 2 3 3 Hé
Puisque cov  X1 , X 2   0 , les variables aléatoires X1 et X 2 ne sont pas indépendantes. On

3.a. Pour tout entier n  1 , l’événement  X n  1 est réalisé si on tire une boule blanche lors
On
de chacun des n tirages, donc on a, pour tout entier n  1 ,
 Xn  1  B1  B2    Bn
On
b. D’après la question précédente et la formule des probabilités composées, il vient :
P  Xn  1
 P  B1  B2   Bn P  B1  PB1  B2  PB1 B2 Bn1  Bn 
1 2 n 1 D’a
     
2 3 n 1 n  1
P
De même, pour tout entier n  1 , l’événement  X n n  1 est réalisé si on tire une boule
MATHÉMATIQUES

rouge lors des n tirages, donc on a, pour tout entier n  1 :


 X n  n  1  R1  R 2   R 2
T echnologique

Puis : Ce
P  Xn  n  1
 P  R1  R 2   R n P  R1  PR1  R 2  PR1 R2 Rn1  R n  D’a

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CORRIGÉ ESCP Europe T ANNÉE 2018

1 2 n 1
     
2 3 n 1 n  1 ESCP
Europe
4.a. Pour tout entier k   2, n  1 , P Xn  k 1  X n 1  k  est la probabilité de tirer une boule
rouge dans une urne contenant k  1 boules rouges et n  2 boules (les deux initiales et n
boules rajoutées), donc :

C ORRIGÉ
k 1
P Xn  k 1  Xn+1  k  =
n2
Pour tout entier k   2, n  1 , P Xn  k   X n 1  k  est la probabilité de tirer une boule
blanche dans une urne contenant k boules rouges, n  2 boules (les deux initiales et n boules
rajoutées), et donc n  2  k boules blanches ; ainsi :
n 2k
P Xn  k   Xn 1  k  =
n2
b. Pour tout k   2, n  1 , l’événement  X n 1  k  est réalisé si et seulement si l’événement
Xn  k ou l’événement  X n k  1 est réalisé ; il vient donc, par incompatibilité, pour
tout k   2, n  1 :
P  Xn 1  k  P   X n 1 k    X n k    X n 1 k    X n k  1 
P  X n 1 k   Xn k   P  X n 1  k 1
k    X n 
 X n k  PXn k  X n 1 
 P k   P  X n 
k  1 P Xn  k 1  X n 1  k 
n 2k k 1
 P   Xn  k   P  Xn  k  1
n2 n2
c. Montrons par récurrence la propriété Pn , définie pour tout entier n  1 , par :
X n suit la loi discrète uniforme sur 1, n  1
Initialisation :
P1 est vraie car, d’après la question 1.a, X1 suit la loi discrète uniforme sur 1, 2 .
Hérédité :
On suppose Pn vraie, pour une valeur de l’entier n  1 , c’est-à-dire :
X n suit la loi discrète uniforme sur 1, n  1
On montre que Pn 1 est vraie, c’est-à-dire :
X n 1 suit la loi discrète uniforme sur 1, n  2
On sait, d’après la question 3.b, en remplaçant n par n  1 , que :
1 1
P   X n
1 
1 et P  X n 1 n  2 
n2 n2
D’après la question précédente, et l’hypothèse de récurrence, on a, pour tout k   2, n  1 ,
n 2k k 1 n 2k 1 k 1 1
P  X n
1 
k P  X
n k   P  X n k  1    
n2 n2 n  2 n 1 n  2 n 1
MATHÉMATIQUES

n  2  k  k 1 n 1 1
  
 n  2  n  1  n  2  n  1 n  2
T echnologique

Ceci assure que Pn 1 est vraie.


D’après le principe de récurrence, on peut conclure que, pour tout entier n  1 , la variable

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CORRIGÉ ESCP Europe T ANNÉE 2018 CO

aléatoire Xn suit la loi discrète uniforme sur 1, n  1 .


ESCP
Europe 5. Le programme Scilab est complété comme suit, afin qu’il simule une réalisation de la Sou
variable X n où l’entier n est entré au clavier.

n=input('donner une valeur à n:')


Pui
C ORRIGÉ

r=1;b=1
for k=1:n
l’in
if rand()<r/(r+b) then r=r+1
else b=b+1
end
end Ain
x=r b. S
disp(x)

6.a. Si on échange la couleur des boules, l’expérience est inchangée, et Yn devient X n , donc
Pui
les variables aléatoires Xn et Yn sont de même loi.
b. Pour tout entier n  1 , X n  Yn est le nombre de boules contenues dans l’urne après la n- l’in
ième expérience ; comme il y avait initialement deux boules dans l’urne, et qu’il en a été
rajouté n à l’issue de la n-ième expérience, on a, pour tout entier n  1 :
Xn  Yn  n  2
c. D’après la question précédente, on a : 3.a
Yn  X n  n  2
pos
Puisque Yn s’écrit sous la forme  Yn aX n  b avec a  0 , il en résulte que le coefficient de
corrélation linéaire   X n , Yn  de X n et Yn vaut :
  Xn , Yn   1

u, v
EXERCICE 4

1.a. Puisque Z est une variable aléatoire qui suit la loi exponentielle de paramètre  , les
formules du cours donnent :
b. O
1 1
E  Z   et V  Z   2
 
La formule de Koenig-Huygens s’écrit :
Et
 Z  E  Z2    E  Z  
2
V

On en déduit que :
2
1 1 2
E  Z2  
V  Z   E  Z  
2
   2 Ca
2    

2.a. f est continue sur , 0 comme fonction constante nulle, et continue sur  0, 
MATHÉMATIQUES

Il e
comme produit et composée de fonctions qui le sont ; de plus, f est continue en 0 car :
lim f  x  lim 0 0 f  0 
T echnologique

x 0 x 1
Donc f est continue sur  .
f est positive ou nulle sur  , car on a :

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354 l ANNALES CCIR 2018-2019

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CORRIGÉ ESCP Europe T ANNÉE 2018

 2 xex  0 si x  0
f x  
0  0 si x < 0 ESCP
Sous réserve de convergence, on a : Europe
 
 f  x  dx
  xg  x  dx
 
 1
Puisque, d’après la question 1, E  Z   xg  x  dx existe et vaut , par linéarité de

C ORRIGÉ
 

l’intégrale,  f  x  dx converge et on a :

  1
 f  x  dx    xg  x  dx  E  Z     1
  
Ainsi f est bien une densité de probabilité.
b. Sous réserve de convergence, l’espérance de la variable aléatoire U est :
 
E  U   xf  x  dx
  x 2g  x  dx
 

2
Puisque, d’après la question 1, E  Z2    x 2 g  x  dx existe et vaut

, par linéarité de
 2
l’intégrale, E  U  existe, et on a :
2 2
x 2 g  x  dx  E  Z2    

E  U    
 2 

A
3.a. Pour tout réel A  0 , calculons 
0
x 3e x dx à l’aide d’une intégration par parties, en
posant, pour tout réel x de  0, A  :
u  x   x3 u '  x   3x 2
1
v'  x   e x v  x    e x

u, v, u ' et v ' étant continues sur  0, A  , il vient :
A A e A

  
 x 3 x  1 A 3 A 3
x 3e x dx 
  e    3x 2 ex dt 
 e  x 2 ex dx
0  0 0    0

b. On a, d’après la question 1 :
A A

  x e
3 3 3 3 2 6
lim x 2 e x dx  lim 2 x
dx  E  Z2   2  2  4
A   A   2 2   
0 0
Et :
 A3 A   1   A 3 
lim   e   lim   4  A   0
A   e 
A 
     
Car :
ex
lim A   et lim   (croissance comparée)
A  x3 x 
MATHÉMATIQUES

Il en résulte de la question précédente que :


A
 A 3 A 3 A 2 x  6
 
T echnologique

lim x 3e x dx lim   e  x e dx   4


A   
   0  
A 
0

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ANNALES CCIR 2018-2019 l 355

