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シネマ
MÉMOIRE
영화 __________
Olivier MEUNIER
_________________________________________________________________________
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
SOMMAIRE
SOMMAIRE 3
REMERCIEMENTS 7
INTRODUCTION 9
RESEARCH DESIGN 13
PARTIE 1 15
I. Intérêt du sujet 15
III. Problématique 19
PARTIE 2 19
I. Cadre théorique 19
REVUE DE LA LITTERATURE 29
1. Le Hallyu Coréen 31
2. Le Soft Power Taïwanais naissant 33
3. Le cool japan 35
II. Les politiques culturelles de ces pays et leurs enjeux 36
I. Le cinéma japonais 42
3
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
RECHERCHE EMPIRIQUE 63
PARTIE 1: Méthodologie 65
I. Le guide d’entretien 65
4
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
CONCLUSION 93
ANNEXES 99
BIBLIOGRAPHIE 172
5
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
6
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
REMERCIEMENTS
Je suis reconnaissant envers tous les professionnels qui ont pris part à ce
travail de recherche en acceptant mes demandes d’entretiens. Merci infiniment à
Thomas PIBAROT, Amel LACOMBE, Bastian MEIRESONNE, Eric LEBOT, Adrien
GOMBEAUD et David TREDLER, de m’avoir fait partager leur culture et leur amour
pour le cinéma asiatique.
7
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
INTRODUCTION
シネマ
영화
电影院
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
Ce travail a pour but de donner une vision globale de ces industries et pour
ce faire, il semble important de cadrer notre sujet. Le research design a cette
fonction. L’attrait du mémoire y sera exprimé, ainsi que les définitions de ses
principaux termes et les problématiques qui l’animeront. C’est également
l’opportunité d’offrir une première vision des deux grandes parties qu’il le précède.
Notre recherche empirique sera le moyen pour nous d’apporter notre pierre à
l’édifice. Nous essayerons de confronter ce qui aura été dit dans notre revue de la
littérature et en espérant pouvoir apporter des éléments supplémentaires qui
permettront de donner des réponses à notre sujet. Grâce à des témoignages de
professionnels du secteur, nous essayerons de comprendre ce qui définit ces
cinémas, comment ils sont représentés en France et quels en sont les subtilités.
Enfin, les recommandations auront la faculté d’ouvrir notre mémoire sur les
théories que nous aurons réussi à dégager et qui mériteront une analyse beaucoup
plus poussée.
1 GOMBEAUD, A. (2008). dictionnaire du cinéma asiatique. Paris, France : Nouveau Monde Edition.
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RESEARCH DESIGN
シネマ
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
PARTIE 1
I. INTÉRÊT DU SUJET
C’est en découvrant enfant des films comme Le Cercle des Poètes Disparus
de Peter Weir (1990), 12 hommes en colère de Sidney Lumet (1957) ou encore West
Side Story de Jerome Robbins et Robert Wise (1962), que mon attrait pour le
cinéma s’est développé. Mais c’est véritablement en regardant en cachette à l’âge
de dix ans Reservoir Dogs de Quentin Tarantino (1992) que j’ai compris que le
cinéma pouvait être autre chose qu’un simple divertissement. Cet art réunit la
musique, l’écriture, la photographie, la mise en scène et bien plus encore.
15
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
plus tard que le cinéma asiatique tient une place particulière dans le cinéma
indépendant et cela depuis longtemps déjà.
3Courmon, B. and Kim, E. (2013). LE SOFT POWER CORÉEN À L'ASSAUT DU MONDE. Monde Chinois.
ESKA, pp.30-41.
16
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
Comme nous venons de le voir, le japon est le premier pays d’Asie à s’être
doté d’une industrie cinématographique. Au niveau international, le cinéma
japonais est reconnu pour le première fois officiellement en 1951, quand
Rashömon, d’Akira Kurosawa (1950) est auréolé du Lion d’Or à Venise. S’en suit une
vague de films récompensés dans de nombreux festivals les années suivantes, avec
entre autres: La porte de l’enfer, de Teinosuke Kinuagas (1953), recevant la Palme
d’Or lors de la 7e édition du festival de Cannes. Mais c’est dans le cinéma de genre
que le cinéma japonais a le plus rayonné à l’international, même si on note un retour
du cinéma d’auteur japonais dans les années 1980. (Tessier, 2018)5.
5Tessier, M. (2007) « LES ÉCLATS DU CINÉMA JAPONAIS », 1895. MILLE HUIT CENT QUATRE-VINGT-QUINZE,
Le Giornate del cinema muto, Pordenone pp.117-131.
17
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
6Joinau, B. (2018). AUX ORIGINES DE LA VAGUE SUD-CORÉENNE : LE CINÉMA SUD- CORÉEN COMME
SOFT POWER. [online] Le Seuil, pp.107-120.
7Courmon, B. and Kim, E. (2013). LE SOFT POWER CORÉEN À L'ASSAUT DU MONDE. Monde Chinois.
ESKA, pp.30-41.
8 Lincot, E. (2015). EXISTE-T-IL UN « SOFT POWER » TAÏWANAIS ? Monde Chinois. ESKA, pp.129-132.
18
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
III. PROBLÉMATIQUE
Quelles sont les raisons qui expliquent l’expansion du cinéma d’Asie de l’est à
travers le monde?
Quelles sont les valeurs qui portent les cinémas d’Asie de l’est?
PARTIE 2
I. CADRE THÉORIQUE
19
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
Nous verrons ensuite les différentes politiques culturelles de ces trois pays.
Nous analyserons leur cinéma et les rapports de force face aux films hollywoodien/
occidentaux.
Puis nous constaterons leur diffusion dans leur pays et à travers le monde et
l’importance des marchés du films dans cet exercice.
Dans cet article Julien Bouvard s’interroge sur la popularité des oeuvres
japonaises en occident. Il y parle notamment du succès du manga et des animés
japonais qui ont su traverser les océans pour envahir les librairies ou les grilles de
programmes des télévisions occidentales. Mais il décrit également les nombreux
évènements visant à mettre en avant cette culture, comme la Japan Expo en France
par exemple. Il définit cette culture comme du Cool Japan.
20
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
politiques et sociaux. D’autant plus que l’histoire Taïwanaise est étroitement liée à la
Chine, où le cinéma d’auteur est quasiment inexistant.
Publié par le même éditeur du Cool Japan et de Soft Power Taïwanais, cet
article met l’accent sur la Corée du Sud et sa culture. Nous ne pouvons que
constater son influence dans le monde. L’article aborde aussi les politiques mises en
place pour promouvoir et protéger cette dernière.
21
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
Dans cet article, l’auteur nous expose la politique protectrice qu’ont les
coréens vis à vis de leur culture. Joo Jeongsuk y parle du rapport de force qui
s’opère entre le cinéma américain et coréen sur le territoire. Craignant une
américanisation, ils se sont longtemps repliés sur eux-même. Dotée d’une véritable
volonté de devancer Hollywood sur son propre territoire, la Corée est devenue une
« Blockbuster Nation », avec une véritable starification de leurs acteurs. Mais depuis
quelques temps, dans l’optique d’une stratégie de mondialisation, il tente d’exporter
leur culture notamment dans l’industrie musicale avec la K-Pop.
L’article nous définit la vague coréenne, aussi appelée Hallyu comme une
véritable volonté du pays de rayonner sur la scène internationale, comme nous
avons pu le voir précédemment. L’auteur y aborde plus en détail la spécificité du
cinéma sud-coréen. Nous comprenons ainsi que la libéralisation de son industrie
cinématographique est récente. Jusqu’aux années 1990, le cinéma était controlé et
en quasi-monopole. Son histoire a été marquée par la censure, et il a fallu attendre
1996 pour que cette pratique soit considérée comme « anticonstitutionnelle » par le
pays. Nous avons aussi un aperçu des méthodes de production et de distribution en
Corée du sud. Nous voyons que l’état s’implique énormément dans 7ème art
aujourd’hui, au moyen de subventions, soutiens et législations, car cette industrie
représente un moyen de rayonner au niveau international. Un modèle d’ailleurs
calqué sur le système français.
22
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
Max Tessier, expose l’histoire du cinéma japonais à travers les grands films
qui ont fait son histoire. Il nous permet de situer leur cinéma à travers le monde et
de le positionner sur le marché mondial. Le cinéma traditionnel japonais y est défini,
notamment à l’époque du muet. Les différentes tendances de mises en scène qui
ont fait vibrer l’industrie du pays au soleil levant, mais aussi les différents genres qui
ont caractérisé leur cinéma: films de samouraïs, policier, films nihilistes et le goût
prononcé pour les remakes.
Nous avons dans cet article, un point de vue intéressant sur la situation du
japon et la rupture qui a eu lieu entre le monde traditionnel et la culture moderne qui
serait alors corrélée à son industrie cinématographique. L’influence hollywoodienne
sur les oeuvres de fictions nippones a profondément marqué le paysage culturel
dans les années 1980. Aussi l’auteur expose aujourd’hui les différents sujets sociaux
abordés dans les films et la glorification de la violence. On comprend que malgré
une société rigide et disciplinée, le cinéma japonais est souvent exutoire et
impertinent, notamment dans le genre de l’humour. On nous parle entre autre du
nombre de films tournant en dérision le suicide alors que pourtant le japon est
énormément touché par ce fléau puisque le pays détient l’un des taux les plus
élevés au monde.
23
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
Cette étude quantitative est intéressante car elle démontre, comme dans
l’article précédent, l’importance des marchés de films. On apprend surtout que pour
de nombreux pays (dont la France) la diversité dans le cinéma est aujourd’hui très
recherchée. L’auteure y définit la diversité culturelle et y présente les principaux
chiffres clés. Cependant ce rapport ne fait pas mention de l’Asie.
24
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
25
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
Concernant mon guide d’entretien, je souhaite privilégier l’entretien semi-
direct. En effet la méthode directive n’offrira pas la liberté nécessaire à mes
interviewés pour qu’ils puissent dégager des pistes nouvelles d’explorations. Le
non directif ne me semble pas non plus très adapté, car ayant un sujet plutôt large,
je risque d’avoir une saturation d’informations si je laisse une totale liberté à mes
répondants. Cette situation serait alors très handicapante pour l’analyse de mes
données. Je devrai composer des guides d’entretiens en définissant plusieurs sous-
thèmes différents en fonction de la personne que j’interroge. En effet étant amené à
rencontrer des personnes aux métiers assez diversifiés, je me dois de me spécifier à
chaque fonction qui se trouve en face de moi. Ainsi, préparer à l’avance des
relances pour inciter mes répondants à rentrer un peu plus dans le détail. Ces
entretiens dureront entre 45 minutes et 1 heure chacun.
26
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
Par ailleurs, je comptais réaliser une veille des films asiatiques qui ont
rencontré le plus de succès ces dernières années. J’aimerais essayer de souligner
les grandes thématiques et tendances. Identifier les genres qui se dégagent de ces
cinémas, pour par la suite les positionner sur le marché mondial. Peut être au moyen
d’un grand mapping.
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
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REVUE DE LA LITTERATURE
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
Dans cette partie nous allons étudier l’industrie cinématographique des pays d’Asie
de l’Est en étudiant le travail déjà établi de certains auteurs. Comme nous avons pu
l’expliquer précédemment, ce mémoire de recherche se concentre essentiellement
sur la Corée du Sud, le Japon et Taïwan. Cependant nous serons amenés à parler
également de la Chine et plus particulièrement de Hong-Kong.
Puis nous analyserons plus spécifiquement leur cinéma et les politiques qui
visent à l’accompagner.
Enfin, comment ces pays ont réussi à se placer sur le marché international du
septième art.
1. Le Hallyu Coréen
1Courmon, B. and Kim, E. (2013). LE SOFT POWER CORÉEN À L'ASSAUT DU MONDE. Monde Chinois.
ESKA, pp.30-41.
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
Par ailleurs, ils démontrent que les sud-coréens ont depuis de nombreuses
années réussi à s’élever au rang de puissance économique. Ceci est en partie du à
leur culture qui s’est popularisée à travers le monde, améliorant ainsi leur image sur
le plan international. Toujours d’’après Barthélemy COURMONT et Eojin KIM:
32
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
2 Lincot, E. (2015). EXISTE-T-IL UN « SOFT POWER » TAÏWANAIS ? Monde Chinois. ESKA, pp.129-132.
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
3Stokes, M; Tsai, S. (2016) DEUXIÈME PARTIE. LES ÉTATS-UNIS ET SES FUTURES OPTIONS STRATÉGIQUES
DANS LE DÉTROIT DE TAIWAN, Forces motrices et implications pour la sécurité des États-Unis, ESKA, Monde
chinois. pp.22-24.
34
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
3. Le cool japan
Cette culture est alors de plus en plus considérée comme un soft power pour
les institutions nipponnes. L’état décide aujourd’hui de la soutenir et de la protéger,
notamment en luttant contre le piratage et en conservant des copies numériques de
chaque mangas, animés ou jeux vidéo, ainsi s’exprime pour l’auteur:
35
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
C’est l’une des causes de cette volonté suprême de vouloir mettre en avant le
Japon et sa culture.
Le Japon n’est pas le seul pays d’Asie à connaitre cette montée des discours
nationalistes dans sa culture. Frédérique MONVOISIN dans son ouvrage « CINÉMA,
D’ASIE, D’HIER ET D’AUJOURD’HUI » 5 rappelle que la Corée du sud a longtemps
5Monvoisin, F. (2015). CINÉMAS D'ASIE, D'HIER ET D'AUJOURD'HUI - JAPON, CORÉE DU SUD, TAÏWAN ET
CHINE. 1st ed. Paris: Armand Collin.
36
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
été une colonie, d’abord sous influence du Japon jusqu’aux années 1940, puis des
américains au sud et des soviétiques au Nord pendant la guerre froide.
Du fait de leur histoire, les coréens ont tendance à avoir une peur des
cultures étrangères. Il faut attendre 1998 pour que la diffusion d’oeuvres culturelles
japonaises soit autorisée dans le pays, jusque là interdite depuis 1945. C’était
évidemment à charge de revanche de la période douloureuse qu’ont connu les
coréens sous l’influence japonaise. Mais selon l’auteur cela traduit aussi un manque
de confiance dans leur propre culture, notamment vis à vis de la pop japonaise
qu’ils jugeaient à l’époque plus compétitive que la leur.
6Joo, J. (2011). TRANSNATIONALIZATION OF KOREAN POPULAR CULTURE AND THE RISE OF ʺPOP
NATIONALISMʺ IN KOREA.
37
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
Même s’il y a une présence occidentale plus importante, la musique n’est pas
en reste avec une forte exportation de la K-Pop. Mais cette large diffusion soudaine
à travers le monde a surpris, y compris les coréens, qui ont du mal à expliquer cet
engouement et peinent par la même occasion à justifier leur politique culturelle
protectionniste.
7 Lincot, E. (2015). EXISTE-T-IL UN « SOFT POWER » TAÏWANAIS ? Monde Chinois. ESKA, pp.129-132.
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
8Ching-Long Lu, M. (2015). TAÏWAN : LA DÉMOCRATIE EN ACTE. Interview menée par Emmanuel Lincot. pp.
6-12.
9Stokes, M; Tsai, S. (2016) DEUXIÈME PARTIE. LES ÉTATS-UNIS ET SES FUTURES OPTIONS STRATÉGIQUES
DANS LE DÉTROIT DE TAIWAN, Forces motrices et implications pour la sécurité des États-Unis, ESKA, Monde
chinois. pp. 22-24.
39
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
Pour Emmanuel Lincot10, c’est cette richesse qui est encore sous-exploitée et
trop peu mise en valeur par le gouvernement taïwanais. Il souligne que les aides aux
créations audiovisuelles et arts plastiques sont presque inexistantes.
10 Lincot, E. (2015). EXISTE-T-IL UN « SOFT POWER » TAÏWANAIS ? Monde Chinois. ESKA, pp.129-132.
11Bouissou, J-M. (2006). POURQUOI AIMONS-NOUS LE MANGA? Une approche économique du nouveau soft
power Japonais, Presses universitaires de France « Cités »
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
millions de BD françaises. Son prix attractif a conduit à faire gonfler ces chiffres, en
effet l’auteur illustre cet argument:
12 Gabilliet, J-P. (2009). BD, MANGAS ET COMICS : DIFFÉRENCES ET INFLUENCES, C.N.R.S Editions, Hermés
la revue.
41
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
Sur un autre point, pour Jean-Marie BOUISSOU, les mangas ont eu une réelle
influence sur le public international. Il a conduit à faire connaitre la culture nippone
de manière plus large. D’après son étude:
Le Manga a donc été un réel Soft-Power pour le Japon qui a su adapter cette
stratégie à d’autre secteur.
I. LE CINÉMA JAPONAIS
Ce n'est qu'au début du XXe siècle que ces pays réaliseront leurs propres
productions. Même s'il s'agit du premier point commun qui marque l'histoire du
cinéma dans ces pays, il est important de noter que chacune des nations possède
aujourd’hui sa propre industrie cinématographique.
Monvoisin, F. (2015). CINÉMAS D'ASIE, D'HIER ET D'AUJOURD'HUI - JAPON, CORÉE DU SUD, TAÏWAN ET
13
42
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
Dans un premier temps les films ne sont que des captations d'évènements de
la vie quotidienne à l’international. Cependant, toujours selon Frédéric MONVOISIN,
en avançant dans l’histoire il remarque:
43
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
Ce n'est que dans les années 1950 que les Etats Unis commencent à rendre
leur souveraineté aux Japonais. Surtout par nécessité car les troupes sont
mobilisées en Corée et ne peuvent pas gérer les deux territoires. Ceci conduit à
rendre la censure moins efficace. De nouveaux films sont produits comme par
exemple Rashomon de Akira Kurosawa (1950) qui connaitra un belle carrière
internationale puisqu'il sera auréolé du Lion d'Or au festival de Venise en 1951.
