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Objectifs pédagogiques..................................................16
Plan du chapitre........................................................16
INTRODUCTION............................................................17
II.1- LA REGION COMME CADRE D’AMENAGEMENT DU TERRITOIRE ET DE
DEVELOPPEMENT REGIONAL................................................18
II.1.1- Les géographes et la notion de région........................19
II.1.1.1. Les premières approches......................................19
II.1.1.2. L'évolution des idées sur la région..........................19
II.1.2. Les économistes et le concept de région.................................21
II.1.3. Pour une typologie adaptée des régions en Afrique...................24
II.2-LES POLITIQUES D’AMENAGEMENT DU TERRITOIRE ET DEVELOPPEMENT REGIONAL
....................................................................... 28
II.2.1. L'évolution des concepts................................................29
II.2.1.2. La mise en valeur régionale..................................30
II.2.1.3. Le développement régional....................................30
II.2.1.4. L'Aménagement du Territoire (physical planning, planification
spatiale, organisation de l’espace) ......................................30
II.2.2. Approches pour la définition des politiques d'Aménagement du
Territoire et de développement régional.............................32
II. 3- METHODES ET TECHNIQUES DE PLANIFICATION SPATIALE...............34
II.3.1-Les différents outils de planification spatiale...............34
II.3.2-Méthodes d’élaboration et de suivi évaluation (Etapes et
activités) ...............35
II.3.3-Quelques techniques quantitatives pour l’analyse régionale....38
Cours préparé et mis en ligne par Dr Ernest K ILBOUDO Enseignant Chercheur à l’UFR/SEG de 1
l’université Ouaga II avec l’appui de MAÏGA Issouf et YARO Etienne
CHAPITRE II-ESPACE, REGION ET DEVELOPPEMENT
Objectifs pédagogiques
Plan du chapitre
Longtemps tenu à l'écart des préoccupations des économistes, l'espace s'est imposé au
fil du temps comme objet d'analyse économique. Des actions ponctuelles d'aménagement des
centres urbains, on est passé à une prise en compte des espaces nationaux ou même supra
nationaux. Autant les mécanismes du marché n'ont pas toujours permis une allocation
efficace des ressources, autant la planification globale n'a pas non plus résolu efficacement
les problèmes d'allocation géographique des investissements et la répartition des fruits de la
croissance.
Au-delà de la recherche d'un meilleur cadre de vie, c'est même un problème de mieux
être matériel et un problème de justice que cherchent à résoudre l'Aménagement du Territoire
et la Planification Régionale.
Dès lors, on ne s'étonnera pas de voir un engouement de plus en plus grand pour la
prise en compte de l'espace dans l'analyse économique, dans les actions de développement
surtout dans les pays en développement.
Les grands champs d'intérêt que couvre la "science régionale" dans ses analyses sont
largement décrits par A.S.BAILLY et al. (1987). Ils soulignent en effet que lors du Congrès
Européen de la Regional Science Association à Milan (Août 1984) fut organisée une Table
Ronde sur l'enseignement des sciences régionales en Europe Occidentale ; y participaient des
spécialistes venus de Belgique, du Canada, d'Italie, de France, du Royaume-Uni, de la
République Fédérale d'Allemagne et de la Suisse. A tous il avait été demandé de bien vouloir
soumettre une liste de dix sujets considérés comme importants dans l'enseignement et dans la
pratique de la "régional science".
L'accord se fait grosso modo sur six grands sujets : localisation d'unités dans l'espace
géographique, croissance régionale, environnement (et congestion), aménagement du
territoire, économie urbaine (voir les sujets "étoilés") ; reste cependant une longue liste de
sujets variés : disparités dans l'espace, interférences entre niveaux régionaux, évaluation de
projets régionaux, effets d'axes de transport, usage et prix du sol, analyse de données
spatiales.
