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Le bureau 72K, rattaché à l'usine de machines à vapeur de Kharkov, déjà concepteur

du char T-24, fut chargé, en 1930, de mettre au point un char rapide capable de se
mouvoir soit sur chenilles, soit sur roues, à l'exemple des prototypes du char M30
achetés à Walter Christie aux États-Unis. Pour lancer le projet, l'ingénieur
militaire N. M. Toskina, de l'administration de la mécanisation de l'armée, fut
détaché au bureau d'étude. Le projet fut mené sous le nom de OBT (char rapide
expérimental), dont le premier exemplaire fut assemblé en septembre 1931. Après
quelques modifications de détail, le char fut alors lancé en production sous le nom
de BT-2 et, le 7 novembre de la même année, trois des premiers chars produits
défilaient sur la Place Rouge.

Le BT-2 différait quelque peu de son modèle américain, entre autres par la tourelle
dessinée par Alexeï Alexandrovitch Malochtanov qui embarquait un canon MS-2 modèle
1930 de 37 mm (ru). Cependant du fait de la faible production de ce canon,
plusieurs variantes virent le jour. Elles embarquaient une, deux ou trois
mitrailleuses DT de 7,62 mm, ou alors un canon M-30 avec parfois une mitrailleuse
coaxiale. Les roues aussi différaient, elles étaient d'un modèle allégé. Par
contre, le moteur restait un Liberty, dont les soviétiques avait acheté deux mille
exemplaires.

Le 6 décembre, Toskina ayant été rappelé à son organisation de tutelle, Athanase


Ossipovitch Firsov (ru) fut nommé à la tête du bureau et commença les études pour
l'amélioration du véhicule. Les efforts portèrent surtout sur le remplacement du
moteur américain, par un équivalent produit localement par l'ingénieur Alexandre
Mikouline, le M-5, et l'augmentation de l'armement par le montage d'un tout nouveau
canon 20K de 45 mm (ru). La masse du blindé passa à 11,5 tonnes et il embarquait
112 obus.

Une variante de commandement avec une radio 71-TKI et une antenne circulaire au-
dessus de la tourelle fut aussi développée, avec un emport de 72 obus de 45 mm. La
tourelle était devenue biplace, ce qui portait l'équipage à trois membres. Au
milieu de l'année 1933, après 400 exemplaires produits, le BT-2 céda sa place au
tout nouveau BT-5 sur les chaînes de montage de Kharkov.
Les grandes séries

La production de ce dernier, bien que ne durant que moins de deux ans, va atteindre
le total de 2 108 exemplaires. De nombreux dérivés seront en outre réalisés :
poseur de pont, amphibie, télécommandé par radio, doté de lance-flammes. De légères
modifications interviendront sur la tourelle et sur les roues. Pendant ce temps, le
bureau d'étude ne restait pas inactif. Dès janvier 1933, utilisant les travaux sur
la construction de caisse blindée, non plus par rivetage, mais par soudage, il mit
au point un nouveau modèle encore plus performant, le BT-7. Le moteur était
maintenant un M-17T, issu d'un moteur d'avion, fournissant 450 ch, et surtout
beaucoup plus fiable que le M-5. Le projet initial prévoyait un canon de 76,2 mm,
mais le premier prototype, assemblé le 1er mai 1934, reprenait la tourelle du BT-5
et son canon de 45 mm. Les essais menés au cours de l'été, ayant conclu à
l'inutilité de la mitrailleuse coaxiale préalablement montée, celle-ci fut
abandonnée. La production en série commença au début de l'année 1935. Une partie
des chars fut dotée d'une mitrailleuse antiaérienne, montée sur l'emplacement du
chef de char.

Au cours du second semestre de 1936, une série de changements d'origine politique


intervint dans la vie de ce char. D'abord, l'usine et le bureau reçurent des
désignations numériques, l'usine no 183 et bureau KB-190 et, surtout, le chef du
bureau d'étude, Athanase Firsov fut limogé et remplacé par Mikhaïl Kochkine, après
que Firsov eut été accusé d'avoir créé une boîte de vitesses défectueuse sur le
char. Ces défauts de transmission étaient surtout dus à une mauvaise maintenance et
la passion des équipages pour le saut d'obstacles à bord de leur véhicule.
Le travail se poursuivit malgré tout, et une version du BT-7 apparut l'année
suivante. Elle était équipée d'une nouvelle boîte à trois vitesses plus robuste et
surtout d'une tourelle dite « semi-conique » avec des flancs inclinés. La capacité
en munitions passa à 172 obus, et on monta deux projecteurs pour permettre le tir
de nuit. Parallèlement, sortirent des chaînes la variante BT-7A qui, adoptant la
tourelle du T-26-4, était armée d'un 76,2 mm court de type KT, ainsi que des
modèles de commandement équipés à l'image du BT-5RT.

