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Sébastien Dujardin Gérontologie MOSS 2 – promotion

2021

TD :
En quoi le soutien aux aidants professionnels et familiaux est un axe prioritaire de
la politique gérontologique ?

Le soutien aux aidants professionnelles et familiaux est un axe prioritaire de la politique


gérontologique car il s’avère indispensable pour la prise en charge de nos ainés du fait de la
structuration de la société et de son évolution.
En effet, la population française vieillit (1), ce qui engendre une hausse des besoins (2) et
donc des dépenses (3) alors même que l’Etat n’a pas les moyens de tout prendre en charge
(4) et que certaines personnes veulent avoir le choix de rester chez elle (5). Il faut donc
pouvoir soutenir les aidants professionnels et familiaux pour offrir une alternative au
placement en EHPAD ( 6)

1 Une population qui vieillit.


La société française est marqué par un vieillissement de sa population qui devrait durer au
moins jusqu’en 2060. Cette modification démographique est dû d’une part à l’augmentation
de l'espérance de vie, et d’autre par au “papy-boom”, pendant du “baby boom” d’après
guerre.
Ainsi, selon les données proposées par l’INSEE, l’espérance de vie à la naissance en
France métropolitaine est passée de 67 ans entre 1960 à 79,2 pour les hommes et 79 ans
pour les femmes en 2020. Mis à part la baisse récente de l’espérance de vie due à
l’épidémie de covid, elle devait atteindre 86 ans pour les hommes et 91,1 ans pour les
femmes d’ici 2060.
Le vieillissement de ces générations va engendrer l’entrée dans le troisième, puis
quatrième âge au cours des prochaines années d’une frange importante de la population. En
parallèle, le taux de natalité ne fait que décroitre. En conséquence, près d’un tiers des
français aura plus de 60 ans en 2030.

Un besoin de soins et donc de dépenses en hausse :


On a depuis toujours distingué deux phases successives dans le vieillissement : une
« première vieillesse » où le corps commence à s’affaiblir mais où l’on est encore en assez
bonne santé, et une « seconde vieillesse » où apparaissent réellement les dépendances.
Vers XVIIe siècle, la première se situait vers 45-50 ans, et la seconde autour de 65-70 ans.
En France, on a commencé à étudier la population par «catégories statistiques» aux
alentours de la Révolution française et l’on fixa alors l’entrée dans la vieillesse à 60 ans. Ce
chiffre correspondait alors à une réalité d’usure des corps. Cet « âge statistique » s’est
finalement imposé dans nos représentations mentales comme « l’âge officiel » auquel on
devient vieux jusqu’au point où, au cours du XXème siècle, c’est cet âge de 60 ans qui sera
désigné celui auquel il convient de prendre sa retraite.
A partir des années 60, la vision de la société change concernant les personnes
âgées. Ce sont désormais des personnes ayant un fort pouvoir d’achat mais aussi des
électeurs potentiels.
 Cette modification de la perception de la personne âgée tient notamment à la
diffusion des retraites, dont les progrès s'observent tout au long du 20ème siècle : le nombre
des retraités pensionnés qui est estimé à la fin du 19ème siècle à moins de 10 % des plus
de 65 ans, devait s'établir à 25 % en 1938 et à plus de 90 % de nos jours.
Nous avons assisté, dans la deuxième moitié du XXème siècle, au passage dans la
classe des "inactifs" de nombreuses personnes alors considérées comme inactives alors
qu'elles sont généralement en pleine forme physique.
Les personnes âgées continuent alors à se comporter sur bien des plans de la même
manière que les actifs (avec un décalage en âge qui tend à être minimisé par les individus
eux-mêmes).
Dans cette optique, se développe les idées de “bien vieillir” et de “profiter de sa
retraite”. Ce qui correspond à maintenir le plus longtemps possible le niveau d'activité de
l'âge mûr et, corrélativement, le maintien à domicile des personnes âgées

Cela implique que le nombre de personnes prises en charge en institution


n’augmente pas nécessairement dans la même proportion que la population âgée
correspondante. Aujourd’hui, les gens de 60 ans sont souvent en bonne santé et actifs
socialement. Il arrive cependant forcément un moment où le corps ralenti et où les besoins
d’assistance apparaissent.