Tableau n°X-Matières stratégiques spatiales
Pour supprimer ou en tout cas, atténuer les disparités géographiques de divers ordres
(revenus, niveaux de vie etc..) il faut forcément passer par le développement régional. La
région constitue le cadre géographique et administratif de cette politique. Mais il faut
1
reconnaître qu'il est difficile de définir la notion de région . En la matière, les divergences
sont très nombreuses et vives. Les définitions varient selon qu'on est géographe, économiste
1 Sur la question, la littérature est très abondante. Ce paragraphe s'en inspire très largement. Pour plus de
détail voir quelques ouvrages fondamentaux : a) J. LAJUGIE, P. DELFAUD, CL. LACOUR (1979)
"Espace régional et Aménagement du territoire" DALLOZ. b) J. H. P. PAELINK et A. SALLEZ (1983)
"Espace et localisation" Economica . c) A. DAUPHINE (1979) "Espace, Région et système" Economica .
ou autre.
L’objet de ce chapitre est de rendre compte de ces points de vue, notamment ceux des
économistes et des géographes.
A l'origine, les géographes faisaient la distinction entre régions naturelles, régions humaines
et régions économiques. Mais très vite, leurs idées et méthodes d'analyse vont évoluer de
sorte qu’ils vont utiliser des critères plus complexes dans la définition des régions.
- On entendait par "régions naturelles" des unités d'ordre physique caractérisées par la
géologie, le relief, le sol, le climat, la végétation etc...
- Selon certains auteurs, la région n'est pas une donnée (unité d'ordre physique) mais
un résultat. C'est la conséquence de "faits d'humanité". Les régions ont été façonnées par
l'action des hommes au cours de l'histoire. Elles sont devenues des unités politiques et
administratives. Ce sont des régions humaines.
Finalement, les géographes vont orienter leurs travaux dans deux directions : d'une part
l'analyse des inter-dépendances géo-économiques, d'autre part l'analyse des phénomènes de
domination urbaine.
Pour rendre plus saisissante (saillante) cette idée de la diversité des critères à prendre en
compte, certains géographes vont proposer d'utiliser l'expression "d'espace fonctionnel" pour
désigner la région. La région serait alors "conçue comme le champ d'action de flux de tous
ordres et qui s'exprime moins par ses limites que par son centre et les réseaux divers qui en
émanent".
Dès lors, les principales forces organisatrices de la région c'est-à-dire les principaux critères
pour définir la région seront :
- La polarisation créée par une industrie motrice autour de laquelle gravitent des activités
satellites.
- Les liens créés par les relations commerciales en termes de marché d'un produit.
Petit à petit, les géographes en arrivent à axer leur étude sur les fonctions économiques des
villes et des régions.
Dans leurs efforts de recherche ils vont distinguer les "régions administratives qui servent de
base à l'administration courante et qui reposent sur un découpage territorial et les régions
économiques qui sont le résultat de flux et de zones d'influence dynamiques".
La région est vue comme "la zone où s'exerce l'action prépondérante d'un grand centre
urbain". C'est la zone qui a pour limite le lieu géométrique des points où l'action du grand
centre urbain est tenue en échec par celle des centres voisins.
L'idée maîtresse est que la région est dominée par une ville. La région se définit et s'organise
par rapport à une ville. La région est vue comme la "zone de rayonnement et de structuration
spatiale d'une ville, d'une métropole régionale".
Au total, chez les géographes trois critères deviendront prépondérants pour définir la région :
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les éléments physiques, les groupes humains et l'organisation volontaire de l'espace par les
hommes, c'est-à-dire les divisions administratives.
Malgré les efforts effectués par les géographes pour donner un contenu économique à leur
acception de la région, il subsiste des différences non négligeables entre leur conception et
celle des économistes. Tandis que les géographes continuent à privilégier les données
physiques, et le milieu naturel et humain dans l'explication de la vie régionale, les
économistes quant à eux, s'attachent davantage aux phénomènes de la production et de la
circulation des biens. Ils donnent plus d'importance à la prise en considération des coûts et
des économies externes dans l'explication de la localisation des unités de production.
Alors que les géographes traitent les régions comme des entités dont les relations internes
sont plus prépondérantes, les économistes insistent sur les interrelations entre espaces
régionaux, sur la nature et les flux de personnes, des biens et services qui en assurent
l'interdépendance.
