Vous êtes sur la page 1sur 6

Le premier homme

Une comparaison entre 'le premier homme' et Meursault

Introduction

Le dernier roman de Camus, « Le Premier Homme », est une autobiographie inachevée. Il a été
publiée en 1995, 35 ans après la mort de Camus. Dans ce roman, il devient clair ce que Camus veut
dire par le phénomène 'premier homme'. Dans cette dissertation, je me propose d'analyser dans quel
degré Meursault, le personnage principal du roman «l'Étranger », est un 'premier homme'. Puis, on
va regarder le rôle de plusieurs éléments dans les deux romans, comme l'histoire d'un individu, le
rôle de l'absurde et de la religion. Finalement, on compare les caractéristiques d'un 'premier homme'
et de Meursault pour répondre à la question principale.

Le roman: Le premier homme


Camus était en train d'écrire « Le premier homme », quand il trouvait la mort dans un accident de
voiture. Le manuscrit a été retrouvé dans sa sacoche, le 4 janvier 1960. Le texte était inachevé et
n'était publié qu'en 1994. Il comprend deux parties. La première partie raconte l'enfance d'un petit
garçon, Jacques Cormery. Néanmoins, il devient clair que c'est en même temps aussi l'enfance de
Camus, car la description contient beaucoup d'éléments autobiographiques. Jacques est né en
Algérie en 1913 dans une famille française sans argent. Son père meurt pendant la première guerre
mondiale, comme c'était le cas chez Camus. Le protagoniste grandit entre sa mère et sa grand-mère,
deux femmes illettrées. En outre, Jacques a un oncle, Étienne, qui est complètement sourd et
partiellement muet, et un frère, Henri, qui ne joue pas un grand rôle dans le roman. Il se souvient les
années de bonheur de son enfance, comme jouer des jeux et aller à la plage avec ses amis. Sa grand-
mère était sévère et avait pris le rôle d'une mère disciplinaire. Jacques est très intelligent, ce qui est
exceptionnel dans sa famille. Il passe un examen pour aller au lycée et il essaie de devenir amis
avec ses camarades de classe qui viennent tous d'un milieu plus favorisé. Jacques devient un
adolescent sensitif, qui observe les gens et les lieux autour de lui et le rapport entre les Arabes et les
Européens.
La deuxième partie commence en 1954, Jacques est un adulte. Le père de Jacques mourait
avant que Jacques avait un ans. Il visite la tombe de son père à Saint Brieuc et est frappé par le fait
que son père n'avait que 29 ans, alors qu'il a 40 ans maintenant. De plus, il se rend compte qu'il ne
sait presque rien de celui qui l'a engendré. Sa famille n'en a jamais parlé. Il choisit alors de chercher
des données, il est à la recherche de son père.
Jacques décide d'aller visiter le quartier dans lequel il a grandi. Il y a beaucoup de souvenirs
et de flash-backs qui reviennent. Le protagoniste se souvient aussi le mauvais temps de son enfance,
par exemple pendant la guerre, quand il entendait tomber les bombes. Cependant, il n'y a personne à
Solférino (le village dans lequel il est né) qui se rappelle de sa famille et de son père. À la fin du
roman, Jacques est devenu un adulte chaleureux. Il sort de la pauvreté et obtient du succès en
France. Il se rend compte que tous les événements de sa vie, surtout le fait qu'il n'a jamais connu
son père, ont fait qu'il est devenu l'homme qu'il est maintenant. Jacques est le premier homme.