Monvoisin, F. (2015). CINÉMAS D'ASIE, D'HIER ET D'AUJOURD'HUI - JAPON, CORÉE DU SUD, TAÏWAN ET
14
44
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
C’est durant ces années que vont se définir les thèmes qui caractérisent le
cinéma japonais: le sexe et la violence... notamment selon l’auteur avec
45
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
Le cinéma japonais contemporain émerge dans les années 1990, on parle de neo-
eiga: « nouveau cinéma japonais », qui se distingue nettement du cinéma
traditionnel japonais mais aussi du cinéma international. Selon Jean Michel
DURAFOUR, dans son article « MATATABI: VERS LE CINÉMA JAPONAIS
CONTEMPORAIN DE FICTION » 15
Ces films usent d’une violence parfois outrancière, mais il faut rappeler que
cette dernière est souvent bien présente dans leur culture comme on a pu le voir
pour les mangas. L’esthétique du gore est souvent privilégiée au réalisme,
notamment pour séduire un public jeune. En effet la société japonaise étant très
rigide, les lycéens subissant parfois une éducation très stricte sont très adeptes de
ce genre d’agressivité. Comme l’explique toujours Jean Michel DURAFOUR, même
si cela ne concerne bien évidemment pas tous les films, le cinéma contemporain
japonais a pour principal objet d’être exutoire. C’est le cas notamment des films
comiques. En effet on ne compte plus selon lui les films qui ont tourné en dérision le
suicide alors que pourtant le pays possède l’un des plus forts taux au monde.
46
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
Jeongsuk JOO, que nous avons étudié plus haut, rejoint également Pierre
GRAS sur ce point dans son article « TRANSNATIONALIZATION OF KOREAN
POPULAR CULTURE AND THE RISE OF ‘‘POP NATIONALISM’’ IN KOREA »17. Les
oeuvres étrangères sont souvent exploitées lors de séances de cinéma moins
populaires ou à des horaires creuses à la télévision. Cette politique a conduit les
producteurs et les distributeurs coréens à développer au maximum leurs
productions locales. Ce fut une nécessité car l’offre cinématographique sud-coréene
17Joo J. (2011). TRANSNATIONALIZATION OF KOREAN POPULAR CULTURE AND THE RISE OF ʺPOP
NATIONALISMʺ IN KOREA.
47
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
à l’époque n’était pas suffisante pour les exploitants afin d’assurer une
programmation tout au long de l’année.
Mais même si la Corée reste réticente à importer sur son territoire des
produits culturels étrangers, elle est beaucoup plus encline à s’inspirer de leur
modèle économique. Toujours d’après Jeongsuk JOO, le ministère de la culture
s’est doté d’énormes moyens pour faire émerger entre-autre son cinéma. La
création du Conseil du film coréen financé par l’état joue un rôle de catalyseur.
Par ailleurs, pour en revenir à l’article Jeongsuk JOO, nous l’avons vu, la
Corée du Sud essaye aussi d’américaniser son modèle en devenant une
« Blockbuster Nation ». Le but étant de procurer les mêmes émotions aux
spectateurs sud-coréens qu’Hollywood peut le faire à travers le monde. Il y a une
réelle volonté de créer des stars locales parfois plus admirées que le star-system
américain. Nombreux sont les acteurs et actrices coréennes qui ont une célébrité
phénoménale dans leur pays. Il n’est pas rare d’utiliser leur images à des fins
publicitaire et autres produits dérivés.
C’est surtout dans les pays voisins que cela est le plus marquant où de
nombreux touristes se rendent en Corée du Sud, pour visiter les lieux de tournage
18Joinau, B. (2018). AUX ORIGINES DE LA VAGUE SUD-CORÉENNE : LE CINÉMA SUD- CORÉEN COMME
SOFT POWER. Le Seuil, pp.107-120.
19 Creton, L (2014). ÉCONOMIE DU CINÉMA (EN 50 FICHES), Armand Colin, 5e edition, pp. 126.
48
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
Enfin Benjamin JOINAU souligne aussi le goût prononcé pour les remakes et
la tendance à réadapter des films à succès étrangers. Une mode qui est apparue
dans les années 1990.
Ainsi des sujets plus tabous et audacieux sont abordés dans les films comme
Desire de KIM Eung Su (2002) l’une des rares oeuvres sud-coréenne évoquant
l'homosexualité.
Mais les années 2000 sont marquées par la sortie d'Old Boy de PARK Chan-
Wook (2004) qui rencontre un succès phénoménale à travers le monde.
Monvoisin, F. (2015). CINÉMAS D'ASIE, D'HIER ET D'AUJOURD'HUI - JAPON, CORÉE DU SUD, TAÏWAN ET
20
49
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
Par ailleurs le cinéma coréen a su diversifier ses genres, avec entre autre la
science fiction comme l’analyse Antoine COPPOLLA dans son article « LA
SCIENCE-FICTION DANS LE CINÉMA CORÉEN DU SUD ET DU NORD: ENJEU
CULTUREL ET POLITIQUE »21. Les traditions, toujours très présentes dans le pays,
chamano-taoïstes et hindo-bouddhistes ont favorisé l’émergence de ce type dans
l’industrie cinématographique. En effet elles ont offert aux auteurs une source
considérable de mythes et d’histoires imaginaires extraordinaires. L’apparition de la
science fiction dans les années 90 dans les productions sud-coréennes, est surtout
un moyen pour eux de s’exprimer pleinement sur les sujets sociaux qui touchent
leur pays et même parfois plus largement le monde.
A ce sujet, l’exemple le plus parlant est justement The Host, de Bong Joon
Ho (2006). Le film dénonce au moyen d’une créature fantastique, l’impérialisme
américain, la corruption politique et même la pollution.
Cependant au fil des années, l’État soutient de moins en moins les nouvelles
productions cinématographiques, et privilégié l'investissement dans la constitution
d’un patrimoine cinématographique avec la restauration des films et la mise en
place de lieux de conservation. La Korean Film Archive ( KOFA ) gagne en prestance
et en importance . Depuis 2007, de nombreux films anciens ont été restaurés et
remis sur le devant de la scène.
50
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
Aujourd'hui, bien qu’il ait acquis son indépendance, celle ci n'a jamais été
officiellement proclamée. Taïwan est aux yeux de l'ONU, toujours considérée
comme une province de la république populaire de Chine. C'est vers le début des
années 1980 que le Pays du Milieu perd de son influence sur la péninsule.
22 Monvoisin, Frédéric. Cinémas d'Asie, d'hier et d'aujourd'hui : Japon, Corée du Sud, Taïwan, Chine, Hongkong
(French Edition). Armand Colin. Édition du Kindle.
51
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
imprégné à l'image des films, Les Terroristes (kong bu fen zi, 1986), Confusion chez
Confucius (Du li shi dai, 1994), Mahjong (Ma jiang, 1996) ou encore Yiyi (2000). On
voit apparaitre à l'écran des enseignes américaines comme Starbuck Coffee, Hard
rock Café ou encore Mc Donald, ainsi que des signes extérieurs de richesse comme
des voitures de luxe souvent de marque allemande (Mercedes, Porsche, BMW...)
Toujours selon le même auteur, cette situation entraine:
Mais cette scission va encore plus loin, avec le réalisateur TSAI Ming-Liang
qui va aborder à la même période les thèmes de l'homosexualité dans ces films,
avec entre autre Vive l’Amour ! (1994). C'est la preuve que l'influence chinoise est de
moins en moins présente sur Taïwan. Aujourd'hui encore il s'agit d’un sujet
systématiquement censuré par les autorités de République populaire de Chine. À
l'image par exemple du film chinois East Palaca West Palace (Dōng gōng xī gōng) de
Zhang Yuang (1996), qui fut sélectionné à Cannes avant d’être rapidement interdit
par la Chine. Le gouvernement aura même confisqué le passeport du réalisateur
pour l'empêcher de présenter le film lors du festival de Cannes ainsi que neuf
années d’interdiction de tournage.
Mais pour en revenir à TSAI Ming-Liang, malgré une reconnaissance
internationale qui auréolera le film Vive L’Amour ! (1994 d’un Lion d'or au Festival de
Venise, le film reste cependant vivement critiqué par le peuple Taïwanais, il ne sera
d'ailleurs distribué quand dans des cinémas pornographiques.
Monvoisin, F. (2015). CINÉMAS D'ASIE, D'HIER ET D'AUJOURD'HUI - JAPON, CORÉE DU SUD, TAÏWAN ET
23
52
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
Il est vrai que l’un des premiers cinémas asiatiques à émerger à l’international
fut inévitablement le cinéma Hongkongais. Avec les années 1970 les films de Kung-
Fu ont littéralement déferlé sur le monde. En partie dû au travail monstrueux de la
société de production Shaw Brothers, créée en 1958 sur le modèle hollywoodien
avec de véritables studios. Les films de Bruce LEE rencontrent un succès
monumental dans le monde.
24Nathalie Bittinger. « LES CINÉMAS D'ASIE » (French Edition) . Presses universitaires de Strasbourg. Édition du
Kindle.
53
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
Certes cela s'explique par le lien historique étroit avec la Chine, mais aussi
par ses auteurs qui ne cessent d’exprimer cette culture chinoise déjà fortement
prédominante sur la péninsule.
Mais comme on l’a rappelé plus tôt avec l’article d’Emmanuel LINCOT25 la
culture taïwanaise ne se limite uniquement qu’avec sa relation avec la Chine, elle est
beaucoup plus riche qu’elle parrait. Peut-être faudrait-il encourager son exposition
au moyen du cinéma comme le suggère Emmanuel LINCOT dans son article.
25 Lincot, E. (2015). EXISTE-T-IL UN « SOFT POWER » TAÏWANAIS ? Monde Chinois. ESKA, pp.129-132.
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
55
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
Sur un tout autre point, Pierre GRAS, dans ce même article souligne
l’importance des festivals pour le cinéma coréen ces dernières années. Il fait
mention de celui de Pusan qui est devenu en quelques années un épicentre du
29Defoy, S. (2005), CORÉE DU SUD, DOULEUR ET PARTITION: MOTEUR DE LA CREATION. Ciné-Bulles, 23, pp
40-43.
56
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
cinéma coréens et qui a permis au monde entier de découvrir des réalisateur tels
que KIM Ki-duk, HONG Sang-soo ou encore LEE Chang-dong.
Nous l’avons dit les marchés de films permettent aux films de voyager et de
traverser les frontières. D’après Yannick DEHÉE dans le chapitre « L’ARGENT
D’HOLLYWOOD » de son ouvrage Le Temps Des Medias31, les marchés du film
internationaux ont pris de l’importance ces dernières années et les studios
hollywoodiens ont adopté une stratégie de co-production internationale en
s‘associant avec des artistes asiatiques comme Ang LEE, John WOO ou Tsui HARK.
Le meilleur exemple de cette tendance est la production et le succès mondial du
film Tigre et Dragon de Ang LEE (2002).
Nous avons étudié plus tôt, la puissance du soft power sud-coréen. Dans
l’article de Barthélemy COURMON et Eojin KIM33 et il y a un point important qui est
32Joo, J. (2011). TRANSNATIONALIZATION OF KOREAN POPULAR CULTURE AND THE RISE OF ʺPOP
NATIONALISMʺ IN KOREA.
33Courmon, B. and Kim, E. (2013). LE SOFT POWER CORÉEN À L'ASSAUT DU MONDE. Monde Chinois.
ESKA, pp.30-41.
57
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
abordé par les auteurs dans cette étude. Aujourd’hui les scénaristes coréens
profites de l’image qu’ont les étrangers de leur pays et savent exploiter certains
codes pour rencontrer un succès international. Selon les auteurs,
Comme pour le cinéma japonais dans les années 50/60 le cinéma coréen est
un outil pour faire la publicité de la Corée.
34oinau, B. (2018). AUX ORIGINES DE LA VAGUE SUD-CORÉENNE : LE CINÉMA SUD- CORÉEN COMME
SOFT POWER. Le Seuil, pp.107-120.
35 Monvoisin, Frédéric. Cinémas d'Asie, d'hier et d'aujourd'hui : Japon, Corée du Sud, Taïwan, Chine, Hongkong
(French Edition), pp. 107. Armand Colin. Édition du Kindle.
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
36Courmon, B. and Kim, E. (2013). LE SOFT POWER CORÉEN À L'ASSAUT DU MONDE. Monde Chinois.
ESKA, pp.30-41.
37Defoy, S. (2005), CORÉE DU SUD, DOULEUR ET PARTITION: MOTEUR DE LA CREATION. Ciné-Bulles, 23,
pp.40-43
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
l’internationnal. Selon lui l’une des raisons qui peut expliquer ce phénomène c’est la
facilité dont font preuve les auteurs pour mélanger les genres dans un seul et même
film. Cela permet à des productions coréennes de toucher un public très
hétérogène.
Bruno DEQUEN dans son article « LE CHOC DES GENRES »38, explique que
l’une des grandes caractéristiques du cinéma asiatique est son hybridité de genre.
Selon lui, ce sont les asiatiques qui savent le mieux jouer sur ces codes sans pour
autant perdre le spectateur. D’après ses dires, c’est un véritable travail de
funambule, car le genre guide le spectateur dans le choix d’un film et il est parfois
difficile de concilier des genres qui sont pourtant opposés. Les asiatiques ont ce
savoir faire. L’auteur cite plusieurs exemples comme Audition du réalisateur japonais
Takashi MIIKE (1999) dont la première partie se rapproche d’une comédie
dramatique et bascule par la suite dans une violence inouïe et difficilement
supportable.
Des réalisateurs étrangers ont voulu adapter ce style dans leurs oeuvres.
Quentin Tarantino, a toujours revendiqué l’influence du cinéma d’asiatique dans sa
filmographie. Ses oeuvres sont également connues pour mélanger les genres.
Cependant contrairement au cinéma asiatique, Tarantino va tenter de créer une
harmonie entre eux et trouver un équilibre là où en asie, les réalisateurs présentent
leur film comme des « anti-genre »
38Bruno Dequen (2010), LE CHOC DES GENRES, Métamorphores - Nouveaux visages des genres, 24 images,
pp 20-21
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
Pour conclure brièvement, nous avons essayé ici d’offrir une vision
d’ensemble des industries culturelles et plus précisément du cinéma de ces trois
pays. Nous retiendrons essentiellement que leurs politiques culturelles, certes
différentes, suit néanmoins une même logique: Tenter de rayonner à l’international.
Leur cinéma apparait souvent comme un support de plus en plus mis en avant dans
ce but. Même si leurs industries cinématographique se distinguent de par leur
histoire, les thèmes qu’ils abordent et leurs situations socio-politiques, ils
conservent néanmoins des caractéristiques relativement similaires. Entre autres,
nous remarquons une volonté commune de mettre en valeur leurs cultures, leur
mode de vie et leurs traditions.
61
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
RECHERCHE EMPIRIQUE
シネマ
영화
电影院
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
PARTIE 1: Méthodologie
I. LE GUIDE D’ENTRETIEN
La forme de l’entretien semi-directif est l’une des plus utilisées durant les
études qualitatives. Cette option a très vite semblé tout à fait adapté à l’objet de la
recherche. L’objectif étant de comprendre comment le cinéma asiatique est
représenté en France et si on peut parler d’essor de ce dernier.
Il était important de définir au préalable les thèmes qui seront étudiés durant
ces entretiens. D’abord il faut que les répondants donnent leur définition du cinéma
asiatique. Cette vision sera forcément évoquée par eux mêmes mais il est important
de cadrer l’entretien au moyen d’un thème qui lui sera dédié.
65
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
Enfin l’objectif du dernier thème enfin est de savoir si on peut parler d’un
nouvel essor sur la scène internationale du cinéma asiatique ces dernières années.
66
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
Ces entretiens ont duré entre une heure et une heure quarante cinq minutes
pour le plus long. En raison du contexte sanitaire du au COVID-19 ces entretiens se
sont fais à distance et les éléments non-verbaux n’ont pas été étudiés.
Durant les entretiens, l’enquêteur doit limiter ses interventions dans le cadres,
et ne se manifester que pour recentrer le sujet ou bien évoquer un thème qui n’a pas
été abordé de lui même par le répondant.
Des biais ont été relevés pendant les entretiens. D’abord ceux exprimant la
liberté d’expression. Certains professionnels ont refusé d’évoquer ou de parler
librement de certains thèmes auxquels ils étaient invités à prendre position. Par
exemple sur la question de la sélection des films par le festival de Cannes, certains
répondants ont préféré prendre leur distance sur le sujet ou ont refusé d’être cités
sur les éléments qu’ils énonçaient. De même, l’objectivité de certains répondant
peut être questionnée. Il est compréhensible qu’un distributeur critique la stratégie
commerciale de Netflix. Ce sont des aspects inévitables, dont il faut avoir
conscience pendant l’analyse.
Les éléments récoltés au moyen d’une étude qualitative sont par définition
beaucoup plus denses que les données résultant d’une étude quantitative. Cette
richesse offre la possibilité d’explorer plus en profondeur un sujet mais elle rend
inévitablement son analyse plus complexe.
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
Un cinéma de
genre
L’exotisme
japonais
Taïwan, en wagon
de queue
Une demande du
public français
Un cinéma pensé
pour la France
L’importance des
festivals
La SVOD et la
démocratisation du
cinéma asiatique
Un nouvel essors
du cinéma
asiatique?
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
1Defoy, S. (2005), CORÉE DU SUD, DOULEUR ET PARTITION: MOTEUR DE LA CREATION. Ciné-Bulles, 23,
pp.40-43
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
Cependant il met en garde sur un point qui n’est pas négligeable et même
applicable à tout cinéma: La nationalité d’un cinéma n’est pas un genre.
2. L’exotisme japonais
Ceci expliquerait selon le répondant une des raisons pour laquelle le cinéma
japonais a un public si important en France. Dans ce sens, Bastian MEIRESONNE
rajoute:
71
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
C’est le même constat qui est fait avec le film Un Jardin Qu’On Dirait Eternel,
de Tatsushi Ōmori (2020). Le film mettant en valeur l’art de faire le thé japonais dans
un décor idyllique. Eric LEBOT, remarque que c’est d’ailleurs peut-être l’une des
seules cinématographies à mettre autant en avant sa culture, cependant il nuance
que ces films exportés ne sont jamais caricaturaux:
Amel LACOMBE, présidente d’Eurozoom est du même avis, les films qui
reflètent cette culture japonaise trouvent une grande résonance chez le public
admirateur du pays du soleil levant.