Comme chez les géographes, les analyses des économistes ont connu de fortes évolutions.
Concrètement, avant que l'on en arrive à l'élaboration d'une définition plus ou moins
générale, il a fallu passer par une série d'intuitions et de définitions partielles, variables selon
les individus et les époques.
Les trois types d'espace retenus par F. PERROUX sont l'espace homogène, l'espace polarisé
et l'espace-plan.
.
1. L'espace homogène : c'est la notion la plus simple, la plus facile à percevoir et la plus
connue des géographes, démographes et économistes. Cette notion correspond à un espace
continu dont chacune des parties constituantes présente des caractéristiques ou des propriétés
aussi proches que possible les unes des autres.
C'est un espace hétérogène dont les diverses parties sont complémentaires, inter-dépendantes
et entretiennent entre elles, et tout spécialement avec les pôles de développement plus
d'échanges qu'avec la région voisine (le pôle de développement peut être une agglomération
urbaine, une activité économique de base, une firme de base, etc...). On mesure
l'interdépendance à travers les flux de biens et services enregistrés au départ ou à destination
de ces pôles de développement.
3. L'espace plan
Ces trois conceptions de l'espace économique ne sont pas exclusives les unes des autres mais
complémentaires :
Ces trois concepts d'espace économique vont être transposés à la région, laquelle notion est
moins générale que celle de l'espace parce que composée d'éléments géographiques contigus.
Cela permet de distinguer trois approches possibles de la région : la région homogène, la
région polarisée ou fonctionnelle et la région de programme ou région plan.
Apportons quelques éléments de précision aux derniers concepts.
Pour délimiter la région polarisée on peut considérer par exemple certains indices (trafic
routier, communications téléphoniques, zone de diffusion de la presse locale etc...). Bref, ce
sont les flux qui tracent les frontières. Donc il y aura autant de frontières que de flux. Ce sont
donc les échanges internes qui prédominent dans la détermination de la région.
La région plan n'est plus un concept descriptif ou explicatif, mais un concept opérationnel
qui définit un espace volontaire, un espace conçu pour l'action. Il traduit le découpage de
l'espace national en circonscriptions administratives pour le développement régional.
Les définitions de la région économique sont innombrables. Plus on avance dans le domaine
économique, plus le critère de définition devient arbitraire parce que la région devient moins
un objet d'étude qu'un moyen d'action, un instrument de l'analyse économique permettant de
fonder, sur des bases plus fermes, une politique de développement régional et d'aménagement
du territoire. La plus utile et la plus adéquate des définitions dépend de l'objet particulier de
l'étude.
Toutefois, à la base de toutes les définitions on retrouve l'idée d'une aire géographique
constituant une entité et pouvant être envisagée comme un ensemble significatif et
l'existence d'un degré élevé de corrélation de comportement entre ses divers éléments.
En d'autres termes, la région correspond à une aire géographique constituant une entité
qui permet, à la fois, la description des phénomènes naturels et humains, l'analyse des
données socio-économiques et l'application d'une politique.
De plus en plus, on a recours à l'analyse systémique pour l'étude des régions. Ainsi, selon A.
DAUPHINE (1979), "la région est un système spatial ouvert, dialectiquement déséquilibré -le
principe d'unité l'emporte sur les forces de diversité - de taille inférieure à la nation, formé
2
d'espaces contiguës"( ).
Les analyses en termes de système conduisent à souligner les processus, les séquences et
3
surtout les enchaînements qui peuvent se produire ( ). Le système est "un ensemble
d'éléments interdépendants, c'est-à-dire liés entre eux par des relations telles que si l'une est
4
modifiée, les autres le sont aussi et par conséquent tout l'ensemble est transformé," ( ).
La région est dite système ouvert dans la mesure où elle entretient des relations d'entrées et
de sorties avec l'environnement c'est-à-dire l'ensemble des facteurs fonctionnels et des
facteurs spatiaux qui exercent une action sur la région ou qui sont soumis à son influence.
