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net/publication/282866832
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3 authors:
Marc Filser
University of Burgundy
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Developping two scales: sensitivity of children to responsaible actions and educational mission of sports trainers. View project
All content following this page was uploaded by Joël Brée on 16 October 2015.
Olivier BADOT
Professeur ESCP Europe et Université de Caen Basse-Normandie, IAE, NIMEC (EA 969)
Joël BRÉE
Professeur Université de Caen Basse-Normandie, IAE, NIMEC (EA 969) & Ecole de
Management de Normandie
Marc FILSER
Professeur Université de Bourgogne, IAE Dijon, CREGO (EA7317)
2 Boulevard Gabriel
BP 26611
21066 Dijon Cedex
Marc.Filser@u-bourgogne.fr
Résumé
Les premiers écrits proposant une formalisation de la mission du marketing laissent deviner
un conflit entre les différents objectifs qui sont assignés à cette fonction de l'entreprise. Si le
premier d’entre eux reste bien sûr la réponse aux attentes des consommateurs, celui-ci est
indissociable d’une réserve logique, à savoir que l'entreprise doit également trouver son
compte dans cette relation marchande ; elle doit en effet faire en sorte que les moyens engagés
soient proportionnés aux bénéfices qu'elle peut escompter. On perçoit ainsi les fondements
d'une dialectique qui sous-tend les phases de développement de la fonction marketing dans les
organisations : il faut répondre de manière de plus en plus fine aux attentes des acheteurs
potentiels tout en optimisant les supports de cette réponse pour que la rentabilité de
l'organisation ne soit pas mise en péril. Sans compter que, dans un environnement
économique où la finance de marché est en train d’imposer des exigences de rentabilité de
plus en plus sévère, la fonction marketing doit, elle-aussi, se plier à ces contraintes ; la
recherche d'efficacité ne suffit plus, c’est pourquoi il faut également améliorer l'efficience des
ressources et la rentabilité des capitaux investis. Il est donc possible de proposer une lecture
de l'évolution de la fonction marketing à travers cet affrontement dialectique entre la création
de valeur pour le consommateur et la création de valeur pour les apporteurs de capitaux.
De fait, en matière de consommation, un des éléments les plus marquants qui a coïncidé avec
le changement de millénaire réside sans doute dans un élargissement des compétences des
consommateurs au-delà des trois missions traditionnelles qui leur étaient dévolues : acquérir
un bien (ou service), faire usage d’un bien et se détacher d’un bien. Dans les décennies
écoulées déjà, certains écrits – tels l’ouvrage séminal Vers une société des consommateurs :
du marketing au consumérisme (Wickham, 1976), des textes inspirés par le courant
postmoderne (Badot et Cova, 1992), par des prospectivistes comme Drucker (1989) et Toffler
(1990), et même par le courant post-marxiste animé par des auteurs comme Latouche,
Agamben ou autre Debord – avaient osé une hypothèse générique concernant la société de
consommation à venir : le marché deviendra une lutte de moins en moins larvée entre des
consommateurs défiants et des opérateurs du marché en cherchant, par des subterfuges de plus
en plus subtils, à procurer une fausse conscience de liberté.
Cette tension entre une vraie liberté et une liberté organisée et suscitée de façon quasi-
subliminale (du moins au sens de Packard, 1957) s’illustre assez bien dans la notion
d’« expérience » ; tant en lieu physique, interprétable sur un continuum allant de l’expérience
produite par la marque ou l’enseigne (souvent inefficiente) à celle réappropriée et reconstruite
par les consommateurs (à efficiente croissante) (Anteblian, Filser et Roederer, 2013), que sur
Internet où se dialectise un sentiment de prise de pouvoir par des Internautes – qui restent
néanmoins conscients des rentes informationnelles et économiques que construisent les
opérateurs qui leur facilitent le « powershift » (Google, par ex.). En facilitant et en
démultipliant les interactions entre les consommateurs, Internet a fait exploser le schéma de
communication traditionnel où l’entreprise responsable de la marque était seule à raconter à la
cible une histoire autour de celle-ci ; aujourd’hui, la prolifération des forums et des
communautés de marque permet aux consommateurs de concevoir leurs propres fables et de
s’approprier celle-ci. On parle ainsi de Consumer Empowerment car les clients deviennent
aussi, de fait, les contributeurs d’une offre qui échappe en partie à la source dont elle émane.