72
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
Cependant Adrien GOMBEAUD reste positif et nuance. Pour lui certain film
chinois arrivent à passer à travers la censure et ont une carrière internationale.
2 Lincot, E. (2015). EXISTE-T-IL UN « SOFT POWER » TAÏWANAIS ? Monde Chinois. ESKA, pp.129-132.
73
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
Pour Adrien GOMBEAUD, le cinéma japonais avait une place importante dans
la cinéphilie des français. Les films d’Ozu ont rencontré un grands succès, et des
oeuvres comme Épouses Et Concubines de Zhang Yimou (1991) faisaient déjà salles
combles dans les grandes villes.
De plus, pour Amel LACOMBE, les années 80 ont créés toute une génération
de « nippophiles » quand les mangas sont arrivés en France.
74
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
une cible très forte, demandeuse et fidèle. C'est plus large que
le cinéma.»
« Est-ce que les gens qui vont à la Japan Expo on les retrouve à
l'expo de Itō Jakuchū au petit palais […] C’est peut-être le cas,
je ne sais pas. Est-ce que c'est le même public qui va voir les
films de Kore Eda et qui lisent des mangas. Ou est-ce que c'est
deux genres de nippophiles qui cohabitent en France. Je ne
peux pas vous dire, je n'en sais rien du tout. »
Mais pour revenir à la diversité recherchée par le public en salle, elle existe
bien. Thomas PIBAROT, ne manque pas cependant de rappeler qu’il s’agit encore
d’un marché de niches, dont le plafond de verre des 200 000 entrées est assez
rarement dépassé par un film asiatique.
Certains sillons se forment avec des auteurs qui trouvent leur public. Les
distributeurs sont alors en concurrence avec des majors qui viennent sur leur terrain
une fois qu’il y a un potentiel économique. Comme le souligne Eric LEBOT, directeur
de chez ArtHouse:
3Bouissou, J-M. (2006). POURQUOI AIMONS-NOUS LE MANGA? Une approche économique du nouveau soft
power Japonais, Presses universitaires de France « Cités »
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
Amel LACOMBE nous fait d’ailleurs part de son expérience sur ce sujet.
Bien que ces films aient un public en France, pour certains des répondants, il
ne sont pas forcément l’expression de leur cinéma national. De l’aveu même d’Eric
LEBOT, il est paradoxal de constater que certains films asiatiques trouvent plus de
public en France que dans leur pays d’origine.
David TREDLER, ne manque pas non plus de rappeler que la part des films
qui sont importés en France ne représente qu’une infime partie de tout le cinéma
produit dans ces pays. Même s’il nuance, au sujet de la Corée du Sud:
76
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
Mais il explique également que ce cinéma populaire a des codes culturels qui
ne trouvent pas de résonances dans les pays occidentaux.
4Joo, J. (2011). TRANSNATIONALIZATION OF KOREAN POPULAR CULTURE AND THE RISE OF ʺPOP
NATIONALISMʺ IN KOREA.
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
Cette idée, se confirme quand quand on regarde de plus près les chiffres des
plus gros succès du cinéma sud-coréens. En effet sur les dix plus gros succès
nationaux au Box office sud-coréen seulement The Host (Bong Joon Ho, 2006) est
sorti en France. Puis, il rajoute que si ce marché est si fort c’est grâce à la politique
culturelle protectionniste qu’a été mise en place. Nous avons pu le voir dans l’article
« VITALITÉ DU CINÉMA CORÉEN »5 de Pierre GRAS que les quotas de
programmation ont permis à la Corée du sud de contrôler les importations et de ne
pas inonder les salles d’oeuvres étrangères, permettant au pays de développer sa
propre industrie.
« Alors c'est aussi parce qu'ils ont un système qui est en partie
inspiré du CNC et qui protège énormément leur cinéma, mais
aussi parce qu'ils ont mis en place des quotas dans leurs salles
pour limiter l'importation des films étrangers en salle. »
6Kil, S., & The Variety. (2019, 3 janvier). Dynamics Change as South Korean Box Office Ends Flat in 2018.
Consulté le 20 juin 2020, à l’adresse https://variety.com/2019/film/asia/korea-box-office-ends-flat-2018-
dynamics-change-1203099043/
78
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
80
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
Mais, ce rôle est beaucoup plus complexe que cela. En effet, Thomas
PIBAROT nous informe de leur impact sur le cinéma.
« Bong Joon Ho, son premier film, date de l'an 2000, donc ça
fait 20 ans qu'il fait des films. Kore Eda encore plus. »
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
Les institutions culturelles des pays d’Asie de l’est, ont d’ailleurs compris
l’importance des festivals. Comme le démontre David TREDLER avec le pays du
matin calme où de réelles politiques culturelles internationales ont été mises en
place afin de d’accompagner le Hayllyu à travers le monde :
Il n’est d’ailleurs pas rare pour le festival du film coréen d’accueillir le JT local
au sein du festival pour faire des reportages. L’exportation de la culture coréenne à
l’étranger est devenue une vraie fierté nationale. Ce point résonne avec le « pop
nationalism » évoqué par Jeongsuk Joo7. Cette idée est clairement exprimée par
Adrien GOMBEAUD:
7Joo, J. (2011). TRANSNATIONALIZATION OF KOREAN POPULAR CULTURE AND THE RISE OF ʺPOP
NATIONALISMʺ IN KOREA.
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
« Ce n’est pas sur les marchés internationaux qu'on peut nouer
ce genre de contacts. Ça c'est pour l'animation, c'est vrai que
pour la fiction ils sont plus dans une logique de vendeurs
internationaux et de rencontres lors des marchés de films.
» […] Il y en a, mais il faut aller au Japon. Mais en réalité il y a
très peu de gens qui sont accrédités. C'est une dynamique
complètement différente, si vous allez à Cannes au marché du
film, il va y avoir des japonais en effet, mais c'est très difficile de
créer le contact avec eux et d'avoir des infos sur leurs projets si
vous ne les connaissez pas déjà. C'est vraiment un marché qui
est pour les initiés. C'est un secteur compliqué. Et même
concernant ces marchés au Japon, ils restent très fermés. Ce
sont des espèces de réunions qui se tiennent à Tokyo tous les
ans. Il y a très peu d'informations dessus, c'est sur invitations et
ce sont des rendez-vous qui se font de pair à pair »
S’il y a une raison pour laquelle le cinéma asiatique a toujours été aussi bien
représenté en France, c’est en partie pour la forte implication de la France dans les
productions asiatiques et notamment au Japon. D’après Thomas PIBAROT:
84
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
Pour autant Amel LACOMBE, conteste cette opinion. Pour elle il n’y a pas de
volonté de positionnement de la part des auteurs.
« Ce sont des films qui ont leur propre culture ou leur propre
parcours. Il n'y a pas de positionnement en fait, chaque film a
sa propre aventure créatrice. L'animation japonaise n'essaye
pas de se positionner par rapport à d'autres films d'animation.
C'est un secteur créatif et culturel. » […] « Ils n'usent d’aucun
stéréotype, et c'est justement ce qui fait la fraicheur des films
japonais. Il n'y a pas de stéréotypes, mais il y a souvent une
attention aux détails de la vie quotidienne que les gens
apprécient énormément. » […] « Il y a une volonté de fidélité, de
spontanéité et d'authenticité et c'est ce qui plaît. »
S’il y a un acteur qui a tendance à empiéter sur le rôle des festivals ces
dernières années ce sont les nouvelles plateformes de SVOD. Comme nous
l’informe Thomas PIBAROT, « ils sont constamment en recherche de nouveaux
marchés. »
David TREDLER, reconnait être parfois amer quand il découvre que certains films
coréens se retrouvent directement sur Netflix, il a le sentiment que celui ci court-
circuite les festivals.
« Dès que j’ai vu les premiers films coréens arrivés sur Netflix,
j’étais un peu déçu. J’aurais aimé avoir pu les programmer au
festival. »
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
PARTIE 3: Recommandations
Il y a un point essentiel que nous n’avons pas abordé mais qui a été évoqué
par quelques répondants. Le cinéma asiatique n’est pas un cinéma mais des
cinémas. Adrien GOMBEAUD auteur du dictionnaire du cinéma asiatique nous l’a
rappelé:
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
Même si on peut y trouver des similitudes dues à leur passé étroitement liées,
il n’en reste pas moins qu’il s’agit de cinématographies parfois radicalement
différentes. Il a été difficile dans ce mémoire d’analyser ces cinémas dans leur
globalité en prenant en compte chaque spécifié sans faire d’amalgames. `
Le cinéma asiatique n’est pas un genre en lui même. Faire un syllogisme pour
définir ces cinémas tendent à restreindre la richesse du cinéma asiatique. Comme le
disait Adrien GOMBEAUD, un film sud-coréen n’est pas uniquement film avec des
antagonistes en costumes noirs. J’ai espoir d’avoir su donné une vision globale de
ces cinémas tout en réussissant à les distinguer dans leurs grandes lignes.
Nous l’avons vu le cinéma asiatique a toujours été très apprécié des français,
notamment le cinéma japonais. L’importation des oeuvres d’animation japonaise
main-stream a façonné toute une génération de nippophiles. Aujourd’hui on peut
espérer que le même modèle s’applique à la Corée au moyen par exemple de la
musique qui pourrait pousser les jeunes générations à découvrir ce pays, leur
culture au sens large et par la même le cinéma.
Nous savons déjà que des distributeurs comme Art House, ont fait ce pari. En
ayant créé une véritable communauté sur les réseaux sociaux avec le groupe
Hanabi, ils ont réussi à fédérer autour de la culture du Japon. Ce groupe représente
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
8LACHAUSSÉE, S., & MARTIN-WINKEL, E. (2020, mars 2). Coproduire avec le Japon.
Consulté le 8 mai 2020, à l’adresse https://avocatl.com/news/coproduire-avec-le-japon/
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
9EURIMAGES. (2018, août 1). Décisions de soutien lors de la 152ème réunion du Comité de
Direction d’Eurimages [Communiqué de presse]. Consulté à l’adresse https://rm.coe.int/
09000016808e7a36
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
CONCLUSION
シネマ
영화
电影院
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
Nous l’avons vu, de manière générale les publics occidentaux ont toujours eu
une appétence pour ce cinéma, en particulier pour le Japon. La culture asiatique
tient une place honorable dans le coeur des français, que ce soit pour les oeuvres
d’art, la gastronomie, la musique et bien évidemment le cinéma. Cet attrait vient des
relations culturelles étroites qu’on a toujours eu avec ces pays.
Il est encore trop tôt pour affirmer qu’il s’agisse d’un déferlement sur
l’occident. Bien qu’une Affaire de Famille et Parasite aient brisé le plafond de verre
des 200 000 entrées en France, un palier difficilement franchissable pour un film
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
On constate tout de même, une demande nouvelle pour ces films. Peninsula,
la suite du Dernier Train Pour Busan du même réalisateur, est le 16ème film le plus
demandé pour la communauté de Sens Critique en 2020. Aussi le festival du film
coréen constate une augmentation totale de sa fréquentation (+4% par rapport à
2018) alors qu’il se tenait sur 7 jours au lieu de 8 en 2018.
En étudiant ces trois pays, je me suis rendu compte que leur situation
actuelle pouvait définir les différentes étapes qui permettent à ces cinémas
d’émerger à l’international:
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
ANNEXES
シネマ
영화
电影院
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
TP: On a un catalogue très éclectique et on travaille pas mal avec l'Asie. Kore-Eda
est le réalisateur avec qui on a le plus travaillé réalisateur tout confondu, avec sept
films qu'on a sorti. C'est notre Woody Allen à nous, on sait que tous les deux ans on
va avoir un nouveau Kore Eda à défendre. Avec Manuel Chiche, on avait ressorti en
salle pour le compte de La Rabbia, l'une de ses filières, Les 7 Samouraïs. Au début
on a travaillé en association avec Wild Side et donc Manuel, c'est à dire qu'on co-
achetait et on co-distribuait. On a eu Snowpiercer, personne n’y croyait au début, on
s'est battu pour l’acheter. On l'a eu sur scripte, c'était un gros MG et il a eu un vrai
succès. Après on a eu The Murderer de Na Hong-jin. D'ailleurs je fais partie des
101
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
personnes qui pensent que Na Hong-jin est un immense réalisateur, il n’a pas encore
cartonné en France. En Corée du sud en revanche The Stranger a fait 10 millions
d'entrées. Mais ça va arriver, faut prendre le temps d'installer les auteurs sur un
territoire. On a fait aussi les deux premiers Detective Dee avec Manuel dans le genre
blockbuster historique. Tu vois ça, tu te dis pourquoi on ne fait pas ça en France ?
Mais oui on n’aime pas se mettre des frontières, alors il y a des pays avec lesquels
on n’a pas travaillé comme on est fidèle au réalisateur. En revanche depuis qu'on ne
travaille plus avec Manuel Chiche, on en rentre moins mais on adore ce cinéma-là.
Après ce n’est pas toujours simple pour un distributeur. Il y a des films qui sont trop
chers, que l'on ne peut pas acheter, par exemple The Spy Gone North, j'avais vu le
film, j'ai dit au vendeur "J'adore le film, mais je ne saurai pas le sortir". En
l'occurrence c'est Metropolitan qui l'a sorti. En tant que distributeur, il y a des films
qu'on adore et que parfois on ne peut pas les acheter. Soit parce qu’ils sont trop
chers, soit parce qu’on ne voit pas le potentiel économique. Alors en tant
qu'indépendant, on espère au moins équilibrer mais c'est vrai que le but c'est
d'essayer de gagner de l'argent ou du moins ne pas en perdre, de faire assez
d'entrées pour vendre à canal+, faire des DVD de la VOD et potentiellement une
vente TNT...
TP: En France on est un des pays européens qui est le plus ouvert à la diversité du
cinéma. Il y a une réelle demande du public que les distributeurs ont habitué à ce
cinéma du monde. Il y a toujours eu une niche pour ce marché parce qu'il nous
offrait ce qu'on ne voyait pas ailleurs. Old Boy a changé les choses, tous les
distributeurs ont commencé à acheter des films coréens, chers, trop chers parfois
mais ça ne suivait pas car il n'y avait pas les talents derrière. Il y avait aussi un
plafond de verre, où on ne pouvait pas faire plus que 200 000 entrées. Parce que ce
sont des films qui sortent en VOST, souvent dans des salles Art & Essais et
102
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
uniquement dans des grandes villes. Et quand Kore Eda et Bong Joon Ho gagnent
la Palme d'Or, on peut se dire qu'on a peut-être brisé ce plafond de verre. Parasite
est sorti en VF après, il a été acheté par France 3. Et ça, c'est assez inédit.
Généralement ce sont des films qui n’intéressent pas la TNT, à part ARTE.
Il y a cette dichotomie en France entre ce public d'Art & Essais, qui est un public
âgé qui veut voir La Saveur des Ramen, et ce que représente réellement le cinéma
de ces pays-là qui est beaucoup plus jeune, nerveux... et pour ces films-là tu as plus
de mal à trouver des salles en France.
OM: Du coup ils se retrouvent directement en DVD ou bien sur les nouvelles
plateformes de SVOD?
TP: Les nouvelles plateformes de SVOD, comme Netflix ils sont constamment en
recherche de nouveaux marchés. Et ils s’intéressent énormément au marché
asiatique parce qu’il y a plein d'opportunités pour eux. Alors ça a commencé en
finançant Okja, Psychokinesis de Yeon Sang-ho réalisateur du Dernier Train Pour
Bussan, la série avec les zombies avec Kingdom. C'est vrai que ça permet une
démocratisation et un accès plus facile. On l'a vu avec Case De Papel, ça eu
103
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
OM: Pouvons nous aborder la représentation des films asiatiques sur les marchés
internationaux et les Festivals?
104
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
C'est un cinéma qui a conquis la France grâce à des réalisateurs comme Park Chan
Wook et Bong Joon Ho reconnus par la presse et les grands festivals. Cannes joue
d'ailleurs ce rôle d'incubateur. Et petit à petit la niche s'est agrandie pour arriver à
Parasite. Le rôle des festivals est prédominant là-dedans. Il faut que la presse suive,
et elle suit quand il y a des festivals qui font confiance aux films, puis il faut
évidemment un succès public.
105
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
savait que le film était relativement accessible et que c'est un film de famille pour la
famille. Et on a eu raison, le film a fait plus de 800 000 entrées. Alors bien entendu la
palme a donné un éclairage considérable au film mais c'est aussi en partie dû à tout
le travail qu'on a fait depuis I Wish et qu'il y a 15 ans de films de Kore Eda sortis en
France avant. Pour qu'une cinématographie explose vis à vis d'un public, il faut que
l'industrie s'en empare, que les distributeurs achètent des films et qu'ils prennent le
temps. L'industrie du cinéma japonais a été marquée par le cinéma d'animation il y
a eu la vague de Miyazaki, qui avait fait un million d'entrées, puis il y a eu Hosada,
ou Makoto Shinkai. Mais c'est vrai que sur la fiction hormis, Kore Eda et Ryusuke
Hamaguchi il manque encore des auteurs.
On attend tous que le cinéma indien prenne, et il y a eu plein de tentatives avec les
films d'Anurag Kashyap par exemple, mais il n'y a jamais eu de vrai
accompagnement de ses auteurs et surtout une pédagogie vis à vis du public, des
festivals et de la presse qui a été faite.
TP: La présence des films asiatiques sur les marchés de films c'est la même depuis
10 ou 15 ans. Il y a toujours eu des asiatiques à Cannes, c'est d'ailleurs la force de
Cannes ; tu en as eu un temps à Venise. En revanche je pense que sur les prochains
marchés du film, il va y avoir une vraie demande à voir les films coréens, parce que
c'est comme ça que marche l'industrie, tout le monde va vouloir avoir le nouveau
Parasite. Ça ne veut pas dire forcément qu'on va tout acheter mais au moins on va
voir un peu plus. Ça c'est une très bonne nouvelle.