4 : J. de ROSNAY cité par R. DAUPHINE (1979« Espace, région et système » Economica- Paris p.21
II.1.3. Pour une typologie adaptée des régions en Afrique
La question fondamentale qui se pose désormais est celle de savoir si on peut transposer ces
notions au cas des pays en développement en particulier ceux de l'Afrique au Sud du Sahara
compte tenu des spécificités de cet espace économique. Et dans le cas échéant à quelles
notions faut-il avoir recours pour rendre compte de cette nouvelle réalité ? Quels sont les
différents types de régions que l'on peut y déceler ? Quelles sont la nature et les fonctions de
ces régions ?
Ces remarques amènent à critiquer ces notions et à rechercher des concepts plus adéquats
pour appréhender la réalité des pays dominés.
La critique portera sur chacune de ces notions dégagées plus haut : région homogène, région
polarisée, région-plan.
Les régions dans les pays dépendants ne présentent pas d'homogénéité économique. En effet,
lorsqu'on parle d'homogénéité, c'est en règle générale de l'homogénéité géographique qu'il
s'agit. On indexe ainsi des espaces ayant des conditions climatiques communes (des espaces
situés soit dans des plaines, soit dans des montagnes). En réalité, ces régions ne forment pas
un marché préférentiel pour les produits locaux. Or cette condition est essentielle.
Les échanges intra-régionaux sont très faibles, souvent inférieurs aux échanges qui se font
avec le centre économique dominant et avec l'étranger. Cela tient à l'absence de
complémentarité des ressources régionales et à la place souvent très grande qui reste accordée
à l'agriculture de subsistance.
Les industries sont de très faible envergure et ne transforment que quelques produits. Les
structures commerciales sont également très faibles. Les infrastructures et moyens de
transports sont quasiment inexistants.
Dans la majeure partie des cas, les régions en question n'ont pas d'histoire et de structure
sociale communes. Rares sont les régions qui correspondent à un groupe ethnique homogène.
Ces régions sont des entités géographico-administratives regroupant plusieurs groupes
ethniques n'ayant pas toujours vécu en harmonie dans le passé.
Le plus grand drame pour une telle stratégie réside dans les effets de fuite. En effet, les
activités motrices sont créées avec des équipements importés, de la main d’œuvre qualifiée
expatriée. Les revenus engendrés sont donc expatriés. Les secteurs d'activités ne sont pas (ou
très peu) complémentaires.
Les transports qui jouent un rôle capital dans la diffusion surtout pour les industries
extractives sont défectueux ou orientés vers l'extérieur.
.
En Afrique, il n'y aurait selon ces critiques, que des fausses polarisations. En tout cas, la
réalité n'a pas changé malgré la création de ces fameux pôles. Le développement intégré
demeure toujours un rêve et un objectif.
Bien de raisons commandent d'être prudent lorsqu'on parle de région-plan dans ce contexte .
- Tout d'abord, le concept de région plan n'est pas un cadre passif de réception des décisions
du pouvoir central. Il faut qu'il y ait des centres de décisions publics et privés locaux actifs.
Or dans ces pays ces conditions manquent de sorte que les actions envisagées échouent le
plus souvent. Les planificateurs régionaux n'ont en général pas l'autorité administrative
requise pour formuler des plans dignes de ce nom. Faute de moyens, ils se confinent au
contrôle et à l'évaluation des travaux en cours.
- Ensuite, la région conçue comme espace opérationnel d'application du plan central n'a de
réalité que dans la mesure où le plan central lui attribue les moyens et prend des décisions
affectant le développement régional. Or ces régions ne sont que des découpages
administratifs éventuellement susceptibles de recevoir des moyens. Dans ce sens, il est
difficile de parler de région-plan. La partie régionalisée du plan est presque toujours vide
pour les régions. Seules quelques régions privilégiées bénéficient effectivement des moyens
centraux. Les investissements publics sont inégalement répartis. Les dotations régionales sont
fonction du rapport de force au niveau du pouvoir politique. En effet, les hommes politiques
se disputent fréquemment "l'enveloppe financière" du plan national pour mieux servir leurs
régions de prédilection pour des raisons de clientélisme politique. Les régions sans défenseur
ou parrain politique se trouvent délaissées.
