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NAVIRE

TRANSPORT MARITIME
GENS DE MER

Doctrine NTG

La responsabilité disciplinaire
et pénale du pilote maritime
> Commandant François LAFFOUCRIÈRE
C1NM – AFNI – Pilote maritime de la station de pilotage du Havre – Fécamp
Master 2 de droit de la mer et des activités portuaires – Doctorant

Le rôle du pilote maritime consiste à monter à bord des navires approchant ou


quittant un port afin d’assister, par les connaissances particulières qu’il a des lieux,
un capitaine (1), pour que celui-ci entame ou achève en toute sécurité l’expédi-
tion maritime. Il s’agit d’une activité à risques qui peut être l’occasion d’accidents
source de dommages causés aux différents participants comme aux tiers, ainsi qu’à
l’environnement. Le pilote peut-être considéré comme un « joint-manager of
high-risk operations ». Martin Ndende et Gaëlle Gueguen-hallouët rappellent (2)
que « la profession de pilote est délicate et présente de hauts risques : la moindre erreur, et
même la faute la plus légère, peuvent entraîner des dommages considérables – abordages,
pollutions, atteintes au domaine public, etc. – susceptibles de dépasser les capacités financières
des pilotes ». Pour une présentation plus détaillée du pilotage maritime il peut être
utile de se référer à l’article publié dans cette revue, en juillet-août 2008, sur la
responsabilité civile du pilote (3).
Un exemple récent d’événement susceptible d’entraîner la responsabilité pénale
et disciplinaire du pilote maritime peut être trouvé dans l’accident du Cosco Busan

(1) Cass. soc., 15 mars 1972, Bull. civ. V, n° 224, p. 205. « Est considéré comme capitaine celui qui exerce régulièrement la part
de commandement d’un bâtiment quels que soient le tonnage, l’affectation de celui-ci et l’effectif de son équipage et ce même si
l’intéressé n’a pas assumé effectivement les fonctions de mandataire commercial de l’armateur. »
(2) Martin NDENDE et Gaëlle GUEGUEN-HALLOUËT, Pilotage maritime, Rép. Com. Dalloz, juin 2002.
(3) François LAFFOUCRIÈRE, La responsabilité civile du pilote, DMF 2008, 595.

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ayant heurté le pont « San Francisco Bay Bridge », le 7 novembre 2007 (4), entraî-
nant une pollution de la baie de San Francisco et la mort de milliers d’oiseaux. Cet
accident permet de constater, outre l’abaissement du seuil de tolérance au regard
des dommages causés à l’environnement, que même aux États-Unis où « l’Oil
Pollution Act » de 1990 (OPA 90) (5) entraîne une réponse civile et financière
plus que pénale, une tendance à la criminalisation, aussi bien du capitaine que du
pilote, se fait jour à l’instar de ce qui se passe en Europe.
La responsabilité pénale et la responsabilité disciplinaire sont autonomes l’une
de l’autre, même si elles ont toutes deux pour objet de sanctionner des compor-
tements portant atteinte à la communauté. La première est relative à la commu-
nauté en général, tandis que la deuxième a trait à la communauté d’un groupe
plus restreint et dans le cas présent la communauté maritime. « De tous temps, en
effet, la spécificité des activités maritimes, ses dangers, les exigences de la vie à bord, le milieu
fermé des marins, ont rendu nécessaires la définition de fautes et d’infractions particulières et
la création de juridictions pour en connaître » (6). Par combinaison des articles 34 et 37
de la Constitution de 1958, les crimes et délits sont du domaine législatif, alors que
les contraventions relèvent du domaine réglementaire. Il s’agit d’une distinction
reprise par l’article 111-2 du code pénal. Le code disciplinaire et pénal de la marine
marchande (CDPMM), de la loi du 17 décembre 1926 modifiée, dans sa partie
législative, traitait cependant aussi bien des crimes et délits que des contraventions.
Le titre 2 du CDPMM concernait les fautes contre la discipline, il a été abrogé et
remplacé par le décret n° 60-1193 du 7 novembre 1960. Il est intéressant de voir
que le curseur qui définit la limite entre le législatif et le réglementaire n’est pas
figé puisque des dispositions de ce décret relatif au régime disciplinaire du marin
sont réintégrées, en principe à droit constant, dans la partie législative du code des
transports annexé à l’ordonnance n° 2010-1307 du 28 octobre 2010 (7). La codi-
fication étant encore incomplète nous considérerons ici les textes qu’elle consolide.
La responsabilité disciplinaire est l’obligation de répondre des comportements
fautifs commis par des personnes au sein d’un groupe de personnes ayant la même
qualité. Il faut, pour qu’elle existe, la présence d’une faute disciplinaire, des sanctions
disciplinaires prévues par un texte, une procédure disciplinaire, ainsi qu’une autorité
ayant qualité pour infliger ces sanctions. Il est à noter que si le droit disciplinaire
connaît le principe de la légalité des peines, il ne connaît pas celui de la légalité des
infractions ou des fautes. Il s’agit d’un régime de sanction, autonome du droit pénal,