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CORRIGÉ ESCP Europe T ANNÉE 2018 CO

 b. D
ESCP
Ceci prouve que 
0
x 3ex dx converge et que :
 6
Europe  0
x 3e x dx 
4 On
Sous réserve d’existence, on a :
E  U2   
 
x 2f  x  dx
  x 3g  x  dx
 
C ORRIGÉ

On a : c. I
0 0
 x g  x  dx 
3
 0 dx 0
 
Et, d’après le calcul de l’intégrale précédente :
   6 6 Co
 x 3g  x  dx 
  x e dx 
2 3 x
 2  x 3e x dx  2  
0 0 0 4 2
Il en résulte que E  U 2  existe et que :
6 Pui
E  U 2    x 3g  x  dx   x 3g  x  dx 
0 

 0 2
Puisque E  U 2  existe, la variance de U existe.
Ca
c. La formule de Koenig-Huygens s’écrit :
 U  E  U2    E  U 
2
V

Soit encore, compte-tenu de la question précédente et de la question 2.b Ain
2
6 2 2
 2     2
V  U
  
5.a
4.a. Si x < 0 , on a :
x x
Fx
  t  dt 
 f 0 dt 0
 
Si x  0 , on a : Pui
x 0 x x
Fx  f  t  dt  0dt    te dt   te dt
2 t 2 t
2.b
  0 0
x
Calculons 
0
tet dt à l’aide d’une intégration par parties, en posant, pour tout réel t de
 0, x  : Pos
u t  t u t 1
'

1
v t  e
' t
v  t    e t Par

u, v, u ' et v ' étant continues sur  0, x  , il vient :
x x x x

 
 t t  1 x  1  x 1 1
tet dtx     e    e t dt   e x    2 e t    ex  2 e x  2 Ain
0 0 0     0   
Il vient donc : b. P
 x 1 1 
F  x    2   e x  2 e x  2   xe x  e x  1  1  1  x  e x
MATHÉMATIQUES

    
Ainsi a-t-on montré que :
T echnologique

Pui
1  1   x  e x si x  0
x   F  x    d’a
0 si x  0

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356 l ANNALES CCIR 2018-2019

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CORRIGÉ ESCP Europe T ANNÉE 2018

b. D’après la question 2.b, on a :


2 2 2 2 2 4
U  E U  E  U  U      U   0 U ESCP
      Europe
On a donc l’égalité :
4
  
P  U  E  U   E  U   P  0  U   
 λ 

C ORRIGÉ
c. Il résulte de la question précédente que :
4 4
  
P  U  E  U   E  U   P  0  U  
   
F    F  0

Compte-tenu de la question 4.a, il vient :
4 4   4
  
P  U  E  U   E  U   F    F  0   1   1     e   0  1  5e4
  
Puisque e4  54, 6 , il vient :
5
1  5e 4  1   1  0,1 0,9
54, 6
Car :
5 5
  0,1
54, 6 50
Ainsi a-t-on montré que :
 
P  U  E  U   E  U    0, 9

5.a. Par définition de U n et par linéarité de l’espérance, on a :


1 n  1 n
 
E Un  E   Uk    E  Uk 
 n k 1  n k 1
Puisque les variables aléatoires U k suivent toutes la même loi que U, et d’après la question
2.b, il vient :
1 n 1 2
 
E Un   E U 
n k 1 n
 nE  U  
E U 

 2a

Posons alors :
1
Wn  U n
2
Par linéarité de l’espérance, on a :
1  1 1
2  2
 
E  Wn  E  U n   E U n   2a a
2
1
Ainsi Wn  U n est un estimateur sans biais du paramètre a.
2
b. Par définition de Wn , de U n et par propriété de la variance, il vient :
1 1 1 1 n  1  n 

  V   Uk   2 V   Uk 
MATHÉMATIQUES

V  Wn  V  Un  V Un
2  4 4  n k 1  4n  k 1 
T echnologique

Puisque les variables aléatoires U k suivent toutes la même loi que U et sont indépendantes, et
d’après la question 3.c, il vient :

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CORRIGÉ ESCP Europe T ANNÉE 2018

1 n
1 1 n
1 1 2 a2
ESCP
V  Wn  
4n 2
 V  U   4n  V  U  
k 1
k 2
4n
 nV  U  V  U  
k 1 4n 2
4n  2

2n
Europe Il en résulte que :
a2
lim V  Wn   lim
0
n  n  2n

c. L’inégalité de Bienaymé-Tchebychev permet d’écrire, pour tout   0 , que :


C ORRIGÉ

V  Wn 

P  Wn  E  Wn     
2

Compte-tenu de la question 5.a, il vient :

S
V  Wn 

0  P  Wn  a   
2

Compte-tenu de la question 5.b, on a :
V  Wn 
lim  0 lim 0
n  2 n 

L’encadrement précédent et le théorème d’encadrement assurent que la suite


 
P  Wn  a    n 1
converge et que :

  0  
lim P  Wn  a     0
n 
MATHÉMATIQUES
T echnologique

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358 l ANNALES CCIR 2018-2019

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MATHÉMATIQUES
Durée : 4 heures.

Il n’est fait usage d’aucun document ; l’utilisation de toute calcula-


trice et de tout matériel électronique est interdite. Seule l’utilisation BSB
d’une règle graduée est autorisée.

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MATHÉMATIQUES
T echnologique

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BSB
MATHÉMATIQUES
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360 l ANNALES CCIR 2018-2019

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MATHÉMATIQUES
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S UJET

C
CO

BSB

1.a

Pu

Ai

b.

Do
c.
dis

Do

2.a

Pu

res
b.

Ai

Le
ob
ma
MATHÉMATIQUES

3.a
T echnologique

dan

Pu

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C ORRIGÉ
Par Bernard Delacampagne, professeur de mathématiques au lycée
BSB
CORRIGÉ ESC T
Madeleine-Michelis, à Amiens. ANNÉE 2018

.Exercice 1

C ORRIGÉ
1.a. Les calculs donnent :
2 1 6  1 6   7 6 
A
 AA
    
1 0  1 0   1 6 
Puis :
 1 6   1 0  1 6   6 0   7 6 
A 6I    6        
 1 0   0 1  1 0   0 6   1 6 
Ainsi a-t-on montré que :
A 2  A  6I
b. En notant 0 la matrice nulle de 2    , le résultat de la question précédente peut s’écrire :
A 2  A  6I 
0
Donc un polynôme annulateur de la matrice A est le polynôme P  X   X 2  X  6 .
c. Les racines de P  X  sont les seules valeurs propres possibles de A ; puisque le
discriminant de P  X  est   1  4  6   25 , les racines de P  X  sont :
1 5 1 5
X1   2 et 
X2  3
2 2
Donc les seules valeurs propres possibles de A sont 2 et 3.

2.a. Les calculs donnent :


1 6  3   9   3 1 6  2   4   2 
AU
      3   3U et AV        2    2V
1 0  1   3  1 1 0  1   2  1
0 0
Puisque U    et V    , U et V sont des vecteurs propres de la matrice A
0
  0
respectivement associés aux valeurs propres 3 et 2 .
b. Les calculs donnent :
1 6  3 2   9 4   3 2  3 0   9 4 
AP      et PD     
 1 0  1 1   3 2   1 1  0 2   3 2 
Ainsi a-t-on montré que :
AP  PD
Le polynôme P  X  est scindé, ses deux racines sont valeurs propres de A, et la matrice P est
obtenue à partir des vecteurs propres U et V de A, donc l’égalité AP  PD assure que la
matrice A est diagonalisable.
MATHÉMATIQUES

a b
3.a. Rappelons que la matrice   est inversible si et seulement si ad  bc  0 , et que,
T echnologique

c d
1  d b 
dans ce cas, sa matrice inverse est   . Ici, pour la matrice P, on a :
ad  bc  c a 
ad  bc  3.1  1 2   5
Puisque ad  bc  0 , P est inversible et l’application du rappel donne :
1  1 2
P 1   
5  1 3 

