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Droit pé nal

Les faits justificatifs

Commentaire d’arrê t
Chambre criminel, 19 février 1959, Reminiac

L’arrêt Réminiac pose le délicat problème du bien fondé de la légitime défense dans le
cadre de l’article 329 de l’ancien code pénal, aujourd’hui article 122-6 du nouveau code pénal
qui énonce que :  « Sont compris dans les cas de nécessité actuelle de défense, les deux cas
suivants:

   1o Si l'homicide a été commis, si les blessures ont été faites, ou si les coups ont été portés
en repoussant pendant la nuit l'escalade ou l'effraction des clôtures, murs ou entrée d'une
maison ou d'un appartement habité ou de leurs dépendances;

   2o Si le fait a eu lieu en se défendant contre les auteurs de vols ou de pillages exécutés


avec violence. »

Avant toute chose et sans tombé dans la dissertation, il convient de définir les termes qui
constitues le thème de cet arrêt, à savoir la « légitime défense ». Le Cornu la définit comme
suit : « La légitime défense est une réaction justifiée; plus précisément, état de celui qui, sous
le coup de la nécessité de protéger sa personne ou celle d’autrui, ou même des biens, contre
une agression injuste (actuelle ou imminente) commet lui-même un acte interdit par la loi
pénale, situation qui vaut pour lui fait justificatif, si du moins l’intensité de sa riposte est
proportionnée à la gravité de l’atteinte, sous la précision que la légitime défense des biens ne
justifie jamais un homicide involontaire. »

Entre l’article du code pénal qui pose une présomption de légitime défense et la définition
couramment fournit de celle ci se dégage le problème d’un tiraillement entre présomption
simple et présomption irréfragable.

Dans la nuit du 11 septembre 1954, Monsieur Tison se présente au domicile de Monsieur


Reminiac dans le but de rendre visite à une domestique de ce dernier, dont il était autrefois
l’amant et qu’il continuait de fréquenter. Il se voit refuser l’accès de la maison en raison de
son état d’ébriété, mais bien décidé à arriver à ses fin, il brise deux carreaux et une imposte à
l’aide d’un pieu arraché à une clôture, puis pénètre dans le jardin de Reminiac en escaladant la
toiture d’un garage. Reminiac se rend alors dans son bureau pour aller y chercher un revolver
qu’il prend soin de charger et d’armé, puis se rend dans une pièce du premier étage et se poste
devant une fenêtre puis tire deux coups de feu dans la direction de l’endroit ou il supposait
que se trouvait Tison. Ce dernier est alors touché au poumon par l’une des deux balles tiré,
alors qu’il fumait une cigarette derrière les buissons du jardin.

La Cour d’appel dans sa décision refuse, de façon justifié, de faire application des articles
328 et 329 du code pénal qui consisterai à accorder au prévenu une justification au meurtre
commis dans le cadre de la légitime défense. Elle motive sa décisions en déclarant que les
circonstances n’étaient pas de nature à laisser percevoir un danger imminent pour les biens ou
les personnes, et que de surcroit la présomption posé par l’article 329 du code pénal n’est pas
irréfragable et est donc susceptible de céder devant la preuve contraire.

Le défendeur déclare qu’il agissait dans le cadre de la légitime défense et demande que lui
soit fait bénéfice de l’application de l’article 329 du code pénal, de façon à ce que soit
considérer comme légitime le meurtre commis dans les circonstances évoquées par l’article
prés cité c'est-à-dire « …Si l'homicide a été commis, si les blessures ont été faites, ou si les
coups ont été portés en repoussant pendant la nuit l'escalade ou l'effraction des clôtures,
murs ou entrée d'une maison ou d'un appartement habité ou de leurs dépendances… »

Dans quelles mesures la Cour de cassation met elle fin à la controverse planant sur le
caractère de la présomption légale de l’article 329 du code pénal ?

La Cour de cassation considère que la décision de la Cour d’appel est justifié, et par
hypothèse considère que les circonstances dans lesquelles furent invoqués la légitime défense
ne permettez pas de penser que l’agresseur représenté un danger imminent pour les personnes
ou pour les biens, qu’ainsi la riposte dont c’est prévalut le prévenu était disproportionné par
rapport aux actes dont il était victime et ne lui permettez pas de mettre en œuvre les
dispositions de l’article 329 du code pénale, dont la présomption est succéptible de céder face
à la preuve contraire. Ainsi par cet arrêt la Cour de cassation tranche la question de la nature
de la présomption posé par l’article 329 du code pénal, et déclare que celle si est une
présomption simple.