La dernière évolution de la série, le BT-7M (désignation usine A8) se caractérisait


par l'adoption du nouveau moteur diesel V-2 de 500 ch (un moteur de 12 cylindres).
Elle vit le jour au cours de l'année 1938. Au total, de 1935 à 1940, 4 965 BT-7 et
790 BT-7M avait été produits.
Engagements

Les chars de la série BT permirent à l'Armée rouge de se forger une doctrine de


guerre mécanisée, très tôt dans les années trente. Dès 1933, furent créés de grands
corps mécanisés comprenant plus de 500 chars. L'accent y était mis sur la vitesse
de mouvement et l'attaque des arrières de l'ennemi. C’est pendant la guerre
d'Espagne que le BT-5 acquit pour la première fois ses lettres de noblesse. Arrivés
par bateau à Carthagène le 1er août 1937, les 50 exemplaires reçus par les
Républicains espagnols seront tous regroupés au sein du 1er régiment international
autonome de chars ("ОИТП" - "OITP"). Les équipages étaient constitués d’espagnols
et de volontaires étrangers tandis que les chefs de chars comme les conducteurs
restaient essentiellement soviétiques. Le baptême du feu eut lieu le 13 octobre
1937 à Fuentes de Ebro : le régiment à peine arrivé à 10 km au sud-est de la ville
mais éreinté par 630 km de marche forcée en moins de deux jours, se lance d’emblée
à l’assaut d’une position fortifiée. Les fantassins du 24e bataillon d’infanterie
de la 15e brigade fournis en renfort au dernier moment, ne parviennent pas à se
cramponner sur ces chars rapides lancés à toute vitesse, d’autant qu’ils sont pris
à partie tant par leur collègues républicains de première ligne de tranchées, non
avertis de l’attaque, que par l’artillerie de tous bords. Cet archétype de
l’opération mal conçue et mal coordonnée sera désastreuse pour les assaillants qui
perdent 16 chars et 37 soldats, même si une partie de ces machines — enlisées dans
les plantations de canne à sucre — sera récupérée et réparée par la suite.

Pour autant l'échec formel de cette opération n'est nullement imputable aux
qualités des BT-5, le régiment s'étant emparé de la plupart des objectifs désignés
et ayant correctement réalisé la mission, bien qu'il n'ait pu s'y maintenir faute
de soutien.

Les BT-5 furent également engagés à la bataille du lac Khassan en terrain très
défavorable. La plupart fut enlisée dans les thalwegs marécageux entre les collines
bezymiannaya (sans nom), celle des mitrailleuses, et zaozernaya et ne parvint pas à
escalader non plus leurs abruptes parois rocheuses. Le peu qui est parvenu sur
l'objectif a cependant fourni un appui feu décisif pour en déloger les Japonais.

Ces expériences, puis la guerre d'Hiver contre la Finlande, induisirent le haut


commandement soviétique en erreur. Ces chars, employés en soutien direct de
l'infanterie et non pas dans leur rôle premier d'exploitation dans la profondeur du
dispositif adverse, se comportèrent de façon médiocre. Ceci, combiné à des raisons
politiques, l'arme blindée étant l'enfant chéri du maréchal Mikhaïl Toukhatchevski,
les grandes unités furent dispersées en 1939. Elles furent recréées moins d'un an
après, à l'annonce des succès allemands en Pologne puis en France, mais ne furent
jamais vraiment prêtes avant le 22 juin 1941.

Les chars BT survivants après l'été terrible continuèrent à être utilisés tout le
long de la guerre, malgré leur grande vulnérabilité due surtout à leur réservoir
d'essence et à leur faible blindage. Certains BT-7 participèrent même à l'offensive
contre la Mandchourie en 1945.
La seule occasion où les BT-5 et BT-7 brillèrent particulièrement fut la bataille
de Khalkhin Gol, en 1939, où les 6e et 11e brigades blindées bouclèrent
l'encerclement de l'armée japonaise opposée à Joukov.

Des BT-7 furent cependant utilisés une dernière fois lors de l'offensive soviétique
menée contre la Mandchourie japonaise à compter du 9 août 1945. Certaines unités
blindées du front de Transbaïkalie (frontières soviéto-mongoles) échangèrent en
effet leurs T-34 contre de vieux BT-7M tirés des réserves stratégiques. Ceux-ci,
quoique moins puissants que leurs successeurs, avaient l'avantage d'une vitesse et
d'un autonomie supérieure sur un terrain ou le ravitaillement était prévu par les
planificateurs soviétiques pour être très difficile1.
Variantes
BT-2
BT-7 modèle 1935
BT-7 modèle 1937
BT-7A

OBT prototype (parfois appelé BT-1)


BT-2 première version de série canon MS-2 modèle 1930 de 37 mm (ru).
BT-5 canon 20K de 45 mm (ru), moteur local M5
BT-5RT version de commandement avec radio
BT-5A prototype de char d'artillerie avec canon court de 76,2 mm.
BT-5BHM version avec un lance flamme (10 exemplaires).
BT-5BHM2 version avec générateur d'écran fumigène (3 exemplaires).
BT-7m35 - version initiale avec tourelle cylindrique du T26m33 et BT5
BT-7m35RT - variante radio
BT-7m37 - nouvelle tourelle semi-conique
BT-7m38RT - variante radio
BT-7M - version améliorée à moteur diesel (788 exemplaires entre 1938 et 1940).
BT-7A - char artillerie avec 76,2mm (154 ou 156 exemplaires).

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