TP: D'un point de vue historique le japon sort de la deuxième guerre mondiale
ravagé et détruit. C'est la fin de l'empire, ils se prennent deux bombes atomiques, et
106
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
107
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
Par rapport cet appétence pour le cinéma asiatique, en France il y a toujours eu une
curiosité. Dans les années 1970, ce sont les films de Bruce LEE qui attiraient les
foules. Bruce LEE deviendra une star mondiale tout comme Jackie CHAN plus tard.
Les films de Kung Fu et de Karaté ont fait des millions d’entrées à travers le monde.
Alors il y a eu du bon et du moins bon, il y avait peu de cinéma d’auteur. Certains
ont essayé comme les films de Jackie Chan, mais bon on regardait ça un peu en se
pinçant le nez. Mais il faut se rappeler que durant le festival de Cannes de 1975 il y a
eu A Touch Of Zen de King YU qui a été récompensé. Et au delà de ça l’influence du
cinéma asiatique est depuis de nombreuses années considérable et ne date pas
d’hier. Si on prend le cinéma d’Hong Kong, beaucoup de cinéastes s’en sont
inspirés, Matrix en est le parfait exemple. Hong Kong était un petit territoire mais qui
produisait plus d’une centaine de films par an avec une créativité de dingue. Hong
Kong était déjà un espèce de maelstrom ultra créatif, avec entre autres comme
réalisateurs Ringo LAM, Fruit CHAN, Kirk WONG […]. Ces réalisateurs sont d’ailleurs
tous partis aux Etats Unis pour réaliser des films, avec parfois plus ou moins de
succès et on constate cette même tendance chez les acteurs comme Chow YUN-
FAT qui est une énorme star dans son pays qui a également eu une carrière
américaine. C’est vrai que depuis la rétrocession a un peu périclité.
Mais s’il y a quelque chose de commun dans les cinémas des pays d’Asie de l’Est,
c’est cette capacité à mélanger les genres. On a souvent des films très violents et à
la fois ultra sentimentaux. En Europe c’est un cinéma pas blasé, mais plus mélo
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
disons. En Corée, il font un vrai mélange des genres, nous on a tendance à regarder
ça avec un oeil un peu naif, mais c’est un vrai-savoir faire.
Pour la Corée à l'époque, il y avait un gros marché vidéo. Les films de genre
coréens faisaient des cartons en DVD parce que c'était le seul cinéma où on avait
cette esthétique de la violence. Et c'était pareil pour le cinéma japonais, les films de
Yakuza. C'était une autre cinématographie pour nous, vis à vis de nos goûts
occidentaux. Il y avait cette violence, mais aussi un mélange extrême des
sentiments. Sans oublier la sexualité qui est montrée et exprimée. Là encore ce goût
pour le genre, pour cette sexualité crue, c'est extrêmement lié à leur histoire. Ce
sont des pays qui ont connu des gouvernements autoritaires dans le passé et cela a
eu une grande influence sur eux. Dans leur culture ce sont des peuples très
disciplinés, réservés, obéissants et le cinéma pour eux c'est un exutoire. Le genre
c'est un moyen de faire passer des messages.
De plus la Corée a un cinéma national qui est hyper important, qui marche mieux
que le cinéma américain chez eux. Le cinéma coréen fait plus d'entrées que les
blockbusters américains. Alors c'est aussi parce qu'ils ont un système qui est en
partie inspiré du CNC et qui protège énormément leur cinéma, mais aussi parce
qu'ils ont mis en place des quotas dans leurs salles pour limiter l'importation des
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
films étrangers. Mais les films qui marchent chez eux, ils ne sortent pas en France
ou uniquement en DVD. Par exemple A Taxi Driver est un film sud-coréen qui a fait
peut-être plus de 12 millions d'entrées chez eux et qui n'est sorti qu'en DVD chez
nous. Et ça c'est parce qu’il faut qu'il y ait un prisme de cinéma d'auteurs. Pour
nous les cinémas coréens, le cinéma japonais, il faut que ce soit par le biais d'un
réalisateur reconnu. On fait un peu cet amalgame, qui n'est pas très grave : cinéma
asiatique / cinéma d'auteurs. Mais leur cinéma est beaucoup plus large que ça. Et
c'est pareil au japon, leur industrie se porte très bien, c’est un peuple de cinéphiles
en 2019 c'est 200 millions de spectateurs et 230 pour la Corée du sud.
L'industrie cinématographique japonaise a beaucoup été dopée par l'animation.
Leur industrie a rayonné à l'internationale sur toute une génération. Moi c'était
Goldorak, mais le club Dorothée ou Miyazaki a marqué toute une génération. Alors il
y a eu un creux, entre les années 90 et 2000 puis il y a eu Eurozoom en France qui a
fait un gros travail sur l'animé japonais. Et c'est toujours parlant ça, ils ont sorti Les
Enfants Loups d'Hosada et ils ont fait 200 000 entrées puis quelques années après
Gaumont a acheté Le Garçon et la Bête et Wild Bunch a pris Miraï. Il s'est passé la
même chose sur Your Name de Makoto Shinkai qu'a aussi sorti Eurozoom et qui a
cartonné, son film suivant Les Enfants du Temps c'est BAC FILMS qui l'a eu. Ça
prouve que c'est un marché qui a du potentiel et que tout le monde s'y essaye.
C'est Eurozoom qui a fait ce travail de défrichage, mais tu sais bien "les
distributeurs sont des tueurs". Mais c'est un important pour un distributeur de
défricher. Nous au Pacte on a la chance d’avoir trouvé Kore Eda, Manuel Chiche suit
Bong Joon Ho depuis quelques temps, même si ça lui ai arrivé de changer de
distributeur, Diaphana a Lee Chang-dong, et il y a même des société qui se sont
spécialisée dans le cinéma asiatique. Comme Art House et le cinéma japonais. Et le
but c'est d'imposer ces réalisateurs pierre après pierre, film après film. On cherche
aujourd'hui des nouveaux réalisateurs. On a besoin d'explorer et de faire ce
défrichage. Tout le distributeur cherche le nouvel Almodovar, le nouveau Park Chan
Wook... Il n'y a pas beaucoup de nouveaux territoires à explorer aujourd'hui, dès
qu'il y en a un qui émerge il est très vite pris. Chaque distributeurs a sa spécificité
mais c'est parfois compliqué de trouver des projets audiovisuels.
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
Pour résumer: L’émergence elle arrive avec la vague coréenne dans les années
2000, mais elle ne s’est pas faite toute seule.
OM: Merci en tout cas pour cet entretien. Ce fut un plaisir d’échanger avec vous.
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
PRÉSIDENTE D’EUROZOOM
AL : J'ai en effet pas mal de films japonais dans mon catalogue. Il y a quinze ans, je
suis venue au cinéma japonais par frustration du fait de la très faible représentation
de l'animation en France. Je me suis rendue compte qu'il y avait des titres
d'animation japonaise qui avaient un grand succès au Japon et qui ne sortaient pas
du tout en France. À l’époque, on n’acceptait l’animation japonaise que pour
Miyazaki. Les films du studio Ghibli c'était bien le reste on n'en voulait pas. C'est
plutôt par ce biais là que je suis arrivée au cinéma japonais. Chaque distributeur a
besoin d'un pré carré qu’il peut cultiver pour pouvoir grandir. J'avais déjà repéré par
goût personnel ces films qui n'existaient pas au cinéma en France et qui étaient
d'une grande qualité, très diversifiés, très riches et je m’y suis attelée alors qu'à
l'époque personne n'en voulait. Quand j'ai sorti le premier film d'animation japonaise
au cinéma c'était Appleseed, réalisé par Shinji Aramaki qu'on a retrouvé bien plus
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
tard dans un grand succès qui était Albator, à l'époque où je l’ai sorti tout le monde
m'a dit mais « ça c'est pour le club Dorothée, on n'en veut pas de tes robots on ne
veut pas de ton film... ». Ça a été une très longue traversée du désert pour creuser
un sillon qui aujourd'hui est reconnu. Le marché de l'animation japonaise, hors
Miyazaki, est reconnu comme un vrai marché de cinéma. Je suis plutôt partie du fait
qu'en France, il y a une communauté qui a été biberonnée par quelque chose à
l'époque qui avait très mauvaise réputation puisque Ségolène Royal et autres
politiques avaient demandé à ce que ça soit interdit : c'était l'animation japonaise
dans le club Dorothée. C'est tout de même quelque chose qui a marqué vraiment
toute une génération, qui était complètement nouveau à l'époque. Cela a permis aux
jeunes de s'ouvrir sur une nouvelle culture. Aujourd'hui ces gens-là ont grandi et on
les retrouve par exemple tous les ans en masse à la Japan Expo. Cette cible-là est
très attentive à tout ce qui est l'animation japonaise, mais aussi à tout ce qui est
culture japonaise. Je pense que c'est une cible très forte, demandeuse et fidèle.
C'est plus large que le cinéma. Je me suis appuyée sur ce public nippophile au sens
large pour imposer, non sans difficultés, auprès des salles et de la presse généraliste
le cinéma d'animation japonaise et cela a été une vraie épreuve. Aujourd'hui j'estime
que c'est vraiment Eurozoom qui a créé le marché de l'animation japonaise hors
Ghibli en France. Bon, maintenant je suis dans la phase de revers de médaille, c'est
-à-dire que j'ai montré que c'était un marché qui avait du potentiel et j'ai face à moi
des surenchères énormes en termes de prix, on me prend les auteurs après trois ou
quatre films, etc. Donc c'est à la fois réconfortant parce que ça prouve qu'on a fait
le travail mais c'est aussi un petit peu ingrat parce qu’on nous laisse faire le
défrichage et quand ça devient bancable d'autres viennent. Après ce n’est pas
toujours satisfaisant pour eux parce que les gens qui nous ont piqués, Hosoda ou
Makoto Shinkai on fait moins que nous sur les entrées de films qui étaient pourtant
beaucoup plus attendus là où le travail de découverte avait déjà été fait. Cela prouve
que ce n'est pas si simple que ça. Je pense qu’on reste, pour la presse, les
partenaires médias, les salles, et autres, un interlocuteur privilégié puisque nous, on
en a fait notre spécialité. On a sorti 42 films d'animation japonaise au cinéma. On ne
le fait pas par opportunisme, c'est-à-dire qu’on ne se focalise pas sur les auteurs
une fois qu’ils marchent. On fait tous les premiers films, on accompagne des
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
réalisateurs sur leur premier, deuxième et troisième film, plus si on nous laisse, mais
bien souvent après on est obligé de s'arrêter parce que les enchères sur les MG
sont complètement délirantes. On a la volonté de cultiver un sillon, qui est le sillon
de l'animation japonaise au cinéma et on le fait parce qu'on connait ce milieu, on
connaît cette culture, on est attentifs aux nouveaux projets, on a fait des choix
éditoriaux et on a une ligne. Quand on sort des choses extrêmement compliquées
comme par exemple la version restaurée de Belladonna qui est un film culte et qui
avait complètement disparu, on a fait le travail jusqu'au bout même si on sait qu'on
va faire vingt mille entrées. Il y a vraiment tout ce travail de fond qui est très
satisfaisant à faire.
OM : Au vu, entre autres, les deux dernières palmes d’or qui sont des films
asiatiques, qui ont rencontrées un certain succès en France et à l’international, et il y
a quelques temps de Your Name, est-ce que c’est un nouvel engouement pour le
cinéma asiatique plus particulièrement le cinéma japonais ?
AL: D’abord, le cinéma comme un peu tous les milieux du divertissement ou même
de la pop culture ou encore de la culture générale marchent par vagues, par cycles.
Le cinéma japonais et le cinéma asiatique de manière générale a déjà été à
l'honneur dans les festivals il y a plusieurs décades. On se souvient par exemple de
la sortie de Ran en 1984, ou des films japonais qui ont marqués leur époque donc je
pense que ce n’est pas nouveau, ce n’est pas une découverte. Après je pense aussi
qu'il y a un côté grégaire, ce n’est pas un jugement de valeur, je pense que ce sont
des modes qui s'auto entretiennent par les festivals. Comme il y a des films
asiatiques qui marchent du coup il y a des réalisateurs asiatiques qui prennent de
l'ampleur, ainsi les festivals les sélectionnent, du coup comme les festivals les
sélectionnent, ils sortent en salles plus gros. C'est une espèce de cercle vertueux,
tant mieux d'ailleurs. C'est comme ça que ça fonctionne. Je pense que ce n'est pas
unique, c'est arrivé dans le temps. Il y a simplement des vagues. À un moment le
cinéma polonais était en avant de même pour le cinéma roumain. Autre exemple, on
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
a connu une grande période du cinéma italien puis après ça s'est arrêté puis ça
revient un petit peu de temps en temps avec Gomorra. C’est vraiment cyclique, il y a
des auteurs qui émergent, qui sont récupérés par des festivals, ils deviennent des
gros auteurs, ils vont aux oscars, etc.
OM: Vous nous avez bien détaillé les raisons qui vous ont poussées à vous
intéresser aux cinémas d'animation japonaise, est-ce-que le succès des films du
studio Ghilbi en France vous a également motivée à vous intéresser à ce cinéma ?
AL: Non pas du tout, si vous voulez, en tant que distributeur indépendant on a
besoin de se développer et pour cela il faut aller chercher de nouveaux auteurs.
Personne ne va vous laisser les Woody Allen, les Clint Eastwood ou les Ken Loach,
tous les auteurs sont pris donc si vous voulez développer votre activité en tant
qu'indépendant, il faut aller chercher son propre territoire. Il se trouve que moi j'ai
toujours été très attirée par la culture japonaise et j'ai vu qu'il y avait des films qui ne
sortaient pas et c'était essentiel pour moi d'aller sur un territoire inconnu. Encore
une fois chaque distributeur a besoin de cultiver son jardin pour pouvoir grossir. J'ai
donc choisi naturellement l'univers du cinéma d'animation japonaise, car il y avait un
vrai potentiel. En effet quatre films d'animation japonaise étaient produits et
sortaient au Japon et nulle part ailleurs.
OM: Vous évoquiez plus tôt la difficulté à laquelle vous avez été confrontée au début
de votre aventure avec le cinéma d'animation japonaise. En effet, il souffrait d'une
image assez négative et de stéréotypes très encrés notamment chez les exploitants.
Comment s’est passé ce travail de pédagogie pour faire changer les mentalités ?
AL: C'est comme toujours, pour que les gens s'intéressent à un secteur il faut déjà
s'y intéresser soi-même et se donner les moyens. Dès le début on a fait venir les
réalisateurs par exemple Hosoda, tout le monde aujourd'hui le connaît parce qu'il
était à Cannes. On l'a fait venir pour son premier film qui était : La Traversée du
Temps, personne absolument ne le connaissait. Le film était absolument magnifique,
donc on avait des partenaires qui ont joués le jeu comme par exemple UGC qui
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
nous a fait confiance dès le début sur cette cible, on a fait une grosse avant-
première aux halles, on a fait des press junket, etc. Les gens ne sont pas contre
dans le fond, c'est juste que tant qu'on ne leur a pas montré ils ont des aprioris,
mais c’est une fois qu'on leur montre les choses qu'ils voient que la qualité est là,
que les réalisateurs ont des choses intéressantes à dire, les choses évoluent petit à
petit. Après ça ne se fait pas du jour au lendemain, il faut du temps et des étapes.
Quand on a sorti La Traversée Du Temps on a eu 50 salles, Gaumont l’a récupéré,
car ils ont vu qu'il y avait justement de grosses entrées sur les films suivants, ils l’ont
sorti dans 180 salles forcément une grande partie étaient les leurs, mais c'est
marrant parce qu’à l'époque ils avaient refusé de sortir le premier film de Hosoda.
Pour faire simple, les players dans un marché qui sont sur des positions au
mainstream, attendent que vous ayez fait vos preuves et que vous deveniez
bancable pour vous suivre. Ça c'est un peu la règle du jeu, par exemple, en France
le distributeur qui a fait connaitre Almodovar ce n’est pas Pathé, c'est une petite
société qui a disparue depuis. C'est une habitude et c'est le sort de la distribution
indépendante. Souvent la R&D est faite par de petites entreprises que peu de gens
soutiennent commercialement parlant et puis quand la preuve est faite de la qualité
des films, les auteurs sont récupérés par des plus grosses boîtes, c'est comme ça…
OM: Vous vous êtes spécialisée dans le film d'animation japonaise, vous nous l'avez
bien détaillé, mais vous manifestez aussi un intérêt pour le film de fiction japonais...
AL: Oui, j'ai aussi des films de fiction par extension. J'ai vraiment travaillé sur le
japon, puisque j'y vais régulièrement, je suis aussi en contact avec la fiction. Par
exemple on a fait trois films de Kiyoshi Kurosawa, des premiers films comme Jesus
d'Hiroshi Okuyama en décembre dernier. On part du principe qu'une grande partie
de la cible de l'animation japonaise n'est pas nécessairement que focalisée sur
l'animation, mais est nippophile avant tout, c'est ce qui nous motive à nous
intéresser à la fiction. C'est évident que les gros auteurs comme Kore Eda on ne va
pas pouvoir y toucher, car ils sont déjà pris et ce n’est pas notre objectif de voler
des talents. Concernant les films coréens on est en revanche pas du tout sur ce
marché et je n'ai pas grand-chose à dire dessus puisque je ne le connais pas. Je
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
pense que ça demande une certaine proximité et donc moi sincèrement je n'ai pas
vocation à m'élargir à d'autres pays d’Asie du sud-est. J'ai un très bon relationnel
avec le Japon, sauf coïncidence ou hasard je n'ai pas vocation à sortir des films
d'autres pays d’Asie du sud-est, c'est plutôt le cinéma d'animation japonais qui
m'intéresse.
OM: Justement vous parlez de vos relations avec le Japon, comment se passe
l’acquisition de ces films ? Vous vous rendez sur des marchés de films ? Ce travail
de défrichage doit parfois être fastidieux, faire émerger des premiers films d’auteurs
étrangers ne doit pas être simple. Il faut savoir trouver le talent, comment ça se
passe pour vous ?