I/ L’invocation de la légitime défense


Le prévenu fonde sa défense sur la légitime défense et peut d’ailleurs faire valoir bon
nombre de décisions antérieures qui ne font que corroboré son geste.

A/ La similarité des faits et des textes


Le prévenu, comparait pour meurtre et invoque la légitime défense de l’article 329 du code
pénal qui énonce deux cas particuliers compris dans la notion de légitime défense : «  Si
l'homicide a été commis, si les blessures ont été faites, ou si les coups ont été portés en
repoussant pendant la nuit l'escalade ou l'effraction des clôtures, murs ou entrée d'une
maison ou d'un appartement habité ou de leurs dépendances ».

D’un point de vue purement comparatif il est aisé de voir que les faits énoncés par les textes
et les circonstances de l’agression de Reminiac sont relativement similaire. En effet, Tison
c’est bien introduit avec effraction dans une propriété qui n’était pas la sienne, ceci en
escaladant un mur, de nuit, et le propriétaire a bien commis un homicide en tirant sur la
personne qu’il considérait comme son agresseur. De plus le texte n’évoque aucunement la
nécessité d’un danger imminent et actuel, et ne fait que décrire une situation qui rend la
solution applicable si une personne se trouve dans le cas décrit.

Les faits énoncés à l’article 329 du code pénal sont suffisamment clair et précis pour qu’il ne
soit guère envisageable de ne pas les appliqués en l’espèce. De plus cette application ne peut
être que renforcé par l’article 322 du code pénal qui énonce des faits tout à fait similaire, mais
dans un cadre météorologique différent : «  Les crimes et délits mentionnés au précédent
article sont également excusables, s'ils ont été commis en repoussant pendant le jour
l'escalade ou l'effraction des clôtures, murs ou entrée d'une maison ou d'un appartement
habité ou de leurs dépendances ».

Si il est possible que ce type de solution soit applicable quant les faits ont lieu le jour, il n’y a
aucune raisons pour qu’il n’en soit pas de même pour des faits similaire qui seraient commis
de nuit.

Bien entendu la nature de la menace va venir tempérer la décision de la Cour de cassation.

B/ La nature de la menace
Est-ce que Tison représentait une menace pour les personnes ou pour les biens ? Le but de
sa visite est gouverner par sa relation avec une domestique du prévenu, et désire donc entré en
contact avec elle. L’entrée lui est refusé par le fait qu’il se trouve sous l’empire de l’alcool, et
c’est cela qui entrainera son intention d’entré par effraction dans la propriété de Reminiac. Si
ont s’en tiens à cela, il est difficile de voir en Tison la représentation d’un danger, son projet
ne se bornant qu’a sa mise en relation avec une personne qu’il connait.

Mais est ce que Reminiac était conscient des intentions réel de Tison, c’est autre chose. En
effet si l’ont peut considérer avec le recul que Tison n’avait pas d’intention délictuelle, le
prévenu était il en mesure de percevoir cela au moment des actes dont il est question ? Se
pose alors le problème de savoir si le caractère dangereux était perceptible au moment des
faits, et bien sur le problème de la réaction du prévenu diriger par la peur ou l’ignorance.

Un auteur, Savey Casard, nous dit qu’en l’absence de discernement des intentions de
l’agresseur par celui qui invoque la légitime défense de l’article 329 du code pénal, celui ci
serai présumé, de façon irréfragable, avoir agit en état de légitime défense. Cette position
n’est néanmoins pas très suivit par la jurisprudence.

La doctrine de l’époque évoqua divers explication sur la nature de cette disposition de


l’article 329 du code pénal, ont peut citer notamment l’évocation d’une présomption
irréfragable par certains auteurs, thèse qui sera consacré par la jurisprudence dans divers
arrêts de la chambre criminel. Pourtant, ces arrêts mettent en œuvre les dispositions de
l’article 329 sans que l’auteur de la légitime défense n’est subit une menace de nature à le
mettre en danger (il s’agissait de maris éliminant leurs concourants, amants de leurs épouses
lorsque ceux ci s’introduisaient dans le domicile conjugale).

Finalement la doctrine aboutira à la conclusion que le législateur posé un cas de présomption


de légitime défense, donc de bonne foi de celui qui l’invoque, contrairement à la notion
habituelle qui veut que celui qui invoque la légitime défense la prouve.