1/11
ANNALES CCIR 2018-2019 l 363

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CORRIGÉ ESC T ANNÉE 2018 CO

b. Montrons par récurrence la propriété Pn , définie pour tout entier naturel n, par :
BSB A n P  PDn Ini
Initialisation : P0
P0 est vraie car on a :
A0
P IP 0
 P et PD PI
 P Hé
Hérédité :
On
C ORRIGÉ

On suppose Pn vraie, pour une valeur de l’entier naturel n, c’est-à-dire :


A n P  PDn
On montre que Pn 1 est vraie, c’est-à-dire : On
n 1 n 1
A P  PD
On a, d’après l’hypothèse de récurrence et la question 2.b : On
A
 n 1
P AA  n
P APD  n
PDD
 n
PD n 1
Ceci assure que Pn 1 est vraie.
Ce
D’après le principe de récurrence, on peut conclure que, pour tout entier naturel n, on a :
D’
An P  PDn
c. L’égalité de la question précédente peut s’écrire, puisque P est inversible :
A n  PD n P 1 d.
Puisque D est une matrice diagonale, on a, pour tout entier naturel n :
 3n 0  u
Dn    
 0  2 n   u
 
Il vient donc, pour tout entier naturel n :
0  1  1 2  1  3n 1  2    1 2 
n n 1
 3 2   3
 An PD  n 1
P 1 1         
  0  2   5  1 3  5  3n  2    1 3 
n n

1  3   2  2  3n  1  3    2  
n 1 n 1 n 1

   La
5  3n    2  n 2  3n  3   2  
n

4. En prenant n  0 , puis n  1 , la relation de récurrence définissant la suite  u n n donne :


u 2  u1  6u 0  3  1  3  3  1 et u 3  u 2  6u1  3 1  6  3  10 7.
un
5. L’instruction à ajouter à la ligne 5 pour que le programme calcule et affiche la valeur de
u n , l’entier n non nul étant donné par l’utilisateur, est :
u=a+6*v+3

6.a. On a, pour tout entier naturel n : 1.a


 u n  2   u n 1  6u n  3   u n 1  6u n   3  1 6   u n 1   3 
 Xn 1               AXn  B
 u n 1   u n 1   u n 1   0  1 0   u n   0  Do
b. On a : b.
MATHÉMATIQUES

 1  7  7 6  1
    
1 6   2   3   2   3   2 2   2  Pu
AL  B                L
T echnologique

1 0   1   0    1   0    1    1 
       
 2  2  2   2
c. Montrons par récurrence la propriété Pn , définie pour tout entier naturel n, par :

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364 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 364 24/10/2018 14:50


CORRIGÉ ESC T ANNÉE 2018

X
 n A n  X0  L   L
Initialisation : BSB
P0 est vraie car on a :
A 0  X0  L   L  I  X 0  L   L  X0  L  L  X 0
Hérédité :
On suppose Pn vraie, pour une valeur de l’entier naturel n, c’est-à-dire :

C ORRIGÉ
X
 n A n  X0  L   L
On montre que Pn 1 est vraie, c’est-à-dire :
X n 1 A n 1  X 0  L   L
On a, d’après la question 6.a, l’hypothèse de récurrence et la question 6.b :
X
 n 1 AX n B A  A n  X 0  L   L 
 B A n 1  X 0  L   AL
 B A n 1  X 0  L   L
Ceci assure que Pn 1 est vraie.
D’après le principe de récurrence, on peut conclure que, pour tout entier naturel n, on a :
Xn  A n  X 0  L   L
d. D’après les questions 6.c et 3.c, on a :
  1   1 
1       
1  3   2  2  3n 1  3   2    
n 1 n 1 n 1
 u n 1 
   X n  A  X 0  L   L   n
n
 1   2     2 

 un  5 3   2  n 2  3n
 3    2 
n
    1   1 
  2       
  2   2 
 1
3
1  3   2  2  3n 1  3   2       2 
n 1 n 1 n 1

   2  
5  3   2  2  3  3   2    0    1 
n n n n
    
 2
La deuxième ligne de cette matrice donne u n ; il vient donc, pour tout entier naturel n :
1 3

un   3n   2   
5 2

n 1 3 n
2 10
 
3   2  
n 1
2

7. L’instruction à compléter à la ligne 5 pour que le programme calcule et affiche la valeur de


u n , l’entier n non nul étant donné par l’utilisateur, est :
X=A*X+B

.Exercice 2

1.a. On a, puisque e x  0 sur  :


x   g '  x   e x  1  0
Donc g est croissante sur  .
b. On a :
g  0   e0  1  0  1  1  0
MATHÉMATIQUES

Puisque g est croissante sur  et que g  0   0 , le signe de g  x  est donné par le tableau :
T echnologique

x  0 
Signe de g  x   0 

3/11

ANNALES CCIR 2018-2019 l 365

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 365 24/10/2018 14:50


CORRIGÉ ESC T ANNÉE 2018 CO

2.a. On a :
 x
BSB  x  xlim
lim f  x  1  x   
x  
 e 
Car :
x
lim  x  1   et lim  0 (croissance comparée)
x  ex
x 
C ORRIGÉ

b. On a, comme cette limite vient d’être rappelée :


 x  x
lim  f  x    x  1  lim  x  1  x  x  1 lim x
0
x  x 
 e  x  e
Donc la droite D d’équation y  x  1 est asymptote à  en  .
c. On a :
 x   1 
lim f  x   lim  x  1  x   lim  x 1  x   1   
x  x 
 e  x    e  
Car :
 1
lim x   et lim 1  x   
x  x 
 e 

3.a. On a :
e x  xe x  e   e  xe ex  e x  1  x  ex  1  x g  x 
x x x2

x   f '  x  
1     x
 ex   ex   ex 
2 2 2
ex e

b. Puisque e x  0 , f '  x  est du signe de g  x  sur  ; d’après la question 1.b, le tableau des
variations de f, avec les limites calculées à la question 2, est le suivant :

x  0 
f'  0  1.a
  de
f bla
1 bie

4. On a :
Pa
g '  x  e x  ex g  x  g'  x   g  x  e  1   e  1  x  2  x
x x

x   f ''  x      x
e x 2 e
x x
e e
Le
Puisque e x  0 , f ''  x  est du signe de 2  x sur  ; le signe de f ''  x  est donc donné par le par
tableau :

x  2 
Signe de f ''  x  b.
 0 
MATHÉMATIQUES

Donc f est convexe sur  , 2 et concave sur  2,  .


T echnologique

 2.a

5. L’allure de  et D, dans le plan rapporté à un repère orthonormé 0,i, j d’unité 2 cm, est la  sui
suivante : b.

4/11

366 l ANNALES CCIR 2018-2019

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CORRIGÉ ESC T ANNÉE 2018

BSB

C ORRIGÉ
o

.Exercice 3
1.a. Le joueur marque un point au deuxième tirage si la boule obtenue au deuxième tirage est
de couleur différente de celle obtenue au premier tirage, c’est-à-dire s’il a obtenu une boule
blanche au premier tirage et une boule rouge au deuxième tirage, ou le contraire ; on a donc
bien :
 X 2  1    B1  R 2    R 1  B 2 
Par incompatibilité des événements B1  R 2 et R 1  B2 , il vient :
P  X 2 1 P   B1  R 2    R1  B2   P  B1  R 2   P  R1  B2 
Les tirages s’effectuant avec remise, les événements B1 et R 2 d’une part, R 1 et B2 d’autre
part, sont indépendants, donc on a :
2 1 1 2 4
P  X 2  1   P  B1  P  R 2   P  R1  P  B2      
3 3 3 3 9
4
b. Puisque X 2 suit la loi de Bernoulli de paramètre p P  X 2 1  , on a :
9
4 4 5 20
E  X 2   p  et V  X 2  p 1  p    
MATHÉMATIQUES

9 9 9 81
T echnologique

2.a. L’urne et la règle du jeu étant analogues lors des deux premiers tirages et lors des deux
suivants, X 3 suit la même loi que X 2 .
b. G étant la variable aléatoire égale au nombre total de points marqués lors des trois tirages,