(4) Le commandant John COTA, pilote du « Cosco Busan », a été condamné le 17 juillet 2009 par le Juge Susan ILLSTON
de la Cour de District du Nord de la Californie, et a été incarcéré 10 mois dans une prison fédérale, pour violation du Clean
Water Act de 1977 tel qu’amendé par l’Oil Pollution Act de 1990 et violation de Migratory Bird Treaty Act de 1918.
http://www.marinelog.com/DOCS/NEWSMMIX/2009jul00171.html John COTA avait également déjà fait l’objet de mesures
disciplinaires puisque sa licence de pilote lui avait été retirée temporairement en décembre 2007 par le « State Board of Pilot
Commissioners » avant son départ à la retraite. Andy PIERCE, TradeWinds, 9 avril 2008.
(5) Cette loi a été promulguée aux USA à la suite de l’échouement, le 24 mars 1989, du navire pétrolier « Exxon Valdez »
dans le détroit du Prince William en Alaska, entraînant une pollution majeure.
(6) Michel RENAUT, Le Tribunal maritime commercial doit-il se réformer où disparaître ?, DMF 2004, 675.
(7) Ce nouveau code des transports comporte une partie 5 « Transport et navigation maritimes », comprenant un livre V « Les
gens de mer », dans lequel se trouve un Titre 2 « L’équipage » et un Chapitre 4 « Sanctions professionnelles ».

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même s’il s’en rapproche. L’autorité pouvant infliger une sanction disciplinaire est,
soit une juridiction disciplinaire, soit un organisme disciplinaire non juridictionnel.
L’intérêt de la distinction réside dans la publicité de « l’audience disciplinaire », l’autorité
attachée aux décisions, les possibilités de recours, les exigences (8) procédurales (9).
Répondent de leur responsabilité disciplinaire « l’ensemble des salariés du secteur privé,
l’ensemble des fonctionnaires, mais également nombre de professionnels indépendants, notamment
ceux, médecins, avocats, architectes, experts-comptables, etc., dont la répression disciplinaire est
confiée à des ordres professionnels, sans compter les fédérations sportives et autres associations ou
syndicats. » (10) La faute ou infraction disciplinaire, différente de l’infraction pénale,
est déterminable aussi bien par un texte ou code de déontologie que par des usages
professionnels, et même par un simple comportement de la personne y compris dans
le cadre de sa vie privée, qui serait nuisible à l’intérêt du groupe (11). À l’inverse, la
sanction disciplinaire doit être impérativement déterminée par un texte et en ce qui
concerne le marin, il s’agit du décret précité n° 60-1193 du 7 novembre 1960, auquel
est soumis le pilote maritime, hors texte spécial. En cas de faute grave dans l’exercice
de sa profession ou de condamnation pour une infraction prévue par le CDPMM,
le marin peut encourir s’il est breveté, diplômé ou certifié, le retrait temporaire ou
définitif, partiel ou total, des droits et prérogatives afférents au brevet, diplôme ou
certificat dont il est titulaire. Dès le Titre 1 du CDPMM, « Dispositions générales »,
il est possible de s’apercevoir que si l’abrogation du CDPMM et son incorporation
dans le nouveau code des transports n’était pas déjà en cours, il faudrait certainement
procéder à son « dépoussiérage » (12). Il aurait certainement été plus judicieux en
1960, de créer une partie réglementaire qui aurait intégré le titre 2 et dans laquelle
il aurait été possible de transférer les dispositions de nature réglementaire ainsi que
tout ce qui a trait au contraventionnel (13). Le titre 3, « Des infractions maritimes »,
dans son chapitre 1 traite, entre autre, des larges pouvoirs attribués au capitaine, et
il est remarquable que, hors urgence, le capitaine ne peut consigner une personne,
française ou non, que sous le contrôle du procureur de la république (14). Le droit
maritime peut paraître parfois obsolète et désuet, impression renforcée quand un texte
en vigueur contient encore des peines de travaux forcés à temps (15). L’article 63 a