Il également possible, de façon plus bancale, de voir un fondement historique au travers des
disposition de l’article 329. En effet, le droit romain au travers de « l’obligatio ex délicto » et
plus particulièrement du «  furtum manifestum » ou flagrant délit nous montre quelques
similitudes avec le code pénal de 1810. Et en la matière la « Lois des XII tables » édicte un
régime rigoureux, d’autant plus rigoureux quand le crime est commis de nuit. Dans cette
hypothèse la victime pouvait mettre à mort le voleur sans s’adresser au magistrat.

Mais à la date des actes qui retiennent notre attention les conceptions de légitime défense son
tout autre et le juge ne retiendra pas la menace comme étant illustratrice d’un danger
imminent pour les personnes ou pour les biens.

En effet, Reminiac ayant connaissance des objectifs poursuivis par Tison, il pouvait
difficilement interprété ses intentions comme étant dangereuses.

II/ L’illégitimité de la riposte


Le fait que la menace que représenté Tison ne soit pas reconnut comme réel et sérieuse
engendre nécessairement un faussé entre celle-ci et la réaction de Reminiac.

A/ La reconnaissance d’une présomption simple


Le prévenu se réfugie derrière l’article 329 pour justifié son geste, et par ailleurs les arrêts
antérieurement rendus en la matière vont dans le sens de sa démarche. En effet, les
antécédents jurisprudentiel consacrant une présomption absolue de la légitime défense, le
prévenu n’avait pas à prouvé qu’il avait agit de façon raisonnable, la bonne foi de ce dernier
étant présumé. Cela donna lieu a nombre de décisions contestables.

En l’espèce le juge prend grand soin d’étudié les modalités de la riposte du prévenu, et
apprécie la proportionnalité de celle-ci par rapport aux actes de l’agresseur.
Néanmoins, il est difficile d’admettre la légitimité d’un meurtre commis dans des
circonstances qui ne nécessité pas une riposte de cette nature. En effet, Reminiac ayant eut
avant de tiré sur Tison, un contacte avec celui-ci, avait largement constaté que le prétendu
agresseur ne représenté pas une véritable menace pour les personnes ou les biens malgré son
état d’ébriété. Il avait donc en sa possession les informations nécessaire sur la nature de la
« menace » que représenté l’intrus, et pouvait par extension proportionné son geste, chose
qu’il ne fit aucunement en tirant sur l’individus à deux reprises, sans somations.

Ont peut donc voir chez Reminiac une véritable intention de mettre hors d’état de « nuire » le
prétendu auteur de la menace.

C’est ce manque d’appréciation de la situation qui mettra en avant le fait que pour user de
violence dans un but de protection, encore faut il qu’il y est un danger grave ou imminent.

En prouvant la disproportion du geste de Reminiac le juge démontre que cette présomption de


légitime défense posé par le code pénal est effectivement susceptible de preuve contraire, et
que par extension elle n’est pas irréfragable. C’est donc la consécration d’une présomption
simple de la légitime défense que nous apporte le juge au travers de sa décision.

B/ Une décision amplement justifier


Par cette décision la Cour de cassation met fin à une controverse jurisprudentiel, dû à la
rédaction hésitante de l’article 329 du code pénal, qui créa la tendance d’une interprétation
plutôt légère de ce texte en omettant l’appréciation du danger, pourtant fondamentale dans la
notion de légitime défense .

En effet, avant cette arrêt bon nombre de décisions ambidextres furent rendus penchant en
faveur soit d’une présomption simple soit d’une présomption irréfragable de la légitime
défense. Le mérite de cette arrêt réside donc essentiellement en l’affirmation d’une
présomption simple, celui qui invoque la légitime défense doit donc prouvé que ses actes
étaient justifier par les circonstances d’un danger imminent et actuelle, et grave pour les
personnes ou pour les biens. Par conséquent en l’absence de ces circonstances la légitime
défense ne pourra pas être invoqué.

Cet arrêt n’est donc pas à proprement parlé un revirement de jurisprudence, les antécédents
jurisprudentiel penchant soit du coté de la présomption simple, soit du coté de la présomption
irréfragable, mais brise l’équivoque planant sur le sujet en affirmant le caractère simple de la
présomption.

Cette décisions donnera le ton pour ces prédécesseurs, et donnera lieu à d’autres arrêts qui
poursuivront l’œuvre de la Cour de cassation dans sa démarche de rationalisation de la
légitime défense et d’affirmation d’une présomption simple qui est l’élément essentiel à la
détermination de la culpabilité de celui qui l’invoque.

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