Enfin, l'investissement privé se concentre dans un petit nombre de points stratégiques où les
occasions de profit sont les plus propices. De même, l'aide internationale ne corrige pas les
inégalités mais les accentue au contraire. Chaque bailleur de fonds choisit sa zone
d'intervention compte tenu de ses intérêts : politiques, économiques, militaires, etc. Les
infrastructures de communication créées deviennent de simple moyen d'évacuation de la main-
d’œuvre et des matières premières.
Un certain nombre d'auteurs ont essayé de systématiser l'approche de la région dans les pays
dépendants, notamment en Afrique. Ils ont tenté de dresser précisément une typologie des
régions dans ce cadre. A ce sujet deux études méritent d'être citées abondamment. Il s'agit de
"Divisions de l'espace géographique dans les pays sous-développés" de B. KAYSER
5
(1966)( )
et de celle de Jacques BUGNICOURT (1978) "Illusions et réalités de la région et du
6
développement régional en Afrique" ( ).
Le premier dégage les types d'espaces géographiques ci-après :
- L'espace indifférencié
- La région de spéculation
- La région d'intervention
- Le bassin urbain
- La région organisée.
- L'aire écoculturelle
- La région traditionnelle
- Les annexes de l'extérieur
- La zone extravertie
- La zone retardée
- La pré-région.
7
D'autres notions sont avancées par d'autres auteurs . Il en est ainsi des expressions de : "sous-
Malgré les différences d'appellations, ces régions ont dans certains cas des contenus
identiques. Il convient donc d'examiner ces différentes notions et de les regrouper en fonction
de leur contenu.
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Tableau n° X-Récapitulation des nouveaux concepts proposés
Notio Synonymes
ns et
Aute Notions Auteurs
1 urs
- Espace a - Isolat A. REYNAUD
Indifférenci b - Aire éco- culturelle
é (B.
KAYSER) J. BUGNICOURT
c – Région traditionnelle
2 - Espace a - Pays
dérivé (M. dépendants b – Divers
SANTOS) aPériphérie
- Aire de drainage
3 - Région de
spéculation b - Annexe de
(B. l'extérieur J. BUGNICOURT
KAYSER) c - Zone extravertie
d - Espace aliéné D. OUEDRAOGO
Z. PIORO
e - Sous-espaces enclavé
Quel contenu à ce concept ? On pourrait dire en exagérant quelque peu, qu'autant d'auteurs,
autant de définitions de l'Aménagement du Territoire. Il n'y a rien d'étonnant à cela, puisque
cette discipline a été par excellence une pratique avant de prétendre s'élever à un certain
degré d'abstraction. En effet, tous les actes de l'homme visant à transformer la nature, toutes
les actions d'embellissement de son cadre de vie... relèvent d'une manière ou d'une autre de
l'Aménagement du Territoire.
Nombreux sont les gouvernements qui, en dépit des prescriptions de l'idéologie libérale, sont
intervenus dans la vie économique pour corriger des déséquilibres trop flagrants. Les
expériences historiques fourmillent en la matière :
- aux USA, la Tenessee Valley Authority en 1933 dans le cadre du New-Deal sans oublier les
diverses tentatives de mise en oeuvre d'une politique régionale systématique sous
KENNEDY.
- Plan Vanoni (1954-1964) en Italie pour aider les "régions à problèmes".
- au Royaume Uni, des politiques ont été entreprises dès 1934 pour combler les déséquilibres
constatés entre les régions,
- en France également de nombreuses actions ont été menées avant la guerre 1939-1945, cette
dernière ayant été le point de départ d'une systématisation de la mise en oeuvre des politiques
régionales (8).
C'est à la suite de très longs et nombreux tâtonnements que des auteurs ont tenté de
conceptualiser les diverses actions relatives à l'Aménagement du Territoire.
On est passé d'une conception étriquée à une conception plus large, plus globale. Les
terminologies exactes utilisées sont : urbanisme, mise en valeur régionale, développement
régional et aménagement du Territoire.