La première réponse des entreprises a été la création d’un nouveau métier, celui de
Community Manager, destiné à réguler les échanges entre internautes et à éviter d’éventuelles
dérives préjudiciables à la marque. Mais, selon McCracken (2009), cette tendance devrait
encore s’accentuer dans les années à venir et la fonction de chef de marque devrait elle-même
évoluer vers ce qu’il a appelé le C.C.O. ou Chief Culture Officer.
Ces contradictions sont visibles sur le terrain des opérations, comme en témoignent les
données et analyses de l’Obsoco qui étudie les modes de consommations émergents et qui
signale dans son rapport de 2012, que si 30% des Français souhaitent consommer « moins et
mieux » ou « autant mais mieux » (22%), 26% « aiment la manière dont ils consomment » et
22% souhaitent même pouvoir « consommer plus ». Ce même rapport montre que cette
segmentation des attitudes n’est d’ailleurs pas si statique et tend à se complexifier en fonction
des situations.
Autour de cette trame générale, nous analyserons dans un premier temps la dialectique
macdonaldisation – réenchantement qui a sans doute été la première manifestation visible de
cette prise de pouvoir expérientielle qui gouverne aujourd’hui le champ du marketing mais
qui fait également l’objet de nombreux questionnements quant à sa pérennité. Nous nous
intéresserons ensuite à une nouvelle logique d’échange basée sur la logique « consumer-to-
consumer » que l’on qualifie, dans une globalisation peut-être hâtive, de consommation
collaborative, et qui permet aux consommateurs de vivre une expérience réenchantée marquée
par un réel pouvoir, dans la mesure où les entreprises n’ont pas encore trouvé le moyen d’y
reconquérir une place centrale. Pour terminer, nous nous projetterons dans l’avenir en
montrant d’une part que cette première prise de pouvoir des consommateurs sur les opérateurs
traditionnels du marché n’est sans doute qu’une première étape et d’autre part, qu’en créant
des sources de « micro-réenchantement », la consommation peut être une des réponses pour
parvenir à supporter et à compenser un monde profondément anxiogène.
Dans sa virulente critique de la place prise par le marketing en général et les marques en
particulier dans l'environnement social, Naomi Klein (2002) souligne un paradoxe de l'offre
marchande. Alors que la communication émanant des marques n'a jamais été aussi
omniprésente, occupant tous les espaces disponibles autour de l'individu (le "zéro espace"),
l'offre proposée à ce consommateur n'a paradoxalement jamais été aussi restreinte, tant les
entreprises s'efforcent de rationaliser leur processus de fabrication et de commercialisation,
conduisant à ce que Klein résume sous le terme de "zéro choix".
L’axe qui constitue sans doute le bouleversement plus notable dans l’univers de la
consommation reste la montée en puissance d’un nouveau modèle économique que l’on a
qualifié de consommation collaborative. En effet, à côté des formes de transactions classiques
entre organisations (que l’on connaît sous le terme de Business-to Business) ou entre une
organisation et des particuliers (Business-to-Consumer), on voit se développer de plus en plus
les logiques d’échange entre consommateurs, alors que ceux-ci étaient encore marginaux il y
a seulement dix ou quinze ans. Derrière toutes ces formes de consommation, qui donnent la
primauté à l’usage sur la propriété par le biais du partage, de l’échange, du troc, de la vente ou
de la location, on trouve une disparition des cloisonnements entre le rôle de l’offreur et celui
du demandeur : chacun peut alternativement devenir l’un ou l’autre selon les circonstances
voire même parfois, les deux simultanément ; sans compter qu’elles abaissent les coûts de
transaction liés à la coordination des activités économiques. De ce fait, n’étant plus co-
contractant, l’organisation se retrouve exclue du jeu si ce n’est en tant que facilitatrice de la
mise en relation entre les particuliers. Après avoir cerné ce qui se cache derrière cette
locution, nous en discuterons les fondements sociaux, nous ferons un focus sur la notion de
partage avec laquelle il y a souvent confusion et nous conclurons par la nécessité de clarifier
un concept « fourre-tout » qui regroupe in fine des logiques très diverses.