(8) Joël MORET-BAILLY, Les institutions disciplinaires, Mission de recherche droit & justice, 2003, pp. 13-28.
(9) Le droit à un procès contradictoire à deux niveaux de juridiction et un délai raisonnable de jugement, dicté par l’article 6-1
de la CEDH, n’est pas systématiquement applicable aux procédures disciplinaires non juridictionnelles.
(10) Joël MORET-BAILLY, op. cit., p. 167.
(11) Joël MORET-BAILLY, op. cit., pp. 54-58.
(12) En effet, son article 3 renvoie au titre 2 qui a été abrogé, l’article 4 renvoie à l’ancien code pénal, et de plus l’article 7
fait mention de « la personne inculpée » notion remplacée depuis par celle de « personne mise en examen ».
(13) Il s’agit de la structure que l’on trouve dans l’actuel code pénal.
(14) La réforme sur la nationalité du capitaine (LOI n° 2008-324 du 7 avril 2008 relative à la nationalité des équipages de
navires), permettant à la France d’être enfin en conformité avec le droit européen, ne remet pas en cause les pouvoirs du
capitaine comme cela a pu être suggéré par des syndicats de capitaines de navire et la question soulevée au colloque organisé
par Mme LE BIHAN-GUENOLE qui s’est tenu au Havre le 13 mars 2008 à l’I.S.E.L.
Patrick CHAUMETTE, « Capitaines, marins : nouveaux enjeux, nouveaux défis », DMF 2008, 366
(15) Article  51 du CDPMM  : «  Toute personne embarquée qui altère volontairement les vivres, boissons ou autres objets de
consommation par le mélange de substances non malfaisantes est punie de six mois d’emprisonnement.
…/… ; s’il en est résulté la mort sans intention de la donner, la peine est celle des travaux forcés à temps. »

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un champ d’application et un objet particuliers (16). Même si le pilote pourrait être
concerné par l’article 63 alinéa 1, il ne le sera spécifiquement que dans le chapitre 5
traitant des accidents et incidents de navigation pouvant constituer des infractions.
Selon l’article 79, l’échouement, la perte ou la destruction volontaire d’un navire, avec
une intention criminelle, encourt une peine délictuelle ou criminelle en fonction de
la qualification du code pénal. Les infractions aux règles prescrites par les règlements
maritimes, commises par le capitaine, le chef de quart ou le pilote, constituent des
délits (17). En 1931, le Conseil d’État établissait que le CDPMM, même dans ses
dispositions ne visant pas expressément les pilotes, était applicable à ces derniers (18).
Mais même s’il est un marin, le pilote maritime bénéficie d’un régime différent, et
à ce titre il est un marin particulier (I), ce qui fait naître des difficultés inhérentes à
son statut et à son activité (II).

I. – LE PILOTE MARITIME, UN MARIN PARTICULIER


Dans la communauté maritime existe un groupe distinct, celui des pilotes
maritimes. En effet, en dehors des patrons-pêcheurs et de la catégorie non encore
entièrement définie des gens de mer (19), le pilote a un statut particulier car il n’est
pas lié à l’armateur par un contrat d’engagement maritime défini par l’article 1er
du code du travail maritime (CTM) (20). Le pilote maritime ne servant pas à bord
d’un navire en vue d’une expédition maritime, ne peut être lié à l’armateur par
un contrat d’engagement maritime. Selon son article 5, le CTM n’est applicable
que pour tout service à bord d’un navire français, alors que les opérations de pi-
lotage prennent place, le plus souvent, à bord de navires étrangers excluant ainsi
l’application du CTM.
Il faut donc identifier cette relation particulière (21) puisque le CDPMM
s’adresse essentiellement aux membres d’équipage ou passagers à bord des navires
de commerce. Le pilote maritime n’étant pas lié par un contrat d’engagement
maritime, mais par un contrat d’entreprise avec l’armateur, il est à bord comme un
marin conseiller du capitaine, non comme membre de l’équipage. Il ne peut donc
engager, par ses actes, la responsabilité pénale de l’armateur en tant que personne

(16) Il s’agit essentiellement de la police des eaux et rades ainsi que de la police de la navigation maritime, applicables à
toute personne quelque soit sa nationalité, sur tout navire dans les eaux territoriales françaises quelque soit son pavillon.
Les règles applicables sont le règlement international pour prévenir les abordages en mer (RIPAM) ainsi que les arrêtés des
préfets maritimes.
(17) Articles 80 et 81 du CDPMM.
(18) C.E., 24 juillet 1931, Navire « Pilote Nivière ». « ledit article s’applique à tout marin breveté ou diplômé, notamment aux
pilotes … » ; il s’agissait de l’article  23, inclus dans le titre  II (abrogé) du CDPMM, relatif aux fautes contre la discipline.
DMF1931, 396.
(19) La catégorie des gens-de-mer est plus large que celle des marins qu’elle englobe. La convention du travail maritime
du 23 février 2006 de l’organisation internationale du travail (OIT) inclut dans la notion de gens-de-mer, les marins et les
autres personnes travaillant à bord à quelque titre que ce soit, son article II 1 f) donnant la définition suivante : « gens de
mer ou marin désigne les personnes employées ou engagées ou travaillant à quelque titre que ce soit à bord d’un navire auquel la
présente convention s’applique ; ». Cette convention a déjà été ratifiée par les États maritimes majeurs que sont le Liberia,
les Bahamas et les Iles Marshall. Elle est à l’heure actuelle l’objet d’une décision du Conseil 2007/431/CE, adoptée le 7 juin
2007, autorisant les États membres à la ratifier, dans l’intérêt de la Communauté Européenne, d’ici le 31 décembre 2010.
(20) Loi du 13 décembre 1926 portant code du travail maritime.
(21) François LAFFOUCRIÈRE, op. cit.