Les projections font état d’une évolution importante du nombre de personnes âgées
dépendantes dans les prochaines décennies.
Cette perte d’autonomie est difficile à vivre physiquement, psychologiquement mais
aussi à assumer financièrement pour les personnes concernées et leurs familles.

Il existe deux manières principales de prendre en charge la dépendance : l’aide au


maintien à domicile et l’aide en établissement spécialisé. Face au vieillissement et à la
dépendance les français expriment à 90% le souhait du maintien à domicile plutôt que
l’entrée en institution.
Dans les deux cas, cela implique une prise en charge par des aidants, qu’ils soient
professionnels, ou familiaux mais aussi un financement particulier de cette prise en charge et
de la dépendance.

3 - Une hausse inexorable des dépenses à prévoir

La France mène des efforts publics en faveur des personnes âgées dépendantes de
façon non négligeable. Les dépenses publiques totales liées à la dépendance (en institution
et à domicile) se montaient à près de 24 Md euros en France (soit 1,2% du PIB) en 2010
(Fragonard, 2011), soit environ 2 300 euros par tête.
L’aide sociale à ce sujet est répartie presque à parité entre les établissements
(EPHAD principalement) et l’aide à domicile.
Or, la prise en charge de la dépendance, mais aussi des coûts connexes à (hôtellerie, soin)
un hébergement en EHPAD est couteuse. Et, pour l’heure, plus la dépendance augmente,
plus le recours à l’hébergement en institution s’avère nécessaire.
Les études montrent qu’il manquerait au moins 50.000 places en EHPAD par rapport
à la demande, bien que ce type d’hébergement soit coûteux et n’est pas accessible à tous.
Le coût moyen est de 2200€ mensuels, à mettre en perspective avec la pension de retraite
moyenne des français qui est de 1100€.
Pour faire face à cela, il existe des aides qui permettent de réduire la note mais le
reste à charge reste important pour les familles et ne fait qu’augmenter. En effet, Dans les
Ehpad, les frais de santé sont pris en charge par l’assurance maladie. Par contre, les frais
d’assistance, non couverts par la Sécurité sociale, sont à la charge des personnes âgées et
de leurs descendants, qui sont tenus à un devoir de solidarité.
Il est également à noter que les EHPAD ne sont pas uniformément réparti sur le
territoire français. Certaines régions sont très bien dotées, d’autres pas du tout.

4) Un état en manque de moyens financiers, et un poids accru sur la sphère familiale.

La France se dispute la place de 5ème puissance mondiale avec le Royaume Uni


mais la situation et plus difficile qu’il n’y parait : la France est soumise depuis plusieurs
années à un chômage de masse, une croissance faible et une dette publique qui se creuse,
ce qui n’a fait qu’empirer avec la crise du covid.
Si la croissance devrait revenir après la gestion de la pandémie, cela ne suffira pas à
empêcher des choix stratégiques dans les dépenses publiques et l’imposition des ménages.
Or, la croissance est le seul moyen de financer les dépenses de l’Etat sans augmenter
davantage les impôts.
Concernant la dette publique, elle atteint plus de 2 523 708 000 000 € et ne cesse
d’augmenter, creusée par des déficits récurrents depuis des dizaines d’années et la politique
du « quoi qu’il en coût ».

Parallèlement à cela, le chômage est autour de 10% de la population active, soit un


des taux les plus hauts d’après-guerre. Cela pèse sur les dépenses publiques en limitant les
rentrées d’argent par les cotisations et en augmentant les dépenses par les aides et
prestations sociales.

