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Résumé
1. Introduction
À l’issue d’une votation populaire du 29 mai 2005 en France, 54,67% des français
ont dit ‘Non’ à la question : Approuvez-vous le projet de loi qui autorise la
ratification du traité établissant une Constitution pour l'Europe ? Un élevé taux de
participation (69,37%) donne toute légitimité à la décision populaire. Dans notre
travail, on prétend aborder le rôle d’un autre acteur au-delà des partisans du
« pour » et du « contre ». Il s’agit de mettre en évidence l’acteur clef de l’espace
public, les médias[7], dans les débats sur l’Europe. Leur action a été décrite dans
cette campagne référendaire. Les opposants au texte se sont élevés contre la
façon dont la presse abordait les questions. Il semble que, dans leur ensemble, les
principaux médias français ont adopté une ligne éditoriale favorable au « oui »[8],
ce qui n’a pas empêché le rejet du projet.
Dans une première partie de notre travail, nous allons développer le concept du
cadrage. Son application dans la littérature et dans la recherche de la
communication politique. Après l’imbrication des médias avec l’espace et opinion
publiques, c’est-à-dire, avec les donnés des sondages et la recherche dans les
éditoriaux, formuler une hypothèse que puisse amener à des éléments
empiriques que susceptibles d’observer le couplage ou découplage entre l’opinion
dominante et l’opinion publié. Toujours dans cette partie du travail, nous
intéresse aussi la confrontation entre les différentes théories de la communication
politique[9].
2. Cadre théorique
Les médias choisis représentent les voix politiques axés vers un clivage de
politique traditionnelle. Le Figaro à droite, le Libération à gauche et Le Monde au
centre[14]. Mais, en ce qui concerne l’espace politique européen, ce clivage n’est
pas présent ou on l’observe rarement, même s’il y a plusieurs pays et chacun est
un cas. Pour l’instant, les clivages politiques traditionnels internes n'ont pas
transposé les frontières nationales. Néanmoins, cette constatation n’empêche que
les médias, politiquement orientés, n’aient pas un cadrage différent de l’enjeu[15].
Les grandes forces nationales sont plutôt favorables à l’intégration européenne,
ainsi que les élites. En France, les partis politiques qui dominent l’aréna ont été
dans le camp du ’oui’ (UMP, UDF, PS et radicaux, Verts), dans le camp du ‘non’
(FN, MPF, RPF, PCF) les plus faibles et plus extrémistes.
Lazarsfeld, les études sur l’influence des médias dans le choix électoral
démontrent que la presse n’a aucune influence sur ce choix, bien au contraire, la
presse ne faisait que renforcer leurs prédispositions. C’est le modèle sociologique
du vote qui prédomine. La persuasion était directe et massive, les effets linéaires
et homogènes. La campagne renforçait au lieu de convertir. À partir des années
60/70, on assiste au tournant cognitif, effets variés, dépendant du contexte et des
caractéristiques des individus. « the press may not to be successful much of the
time in telling people what to think, but it is stunningly successful in telling its
readers what to think about » (Cohen 1963); la presse se présente comme
indépendante à l’égard de la politique, autonome et surtout comme un
intermédiaire entre la politique et l’individu. L’importance du type de média joue
un rôle croissant et le décalage entre le pouvoir des médias écrits et les
audiovisuels est évident. Quand-même, la capacité des médias écrit met en
évidence certains enjeux, leurs exploitations, leurs opinions à propos, comme
aussi bien, leur capacité de persuasion, qu’on ne peut négliger. C’est à partir de
cette approche que nous induisons que les médias écrits proposés dans cette
étude ont joué un rôle significatif, sois dans les contours présentés de l’enjeu
européen, sois dans la prise de position auprès d’un public-ciblé. Pour soutenir
l’utilisation du cadre proposé, je vais faire recours aux niveaux macro et micro de
l’analyse sociologique du cadrage. Selon la perspective macro, la sélection de
certains aspects d’un enjeu induit à une interprétation particulière de l’objet ; au
niveau micro, la façon de présenter l’information a un effet sur le traitement de
l’information et les jugements individuels ; la mise en évidence des déterminants
cognitifs et psychologiques du choix individuel dans un contexte de gains et de
pertes. « The concept of framing refers to the effects of presentation on
judgement and choice … that individuals’ choices vary dramatically depending
upon whether the options are presented as potential gains or losses. » (Shanto
Iyengar, 1996, p.61), s’agissant d’un enjeu thématique, selon mon interprétation.