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morale (22), établie à l’article 121-2 du code pénal, puisque seul un organe ou un


représentant de cette dernière pourrait le faire. Seul le capitaine, représentant de
l’armateur, peut engager, par emprunt de criminalité, la responsabilité pénale de
cet armateur.
La responsabilité pénale du pilote est régie également par des articles particuliers
du CDPMM et par des textes spécifiques au pilotage (A). La même problématique
se rencontre à l’égard de sa responsabilité disciplinaire, le pilote bénéficiant d’un
régime disciplinaire spécial (B).

A. – Spécificité des infractions


Au cours de son activité, le pilote maritime est soumis au régime pénal du Code
disciplinaire et pénal de la marine marchande (23), à la loi du 28 mars 1928 et au
Code des Ports Maritimes.
Les infractions du CDPMM
L’infraction de l’article 63 alinéa 1 est un délit dont pourrait être l’auteur un
pilote qui, sans transmettre au capitaine les ordres des autorités portuaires, refuserait
de s’y soumettre, ou bien ne prendrait pas en compte les règlements locaux que le
capitaine n’est pas censé connaître. Dans ces deux cas, le capitaine du navire n’étant
pas conscient, contrairement au pilote, d’enfreindre une consigne, sa responsabilité
pénale ne peut être engagée (24).
L’article 79 du CDPMM est important car, même sans précédent connu, il
entraîne la perte du bénéfice de l’article 21 de la loi n° 69-8 du 3 janvier 1969
relative à l’armement et aux ventes maritimes (25). Les articles 80 et 81 concernent
la conduite nautique du navire (26), comme un excès de vitesse (27) entraînant
condamnation du pilote (28), ou bien un non respect (29) du RIPAM (30).

(22) Jean-Claude SOYER, Droit pénal et procédure pénale, L.G.D.J., 2006, 19e  édition, p.  128. Le nouveau code pénal
« Tenant compte de l’évolution économique, (il) a consacré largement, dans une construction d’ensemble, la responsabilité pénale
des personnes morales, que la loi Perben II a d’ailleurs généralisée. »
(23) C.E., 24 juillet 1931, Navire « Pilote Nivière », op. cit.
(24) Haute Cour de Justice (division d’Amirauté), Royaume-Uni, 29-30 octobre 1952, navire : « Hans Hoth », DMF 1953, 351.
Pour la Haute Cour, la responsabilité incombe non pas au capitaine qui s’est abstenu de questionner le pilote sur les signaux
portuaires, mais bien au pilote qui n’a pas correctement rempli son obligation de conseil.
(25) Cet article permet au pilote, par l’abandon du cautionnement prévu à l’article 20 de cette même loi, de s’affranchir de
la responsabilité civile résultant des dommages causés au cours des opérations de pilotage.
(26) Tribunal correctionnel de Saint-Nazaire, 10 mars 1934, navires : « Docteur Roux », « Dehorter » et « Jamaïque », DMF 1934, 223.
(27) Nouvelles et informations : « Un pilote condamné pour excès de vitesse », DMF 1961, 767. Note du rapporteur : « Mais ce
qui est à noter dans cette affaire, c’est que le pilote se trouve condamné, et non le capitaine, qui conserve en principe la responsabilité
de son navire. »
(28) Tribunal maritime commercial du Havre, 17 mai 1955, navire : « Atlantic » et remorqueur « Abeille IV », DMF 1955, 556,
note Francis SAUVAGE. « Si le capitaine demeure, en tout état de cause, seul chargé de la direction de son navire, il peut néanmoins,
légitimement, dans cette direction, s’en rapporter à la compétence spécialisée du pilote. » Le naufrage du remorqueur entraîné par
la vitesse jugée excessive du paquebot « Atlantic » avait provoqué la mort de sept marins. Seuls le pilote et le commandant
rescapé du remorqueur ont été condamnés.
(29) Tribunal maritime commercial de Bordeaux, 10 octobre 1962, navires : « Saint-Jacques » et « Bassens », DMF 1963, 488,
note sous jugement : « La responsabilité des pilotes semble avoir été plus gravement engagée que celle des capitaines, ce qui se
justifie par l’autorité incontestable du pilote à bord. »
(30) Tribunal maritime commercial de La Rochelle, 24 juin 1963, navires : « Ile Maurice » et « Rosalain », DMF 1963, 673, note
P. PFISTER. Le pilote et le chef de quart du navire piloté ont tous deux été reconnus coupables d’avoir enfreint le règlement
pour prévenir les abordages en mer provoquant un abordage causant la perte de leur navire.