5/11

ANNALES CCIR 2018-2019 l 367

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 367 24/10/2018 14:50


CORRIGÉ ESC T ANNÉE 2018 CO

on a : On
G  X2  X3
BSB
Par linéarité de l’espérance, et puisque X3 suit la même loi que X 2 , il vient, d’après la
question 1.b : On
4 8
E G   E  X 2  X3  
E  X 2   E  X3  
2E  X 2  
2 
9 9
C ORRIGÉ

Il v
3.a. L’événement  X 2  1   X 3  1 est réalisé s’il y a deux changements de couleurs
consécutifs, c’est-à-dire si l’on tire dans cet ordre une rouge, une blanche, une rouge, ou une
blanche, une rouge, une blanche ; on a donc :
 X 2  1    X 3  1    R 1  B 2  R 3    B1  R 2  B 3  4.
Par incompatibilité, puis indépendance, il vient bien :
P   X2  1   X 3  1   P   R1  B2  R 3    B1  R 2  B3   D’
 P  R 1  B2  R 3   P  B1  R 2  B3 
 P  R 1  P  B2  P  R 3   P  B1  P  R 2  P  B3 
Il r
1 2 1 2 1 2 2 4 6 2
         
3 3 3 3 3 3 27 27 27 9
b. On trouve de même :
P   X 2  0    X3  0    P   R1  R 2  R 3    B1  B2  B3   5.a
 P  R 1  P  R 2  P  R 3   P  B1  P  B2  P  B3  par
1 1 1 2 2 2 1 8 9 1
         
3 3 3 3 3 3 27 27 27 3 tira
P   X 2  0    X 3 1   P   R1  R 2  B3    B1  B2  R 3  
un
 P  R 1  P  R 2  P  B3   P  B1  P  B2  P  R 3 
1 1 2 2 2 1 2 4 6 2 sim
          b.
3 3 3 3 3 3 27 27 27 9
po
P   X 2 1   X 3 0   P   R1  B2  B3    B1  R 2  R 3  
 P  R 1  P  B2  P  B3   P  B1  P  R 2  P  R 3  En
1 2 2 2 1 1 4 2 6 2 lor
         
3 3 3 3 3 3 27 27 27 9 ièm
Le tableau donnant la loi conjointe du couple  X 2 , X3  est donc le suivant :

X3
0 1 1.
X2
3 2
0
9 9
Il e
2 2
MATHÉMATIQUES

1
9 9
T echnologique

On a : Ce
cov 
X 2 , X 3  E  X 2 X 3   E  X 2  E  X3 

6/11

368 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 368 24/10/2018 14:50


CORRIGÉ ESC T ANNÉE 2018

On a déjà vu que :
4
 X 2  E
E  X3  BSB
9
On a :
3 2 2 2 2
E  X 2X3    xyP   X 2  x    X 3  y    0  0   0 1   1  0   11 
xX 2    9 9 9 9 9
yX3   

C ORRIGÉ
Il vient bien :
2 4 4 18  16 2
cov  X 2 , X 3      
9 9 9 81 81

4. D’après la question 2.b, on a :


V  G  V  X 2  X 3  V  X 2   V  X3   2cov  X 2 , X 3 
D’après les questions 1.b et 2.a, on a :
20
V X 2  V  X3 
81
Il résulte de la question précédente que :
20 20 2 44
V  G    2 
81 81 81 81

5.a. L’instruction X=grand(1,n,'bin'1,1/3) simule n lois binomiales indépendantes de


1 1
paramètres 1 et , c’est-à-dire n lois de Bernoulli indépendantes de paramètre ; chaque
3 3
1
tirage dans l’urne suit une loi de Bernoulli de paramètre , puisque la probabilité d’obtenir
3
1
une boule blanche est , et les tirages sont indépendants, donc cette instruction permet de
3
simuler n tirages dans l’urne.
b. Pour que le programme simule n tirages successifs dans l’urne et qu’il affiche le nombre de
points marqués par le joueur, il faut ajouter à la ligne 6 l’instruction :
G=G+1
En effet, au départ, le gain est G  0 ; pour chacun des tirages, du deuxième au n-ième,
lorsque l’instruction X(i)<>X(i-1) est vérifiée, les boules obtenues au i-ème et au  i  1 -
ième tirage sont de couleurs différentes et donc le gain augmente d’un point.

.Exercice 4
1. On a :
x x


1  1 1 1
x   a,  dt    t    x  a
a t2 a
Il en résulte que :
MATHÉMATIQUES


1  1 1 1
dt lim
 lim     
t2 x 
x 
 x a a
T echnologique

a
Ceci assure que l’intégrale I converge et que :
1
I
a

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CORRIGÉ ESC T ANNÉE 2018 CO

On a de même : 3.
x x x x

 t
1 t  2
 1  1 1
BSB x   a,  dt  3
dt       2    2  2
a t3 a  2  a  2t  a 2x 2a
Pu
Il en résulte que :
x


1  1 1  1
3
lim
dt  lim   2  2   2
t  2x 2a  2a
C ORRIGÉ

x  x 
a
D’
Ceci assure que l’intégrale J converge et que :
1
J 2
2a
On a enfin de même :
x x x x Do

 
1  t 3   1  1 1
x   a,  dt  t 4 dt       3    3  3 rel
a t4 a  3  a  3t  a 3x 3a
Il en résulte que :
x


1  1 1  1 De
4
lim
dt  lim   3  3   3
a t x x 
 3x 3a  3a
Ceci assure que l’intégrale K converge et que :
1 Pu
K 3
3a

2. f est continue sur , a  comme fonction nulle, et sur  a,  comme fonction rationnelle
D’
de dénominateur non nul, puisque a est un réel strictement positif ; de plus f a des limites
finies à gauche et à droite en a, puisque :
3a 3 3a 3 3
f  t  lim
lim   
0 0 et lim f  t  lim  
t a t a 
t a t a t4 a4 a
Donc f est continue par morceaux sur  , avec un nombre fini (un) de points de discontinuité. Do
Pour tout réel t appartenant à , a  , on a : rel
f  t  0  0
Pour tout réel t appartenant à  a,  , on a, puisque a est un réel strictement positif : Pu
3a 3 Ko
t
f 0
t4
Donc f est positive ou nulle sur  .
a
Puisque f est nulle sur , a  , f  t  dt converge et vaut :
 4.a
a a
 f  t  dt 
0dt 0
 

D’après la question 1, et par linéarité de l’intégrale,  f  t  dt converge et vaut : Il v
a
  

  
3a 3 1 1
f  t  dt
  dt 3a 3 dt  3a 3K  3a 3  3 1 b.
MATHÉMATIQUES

a a t4 a t4 3a

Il en résulte que  f  t  dt converge et vaut, grâce à la relation de Chasles :
T echnologique


 a 
 f  t  dt   f  t  dt   f  t  dt  0  1  1
  a
Donc f est bien une densité de probabilité.

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CORRIGÉ ESC T ANNÉE 2018

3. Sous réserve de convergence, l’espérance de X est, par définition :



E  X    tf  t  dt BSB

a
Puisque f est nulle sur , a  ,  tf  t  dt converge et vaut :

a a
 0dt 0 
 t  dt
tf 


C ORRIGÉ

D’après la question 1, et par linéarité de l’intégrale,  tf  t  dt converge et vaut :
a
  

  
3a 3 1 1 3a
tf  t  dt
  dt 3a 3 dt 3a 3J 3a 3  2 
a a t3 a t3 2a 2

Donc  tf  t  dt converge, ce qui prouve que X admet une espérance et on a, grâce à la

relation de Chasles :
 a  3a 3a
E X   tf  t  dt 
 tf  t  dt  a tf  t  dt 
0 
2 2
2
De même, sous réserve de convergence, l’espérance de X est, par définition :
E  X 2    t 2 f  t  dt



a
Puisque f est nulle sur , a  ,  t 2 f  t  dt converge et vaut :

a a
 
0dt 0

 t  dt
t 2f 


D’après la question 1, et par linéarité de l’intégrale,  t f  t  dt 2
converge et vaut :
a
  

  t dt 3a 
3a 3 1 1
t f  t  dt 
2
2
3
dt  3a 3I  3a 3   3a 2
a a a t2 a

Donc  t 2 f  t  dt converge, ce qui prouve que X 2 admet une espérance et on a, grâce à la

relation de Chasles :
E  X2    
 a 
t 2 f  t  dt  t 2 f  t  dt   t 2 f  t  dt 0  3a 2  3a 2
  a

