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BTS – CULTURE GÉNÉRALE ET EXPRESSION – Durée 4h00

DE LA MUSIQUE AVANT TOUTE CHOSE ?


PREMIÈRE PARTIE : SYNTHÈSE (/ 40 points)

Vous rédigerez une synthèse objective, concise et ordonnée des documents suivants :

Document 1 : Élizabeth Giuliani, Musique et prison, 2012


Document 2 : Gérard de Nerval, « Fantaisie », dans Sylvie suivi des Chimères et d’Odelettes,
J’ai Lu, coll. « Librio », 2005
Document 3 : Éric-Emmanuel Schmitt, Ma vie avec Mozart, 2005,
Document 4 : Composition VI, Wassily Kandinsky, 1913

DEUXIÈME PARTIE : ÉCRITURE PERSONNELLE (/ 20 points)

Vous répondrez à cette question d’une façon argumentée en vous appuyant sur les documents du
corpus, vos lectures et vos connaissances personnelles.

La musique est-elle, selon vous, un moyen de s’éloigner du quotidien et du réel ?

DOCUMENT 1
[La musique souffle où elle veut]

Libre comme l’air. La musique se joue des obstacles et, en particulier, traverse les murs de la prison.
Deux artistes, l’un composant pour l’opéra, Giuseppe Verdi (1813-1901), l’autre réalisant pour le
cinématographe, Robert Bresson (1901-1999), ont rendu particulièrement sensible l’étroite analogie
entre l’écoute musicale et l’aspiration à l’évasion. Et, au-delà, jouant l’un comme l’autre de
l’association-dissociation entre les perceptions de l’espace et du son, ils ont manifesté la faculté
libératrice de la musique qu’ils inscrivent dans leurs récits eux-mêmes. Inaugurant la fin tragique de
son opéra Le Trouvère (1853), Giuseppe Verdi place un superbe édifice musical et dramatique, le
célèbre « Miserere ». Manrico, noble Aragonais que poursuit une malédiction familiale et politique
fatale, est la proie innocente – comme si souvent chez le compositeur italien dont le nom devint le sigle
de la résistance nationale à l’oppression autrichienne – de la tyrannie jalouse d’un rival le Conte de
Luna – son demi-frère, ils l’ignorent encore tous deux. Enfoui dans un cachot souterrain, il échappe à
la vue de Leonora venue le délivrer mais sa voix lui adressant de derniers serments arrive jusqu’à elle.
De cette échappée musicale naît un instant de véritable communion que souligne, et sacralise même,
l’apparition lointaine d’un chant choral et religieux.

Élizabeth Giuliani, Musique et prison, 2012

DOCUMENT 2
[Un voyage dans le temps]

Il est un air pour qui je donnerais Tout Rossini *, tout Mozart * et tout Weber *, Un air très vieux,
languissant et funèbre, Qui pour moi seul a des charmes secrets ! Or, chaque fois que je viens à
l’entendre, De deux cents ans mon âme rajeunit… C’est sous Louis treize ; et je crois voir s’étendre
Un coteau vert, que le couchant jaunit. Puis un château de brique à coins de pierre, Aux vitraux teints
de rougeâtres couleurs, Ceint de grands parcs, avec une rivière Baignant ses pieds, qui coule entre des
fleurs ; Puis une dame, à sa haute fenêtre, Blonde aux yeux noirs, en ses habits anciens, Que, dans une
autre existence peut-être, J’ai déjà vue… et dont je me souviens !

Gérard de Nerval, « Fantaisie », dans Sylvie suivi des Chimères et d’Odelettes, J’ai Lu, coll. «
Librio », 2005, p. 79.

DOCUMENT 3
[Une géographie imaginaire de la musique]

Cher Mozart, Il n’y a pas une histoire de la musique mais une géographie de la musique. Sur une
mappemonde multicolore existent plusieurs continents, le continent Bach *, le continent Mozart *, le
continent Beethoven *, le continent Wagner *, le continent Debussy, le continent Stravinski… Parfois
des océans massifs peints en bleu profond les séparent ; parfois, seul un détroit étroit marque la
frontière, comme entre Debussy et Stravinski ; plus rarement, les territoires se chevauchent en raison
d’une continuité géologique, ainsi Mozart et Beethoven partagent-ils un fleuve comme délimitation.
Non loin des masses continentales se détachent certaines îles plus ou moins importantes : l’île Vivaldi
ou la péninsule Haendel autour de Bach ; les archipels Schumann ou les atolls Chopin aux environs de
Beethoven. De temps en temps, à la faveur d’un raz-de-marée, on doit redessiner les cartes car, s’il est
rare que des territoires disparaissent, il est courant que de nouveaux émergent. Si la musique constitue
une géographie, cela signifie que nous sommes devenus des voyageurs. Nos pérégrinations musicales
n’ont rien d’une visite guidée, linéaire, fastidieuse qui emprunterait le chemin des siècles ; elles
relèvent plutôt de raids libres, imprévus, imprévisibles, de sauts désordonnés effectués par lestage en
parachute. Un jour chez Mozart, l’autre chez Debussy… Cette luxueuse fantaisie – avoir accès à tout –
, les techniques modernes nous la permettent. On ne découvre ni on n’aime les compositeurs dans
l’ordre successif où ils sont apparus. Et si je me sens bien chez toi, Mozart, cela ne signifie pas que
j’éprouve la nostalgie de ton temps ni que j’ai une sensibilité de ton époque puisque, une heure plus
tard, je séjournerai chez Messiaen en passant par Ravel. Cela dément de surcroît cette absurde notion
d’un progrès en musique, comme si Schoenberg avait quelque chose de plus que Bach… Sur le globe
de la musique, il n’y a que des univers…

Éric-Emmanuel Schmitt, Ma vie avec Mozart, 2005, p. 151-153.

DOCUMENT 4

Composition VI, Wassily Kandinsky, 1913

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