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Les infractions de la loi du 28 mars 1928 (articles 15 et 16)
L’article 15 définit deux délits différents pour une même peine. Le premier
est le manquement à l’obligation de service public de l’article 6 de la loi (31) qui
impose au pilote de porter assistance à un navire en danger. Cette assistance est
différente de celle de la loi du 7 juillet 1967 (32), la fédération française des pilotes
maritimes (F.F.P.M.) ayant eu l’occasion de fournir un éclairage sur les différents
cas de figure pouvant se présenter (33). Le deuxième délit prévu à l’article 15 est
constitué par la conduite d’un navire par un pilote en état d’ivresse (34). Deux
questions se présentent, car le texte de la loi obligeant à considérer que si le pilote
n’a pas le commandement du navire il peut cependant en avoir la conduite. En-
suite, l’état d’ivresse (35) n’ayant toujours pas de définition légale, le problème a
été contourné dans le code pénal et dans le code de la route, par la notion d’état
alcoolique caractérisé par des taux fixés par des dispositions législatives ou régle-
mentaires. Un mécanisme similaire serait bienvenu dans le CDPMM et la loi
du 28 mars 1928, car dans l’état actuel du droit positif, l’état alcoolique ne peut
correspondre à l’état d’ivresse de l’article 15 de la loi du 28 mars 1928.
L’article 16 définit le délit de « pilotage de fait » résultant soit d’une tentative de
concurrence par des marins non commissionnés par l’État, soit d’une tentative par
un pilote d’une autre station d’offrir ses services dans une zone de pilotage pour
laquelle il n’a pas été commissionné par l’État.
Ces trois délits sont de la compétence des tribunaux correctionnels, confor-
mément à l’article 17 de la loi de 1928. La modalité de leur saisine peut paraître
ambiguë car le mécanisme des renvois multiples à différents codes laisse à penser
que ces trois délits ne peuvent être poursuivis que si l’administrateur des affaires
maritimes saisit le procureur de la république et seulement après avoir procédé à une
enquête contradictoire. Pourquoi ne pas alors accorder compétence aux TMC ?
Les infractions du code des ports maritimes
Le livre III de la partie législative du code des ports maritimes (36) a pour objet
la police des ports maritimes. Son titre III est relatif à la police de la grande voirie et
(31) Article 6 : « Hors le cas de force majeure, tout pilote doit, nonobstant toute autre obligation de service, prêter d’abord son
assistance au navire en danger, même s’il n’en a pas été requis, du moment où il a pu constater le péril dans lequel se trouve ce
navire. Le pilote a droit, dans ce cas, à une rémunération spéciale, qui, s’il y a contestation, sera fixée par le tribunal de commerce. »
(32) Martin NDENDE et Gaëlle GUEGUEN-HALLOUËT, Pilotage maritime, op. cit., n° 88-91.
(33) Communication de la FFPM, « À propos de la rémunération d’assistance du pilote maritime », DMF 1969, 272.
Voir aussi, Guy MARCHAND, Pilotage, J.-Cl. com. 2001, Fasc. 1181, pp. 1-20, n° 27.
(34) Le nouveau commentaire sur l’ordonnance de la marine du mois d’aout 1681, à propos du livre  IV titre  III des Pilotes
Lamaneurs, article VIII présentait la chose ainsi : « Article VIII.
Le Lamaneur qui entreprendra, étant yvre, de piloter un vaisseau, sera condamné en cent sols d’amende & interdit, pour un mois, du
pilotage. Dans le vrai, si cet article étoit pris à la lettre, les interdictions seroient si fréquentes & si multipliées, qu’il n’y auroit presque
jamais de pilotes en exercice, tant les hommes de mer, sur les ports, sont sujets à s’enivrer. Mais il est différens degrés d’ivreffe ; & ce
qu’il y a de singulier, c’est qu’il est des pilotes & autres mariniers qui ne montrent jamais plus d’habileté, de courage & de prévoyance
tout à la fois, que lorsqu’ils sont ivres à un certain point. Le meilleur est néanmoins de ne pas s’y fier, ne fût-ce qu’à cause de la
difficulté de distinguer le degré d’yvresse qui ne seroit pas dangereux ; & à cela le remède est facile, le maître ayant la liberté de refuser
tout pilote qui sera reconnu ivre : si ensuite il le laisse enivrer à son bord, ce sera uniquement sa faute. »
(35) Cass. Crim., 24 avril 1990, Bull. crim. 1990, n° 152, p. 400. Définition de la Cour : « L’ivresse manifeste est un fait matériel
qui peut être constaté à l’aide du témoignage des sens, sans qu’il soit nécessaire que le rapport qui l’atteste relate à l’appui des
signes particuliers ».
(36) Le code des ports maritimes est issu du décret n° 56-321 du 27 mars 1956