AL: Alors c'est pas toujours le cas, mais c'est vrai qu'on fait beaucoup de premiers
films. Avec le Japon, le marché de l'animation est tel que ce n’est pas en allant à
Cannes que vous allez nouer un contact. Ce sont des gens qui apprécient un
contact plus privilégié. Il faut aller au japon pour les connaître personnellement. On
n’a pas leurs coordonnées sur Imdb, ils sont assez inaccessibles, c'est donc
important d'avoir un certain relationnel. Nous, on s'est donc créé un réseau petit à
petit mais c'est très compliqué, il faut montrer patte blanche. On a dû faire nos
preuves. Avec Appelseed, le premier film d'animation japonaise qu'on a distribué en
France, on a fait une vraie sortie digne de l'œuvre en question. Cela comprenait pub,
affichage et un gros travail éditorial. Et même si on n’a fait que 50 000 entrées, on a
montré qu'il y avait un marché en France. En ayant ça à notre actif on a pu aller
convaincre les gens petit à petit. Aujourd'hui on connaît vraiment tous les studios
d'animation japonaise, tous les intermédiaires, toutes les grosses boîtes et c'est
vraiment quelque chose de très particulier. Mais ce n’est pas sur les marchés
internationaux qu'on peut nouer ce genre de contacts. Ça c'est pour l'animation,
c'est vrai que pour la fiction ils sont plus dans une logique de vendeurs
internationaux et de rencontres lors des marchés de films.
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
OM: Et donc si je comprends bien, les nouveaux talents que vous avez découverts,
c'est en partie grâce à votre carnet d'adresses et aux productions avec qui vous
avez déjà travaillé auparavant qui vous soumettent ces nouveaux auteurs ?
AL: Exactement, généralement on achète nos films avant qu'ils ne soient finis donc
on discute avec les différents ayant-droits sur place au Japon. On a un relationnel
qui est tel, qu'ils nous tiennent au courant de leurs projets, on décide de suivre ou
pas ou d'attendre de voir un peu plus... Mais généralement on achète les films avant
même qu'ils ne soient finis.
AL: Il y en a, mais il faut aller au Japon. Mais en réalité il y a très peu de gens qui
sont accrédités. C'est une dynamique complètement différente, si vous allez à
Cannes au marché du film, il va y avoir des japonais en effet, mais c'est très difficile
de créer le contact avec eux si vous ne les connaissez pas déjà et d'avoir des infos
sur leurs projets. C'est vraiment un marché pour les initiés. C'est un secteur
compliqué. Et même concernant ces marchés au Japon, ils restent très fermés. Ce
sont des espèces de réunions qui se tiennent à Tokyo tous les ans. Il y a très peu
d'informations dessus, c'est sur invitations et ce sont des rendez-vous qui se font
de pair à pair. Au début on n’y était pas du tout nous, il a fallu que l'on fasse nos
preuves pour qu'on y être accueilli. Mais c'est très spécifique au secteur de
l'animation japonaise. Pour la fiction c'est beaucoup plus normalisé. Mais il faut
savoir que pendant très longtemps les films d'animation japonaise ne sortaient en
salle nulle part ailleurs. C'est un marché qui s'est développé à l'international parce
qu'il y a eu des ayant-droits locaux, comme nous en France, qui ont fait le travail.
Mais par exemple les japonais préfèrent vendre leurs films d'animation eux-mêmes.
Ils n'aiment pas confier leurs films à des vendeurs internationaux.
OM: Sur un autre sujet, concernant les festivals de films d'animation, quelles sont
vos relations avec ces derniers?
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
AL: Alors, pour l'animation, le festival clé au niveau international c'est Annecy.
Nous ,c’est notre rôle en tant qu'ayant-droits français de proposer des films à
Annecy. L'an dernier (ndlr: 2019) Eurozoom était le distributeur qui avait le plus de
films à Annecy, on avait cinq films en sélection officielle parce que justement on a
une très large gamme de films, et pas que du japonais. Par exemple, Bunuel Après
l’Age d'Or, un film d'animation espagnol a eu le prix du jury. Concernant l'animation
japonaise, on a essayé de montrer depuis le début que l'animation ce n'est pas que
pour les enfants. Elle s'adresse même au contraire plutôt aux ados adultes. On a
donc aussi dû faire tout ce travail d'éducation parce que beaucoup d'exploitants (et
c'est le cas encore aujourd'hui) pensent que l'animation c'est réservé aux enfants le
mercredi après-midi.
AL: Vous savez, Annecy c'est un festival d'animation pur et dur avec des gens qui
apprécient énormément l'animation japonaise et l'animation en général. On n’a pas
de grandes difficultés à faire sélectionner nos films à Annecy. Mais ce n’est pas
parce que vous avez un succès dans un festival que le succès est commercial. Avec
Annecy on a un partenariat à long terme depuis longtemps et on a toujours un très
bon accueil de nos films.
OM: Vous disiez que le cinéma d'animation japonaise était majoritairement destiné à
un public adulte et adolescent. Pour m’être intéressé brièvement dans le cadre de
ce mémoire de recherche à la littérature du manga, l'une des grandes clés de son
succès c'est la manière dont les japonais ont réussi à segmenter leur marché en
proposant des œuvres destinées à tous types de public. Est-ce qu'au niveau de
l'animation là aussi vous constatez une différence de genres très notable d'un film à
l’autre ?
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
AL: Oui et non, il y a des œuvres qui sont exclusivement destinées à des adultes,
comme Belladonna à la limite du psychédélique, un peu coquin. C'est clairement
pour les adultes. Mais les films qu'on sort et qui ont beaucoup de succès par
exemple Les Enfants Loups de Mamorou Hosada ou Your Name de Makoto Shinkai,
sont absolument tout public et c'est d'ailleurs pour ça qu'on fait des VOSTF et des
VF parce qu'ils sont destinés à tous public. Ça peut aller de sept ans à peut-être
cinquante ans. Justement parce qu’on touche les gens qui ont aimé le club
Dorothée, qui ont été biberonnés à l'animation japonaise et ces gens-là aujourd'hui
ils sont adultes, ils ont des enfants, ils viennent avec eux au cinéma. Je pense qu'au
contraire, les japonais essayent de travailler sur des titres qui parlent largement à
tout le monde. Ce sont de gros investissements et des grosses productions.
Contrairement au manga, ces films coûtent chers. C'est une nécessité économique.
AL: C'est une question générale, ce n’est pas parce qu' il y a des films de Kore-Eda
qu'il n'y a pas des films de Ken Loach. Chaque film raconte une histoire différente.
Je ne pense pas qu'il y ait une volonté de positionnement par rapport à tel ou tel film
d'animation. Ce sont des films qui ont leur propre culture ou leur propre parcours. Il
n'y a pas de positionnement en fait, chaque film a sa propre aventure créatrice.
L'animation japonaise n'essaye pas de se positionner par rapport à d'autres films
d'animation. C'est un secteur créatif et culturel.
OM: Le mot positionnement est peut-être mal choisi, ce que je voulais vous
demander s’il y a un élément, un style... qui le distingue des autres cinémas. Par
exemple, un film scandinave a son univers, qui est radicalement opposé au cinéma
coréen par exemple. Est- ce que c'est le cas pour le cinéma d’animation japonaise ?
AL: Évidemment, mais cela vient du fait que ce sont des films qui reflètent une
culture. Tout comme on sait tout de suite quand on regarde un Ken Loach ou un
Kore Eda. C'est différent, mais il n’y a pas une volonté de se positionner. C'est un
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
processus créatif différent avec une culture différente. Après, l’animation au Japon
c'est une industrie très ancienne. Les premiers films animés japonais sont apparus,
je crois il y a plus de cent ans. C'est quelque chose de très ancré dans leur culture.
Ce sont des auteurs qui suivent leur processus créatif. Après, nous en tant que
distributeur on ne va pas se positionner face à des Pixar ou des Disney parce qu’on
n’a pas les moyens de rivaliser. Si ces films marchent, il y a de la qualité certes, mais
il y a des budgets faramineux dans la communication, le marchandising... Mais,
l'animation japonaise représente un univers culturel très riche qui est souvent dérivé
du manga mais pas uniquement. Ce sont des films qui représentent la culture
japonaise. Et c'est pour cette raison que c'est facile d'attirer ce public déjà acquis.
C'est vraiment cette cible là qu'on retrouve à la Japan Expo tous les ans en masse.
La spécificité, c'est tout simplement l'univers culturel.
OM: Pensez-vous que les studios ou les artistes japonais ont conscience de cet
attrait du public étranger pour leur culture et jouent donc sur ces codes pour séduire
ce public?
AL: Pas du tout, c'est pour ça que pour moi il n'y a pas de positionnement. Les
créations de ces artistes sont le résultat d'un processus créatif chez eux. Ils n'usent
d’aucun stéréotype, et c'est justement ce qui fait la fraicheur des films japonais. Il y
a souvent une attention aux détails de la vie quotidienne que les gens apprécient
énormément mais ce ne sont pas des stéréotypes. Au contraire il y a parfois des
histoires très difficiles comme quand j'ai sorti un film magnifique de Keiichi Hara, qui
s'appelait Colorful qui aborde le suicide des adolescents. On ne peut pas dire que
ce soit très vendeur.
OM: Et justement qu'ils abordent des sujets violents et durs comme le suicide dans
un film d'animation, c'est quelque choses que l'on trouve assez peu dans d'autres
pays?
AL: Peut-être enfin, enfin après quand vous prenez Ma Vie de Courgette ça parle
quand même d'un gamin qui tue sa mère. Pour moi il ne faut pas voir ces films
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
comme des produits formatés. Ils ne sont pas pensés pour toucher un certain
marché. Ce sont des expériences créatives qui représentent généralement la culture
de leur pays sans des stéréotypes. Au contraire, il y a une volonté de fidélité, de
spontanéité et d'authenticité et c'est ce qui plaît.
OM : Je vous remercie sincèrement pour le temps que vous m’avez accordé. Ce fut
un échange très enrichissant pour moi, qui contraste avec ce que j’ai pu étudier
jusqu’à présent. C’était un plaisir d’échanger avec vous. Je vous souhaite une
bonne journée et je vous remercie à nouveau.
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
BM: Je découvre le cinéma asiatique sous l’influence de mes parents. Mon père
avait un lecteur betacam, et une palette de films asiatiques que je découvrais parfois
sans sous-titre. J’ai été fasciné par ce cinéma. J’allais y puiser pour y découvrir un
exotisme qui me fascinait. Adolescent c’était aussi pour voir des films violents. Là
où tous mes amis adoré Die Hard, je m’ennuyais profondément on ne voyait pas une
seule goutte de sang alors que dans le cinéma coréen ou japonais c’était l’inverse.
Des têtes explosaient en gros plan, vous rajouté à ça des japonaises aux seins nus,
l’adolescent que j’étais, était comblé. Mais au delà de ça c’était surtout la
découverte de sujets qui m’intéressait et la manière dont les cinéastes racontaient
les histoires. En Asie on ne suit pas forcément un modèle de scénario classique
comme on peut le voir avec les Etats Unis, les ressorts dramatiques ne sont pas les
mêmes. En effet la notion de héros/Anti-héros est plus floue. Il n’est pas rare de se
questionner quand on regarde un film coréen sur les valeurs du personnage
principal que l’on suit. Mon désir de découvrir tout ce cinéma dont il était difficile
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
d’avoir accès en France, s’est développé et ça s’est accentué avec l’âge. Durant de
nombreux voyages en Asie, je revenais avec des valises de films asiatiques, je me
souviens aussi avoir fait des allers retours au Chinatown de Londres pour acheter un
film de Park Chan Hook. Cela faisait partie de mon expérience. C’était des cassettes
que j’usais. J’ai voulu plus tard allier ma passion à mon travail et j’ai collaboré à la
rédaction de trois magazines autour du cinéma asiatique, j’ai réalisé un
documentaire et puis j’été 4ans directeur artistique festival du film asiatique de
Vesoul.
OM: Vous avez beaucoup fait pour ce festival, vous pouvez nous en parler un peu?
BM: C’est un festival qui existe depuis 26ans, nous sommes d’ailleurs le plus ancien
dédié au cinéma d’Asie en Europe et parmi les 6 festivals de cinéma qui
rassemblent le plus de personnes en France. Environs 32 000 personnes par
semaines assistent aux projections. Après nous ne faisons peut-être pas partie des
plus connus, ni des plus reconnus de la part des professionnels du secteur mais
c’est aussi une volonté des créateurs. En effet au départ il s’agit d’un événement
dédié au public, pour faire découvrir un cinéma encore trop peu méconnu. Nous
valorisons les cinémas asiatiques au sens large et nous avons fait un choix de
couvrir un large spectre de pays, cela va de la Turquie jusqu’à la Corée en passant
par l’Inde, le Pakistan… Au total c’est 54 pays qui peuvent rentrer en compétition,
c’est rarement le cas, car dans certains pays le cinéma est tout simplement
inexistant comme c’est le cas au Yemen. Chaque année nous choisissons une
thématique autour de laquelle va s’articuler la programmation, pour la dernière
édition en 2020 c’était Liberté, Egalité, Créativité.
OM: Aujourd’hui la dimension professionnelle s’est elle accrue dans votre festival?
BM: Pas tant que ça, non pas que ce soit une volonté mais on projette surtout des
films qui sont déjà sortis en France, cela concerne en moyenne 60% de notre
programmation. Alors attention ce sont souvent des films très peu connus du grand
public car ils ont été très peu distribués, souvent dans une ou deux salles à Paris ou
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
bien parce qu’il s’agit de films plus anciens. Pour les professionnels, comme les
distributeurs, ce genre de festivals présente peu d’intérêt puisque la majeure partie
des films ont déjà un distributeur. Alors on a quand même un travail de défrichement
où on va essayer de trouver des films inédits, mais cela s’opère parfois sur des
territoires qui sont peu attractifs pour les distributeurs. Nous trouvons cependant de
vraies pépites au Sri Lanka ou encore en Turquie…
BM: Comme je vous disais, j’ai toujours été attiré par ce cinéma. C’est une
cinématographie beaucoup plus complexe que ce qu’on peut trouver dans d’autres
pays. Souvent vous avez des films très oniriques qui prennent le temps de poser
leur histoire. Certains vont penser que c’est un cinéma lent, c’est pas mon cas. A
chaque fois je suis transporté par le rythme que me propose le réalisateur. D’ailleurs
ce n’est pas toujours le cas, si vous prenez le cinéma sud-coréen, c’est beaucoup
plus énergique. Vous avez ce mélange de genres qui fait que l’on ne s’ennuie jamais.
Vous passez de la comédie au drame en un instant. Ce basculement est fascinant.
Et puis cette ambiance, les films asiatiques offrent une palette d’exotisme qui vous
attire. Vous avez aussi une mise en images de la violence qu’on voit rarement
ailleurs. C’est un cinéma très exutoire. C’est lié à leur histoire. Notons le rapport au
sexe aussi, ce sont des pays où pourtant il y a une grande pudeur. Ce sont des
cultures qui ne sont pas a l’aise avec ça. Ils en parlent assez peu. Et pourtant leur
cinéma met vraiment en avant ce coté érotique parfois limite pornographique. Mais
ça c’est secondaire. Ce que j’apprécie vraiment le plus dans le cinéma japonais ou
coréen, c’est la manière dont les cinéastes, ou les scénaristes si vous préférez,
racontent leur histoire.
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
BM: Vous savez l’importance des festivals est certes considérable pour les films qui
sont récompensés, et je ne trahi pas un secret en disant qu’obtenir une Palme d’Or
va nécessairement faire accroitre le nombre de tickets vendus. Mais il est important
de nuancer, bien souvent les films asiatiques présents en compétition à Cannes par
exemple, sont des co-productions françaises. Il y a donc un intérêt à les mettre en
avant pour la France notamment. Vous savez le défrichage de talents n’est plus ce
que c’était. Autre fois, les programmateurs de festival se rendaient dans le pays et
ramenaient ce qui se faisait de mieux. Aujourd’hui cette pratique s’est perdue avec
l’avènement du numérique. Les films asiatiques qui s’importent le mieux à
l’international sont tout simplement des films qui répondent à un cahier des charges.
Ils sont pensés pour séduire un public étranger. On importe des films où l’on voit
des cerisiers en fleurs et des gens qui mangent de la nourriture traditionnelle
japonaise et en faisant cela vous séduisez toute une partie du public. Mais c’est
important de comprendre que ce n’est pas réellement le cinéma asiatique. Souvent
d’ailleurs le public local se désintéresse totalement de ces films. Aujourd’hui certains
festivals dans le monde ne mettent en avant que les oeuvres qui ont été pensées
pour ces derniers. Alors ça n’enlève rien à la qualité des films.
OM: Le fait qu’il n’y ai plus de défrichage ou de veille sérieuse et concrète qui soit
faite par les festivals, ça a une incidence sur la représentation du cinéma asiatique
en France et dans le monde?
BM: Évidemment! On a tendance à voir tout simplement les même cinéastes venus
de ces pays. On a de moins en moins de nouveaux talents. Bong Joon Ho a
décroché la Palme d’Or pour Parasite l’année dernière mais c’est tout sauf une
surprise, c’est son septième film et les précédents ont très bien marché à
l’international avant. Kore Eda tous ses films sont co-produits avec la France depuis
quelques années, il sait donc ce qu’il doit faire pour séduire ce public. Alors je ne
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
veux pas minimiser le succès de ces films mais c’est vrai qu’on parle déjà de
réalisateurs installés.
OM: Vous parliez toute à l’heure de votre souhait de mettre en lumière des pays où
le cinéma est méconnu, y a t-il aujourd’hui une reconnaissance de la part des
artistes locaux envers le festival de Vesoul?
BM: Oui, et de plus en plus. Vous savez nous rentrons en contact avec des
réalisateurs ou producteurs qui n’ont pas l’habitude que des étrangers viennent
s’intéresser à leurs films. Bien souvent ils ne savent pas comment les exporter. On
les accompagnent donc sur cette voie et ils sont ravis que leurs films traversent les
frontières et puissent être vus par un public français.
BM: Il est difficile de définir le cinéma asiatique. Chaque pays est différent. Mais
grossièrement c’est le mélange des genres. Le cinéma coréen par exemple a
adopté un modèle très américain pour ces films ces dernières années? Ils
produisent des films à très gros budget. Après, les cinéastes et producteurs de ces
pays l’ont compris. Pour séduire un public international il faut jouer les stéréotypes.