· La transformation des produits en service (on paye pour avoir le droit d’utiliser le
produit de quelqu’un d’autre pendant un temps donné dans un contexte donné) ;
· La création des marchés de redistribution (on réorganise la redistribution des produits
utilisés ou achetés quand ils ne sont plus utilisés) ;
· Les styles de vie collaboratifs (des gens avec des intérêts similaires s’assemblent pour
partager biens, temps, espace, compétence, monnaie…) ;
Il n’y a pas, derrière ces trois manifestations un bouleversement de ce qui est consommé par
les individus, mais plutôt un changement radical de la manière dont s’opère l’échange. En
effet, au travers de la création de lien qui s’établit entre les deux acteurs, on transforme
l’acquisition en expérience, donc en ré-enchantement tel que Filser (2002) avait pu l’évoquer.
La consommation collaborative repose d’abord et avant tout sur des individus qui ont le désir
de coopérer directement, en privilégiant l’autonomie et une forme de responsabilisation. Et,
alors que les formes plus traditionnelles de l’économie semblent marquer le pas et affronter
des crises mondiales (financières, énergétiques…) de plus en plus fréquentes et profondes,
l’économie collaborative paraît, quant à elle, bénéficier d’une croissance accélérée.
C’est une forme d’échange qui intègre aujourd’hui aussi bien des marchés mondiaux (eBay,
Craigslists…) que des niches de marché qui peuvent appartenir ou pas au secteur marchand :
prêt entre particuliers (Zopa), partage de voitures (Zipcar), covoiturage (Covoiturage),
produits de puériculture (Squaredespetits), accueil d’inconnus (Couchsurfing), échange de
maison (HomeExchange), partage de compétences (Brooklyn Skills), don d’objets usagés
(Freecycle), Investissement (My Major Company), achats groupés (Groupon), découverte de
métiers (Jobsenboite)…
Ce n’est donc en aucun cas la crise financière de 2008 qui a amené les consommateurs à se
tourner de plus en plus nombreux vers la consommation collaborative ; même si la volonté de
pouvoir préserver son pouvoir d’achat a certainement contribué à en accélérer le
développement. Si cela avait été le cas, cela voudrait dire que les individus se livrent à ce type
de pratiques essentiellement contraints et forcés par des motifs économiques et donc qu’ils les
abandonneront dès lors que la situation se sera améliorée (Schulist, 2012).
Mais pour que cette consommation collaborative puisse véritablement s’épanouir, il était
important que s’instaure une réelle confiance entre des contractants qui, pour la majorité
d’entre eux, ne pourront jamais se rencontrer. Auparavant celle-ci s’établissait entre des
1
L’utilisateur moyen utilise sa perceuse entre six et treize minutes dans sa vie. Cela justifie-t-il d’être
propriétaire ?
2
D’ailleurs en 2011, les magasins de détail de biens d’occasion ont été la forme de commerce qui a connu la
plus forte progression de son chiffre d’affaires : + 3 % (source : Commission des Comptes Commerciaux de la
Nation).
individus qui vivaient à proximité les uns des autres et pouvaient, dès lors, apprendre à se
connaître. Avec les échanges en ligne, elle repose sur des systèmes de réputation où chacun
des partenaires va évaluer la qualité de la relation qu’il a pu avoir avec l’autre.