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aux atteintes constitutives d’une CGV, tel un usage non conforme du plan d’eau.
Cependant, dans ce cas, seul le capitaine du navire est expressément nommé, ce
qui exclut la responsabilité du pilote (37).
Le titre V est intitulé « Mesures d’application » et son article unique L351-1
renvoie à la partie réglementaire du code. L’article R311-7 (38) donne certains
pouvoirs aux officiers de port qui peuvent établir une contravention, selon l’article
R311-8 (39), à l’encontre d’un pilote qui contreviendrait à leurs ordres. L’article
R351-1 renvoie au « règlement général de police des ports maritimes de commerce
et de pêche » annexé. Des contraventions peuvent être infligées au pilote qui ne
respecterait pas ce règlement, notamment en ce qui concerne le mouillage d’un
navire ou le non respect de la vitesse par ce même navire (40).
La création d’un code des transports doit être l’occasion d’actualiser les textes
précités.
Une codification en cours
C’est la volonté de rendre le droit accessible qui est à l’origine de l’œuvre de
codification du droit, dont celui des transports. Les lois d’habilitation ont une
durée de vie limitée : l’article 84 de la loi n° 2004-1343 du 9 décembre 2004 de
simplification du droit autorise le Gouvernement à procéder par ordonnance à
l’adoption de la partie législative du Code des transports et elle précise, en son
article 92, la durée de l’habilitation prorogée par l’article 28 de la loi n° 2007-1787
du 20 décembre 2007 au 31 décembre 2008. Un nouveau report avait été accordé.
Les termes (41) de cet article 28, malgré une codification à droit constant,
permettent une adaptation des textes de valeur législative. Il peut s’agir d’assurer
le respect de la hiérarchie des normes ou bien de procéder à un alignement avec
l’esprit du droit positif actuel.
Les deux codes créés en décembre 1926 (42) sont partiellement abrogés et les
dispositions ayant encore un sens reprises pour être intégrées dans le nouveau code
des transports ou dans le code du travail, voire dans le code pénal.
La partie V du code des transports comprend un livre V intitulé « Les gens de
mer » dans lequel sont concentrées les dispositions reprises du CDPMM, du code
du travail maritime et des divers décrets pour leurs dispositions à valeur législative,

(37) Robert REZENTHEL, Le pilotage dans les eaux portuaires, DMF 1988, 355, p. 364 : « Le Conseil d’État a jugé récemment que
les dommages causés à des ouvrages portuaires par un navire, et imputable pour partie à la faute du pilote, engageait la responsabilité
de l’armateur au titre de la contravention de grande voirie » …/… « Il faut plutôt considérer, selon nous, qu’en ne suivant
pas les conseils du pilote, le capitaine commet une faute nautique dont l’armateur doit assurer la responsabilité. »
(38) Article R311-7  : … « Ils donnent des ordres aux capitaines, patrons, pilotes, maîtres haleurs et lamaneurs en tout ce qui
concerne le mouvement des navires et l’accomplissement des mesures de sûreté, d’ordre et de police. » ../… « Ils ont le droit, dans les
cas d’urgence ou d’inexécution des ordres qu’ils auraient donnés, de se rendre à bord et d’y prendre, à la charge des contrevenants,
toutes mesures nécessaires à la manœuvre des navires. »
(39) Article R311-8 : … « Les personnes qui contreviennent aux prescriptions des officiers de port sont punies de l’amende prévue
pour les contraventions de 2e classe. », incluant les pilotes auxquels ils peuvent donner des ordres.
(40) Voir supra
(41) Article 28 de la loi n° 2007-1787 : « … Les dispositions codifiées sont celles en vigueur au moment de la publication de
l’ordonnance, sous réserve des modifications nécessaires : 1° Pour assurer le respect de la hiérarchie des normes, la cohérence
rédactionnelle des textes ainsi rassemblés, harmoniser l’état du droit, remédier aux éventuelles erreurs et abroger les dispositions,
codifiées ou non, devenues sans objet ; »
(42) Le CDPMM par la loi du 17 décembre 1926, et le code du travail maritime par la loi du 13 décembre 1926.

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occasion d’unifier certains termes par l’introduction d’articles de définition, tel
l’article L.5000-1 (43).

