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Université de Carthage
Institut des Hautes Etudes Commerciales de Carthage
RAPPORT
de Mémoire de Fin d’Études
SUJET :
LE DOMAINE D’INTERVENTION DE
L’EXPERT-COMPTABLE DANS LES ENTREPRISES EN
DIFFICULTÉ ÉCONOMIQUE
À ma mère Ratiba,
Qui m’a comblée de son soutien et m’a voué un amour inconditionnel
Tu es pour moi un exemple de courage et de sacrifice continu
Que cet humble travail témoigne mon affection et mon éternel attachement
C’est avec mon enthousiasme le plus vif et le plus sincère que je voudrais rendre mérite
à tous ceux qui m’ont aidée à mener à bien ma mémoire de fin d’études.
Je présente aussi mes vifs remerciements à tous les membres de jury d’avoir accepté de
juger mon travail. Veuillez trouver ici l’expression de mon profond respect.
Je tiens à remercie également tous mes enseignants à l’institut des Hautes Études
Commerciales de Carthage pour la formation qu’ils m’ont donnée.
Finalement, j’espère que ce travail sera à la hauteur de la confiance qu’ils m’ont donnée.
SOMMAIRE
_____________________________________________________________________________________
BIBLIOGRAPHIE ............................................................................................................. 76
ANNEXE ............................................................................................................................ 86
INTRODUCTION GÉNÉRALE
Introduction générale
Lorsqu’une entreprise disparaît, c’est à la fois un ordre économique qui est perturbé, mais
aussi un ordre social qui est troublé. La passation d’une entreprise en situation de difficulté
économique constitue un événement terrible puisque ses conséquences sont assez graves tant
sur le plan financier par le non-recouvrement des dettes des fournisseurs, des établissements
bancaires, des pouvoirs publics, que sur le plan humain par la perte des emplois. Il est donc
normal que la santé de l’entreprise préoccupe les pouvoirs publics sur tous les niveaux et que
le législateur consacre aux entreprises en difficulté des solutions spécifiques afin de les lui
permettre de faire face aux situations désastreuses.
Le droit des entreprises en difficulté ou le droit des procédures collectives s’inscrit dans ce
cadre, dans la mesure où il fixe le régime juridique applicable aux entreprises qui affrontent des
difficultés et déterminent les procédures qui lui sont applicables.
Le régime juridique de ces entreprises fait apparaître une certaine évolution historique
permettant de distinguer entre la période du Code de commerce, la période de la loi du 17 avril
1995 relative au redressement des entreprises en difficulté économique et celle de la loi du 29
avril 2016 relative aux procédures collectives. Les dispositions du code de commerce avant la
promulgation de la loi de 1995 n’étaient plus adaptées au contexte économique ni aux situations
auxquelles elles étaient applicables. Le législateur a décidé ainsi de passer d’une conception
classique du droit des procédures collectives à une conception moderne à partir de 1995.
2|P a g e
Introduction générale
L’environnement de l’entreprise en difficulté est une matière riche, parfois complexe qu’il
convient de bien maîtriser afin de sauver l’entreprise. 1 Par conséquent, ces intervenants doivent
avoir des compétences techniques et des connaissances dans plusieurs domaines.
Le défaut des dirigeants d’entreprises est bien souvent d’attendre toujours le dernier moment
soit parce qu’ils ne sont pas en mesure de situer le niveau de difficulté de son entreprise soit
parce qu’ils ne peuvent pas identifier les mesures adéquates prévues par la loi.
Ces facteurs, et bien d’autres peuvent entrainer la fermeture des entreprises qui sont encore
viables.
Dans cet environnement indéniablement complexe pour les dirigeants et en absence d’une
approche méthodologique ou d’un guide pratique des procédures collectives, l’expert-
comptable est le mieux placé pour les guider et les accompagner dans le sauvetage de leurs
entreprises. Une recherche portant sur l’approche d’accompagnement des entreprises en
difficulté par les experts-comptables peut-être d’une grande utilité aussi bien pour les
professionnels que pour les entreprises.
1
Ordre des experts-comptables français, « Guide de l’accompagnement des entreprises en difficulté », édition 2018, p3.
2
www.tustex.com, site boursier et économique Tunisien, article publié le 04/02/2019.
3|P a g e
Introduction générale
Notre projet de fin d’études se propose d’apporter un cadre de réflexion sur le domaine
d’intervention de l’expert- comptable dans le cadre de l’application de la loi n° 2016-36 relative
aux procédures collectives ou en tant qu’accompagnateur des entreprises en difficulté, et ce en
posant la problématique suivante : Quel est le rôle de l’expert-comptable dans les entreprises
en difficulté économique ?
La première partie intitulée « Entreprise en difficulté : concept et cadre juridique » aura une
portée générale, notamment, pour présenter le concept des entreprises en difficulté économique
et les dispositions juridiques de la loi n° 2016-36 relative aux procédures collectives.
Dans la deuxième partie intitulée « Le rôle de l’expert-comptable dans le cadre des procédures
appliquées aux entreprises en difficulté », nous allons étudier d’une manière détaillée les
différentes interventions de ce professionnel comptable tout au long de la procédure de
sauvetage.
4|P a g e
PARTIE 1 : ENTREPRISE EN DIFFICULTÉ :
CONCEPT ET CADRE JURIDIQUE
Introduction de la première partie
La première partie de ce mémoire s’inscrit dans ce cadre dans la mesure où elle vise à présenter
dans un premier lieu le concept d’entreprise en difficulté et d’expliquer, dans un second lieu, le
régime juridique de ces entreprises en Tunisie.
6|P a g e
CHAPITRE 1. CADRE ÉCONOMIQUE ET JURIDIQUE DES
ENTREPRISES EN DIFFICULTÉ
Introduction
Au cours de leur cycle de vie, les entreprises peuvent passer par des périodes de
difficultés, plus ou moins graves. Nombreuses d’entre elles réussissent à accroitre leurs chances
d’existence dans un milieu purement concurrentiel. Cependant, plusieurs d’entre elles ne
peuvent limiter leurs risques, et tombent donc dans les difficultés.
Cependant, sur le plan purement juridique, le législateur a prévu plusieurs indicateurs qui
permettent de déterminer si une société est en difficulté. Ces indicateurs seront développés au
niveau de la deuxième partie de cette section.
3
Achref MAALOUL, mémoire pour l’obtention du diplôme d’expert-comptable, « La détection des entreprises en difficultés
et de la fraude par l’analyse financière », 2017, p10.
4
Loi n° 2016-36 du 29 avril 2016 relative aux procédures collectives, La traduction française de la loi n’est pas encore publiée
au JORT.
7|P a g e
Chapitre 1 : Cadre économique et juridique des entreprises en difficulté
Sur le plan économique, plusieurs auteurs ont essayé de définir la notion d’entreprise en
difficulté. JF Daigne, par exemple, retient trois concepts dans son livre « Management en
période de crise, aspect stratégique, financiers et sociaux » pour la définir. 5
Premièrement, une entreprise en difficulté est une entreprise non rentable en état de cessation
de paiement. En effet, la cessation de paiement est considérée comme étant « l’incapacité de
faire face à son passif exigible au moyen de son actif disponible ».
Enfin, une entreprise peut être en difficulté sans pour étant être en état de cessation de paiement.
Il s’agit d’une entreprise saine vulnérable qui en cas de changement de la conjoncture peut se
retrouver face à des graves difficultés pouvant entraîner la cessation de paiement.
Les indicateurs de détection des entreprises en difficulté sont prévus par le code de
commerce, le code des sociétés commerciales, le décret gouvernemental n° 2018-463 du 31 mai
2018 relatif à la détermination des critères et procédures de notification des signes précurseurs
des difficultés économiques et par la norme internationale d’audit ISA 570.
1.2.1 Indicateurs prévus par le code de commerce et le code des sociétés commerciales
Les principaux critères de difficultés prévus par le code de commerce ou également la loi
n° 2016-36 relative aux procédures collectives6 sont : le non-paiement des dettes, la perte de ⅓
du capital social, la présence de tout acte menaçant la continuité de l’activité et tous les signes
précurseurs des difficultés économiques qui peuvent entraîner, si elles persistent, la cessation
de paiement7.
Quant au code des sociétés commerciales, il définit les entités en difficulté économique à partir
de la situation nette comptable. En effet, pour les sociétés anonymes, par exemple, l’article 388
de ce code stipule que : « Si les comptes ont révélé que les fonds propres de la société sont
5
Daigne Jean-François, « Management en période de crise, aspect stratégique, financiers et sociaux », édition d’organisation,
Paris, p. 25.
6
Abrogeant la loi de 1995, la loi de 2016 l’a remplacé en intégrant le code de commerce.
7
Article 418 du code de commerce.
8|P a g e
Chapitre 1 : Cadre économique et juridique des entreprises en difficulté
devenus en deçà de la moitié de son capital en raison des pertes, le conseil d’administration ou
le directoire doit dans les quatre mois de l’approbation des comptes, provoquer la réunion de
l’assemblée générale extraordinaire… ».
La notion de fond propre indiquée au niveau de cet article correspond à « la somme des apports
(capital social et prime d’émission, d’apport ou de fusion), des écarts d’évaluation, des réserves,
du report à nouveau créditeur, du bénéfice de l’exercice…. Quant au capital, il s’agit de son
montant nominal et non de la somme libérée. »8
Les critères généraux s’appliquent à toutes les personnes soumises à l’obligation de notification
au sens de l’article 419 du code de commerce. Il s’agit notamment du dirigeant ou du
propriétaire de l’entreprise, des associés détenant au moins 5 % du capital, s’il s’agit d’une
société de capitaux ou d’une société à responsabilité limitée ou des services externes.
Ces critères se divisent en critères économiques et critères financiers9.
Quant aux critères économiques de notification, ils sont liés aux activités de la société et à son
environnement tel que, par exemple, la démission des cadres et agents de grands savoir-faire.