Les possibilités d’en faire un usage plus vaste et abstrait augmentent, dans la
mesure que le contexte est aussi plus favorable. La responsabilité des médias
augmente parallèlement aux possibilités mises en avant par le contexte.
L’option de prendre les éditoriaux comme objet d’analyse a déjà été annoncé
précédemment. Néanmoins, il faut exploiter les contours de l’absence de
consensus autour de la pratique journalistique et l’impartialité des éditeurs. Un
des éléments d’une presse impartiale est l’impénétrabilité du mur qui sépare
l’éditorial de la rédaction. Le point de vue de l’éditeur est supposé ne pas
intervenir dans le choix des reportages. Selon les normes journalistiques,
l’information doit être objective, libre et sans pression ou direction de personne
(Kim Kahn and Patrick Kenney, 2002, p.381) “According to the executive editor of
the Washington Post, Leonard Downie, Jr., the news departement at the Post
follows the paper’s formal ethics policy that ‘the separation of news columns from
the editorial pages … is solemn and complete’ ”(Seib 1994 cité par Kim et
Kenney, p. 381). Selon l’éditeur du réputé journal américain la frontière entre
l’éditorial et le choix des nouvelles, les enjeux, reportages et leurs saillances est
infranchissable. Mais Kim Kahn et Patrick Kenney assurent qu’aux États-Unis, les
journaux n’ont jamais été totalement dissociés des ‘cues’ partisanes et qu’ils sont
toujours une source de propagande politique. Selon eux, les préférences
politiques sont manifestement visibles dans les pages de l’éditorial. Et que,
contrairement aux affirmations de l’éditeur du Post, ils ajoutent « The editorial
influence on news coverage has electoral ramifications. In particular, the
endorsement decisions of newspapers, reflected in the news coverage, may affect
citizens’ attitudes about competing candidates. » (Idem, p.382) Acceptant ces
propositions on pourrait faire un parallélisme avec les clivages, situant les
journaux dans l’axe gauche/droite. On suggère cette proposition de Kim Kahn et
Kenney simplement pour renforcer l’idée de l’importance des éditoriaux dans la
prise en relevance d’une affaire ou d’un enjeu et sa saillance. Ce qu’on veut
mettre en lumière c’est la voie du message et du discours. Défendre l’idée que
“models of persuasion … suggest that people who are highly involved with an
issue are likely to process relevant messages in detail. They are thought to rely on
careful scrutiny of message content and their knowledge of the merits of the issue
to judge the validity of an advocacy. Accordingly, under high involvement, how
people combine or integrate message-relevant information into a unitary attitude
plays an important role in persuasion.”(Petty, Cacioppo, and Schumann, 1983).
Plusieurs études confirment que l’influence des médias dans l’opinion public est
évidente, et que cette influence est encore plus directe quand il s’agit de la
préférence de vote « The contemporary view is that media influences are
primarily the cognitive effects of agenda-setting and framing how events and
candidates are perceived (Iyengar and Kinder, 1987, McLeod et al. 1994) . At the
same time, other researchers have continued to explore the medias’ potential for
persuasion. Robert Erikson (1976) found that a newspaper’s editorial
endorsement was significantly related to county-level voting patterns. John
Robinson (1974) and Steven Coombs (1981) also documented a direct
relationship between newspaper endorsements and the voting patterns of
readers. Noelle-Neumann (1984) claimed that the media can have a strong
influence on voting preferences when their message is clear and consistent. Larry
Bartels (1993) showed that measurement error may significantly attenuate
estimations of media effects, and he argued that the direct influence is much
stronger than previously recognized. John Zaller (1996) provided new evidence
that media content can affect policy preferences and political evaluations.”