Le roman : L'étranger
L'étranger est un roman que Camus a publié en 1942. Il raconte l'histoire de Meursault, un homme
qui vit en Alger. Au début de l'histoire, Meursault va à l'enterrement de sa mère. Toutefois, il ne
semble pas du tout être en deuil. Après l'enterrement, Meursault décide d'aller nager et il rencontre
Marie. Ils vont au cinéma et passent la nuit ensemble. Le lendemain, Raymond Sintès, son voisin
avec qui il a peu de contact, lui demande d'écrire une lettre concernent la dispute entre lui et sa
maîtresse arabe. La lettre est pour le frère de celle-ci. Cette lettre fait que Meursault se trouve mêlé
à la querelle entre Raymond, sa maîtresse arabe et son frère. Un dimanche, Meursault et Raymond
visitent la plage et rencontrent un groupe d'arabes dont le frère est le chef. Raymond et le frère
finissent par se frapper. Meursault ne participe pas mais il prend le revolver de Raymond pour
prévenir des accidents. Après ce combat, quand tout semble appartenir au passé, Meursault fait tout
seul et sans but un promenade sur la plage. Tout d'un coup, il voit un arabe qui tient un couteau, qui
s'est posé tranquillement à côté d'un rocher. Le couteau met des reflets de soleil dans les yeux de
Meursault. Sa main, avec laquelle il tient le revolver de Raymond, se crispe et accidentellement il
tire un coup de fusil. L'arabe tombe raide mort. Puis, Meursault tire encore quatre fois sur le corps.
Dans la deuxième partie, Meursault est en prison. Son avocat jeune ne comprend rien de son
explication peu conventionnelle pourquoi il a commet le crime. Au tribunal, Meursault est plutôt
jugé comme un fils dénaturé de sa mère, car son attitude à l'enterrement était particulier, que comme
meurtrier. Meursault est condamné à la peine capitale. Quand l'aumônier le visite pour qu'il puisse
s'excuser et demander pardon, Meursault réclame qu'il n'a pas de temps pour Dieu. À la fin,
Meursault meurt à cause de la chaise électrique.

Le Premier Homme

Le premier homme et ses racines


« Le premier homme » est un roman du retour, de retour au monde de l'enfance et de la jeunesse
algérienne, de retour à la mère, de la recherche du père, des origines et de l'histoire coloniale. La
situations des enfants des immigrants européennes en Algérie, qui vivent sans connaître leurs
racines, joue un rôle primordial dans le roman. 1 Jacques Cormery, le personnage principal du
roman, n'a pas vraiment connu son père, qui mourait dans une bataille pendant la première guerre
mondiale. « Personne ne l'avait connu (son père) que sa mère qui l'avait oublié. Il en était sûr. Et il
était mort inconnu sur cette terre où il était passé fugitivement, comme un inconnu. »(p.36). Pendant
toute la vie de Jacques, son père est alors resté un étranger. Il connaît le reste de sa famille, mais il a
comme même besoin de savoir plus de son père. Il y a un « vide affreux » dans son corps qui est
causé par l'absence de son père. Sa mère ne peut pas vraiment l'aider. Elle n'a jamais appris à lire et
à écrire, ce qui fait qu'elle ne peut pas relire les données importantes sur le père. «  Une famille où
l'on parlait peu, où on ne lisait ni n'écrivait, une mère malheureuse et distraite, qui l'aurait renseigné
sur ce jeune et pitoyable père? »(p.36). Quand Jacques la questionne sur son père, elle devient
émotionnelle et elle dit qu'elle ne se souvient plus guère, que tout ça est si loin. Ceci est causé par
l'indigence de ses souvenirs et la simplicité de sa conception du monde. « Le reste, il fallait
l'imaginer. Non pas à travers ce qui pouvait lui dire sa mère, qui ne pouvait même pas avoir l'idée de
l'histoire ni de la géographie, qui savait seulement qu'elle vivait sur la terre près de la mer
[...] »(p.79-80).
Le rapport entre Jacques et sa famille est relativement complexe. Il aime sa mère,
mais il ne peut pas prononcer ceci, il y a une sorte de barrière entre eux. « Il allait dire « Tu es très
belle » et s'arrêta. Il avait toujours pensé cela de sa mère et n'avait jamais osé le lui dire. […] C'eût
été franchir la barrière invisible derrière laquelle toute sa vie il l'avait vue retranchée […] »(p.71).
Cette barrière est causée par le fait que Jacques est une personne à part dans sa famille. Quand il
passe l'examen pour aller au lycée, il y a une coupure d'une certaine façon avec sa famille. Il peut
lire et écrire, et il a du contact avec les jeunes de familles bourgeoises. Jacques découvre cet univers
extérieur de la maison. Pourtant, dans le monde extérieur il reste un homme isolé. Il ne parle pas
l'arabe et il y a une absence de contacts et des échanges avec les Arabes.