Ils concernent, également, la perte d’un marché, fournisseur ou client ayant un impact capital
sur l’activité de l’entité, le non-renouvellement d’une autorisation administrative nécessaire à
l’exercice de l’activité, l’incapacité à suivre une évolution technologique, etc.10
8
Mellouli Slaheddine et Frikha Sami, « les sociétés commerciales », la maison du livre, 2013, p.334.
9
Art. 3 du décret gouvernemental n° 2018-463 du 31 mai 2018.
10
Art. 5 du décret gouvernemental n° 2018-463 du 31 mai 2018.
9|P a g e
Chapitre 1 : Cadre économique et juridique des entreprises en difficulté
En ce qui concerne les critères spéciaux, ils s’appliquent aux intervenants soumis à l’obligation
de notification à la commission de suivi des entreprises économiques et qui sont mentionnés à
l’alinéa 3 de l’article 419 du code de commerce, notamment les services d’inspection du travail
les services de contrôle des impôts, la CNSS, les banques et les institutions financières.
L’inspection de travail, par exemple, doit notifier la commission de suivi en cas de « retard
répétitif dans le paiement des salaires ou non-paiement des primes et avantages périodiques et
saisonniers pour une période dépassant les trois mois »11.
Quant aux services du contrôle fiscal, ils doivent alerter la commission dans le cadre « des
informations disponibles suite aux opérations de contrôle fiscal approfondi se basant sur la
comptabilité notamment dans l’hypothèse de baisse du chiffre d’affaires de manière continue
durant les trois dernières années, à un taux égal ou supérieur à 30 % »12.
Pour les banques et les institutions financières, ils doivent notifier la commission notamment
dans le cas « d’ancienneté des créances non recouvrées en principal ou en intérêts pour une
période qui dépasse 180 jours »13.
11
Art. 8 du décret n° 2018-463 du 31 mai 2018.
12
Art.11 du décret n° 2018-463 du 31 mai 2018.
13
Art.12 du décret n° 2018-463 du 31 mai 2018.
14
International standards on Auditing, Le Conseil de l’Ordre des Experts Comptables de Tunisie a décidé en 2010 d’adopter
les normes internationales d’audit (ISA).
10 | P a g e
Chapitre 1 : Cadre économique et juridique des entreprises en difficulté
Marquée par une conception classique basée sur la sanction du débiteur malhonnête en
le déclarant en faillite et le paiement des créanciers en premier lieu sans prendre en
considération l’intérêt de l’entreprise et de la collectivité, la période des procédures collectives
avant la promulgation de la loi de 1995 a été régie par le Code de commerce qui prévoit deux
11 | P a g e
Chapitre 1 : Cadre économique et juridique des entreprises en difficulté
Le concordat préventif était considéré comme étant une procédure de conciliation. Il s’agit d’un
accord à l’amiable entre le débiteur et ses créanciers pour le paiement des créances avec la
possibilité de prévoir des remises de créance ou un rééchelonnement de paiement. Il est
applicable aux débiteurs de bonne foi qui passent par des difficultés économiques, sans pour
autant être en état de cessation de paiements. 15
Quant à la faillite, elle était considérée comme étant une sanction du débiteur qui a trahi la
confiance de ses créanciers. C’est une procédure qui vise la liquidation des biens du débiteur
failli et elle ne s’applique que pour les entreprises qui se trouvent en état de cessation de
paiement16.
Le législateur tunisien a adopté en 1995 la loi n° 1995-34 qui porte sur le redressement
des entreprises en difficulté économique. Avec la promulgation de cette loi, on est passé d’un
droit qui vise le paiement des créanciers et la sanction du débiteur défaillant en le déclarant en
faillite sans pour autant prendre en considération l’intérêt de l’entreprise à un droit qui a pour
objectif primordial le redressement de celles qui sont viables. La faillite est devenue ainsi une
procédure secondaire à laquelle on ne peut recourir, malgré la cessation de paiements du
débiteur, qu’en cas d’échec de la procédure de redressement ou d’impossibilité de redresser
l’entreprise par application de cette loi.
La loi de 1995 a fait l’objet de deux modifications. D’abord en 1999 par la loi n° 99-36 du
15/7/1999. Ensuite, en 2003 par la loi n° 2003-79 du 29/12/2003.
15
Art 413 à 444 du code de commerce, Titre abrogé par la loi n° 95-35 du 17 avril 1995 relative au redressement des entreprises
en difficulté économique.
16
Art. 591 à 596 du code de commerce, Titre abrogé par la loi n° 95-35 du 17 avril 1995 relative au redressement des entreprises
en difficulté économique.
12 | P a g e
Chapitre 1 : Cadre économique et juridique des entreprises en difficulté
Cette loi repose sur quatre procédures qui s’étalent dans le temps. Il s’agit respectivement de la
notification des signes précurseurs, de la procédure de règlement amiable, de règlement
judiciaire et de la liquidation judiciaire.
Ces procédures sont appelées collectives, contrairement aux procédures individuelles, dans la
mesure où ils permettant aux créanciers de l’entreprise d’agir d’une manière collective et
organisée.
Dans une reprise presque intégrale des dispositions de l’article 1er de la loi de 1995, l’article 415
du code de commerce dispose que « Le régime de redressement tend à aider les entreprises qui
connaissent des difficultés économiques à poursuivre leurs activités, à y maintenir les emplois
et à payer leurs dettes ».
Il en ressort de la lecture de l’article précité que les objectifs du régime de redressement sont
liés l’un à l’autre et que la poursuite de l’activité de l’entreprise en difficulté constitue l’objectif
primordial du législateur. En effet, le maintien de l’emploi au sein de l’entité ne peut être garanti
qu’à travers la poursuite de l’activité et vice-versa. Si ces deux objectifs sont réunis, le paiement
des créanciers peut être assuré. Toutefois, le sauvetage de l’entreprise dépend du degré des
sacrifices que ces derniers consentent au profit de cette entreprise.
Par ailleurs, par la promulgation de cette loi, le législateur ne fait plus de la faillite une solution
secondaire, mais au contraire il permet au juge de la prononcer chaque fois que ses conditions
sont réunies pendant n’importe quelle phase de la procédure de redressement 17.
Les dispositions juridiques de cette loi sont développées au niveau du deuxième chapitre de ce
mémoire.
17
Art. 433 du code de commerce.
13 | P a g e
Chapitre 1 : Cadre économique et juridique des entreprises en difficulté
L’article 416 du code de commerce tel que modifié par la loi n° 2016-36 relative aux
procédures collectives prévoit que les dispositions relatives au redressement des entreprises en
difficulté « s’appliquent à toute personne morale, ainsi que toute personne physique assujettie
au régime d’imposition réel, exerçant une activité commerciale, au sens de l’article 2 du présent
code ou artisanale, ainsi qu’à toutes les sociétés commerciales par la forme exerçant une activité
agricole ou de pêche. Sont exclus des dispositions de ce code, les établissements et les
entreprises publiques conformément à la loi n° 89-9 du premier février 1989 relative aux
participations, entreprises et établissements publics. »
En outre, l’article 475 du même code ajoute que « Le tribunal prononce la faillite des personnes
visées par l’article 416, ainsi que tout commerçant en cessation de paiement et en situation
désespérée. »
Une lecture synthétique de ces deux articles permet de distinguer plusieurs critères d’éligibilité
et d’exclus du régime des procédures collectives.
À partir des dispositions de l’article 416 ci-dessus cité, pour pouvoir bénéficier de
l’ouverture du régime des procédures collectives, l’entreprise doit, premièrement, exercer une
activité commerciale, artisanale ou agricole.
En effet, on entend par commerçant, celui qui exerce l’une des activités citées à l’article 2 du
code de commerce à savoir les activités de « production, circulation, spéculation ou entremise »
exercées à titre professionnel. L’artisan est celui qui accomplit, à titre professionnel, son travail
manuellement sans se livrer à des actes de spéculation 18 . Quant à l’activité agricole, le
bénéficiaire doit l’exercer dans le cadre d’une société commerciale par la forme à savoir une
société au nom collectif, société anonyme, société à responsabilité limitée ou société
unipersonnelle à responsabilité limitée.
En outre, l’entreprise doit être assujettie au régime d’imposition réel. En effet, les personnes
soumises à ce régime doivent respecter plusieurs obligations fiscales, dont notamment, la tenue
d’une comptabilité conforme aux dispositions du système comptable des entreprises
18
Art. 16 de la n° 2005-15 du 16 février 2005 relative à l’organisation des secteurs des métiers.
14 | P a g e
Chapitre 1 : Cadre économique et juridique des entreprises en difficulté
l’établissement d’un inventaire physique au moins une fois par exercice 19, la conservation des
pièces comptables au moins pour une période égale à 10 ans 20, etc.
Ce régime s’applique obligatoirement aux sociétés. Quant aux personnes physiques, elles
peuvent bénéficier du régime forfaitaire, mais à condition de répondre à certaines conditions
prévues par la réglementation tunisienne. Par conséquent, pour pouvoir bénéficier de
l’ouverture des procédures collectives l’entreprise doit aussi faire preuve d’une certaine
régularité et organisation de sa situation comptable et démontrer une certaine transparence
financière vis-à-vis de l’administration fiscale.
Outre les critères généraux ci-dessus mentionnés, la loi n° 2016-36 relative aux procédures
collectives a cité d’autres critères d’éligibilités spécifiques à chaque type de procédure. Ces
critères se rapportent au degré de difficulté de l’entreprise. En effet, on peut parler de plusieurs
états ou degrés de difficultés qui passent du remédiable à l’irrémédiable. Pour les difficultés
remédiables, elles donnent lieu à l’application de procédures préventives et de règlement
judiciaires. Quant aux difficultés irrémédiables, ils donnent lieu à la déclaration de la faillite du
débiteur. Ces critères spécifiques sont développés au niveau de la deuxième partie du mémoire.
En vertu des dispositions de l’article 416 alinéa 2 ci-dessus cité, les entreprises qui sont
hors champ de ce régime sont, premièrement, celles qui ne remplissent pas les conditions
d’éligibilité générales, ci-dessus mentionnées, ou spécifiques à chaque type de procédures.