Puisque X 2 admet une espérance, X admet une variance, et on a, d’après la formule de


Koenig-Huygens :
2
 3a  9a 2 12a 2  9a 2 3a 2
V  X   E  X 2    E  X   3a 2    3a 2 
2
 
 2 4 4 4

4.a. On sait que, pour tout réel x :


x
F  x    f  t  dt

Il vient donc, lorsque x  a :
x
F  x
 
0 dt 0

b. En utilisant la question 1, on obtient, lorsque x  a :
MATHÉMATIQUES

x a x a x x

      t dt
3a 3 1
F  x   f  t  dt  f  t  dt  f  t  dt  0 dt  dt 3a 3
T echnologique

  a  a t4 a
4

3
 1 1  a3 a
 3 1  1   
3a 3   3  3  

 3x 3a  x x

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CORRIGÉ ESC T ANNÉE 2018 CO

c. On a : d.
P  2a  X  4a
 F  4a   F  2a 
BSB 1
Puisque, a étant strictement positif, 2a  a et 4a  a , il vient : On
3 3 3 3
 a    a   1 1 1 1 1  8 7
P  2a  X  4a   1     1      1     1        
 4a    2a   4 2 64 8 64 64
Il v
Et, de même :
C ORRIGÉ

  a 3  3
1 1
P  X  2a   1  P  X  2a   1  F  2a   1   1      1  1    
  2a   2 8
 
Il résulte de ces deux calculs que :
7 Ai
P   X  4a    X  2a   P  2a  X  4a  64 7 7
P X 2a   X  4a      8  de
P  X  2a  P  X  2a  1 64 8
e. O
8

5.a. Par linéarité de l’espérance, on a :


 2 n  2 n Le
E  M n   E   Xi    E  Xi 
 3n i 1  3n i 1
Puisque les variables aléatoires X1 , …, X n suivent la même loi que X, il vient, d’après la
question 3 :
2 n 2 2 3a
E  Mn    E X 
3n i 1 3n
 nE  X    a
3 2
Par propriété de la variance, et puisque les variables aléatoires X1 , …, X n sont
indépendantes, on a :
 2 n  4  n  4 n
V  M n   V   Xi   2 V   Xi   2  V  Xi 
 3n i 1  9n  i 1  9n i 1

Puisque les variables aléatoires X1 , …, X n suivent la même loi que X, il vient, d’après la
question 3 :
4 n 4 4 3a 2 a 2
V  M n   2  V  X  2  nV  X   
9n i1 9n 9n 4 3n
b. Puisque E  M n   a d’après la question précédente, M n est un estimateur sans biais de
a.
Puisque M n est un estimateur sans biais de a, son risque quadratique est, d’après la question
précédente :
a2
r  Mn   V  M n  
3n
c.  un réel strictement positif, l’inégalité de Bienaymé-Tchebichev, appliquée à la variable
aléatoire M n , donne :
V  Mn 
 
MATHÉMATIQUES

P Mn  E  Mn    
2
T echnologique

Compte-tenu du calcul de la variance de M n à la question 5, on a bien :


a2
P  Mn  a  ε  
3n 2

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CORRIGÉ ESC T ANNÉE 2018

d. Par définition,  M n  , M n    est un intervalle de confiance de a au niveau de confiance


1  si P  M n    a  M n     1   . BSB
On a :
P  M n    a  M n     P    M n  a     P  M n  a     1  P  M n  a   
Il vient donc, d’après la question précédente et compte-tenu de la valeur de  :

C ORRIGÉ
a2 a2 a2
P  Mn    a  Mn     1   1 2
 1  1 
3n 2
 a  a2
3n  3n 
 3n
 3n 
a
Ainsi, pour  réel de 0,1 et   ,  M n  , M n    est un intervalle de confiance
3n
de a au niveau de confiance 1   .
e. On a, par définition de M n :
2 100 2 2  201
M100   Xi 3 100  603 100  4, 02
3 100 i 1
Le fabriquant peut donc estimer que a vaut 4.

MATHÉMATIQUES
T echnologique

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S UJET

RÉSUMÉ DE TEXTE
Durée : 3 heures.

Résumez en 400 mots le texte suivant.


EM
Strasbourg
Une tolérance de 40 mots est admise : le résumé devra être stricte-
ment compris entre 380 et 420 mots.
Les candidats doivent indiquer, sur leur copie, le nombre employés
de 50 en 50 (marque dans le texte et regard dans la marge), ainsi
que le total exact à la fin.
Les correcteurs tiendront compte de la présentation de la copie et de
la correction de la langue.
L’usage de documents et de tout matériel électronique est interdit.

S UJET

Même s’ils en sont victimes, tous les parents et éducateurs savent asso-
cier le pouvoir de dire « non » à la croissance, sinon à la maturité, de leur
progéniture. Psychologues et psychanalystes situent l’apparition du « non »
vers l’âge de 3 ans, au moment où la compétence pour le langage s’affirme.
La première chose que les enfants savent dire, en donnant l’impression qu’ils
savent ce qu’ils disent et qu’ils ne sont plus dans le babillage ou l’écholalie1,
c’est « non ». L’humanité en eux paraît donc surgir avec le refus. Savoir dire
« non », c’est d’emblée affirmer que le monde ne saurait s’imposer à l’hu-
main sans qu’il lui résiste d’abord. La réalité sera peut-être la plus forte
(les parents gagnent toujours), mais l’enfant ne se sera pas laissé faire. Le
baroud d’honneur, c’est au moins la dignité sauvegardée !
Le Non traduit durablement l’arrachement à la nature par lequel on
a longtemps décrit l’humanisme : ne pas se laisser imposer ce qui se prétend
obligatoire parce que naturel, immédiat, donné – et au contraire, l’affronter
et lui objecter l’artifice, le détour, le construit. Tous les ingrédients sont ici
réunis pour décrire le processus d’humanisation dont les animaux ne sont
pas capables : dire « non » et signifier par là que nous prétendons être pour
quelque chose dans ce que nous devenons, telle est la formule justifiant
RÉSUMÉ DE TEXTE

qu’on ait défini l’humanisme comme « l’anti-destin » – une formule d’où se


déduisent les avatars de la liberté : dire « non » pour refuser que les choses
soient seulement comme elles sont, dire « non » pour transfigurer la situa-
T echnologique

tion dans laquelle nous sommes prisonniers, dire « non » pour nous affirmer
capables d’utopie, dire « non » pour afficher le point de vue moral susceptible
de contraindre le monde à être conforme à nos idéaux, dire « non » pour
éviter d’être réduits au simple fonctionnement métabolique qui caractérise
l’organisme vivant… Le pouvoir de la négation révèle l’être de langage en
nous et interdit qu’on nous définisse comme des « animaux comme les
autres ».