Le premier homme et Adam

L'enfance est un élément essentiel de « Le Premier Homme ». C'est un paradis perdu qu'il faut
1 Gadourek, C. “Albert Camus, uitleg en aantekeningen bij zijn werken” Assen: Van Gorcum & Comp. (2000) p.137
reconquérir par l'art. L'enfance est la source de l'art et l'art est la voie pour y retourner. 2 Le geste de
retour se représente par le fait que Camus essaye de récrire son enfance. « En somme, je vais parler
de ceux que j'aimais. Et de cela seulement. »(p.312). Dans la préface il devient clair qu'il veut
laisser revivre les anciens mythes. Le mythe, qui est au centre de « Le premier homme » est le
mythe d'Adam. Camus avait d'abord envisagé d'appeler son roman Adam. Dans un entretien avec un
journaliste italien il dit : « En réalité chacun de nous, y compris moi, est d'une certaine façon le
premier homme, l'Adam de sa propre histoire. »3 En outre, le terme 'le premier homme' fait en effet
immédiatement penser à Adam. « Il est le premier encore en ce sens qu'il est responsable de toute la
lignée qui descend de lui. Sa primauté est d'ordre moral, naturel et ontologique : Adam est le plus
homme des hommes. »4 Selon Camus, on peut alors comparer Jacques et Adam parce que Jacques
ne sait pas sa propre histoire et ses racines, comme Adam.