Quant aux entreprises et les établissements publics, elles sont « les établissements publics à
caractère non administratif et dont la liste est fixée par décret, les sociétés dont le capital est
entièrement détenu par l’État, les collectivités locales, les établissements publics et les sociétés
dont le capital est détenu entièrement par l’État à plus de 50 % chacun individuellement ou
conjointement. Sont considérées participations publiques, les participations publiques, les
participations de l’État, des collectivités locales, des établissements publics et des sociétés dont
le capital est entièrement détenu par l’État »21.
19
Art. 17 de la Loi 96-112 du 30 décembre 1996 relative au système comptable des entreprises
20
Art. 25, Loi n° 96-112 du 30 décembre 1996 relative au système comptable des entreprises
21
Art. 8 de la 96-74 du 29 juillet 1996, modifiant et complétant la loi n° 98-9 du 1er février 1989 relative aux participations et
entreprises publiques telle que modifiée et complétée par la loi n° 94-102 du 1er août 1994.
15 | P a g e
Chapitre 1 : Cadre économique et juridique des entreprises en difficulté
Conclusion
Dans ce chapitre introductif, nous avons commencé par expliquer la notion d’entreprise
en difficulté économique. Ensuite, nous avons énuméré les différents indicateurs de détection
des difficultés. Puis, nous avons présenté l’évolution législative en matière d’entreprise en
difficulté. Finalement, nous avons explicité le champ d’application des procédures collectives.
Le régime juridique applicable aux entreprises en difficultés économiques sera développé dans
le chapitre suivant.
16 | P a g e
CHAPITRE 2. LES RÈGLES JURIDIQUES RELATIVES AUX
PROCÉDURES COLLECTIVES
Introduction
Dans cette section, nous allons présenter les deux composantes de la procédure préventive
à savoir la procédure d’alerte et la procédure amiable.
La procédure d’alerte consiste à découvrir des indices de difficultés appelés « les signes
précurseurs » et ce afin d’organiser discrètement et rapidement une résistance efficace22. Cette
procédure vise à « tirer la sonnette d’alarme » à chaque fois que l’entreprise passe par des
difficultés23. Néanmoins, il faut que l’entreprise ne soit pas en état de cessation des paiements.
Cette loi a prévu deux types d’alertes : une alerte interne et une autre externe.
L’alerte interne peut être faite par le propriétaire de l’entreprise individuelle, son
dirigeant, l’un des associés ou par le commissaire aux comptes.
D’après l’article 419 du code de commerce, le dirigeant ou le chef d’entreprise doit aviser la
commission de suivi des entreprises économiques des indices des difficultés économiques
rencontrées par l’entreprise et qui peuvent, s’ils persistent, conduire à la cessation de paiements.
22
Guyon Yves, « Entreprises en difficultés- Redressement judiciaire- Faillite », édition Economica, Tome II, Paris, 2003, p. 51.
23
Khaled Salma, cours « droit des procédures collectives », faculté de droit et des sciences politiques de Tunis, p 10.
17 | P a g e
Chapitre 2 : Les règles juridiques relatives aux procédures collectives
En outre, le même article ajoute que la notification des difficultés à la commission de suivi doit
être faite par l’associé ou les associés détenant 5 % au moins du capital de la société en difficulté
si elle a la forme d’une société par actions ou une société à responsabilité limitée et par tout
associé, quel que soit le pourcentage de sa participation, pour les autres sociétés.
Quant aux commissaires aux comptes, l’article 420 du code de commerce lui a chargé d’une
mission accessoire à sa mission principale appelée « mission d’alerte ». Cette mission est
développée au niveau de la deuxième partie de ce mémoire.
En outre, les services de l’inspection de travail la Caisse Nationale de Sécurité Sociale, les
services du contrôle fiscal, les services de la comptabilité publique et du recouvrement et les
établissements financiers doivent aviser la commission de suivi des entreprises économiques
de tous actes constatés par eux et qui peut menacer la poursuite de l’activité de toute entreprise
à laquelle le régime de redressement est applicable. 25 Les critères de notification de ces
différents organes sont fixés par le décret gouvernemental du 31 mai 2018 ci-dessus cité.
Par ailleurs, le président du tribunal joue un rôle important dans la procédure de notification. Il
doit convoquer le dirigeant de l’entreprise ou son propriétaire dès la réception de la notification
des signes précurseurs pour lui demander les mesures qu’il envisage prendre et lui fixe à cet
effet un délai qui ne peut excéder dans tous les cas un mois26.
Le règlement amiable est une procédure préventive qui permet au dirigeant de trouver
des solutions amiables et discrètes, et ce afin d’assurer le redressement des entreprises en
difficulté économique. Cette procédure, est basée essentiellement sur la conclusion d’un accord
24
Art. 418 du code de commerce.
25
Art. 419 du code de commerce.
26
Art. 421 du code de commerce.
18 | P a g e
Chapitre 2 : Les règles juridiques relatives aux procédures collectives
entre l’entreprise en difficulté qui n’est pas en état de cessation de paiement et ses créanciers27.
La réussite de cette procédure dépend essentiellement des sacrifices que ces derniers consentent
au profit de l’entreprise.
Quant à l’état de cessation de paiement, il survient lorsque le débiteur n’arrive plus à faire face
à son passif exigible avec ses actifs disponibles29. Cet état constitue ainsi un degré de difficultés
grave et sérieuse qui nécessite l’intervention du juge. Par conséquent, cette procédure est
ouverte au profit des entités qui n’ont pas encore atteint ce stade de difficulté. Ils continuent de
ce fait à honorer leurs dettes, mais le font difficilement.
27
Art. 422 du code de commerce.
28
Art. 416 du code de commerce.
29
Art. 434 du code de commerce.
19 | P a g e
Chapitre 2 : Les règles juridiques relatives aux procédures collectives
cette hypothèse le dirigeant est appelé à présenter tous les documents mentionnés à l’article 417
du code de commerce30.
S’il s’avère que la demande d’ouverture de la procédure de règlement amiable est fondée,
le président du tribunal de première instance ordonne l’ouverture de la période de négociation
et désigne, de ce fait, un conciliateur.31 Toutefois, le tribunal peut rejeter cette demande s’il
considère que l’entreprise ne répond pas aux conditions de fond et de forme ci-dessus
mentionnés.
La période de négociation est fixée par l’article 425 du code de commerce. Elle est égale
à trois mois prorogeables d’un mois par décision du président du tribunal. Durant lesquelles, le
conciliateur doit veiller à ce que le débiteur et ses créanciers conviennent à conclure un accord
de règlement à l’amiable.
Pendant cette période, l’entreprise continue à exercer son activité professionnelle comme
auparavant et les créanciers préservent leur droit d’agir individuellement contre elle.
Toutefois, l’article 427 du code de commerce prévoit que le président du tribunal peut ordonner
la suspension des procédures d’exécution qui visent le recouvrement d’une créance antérieure
à l’ouverture de cette procédure, si le paiement aboutissait à la détérioration de la situation de
l’entreprise en difficulté, ou la récupération des biens meubles ou immeubles s’il s’avère qu’ils
sont indispensables à l’activité de l’entreprise. La suspension prend fin de manière automatique
dès la prise de décision concernant la demande de règlement.
30
Art. 421 du code de commerce.
31
Art. 424 du code de commerce.
20 | P a g e
Chapitre 2 : Les règles juridiques relatives aux procédures collectives
Les négociations faites par le conciliateur avec les parties peuvent aboutir soit à l’échec à défaut
de conclusion d’un accord de règlement amiable, soit à la réussite. Dans tous les cas, il doit
adresser un rapport au président du tribunal de première instance32.
Cet accord porte généralement sur les modalités de paiement des dettes. Son contenu est
librement déterminé par les parties. Il « peut porter sur l’échelonnement des dettes et leur
remise, sur l’arrêt du cours des intérêts ainsi que sur toute autre mesure »34. Les autres moyens
de redressement peuvent être, par exemple, des sacrifices consentis par les créanciers ou des
engagements présentés par le débiteur.
L’accord de règlement amiable, signé par le débiteur et ses créanciers, doit être homologué par
le juge. Lorsque l’accord est unanime, il donne lieu à une homologation obligatoire.
Néanmoins, lorsqu’il est majoritaire 35 son homologation est facultative36.
Si l’accord est unanime, le président du tribunal doit ordonner la suspension des procédures
d’exécution visant le recouvrement d’une créance antérieure ou la récupération de biens
meubles ou immeubles en raison du non-paiement d’une créance, et ce, jusqu’à la fin de la
période de l’accord.
Tout au long de la période de l’accord, le débiteur doit respecter les engagements qu’il a pris à
sa charge notamment les nouvelles échéances et les modifications à faire dans l’entreprise.
Quant aux créanciers, ils doivent respecter les modes et les échéances de paiement.
32
Art. 425 du code de commerce.
33
Art. 428 du code de commerce.
34
Art. 428 du code de commerce.
35
Acceptation des 2/3 du montant global des dettes
36
Art. 428 du code de commerce.
37
Art. 428 du code de commerce.
21 | P a g e
Chapitre 2 : Les règles juridiques relatives aux procédures collectives
Le règlement judiciaire est une procédure collective de redressement ordonnée pour les
entreprises qui se trouvent en état de cessation de paiement. L’objectif primordial de la mise en
place de cette procédure est le sauvetage des entreprises qui sont encore viables, et ce par
l’application d’un plan de redressement.
Le législateur a exigé à travers les articles 434 et 435 du code de commerce des conditions
de fond et de forme pour l’ouverture de la procédure de règlement judiciaire.
38
Art. 416 du code de commerce.
39
Salgaro Maria, « Droit des entreprises en difficulté », édition Bréal, 2007, P62.
22 | P a g e
Chapitre 2 : Les règles juridiques relatives aux procédures collectives
- L’entrepreneur individuel ;
- Le président directeur général, le directeur général, ou la majorité des membres du
conseil d’administration, lorsque la société est dirigée par un conseil d’administration ;
- Le président du directoire, le directeur général ou encore la majorité des membres de
directoire, si la société anonyme est à directoire ;
- L’associé unique, s’il s’agit d’une société unipersonnelle à responsabilité limitée ;
- Le gérant pour les autres sociétés.