II.2.1.1. L'urbanisme
- Pour P.H. DERYCKE, (1979) l'urbanisme est une expression ambiguë qui "désigne tantôt
une action qui va de la simple opération de voirie à l'aménagement complet de vastes
ensembles urbains , tantôt une réflexion sur leur fonctionnement et la rationalité des décisions
à prendre concernant leur évolution; tantôt une certaine conception esthétique ou architectu-
rale des villes".
C'est la " science des aménagements urbains , ce qui couvre aussi bien les travaux de génie
civil que les plans des villes ou les formes caractéristiques urbaines de chaque époque"
(Françoise CHOAY cité par P.H. DERYCKE 1979).
- Quant au terme urbanisation "il désigne à la fois les divers processus par lesquels une
population se structure en ensemble urbain et l'étude scientifique systématique de ces
ensembles eux-mêmes et leurs relations (P.H. DERYCKE 1979).
Alors que l'urbanisme classe les différents types d'aménagement de l'espace urbain,
l'urbanisation classe les différents types de villes et de structures urbaines.
8 : Une excellente synthèse de ces politiques à l'échelle internationale à été faite dans l'ouvrage
commun de J. LAJUGIE, P. DELFAUD, C. LACOUR "Espace régional et Aménagement du Territoire"
DALLOZ 1979.
II.2.1.2. La mise en valeur
régionale
La mise en valeur régionale renvoie à la nécessité et à la pratique pour un pays d'exploiter
plus rationnellement toutes les ressources naturelles (sources d'énergie, minerais...) dont il
dispose et spécialement de mettre en valeur les régions insuffisamment développées. En cela,
cette expression marque un élargissement par rapport à la notion d'urbanisme. Il s’agit en fait
de la recherche d’un meilleur équilibre entre les régions au plan économique. Pour Lajugie
(1979), les promoteurs de cette conception « avaient en vue l’accroissement de la production,
l’augmentation de la productivité, des profits, des revenus sans faire une place suffisante à la
promotion humaine des populations ».
II.2.1.3. Le développement
régional
Quant au développement régional, il est conçu comme la base de l'Aménagement du
Territoire. Il intéresse toutes les régions du pays et non pas les régions retardataires
exclusivement. En ce sens, il est plus large encore que les notions précédentes. L'objectif
principal d'un plan de développement régional conduit par l’Etat est la mise en place des
investissements qui puissent profiter à toutes les populations de toutes les localités de la façon
la plus équitable possible. En ce sens, il a un caractère humain.
Il se fonde sur la planification régionale qui consiste en dernière analyse à élaborer des plans
régionaux et à les exécuter effectivement. La planification régionale implique l'analyse de la
région, sa connaissance approfondie, la mise en évidence de ses potentialités et de ses
contraintes. Le planificateur régional doit pouvoir faire le diagnostic de la région afin de
proposer une thérapeutique appropriée. Il doit faire des propositions de politiques de
développement régional. Les différents plans régionaux devraient s'insérer dans la stratégie
générale de développement du pays concerné. (9).
A. Essai de définition
Dégager une définition unique de ce terme n'est pas chose particulièrement aisée. L'on
pourrait aligner une infinité de définitions si on devrait tenir compte de la sensibilité et du
domaine de prédilection de chaque auteur. Aussi va-t-on se contenter de quelques définitions
à l'issue desquelles une synthèse sera tentée.
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9 : Pour plus de détail voir BARACHETTE (1968) "Etudes régionales et plan national dans les pays en
voie de développement". Revue Tiers-Monde. nΕ 34.
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Pour M RANDET, cité par LAJUGIEjugie (1979), « la politique d’Aménagement tend à
endiguer le courant qui porte toutes les forces vives du pays vers les grands centre, à créer
des sources de vie dans les régions dont les ressources sont insuffisamment utilisées et qui,
malgré les riches possibilités, tendant à devenir désertes, à contenir le développement des
grandes agglomérations, à mettre en valeur les zones sous-développées du territoire ».
Selon J. M. ROULIN (1961) "on peut définir l'aménagement du Territoire comme la science
ou l'art qui a pour objet l'organisation et la répartition de l'espace régional ou national des
diverses activités humaines en fonction des besoins de l'individu et de la collectivité" (10).