Ces différents éléments ont un impact sur la prise en charge de la dépendance. En


2030, 23,2% de la population française aura plus de 65 ans. Cela signifie qu'il y aura alors 1
personne de plus de 65 ans pour 2 personnes en âge de travailler (contre 1 personne de
plus de 65 ans pour 4 personnes en âge de travailler actuellement). Cela implique une
hausse des dépenses de santé et des pensions retraites, et par conséquence une hausse du
déficit, toutes choses égales par ailleurs. La hausse de dépenses liée au vieillissement de la
population est estimée à environ 3% du PIB à l'horizon 2050 en France

D’après une étude de la DREES en 2014, les prévisions disponibles sur l’évolution à
long terme de l’effort demandé aux financeurs de la dépendance, pour le maintien à domicile
font état d’un accroissement important de la dépense à l’horizon 2060.
Or, côté publique, la politique menée en faveur des personnes âgées dépendantes
est partagée entre l’État, la sécurité sociale et les collectivités locales, en particulier les
départements qui financent la part dépendance via l’APA. Cette même APA dont les
dépenses ne font qu’augmenter alors que les actions mises en oeuvre pour la financer ne
suffisent plus, ce qui fait peser les tensions les plus fortes sur les budgets des départements
alors que leurs recettes diminuent avec la baisse des dotations d’Etat.
Elle révèle enfin la nécessité d’un soutien plus adapté des ménages, dont la part
dans le financement de la dépendance s’accroîtra immanquablement.
Ainsi, malgré l’intervention des pouvoirs publics, l’essentiel de la solidarité exprimée
en faveur des personnes âgées dépendantes relève en grande partie de la sphère familiale.
La progression des besoins, dans un contexte où les financements publics atteignent leurs
limites, accroît la charge pesant sur les personnes âgées et leur entourage.
Aujourd’hui, malgré l’augmentation du taux d’activité professionnelle des femmes, qui
sont les principaux acteurs de cette aide, la génération des 50-65 ans (« génération pivot »)
est fortement mise à contribution par leurs parents dépendants. Il est estimé qu’en volume
horaire l’implication de la famille serait trois fois plus importante que celle des professionnels.
En France, la prise de conscience du rôle primordial des proches aidants n’est
arrivée que tardivement. L’intervention des pouvoirs publics repose sur l’idée que « la
première forme de soutien aux aidants consiste à fournir une aide professionnelle de qualité
à la hauteur des besoins de la personne aidée, et accessible à tous financièrement ».
Pourtant, pour une majorité de Français, la situation financière est tendue et presque
un actif sur deux a connu une baisse de revenu depuis 2014. Aux problèmes connus de
l’emploi, s’ajoute le fait que les familles sont de plus en plus éclatées, ce qui pèse sur les
revenus et dépenses des ménages. Il plus facile de faire face aux dépenses du quotidien
avec deux salaires qu’avec un seul. De ce fait, assumer en plus de ses propres dépenses
celles liées à ses parents est compliquée pour une majorité de français.
Concernant les personnes âgées, alors qu’elles ont connu au accroissement de leur
pouvoir d’achat inédit entre 1975 et 1990 (le taux de pauvreté de cette frange de la
population est passé de 30% à 8% durant cette période), on assiste depuis les années 2000
à une baisse régulière de leur niveau de vie. Cela est particulièrement vraie pour les
femmes, notamment les veuves.
Ce mouvement est aussi dû aux choix fiscaux des différents gouvernements qui ont
un impact direct sur le montant de la retraite des personnes âgées ; gel des revalorisations,
hausse de la CSG...

Pour aider à faire face aux dépenses de santé existe normalement l’APA qui est une
aide universelle. Seulement, son montant est plafonné à 1714 euros par mois pour une
dépendance très lourde. Et dans la majorité des cas, l’APA se situe entre 500 et 1 000
euros, fonction du revenu de la personne aidée. Une aide pour les aidants a bien été mises
en place a été mise en place en 2020 ; l’AJPA (allocation journalière de proche aidant) mais
son montant est dérisoire ; 500€ par an maximum.