L’empire des Sens, la seule motivation pour les distributeurs étrangers s’était
d’acheter l’un des films les plus irrévérencieux. On y revient mais les films qui sont
distribués en France sont des films qui ne verraient jamais le jour sans l’influence de
la France. Kore Eda, il n’aurait certainement pas fait autant de films s’il n’y avait pas
eu les français pour financer son cinéma. C’est formidable ce qu’il fait, mais c’est
important de comprendre que le cinéma japonais par exemple a un spectre
beaucoup plus large.
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
OM: Sur un tout autre sujet, au fil des entretiens un sujet revenait souvent c’était
Netflix, comment percevez vous ce nouvel entrant sur le marché
cinématographique?
BM: Netflix produit tout de même des trucs supers, il faut le reconnaitre. Leur séries
asiatiques sont vraiment biens. Mais c’est le même problème, je m’interroge souvent
quand je vois un film ou série, s’il s’agit vraiment d’une oeuvre à 100% japonaise par
exemple. Vous avez des sujets qui ne sont pas abordés au Japon et qui pourtant
dans ces oeuvres sont totalement évoqués. Je vous prend un exemple assez
parlant. En occident pour l’horreur on est très adepte des films de Zombies. Au
Japon c’est pas le cas. Eux ils adorent les vampires. Vous avez des dizaines et des
dizaines de films de vampires qui sont produits pour un un seul film de zombies. Est
ce que nous, en France, nous avons eu ces dernière années un seul film japonais de
vampire? C’est tout le sujet. En fait on va chercher chez eux, des films qui sont à
peu prêt formaté comme les nôtres mais avec cette culture asiatique qui est mise en
avant, puis on les importent sur le territoire. Mais ce n’est pas du tout représentatif
de leur cinéma national. Pour en revenir à Netflix je trouve qu’il y a du bon et du
moins bon. Le fait d’avoir tous les Miyazaki sur la plateforme c’est super, vous avez
aussi une énorme sélection de films coréens. Mais tout ça est noyé dans la masse.
S’ils achètent ce genre de films c’est pour leur algorithme. Moi j’ai une bonne
visibilité sur ces oeuvres quand je m’y connecte car l’algorithme a compris que c’est
ce qui m’intéressait donc il me propose de voir ce que je veux voir. Mais quelqu’un
qui n’a jamais vu un seul film coréen ou japonais il ne soupçonne même pas que ces
films sont disponibls en SVOD.
OM: Quels sont les facteurs qui selon vous expliquent ce nouvel essor?
BM: Je ne sais pas si on peut parler d’un essor récent. A la rigueur d’un renouveau.
Mais le cinéma asiatique a toujours fasciné notamment les français. Il y a eu des
festivals qui l’ont mis à l’honneur et des films qui ont profondément marqué le
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
public. Même si les films de Bruce Lee ont rencontré du succès seulement après la
mort de l’acteur cela a tout de même été quelque chose, des millions de personnes
ont vu ses films à travers le monde. Pareil pour Tigres et Dragons. Moi je travaille
exclusivement sur ce cinéma là depuis plusieurs années, c’est vrai qu’il y a des gens
qui manifestent un intérêt à nouveau pour ce genre de films. Mais est ce que ca va
durer. Vous savez il m’arrive de présenter des films pour des rétrospectives et
aujourd’hui encore beaucoup ne connaissent pas Park Chan Wook qui est pourtant
l’un des cinéastes sud-coréens les plus connus. Je fais donc toujours ce travail
d’éducation 20 ans après. Et c’est normal. Vous avez des modes qui passent et qui
reviennent. Avec Parasite, Dernier train pour Busan on remarque qu’il y a un regain
d’intérêt mais est ce que cela va durer?
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
EL: Je suis donc Eric Le Bot, je suis à la tête de la société de distribution Art House
que j’ai fondée en 2018. Avant cela j’ai passé 8ans chez EuropaCorp où j’ai pu
évoluer sur les différents postes de la distribution. Après j’ai monté ma première
boite, qui s’appelle Version Originale en 2013. Très jeune j’ai pu passer 6 mois au
Japon vers mes 20 ans. C’est là bas que j’ai découvert tout le cinéma japonais et
que j’en suis tombé amoureux. C’était beaucoup plus facile évidemment là bas de
voir leur film qu’en France. Résultat j’ai découvert des auteurs dont je ne
soupçonnais même pas l’existence. J’ai développé une vraie cinéphilie pour le
cinéma japonais. Cette passion m’a guidée tout au long de ma carrière, déjà à
l’époque de Version Originale j’avais eu la chance de distribuer Kurosawa ou Kudua.
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
EL: Nous on se concentre uniquement sur le marché japonais. On fait aussi bien
vendre de la fiction que de l’animation. Notre premier gros projet c’était SENSES de
Ryusuke Hamaguchi. Le film original fait cinq heures. Nous savions qu’il serait
quasiment impossible de convaincre les salles de le programmer. Nous avons donc
convaincu le producteur, Satoshi TAKATA et évidemment le réalisateur Ryusuke
HAMAGUCHI de diviser le film en 5 épisodes. On a aussi laissé le choix au public
de voir le film dans son intégralité et sans découpage sériel. Deux ou trois jours
avant sa sortie nationale a été programmé dans son intégralité dans 15 salles en
France et plus de 1000 personnes sont venues découvrir le film. Les parties 1 & 2
sont sorties le 2 mai 2018, la partie 3 & 4 le 9 mai et enfin la partie 5 le 16 mai. Au fil
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
des semaines on faisait en sorte que les exploitants veuillent bien programmer les
partie à la suite, afin que si un spectateur veut vivre l’immersion de cinq heures, qu’il
en ait la possibilité. Ce fut une expérience de programmation tout à fait inédite, et
débuter la vie de la société avec un tel projet c’était hyper enrichissant. Après on a
eu des projets formidables. On a ensuite continué à distribuer les films de Ryusuke
Hamaguchi, avec Asako I & II qu’on a sorti et ensuite Passion.
EL: A vrai dire pas tellement, Senses et Passion sont des films qui sont assez vieux.
Le premier date de 2015 et il n’est sorti qu’en 2018 en France. Il a eu du mal à
trouver un distributeur en raison de son format. Passion lui etait sorti en 2008 au
Japon, mais n’avait jamais eu de sortie française. C’est le premier film du réalisateur.
Après le succès de Senses et Asako on a décidé de le sortir en France. Si ces trois
films sont sortis en même pas deux ans, c’est plus en raison de la spécificité du
marché et du calendrier que de la volonté du réalisateur. Ça ne reflète pas sa
cadence de travail. Contrairement à un Kore Eda qui lui est beaucoup plus prolifique
comme vous dites.
OM: On sait qu’en France la diversité des films proposés a une importance capitale,
Hors les films anglo-saxons, quels sont les films qui s’importent le plus en France?
EL: Je pense à La Saveur des Ramen qui a très bien marché sur le public Art &
Essais. C’est un film magnifique, qui invite aux voyage. On sait qu’il y a un public qui
cherche de l’exotisme quand il va au cinéma. Le pari d’Art House c’est de proposer
des films aussi bien aux cinéphiles qu’aux aficionados du Japon. Les Saveur des
Ramen a pour trame une histoire de cuisine japonaise. Beaucoup pensaient
justement que ce serait une carte postale du Japon or quand on le voit on se rend
compte que c’est très secondaire, c’est surtout Singapour que l’on découvre avec
ce film. C’était le pari.
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
OM: Vous pensez que certains films du japon s’exportent mieux parce que
justement ils savent jouer sur ces codes d’exotisme?
EL: Surement, vous savez les films japonais qui sortent en France ne sont pas du
tout les films qui marchent au Japon. Nous on travaille avec des auteurs qui pour la
plupart, peinent à faire des entrées dans leur propres pays. Il arrive qu’ils pensent
leur film pour séduire un public international. Après il reflètent leur culture ces films
sont faits avec les meilleures intentions cependant il se trouve que cette culture
résonne fort dans les pays occidentaux, notamment chez nous. Dans le film Un
Jardin Qu’on Dirait Eternel, on a toute une exposition sur l’art de faire le thé. Le film
se passe dans un décor somptueux. C’est vrai que c’est l’une des seules
cinématographies à mettre autant l’accent sur leur culture. Mais ce n’est jamais
caricatural. C’est une volonté des auteurs de faire partager cet exotisme et ces
rituels. Ce sont des films qui invitent au voyage.
OM: Pouvons nous aborder la représentation des films asiatiques sur les marchés
internationaux.
EL: Il y a des auteurs qui ont leur propre distributeur depuis des années en France,
c’est le cas de Kore Eda, par exemple. Nous on travaille aussi avec les mêmes,
comme Hamaguchi ou Fukada on espère que ça va durer car souvent quand un
réalisateur marche bien sur un marché il n(est pas rare qu’un distributeur
indépendant se le fasse prendre par un plus gros qui surenchérit sur les MG. Après
comme je vous l’expliquais, nous on s’est vraiment focalisé sur ce marché là. Les
producteurs japonais sont donc rassurés et savent qu’on a le savoir-faire pour sortir
leurs films. Aujourd’hui tous les films que j’ai sortis avec Art House ont marché.
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
OM: Vous disiez tout à l’heure que les films japonais qui sortent en France ne sont
pas le reflet réel de l’industrie cinématographique nippone. Vous pouvez nous
expliquer?
EL: C’est tout simplement parce que le cinéma japonais ne se résume qu’à un
cinéma d’auteur et chez eux c’est un cinéma beaucoup plus populaire qui domine
leur marché. Il y a peu d’auteurs qui arrivent à faire des entrées chez eux, c’est pour
ça qu’ils sont toujours heureux de voir leurs films distribués en France. Le Japon a
encore donc énormément de mal à vendre ses films de studio à l’étranger. C’est
aussi parce qu’il s’agit d’un code entertainment très spécifique que l’on ne
comprend pas tellement en occident. Vous pouvez par exemple avoir un
personnage qui pleure parce qu’il est en colère et nous ça on ne le comprend pas
est on est très hermétique
OM: Quels sont pour vous les facteurs qui expliquent ce nouvel essor.
EL: L’attrait pour le cinéma asiatique en France ne date pas d’hier. Pour le Japon
c’est un cinéma qui a déjà connu un succès, parfois même plus important que le
succès qu’il rencontre aujourd’hui. Entre les années 1990 et 2000 à Cannes, le
cinéma asiatique était très présent notamment le cinéma Coréen. Il y a eu un creux
les années suivantes et aujourd’hui oui on retrouve des spectateurs qui ont envie de
voir ces films. Pour la Corée c’est un phénomène très récent c’est vrai. Ça a
commencé comme je vous l’ai dit dans les années 2000, Ivre de femmes et de
peintures est le film qui totalisait le plus d’entrées avec 400 000 personnes. Ensuite
ça s’est calmé et là ça reprend assez fort. Parasite marque certainement le début
d’une nouvelle vague. Mais c’est parce qu’il y a des auteurs qui ont émergé. C’est
un cinéma qui a plein de particularités.
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
OM: Pour commencer, j'aimerais que vous parliez juste un peu de-vous de votre
métier, que vous vous présentiez et que vous me dites ce qui vous a amené à vous
intéresser au cinéma asiatique.
AG: Alors c'est une longue histoire maintenant. Ça fait pas mal d'années. J'ai
commencé à étudier les langues, au Langues'O (ndlr: autre noms pour
désigner, L’Institut national des langues et civilisations orientales), ma langue
principale c'était le Chinois. On était dans les années 90 c'était un département qui
était énorme, il y avait beaucoup d'étudiants dans des amphis plein. On avait le
choix au Langues'O, de prendre une deuxième langue si on le souhaitait. J'ai pris le
coréen, je dois dire un petit peu au hasard en fait. Je n’avais pas envie de faire du
japonais c'était un département qui était aussi grand que le département chinois. Je
me suis tourné vers ce petit pays où on devait être 5 à apprendre la langue à
l'époque. C'est une langue plus compliquée que le chinois. J'ai commencé à voir
beaucoup de films coréens dans le but à la fois de découvrir ce cinéma et de
parfaire la langue, qui me posait beaucoup de difficultés. J'ai donc vu énormément
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
de films dans les années 90 quand j'étais à la fac. Il y avait une grosse vidéothèque
de VHS de films coréens, qui n’étaient souvent pas sous-titrés. J'en voyais comme
ça trois à quatre par semaine complètement au hasard. Là j'ai trouvé que ces films
étaient non seulement intéressant pour apprendre la langue, et en plus qu'il y avait
vraiment quelque chose de passionnant, c'était un truc très original. Je voyais
beaucoup de films à Paris, j'étais cinéphile depuis mon adolescence, mais personne
ne s'intéressait au cinéma coréen à l'époque. Il n’y avait eu qu'un film qui était sorti
en France, c'était Pourquoi Bodhi-Dharma Est-Il Parti Vers l'Orient ?
Après, quand je suis arrivé en licence ou en maitrise, je ne sais plus, il y a ce film qui
s'appelle L'Île Étoilée qui est sorti. C'était les deux premiers films sud-coréens à être
sorti en France. Donc tout ce que je voyais, j'avais le sentiment que personne ne les
avait vu avant, j’ai commencé à aller en Corée très régulièrement et passé des mois
aux archives à regarder ces films. C’est devenu le sujet de ma thèse. Je pense que
ça devait être à l'époque la première thèse sur le sujet en France. Après je n’étais
qu'étudiant, je n’avais pas de poids sur la distribution mais il se trouve que
parallèlement le cinéma sud-coréen commençait à arriver en France au moment où
je terminais ma thèse. Un jour j'ai reçu un mot de Michel Ciment, me demandant si
je pouvais écrire sur Im Kwon-taek car il y avait une grande rétrospective sur lui à la
Cinémathèque, et j'ai écrit mon premier article dans Positif à ce moment-là. Après
ça c'est un peu enchaîné, cependant je ne voulais pas devenir le spécialiste du
cinéma asiatique en France, j'ai donc écrit sur d’autres films et sujets. Aujourd'hui la
critique cinéma ne représente qu'une petite partie de mon travail. Mais j'écris encore
pour Positifs, Les Echos, Vanity Fair, même si cela s'est un peu interrompu avec la
nouvelle direction.... Mais je suis à la fois critique, journaliste et écrivain. J'ai écrit
des livres sur des sujets très variés, contrairement à des collègues comme Philippe
Rouyer qui est exclusivement critique de cinéma.
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y avait un terreau qui faisait que c'était connu. Le cinéma coréen, c'est
complètement autre chose, mis à part dans les années 50 où le cinéma coréen se
développait avec les studios de Séoul qui étaient du même niveau de Hong Kong.
Ils produisaient des films qui s'exportaient dans toute l’Asie, mais c'était un cinéma
très populaire qui ne rayonnait pas à l'international. Puis ça s’est arrêté car il y a eu
la dictature. Au cours des années 70 il n'y a plus eu de films sud-coréens. Le
cinéma qu'on connait aujourd'hui n'existait pas du tout ou de façon très
marginale, avant son apparition en gros avec le début du 21e siècle. Et c'est par le
cinéma que finalement d'autres choses ont suivi comme la K-pop, un peu de
littérature aussi. Sur un tout autre point, la Corée a longtemps considéré le cinéma
comme une industrie de consommation. Les films étaient faits à la chaine sans
vraiment être conservés. Globalement ce n'était pas considéré comme un art. Et
puis tout le cinéma d'avant la guerre de Corée a disparu. On retrouve quelques films
mais c'est assez mince. Aujourd'hui, ils essayent de retrouver ce patrimoine et de le
sauvegarder.
OM: Est-ce que la demande de diversité de la part du public français est propice
selon vous à l'importation de cinéma asiatique sur le territoire?
AG: Oui, bien sûr, mais cela date d'un moment déjà. On m'a décrit des files
d'attente devant les cinémas pour voir les films d'Ozu dans les années 70. À propos
des succès comme Épouse et Concubine, je me souviens avoir vu la salle pleine. Il y
a ce goût du cinéma en France qui n'est pas seulement porté sur la région que vous
étudiez. Il y a un statut très particulier de la France par rapport au cinéma. Des
cinéastes étrangers peuvent trouver un public chez nous qu'ils ne trouvent pas
ailleurs ou même chez eux. C'est ce qui fait que la France produit même les films de
certains réalisateurs étrangers. Essentiellement parce que le public de ces cinéastes
se trouvent en France.
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
AG: Oui c'est totalement vrai. Et en même temps, en dehors de l'art & Essais, la
culture main Stream coréenne ou japonaise s'exporte aussi très bien. Alors est ce
que c'est le même public je ne sais pas. Si on revient à nouveau au Japon, ça a
commencé dans les années 80, je suis un enfant du manga. Les dessins animés que
je regardais étaient tous japonais. Le Japon est à l'avant-garde de tout ça.
Aujourd'hui j'ai le sentiment, ce n’est pas tellement une cinéphilie autour de l'Asie
qui existe depuis longtemps, mais le fait que toute une génération adopte dans son
entièreté la culture mainstream de ces pays. Aujourd'hui, vous avez des groupes de
KPOP qui remplissent Bercy. Ça c'est complètement inédit. Après qu'un film
asiatique soit un succès après avoir été récompensé à Cannes on peut trouver
d'autres exemples.
OM: Pouvons nous parlez d'un essor ou d'un renouveau du cinéma asiatique
AG: c'est des histoires différentes et c'est compliqué de parler de vagues asiatique
spour ça, parce que justement ce sont DES vagues.
OM: Dernièrement il y a eu deux palmes d'or de suite qui on été données d'abord à
un cinéaste japonais et l'année suivante à un cinéaste sud-coréen. C'est un hasard
pour vous ?