En paraphrasant C. PETIT (ancien ministre français de la Reconstruction et de l'Urbanisme),
on pourrait dire tout simplement que l'Aménagement du Territoire est la recherche dans le
cadre géographique d'un pays, d'une meilleure répartition des hommes en fonction des
ressources naturelles et des activités économiques. Cette recherche doit être faite dans la
constante préoccupation de donner aux hommes de meilleures conditions d’habitat e de
travail, de plus grandes facilités de loisirs et de culture. Cette recherche n’est donc pas faite à
des fins strictement économiques, mais bien davantage pour le bien être et l’épanouissement
de la population ».
Pour la revue Economie et humanisme (1953) cité par Lajugie (1979), « l’objet de
l’Aménagement du territoire est de créer, par l’organisation rationnelle de l’espace et par
l’implantation des équipements appropriés, les conditions optima de mise en valeur de la
terre et les cadres les mieux adaptés au développement humain des habitants ». C’est de la
géonomie (science et art de l’aménagement de l’espace) selon l’expression de MF Rouge.
C’est donc de la prospective.
La plupart des définitions sont synthétisées par J. LAJUGIE (1979) en ces termes,
"l'Aménagement du Territoire a pour fin, à la fois, de promouvoir la mise en valeur des
ressources régionales et d'améliorer le cadre de vie et les conditions d'existence des habitants
en atténuant les disparités régionales de développement économique et social par une
organisation prospective de l'espace, reposant sur une orientation volontariste et concertée
des équipements et des activités".(11)
On peut en définitive dire que l'Aménagement du Territoire a pour objet, la recherche
d'un développement équilibré et harmonieux de la nation par le meilleur emploi des
ressources humaines, économiques et financières du pays, par l'utilisation rationnelle du
territoire en fonction des éléments propres à chaque milieu et à chaque région.
Ces finalités sont de plusieurs ordres. Ainsi que l'indique PH. PINCHEMEL (1985),
"les finalités les plus évidentes sont d'ordre économique : il s'agit de mettre en valeur, de
développer, d'assurer la croissance économique, de tirer du territoire en question les revenus
les plus importants possibles avec le minimum d'investissements. Cette mise en valeur
13
: Ph. PINCHENEL pp. cit. p. 10.
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Partant de l'étude des pays développés, L. H. KLAASSEN (1965)(14) suggère de distinguer
quatre types de régions en fonction desquelles des politiques caractéristiques pourraient être
appliquées. Le critère de distinction est le niveau du revenu et / ou du chômage. Pour tenir
compte du facteur temps, il préconise de retenir d'une part le niveau de revenu pendant
l'année considérée par rapport au niveau national pour la même année (soit m) et d'autre part
le taux d'accroissement prévu de ce revenu dans les années à venir par rapport au taux
national prévu (soit t).
Les différents types de régions obtenues et les politiques préconisées sont récapitulés dans les
deux tableaux ci-après.
14
: K. H. KLAASSEN (1965)"Aménagement Economique et Social du Territoire" OCDE Paris.
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Tableau n°X Régions à problèmes et caractéristique de la politique
Caractéristique le
Nature de la région de la politique
principa Modalité
- la destination générale des terres situées dans les limites du territoire national ;
- la nature et la localisation des grands équipements d'infrastructures sur l'ensemble
du territoire national.
Le SDAU détermine :
Planifier, c'est élaborer des plans et les mettre effectivement en oeuvre. Autrement dit, le
processus de la planification comporte deux étapes principales qui sont : l'élaboration et
l'exécution des plans. Ceci est valable pour la planification régionale et l'aménagement du
territoire. Chacune des étapes se subdivise en sous-étapes. Ces dernières apparaissant comme
des tâches particulières imposées au planificateur.
II.3.2.2- La collecte des données : méthodes de recueil des données et leur présentation.