5) Les français souhaitent de plus en plus vieillir chez eux


L’Etat, depuis le rapport Laroque, encourage fortement le maintien à domicile des
personnes âgées, pour leur bien être mais aussi pour des questions financières. Cela lui
revient moins cher qu’une place en EHPAD.
Cela s’accompagne également d’une volonté des personnes âgées de pouvoir vieillir
chez elles plutôt qu’en institution. Les personnes âgées préfèrent rester chez elle pour
protéger leur qualité de vie (horaires, environnement), pour limiter leur perte d’autonomie et
pour maintenir plus facilement leurs liens sociaux et familiaux. Mais pour permettre cela,
l’entourage familial et professionnel est prépondérant.

6) Il est donc important de soutenir les aidants familiaux et professionnels


Comme nous l’avons vu, la part des personnes âgées dépendantes ne vas faire
qu’augmenter au cours des prochaines années. Cela va engendrer un coût financier
important pour la société, mais aussi nécessité une importante main d’œuvre pour permettre
une priseen charge de qualité des ainées.
La prise en charge à domicile ou en institution ne doivent pas être opposées mais
vues comme complémentaire, la première seconde prenant souvent la suite de la première.
Il apparait donc important de soutenir les aidants dans les deux possibilités de prises
en charges, qu’ils soient professionnels, en institutions ou à domicile, ou familiaux.
La société a besoin des aidants familiaux, qui sont entre 8 et 11 millions ; ils permettent de
maintenir la personne âgée dans son cadre de vie et son entourage plus long, de respecter
son choix de vie et donc de « bien vieillir ». C’est aussi et alors un coût moindre pour la
société. Mais cela ne doit pas se faire au dépend de l’aidant qui y laisse un niveau de vie en
subissant une baisse de salaire et une augmentation de ses charges mais aussi parfois sa
santé. Nombreux sont les aidants qui ne survivent pas aux ainés qu’ils aident. Ainsi,
l’association France Alzheimer a montré que le temps passé par un aidant familial peut être
évalué à six heures et demie par jour, toute la semaine. De même, il est estimé que même
avec un aidant “bénévole”, il reste une charge mensuelle de l’ordre de 500 à 550 euros pour
la famille.

Il faut aussi soutenir les aidants professionnels qui sont un maillon indispensable de
la prise en charge des personnes âgées et dont le recours va s’avéré de plus en plus
important. Soutenir les aidants professionnels, donc des personnes qui ont fait le choix de
cette activité, et d’être réénuméré pour l’exercer, permettrait de faire rebasculer une partie de
la charge pesant sur les aidants familiaux sur eux. D’autant plus, qu’il y aura de moins en
moins d’aidants familiaux dans les prochaines années du fait de la courbe démographique.
Les aidants d’aujourd’hui sont les personnes âgées de demain, mais avec moins d’enfants
pour prendre le relais. Et avec un niveau des retraités qui est également amené à baisser.
Mais pour cela il faut des moyens, humains et financiers. Il faut pouvoir augmenter
les effectifs pour que l’augmentation des besoins ne deviennent pas une charge trop lourde
pour ce corps professionnel, créant alors une fuite des vocations qui seraient néfaste à la
prise en charge des personnes âgées. Il faut également revoir à la hausse le volet financier
afin qu’ils aient les moyens d’exercer dignement leur travail et de s’équiper en matériel de
soutien qui rendent les taches moins pénibles et plus efficients (appareils connectés,
exosquelettes…). Cela sera bien sur en premier lieux bénéfique pour ces salariés, mais
aussi pour la société en limitant les arrêts maladie ou les démissions et donc en assurant
une continuité et une qualité de service optimales.

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