AG: Alors ceux qui ont eu ces prix, il est important de rappeler que ce sont des
cinéastes qui sont déjà connus. Ils ne sortent pas de nulle part. Bong Joon Ho, son
premier film date de l'an 2000, donc ça fait 20 ans qu'il fait des films. Kore Eda
encore plus. Si on prend Bong Joon Ho, il vient vraiment de cette vague coréenne,
qui émerge à la fin des années 1990 au début des années 2000. Tous les cinéastes
sud-coréens qui sont reconnus émergent à cette période. Même si il y a des
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
cinéastes qui arrivent après et qui restent intéressants comme Na Hong-jin par
exemple. Mais les têtes de gondoles de ces cinémas-là, sont apparues à cette
époque je dirais. Et puis c'est hyper important de comprendre que la Corée c'est un
pays qui a construit son cinéma en sachant que son cinéma patrimoine avait
disparu. Et ça ces cinéastes des années 2000, ils sont motivés par cette idée de
reconstruction.
OM: vous évoquiez l'influence des mangas sur toute une génération dans les
années 80. Vous pensez que ceux qui ont été bercés à cette culture, enfants on les
retrouve aujourd'hui dans les salles de cinéma ou à la Japan Expo?
AG: Je ne sais pas, il faudrait étudier ce point. Est-ce que comme vous dites ces
ponts existent. Est-ce que les gens qui vont à la Japan Expo on les retrouve à l'expo
de Itō Jakuchū au petit palais dont on parlait tout à l’heure ? C'est peut-être le cas,
je ne sais pas. Est-ce que c'est le même public qui va voir les films de Kore Eda et
qui lisent des mangas. Ou est-ce que c'est deux genres de nippophiles qui
cohabitent en France. Je ne peux pas vous dire, je n'en sais rien du tout.
OM: Qu'est-ce que va chercher le public dans le cinéma asiatique selon vous?
AG: D'abord sur la Corée, ce qui m'a tout de suite plu c'est que c'était
extrêmement varié. C'est à dire, même si on y retrouve des acteurs, je pense qu'il
n'y a pas grand-chose à voir entre Hong Sang Soo et Park Chan Wook. Il y a une
diversité en Corée. Comme à Hong Kong d'ailleurs. Je dis ça, parce que souvent, on
parle de cinéma asiatique et ça devient un genre. Ce n’est pas le cas, le cinéma
asiatique c'est un cinéma qui est produit dans une région du monde. Ce serait très
dangereux, proportion gardée évidemment, de coller une étiquette régionale sur un
film ou un réalisateur. Non ils ont chacun leur identité à eux. Après ils ont des points
communs, parce qu'il travaillent avec les mêmes acteurs, les mêmes techniciens et
dans le même environnement économique. Mais il faut bien respecter l'individualité
de chaque cinéaste et de chaque artiste. Après sur les genres c'est vraiment
quelque chose qui m'avait vraiment fasciné dans le cinéma coréen dès la fin des
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
années 90. Cette manière de mêler toutes sortes de cinémas dans un seul film. Moi
j'avais expliqué ça, à l'époque par le fait que le cinéma avait tellement été contrôlé
par l'état de façon violente parfois. C'est important de le rappeler parce qu'on a
tendance à oublier que la Corée du Sud a vraiment été une dictature dure. Il s'est
passé des choses terribles dans l'histoire de la Corée du sud et quand ça s'est
arrêté, j'ai l'impression que les réalisateurs on voulu tout mettre dans leurs films.
C'est ce qui fait que ce cinéma-là m'a toujours passionné. Et le cinéma des années
2000 m'intéresse plus que celui qui se fait aujourd'hui. Malheureusement aujourd'hui
c'est devenu en Corée un grande industrie puissante et mondiale, et à part quelques
auteurs comme Bong Joon ho, qui peuvent faire ce qu’ils veulent, c'est plus dur de
faire un premier film original aujourd'hui qu'à la fin des années 90. Mais oui ce
cinéma se caractérise quand même par un mélange de tout. C'est assez dingue de
voir des films avec des moments de pures comédies loufoques, d'une sexualité
complètement débridée. Mais c'est dans leur culture. Si on extrapole. Vous allez
dans un restaurant Coréen, vous prenez un bibimbap, c'est un mélange de tout,
vous avez du riz, de l'ail, des légumes, de la viande, un oeuf placée dessus. Par
contre vous allez dans un restaurant japonais, vous allez avoir des aliments
parfaitement découpés, rangés, posés en ligne. Et c'est cette idée dans le cinéma
coréen de fourre-tout bordélique et en même temps très bien foutu. Un sympathique
bazar. Et quand on fait ce genre de mélange, c'est extrêmement difficile.
AG: Oui, et encore une fois on sort de la dimension cinéma asiatique. C'est la
particularité des auteurs coréens. Attention à ce que le cinéma coréen ne devienne
pas un genre en lui-même. C'est à dire qu'il ne suffit pas qu'il y est des gens en
costumes noirs qui se tapent dessus pour faire du cinéma coréen. Mais c'est vrai
qu'on ne retrouve pas ça ailleurs.
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AG: Cette Palme d’Or était quelque chose d'attendu en Corée. Moi j'ai vécu ça, il y
avait une frustration de la part des coréens de ne pas être reconnus. Alors là on
parle de cinéma, mais il y a eu la même chose avec le Prix Nobel de littérature. Je
me souviens j'étais passé devant une grande librairie, l'équivalent de la Fnac chez
nous, et en vitrine il y avait tous les grands auteurs coréens et il y avait une place
vide pour le futur prix nobel de littérature coréenne. Dans les années 80, la Corée du
Sud a très vite été connue pour des raisons industrielles. C'était, une réussite
économique, ils ont fait le pari de faire la même chose que les japonais mais en
moins cher. Mais ça c'était humiliant pour un pays qui a sa propre culture, sa propre
écriture de ne pas être reconnu à leur juste valeur. Et ils attendaient cette
reconnaissance en tant que pays culturel depuis longtemps. C'est très intéressant
de réécouter le discours de Im Kwon Taek quand il reçoit son prix à Cannes pour
Ivre De Femmes Et De Peinture. Il dit "Ce prix récompense les deux Corées et tout
le cinéma asiatique." Il a connu avant Bong Joon Ho, son industrie qui était mal
menée, et quand il rentre en Corée il se dit soulagé. Quand Bong Joon Ho revient à
Séoul il est accueilli comme s'il avait gagné la coupe du monde. Parce que c'est une
mission qui tient du nationalisme chez eux. Puis après vous avez l'Oscar... C'est à
dire presqu'ils ont eu de la chance, car c'est l'oscar anti Donald Trump. L'industrie
d'Hollywood est en guerre contre Trump et elle donne l'Oscar du meilleur film à un
film en langue étrangère. C'est un symbole aussi, c'est la première fois dans
l'histoire. J'aime beaucoup Parasite, mais il y a une quantité de films non-
anglophones qui aurait mérité de concourir dans la catégorie. Trump a très bien
décodé le truc, il a fait peu de temps après un discours où il dit "Vous avez vu, on
donne l'oscar du meilleur film à un film étranger. Je n'ai pas vu Parasite, mais
rendez-moi Autant En Emporte Le Vent."
Donc Parasite est le symbole d'une guerre interne aux Etats Unis entre des gens qui
veulent ouvrire les frontières et d'autres qui veulent construire des murs. Comme les
américains avaient récompensé des cinéastes mexicains avant. Ce n’est pas un
hasard. Après je ne veux pas minimiser le succès de Parasite. Les Coréens ont
produit un film qui s'est élevé aux plus haut rang du cinéma mondial.
146
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
OM: C'est justement dans ces moment-là qu'on se rend compte que des films
peuvent devenir des armes géopolitiques. On n’a pas beaucoup parlé de Taïwan,
tout à l'heure vous disiez que le cinéma Hong Kongais était le seul dépositaire dans
les années 70 du cinéma chinois. Depuis la rétrocession, le cinéma Hong Kongais
rayonne de moins en moins, est ce que Taïwan ne s'inscrit pas dans le digne
successeur de Hong Kong?
AG: Là ils ont une carte à jouer. Sauf qu'il y a quand un même grand auteur chinois
qui émerge. Au début d'année on a eu le magnifique : Séjour dans les Monts Fuchun
de Gu Xiaogang qui est un premier film complètement indépendant. Alors même s'il
y a la censure chinoise qui est très présente, et que beaucoup de film nationalistes
complètement aberrant, sont produits, malgré tout le cinéma d'auteur chinois existe.
Un Long Voyage Vers La Nuit de Bi Gan est un bon exemple. Concernant Taïwan, ils
ont eu une grande époque du cinéma dans les années 90, avec les films d'Hou
Hsiao-hsien on était tous éblouis, Edward Yang a fait des choses extraordinaires.
Mais bizarrement, ils n’ont pas su faire ce qu'ont fait les coréens. Et face à la
position qu'ils tiennent face à la Chine, ils auraient sur Soft Power quelques choses
à jouer. Ils devraient promouvoir leurs cinéastes, faire des films chinois dans la Chine
libre. Si on prend Tigre et Dragon, c'est une production américaine avec un cinéaste
Taïwanais. C'est assez passionnant comme film, car c'est un film américain qui est
déguisé avec la culture chinoise. Mais c'est un film qui dans sa production, sa
structure, son histoire est imprégné par Hollywood. Ça n'a pas grand-chose à voir
avec un film Taïwan. C'est pour ça que ça été un carton mondial, sauf en Chine et à
Taïwan. C'était une tentative hybride de la culture chinoise même. C'est à dire que
vous avez des acteurs hong-kongais et taïwanais, un cinéaste taïwanais, un co-
scénariste américain et Columbia qui est derrière et tourné en Chine occidentale. Un
Blockbuster américain produit en Chine ça reste assez inédit. Et il n'y a pas eu
tellement d'autres tentatives. Par contre ça a donné envie à la Chine de faire des
blockbusters. Mais Tigre & Dragon reste un film important car il a permis à faire
connaitre ce cinéma-là à des gens qui n'en avaient jamais vu. Aujourd'hui on
constate un autre phénomène. Le marché chinois est extrêmement porteur pour
Hollywood, avec 1/4 de la population mondiale qui est chinoise. Et ils ont tendance
147
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
dans leur hyper production à importer des codes culturels et politiques. Vous allez
avoir des films ou la Chine sauve ou participe à sauver le monde. Ils vont employer
des stars chinoises qui vont avoir un rôle secondaire voir un rôle plus développé
dans la version chinoise. Ça c'est parce qu'il y a très peu de films étrangers qui
peuvent sortir en Chine et c'est pour avoir accès au marché, tel sont les choix des
studios américains...
OM: Dans l'ensemble je pense qu'on a fait le tour du sujet. Votre point de vue été
très intéressant. Si je résume, vous soulignez que ces pays ont des histoires très
différentes et qu'il faut les distinguer. Il y a eu différentes vagues de ces cinémas là.
Je ne sais pas si vous avez des choses à rajouter.
OM: Oui complètement. Je vous remercie sincèrement pour cet entretien et je vous
dis à bientôt.
148
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
DT: Je suis David Tredler, et je suis comme vous l’avez dit, chef programmateur du
festival du film Coréen à Paris. C’est un festival qui a été fondé en 2006 par 3
étudiants coréens basés à Paris. Le but était d’allier le cinéma Français au cinéma
sud-coréen. Ce modèle de programmation a duré 5ans, mais le public n’était pas
tant interessé par les oeuvres Française. Le festival s’est alors à partir de là
exclusivement consacré au cinéma sud-coréen. Moi je rejoins l’équipe du festival en
2012. Aujourd’hui on prépare la 15ème édition. Au début du festival, c’était difficile
de rentrer en contact avec les studios sud-coréens, c’est pour ca que très vite on a
eu une programmation de films d’auteur. Alors c’était par goût également mais aussi
parce que les studios était inaccessibles. Aujourd’hui on a réussi à élargir notre
programmation. On va du film très pointu au film très populaire coréen comme A
Taxi Driver en 2017. On s’amuse chaque année à dégager un thème dans notre
sélection et à articuler les films autour de ce dernier. Chaque année c’est un Focus
sur un thème, des acteurs ou un genres. C’est la section principale qui s’appelle
149
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
PAYSAGE. Elle couvre un large spectre, la fiction évidemment mais aussi l’animation
ou le court-métrage.
OM: Ce sont des films qui ont déjà des distributeurs en France, qui sont déjà sortis?
DT: Alors il y a les deux. On sélectionne 30 films par an dont 1 ou 2 ont déjà été
achetés, c’est l’occasion de faire une avant-première. 90% de la programmation
reste des films inédits en France. Après il y a aussi une programmation du cinéma
classique coréen ainsi qu’une sélection de 20 à 25 courts métrages.
DT: Je suis cinéphile depuis très jeune. J’aime le cinéma dans sa globalité. J’ai pas
un prédilection particulière pour le cinéma sud-coréen. Ma cinéphilie est généraliste.
Mais c’est vrai que je me suis interessé au cinéma sud-coréen assez vite. Ça a
débuté vers mes vingt ans. J’ai commencé à fréquenter des festivals et j’ai
découvert une offre cinématographique beaucoup plus large. Alors comme
beaucoup, au début des années j’ai vu en salle Old Boy et Ivre De Femmes Et De
Peinture. Puis le festival Paris Cinéma dans ces années là, a mis à l’honneur la
Corée du Sud en 2005 ou 2006. Ça a été une révélation pour moi, un vrai coup de
foudre. En parallèle justement c’était la première édition du festival du film coréen à
Paris. J’y suis allé. Ensuite j’ai commencé à me rendre en Corée en vacances. Je
tenais un blog où je parlais de cinéma et de mes expériences en Coréen. Avant le
festival Paris Cinéma ma culture du cinéma sud-coréenne se limitait à un ou deux
films. Grace à ce festival j’ai eu une vision beaucoup plus large de leur cinéma. J’ai
pris conscience de sa richesse. Comédie, Drame, Horreur, on ne sait jamais à quoi
on peut s’attendre. Je suis parti en Corée aussi grâce à ce cinéma. Très attiré par ce
pays et de ce que j’en voyais dans les salles. J’ai voulu apprendre la langue pour
m’imprégner de cette culture. Je suis vraiment tombé amoureux de ce pays.
150
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
OM: Vous pensez justement que certaines productions coréennes jouent sur ces
codes culturels pour diffuser leurs films à travers le monde?
DT: Je ne sais pas s’ils jouent réellement sur ces codes culturels. Les films restent
quand même produits en premier lieu pour les coréens. Après c’est vrai que de
grands studios ont commencé à développer leur branche internationale comme CJ
Entertainment par exemple.
DT: L’ambition du festival du film coréen à Paris est de faire connaitre de manière
plus large le cinéma sud-coréen. En effet les films de ce pays qui sortent en France
chaque année représente une infime partie de ce qui est réellement produit là bas. Il
arrive parfois que des distributeurs viennent au festival. Deux ou trois films peuvent
être achetés pendant ou grâce au festival, soit par des distributeurs, soit par des
éditeurs vidéo. C’est important pour nous de faire ce travail de défrichage. On sait
qu’on a bien fait notre travail quand les films qu’on sélectionne suscitent l’intérêt des
distributeurs français. C’est hyper satisfaisant pour moi quand un distributeur vient
me voir à la fin d’une séance et me demande si tel ou tel film peut s’acheter. Faut
pas oublier qu’hormis les grands auteurs comme dernièrement Bong Joon Ho, il y a
peu d’opportunité à l’international pour des réalisateurs sud-coréens. On est une
fenêtre pour eux sur un marché dont jamais ils n’auraient pu penser avoir accès.
DT: Oui de plus en plus. Les distributeurs sud-coréen sont hyper enclins à envoyer
leur films chez nous. Et c’est pareil pour les auteurs. Il y en a plein qui font même
l’effort de venir. Au fil des années on s’est construit une réputation. On a fait venir
151
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
beaucoup de monde et souvent quand on accueille un nouvel auteur il nous dit « Ah,
c’est untel qui m’a encouragé à venir, vous l’aviez reçu il y a quelques années et il
avait été ravi… ». Il n’est pas rare aussi que les JT sud-coréens viennent faire un
reportage sur notre festival. C’est hyper important pour nous d’être reconnus en
Corée. Aujourd’hui le festival est soutenu par le pays. On a un partenariat avec le
centre culturel sud-coréen, on reçoit des subventions publiques de la Corée, mais
aussi des subventions privées d’entreprises sud-coréenes.
OM: En étudiant mon sujet, je me suis justement rendu compte que la Corée
investissait massivement dans la diffusion de sa culture à travers le monde. Le
Hallyu est pour eux un véritable soft power. Votre festival montre justement
l’importance qu’accorde la Corée à ce genre d’événements qui contribuent à faire
rayonner son dans différents pays.
DT: Totalement. Après il est important de souligner qu’on reste très indépendants.
Vous avez le London Korean Film Festival qui est entièrement organisé par le centre
culturel coréen et le KOFIC. Le KOFIC c’est si vous voulez l’équivalent du CNC en
France. Nous concernant on perçoit des subventions de leur part, c’est un
partenaire, mais contrairement à Londres ou à d’autre pays, ils n’interagissant pas
dans notre sélection ni notre programmation. C’est nous qui choisissons quels films
on veut montrer et quels acteurs ou actrices on veut recevoir. Après ils peuvent jouer
le rôle d’intermédiaire. C’est pour ça que c’est important de travailler avec eux. Mais
c’est vrai que dans d’autres pays, ils prennent beaucoup plus part à l’organisation
de ces festivals à travers le monde.
OM: Vous nous avez dit plus tôt, que c’était parfois difficile de rentrer en contact
avec les grands studios coréens, pourquoi?
DT: Vous savez, les grands studios ne s’intéressent pas vraiment aux petits festivals,
mais ça c’est valable pour tous les pays. Après au fur est à mesure que les contacts
se font, ils commencent à nous connaitre. Quoique on a constaté qu’il y avait un
grand turnover chez eux. C’est difficile chaque année d’avoir affaire à la même
152
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
OM: Aujourd’hui les services de vidéo en demande ont tendance à ouvrir à ce genre
de production sur le monde. Comment percevez-vous cette concurrence de ces
nouveaux entrants aujourd’hui?