- L’associé ou les associés détenant au moins 5 % du capital de la société s’il s’agit d’une
société par action ou à responsabilité limitée, et tout associé, quelle que soit sa part de
participation s’il s’agit d’une autre société ;
- Les créanciers qui n’ont pas pu recouvrer leurs créances par les voies d’exécution
individuelles.
Par ailleurs, cette procédure peut être ouverte par le tribunal qui se saisit d’office, et ce dans le
cas d’échec de la procédure d’alerte ou celle de règlement amiable.
La période d’observation est fixée par l’article 439 du code de commerce. Elle est égale
à neuf mois, prorogeable une seule fois, pour une durée de trois mois.
40
Article 435 du code de commerce.
41
Article 439 du code de commerce.
42
Article 436 du code de commerce.
23 | P a g e
Chapitre 2 : Les règles juridiques relatives aux procédures collectives
Le juge-commissaire est choisi parmi les juges ayant une compétence dans les affaires
commerciales. Le président du tribunal lui confie le dossier de l’entreprise pour :
- Rédiger un rapport sur la faisabilité du plan de redressement qu’il soumet au tribunal dans
un délai de 15 jours47.
Durant la période d’observation, le dirigeant peut voir ses pouvoirs de gestions limités.
En effet, ce dernier peut, tout au long de cette période, être assisté, contrôlé ou remplacé par
l’administrateur judiciaire48. Deuxièmement, afin d’éviter tout risque de fraude ou de déficience
des dirigeants, le même article ajoute que le débiteur ne peut pas procéder au recouvrement des
créances antérieur à l’ouverture de la procédure ou à la cession des actifs immobilisés, sans
l’autorisation du juge. Enfin, les actes de gestion accomplis pendant la période suspecte49, c’est-
à-dire la période qui s’étale entre la date de cessation de paiement et la date d’ouverture du
règlement judiciaire, peuvent être sanctionnés par la nullité s’il s’avère qu’ils privilégient un
créancier par rapport aux autres ou entravent les chances de redressement 50.
Quant aux créanciers, ils doivent vérifier, dans un délai de 30 jours, si ses créances figurent
parmi l’état des dettes de l’entreprise, et ce pour pouvoir participer aux différentes modalités
d’apurement du passif qui résultent du plan de redressement.
43
Article 444 du code de commerce.
44
Article 441 du code de commerce.
45
Article 441 du code de commerce.
46
Article 444 du code de commerce.
47
Article 452 du code de commerce.
48
Article 443 du code de commerce.
49
L’appellation ou l’expression « période suspecte » ne figure pas dans le Code de commerce. Elle demeure utilisée cependant
par les praticiens.
50
Article 446 du code de commerce.
24 | P a g e
Chapitre 2 : Les règles juridiques relatives aux procédures collectives
Toutefois, si à la suite de la vérification, le créancier constate que sa créance n’est pas inscrite,
il doit demander son inscription à l’administrateur judiciaire chargé d’arrêter la liste des
créanciers, et ce dans le même délai51.
En outre, pendant cette période, le tribunal doit ordonner, selon l’article 449 du code de
commerce, la suspension des procédures d’exécutions individuelles visant le recouvrement
d’une créance antérieure à cette période ou visant la récupération de biens meubles ou
immeubles, ainsi que la suspension du cours des intérêts, des délais de déchéance et des
dommages et intérêts moratoires, et ce pour pouvoir préserver les fonds de la société et parvenir
à se décider sur le sort de l’entreprise.
Par ailleurs, d’après l’article 451 du code de commerce, le législateur peut ordonne la
continuation des contrats en cours pendant cette période. Toutefois, le tribunal peut décider de
mettre fin à certains contrats s’ils ne sont pas nécessaires à la continuité de l’activité de
l’entreprise et que leurs ruptures ne provoquent pas des préjudices au cocontractant.
En outre, la loi accorde aux créances nouvelles la priorité pour être payée avant les autres
créances. Cette priorité favorise les créances nées à partir de l’ouverture de la période
d’observation et qui sont en relation directe avec la poursuite de l’activité 52.
Le plan de redressement doit être élaboré par le débiteur pour être par la suite examiné
par l’administrateur judiciaire et le juge- commissaire 53 et homologué par le président du
tribunal54. Ce plan peut-être, un plan de continuation, un plan de cession, ou un plan de location
ou location-gérance.
Le président du tribunal adopte l’un des plans de redressement, ci-dessus cités, s’il est
convaincu des chances de sauvetage et charge des contrôleurs de son exécution55. Toutefois, il
peut ordonner l’ouverture d’une procédure de faillite s’il apparaît que la situation de la société
s’est dégradée56.
51
Art. 445 du code de commerce.
52
Art. 450 du code de commerce.
53
Art. 452 du code de commerce.
54
Art. 453 du code de commerce.
55
Art. 453 du code de commerce.
56
Art. 454 du code de commerce.
25 | P a g e
Chapitre 2 : Les règles juridiques relatives aux procédures collectives
Le redressement de l’entreprise dans le cadre de l’exécution de ce plan, peut être assuré par
plusieurs mesures :
Cependant, bien que la cession de certains biens puisse constituer une source de financement
de l’entreprise, le débiteur ne peut procéder, selon l’article 455 du code de commerce, à la
cession ou l’hypothèque des actifs immobilisés inscrits au bilan de l’entreprise, sans
l’autorisation du tribunal. En outre, d’après l’article 456 du code de commerce, le plan de
poursuite ne peut prévoir le report des délais de paiement au-delà de sept ans, sauf accord des
créanciers. Cet article ajoute que certaines créances sont exclues de ce report en raison de leurs
natures. Il s’agit des dettes privilégiées et des dettes minimes.
D’après l’article 464 du code de commerce, dès que le cessionnaire exécute tous ses
engagements et paye l’intégralité du prix, il acquiert la propriété de l’entreprise. L’entité cédée
sera assainie de toutes ses dettes, y compris celles qui sont privilégiées, et les créanciers sociaux
57
Art. 455 du code de commerce.
58
Art. 456 du code de commerce.
59
Art. 455 du code de commerce.
60
Art. 456 du code de commerce.
61
Art. 457 du code de commerce.
62
Art. 461 du code de commerce.
63
Art. 463 du code de commerce.
26 | P a g e
Chapitre 2 : Les règles juridiques relatives aux procédures collectives
n’auront aucun droit contre l’acheteur. Par contre, ils peuvent exercer leurs droits sur le prix de
cession.
La procédure à suivre pour ce plan doit être conforme à la procédure énumérée à l’article 460
du code de commerce, et ce par l’élaboration d’un cahier des charges par l’administrateur
judiciaire et la publication de l’appel d’offres.
3.1 La faillite
64
Art. 577 du code de commerce
27 | P a g e
Chapitre 2 : Les règles juridiques relatives aux procédures collectives
- Dans les cas urgents, tels que celui où le débiteur aurait fermé ses magasins et pris la
fuite, l’entreprise aurait été dissoute ou le débiteur aurait fait disparaître une partie
importante de son actif ou de ses avoirs financiers68 ;
- Lorsque la société est entrée en liquidation et que les conditions de la faillite sont
réunies ;
- Si l’entreprise a cessé son activité depuis au moins un an ;
- Lorsque les pertes atteignent la totalité des fonds propres ou s’ils dépassent trois quarts
de ces derniers sur trois années successives, sauf si le juge révèle qu’il existe des chances
sérieuses pour son redressement.
- Si le débiteur a cessé son activité et qu’il ne dispose pas de biens suffisants pour couvrir
les frais de justice.
L’article 477 du code de commerce prévoit que le tribunal peut être saisi par le débiteur
lui-même, et ce lorsque l’entreprise est en état de cessation de paiement et dans une situation
irrémédiable. Ce dernier doit faire une déclaration au greffier du tribunal dans un délai d’un
mois qui suit la cessation de paiement. À défaut de déclaration, il encourt les peines prévues
par l’article 595 du code de commerce 69 . La juridiction peut également être saisie par les
créanciers de la société ou encore le ministère public. En outre, le tribunal peut se saisir
d’office, et ce dans les cas prévus à l’article 476 ci-dessus énuméré.
65
Les critères d’éligibilité au régime de redressement ont été développés dans le premier chapitre de cette première
partie : champ d’application des procédures collectives.
66 Article 475 du code de commerce.
67
Article 476 du code de commerce
68
Art. 482 du code de commerce.
69
Une peine d’emprisonnement de 6 mois et une amende de 5000 dinars.
28 | P a g e
Chapitre 2 : Les règles juridiques relatives aux procédures collectives
Pour que les effets de la faillite puissent se produire, il faut qu’un jugement déclaratif de
faillite soit prononcé par le tribunal territorialement compétent. D’après l’article 414 du code
de commerce, la compétence territoriale appartient au tribunal de première instance dans lequel
se trouve le siège principal de l’entreprise.
70
Art. 484 du code de commerce.
71
Art. 499 du code de commerce.
72
Art. 501 du code de commerce.
73
Art. 507 du code de commerce.
29 | P a g e
Chapitre 2 : Les règles juridiques relatives aux procédures collectives
Finalement, l’entreprise est dissoute. Son activité s’éteint, sauf à ce qu’elle ait été reprise par le
biais d’une cession76. Toutefois, l’absence de passif exigible ou encore l’insuffisance de l’actif
peut motiver la clôture de cette procédure avant son achèvement 77.
Conclusion
Dans le cadre de ce chapitre, nous avons expliqué les différentes procédures applicables
aux entreprises en difficultés économiques, à savoir la procédure d’alerte, de règlement
amiable, de règlement judiciaire et de faillite.
74
Art. 486 du code de commerce.
75
Art. 525 du code de commerce.
76
Art. 546 du code de commerce.
77
Art. 550 du code de commerce.
30 | P a g e
Conclusion de la première partie
Dans le cadre de cette partie introductive, nous avons présenté le concept d’entreprise en
difficulté économique ainsi que son régime juridique applicable en Tunisie.