B. – Un régime disciplinaire spécial


Le pilote est soumis au régime disciplinaire spécial déterminé par le décret
n° 69-515 du 19 mai 1969 relatif au régime du pilotage dans les eaux maritimes (44),
ainsi qu’au décret n° 60-1193 du 7 novembre 1960 sur la discipline à bord des
navires de la marine marchande, combinaison peu efficace justifiant une refonte
de l’article 13 du décret du 19 mai 1969.
Un système peu efficace
L’article 13 du décret de 1969, confiant au ministre des transports un pouvoir
disciplinaire (45) sur les pilotes, crée une sorte de summa divisio entre un régime
applicable aux pilotes à bord d’un navire et un autre applicable aux pilotes hors
service à bord d’un navire (46).
Le décret de 1960, mis à jour (47), en voie d’intégration dans le code des trans-
ports traite du retrait des prérogatives attachées aux brevets et diplômes, l’article 22
permettant à l’administrateur des affaires maritimes de suspendre provisoirement
l’exercice du droit de piloter d’un pilote mis en examen (et non, inculpé) au titre
de l’article 81 alinéa 2 du CDPMM.
Son champ d’application réduit aux navires français (environ deux cents) (48), ce
décret ne peut avoir qu’un faible impact sur les pilotes, hormis l’article 22, aucun
brevet ou diplôme ne conférant le droit de piloter un navire (49).
Il apparaît donc très difficile de sanctionner disciplinairement un pilote pour
un comportement ou des agissements en service à bord d’un navire, mais lorsque
le pilote n’est pas en service à bord d’un navire l’article 13 du décret de 1969
développe alors son plein effet (50).
S’il ressort clairement du texte que le président de la station ou le chef du
pilotage n’ont plus aucun pouvoir disciplinaire (51) depuis l’entrée en vigueur
du décret de 1969, la détermination de l’autorité réellement compétente pour
chacune des sanctions peut poser problème. En ce qui concerne la révocation et

(43) Article L.5000-1 :


« Est considérée comme maritime pour l’application du présent code la navigation de surface ou sous-marine pratiquée en mer, ainsi
que celle pratiquée dans les estuaires et cours d’eau en aval du premier obstacle à la navigation des navires. La liste de ces obstacles
est fixée par voie réglementaire. »
(44) Guy MARCHAND, Pilotage, op. cit., p. 16.
(45) Exercé par l’administrateur des affaires maritimes territorialement compétent, dans le respect du contradictoire.
(46) Martin NDENDE et Gaëlle GUEGUEN-HALLOUËT, Pilotage maritime, op. cit., n° 105.
(47) Au visa de la version en vigueur de ce décret figure toujours l’article 14 de la loi du 28 mars 1928 alors que ce dernier
a été abrogé par le décret du 19 mai 1969 qui en a repris le contenu puisqu’alors de nature réglementaire.
(48) Caroline BRITZ, «  Pilotage  », Le Marin, 2  mai 2008, p.  10. Plus de cent mille opérations de pilotage sont réalisées
chaque année
(49) Ce droit provient de l’article 1 de la loi du 28 mars 1928 et des dispositions de l’article 9 du décret du 19 mai 1969.
(Le pilote est commissionné par l’État, le décret de 1960 est muet en ce qui concerne un retrait de cette commission.
(50) Quatre sanctions sont possibles  : la réprimande, le blâme, la suspension temporaire de l’exercice des fonctions, la
révocation.
(51) L’article  14 de la loi du 28  mars 1928, abrogé par le décret de 1969, prévoyait que « la réprimande, le blâme et la
suspension de fonctions pendant dix jours au plus sont prononcés par le chef du service du pilotage, … »

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Doctrine NTG

la suspension de fonctions de plus de dix jours, la solution est claire, le ministre