Certes, des événements tels que l’épuisement des énergies fossiles, le réchauffement
climatique ou encore une financiarisation accrue de l’économie ont favorisé des aspirations
écologiques et citoyennes (Van de Walle et al., 2012) et par là-même valorisé l’appropriation
du développement durable et de la consommation responsable. Celle-ci trouvera à s’exprimer
par des produits liés à la satisfaction personnelle plutôt qu’au prestige, des produits durables
plutôt que jetables ou des produits mutualisés plutôt que des produits possédés. Quant aux
entreprises, elles vont chercher à s’adapter en glissant peu à peu dans une économie de
fonctionnalité où le modèle économique privilégiera la valeur d’usage d’un bien à sa valeur
d’échange ; pour se faire, elles devront produire des objets durables, faciles à réparer, et faire
reposer l’essentiel de leur profit non plus sur leur vente mais bien sur leur entretien.
Néanmoins, compte tenu de la diversité des formes d’échange que l’on regroupe sous cette
appellation générique de « consommation collaborative », ce serait extrêmement réducteur
que de vouloir tous les associer à un rejet de la société de consommation. Car si les systèmes
de covoiturage, le troc de savoir-faire ou l’accueil de voyageurs inconnus reposent
incontestablement sur des motivations altruistes et/ou citoyennes, il est difficile d’en dire
autant lorsqu’un cadeau de Noël est revendu la semaine suivante sur eBay ou PriceMinister.
L’étude de Bardhi et Eckhardt (2012) montre d’ailleurs – avec le partage de voiture – que des
logiques opportunistes peuvent cohabiter avec un sentiment communautaire. Cela confirme
les travaux d’Axelrod (1984 et 1997) pour qui une coopération fondée sur la réciprocité peut
évoluer et se maintenir, même chez des acteurs égoïstes, pour peu que la possibilité de gain à
long-terme dépasse le coût à court terme. Selon lui, de telles collaborations peuvent finir par
imposer des normes de conduite et par construire une culture commune fondée sur l'influence
mutuelle.
En fait, l’immense majorité des consommateurs n’est pas dans le rejet de la consommation
actuelle, ils veulent simplement mieux la contrôler ; quant aux véritables alter-consommateurs
militants ils restent ultra-minoritaires. Une étude conduite par IPSOS en 2013 a d’ailleurs
montré qu’il pouvait être pertinent de classer les différents modes de consommation
collaborative sur un continuum opposant engagements sociétaux (notamment un engagement
écologique) et recherche de bons plans (principalement financiers).
Belk (2007) définit le partage comme « l’acte et le processus consistant à distribuer aux
autres ce qui est à nous pour qu’il l’utilisent et/ou l’acte et le processus consistant à recevoir
des autres et à prendre quelque chose pour notre usage ». Selon Price (1975), il s’agit de la
forme la plus basique de distribution économique ; elle est universelle et plus fondamentale
que la réciprocité (dont elle est d’ailleurs distincte alors que l’on a souvent injustement traité
les deux de manière identique), et elle existe depuis que sont apparus les premiers hominidés.
La réciprocité suppose un échange de propriété – ou à tout le moins une contrepartie, même
immatérielle et différée comme dans le don – alors que le partage implique une mise à
disposition mutualiste et la libre jouissance de chacun sans qu’il soit besoin d’une
compensation : dans une famille, le mobilier appartient le plus souvent à la communauté et
tous les membres peuvent en disposer à leur guise ; sur Internet, tous le monde peut bénéficier
à sa guise de l’information qui est disponible sur Wikipedia (un bénéficiaire peut en mettre
également à la disposition des autres mais rien ne l’y oblige et personne ne lui en fera grief
s’il ne le fait pas).
Mais si le partage peut, comme dans les exemples de Wikipedia ou de Linux, permettre à de
multiples utilisateurs d’en jouir en même temps, il va aussi créer de la rareté dès lors que
l’usage de plusieurs personnes ne peut être simultané. De fait, en se basant sur trois études,
Lamberton et Rose (2012) ont montré qu’au-delà des bénéfices en termes de coûts liés au
partage, le risque perçu de rareté qui peut en découler est un déterminant central de
l’attractivité d’un produit ; leurs résultats suggèrent que la probabilité perçue de pouvoir
disposer des produits agit directement sur la propension à partager (même si la familiarité
avec le partage a un effet modérateur et augmente cette propension).