DT: J’ai un avis très ambivalent sur ces plateformes. Je pense qu’il faut pas mettre
tout dans le même panier, il y a Netflix et les autres. Alors oui c’est forcément une
forme de concurrence. Pour être honnête dès que j’ai vu les premiers films coréens
arrivés sur Netflix, j’étais un peu déçu. J’aurais aimé avoir pu les programmer au
festival. Dans l’absolu je trouve ça tout de même génial que le public ait accès sur
ces plateformes à ce cinéma là. Il y a un nombre assez conséquent sur Netflix de
films sud-coréens, cependant il faut le savoir. A cause de l’algorithme ce sont
uniquement ceux qui veulent voir ces films qui savent qu’ils sont dans le catalogue.
Après on n’a aucune idée du succès de ces films sur Netflix, aucun chiffre n’est
communiqué. Mais il y a des plateformes qui font un travail formidable. Je pense à
Outbuster, qui a un super catalogue. Ils arrivent à évenementialiser leur films. C’est
beaucoup plus petit que Netflix mais ils mettent vraiment en avant tous les cinémas
du monde. Ils viennent très souvent au festival et on acheté des films sélectionnés.
Je pense que c’est important de travailler main dans la main avec ce genre de
plateformes.
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
OM: Est-ce que le cinéma asiatique se diffuse mieux par rapport à d’autres
nationalités?
DT: Il faut prendre le cinéma coréen dans sa globalité, c’est difficile de donner une
vision précise. Cependant je pense que ce qui caractérise en grande partie le
cinéma sud-coréen c’est la différence de ton qu’on peut trouver dans un film. Cette
rupture de ton dont font preuve les auteurs est extraordinaire. C’est ce qui m’a
toujours plu dans le cinéma coréen. C’est à chaque fois surprenant. Quand on
découvre un film sud-coréen on se dit que ça va être tel ou tel film et dans le fond
ce n’est jamais le cas. On est à chaque fois surpris.
OM: Quels sont selon vous les facteurs qui expliquent ce nouvel essor.
OM: Suite au succès de Parasite l’an dernier, est ce qu’en Octobre vous avez eu
plus de festivaliers?
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
DT: Dans un sens oui, car on avait une journée de moins par rapport à 2018 et
pourtant on a eu 4% de personnes en plus. C’est forcément lié. Parasite va
surement redonner un coup de boost au marché. Sans la Palme d’Or le film n’aurait
peut-être fait que 400 000 entrées, il y a eu le travail de JOKER FILMS qui a permis
au film d’avoir un si grand impact. On espère être à l’aube d’une nouvelle vague. Je
crois que de nouveaux auteurs vont émerger sur la scène internationale. Je sais qu’il
y a un Space Opéra sud-coréen qui est en préparation j’ai très hâte de voir ça.
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
Grille d’Analyse
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THOMAS PIBAROT AMEL LACOMBE BASTIAN MEIRESONNE ERIC LEBOT ADRIEN GOMBEAUD DAVID TREDLER
• « Si la Corée du Sud a ce goût • « Des films d'une grande qualité, « les ressorts dramatiques ne sont • « Les genres c'est vraiment • « Il faut prendre le cinéma coréen
très prononcé pour le genre c’est très diversifiés, très riches. »
pas les mêmes. En effet la notion quelque chose qui m'avait dans sa globalité, c’est difficile de
fasciné dans le cinéma coréen
parce que c’est un moyen pour de héros/Anti-héros est plus floue. dès la fin des années 90. Cette donner une vision précise. »
les auteurs d'exprimer leurs • « Il y a des œuvres qui sont Il n’est pas rare de se questionner manière de mêler toutes sortes
pulsions et tout ce que tu n'as quand on regarde un film coréen de cinémas dans un seul film.
exclusivement destinées à des Moi j'avais expliqué ça, à • « Ce qui caractérise en grande partie
pas le droit de dire. Pourquoi en adultes, comme Belladonna à la sur les valeurs du personnage l'époque par le fait que le cinéma le cinéma sud-coréen c’est la
France, par exemple on a limite du psychédélique, un peu principal que l’on suit »
avait tellement été contrôlé par différence de ton qu’on peut trouver
beaucoup moins de films de l'état de façon violente parfois.
coquin. C'est clairement pour les C'est important de le rappeler dans un film. Cette rupture de ton
genre qu'en Espagne ou en Italie, adultes. Mais les films qu'on sort parce qu'on a tendance à oublier dont font preuve les auteurs est
tout simplement parce que ces et qui ont beaucoup de succès que la Corée du Sud a vraiment extraordinaire. »
deux pays ont vécu des été une dictature dure. Il s'est
par exemple Les Enfants Loups passé des choses terribles dans
dictatures fascistes. C'est lié. »
de Mamorou Hosada ou Your l'histoire de la Corée du sud et
Name de Makoto Shinkai, sont quand ça s'est arrêté, j'ai
l'impression que les réalisateurs
• « Mais s’il y a quelque chose de absolument tout public et c'est on voulu tout mettre dans leurs
commun dans les cinémas des d'ailleurs pour ça qu'on fait des films. »
158
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
• « Beaucoup de films sud-coréen • « une grande partie de la cible de • « On importe des films où l’on • « Beaucoup de des distributeur • Le Japon, c'est un pays qui
ou japonais s'adressent à (…) l'animation japonaise n'est pas voit des cerisiers en fleurs et des nous demande d’ailleurs d’avoir existe dans l'imaginaire français
ceux qui veulent voyager. C'est nécessairement que focalisée sur gens qui mangent de la nourriture accès à notre base de données depuis très longtemps et a pris
souvent un public plus âgé, dans l'animation, mais est nippophile traditionnelle japonaise et en pour leur communication quand une importance considérable dès
des grandes villes, qui vont voir avant tout, c'est ce qui nous faisant cela vous séduisez toute ils sortent un film japonais le 19e siècle puisque les
des films que j'appelle des motive à nous intéresser à la une partie du public. »
comme Haut & Court par estampes japonaises ont
National Geographic. Les Délices fiction. »
exemple ou Bac Films.
influencé les impressionnistes,
de Tokyo de Naomie Kawase • que Zola les collectionnait, si
s'adresse à ce public, Notre vous allez au Musée d'Orsay,
• « ce sont des films qui reflètent • « Je pense à La Saveur des
Petite Sœur de Kore Eda on l’a une culture. Tout comme on sait Ramen a très bien marché sur le vous trouverez plein d'estampes
vendu sous ce prisme. Un public tout de suite quand on regarde public Art & Essais. C’est film japonaises représentées dans les
qui veut voir des cerisiers en un Ken Loach ou un Kore Eda. magnifique qui invite aux voyage. toiles françaises.
fleurs, des kimonos, des ramen... C'est différent, mais il n’y a pas On sait qu’il y a un public qui
Ces dernières années ces films une volonté de se positionner. cherche de l’exotisme quand il
ont trouvé un public, ça marche C'est un processus créatif vont au cinéma. »
beaucoup dans les circuits Art & différent avec une culture
Essais, car en France c'est un différente. »
• «L'industrie cinématographique
japonaise a beaucoup été dopée
• « Dans le film Un Jardin Qu’on
par l’animation" Dirait Eternel, on a toute une
exposition sur l’art de faire le thé.
Le film se passe dans un décor
somptueux. C’est vrai que c’est
l’une des seules
cinématographies à mettre autant
l’accent sur leur culture. Mais ce
n’est jamais caricatural.
159
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
THOMAS PIBAROT AMEL LACOMBE BASTIAN MEIRESONNE ERIC LEBOT ADRIEN GOMBEAUD DAVID TREDLER
• « La France est l’un des pays les • « c'était l'animation japonaise • « le cinéma asiatique à toujours • A Propos d’Hanabi « Nous avons • « ca date d'un moment déjà. On
plus ouvert à la diversité du dans le club Dorothée. C'est tout fasciné notamment les français. »
près de 100 000 personnes qui m'a décrit des files d'attentes
cinéma »
de même quelque chose qui a suivent nos pages sur Facebook devant les cinémas pour voir les
marqué vraiment toute une • et Instagram. »
films d'Ozu dans les années 70. »
c'est une cible très forte, l'expo de Itō Jakuchū au petit
demandeuse et fidèle. C'est plus palais dont on parlait tout à
large que le cinéma. • l’heure ? C'est peut-être le cas, je
ne sais pas. Est-ce que c'est le
même public qui va voir les films
• »
160
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
tout. »
THOMAS PIBAROT AMEL LACOMBE BASTIAN MEIRESONNE ERIC LEBOT ADRIEN GOMBEAUD DAVID TREDLER
• « Le cinéma japonais, il y en a • « c'est vraiment Eurozoom qui a • « B i e n s o u v e n t l e s fi l m s • « Les films japonais qui sortent • « et il y a eu vraiment un énorme • « Les films restent quand même
toujours eu, aussi parce que leur créé le marché de l'animation asiatiques présents en en France ne sont pas du tout les succès du cinéma japonais dans produits en premier lieu pour les
cinéma a été souvent coproduit japonaise hors Ghibli en France. »
compétition à Cannes par mêmes films qui marchent au les années 70 en France. Donc coréens. Après c’est vrai que de
ça veut dire qu'un cinéaste
par des européens. Ran par exemple, sont des co- Japon. Nous on travaille avec des comme Kore Eda, il s'appuie sur grands studios ont commencé à
exemple était co-produit par un productions françaises. Il y a auteurs qui pour la plupart la plus ça quand il sort ses films en développer leur branche
• « Les gens ne sont pas contre
français. »
dans le fond, c'est juste que tant donc un intérêt à les mettre en part peinent à faire des entrée France, sur cette connaissance internationale comme CJ
avant »
dans leur propres pays. Il arrive très anciennes de la France pour Entertainment par exemple »
s i m p l e m e n t d e s fi l m s q u i intentions et cependant il se
coréen fait plus d'entrées que les choses intéressantes à dire, les produit là bas. »
répondent à un cahier des trouve que cette culture résonne • « la France produit même les
blockbusters américains. »
choses évoluent petit à petit. films de certains réalisateurs
charges. » »
fort dans les pays occidentaux,
Après ça ne se fait pas du jour au étrangers. Essentiellement parce
lendemain, il faut du temps et des notamment chez nous. »
que le public de ces cinéastes se
• « lors c'est aussi parce qu'ils ont • A propos des films qu’importe en
étapes. »
trouvent en France. »
qui marchent chez eux, ils ne les auteurs sont récupérés par international il faut jouer les
sortent pas en France ou des plus grosses boîtes, c'est stéréotypes. L’empire des Sens, • « Il y a peu d’auteurs qui arrivent
Un cinéma uniquement en DVD. Par exemple comme ça... »
la seule motivation pour les à faire des entrées chez eux,
pensé pour la A Taxi Driver est un film sud- distributeurs étrangers s’était c’est pour ça qu’ils sont toujours
France coréen qui a fait peut-être plus de d’acheter l’un des films les plus heureux de voir leurs films
• « Je ne pense pas qu'il y ait une
12 millions d'entrées chez eux et volonté de positionnement par irrévérencieux. On y revient mais distribués en France. »
qui n'est sorti qu'en DVD chez r a p p o r t à t e l o u t e l fi l m les films qui sont distribués en
nous. »
d'animation. Ce sont des films France sont des films qui ne
qui ont leur propre culture ou leur verraient jamais le jour sans
propre parcours. Il n'y a pas de l’influence de la France.
161
L’export du cinéma d’Asie de l’Est
THOMAS PIBAROT AMEL LACOMBE BASTIAN MEIRESONNE ERIC LEBOT ADRIEN GOMBEAUD DAVID TREDLER
• « Il y a énormément de festivals • « Ce n’est pas sur les marchés • « Vous s’avez l’importance des • « Souvent quand un réalisateur • A Propos des palme d’or 2018 et • « On peut citer le London Korean
dédiés à ce cinéma en France internationaux qu'on peut nouer festivals est certes considérable marche bien sur un marché il 2019: « il est important de Film Festival qui est entièrement
c o m m e l e f e s t i v a l d u fi l m ce genre de contacts. Ça c'est p o u r l e s fi l m s q u i s o n t n’est pas rare qu’un distributeur rappeler que c'est des cinéastes organisé par le centre culturel coréen
asiatique de Vesoul ; le festival pour l'animation, c'est vrai que récompensés, et je ne trahis pas indépendant se le fasse prendre qui sont déjà connu. Ils ne sortent et le KOFIC. Le KOFIC c’est si vous
des trois continents ; le festival pour la fiction ils sont plus dans un secret en disant qu’obtenir par un plus gros qui surenchérit pas de nulle part. Bong Joon Ho, voulez l’équivalent du CNC en
du film Sud-Coréen à Paris… »
une logique de vendeurs une Palme d’Or va sur les MG. » son premier film il date de l'an France. Nous concernant on perçoit
internationaux et de rencontres nécessairement faire accroitre le 2000, donc ça fait 20 ans qu'il fait des subventions de leur part, c’est un
• « On a besoin de festival et de lors des marchés de films
nombre de tickets vendus. »
des films. Kore Eda encore partenaire, mais contrairement à
Cannes en premier lieu. »
plus. »
Londres ou à d’autre pays, ils
• A propos des marché du film • « Aujourd’hui certains festivals n’interagissant pas dans notre
d’animation japonaise: « Il y en a dans le monde ne mettent en • « La Palme d'Or, était quelque sélection ni notre programmation.
• « Les festivals donnent une
mais il faut aller au Japon. Mais avant que les oeuvres qui ont été choses d'attendu en Corée. Moi C’est nous qui choisissons quel films
visibilité et la presse valide, ou
en réalité il y a très peu de gens pensées pour ces derniers. Alors j'ai vécu ça, il y avait une on veut montrer et tel acteur ou telle
pas, et après quand vous allez
qui sont accrédités. C'est une ça n’enlève rien à la qualité des frustration de la part des coréens actrice on veut recevoir. Après ils
voir des exploitants frileux c'est
dynamique complètement films. »
de ne pas être reconnus. Alors là peuvent jouer le rôle d’intermédiaire.»
avec eux et d'avoir des infos sur surprise, c’est son septième film grande librairie, l'équivalent de la être une porte pour accéder à de
leurs projets si vous ne les et les précédents ont très bien Fnac chez nous, et en vitrine il y nouveaux marchés là où la
• EXEMPLE KORE EDA connaissez pas déjà. C'est avait tous les grands auteurs concurrence est beaucoup plus
marché à l’international avant »
L’importance vraiment un marché qui est pour coréens et il y avait une place grande comme à Cannes. »
les initiés. C'est un secteur vide pour le futur prix nobel de
des festivals
compliqué. Et même concernant littérature coréenne. »
• « C o n c e r n a n t l ' a n i m a t i o n
japonaise, on a essayé de
montrer depuis le début que
l'animation ce n'est pas que pour
les enfants. »
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
THOMAS PIBAROT AMEL LACOMBE BASTIAN MEIRESONNE ERIC LEBOT ADRIEN GOMBEAUD DAVID TREDLER
• « ils sont constamment en • « Je m’interroge souvent quand je • « Dès que j’ai vu les premiers films
recherche de nouveaux vois un film ou une série, s’il coréens arrivés sur Netflix, j’étais un
marchés. »
s’agit vraiment d’une oeuvre à peu déçu. J’aurais aimé avoir pu les
100% japonaise par exemple. programmer au festival. »
• « si Netflix a prit Bong Joon Ho, le cas. Eux ils adorent les
Alfonso Cuaron, Martin Scorsese vampires. Vous avez des dizaines
c'est pour faire leur pub. »
• « Il y a des plateformes qui font un
et des dizaines de films de
travail formidable. Je pense à
vampires qui sont produits pour
Outbuster, qui a un super catalogue.
• « Quand Vincent Maraval décide un seul film de zombies. Est ce
Ils arrivent à évènementialiser leur
de mettre tous les films du studio que nous, en France, nous avons
films » [...] « c’est important de
Ghibli sur Netflix c'est une bonne eu ces dernières années un seul
travailler main dans la main avec ce
La SVOD et la chose. » film japonais de vampire? C’est
genre de plateformes. »
on du cinéma
• « c’est important de travailler main
asiatique • « Je trouve qu’il y a du bon et du
dans la main avec ce genre de
moins bon. Le fait d’avoir tous les
plateforme. »
Miyazaki sur la plateforme c’est
super, vous avez aussi une
é n o r m e s é l e c t i o n d e fi l m s
coréens. Mais tout ça est noyé
dans la masse. S’ils achètent ce
genre de films c’est pour leur
algorithme. Moi j’ai une bonne
visibilité sur ces oeuvres quand je
m’y connecte car l’algorithme a
compris que c’est ce qui
m’intéressent donc il me propose
de voir ce que je veux voir. Mais
quelqu’un qui n’a jamais vu un
seul film coréen ou japonais il ne
soupçonne même pas que ces
films sont disponibles en SVOD. »
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L’export du cinéma d’Asie de l’Est
THOMAS PIBAROT AMEL LACOMBE BASTIAN MEIRESONNE ERIC LEBOT ADRIEN GOMBEAUD DAVID TREDLER
• « Le cinéma d'auteur japonais est • « Il y a quinze ans, je suis venue • « Je ne sais pas si on peut parler • « LLe Japon a encore donc • « Parler du cinéma asiatique • « Il y a depuis trois ou quatre ans
apparu très tôt »
au cinéma japonais par d’un essor récent. A la rigueur énormément de mal à vendre ses comme une généralité, c'est très effectivement une nouvelle
frustration du fait de la très faible d’un renouveau.
films de studio à l’étranger. C’est compliqué. Je dis ça parce qu'il y appétence pour le cinéma sud-
• « Dans les années 1970, ce sont représentation de l'animation en aussi parce qu’il s’agit d’un code a aussi des histoires différentes coréen. »
tout le monde va vouloir avoir le marchent par vagues, par cycles. qui ont découvert le film en salle.
nouveau Parasites. »
Le cinéma japonais et le cinéma • « Ces films ont brisé le plafond de
Un nouvel asiatique de manière générale a verre des 200 000 entrées dans les
essors du • « les années 90-2000 et il y a déjà été à l'honneur dans les années 2000.
cinéma pleins de distributeurs qui se sont festivals il y a plusieurs
asiatique? mis à acheter tout et n'importe décades. »
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BIBLIOGRAPHIE
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