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en rapport avec d’autres « novateurs », qu’ils s’appellent Gluck ou Pergolèse.

Enfin, l’article indéfini


« on », méritait une attention particulière.

La perspective historiographique s’imposait alors et entraînait une lecture juste du sujet tout entier –
pas seulement de la citation. Cette approche n'apparaît que dans une infime minorité de copies, les
discours sur la musique et son histoire n'étant que très rarement évoqués en termes de "points de
vue" et de perspectives. Le plus souvent, la notion de « révolution » est illustrée sans grand recul par
différents exemples. Un changement est assimilé à une « révolution », et l’explicitation de la citation
devient une juxtaposition d’exemples de changements dont la nature réelle est peu interrogée. La
seconda prattica de Monteverdi est mise trop souvent sur le même plan que l’Ars nova de Vitry par
exemple.

En revanche, certains candidats ont fait ressortir, au-delà de la seule notion de révolution, les
spécificités de la conception de l'histoire de la musique développée par l’auteur de l’article « École »
de l'Encyclopédie : d’une part, l'association style-école-individu (qu'il convenait de rapprocher de la
théorie du génie) et d’autre part, le mécanisme d'acceptation progressive de la nouveauté par le
truchement du « plaisir ». Les meilleures copies ont su souligner le présupposé « cyclique » de ce
processus en voyant l'histoire comme une succession de phases d'innovations soudaines imaginées
par un individu exceptionnel. C’est cette conception très particulière de l’histoire qui permettait de faire
se côtoyer notion de « révolution » et notion d’ « école ». Peu de candidats ont réussi à montrer que le
rapport que chaque œuvre entretient avec le passé implique une conception de ce qu’est l’histoire.

Voilà qui exige un rappel simple : l'histoire de la musique ne tombe pas du ciel ; elle est le fruit,
formalisé par différents auteurs, d'une interaction complexe entre les nombreux acteurs du monde
musical (qui ne se résume certainement pas aux seuls compositeurs) et la société en général. Le
sujet invitait à s'interroger sur son élaboration. Si quelques candidats ont su identifier les acteurs
évoqués dans la citation (en bref, le compositeur et son "public"), presque tous ont oublié un acteur
essentiel du processus : l'historien qui, à l'instar de l'auteur de la citation, met en forme les faits, alors
qu'il est lui-même plongé dans sa propre époque et soumis à une infinité de déterminants
socioculturels. Ne pas supposer les faits acquis comme des vérités révélées ou universelles était un
enjeu crucial de la question. Il n'est pas évident que ce message soit passé. Mais quelles que soient
les questions posées à l'avenir aux candidats, on ne peut que les encourager à développer leur
attention à la construction du discours historique.

Enfin, une lecture critique de la citation devait aussi approfondir certains biais qu'elle présentait : ainsi,
dire que "la France n'a connu que deux écoles" est une affirmation frappante dont trop peu de
candidats ont su s'étonner (il faut savoir s'étonner, et même, si possible, avec un peu de candeur et
de fraîcheur, pour découvrir les bonnes questions qui sous-tendent un sujet). Cette affirmation trahit
d'abord une bien faible profondeur chronologique d'à peine un siècle (puisque, à en croire d'Alembert,
rien n'a existé avant Lully). Ensuite, elle oppose ou, en tout cas, distingue deux compositeurs qui, de
notre point de vue historique, appartiennent — au-delà de leurs évidentes différences — à un monde
esthétique (disons, la « musique baroque française ») dont l'unité nous paraît aujourd'hui bien plus

Rapport agrégation externe – section musique – session 2011 12

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