1. Tendance à répéter les derniers mots entendus.

374 l ANNALES CCIR 2018-2019

Annales-HEC-2018_P001-384_BAT.indd 374 24/10/2018 14:50


S UJET
George Steiner l’expliquait avec élégance : « Le langage est l’instrument
privilégié grâce auquel l’homme refuse d’accepter le monde tel qu’il est. »
L’humanité se révèle à elle-même dans la disposition à utiliser les mots pour
dire ce qui n’est pas – donc pour tourner le dos à la réalité et éventuelle-
ment pour mentir. Parodie de Rousseau : le premier qui, ayant découvert
qu’il pouvait expliquer à celui qui cherchait la source où s’abreuver qu’elle EM
se trouvait derrière la colline, à droite du chemin, alors qu’il savait qu’elle Strasbourg
était dans la vallée, à la lisière du bois – celui-là, dit à peu près Steiner,
a inventé l’humanité.
Le mensonge est en effet l’indice de la supériorité de notre espèce. C’est
grâce à lui que nous avons survécu et évolué. Grâce au mensonge permis
par les mots, mais aussi grâce à celui que recèlent les artifices appliqués
au corps, que nous a ouvert la vie symbolique et dont témoignent très tôt,
selon Hegel, les tatouages ou les scarifications des Indiens ou, plus tard,
selon Baudelaire, le maquillage des femmes. Les éthologues ont certes
mis en évidence que les grands singes sont capables de mentir et qu’ils
trompent leur femelle avec cynisme, mais c’est justement pour cela qu’ils
nous sont si proches. Communément, l’animal adhère sans liberté au monde
qui est le sien. Il est incapable de prendre ses distances avec lui. Il est à sa
naissance ce qu’il sera à sa mort, disent les philosophes, rappelant ainsi
que nous, humains, sommes d’abord des prématurés obligés de trouver des
expédients pour compenser notre indigence ou nudité premières.
En somme, dire ce qui n’est pas, c’est une façon d’exprimer notre voca-
tion à évoluer, à grandir et à faire une histoire. Ce qui n’est pas nature en
nous est esprit et signale notre aptitude à l’ironie (à « faire de l’esprit »),
à fabriquer des artifices (à inventer ce qui n’existait pas) autant que notre
prétention à dominer la nature (la métaphysique, la science, la technique et
toute la culture humaine se retrouvent dans ce projet).
Ce qui est humain, c’est de pouvoir refouler en nous tout ce qui relève
d’automatismes. À commencer par les automatismes de nos comporte-
ments instinctifs. Ces automatismes nous effraient quand ils prennent la
forme de troubles obsessionnels compulsifs (les TOC) et révèlent que la
mécanique en nous peut toujours prendre le dessus. Nous sommes intel-
ligents quand nous pouvons dire « non » à ce qui est de l’ordre de l’instinct
– même quand cet instinct pourrait nous conduire vers le Bien. Cela peut
aller très loin : par exemple, certains n’hésitent pas aujourd’hui à souhaiter
que la guerre demeure humaine, alors qu’on tend à l’automatiser avec des
drones et des robots. Pourquoi la guerre peut-elle paraître humaine, même
lorsqu’elle est cruelle ? Parce que nous la déclarons, la calculons, la limi-
RÉSUMÉ DE TEXTE

tons et la réglementons. Mais aussi parce que nous nous arrachons à des
instincts qui, livrés à eux-mêmes, ne nous permettraient pas de l’engager
– autrement dit : parce que nous résistons, en la faisant, aux comporte-
T echnologique

ments d’empathie qui relèvent de mécanismes naturels (par exemple du


fonctionnement de neurones miroirs). Ces mécanismes, les animaux y sont
enchaînés. Quand il se bat et se reconnaît vaincu, le chien se couche et
tend le cou, son adversaire ne le touche alors plus : des inhibiteurs de
violence se mettent en place spontanément qui régulent le comportement
agressif. Ces inhibiteurs de violence ont disparu chez les psychopathes
et sont limités chez les soldats auxquels on donne, avant l’assaut, du
rhum, des amphétamines, du Prozac ou même du Viagra… L’histoire de la
guerre relate à sa façon l’histoire des moyens déployés pour ne pas céder

ANNALES CCIR 2018-2019 l 375

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S UJET

à ces mécanismes que nous partageons au départ avec les animaux. Elle
raconte la déshumanisation imputée aujourd’hui aux technologies, à savoir
l’introduction croissante de la distance entre les belligérants, avec l’arc,
l’arbalète, l’arme à feu, le canon, le missile et finalement le drone. La guerre
était humaine dans le corps-à‑corps, elle a peu à peu cessé de l’être en
EM devenant plus abstraite, et elle sera proprement inhumaine lorsqu’il n’y
Strasbourg aura plus que des automates sans états d’âme pour la faire. C’est évidem-
ment un paradoxe et certains pensent qu’une guerre « zéro morts chez les
soldats » serait humaine. Ce n’est pas sûr, si l’on s’accorde à considérer
que là où il n’y a plus de réflexion, de prise de distance, de conscience,
d’auto-maîtrise – là triomphe l’inhumain. Les militaires qui s’interrogent
aujourd’hui sur l’éthique des robots ne le cachent pas : les populations
civiles auront tout à craindre quand les soldats auront disparu au profit
des machines guerrières.
L’enseignement des neurobiologistes est précieux, surtout quand il
entend sauver en nous le libre arbitre : notre cerveau a beau être dominé
par des mécanismes, nous explique-t‑on, notre conscience subsistera
pour autant qu’elle témoignera de notre aptitude à lui dire « non ». Les
fameuses expériences du neurophysiologiste Benjamin Libet ont aidé à tirer
cette conclusion il y a près de trente ans : la conscience existe de pouvoir
opposer un droit de veto à ce que nos mécanismes neuronaux imposeraient
en matière de décision. C’est cela, la liberté et c’est pourquoi on a raison
de dire qu’être libre s’éprouve dans le pouvoir de faire le mal. Oserais-je
souligner que le judéo-christianisme l’a compris ? Mais l’élémentaire, le
pulsionnel, le machinique affleurent toujours en nous. Si nous leur laissons
libre cours, nous cessons d’être libres (de pouvoir dire « non ») et nous
perdons notre humanité. Comme si le cerveau reptilien, recouvert par le
néocortex et régulé par le lobe frontal, pouvait resurgir. En ce sens, nous
sommes menacés d’inhumain quand nous acceptons de nous considérer
comme de simples êtres de pulsions ou comme des automates perfec-
tionnés. La solidarité étrange qu’on observe parfois entre l’écologie dite
profonde et les spéculations transhumanistes trouve ici une illustration : la
première est portée à nous rappeler que nous sommes des animaux comme
les autres et elle nous enjoint d’abandonner les prédations auxquelles nous
cédons en éprouvant notre complexité neurobiologique comme la marque
d’une supériorité ; les secondes contribuent à dévaluer notre intelligence
au profit de celle des machines qui seront toujours plus efficaces. De part
et d’autre, un même entêtement à humilier l’humanité en nous. Contre
l’écologie et le transhumanisme, une seule réponse : la réhabilitation du
RÉSUMÉ DE TEXTE

pouvoir de dire « non ».

Un monde où domineraient les machines, qui nous obligeraient à nous


T echnologique

comporter comme des machines pour pouvoir interagir avec elles, interdirait
ce pouvoir de dire « non » et nous contraindrait, de ce fait, à consentir à l’in-
humain. Nombre d’utopies posthumaines décrivent un semblable monde.
À commencer par celle du psychologue comportementaliste Skinner qui, dès
les années 1940, établit le scénario d’une microsociété dont les membres
fonctionneraient sur la base des schémas stimulus-réponse décrits par le
béhaviorisme. Ce n’est pas un hasard si ce scénario a été intitulé Walden
2, par référence à Thoreau qui, lui, préconisait une vie dans les bois et
une sagesse faite d’assentiment à la nature. Pourtant, dans l’imaginaire