Le positionnement du sujet dans son contexte nous servira à nous orienter dans notre étude
bibliographique au rôle de l’expert-comptable dans le cadre des procédures appliquées à ces
entreprises, chose à laquelle nous nous intéressons dans la partie suivante.
78
Ordre des experts-comptables français, « Guide de l’accompagnement des entreprises en difficulté », édition 2018, P55.
31 | P a g e
PARTIE 2 : LE RÔLE DE L’EXPERT-COMPTABLE
DANS LE CADRE DES PROCÉDURES APPLIQUÉES
AUX ENTREPRISES EN DIFFICULTÉ
Introduction de la deuxième partie
En étudiant les dispositions de la loi n° 2016-36 relative aux procédures collectives, nous
remarquons que les hypothèses d’intervention de l’expert-comptable dans une entreprise en
difficulté sont nombreuses. Le recours du juge à ce professionnel comptable peut être expliqué
par sa formation pluridisciplinaire et ses compétences multiples.
Dans le cadre de la partie précédente, nous avons présenté le concept et le cadre juridique des
entreprises en difficultés économiques.
Nous nous intéressons au niveau de cette partie au rôle de l’expert-comptable dans le cadre des
procédures appliquées aux entreprises en difficulté. Nous commencerons, au niveau du premier
chapitre, à présenter le rôle préventif de ce professionnel comptable. Ensuite, nous
expliquerons, dans le deuxième chapitre, son rôle curatif et de naufrage.
33 | P a g e
CHAPITRE 1. LE RÔLE PRÉVENTIF DE L’EXPERT-
COMPTABLE
Introduction
79
Décret n° 2006-1546 du 6 Juin 2006, portant application des dispositions des articles 13, 13 bis, 13 ter, 13 quater et 256 bis
du code des sociétés commerciales.
34 | P a g e
Chapitre 1 : Le rôle préventif de l’expert-comptable
L’article 13 du code des sociétés commerciales ajoute que ces sociétés seront dispensées de la
désignation de ce professionnel même pour le premier exercice comptable de leur activité.
Toutefois, les articles 123 et 124 du code des sociétés commerciales stipulent que, pour les
sociétés à responsabilité limitée, la nomination d’un commissaire aux comptes peut être
demandée par les associées à l’assemblée générale ordinaire ou au tribunal ou prévue par une
clause statutaire. Dans ce dernier cas, la nomination devient obligatoire.
La conclusion que nous pouvons tirer de cette brève analyse est que le champ d’intervention du
commissaire aux comptes est très limité. C’est pourquoi le législateur a prévu d’autres organes
chargés de la notification qui, en raison de leurs rapports avec la société, peuvent connaître sa
situation financière de très près et se rendre compte de ses difficultés.
Une lecture approfondie de l’article 420 du code de commerce permet de conclure que la
procédure d’alerte du commissaire aux comptes se déroule d’une manière évolutive.
Dans un premier temps, le commissaire aux comptes doit « demander par écrit au
dirigeant des éclaircissements relatifs à tous actes ou données menaçant l’activité de
l’entreprise »80. Le dirigeant doit, de ce fait, donner des explications nécessaires et proposer des
solutions appropriées, et ce, dans un délai de huit jours à compter de la date de la réception de
cette demande81.
80
Article 420 du code de commerce.
81
Article 420 du code de commerce.
35 | P a g e
Chapitre 1 : Le rôle préventif de l’expert-comptable
Si le commissaire aux comptes reçoit une réponse satisfaisante, la procédure d’alerte reste
confidentielle et prend fin à ce niveau. Cependant, si la réponse lui parait non convaincante ou
en cas de défaut de réponse, il doit passer à la deuxième étape.
Cette première phase de la mission d’alerte a été fortement critiquée pour sa prise en
considération d’une formule générale, données ou actes menaçant la continuité
d’exploitation, à la présentation d’une liste précise de signes précurseurs de difficulté
économique. Il y a lieu de préciser à cet égard que si l’alerte est trop tardive, elle risque de ne
pas pouvoir redresser la situation de l’entreprise et le commissaire aux comptes peut engager
de ce fait sa responsabilité. En effet, le défaut d’alerte est sanctionné pénalement par
l’article 594 du code de commerce. Par contre si elle est précoce, elle risque d’aggraver les
difficultés de l’entreprise en inquiétant les bailleurs de fonds notamment les banques 82.
La norme ISA 570 relative à la continuité de l’exploitation fournit des directives sur la
responsabilité de l’auditeur, dans le cadre d’un audit des états financiers, en ce qui
concerne l’application par la direction de l’hypothèse de continuité d’exploitation lors de
l’établissement des états financiers et son évaluation de la capacité de l’entité à poursuivre son
exploitation 84 et met à sa charge des procédures d’audit complémentaires lorsque des
82
Jaoua Fadhel, cours CES révision comptable, « commissariat aux comptes en Tunisie », p 108
83
Jaoua Fadhel, cours CES révision comptable, « commissariat aux comptes en Tunisie », p 108.
84
Parg. 12 de la norme d’audit ISA 570.
36 | P a g e
Chapitre 1 : Le rôle préventif de l’expert-comptable
Toutefois « en cas d’urgence, il convoque l’assemblée générale des actionnaires »87, et ce dans
le même délai. À défaut de précision des critères d’urgence par le législateur, le commissaire
aux comptes reste le seul chargé d’apprécier l’existence de situation alarmante pour décider la
convocation ou non de l’assemblée générale ordinaire. Cette appréciation repose aussi sur le
jugement professionnel de l’auditeur légal.
Créant une relation directe entre le commissaire aux comptes et l’autorité judiciaire,
l’article 420 du code de commerce lui donne le pouvoir de s’adresser au président du tribunal
lorsque les menaces persistent, et ce dans un délai d’un mois à compter de l’accomplissement
des mesures ci-dessus citées. Une copie du rapport doit être transmise à la commission de suivi
des entreprises économiques88.
Concernant la responsabilité pénale, la loi de 2016 a prévu des sanctions spécifiques applicables
au commissaire aux comptes en tant qu’organe d’alerte. L’article 594 du code de commerce
prévoit que le commissaire aux comptes qui ne déclenche pas cette procédure, malgré sa
85
Parg. 18-21 de la norme ISA 570.
86
Art. 420 alinéas 1 du code de commerce.
87
Art. 420 al. 1 du code de commerce
88
Art 420 al. 2 du code de commerce.
37 | P a g e
Chapitre 1 : Le rôle préventif de l’expert-comptable
connaissance des difficultés de l’entreprise, est sanctionné pénalement par la même sanction
que subit le dirigeant de l’entreprise ou son propriétaire qui ne procèdent pas à l’alerte.
Toutefois, la sanction est uniquement pécuniaire pour le commissaire aux comptes, elle consiste
en une amende variant entre mille et dix mille dinars.
Quant à la responsabilité civile, elle ne peut être engagée que si le plaignant prouve qu’il y a
une faute, un dommage et un lien de causalité entre la faute et le dommage. A priori, cette
responsabilité peut être engagée puisqu’en vertu des dispositions de l’article 83 du code des
obligations et des contrats « la faute consiste, soit à omettre ce qu’on était tenu de faire, soit à
faire ce dont on était tenu de s’abstenir, sans intention de causer un dommage ».
En outre, l’article 272 du code des sociétés commerciales ajoute que le commissaire aux
comptes est responsable des dommages causés par lui. Par conséquent, ce dernier peut engager
sa responsabilité civile.
Rappelons que la procédure de règlement amiable est réservée aux entreprises qui n’ont
pas atteint le stade de cessation de paiement. Si l’entreprise est jugée admissible pour bénéficier
de ce régime, le président du tribunal de première instance ordonne l’ouverture de la procédure
et désigne, de ce fait, un conciliateur.
Cependant, malgré l’importance de l’avis de l’expert en diagnostic qui constitue une pierre
angulaire de la procédure, le législateur, avec la nouvelle réforme du code de commerce
89
Article 10 de la loi n° 2003-79 du 29 décembre 2003, modifiant et complétant la loi n° 95-34 du 17 avril 1995, relative au
redressement des entreprises en difficulté économique.
38 | P a g e
Chapitre 1 : Le rôle préventif de l’expert-comptable
n’a fait aucune indication sur la possibilité de nommer un expert en diagnostic chargé de
l’évaluation de la situation de l’entreprise. En effet, l’article 426 du code de commerce prévoit
que le président du tribunal peut demander des informations sur la situation de l’entreprise
auprès de la commission de suivi des entreprises économiques ainsi qu’auprès de toute
administration ou tout établissement financier. Il peut demander également à la commission de
suivi de procéder au diagnostic et à l’étude du dossier de l’entreprise en question, et ce, dans
un délai ne dépassant pas un mois à compter de la date de sa saisine. Toutes ces informations
seront par la suite transmises par le juge au conciliateur.
Par ailleurs, il convient de préciser que la demande d’expertise peut être sollicitée par le
dirigeant qui prépare la demande d’ouverture de la procédure de règlement amiable ou même
par les organismes prêteurs qui les intéressent de connaître, par leurs propres moyens, la
situation réelle de l’entreprise.
Selon l’article 424 du code de commerce, le conciliateur doit être choisi parmi les personnes se
trouvant sur une liste qui doit être établie par le ministre de la Justice. L’article 13 de la loi de
n° 2016-36 relative aux procédures collectives ajoute que le juge peut choisir ce professionnel
parmi les personnes proposées par le propriétaire de l’entreprise ou par le dirigeant de la société
parmi les avocats à la cassation, ou toute personne qu’il juge capable d’effectuer cette mission
et qui remplit les conditions de compétence, neutralité, objectivité et expérience dans le
domaine des entreprises.
90
Article 424 du code de commerce.
91
L.234-4 du code de commerce français.
39 | P a g e
Chapitre 1 : Le rôle préventif de l’expert-comptable
La mission du conciliateur a été précisée par la loi, elle consiste à favoriser la conclusion
entre le débiteur et ses principaux créanciers d’un accord amiable destiné à mettre fin aux
difficultés de l’entreprise, et ce dans un délai de trois mois prorogeables d’un mois par décision
du juge93.