Dans la consommation collaborative, il est rare que la réciprocité ne soit pas présente sous
une forme ou sous une autre. Parfois, elle se manifeste directement sous forme d’une
transaction : je vends directement un objet à une autre personne ou alors je le troque en
échange d’autre chose. Parfois, il y a bien mise en commun d’un bien, mais celui-ci appartient
à un propriétaire clairement identifié et tous les autres doivent apporter une contrepartie pour
pouvoir l’utiliser (même si cette contrepartie n’est pas systématiquement accordée à ce même
propriétaire) ; on est dans un système d’échanges complexes où A va échanger avec B, B avec
C… mais un équilibre va se faire au niveau du système global parce que tous ceux qui en font
partie apportent quelque chose et reçoivent quelque chose qu’ils jugent équivalent.
La consommation collaborative n’est donc que rarement du partage, mais elle peut-être par
contre de l’échange de partage. Il y a clairement un abus de langage lorsque Botsman et
Rogers (2011) indiquent – en évoquant de manière générique les formes de consommation
collaborative – que le partage pourrait être aussi important que la Révolution Industrielle
basée sur la propriété. Il en va de même quand Gansky (2012) parle de « Mesh » pour évoquer
un moyen de partager et de profiter de produits et d'informations entre des groupes de
personnes sans le « fardeau de la propriété » ; un concept qui s'articule autour de quatre
caractéristiques : le partage, l'utilisation d'applications Web et des réseaux mobiles, les biens
physiques et les services, et la communication via les réseaux sociaux.
En définitive, la consommation collaborative est une notion générique qui regroupe des
formes d’échange dont les valeurs et les modèles économiques restent, au final, assez
différents les uns des autres. Si l’on reprend les trois logiques recensées par Botsman et
Rogers (2011), on est en fait confronté à des schémas dont le seul véritable point commun est
la contractualisation entre des consommateurs particuliers :
Badot et Cova (2003) ont montré que si, beaucoup d’offreurs du marché se considéraient plus
proches de leurs clients que des institutions (Etat, armée, services publics, etc.), aidant même
les consommateurs à supporter le sentiment d’oppression ou d’incompréhension par les
institutions (cf. les campagnes de communication des Centres Leclerc), du point de vue des
consommateurs, il en allait autrement. En effet, de nombreuses observations empiriques ont
révélé des consommateurs faisant bonne figure mais renfermant des frustrations à l’égard des
offreurs pouvant, pour un rien, se transformer en incivilités, en détournements et autres gestes
vindicatifs particuliers ou collectifs (Cova et Carrère, 2002). Y compris dans le cadre de
processus collaboratifs impliquant fortement les consommateurs dans l’expérience de
consommation (Dujarier, 2008 ; Cova, Louyot-Gallicher et Bonnemaison, 2010).
Evoquer Marx pour qualifier le marketing apparaît sans doute comme le paradoxe le plus
étonnant du propos. Or, à regarder certains pans du marché de la consommation occidentale
actuelle, on découvre la concrétisation, certes symbolique, de deux concepts inspirés par
l’analyse de la valeur de Marx dans le Capital : la désintermédiation symbolique et la
défétichisation de la marchandise.
a) La désintermédiation symbolique
Pour Marx, c’est seulement la quantité de travail nécessaire à la production d’un article et de
ses composantes et des machines ayant permis sa fabrication qui en détermine la quantité de
valeur. La plus-value forgeant la rente des capitalistes provenant, d’une part, de la différence
entre la valeur d’usage des marchandises et les salaires payés aux travailleurs et de la
différence entre la valeur d’usage et la valeur d’échange, d’autre part. Dans cette perspective
sous-jacente et dans celle d’une assimilation du consommateur au travailleur dans une
souffrance économique commune, apparaissent actuellement des offres qui promeuvent —
symboliquement ou réellement — la réduction du nombre d’intermédiaires marchands car
source de captation de la rente forgée entre la valeur-travail et la valeur d’échange. Qu’il
s’agisse de la marque de sacs en bâches de camion recyclées Freitag qui installe son magasin
amiral fait en containers sur une plateforme logistique à Zurich, de l’enseigne Whole Foods
Market qui commence à installer ses magasins au milieu d’une quasi-ferme ou de sites
Internet valorisant la relation directe du fournisseur aux consommateurs, ces offreurs
signalent qu’ils réduisent le nombre d’intermédiaires, évitant en cela un sur-coût excessif et
assurant une meilleure maîtrise de la qualité des produits vendus aux consommateurs. La crise
du cheval — appelée avec humour par Lardellier (2013) : l’« écheveau alimentaire » — a sans
doute renforcé la pertinence d’une mythologie de la désintermédiation dans la consommation.