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S UJET
de la science-­fiction, on décrit volontiers des sociétés dans lesquelles les
humains sont parfaitement dressés, ont perdu tout sens critique, mais qui
sont menacés par des robots qui, eux, ont découvert la possibilité de refuser
l’exploitation qu’on leur impose. La série télévisée suédoise Real Humans
(Sveriges Television, 2012-2014) a bien décrit le transfert du pouvoir de
dire « non » sur les machines elles-mêmes, pour mieux suggérer sans doute EM
combien les robots pourraient hériter de ce dont nous ne sommes plus Strasbourg
capables. Le thème de la révolte des robots y est le pendant de la descrip-
tion des humains résignés à se laisser déposséder de l’initiative.
Certains paléoanthropologues prévoient que l’espèce humaine sera de
plus en plus capable d’automatismes, comme si cela était pour nous une
loi d’évolution qui, progressivement, nous rapprocherait des animaux. La
conscience devrait donc de plus en plus disparaître. Dans l’évolution de
l’espèce, elle a été un avantage sélectif pour assurer notre survie face à un
environnement naturel hostile. Elle cesse d’être un avantage dans un envi-
ronnement « technologisé », où il faut être compétitif et réactif. Il va donc
falloir se débarrasser de la conscience, ou en tout cas la réduire au minimum.
C’est la « zombification » de l’humain qui se profile – ou plus sobrement dit,
sa « simplification ». Sombre perspective, sans doute, mais qui peut affirmer
qu’il n’est pas obligé de se comporter de plus en plus comme une machine
pour être performant dans la vie de tous les jours ? Nietzsche décrivait le
monde qui s’annonçait à son époque comme nihiliste : non pas au sens où
ce monde abriterait des humains tout entiers voués au Non, mais au sens où
ceux-ci se demanderaient : « À quoi bon résister ? », où ils seraient tentés par
le Rien, par une volonté de Néant. « Dieu est mort, nous l’avons tué et nous
ne nous en remettons pas… » Telle est à peu près la formule du nihilisme
qui équivaut à une perte de toute substance humaine, au triomphe d’un
ressentiment généralisé. Ce que décrivait Nietzsche, c’était déjà le monde de
la désaffection de l’humain pour lui-même : l’incapacité de revendiquer des
valeurs à objecter à la réalité. « Le désert croît », disait Nietzsche. Aujourd’hui,
on entend dire que « le monde est plat », sans relief, sans contraste, homo-
gène parce que sans autre valeur que marchande, c’est-à‑dire où tout est
interchangeable, où personne n’est plus responsable de rien.

Dans Ainsi parlait Zarathoustra, Nietzsche décrit les trois métamorphoses


par lesquelles passe l’esprit : le chameau qui porte les charges qu’on lui
met sur le dos, sans rechigner – c’est le Oui de l’acceptation contrainte et
courageuse ; le lion, le Non rageur et systématique ; et puis l’enfant qui est
innocence et oubli, qui joue sans arrière-pensées, qui dit Oui au monde,
RÉSUMÉ DE TEXTE

avec générosité et confiance. Où en serions-nous, selon Nietzsche ? Sans


doute plus au stade du lion : il y a trop de lassitude chez nous et de sentiment
d’impuissance, accru par le monde des machines qui nous immerge. Sans
T echnologique

doute pas au stade de l’enfant, car nous sommes dépourvus de légèreté et


d’ouverture naïve au monde. C’est donc sans doute le chameau – le courage
en moins – qui menace de se réimposer comme l’emblème de l’humain
fatigué d’être soi, convaincu que le destin est inéluctable, que le monde ne
peut être changé, qu’il faut seulement y consentir…
Dans Les Particules élémentaires, puis dans La Possibilité d’une île,
Michel Houellebecq illustre bien cette désertion du Non qu’on pourrait
décrire comme postmodeme (avec la fin des idéaux révolutionnaires, la fin
des grands récits), cet ennui qui nous saisit, cet autisme qui se développe

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S UJET

et qui ira jusqu’au vertige du clonage répétant le même ad nauseam1…


L’humain décrit par Houellebecq, c’est le dernier homme de Nietzsche, « le
plus laid des hommes », honteux d’avoir tué Dieu et avec lui tarit la source
des valeurs qui permettaient de s’opposer à Lui aussi bien que de vouloir
dépasser la condition humaine. Désormais, le dernier homme délègue à ses
EM machines ce pouvoir de dépassement, et il succombe à « la honte promé-
Strasbourg théenne d’être soi », selon l’expression de Günther Anders.

La perspective de fusionner avec les machines, annoncée par les


transhumanistes comme avenir radieux, est là pour confirmer cette dispa-
rition du pouvoir de dire « non » par lequel nous nous définissions comme
humains. Elle indique aussi ce par quoi nous pensons nous sauver. Il suffit
pour s’en convaincre de lire l’introduction du fameux rapport américain
de 2003, intitulé Convergence technologique pour l’augmentation des
performances humaines. L’hybridation de l’homme biologique et de la
machine y est donnée comme la clé d’un bonheur supposé désirable – un
bonheur où il n’y aurait plus d’événement pour relancer une histoire faite
de hasard ou de violence : la communication homme-machine, cerveau-or-
dinateur, cerveau-cerveau, la pensée intégrale (le couplage du cerveau
avec Internet) traduisent en effet la finalité des technologies convergentes.
L’important est de comprendre que les perspectives offertes ont toutes en
commun d’écarter le langage, l’univers des signes, le symbolique, au profit
des simples signaux dont sont capables les machines ou des symboles
mathématiques nécessaires aux algorithmes. On ne saurait mieux démontrer
qu’en se défaisant du langage, on s’interdit le Non et on se démet de son
humanité au profit de machines qui feront toujours davantage triompher
les signaux…
Un monde dominé par les machines est un monde qui n’a plus besoin
du langage humain. Il suffit que nous communiquions comme le font les
abeilles, grâce à des signaux que nous captons et que nous émettons pour
ainsi dire sans y penser. Déjà, nous ne sommes plus guère que des codes-
barres ambulants, des êtres de signaux, des mécaniques pulsionnelles, des
supports de data. En décrivant « le syndrome de la touche étoile », dans son
ouvrage L’Homme simplifié, l’auteur de cet article suggérait cette élimination
du langage et de tout ce qu’il a permis de développer. Le transhumanisme
est une offensive contre les mots et leurs ambiguïtés, contre la vie intérieure
et la liberté de s’abstraire du monde. Vivre tout en extériorité, à la manière
d’une mécanique, imposer la transparence au-delà même de l’ambition du
Panoptique de Bentham2 voilà ce que voudraient les techno-prophètes.
RÉSUMÉ DE TEXTE

Le pire est que ceux-ci sont de plus en plus écoutés. Pourquoi ? Parce
qu’ils annoncent aux humains la fin de leurs supposés malheurs, c’est-à‑dire
T echnologique

la fin de l’adversité qui les a obligés à naître, à souffrir, à être malades,


à vieillir et à mourir. On touche à l’extrême aujourd’hui avec les promesses
d’immortalité qui reposent sur les extrapolations obtenues à partir de
la biologie (les cellules-souches totipotentes induites, la maîtrise de la

1. Jusqu’au dégoût.
2. Architecture carcérale imaginée à la fin du xviiie s. par Jeremy et Samuel Bentham, permettant à un
gardien de prison de surveiller depuis une tour centrale tous les prisonniers, sans que ceux-ci puissent
savoir s’ils sont observés.

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S UJET
télomérase, l’ectogenèse…) et de l’intelligence artificielle (le cerveau artifi-
ciel, le téléchargement de la conscience…).
Qui se représente ce que serait l’immortalité, si elle était réalisable ? Le
triomphe de l’animalité en nous (l’instinct de conservation satisfait grâce
à la pérennisation des métabolismes biologiques ou à la fabrication d’or-
ganes de rechange), l’immersion dans le flux de l’espèce sans possibilité de EM
revendiquer une individualité (le vouloir-vivre éternel de Schopenhauer ou Strasbourg
des bouddhistes), la solitude et l’ennui (la disparition de la finitude rendant
superflue l’ouverture sur les autres). L’immortalité, ce serait l’abandon de
soi à l’innommable – c’est-à‑dire à l’illimité : ce serait la restauration de
l’animalité à laquelle nous avions échappé, en naissant limités et imparfaits ;
ce serait l’accession à une image de la divinité faite d’impassibilité et de
solitude. Rien à voir avec le désir d’éternité qui se nourrit d’une tension et
d’une quête infinie d’absolu et de spiritualité. L’immortalité promise par les
techno-prophètes n’est pas spirituelle : elle est résolument animale et elle est
présentée comme la perspective ouverte par une médecine dite connectée
(médecine personnalisée et prédictive, précise-t‑on), dépourvue de la
relation symbolique que la relation clinique du médecin avec son patient
entretenait dans le dialogue. Didier Sicard a très bien décrit cette situation
dans un livre au titre éloquent : La Médecine sans le corps. L’immortalité
est certes capable d’opposer un refus, mais c’est à la mort autant qu’à la
vie elle-même qu’elle dit « non ». Ultime paradoxe : la technique, née avec
la faculté de dire « non », était sans doute contemporaine du langage dans
l’aventure de l’hominisation. Elle a fini par s’auto-développer et s’auto-
accroître, au point de dénoncer son lien avec le langage. Désormais, elle
donne à entrevoir la fin de l’humain, avec le triomphe d’une immortalité
mortifère qui constituera le dernier Non opposé à la vie tout entière…