Le premier homme et l'absurde


L'absurdité de la vie est un thème important dans l'oeuvre de Camus. Il explique cette notion
explicitement dans son essai « le mythe de Sisyphe »(1942). Sisyphe est un héros de la mythologie
grecque qui était puni par Zeus. parce qu'il l'avait défi. Il devait rouler éternellement un énorme
rocher en remontant une pente ; dès que le rocher était parvenu au sommet, il retombait, et le travail
était à recommencer. Le temps que Sisyphe retourne, c'est le temps de la conscience, de l'absurde,
du savoir. Sisyphe se rend compte que la vie n'a pas de sens, qu'elle est absurde. C'est la raison
pourquoi il accomplit résolument son châtiment. Pour Camus, la lutte de Sisyphe suffit à remplir un
cœur d'homme. « Il faut imaginer Sisyphe heureux, parce qu'il n'y a pas d'amour de vivre sans
désespoir de vivre ». (Noces, 1938) Sisyphe est l'exemple d'un héros absurde.
Quand Jacques retrouve la tombe de son père à Saint-Brieuc, il est choqué : « L'homme
enterré sous cette dalle et qui avait été son père, était plus jeune que lui. »(p.34). « Le flot de
tendresse et de pitié » qui remplit son cœur est le sentiment d'une injustice profonde ressenti
« devant l'enfant injustement assassiné »(p.34). Cette mort détruit un équilibre naturel, car le fils est
plus âgé que le père. Cette scène est une scène clé, car elle montre l'absurdité de l'histoire. Il se rend
compte qu'il ne peut pas découvrir son propre identité en cherchant des traces de son père :
« Tournant le dos à la tombe, Jacques Cormery abandonna son père. »(p.37). En abandonnant son
père, il trahit d'une certaine façon le monde dont il est issu. Il a essayé d'échapper à « l'anonymat, à
la vie pauvre, ignorante obstiné, il n'avait pu vivre au niveau de cette patience aveugle, sans
phrases, sans autre projets que l'immédiat »(p.181-182). Cette tendance se voit déjà quand Jacques
passe l'examen pour aller au lycée, il se trouve dans un autre monde que sa famille. Cette 'trahison'
de Jacques le rend étranger comme un nouvel Adam chassé du Paradis terrestre.5
Jacques est alors lui-même le Premier Homme, il doit tracer son propre chemin. Malgré que
la recherche du père est un échec, Jacques retrouve tout de même sa propre enfance. Le retour de
l'adulte en Algérie est en même temps que le retour dans le monde de l'enfance : « Il pouvait enfin
dormir et revenir à l'enfance dont il n'avait jamais guéri, à ce secret de lumière, de pauvreté
chaleureuse qui l'avait aidé à vivre et à tout vaincre. »(p.201). La théorie de Nietzsche6 sur l'enfance
est applicable sur cette constatation. Cette théorie, qui explique ce que c'est la vie, est basée sur trois
métaphores : « Je vais vous énoncer trois métamorphoses de l'esprit : comment l'esprit devient
chameau, comment le chameau devient lion, et comment enfin le lion devient enfant. »7 Le
chameau représente la première phase de la vie dans laquelle l'individu porte des charges. En même
temps, le chameau développe ses forces, ce qui fait qu'il veut porter plus et plus de charges. Le
seconde stade dans la vie est représenté par le lion. Quand le chameau s'est rendu compte de sa
propre motivation, il entre le désert et se transforme en un lion. Celui est l'esprit de la négation de la
réalité. Il apprend de dire non contre les charges que portait le chameau. De plus, le lion s'est
2 Sarocchi, J. “Le dernier Camus ou le Premier Homme” Paris: Libraire A.-G. Nizet. (1995) p.114
3 Cité par Antoine de Gaudemart, Libération, 14 avril 1994
4 Chevalier, J. & Gheerbrant, A. “Dictionnaire des Symboles” Paris: Robert Laffont. (1982) p. 7.
5 Sarocchi, J. “Le dernier Camus ou le Premier Homme” Paris: Libraire A.-G. Nizet. (1995) p.193-194.
6 Sapin, J.C. “La tête de l'homme de Mencius” Éditions Qi Gong. (2012) p.114
7 Zarathoustra, Nietzsche. (1883)
conscient de l'absurdité de la vie, c'est-à-dire, que la vie n'a pas de sens. Tous les valeurs
européennes fondamentales, comme la charité, la pitié, la justice et la vérité, perdent alors leur sens.
Quand le lion se rend compte que l'on ne peut pas seulement dire non sans avoir une alternative, il
se transforme d'un enfant jouant. Cet enfant a la puissance de donner du sens à l'absurdité de la vie.
Il est spontané, créatif et totalement innocent. Il n'a pas des charges morales et il est complètement
libre.
On retrouve les trois stades de la vie chez Jacques.Son enfance en Algérie est dur, sa famille
est différente que lui et à cause de ceci il souffre. Du reste, il ne connaît pas son père. Quand il
découvre le monde extérieur, il apprend de dire non aux valeurs qu'il a appris quand il était petit. Il
découvre son propre chemin et il se réalise, à la tombe de son père, que même sans savoir ses
racines, il connaît son propre identité. À la tombe, il se transforme à l'enfant jouant. Il est libre car il
est responsable de ses propres actes, il est complètement innocent.

L'Étranger

Meursault et ses racines


Au début du roman, Meursault apprend que sa mère est morte. Son comportement est troublant, car
il ne montre aucune réaction de son état d'esprit. Le décès ne change rien pour lui, c'est une chose
abstraite. « Pour le moment, c'est un peu comme si maman n'était pas morte. Après l'enterrement, au
contraire, ce sera une affaire classée et tout aura revêtu une allure plus officielle. »(p.10). Par
Meursault, Camus dénonce l'absurdité de la vie. Chaque être sur terre est destiné, un jour ou l'autre,
à mourir. C'est pour cette raison que Meursault n'est pas triste à l'enterrement de sa mère. Il ne fait
pas semblant de pleurer, il est honnête et ne cache pas son absence des sentiments. Néanmoins, ceci
n'est pas accepté par la société. Meursault est vu comme une personne à part par la société, car il
n'est pas plongé dans le deuil. Au tribunal, dans la seconde partie du roman, le fait qu'il ne réagissait
correctement à la mort de sa mère égratigne son image plus que le fait qu'il a tué une personne.
Il semble que la mère de Meursault était encore le seul parent que lui reste. Meursault est
représenté comme un individu avec peu de contacts. Il est étrange au monde autour de lui. On sait
qu'il est un pied-noir, comme beaucoup de personnages de Camus, mais ses racines et son histoire
restent inexplorés.