(Citation de Dalton, Beck and Huckfeldt, 1998, p.112). La plupart de cette
littérature est d’origine anglo-saxonique où le modèle libéral prédomine et le
bipartisme domine dans l’aréna politique. En Europe, des États coordonnés et
directives régulatrices, le jeu des médias acquière d’autres dimensions. Le rôle
des éditoriaux est très différent, mais la littérature aussi très peu développée, ce
qui nous a amené à raisonner sur le cadre en introduisant les études faits à
propos de l’importance des éditoriaux et leurs positions dans le champ politique,
renforçant l’idée que les éditoriaux reflètent l’orientation rédactionnelle.
La France s’inscrit dans le modèle pluraliste polarisé qui caractérise les pays de
l’Europe du sud. (Hallin/Mancini 2004). Il s-agit d’un modèle où les commentaires
des journalistes sont explicites dans la partie rédactionnelle « commentary-
oriented journalism ». Il s’inscrit dans la théorie de l’action. Dans le modèle du
journalisme partisan, les enjeux prennent l’importance et l’intérêt à la mesure des
médias. Néanmoins, l’influence sur la sélection peut-être inconsciente et implicite.
Il y a un rôle actif et stratégique des médias, surtout dans les pages éditoriales,
l’information n’est pas neutre, elle est explicitement orientée. L’opinion éditoriale
est clairement le miroir de la rédaction. Les journalistes instrumentalisent et sont
instrumentalisés, ils interagissent comme acteurs partisans.
4. Problématique
Deuxième hypothèse: Les médias écrits de référence ont primé les questions
nationales (game frame)[18] en détriment des questions européennes (issue
frame).
5. Méthode
À partir d’un champ empirique appuyé sur les éditoriaux et axé sur une recherche
qualitative[19] (Donati 92) de l’analyse de contenu et analyse interprétative.
À partir d’un champ empirique appuyé sur les éditoriaux et axé sur une recherche
qualitative, je vais chercher le cadrage communicationnel de l’enjeu. Pourquoi
cette méthode qualitative ? D’abord, parce qu’est très difficile dans le cadre de ce
travail d’en utiliser une autre, ensuite, parce que c’est la méthode que je trouve la
plus appropriée pour l’analyse en cause. Les avantages de l’analyse qualitative
pour ce travail sont: qu’il s’agit d’un enjeu qui a un rapport stricte avec une réalité
qui n’existe qu’en lien avec des êtres humains et c’est une réalité de
significations pour des individus, elle symbolise quelque chose pour eux. L’objet
de ma recherche repose sur un enjeu de ‘sens’, un événement particulier dans
une situation et un contexte donnés. C’est un objet élaboré, construit. À son
propos, on pourrait même parler de « réel ». Chercher ici consiste à comprendre
la signification que des acteurs politiques intermédiaires (journalistes) donnent à
un événement auquel ils ont été confrontés. Mon objectif de comprendre est aussi
partagé intellectuellement leur expérience pour retrouver le sens de leur
construction communicative. La « vérité », ici, doit être mise entre guillemets car
la compréhension que l’on a d’un phénomène est valable uniquement dans le
contexte où il se déroule. En approche qualitative, il ne faut pas avoir d’a priori
sur l’objet d’étude[20]. Il s’agit de tenter de comprendre, du point de vue des
acteurs qui ont vécu l’enjeu, qui l’on décrit, lesquels ont partagé des opinions. On
retiendra que la priorité est ici accordée au « terrain », c'est-à-dire, aux éditoriaux
que fait l’objet signifiant. J’aimerais bien avoir l’aide d’un logiciel qui me
permettrait de créer des noyaux sémantiques et des codifications nodales de
mots-clés. La description et les constructions sémantiques croisées me servent de
traitement de données. Il semble évident qu’une étude de ce genre implique un
énorme effort pour repérer des interactions, des structures, des constructions de
significations, des émergences de sens, de jeux, toute une panoplie
d’élaborations individuelles de l’enjeu qui pourraient m’amener à des conclusions
plus précises et corroborées.
Bibliographie:
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