b) La défétichisation de la marchandise
Pour Ebguy (2002), le pessimisme semble gagner dans la société occidentale en général, et
française en particulier, du fait d’un cumul de facteurs : installation dans un système de crise
permanent, stress et dépression, mondialisation et crainte de l’anonymat, précarité potentielle
ou réelle, crise du lien social, « horreur économique » et son cynisme, perte de confiance dans
les institutions, etc. Selon Wieder (2014) s’inspirant de Perrineau (2014) et d’enquêtes par
sondage, ce pessimisme semble s’accroître jusqu’à mener à un questionnement des
fondamentaux de la société occidentale tel que, par exemple, le système démocratique. Ce
pessimisme conduit à une « méfiance généralisée » à l’égard des institutions mais aussi de ses
contemporains, à un fatalisme et une incapacité à maîtriser son avenir, à une perte totale de
confiance dans les représentants politiques et économiques.
Cette tendance au pessimisme et au fatalisme semble s’inscrire dans un temps long. En effet,
dès le début des années 1980, Lipovetsky (1983), recourant au paradigme postmoderne,
énonçait : « la société postmoderne n'a plus d'idole, ni de tabou, plus d'image glorieuse d'elle-
même, plus de projet historique, c'est désormais le vide qui nous régit, un vide puissant sans
logique, ni apocalypse. (...) La culture postmoderne est décentrée et hétéroclite ». Selon lui, «
la conquête de soi est devenue froide mais inéluctable, désenchantée mais générale », et l'on
voit se multiplier des « êtres mixtes sans modèles sociaux impératifs, sortes de combinaisons
du troisième type ne choquant plus personne » (Lipovetsky, 1990).
Drucker (1989) mena une analyse identique. Selon lui, si l’Occident a cru au « salut par la foi
» jusqu’au milieu du XVIIème siècle, émergea progressivement la philosophie des lumières,
porteuse du « salut par la raison et par les modèles » donc de solutions universelles (Etat,
idéologie, parti politique, théorie, etc.). Après avoir propagé comme solution universelle le «
laisser-faire », l’occident se tourna au XXème siècle vers le « salut par la société » et ses
différentes formes : la social-démocratie de Bismarck, le Tout-Etat léninien ou stalinien ou la
« Grande Société » de Johnson. Or, les occidentaux semblent avoir considéré qu’aucun de ces
systèmes politiques n’a pu apporter de réponse aux grands problèmes cristallisés par les crises
des années 1970 (Drucker, 1989, pp. 22-23). Les populations semblent s'être violemment
réveillées au cours des années 1980 en constatant que rien ni personne ne réussissait à les
sortir du marasme produit par la combinaison des crises et des mutations socio-économiques.
Chacun semble alors avoir décidé de prendre en charge son propre salut et son propre bonheur
en se substituant aux moyens traditionnels « modernes » (Etat, partis politiques, droit,
modèles, idéologies, rationalité, etc.) et en considérant que seule l'action individuelle ou
tribale produirait des effets tangibles (Badot et Cova, 1992).