Toutefois, le conciliateur lui appartient uniquement de conseiller les parties et rapprocher leurs
points de vue. Il est perçu de ce fait comme étant un simple « négociateur’94 par le fait qu’il ne
peut pas présenter aux parties des propositions se rapportant à la sauvegarde de l’entreprise
et ce à la différence au droit français, qui a confié au conciliateur un rôle plus actif dans le
déroulement de cette procédure. En effet, l’article L 611-7 du code de commerce prévoit que le
conciliateur n’a pas seulement pour mission de favoriser la conclusion d’un tel accord, il peut
aussi présenter toute proposition qu’il juge nécessaire et appropriée pour atteindre les objectifs
du redressement à savoir le sauvetage de l’entreprise, la poursuite de l’activité et le maintien
des emplois.
Par ailleurs, l’article ci-dessus cité, prévoit que le conciliateur doit adresser au président du
tribunal un rapport chaque mois et chaque fois qu’il juge nécessaire sur l’état d’avancement de
sa mission et formule toute observation utile. Cet article ajoute que le président du tribunal doit
fixer le montant de ses honoraires qui seront à la charge du débiteur.
92
Elloumi Yadh, mémoire en vue de l’obtention du diplôme d’expert-comptable, « Le rôle de l’expert-comptable dans le
redressement des entreprises en difficulté économique », 1998, P51.
93
Art. 425 du code de commerce.
94
Amara dora, cours « droit des procédures collectives », école supérieure de commerce de Sfax, 2018, p28.
40 | P a g e
Chapitre 1 : Le rôle préventif de l’expert-comptable
Enfin, lorsque le conciliateur n’arrive pas à trouver un terrain d’entente entre le débiteur et ses
créanciers dans les délais requis, ou lorsque l’entreprise se trouve en état de cessation de
paiement, le conciliateur, en vertu des dispositions de l’article 432 du code de
Commerce, informe immédiatement le tribunal qui met fin à sa mission ainsi qu’à la procédure
de règlement amiable et ordonne l’ouverture de la procédure de règlement judiciaire si toutes
ses conditions sont réunies.
La loi n° 2016-36 relative aux procédures collectives a prévu un dispositif pour chaque
niveau de difficulté des entreprises. Toutefois, les dirigeants des entreprises en difficulté ne
souffrent pas uniquement d’un déficit de compétitivité, mais aussi d’un manque
d’accompagnement 96 et c’est pour cette raison et bien d’autres que les cabinets d’expertise
comptable s’orientent aujourd’hui vers le développement des missions de conseils, et ce en
accompagnant les dirigeants pour mettre fin aux difficultés.
95
Art. 424 du code de commerce.
96
Charles-René Tandé, Président du Conseil supérieur de l’ordre des experts-comptables, 72e Congrès de l’Ordre des experts-
comptables français.
41 | P a g e
Chapitre 1 : Le rôle préventif de l’expert-comptable
En outre, l’expert-comptable, après avoir réalisé une évaluation complète de l’entreprise, peut
orienter son client vers les solutions auxquelles elles peuvent prétendre en fonction de sa
situation.
Si la situation de l’entreprise nécessite d’engager des négociations avec les créanciers, l’expert-
comptable peut proposer au dirigeant de demander au président du tribunal l’ouverture d’une
procédure de règlement amiable et il peut de ce fait assister le dirigeant dans la formalisation
de la demande98.
Conclusion
Dans le cadre de ce chapitre, nous avons présenté d’une manière détaillée le rôle
préventif de l’expert-comptable dans les entreprises en difficulté économique.
97
Entreprise ressource planning, il s’agit d’un progiciel de gestion intégré
98
Ordre des experts-comptables français, « Guide de l’accompagnement des entreprises en difficulté », édition 2018, p 181.
42 | P a g e
CHAPITRE 2. LE RÔLE DE L’EXPERT-COMPTABLE DANS
LA PROCÉDURE CURATIVE ET DE NAUFRAGE
Introduction
L’administrateur judiciaire est régi par a loi du 11/11/1997 relative aux liquidateurs,
mandataires de justices, syndics de la faillite, et administrateurs judiciaires. L’article 3 de cette
Loi prévoit que, pour pouvoir exercer ses fonctions, l’administrateur judiciaire doit être inscrit
sur une liste arrêtée par le ministre de la Justice. Cette liste doit comporter leurs noms, prénoms,
spécialités ainsi que leurs domiciles élus.
Pour être inscrit sur cette liste, l’article 4 cette loi exige que le candidat :
43 | P a g e
Chapitre 2 : Le rôle de l’expert-comptable dans la procédure curative et de naufrage
En outre, l’administrateur judiciaire désigné ne doit avoir aucun lien d’intérêt financier
économique ou familial avec le débiteur. En effet, il est interdit que l’administrateur judiciaire
soit un conjoint, un ascendant ou descendant du débiteur, l’un des créanciers de la société, le
commissaire aux comptes, un salarié ayant été employé pendant les 5 dernières années qui
précède l’ouverture de la procédure de règlement judiciaire, ou toute personne ayant un rapport
avec le gérant, le président-directeur général, le directeur général, membre du conseil
d’administration ou du directoire, membre du conseil de surveillance ou associé 99 . Cette
disposition cherche à garantir un minimum de neutralité et d’indépendance de ce professionnel.
99
Art. 440 du code de commerce.
100
Art. 443 du code de commerce.
44 | P a g e
Chapitre 2 : Le rôle de l’expert-comptable dans la procédure curative et de naufrage
En outre, l’administrateur judiciaire, pendant cette période, doit étudier le plan de redressement
proposé par le débiteur. En effet, l’administrateur judiciaire n’est plus chargé d’élaborer le plan
de redressement comme ça a été prévu au niveau de l’ancienne loi103. Avec la nouvelle réforme
du code de commerce introduite par la loi du 29 avril 2016, l’élaboration de ce plan de sauvetage
doit être faite par le débiteur 104. L’administrateur judiciaire intervient conséquemment, selon
l’article 452 du code de commerce, pour examiner le plan, le modifier en cas de besoin, le
finaliser et l’apprécier, et ce, à l’aide des informations dont il dispose soit de l’entreprise ou des
tiers. Il peut également demander l’avis de la commission de suivi sur ce plan.
Enfin, outre les missions susmentionnées, l’administrateur judiciaire est tenu de dresser une
liste des biens de l’entreprise105 ainsi qu’une liste des créanciers106 et il doit, dans les deux mois
qui suivent sa désignation, établir un rapport à l’attention du président de tribunal dans lequel
il présente une étude sur la situation économique, financière et sociale de l’entreprise 107.
101
Art. 443 du code de commerce.
102
Art. 443 du code de commerce.
103
Art. 22 de la loi de 1995-34 relative au redressement des entreprises en difficulté économique.
104
Art. 435 du code de commerce.
105
Art. 442 du code de commerce.
106
Art. 444 du code de commerce.
107
Art 442 du code de commerce.
45 | P a g e
Chapitre 2 : Le rôle de l’expert-comptable dans la procédure curative et de naufrage
En outre, le respect du secret professionnel, en vertu de l’article 21 de la même loi, est une
obligation qui pèse sur l’administrateur judiciaire qui en vertu de laquelle ce dernier doit
s’abstenir de divulguer les secrets dont il a pu avoir connaissance lors de l’exercice de ses
fonctions.
De même, l’article 254 du Code pénal prévoit la peine d’emprisonnement de 6 mois et une
amende pour toutes personnes qui en vertu de sa profession se trouvent dépositaires de secrets.
Lesquelles personnes sont autorisées à se porter dénonciateurs que dans les cas fixés par la loi.
Par ailleurs, l’article 22 de la même loi prévoit que l’administrateur judiciaire n’a pas le droit
de demander son exemption de sa mission sans motif légitime, notamment « pour cause
d’empêchement, de récusation ou autre excuse acceptée par le président du tribunal. ».
Le président du tribunal adopte le plan qui convient avec la situation de l’entreprise et charge
des contrôleurs de son exécution. Ce contrôleur d’exécution peut être soit l’administrateur
judiciaire, soit le représentant des créanciers ou toute autre personne 109.
De ce fait, on peut dire que l’expert-comptable peut être désigné comme étant un contrôleur de
l’exécution de ces plans.
108
Article 455 du code de commerce.
109
Article 453 du code de commerce.
46 | P a g e
Chapitre 2 : Le rôle de l’expert-comptable dans la procédure curative et de naufrage
tribunal110. Il doit lui communiquer un rapport spécial, dont une copie doit être envoyée à la
commission de suivi, chaque fois qu’il le juge nécessaire et un rapport général périodique dans
le délai que lui fixe le juge, mais sans que cela dépasse les 6 mois.
Par ailleurs, rappelons que dans le cas où le président du tribunal adopterait un plan de
poursuite, l’exécution de ce plan peut être opérée par la restructuration de l’actif ou par la
modification du passif. Lors de l’exécution de ces procédures, le contrôleur d’exécution peut
être appelé pour accomplir certaines tâches.
En effet, c’est le contrôleur de l’exécution, en vertu des dispositions de l’article 457 du code de
commerce, qui doit accomplir la procédure d’augmentation de capital.
En outre, cet article ajoute que si le plan de poursuite prévoit une modification des statuts de
l’entreprise, ce dernier reçoit mandat du président du tribunal pour convoquer l’assemblée
générale extraordinaire.
Par ailleurs, si la poursuite de l’activité est accompagnée par la vente de certains biens,
l’article 455 du code de commerce prévoit que le tribunal peut interdire la cession ou
l’hypothèque de certains actifs sans son autorisation. Dans ce cas, ce professionnel doit publier
cette interdiction au Journal officiel de la République Tunisienne, JORT, et l’inscrire au registre
de commerce, aux titres de propriété et aux registres publics.