chargé des transports est compétent pour prononcer ces sanctions.
En revanche, la suspension de fonction de moins de dix jours est moins claire
car le texte du décret de 1969 désigne le directeur des affaires maritimes pour
prononcer cette sanction, mais un transfert de compétence a été organisé par le
décret n° 82-635 du 21 juillet 1982 (52) pris en application de l’article 3 du décret
n° 82-389 du 10 mai 1982 et de l’article 3 du décret n° 82-390 du 10 mai 1982,
relatif aux pouvoirs des commissaires de la République sur les services des affaires
maritimes. En ce qui concerne le blâme et la réprimande l’administrateur des af-
faires maritimes est compétent selon l’article 13 du décret de 1969, mais en accord
avec l’article 4 du décret n° 82-635 le préfet de département doit être considéré
comme compétent pour prononcer ces sanctions.
Il apparaît nettement à la lumière des développements précédents qu’un désé-
quilibre existe entre une quasi-absence de sanction applicable au pilote en service
à bord d’un navire et des sanctions qui, pour des comportements ou agissements
hors service, peuvent paraître sévères mais dont la mise en œuvre est délicate.
Cela démontre, l’inadaptation de l’article 13 du décret du 19 mai 1969, et les
pilotes maritimes, par l’intermédiaire de la FFPM, face à ce constat, ont souhaité
travailler avec l’Administration afin de le réformer.
Réforme de l’article 13 du décret de 1969
Le pilote n’est pas un employé de la station de pilotage ou du syndicat et par
conséquent pas plus un licenciement que des mesures disciplinaires issues du droit
du travail ne lui sont applicables. Certaines mesures internes (53), très limitées,
sont cependant possibles. Afin de respecter le parallélisme des formes, il faudrait
que le préfet de région puisse retirer sa commission au pilote. La question de la
création d’un « conseil de l’ordre » consultatif au niveau fédéral a été soulevée et
rapidement écartée. Même s’il existe une Commission de conciliation fédérale,
sans pouvoir de sanction, la FFPM n’a en fait aucun pouvoir disciplinaire, seule
l’autorité de tutelle pouvant remettre en cause la commission dont bénéficie un
pilote. D’où une réforme d’ensemble de cet article envisagée et soumise par la
FFPM à son autorité de tutelle (54).
La première des réformes envisagée consiste à clarifier l’autorité compétente pour
nommer et révoquer un pilote. L’article 9, du décret n° 69-515 du 19 mai 1969
qui traite du recrutement des pilotes, ne précise pas l’autorité chargée de nommer
un pilote après sa réussite au concours. Par renvoi à différents décrets, la nomina-
tion des pilotes est effectuée par le préfet de région territorialement compétent.
Cependant, pour des raisons évidentes de clarté, la FFPM a proposé l’ajout d’un
(52) Article 3 du décret n° 82-635 : « Les commissaires de la République de région exercent, dans les conditions et sous les
réserves prévues dans le décret n° 82-390 du 10 mai 1982 précité, les pouvoirs précédemment détenus par les directeurs
des affaires maritimes figurant à l’annexe au présent décret. » Cette annexe cite les pouvoirs transférés aux préfets de région
dont la nomination des pilotes ainsi que la suspension de dix jours au plus du décret de 1969.
(53) Dans certaines stations, il existe une commission d’aptitude qui peut autoriser le chef du pilotage à procéder à une
adaptation des navires au pilote, en fonction des compétences de ce dernier. Il ne s’agit pas d’une sanction mais d’une mesure
permettant à un pilote de progresser et de se perfectionner pour offrir in fine le meilleur service possible.
(54) Un groupe de travail Administration/pilotage de travaillant sur les propositions FFPM avait été instauré.

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alinéa à l’article 9 du décret de 1969 (55). La révocation d’un pilote ne pouvant
être prononcée, conformément à l’article 13 du décret de 1969, qu’après avis d’un
conseil de discipline (56), et par le ministre des transports, la FFPM a proposé que,
comme pour la nomination d’un pilote, le préfet de région soit compétent pour
sa révocation, sur proposition du directeur régional des affaires maritimes après
avis d’un conseil de discipline dont la composition serait directement fixée par
l’article 13 du décret de 1969.
La deuxième réforme à considérer est l’unification des deux régimes disciplinaires
provenant de la prise en compte du fait qu’un pilote est en service à bord d’un navire
ou non. La troisième réforme proposée consiste à réduire à trois le nombre des
sanctions disciplinaires afin de supprimer la réprimande. La quatrième proposition
est l’introduction d’une procédure d’urgence, afin qu’un comportement déviant
ne mette en danger la communauté portuaire et maritime (57).
(À suivre)

(55) Proposition : « VII. Les pilotes sont nommés par décision du préfet de région désigné à l’annexe V du décret n° 97-156 du
19 février 1997 portant organisation des services déconcentrés des affaires maritimes ».
(56) Ce conseil de discipline est institué et sa composition définie par l’article 23 du décret n° 60-1193 du 7 novembre 1960
sur la discipline à bord des navires de la marine marchande ; cet article renvoi, au cas où il s’agit de statuer sur un pilote, à
l’article 14 (abrogé) de la loi du 28 mars 1928 qu’il faut entendre comme l’article 13 du décret de 1969.
(57) Une partie de l’article 13 pourrait être intitulée « Mesures d’ordre » et démarrer ainsi : « Mesures d’ordre : Lorsque la
nature des faits reprochés au pilote est susceptible de présenter un danger grave et immédiat pour la sécurité de la navigation, du
port ou des navires servis, le directeur départemental des affaires maritimes peut suspendre sans délai le pilote de ses fonctions pour
une durée maximale de trente jours. … ».

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