Dans la lignée de Max Weber pour qui la fonction des religions est de réenchanter les
populations angoissées par l’idée de la mort et de la souffrance, pour Desjeux (2004, pp. 192-
196) s’inspirant de DeChant (2002), la consommation, associée aux discours de la persuasion,
notamment publicitaire, tend à devenir une forme concurrente aux religions transcendantales
traditionnelles qui ont tendance à séparer le sacré du profane. Mais le monde de la
consommation renouerait plutôt avec les religions « cosmologiques » ou animistes, celles
pour qui la nature, le sacré et la vie quotidienne ne font qu’un. La nature semblant être,
aujourd’hui, remplacée, pour DeChant, par l’économie et ses « turbulences » (caprices,
dureté, imprévisibilité, etc.) et pour Lardellier (2005 et 2013), la consommation en magasins
physiques comme sur Internet offre aux individus des « nouveaux rites » pérennisant ainsi
leur fonction ancestrale de rassurer et de structurer.
Le « fun » recherché par les consommateurs dans leur consommation (au sens large) afin de
compenser leur pessimisme assumé et profond semble pouvoir être interprété comme une
suite de « micro-réenchantements » — des « futurismes de l’instant » pour le dire comme
Virilio (2009) — permettant de compenser une « carence en caressage » (Ebguy, 2002) par
des flux de gratifications instantanées successives. Les consommateurs seraient donc à la
recherche de « doudous pour adultes » afin de réenchanter en permanence leur vie
quotidienne par un foisonnement de petits plaisirs abordables (le « treat and thrift » de Miller,
1998), de petits voyages plus ou moins réels, de petites histoires et de pseudo-liens sociaux
leur donnant l’impression de ne pas être seuls (Ebguy, 2002).
D’ailleurs selon Bourdieu (1990 et 2000), la fonction de l’ordinaire, du domestique, est
justement de diluer les grandes exaltations (notamment politiques). La consommation peut
être alors interprétée comme « une sorte de domestication des aspirations et des projets
désormais bornés à la frontière du seuil, et enfermés dans l’ordre du privé, par opposition aux
projets collectifs de la lutte politique par exemple, qui devaient toujours être conquis contre la
tentation du repli sur l’univers domestique » (Bourdieu, 1990, pp. 4-5).
Pour Schmoll (2010), les individus demanderaient de plus en plus à la vie en société, à la vie
au travail, qu'elles aient des dimensions ludiques, émotionnelles, d’exploration, en un mot,
que la vie soit « fun », notamment grâce aux nouvelles applications sur smartphone et
tablettes, mais aussi grâce à des petites cellules commerciales au fil des parcours des clients.
Fixes, comme dans les couloirs de métro mais aussi dans les gares et les aéroports, voire, dans
des centres commerciaux implantés au milieu de quartiers d’affaires. Par exemple, le centre
commercial des Quatre Temps à La Défense à Paris sert de « réservoir de petits plaisirs4 et
services », dans lequel les salariés travaillant dans les bureaux voisins piochent au gré de leurs
humeurs et de leurs besoins, de leur arrivée le matin au départ en fin de journée. Temporaires
et mobiles, les bulles d’oxygène et de bien-être prennent la forme, comme dans le cas du
centre commercial Westfield implanté à Londres, de stands, d’animations éphémères ou de
pop-up stores venant compléter (gratuitement ou non) un socle d’offre commerciale plus
stable quoique, lui-même réorienté vers « spa » et « grooming » (Badot et al., 2013).
Conclusion
3
Selon Sociovision (2011), 46% des Français souhaitent « mettre du fun » dans leur vie quotidienne à travers les
nouvelles technologies de l’information et de la communication (Internet, smartphones, apps, mp3,…).
4
Le centre commercial des Quatre Temps met même à disposition des passionnés de salsa, de rock, de tango ou
de gospel, des espaces gratuits dans le centre pour qu’ils puissent pratiquer leur passion en milieu de journée.
égoïste et orienté par la maximisation du gain. La forte défiance exercée par les
consommateurs à l’égard des opérateurs du marché pourrait être canalisée, voire refoulée, par
ces mêmes opérateurs économiques et informationnels (du monde Internet mais pas
seulement) aidant plus ou moins symboliquement les consommateurs à exercer cette défiance.
Références bibliographiques
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