Par la suite, selon l’article 463 du code de commerce, l’administrateur judiciaire doit collecter
les offres des soumissionnaires et les transmettre au tribunal. Cet article ajoute que, c’est le
contrôleur de l’exécution qui doit notifier le soumissionnaire de l’offre retenue et procéder à
l’accomplissement des procédures de cession dans un délai d’un mois à compter du choix de
110
Article 453 du code de commerce.
111
Art. 460 du code de commerce.
47 | P a g e
Chapitre 2 : Le rôle de l’expert-comptable dans la procédure curative et de naufrage
À la fin de l’exécution du plan de redressement, quel que soit son contenu, le contrôleur de
l’exécution doit communiquer au président du tribunal un rapport dans lequel il précise les
résultats des actes d’exécution. De ce fait, le tribunal ordonne la clôture de la procédure de
redressement, tout en constatant les erreurs et les omissions commises lors de l’exécution112.
Le syndic de la faillite est régi par la loi du 11/11/1997 relative aux liquidateurs,
mandataires de justice, syndics de la faillite et administrateurs judiciaires.
Pour être inscrit sur la liste des syndics de la faillite, le candidat doit remplir les mêmes
conditions que celles exigées pour l’administrateur judiciaire. Ces conditions sont ci-dessus
traitées.
- Conjoint du débiteur ;
- Ascendants, descendants ou parent du débiteur au quatrième rang ;
- Un salarié du débiteur pendant les cinq dernières années précédant le jugement
déclaratif de faillite ;
- La commissaire aux comptes de la société déclarée en faillite.
112
Art. 473 du code de commerce.
113
Art. 502 du code de commerce.
48 | P a g e
Chapitre 2 : Le rôle de l’expert-comptable dans la procédure curative et de naufrage
Puisque l’expert-comptable dispose une compétence pluridisciplinaire, il peut, s’il remplit les
autres conditions ci-dessus citées, être inscrit sur la liste des syndics de faillite.
L’objectif primordial de la faillite est la liquidation 114 des biens du failli pour les
distribuer aux créanciers. Pour atteindre efficacement cet objectif, dès la prononciation de la
faillite, le failli est dessaisi de l’administration de ses biens au profit du syndic de faillite.
Ce dernier devient le seul compétent pour agir en lieu et place du débiteur dessaisi et exerce ses
fonctions sous le contrôle du juge-commissaire115. Les actes que le syndic est appelé à effectuer
pendant cette période devraient se limiter à des actes de pure administration.
Toutefois, l’article 512 du code de commerce, prévoit que le président du tribunal peut autoriser,
à la suite de la demande du syndic, sur un rapport du juge-commissaire, le débiteur failli à
poursuivre son activité si l’intérêt public ou celui des créanciers l’exigent, et ce pour une durée de
trois mois. En absence d’une décision d’autorisation, l’exploitation sera réputée illicite.
Durant cette période, le syndic de faillite peut procéder à la vente des biens périssables116. Il peut
également prélever sur l’actif de la faillite des secours alimentaires pour le débiteur failli 117 .
Toutefois, dans ces deux séries d’hypothèses, puisqu’il s’agit d’actes dépassant la simple
administration, le syndic de faillite ne pourra y procéder qu’après l’obtention d’une autorisation du
juge-commissaire.
114
Art. 539 du code de commerce.
115
Art. 486 du code de commerce.
116
Art. 512 du code de commerce.
117
Art. 513 du code de commerce.
49 | P a g e
Chapitre 2 : Le rôle de l’expert-comptable dans la procédure curative et de naufrage
La loi permet aussi au syndic, en vertu des dispositions de l’article 544 du code de
commerce, la cession des éléments d’actif immobilisé et des stocks.
Pour la vente des biens mobiliers, elle doit être autorisée par le juge-commissaire. Il lui
appartient de décider si la vente doit être faite de gré à gré ou aux enchères publiques.
Si la cession porte sur des biens immobiliers du débiteur, elle doit être également autorisée par
le juge, mais le législateur a précisé qu’en principe la vente doit être faite aux enchères
publiques et que la vente de gré à gré est l’exception et ne doit se faire que sur la base d’une
décision argumentée du président du tribunal118.
Par ailleurs, le syndic doit demander aux associés la libération de leurs apports échus fixés par
les statuts, ou par le procès-verbal d’augmentation de capital119.
Enfin, les sommes qui proviennent des ventes ou des recouvrements effectués par le syndic de
faillite doivent être immédiatement versées par lui à la Caisse des Dépôts et
Consignations, et ce, après déduction de ce que le juge-commissaire aura retenu pour payer les
frais et dépenses120.
Cependant, selon l’article 510 du même code, certains biens peuvent être exclus de la mise sous
scellés. Il s’agit des :
118
Ben Abid Sofien, cours CES révision comptable, « Droit des procédures collectives », Institut Supérieur de Comptabilité et
d’Administration des Entreprises de Manouba, p10.
119
Art. 543 du code de commerce.
120
Art. 528 du code de commerce.
121
Art. 508 du code de commerce.
122
M. Thieriet, « code des faillites et banqueroutes », Paris, p106.
50 | P a g e
Chapitre 2 : Le rôle de l’expert-comptable dans la procédure curative et de naufrage
Ensuite, le syndic doit requiert la levée des scellés et procéder à l’inventaire des biens du failli,
et ce, dans un délai de trois jours, soit de l’apposition des scellés, soit de la date du jugement
de la faillite au cas où cette mesure aurait eu lieu antérieurement 123. Cet inventaire doit être
établi en deux exemplaires, l’un restant entre les mains du syndic, l’autre étant déposé au greffe
du tribunal124.
En outre, si le failli n’a pas déposé son bilan, le syndic y procédera immédiatement à l’aide des
livres et papiers du failli et le déposera au greffe 125.
Par ailleurs, dans les 15 jours de son entrée en activité, le syndic de faillite doit remettre au
juge-commissaire un compte-rendu sommaire qui indique les principales causes et
circonstances de la faillite. Ce compte-rendu, auquel le juge-commissaire joint ses observations
doit être immédiatement remis au ministère public.
Les créanciers sont avertis de la faillite en premier lieu par la publication du jugement.
L’article 530 du code de commerce prévoit que chaque créancier doit remettre au syndic son
titre de créance avec un bordereau indicatif des pièces remises et des sommes réclamées, dans
un délai de 15 jours à compter de l’insertion du jugement au JORT.
À défaut de déclaration dans les délais les créanciers sont avertis par des insertions dans les
journaux et par une lettre recommandée du syndic qu’ils doivent lui remettre leurs titres dans
les 15 jours de la notification126.
Ce délai est augmenté de 60 jours pour les créanciers domiciliés à l’étranger, les créances
fiscales et les cotisations de la CNSS. En l’absence de déclaration dans les délais, le créancier
ne pourra bénéficier d’aucune répartition127.
Ensuite, selon les articles 532 et 533 du code de commerce, le syndic, assisté par les
contrôleurs, procède à la vérification des créances en présence du failli dans un délai de 3 mois,
mais le juge-commissaire peut y proroger dans des circonstances exceptionnelles.
123
Art. 518 du code de commerce.
124
Art. 519 du code de commerce.
125
Art. 515 du code de commerce
126
Art. 531 du code de commerce.
127
Art. 538 du code de commerce
51 | P a g e
Chapitre 2 : Le rôle de l’expert-comptable dans la procédure curative et de naufrage
Si la créance est discutée en tout ou en partie par le syndic, ce dernier en informe le créancier
par lettre recommandée et lui donne un délai de 15 jours pour lui fournir des explications écrites
ou orales.
Une fois la vérification terminée, le syndic doit dresser un état des créances dans lequel il doit
indiquer des propositions d’admission ou de rejet avec indication des créances privilégiés.
Ces propositions seront transmises au juge-commissaire pour prendre une décision pour
chacune des créances. Il peut s’agir d’une décision de rejet, d’admission conditionnelle ou
d’admission pure et simple.
L’état des créances doit, selon l’article 533 du code de commerce, être ensuite déposé au greffe
par le syndic de la faillite.
Le greffier doit immédiatement aviser les créanciers du dépôt de l’état des créances vérifiées
par des insertions dans les journaux et il leur adresse une lettre indiquant pour chacun d’eux la
somme pour laquelle sa créance y figure. En outre, il doit informer les créanciers dont les
créances sont contestées, par pli recommandé avec accusé de réception 128.
La loi n° 2016-36 relative aux procédures collectives n’a envisagé aucune solution qui
puisse permettre la continuité d’exploitation du débiteur. Toutefois, elle a envisagé une solution
principale de la faillite, qui est la liquidation, et deux autres solutions exceptionnelles, qui sont
la clôture de la faillite pour défaut d’intérêt de l’ensemble des créanciers et la clôture pour
insuffisance d’actif.
128
Art. 533 du code de commerce.
129
Art. 540 du code de commerce.
52 | P a g e
Chapitre 2 : Le rôle de l’expert-comptable dans la procédure curative et de naufrage
Après la réalisation de l’actif, le syndic en distribuera le produit entre les créanciers du failli.
Les premiers créanciers qui doivent être payés, conformément à l’article 541 du code de
commerce, sont les salariés. En effet, le syndic doit, dans les 10 jours qui suivent le jugement
de la faillite, procéder au paiement de la partie insaisissable des créances salariales. À défaut
de fonds disponibles, ces créances doivent être payées dès les premières rentrées de fonds.
Enfin, après avoir fait la déduction des frais de la faillite, des frais de secours au failli ou sa
famille et des sommes payées aux créanciers super privilégiés, le syndic doit partager le
reliquat, et ce conformément au classement suivant130 :
Premièrement, lors de l’exercice de cette mission, l’expert-comptable peut orienter son client
vers les solutions de redressements possibles prévues par la loi n° 2016-36 en fonction de sa
situation, et ce, après avoir fait un diagnostic complet de l’entreprise.
Par contre, si l’entreprise est dans une situation irrémédiable l’expert-comptable doit aviser le
dirigeant pour qu’il fasse une déclaration au greffier du tribunal dans les plus brefs délais
130
Art. 569 du code de commerce.
131
Ordre des experts-comptables français, « Guide de l’accompagnement des entreprises en difficulté », édition 2018, p 181.