Meursault et l'absurde
Meursault éprouve le sentiment de l'absurde au quotidien. Sa vie quotidienne est baigné de codes.
Les lois et normes sociales entravent sa liberté. On peut dire qu'il est comme le chameau de
Nietzsche, il porte les charges de la société. Le juge d'instruction exige de Meursault une
acceptation de la valeur de ces codes : « Voulez-vous que ma vie n'ait pas de sens ? »(p.106).En
général, les lois doivent aider les gens à surmonter l'angoisse de l'existence, donner un sens à la vie,
mais pour Meursault, ces valeurs ne lui sont rien. Meursault est écrasé par leur poids sans qu'il ne
comprenne réellement d'où vient ce sentiment. Cette sensation est matérialisée par une sensibilité
pour la lumière. La lumière, qui symbolise le monde social, prive Meursault d'une vie personnelle et
intime. Il compare la douceur du soir à l'éclairage du jour. « Le soir, dans ce pays, devait être
comme une trêve mélancolique. Aujourd'hui, le soleil débordant qui faisait tressaillir le paysage le
rendait inhumain et déprimant. »(p.85). Meursault ne comprend pas encore ses sentiments, mais il
tente inconsciemment d'y échapper. Le moment du meurtre est le moment au lequel il échappe à la
lumière et le monde systématique autour de lui. « J'ai secoué la sueur et le soleil. J'ai compris que
j'avais détruit l'équilibre du jour, le silence exceptionnel d'une plage où j'avais été heureux. »(p.93).
Il insupporte le monde lumineux et systématique, ce qui fait qu'il est écrasé par son absurdité. 8
Pourtant, Meursault n'est pas encore capable de se laisser aller au sentiment de l'absurde. Même
dans la seconde partie du roman, il n'accepte pas encore totalement l'absurdité de la vie : « Quand je
suis entré, le bruit des voix qui rebondissaient contre les grands murs nus de la salle, la lumière crue

8 Hafner-Meister, U. “Une étude sur l'Étranger chez Saint-John Perse et chez Camus” Benziger Graphischer Betrieb
Einsiedeln. (1974). p.71-72
qui coulait du ciel sur les vitres et rejaillissait dans la salle, me causèrent une sorte
d'étourdissement. »(p. 159).
On peut dire qu'au début du roman, Meursault est à la fin du stade de la vie que Nietzsche
appelle 'le chameau'. Par le meurtre et par son indifférence, il commence à déchirer les normes et les
lois de la société. Quand il est questionné par le juge d'instruction, il devient clair qu'il a choisi son
propre chemin, il est devenu un lion. Il ne se soucie pas du tout aux lois et morales sociales. Pendant
la visite de l'aumônier il devient encore plus clair que Meursault s'est vraiment rendu compte de
l'absurdité de la vie. «Il (l'aumônier) n'était même pas sûr d'être en vie puisqu'il vivait comme un
mort. Moi, j'avais l'air d'avoir les mains vides. Mais j'étais sûr de moi, […] sûr de ma vie et de cette
mort qui allait venir. »(p.180-181). Cette citation explique en même temps l' air indifférent de
Meursault. Finalement, tout le monde est condamné à la mort. « Tout le monde était priviligié ». Il
faut alors donner du sens à la vie sans avoir des regrets et sans envisager l'avenir.