- en enquêtes systématiques qui, en général, ne seront pas exhaustives dans le cas des études
régionales, mais se feront par sondages auprès d'échantillons représentatifs obtenus soit par
une méthode de tirage aléatoire, soit par la méthode des choix raisonnés;
Une fois les données collectées, il faut les présenter sous une forme qui les rend très
faciles à utiliser. On utilisera à cet effet : les tableaux statistiques, les cartes, les graphiques,
les coefficients, les indices, les indicateurs...
L'analyse régionale est une méthode visant à connaître une unité territoriale définie.
Elle consiste en la recherche des potentialités et des contraintes de la dite unité de
planification. Elle doit permettre de déceler les aptitudes et les faiblesses de la région. Bien
entendu, cette recherche, cette étude de la région n'est pas faite en tant que simple exercice
intellectuel ou "académique". Elle vise un but. Elle est intéressée. On cherche à mieux
connaître la région en vue d'une action de transformation, (de développement) et
d'intervention pour le progrès de l'espace considéré et le bien être des populations qui s'y
trouvent.
Ainsi perçu, le diagnostic est un exercice dynamique qui examine l'état actuel et les
potentialités compte tenu du passé récent et en fonction des objectifs à atteindre à terme.
L'analyse se concentre sur les structures essentielles de l'économie telles que la distribution
de la population, des activités et des investissements, (tels que) l'environnement naturel et le
patrimoine, le désenclavement et les transports. Ainsi on aboutit à définir avec précision les
problèmes qui se posent dans le cadre de la mise en valeur du territoire et les contraintes qui
sont à leur origine.
.
Les techniques de connaissance sont fonction de la conception de la région et des
buts poursuivis à travers l’analyse régionale.
Si l'on conçoit la région comme un "espace lieu", c'est à dire tout juste un point, un
lieu de concentration d'activités, on pourra se contenter de calculer des indicateurs de chaque
activité pour traduire le niveau de développement de la région et procéder à des comparaisons
entre régions soit directement, soit indirectement en passant par les moyennes nationales des
mêmes indicateurs.
Ici, on part de l'idée que la région est un lieu où sont réunies des activités, et plus
abusivement encore, une somme d'activités. On parle "d'espace lieu de concentration"
d'activités. Ce sont des "points" que l'on aura pris soin de repérer et baliser c'est à dire de
situer dans l'espace. On veut alors comparer les régions entre elles pour faire apparaître les
inégalités de développement et faire les propositions d'intervention en conséquence. Selon
KLAASSEN (1965), "Le but d'une étude comparative est de déterminer la position d'une
région donnée par rapport à d'autres régions et par rapport à l'ensemble du pays. Dans
certains cas, des comparaisons avec des régions au-delà des frontières nationales sont aussi à
conseiller, en particulier si ces régions sont limitrophes de celles qu'on étudie et si elles ont
une structure analogue".
Afin de parvenir à la comparaison des régions, on les traduit sous la forme d'un ensemble
d'index, d'indicateurs. Ainsi on aura les mêmes indicateurs (revenu par tête, taux de
scolarisation, IDH, IPH, etc,...) pour toutes les régions et on effectue aisément les
comparaisons. On pourra faire pour chaque région, une synthèse des indicateurs et la réduire
ainsi à un indice unique et homogène et par la suite effectuer les comparaisons avec d'autres
régions.
Ainsi que l’écrit J.BUGNICOURT (1970), les disparités régionales sont des inégalités de
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toutes natures apparaissant entre différentes zones d’un même espace . Pour AYDOLOT
(1985), elles s'évaluent nécessairement par rapport à une référence implicite. La disparité,
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c'est un écart par rapport à une norme. Mais laquelle choisir?" . Toute la question est là!
Faut-il concevoir que toutes les régions soient identiques ou simplement rechercher l'égalité
sous certains aspects tout en respectant les différences ou les spécificités des régions ? Et si
on accepte cette deuxième hypothèse, quelle unité de mesure faut-il utiliser et selon quel
indicateur?. Dans la pratique, l’on pense qu’il y a des régions retardées et des régions
1) Moyennes
2) Ecart type
3) Ecart absolu moyen
4) Variance
5) Coefficient de variation
6) Coefficient de Gini
etc...