Mais il faut s’interroger pour finir et pour ne pas désespérer : est-il donc
encore possible de dire « non » aux machines ? Est-ce que cela a un sens ?
Adresser un Non à ce qui n’est pas un humain doté d’une conscience et
d’un pouvoir de répondre, quelle folie ! Sauf qu’on pourrait refuser d’utiliser
ces machines, ce qui les rendrait inutiles et obsolètes. Sauf qu’on pourrait
vouloir les détruire, comme les luddites, ces artisans anglais du xixe siècle qui
exigèrent de retrouver la dignité qu’on leur enlevait en les ayant remplacés
par des machines imbéciles (les métiers Jacquard). On a toujours raison de
se révolter, disait Sartre. Tant que nous nous vivons comme des humains,
le pouvoir de refuser est toujours justifié. Alors serait-il donc temps de se
révolter contre les machines ?
RÉSUMÉ DE TEXTE

Examinons rapidement la chose, afin de ne pas céder trop vite à quelque


angélisme de la révolte : voudra-t‑on dire « non » à l’utilisation de l’imagerie
médicale, à l’échographie, à l’lRM fonctionnelle, au cœur artificiel, bientôt
T echnologique

aux lentilles de contact qui délivreront des mesures d’insuline aux diabé-
tiques ? Voudra-t‑on dire « non » aux implants intracérébraux qui rendront
la vie plus facile aux parkinsoniens et aux tétraplégiques ? Dire « non »
aux régulateurs d’humeurs ou aux antalgiques issus des technosciences
appliquées au cerveau ? Voudra-t‑on refuser la robotique au service de la
chirurgie, qu’elle soit réparatrice ou esthétique ? Refuser aussi les innova-
tions médicales orientées par le souci d’accroître la longévité et d’aiguiser
l’aspiration à l’immortalité ?

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S UJET

On connaît des amish, des témoins de Jéhovah ou quelques adeptes de


la décroissance qui iraient jusqu’à refuser tout cela. Mais il est plus courant
de rencontrer parmi nos contemporains une inclination à recevoir comme
C
désirable ce qui pourrait faire de nous des post-humains, débarrassés des
vulnérabilités caractéristiques de l’humanité. Sous prétexte de pouvoir
EM encore et toujours dire « non », il n’est pas sûr que nous soyons disposés
Strasbourg à rejeter tout ce qui nous mécanise et prétend nous délivrer du hasard que
comporte la vie elle-même. Le baroud d’honneur évoqué tout à l’heure n’est
peut-être déjà plus à l’agenda d’Homo technologicus.

Comment dire « non » quand les machines triomphent ? La réponse est


plus difficile qu’il n’y paraissait quand on croyait pouvoir miser sur la dignité
pour réveiller en l’homme sa liberté. Nous avons fait triompher les machines
parce que nous étions capables de dire « non » aux déterminismes naturels,
aux risques auxquels nous expose l’environnement.
Le Non a eu ses effets pervers au cours de la Modernité et nous nous
sommes un temps félicités de pouvoir nous en débarrasser, pour célébrer
parfois les sagesses du consentement et aspirer à l’insouciance de l’enfant
de Nietzsche. Mais voilà que nous nous découvrons proprement menacés
par ce que nous avons laissé s’installer. S’il est encore temps de réagir,
cela passera par une prise de conscience qui signifiera en elle-même que
nous n’avons pas perdu le Non. Être conscient, c’est toujours déjà s’op-
poser, et rien n’est plus nécessaire quand l’abandon aux automatismes de
toutes sortes promet de délivrer des inquiétudes existentielles. Quelques
mouvements d’opinion, souvent opposés au transhumanisme, s’emploient
à entretenir la résistance – des mouvements qui font appel à la sobriété
technologique, à la simplicité volontaire, à une technologie conviviale…
Parviendront-ils à désengager le grand nombre de nos contemporains de
la servitude volontaire qui autorise chaque jour davantage l’accroissement
du pouvoir des méga-machines, autrement baptisées GAFA1 ?
Jean-Michel Besnier, « Comment dire "non" quand les machines triomphent ? »,
Esprit, n° 433 (mars-avril 2017), p. 76-86.
RÉSUMÉ DE TEXTE
T echnologique

1. GAFA : Google Amazon Facebook Apple.

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C ORRIGÉ
Par Françoise Détharré, professeure agrégée de lettres modernes.
EM
Strasbourg

Comment dire « non » quand les machines triomphent ?

C ORRIGÉ
En commençant à dire « non », l’enfant commence à manifester/son huma-
nité. Contrairement aux autres animaux, nous savons opposer un/refus
aux diktats de la nature et revendiquer la maîtrise/de notre propre vie. Par
le langage, nous pouvons substituer/ce que nous voulons à ce que nous
constatons et/(50) subissons, serait-ce par le mensonge ; nous montrons
ainsi notre/aptitude à évoluer et à faire évoluer la nature. Cependant/, si
notre intelligence nous permet de juguler nos instincts, elle/ne nous amène
pas nécessairement à gagner en humanité : une/guerre totalement techni-
cisée, devenue affaire de missiles et de drones/(100), soustrayant la mort
de l’ennemi à notre regard, s’/avèrera froidement et épouvantablement
destructrice.
Aucun mécanisme, ne l’oublions/pas, ne peut annihiler notre capacité à le
contrer. Nous/bradons notre liberté, donc notre humanité, si nous nous
résignons/à obéir à des automatismes, aussi prégnants soient-ils. Ne/
(150) suivons ni l’écologie « profonde » qui nie la spécificité de/l’espèce
humaine, ni le transhumanisme qui croit en la/suprématie des machines. La
science-fiction abonde en dystopies dans/lesquelles des robots asservissent
des hommes dénués de conscience, incapables/de rébellion mais, dans
notre réalité, ne tendons-nous pas/(200) vers cette révolution ? Contraints
par la technologie à agir vite/, nous renonçons au temps de la réflexion, de
la distanciation/et allons vers un nihilisme nietzschéen, une passivité amère
dans/un monde mercantile.
Prolongeant l’analyse nietzschéenne, Michel Houellebecq stigmatise
l’/apathie désenchantée de notre société post-moderne, sans foi ni/(250)
ambition. Les transhumanistes y ont toute latitude pour célébrer les/mérites
d’une alliance aboutie entre l’Homme et l’/ordinateur : les signaux évince-
raient signes et langage pour instaurer une/parfaite univocité. Si, avec notre
opacité, sombrerait notre humanité, ce/discours trouve néanmoins un écho
favorable, tant il rassure quant/(300) aux maux inhérents à notre mortalité.
Pourtant, rester éternellement vivants/, loin de nous apporter pugnacité et
spiritualité, nous rendrait à/une vie animale d’une pauvreté affligeante, sans
le langage/auquel la technologie novatrice doit son éclosion.
RÉSUMÉ DE TEXTE

Opposer au machinisme/dominant la supériorité de l’humain tient-il désor-


mais du/(350) combat d’arrière-garde ? Qui oserait renoncer aux bénéfices
des/avancées médicales sophistiquées, du cœur artificiel aux robots d’assis-
T echnologique

tance/chirurgicale ? Ceux qui s’y risquent, tels les Amish, restent/marginaux.


Les apprentis sorciers que nous sommes sauront-ils cadrer/, limiter l’ex-
pansion technologique dans un salvateur sursaut de conscience/(400) et de
soif de liberté, face à la puissance exponentielle/des GAFA ?
412 mots

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Service éditorial : Marjorie Champetier, Benjamin Dias Pereira,


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Dépôt légal à parution


ISBN 978-2-7590-3844-2

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