Meursault et le Christ
Camus a dit de Meursault : « Meursault est le seul Christ que nous méritions. » Il y a plusieurs
caractéristiques de Christ et de Meursault que l'on reconnaît dans le roman. Une citation importante
d'Évangile est « Ne jugez pas afin de ne pas être jugés ». Meursault sait que les autres voisins
n'aiment pas Raymond, néanmoins il se laisse guider par ce que Raymond lui raconte. Un soir, ils
mangent ensemble du boudin et ils boivent du vin rouge. En utilisant un peu d'imagination, on peut
voir la Cène dans cette scène. Raymond est la figure satanique qui séduit Meursault de dîner et
finalement d'écrire la lettre pour lui. Meursault s'attache de Raymond par la lettre, qui influencera
drastiquement sa vie.
Une autre scène qui donne des correspondances entre Christ et Meursault est quand
Meursault est au tribunal. Le juge d'instruction lui montre un crucifix d'argent, Meursault ne semble
pas touché par ce crucifix. Le juge lui dit : « Je n'ai jamais vu d'âme aussi endurcie que la vôtre. Les
criminels qui sont venus devant moi ont toujours pleuré devant cette image de la douleur. » (p.107).
C'est un truc psychologique pour laisser briser Meursault, et de lui laisser parler. Néanmoins,
Meursault se tait. Il ne répond pas aux questions importantes dans le cadre de la recherche, il se tait
tout le temps. Christ, qui était questionné par Pilate, a fait exactement la même chose, il se taisait.9

La comparaison
'Le premier homme' a selon Camus, comme on a vu dans l'analyse, plusieurs caractéristiques. Il est
important que le premier homme est un individu indépendant, il se développe lui-même sans être
influencé par ses racines. Jacques veut découvrir son identité en cherchant des traces de son père,
mais quand il visite sa tombe et se rend compte que son père était plus jeune que lui quand il
mourait, il se réalise qu'il doit suivre son propre chemin. L'attitude indifférente de Meursault à
l'enterrement de sa mère et pendant l'interrogation au tribunal n'est pas accepté par la société,
toutefois, elle montre que Meursault aussi est un individu indépendant qui cherche sa propre voie.
On peut alors dire que Meursault répond à cette caractéristique.
En outre, le premier homme est dans la dernière phase qu'un individu peut atteindre, que
Nietzsche appelle, l'enfant jouant. Il s'est rendu compte de l'absurdité de la vie et est libre, innocent,
il a donné du sens à sa vie. À la fin du livre, Meursault déclare qu'il a été heureux et qu'il est
conscient de l'absurdité de la vie. Néanmoins, il n'est pas totalement innocent. Il a eu un moment
d'inconscience et à ce moment, il a tué un homme. Quand il meurt, Meursault se trouve alors à la fin
de la phase de lion, car il n'a pas l'innocence de l'enfant et il n'est pas libre comme l'enfant, car il se
trouve en prison et il est puni par la société.
Selon Camus, Meursault est le seul Christ que nous méritions. Il a une fonction
d'exemple comme héros absurde. Dans 'Le premier homme' le mythe d'Adam joue un grand rôle. Le
Christ a un rôle exemplaire pour ses descendants. Adam n'a pas de racines, comme Jacques, et est

9 Sarocchi, J. “Le dernier Camus ou le Premier Homme” Paris: Librairie A.-G. Nizet. (1995) p.306-307
alors l'ultime premier homme. On peut dire qu'il sert aussi d'une sorte d'exemple pour ses
descendants. Dans ce cas, Meursault répond alors aussi à cet élément essentiel d'un premier homme.
Enfin, quand on regarde les éléments de l'histoire et des racines d'un individu, de
l'exemplarité et de la conscience de l'absurdité de la vie on peut dire que Meursault est pour la plus
grande partie un premier homme. Son seul défaut est qu'il n'est pas totalement innocent et libre, car
il est puni par la société et il a eu un moment d'inconscience.

Vous aimerez peut-être aussi