53 | P a g e
Chapitre 2 : Le rôle de l’expert-comptable dans la procédure curative et de naufrage
car à défaut de déclaration, ce dernier peut encourir une peine d’emprisonnement de 6 mois et
une amende de 5000 dinars132.
Conclusion
132
Art. 595 du code commerce
54 | P a g e
Conclusion de la deuxième partie
Dans les deux premières phases, l’expert-comptable joue un rôle préventif, en tant que
commissaire aux comptes ou conciliateur. Dans la phase de règlement judiciaire, il joue plutôt
un rôle curatif en tant qu’administrateur judiciaire ou un contrôleur de l’exécution. Quant à la
dernière phase, à savoir la liquidation judiciaire, il peut être nommé en tant que syndic de
faillite.
Outre les missions ci-dessus citées, l’expert-comptable, conseiller privilégié des entreprises,
peut effectuer une mission d’accompagnement des entreprises en difficulté économique. Cette
mission sera l’objet de notre troisième et dernière partie.
55 | P a g e
PARTIE 3 : GUIDE D’ACCOMPAGNEMENT DES
ENTREPRISES EN DIFFICULTÉ
Introduction de la troisième partie
L’accompagnement du dirigeant est une source de missions de conseil à forte valeur ajoutée
pour le client qui rencontre des difficultés133 et pour l’expert-comptable qui peut intervenir de
plusieurs manières.
En absence d’une norme qui traite la mission d’accompagnement des entreprises en difficultés
économiques, cette partie a pour objectif de proposer une méthodologie et des outils afin que
les professionnels comptables puissent accompagner les dirigeants de ces entreprises et mettre
fin ainsi aux difficultés.
133
http://sic.experts-comptables.fr, 72e Congrès de l’Ordre des experts-comptables français : quatre axes consacrés au
conseil.
57 | P a g e
CHAPITRE 1. LA MISSION D’ACCOMPAGNEMENT DES
ENTREPRISES EN DIFFICULTÉ
Introduction
Cette mission, sans assurance, n’est pas régie par une norme spécifique. Cependant, elle est
soumise aux grands principes qui régissent la profession. Notamment, le code d’éthique de
l’IFAC134 qui recouvre l’ensemble des principes et règles de déontologies qui gèrent et guident
l’activité de ce professionnel, la norme professionnelle de maîtrise de la qualité, à savoir
l’ISQC 1 135 pour l’organisation et le fonctionnement du cabinet, le code des devoirs
professionnels ainsi que les autres normes produites par la profession et les lois juridiques.
Lors de l’exercice de cette mission, l’expert-comptable ne doit pas s’engager sciemment dans
une affaire, ou une activité qui porte atteinte ou pourrait porter atteinte aux principes
fondamentaux de l’éthique à savoir, l’intégrité, la compétence, la confidentialité ou la bonne
réputation de la profession136.
En effet, l’intégrité signifie que l’expert-comptable doit être droit et honnête lors de l’exercice
de sa mission de conseil137. Il ne doit pas de ce fait être, en connaissance de cause, associé à des
rapports ou à des déclarations significativement fausses ou trompeuses ou fournies d’une façon
irréfléchie.
134
International Federation of accountants.
135
International Standard on Quality Control
136
Par 100.5 du code d’éthique de l’IFAC.
137
Par 110.1 du code d’éthique de l’IFAC.
58 | P a g e
Chapitre 1 : La mission d’accompagnement des entreprises en difficulté
138
Par 140.1 du code d’éthique de l’IFAC.
139
Par 150.1 du code d’éthique de l’IFAC.
140
Par 130.1 du code d’éthique de l’IFAC.
141
Par 210.1 du code d’éthique de l’IFAC.
59 | P a g e
Chapitre 1 : La mission d’accompagnement des entreprises en difficulté
Outre les principes ci-dessus mentionnés, le principe fondamental de la compétence impose une
obligation à l’expert-comptable de n’accepter de fournir que les services pour lesquels il est
compétent.
A cet égard, une prise de connaissance préalable doit être faite par l’expert-comptable, dans le
double but d’apprécier s’il peut accepter cette mission, au regard des textes légaux et
142
Par 100.2 du code d’éthique de l’IFAC
143
Par 210.7 du code d’éthique de l’IFAC.
60 | P a g e
Chapitre 1 : La mission d’accompagnement des entreprises en difficulté
L’expert-comptable est toujours lié à son client par une relation contractuelle. Il répond aux
sollicitations du chef d’entreprise et apprécie s’il peut accepter la mission, auquel cas il présente
une lettre de mission et n’est tenu qu’au cadre défini par ladite lettre144.
Le forme et le contenu de cette lettre peut varier d’une mission à l’autre mais elle doit comporter
dans tous les cas les mentions suivantes :145
Les difficultés que rencontre une entreprise trouvent en général leur origine dans
l’évolution de son mode économique ou encore dans la diminution rapide de son activité et plus
on intervient précocement plus l’entreprise à des chances de se redresser.146
Cependant, il convient de souligner que ce recours n’est pas obligatoire et que le dirigeant peut
choisir de se débrouiller seul.
144
Art. 7 du code de devoirs professionnels.
145
Art. 8 du code des devoirs professionnels.
146
Ordre des experts-comptables français, « Guide d’accompagnement des entreprises en difficulté ». Édition 2018, p 12.
61 | P a g e
Chapitre 1 : La mission d’accompagnement des entreprises en difficulté
Conclusion
62 | P a g e
CHAPITRE 2. LA DÉMARCHE D’ACCOMPAGNEMENT DES
ENTREPRISES EN DIFFICULTÉ
Introduction
Durant cette phase préliminaire, l’expert-comptable doit recueillir des informations sur
l’historique de l’entité, son secteur d’activité, son environnement réglementaire, ses principaux
clients et fournisseur, ses objectifs stratégiques, il doit aussi comprendre son organisation, ses
spécificités de fonctionnement, la pensée et la culture de ses responsables, etc.
Pour ce faire, l’expert-comptable peut commencer par effectuer une visite des locaux dans le
cas où il interviendrait pour la première fois dans l’entreprise, ce qui va lui permettre de faire
des observations directes.
Il s’agit alors, d’un moyen indispensable pour la prise de connaissance de l’entreprise au cours
de laquelle l’expert-comptable sera présenté au personnel ce qui va lui permettre de mieux
comprendre l’organisation et le fonctionnement des différents services.
63 | P a g e
Chapitre 2 : La démarche d’accompagnement des entreprises en difficulté
Durant cette phase, ce professionnel doit faire aussi un pré-diagnostic sur l’état de l’entreprise,
et ce, pour détecter les signes précurseurs de difficultés, leurs causes et leur état
d’avancement.147
Une fois ce diagnostic est terminé, l’expert-comptable sera en mesure d’identifier les origines
des difficultés de l’entreprise qui peuvent être dues à l’environnement externe, des erreurs
stratégiques des responsables, un problème de rentabilité, système d’information obsolète, la
perte d’un client majeur, etc.
Par conséquent, ce pré diagnostic va lui permettre d’évaluer, en premier lieu, si la poursuite de
l’activité de l’entreprise est envisageable, et de situer, dans un second lieu, le niveau de
difficulté de l’entreprise et les solutions appropriées.
147
Ordre des experts-comptables, « Guide d’accompagnement des entreprises en difficulté », édition 2018.
148
Le diagnostic de l’état de l’entreprise est largement inspiré des propositions présentées par l’ordre des experts-comptables
français dans son guide destiné aux experts comptables. « Guide de l’accompagnement des entreprises en difficulté »,
édition 2018, P 18.
64 | P a g e
Chapitre 2 : La démarche d’accompagnement des entreprises en difficulté
Si l’expert-comptable constate que les difficultés de l’entreprise sont passagères et que la mise
en place de quelques mesures de sauvegarde va permettre au dirigeant de les éliminer ou les
réduire à un niveau faible acceptable, il peut proposer à son client plusieurs alternatives parmi
lesquelles on peut citer :
Un des problèmes majeurs rencontrés par les entreprises d’aujourd’hui est la multitude
des données et d’informations utilisées, manipulées par les services et unités. Souvent ces
données doivent être ressaisies pour alimenter les divers systèmes informatiques.
149
L’académie, science techniques comptables financiers, « le management des entreprises en difficulté financière »
mars 2009, p 18.
150
Entreprise ressource planning, c’est un progiciel de gestion intégré
65 | P a g e
Chapitre 2 : La démarche d’accompagnement des entreprises en difficulté
Ainsi si deux systèmes différents sont utilisés pour les commandes et pour la facturation, les
données issues du premier doivent être ressaisies dans le deuxième. La multitude de systèmes
est une source énorme d’inefficacité et de manque à gagner.
L’ERP est « prêt à implanter » qui peut couvrir l’ensemble des processus de l’organisation. Ce
progiciel se caractérise par le fait qu’il est adaptable, quelle que soit la nature de l’entreprise,
sécurisé contre les cryptages et les accès, évolutif et capable d’intégrer les multiplicités
présentes dans l’entreprise (multi langues, multi devise, multi réglementation, etc.) 152
Outre ces caractéristiques, les avantages d’une implantation ERP, les plus cités dans la
littérature, sont :
151
Boulifa ines, cours « système d’information et de gestion », Institut des hautes études commerciales de Carthage, p60.
152
Michel Kalika, « E-RH, réalité managériale », édition Vuibert, P274.
153
www.lebigdata.fr, article publiés sur les Data cleansing, 2018.
66 | P a g e
Chapitre 2 : La démarche d’accompagnement des entreprises en difficulté
Selon le rapport COSO154 publié en 1992, le contrôle interne est défini comme étant « un
processus mis en œuvre par la direction générale, la hiérarchie, le personnel d’une organisation,
et destiné à fournir une assurance raisonnable quant à la réalisation des objectifs entrant dans
les catégories des objectifs suivants :
Une lecture synthétique de cette définition permet de conclure que la mise en place d’un
système de contrôle interne efficace aide l’entreprise à réaliser ses objectifs. Il contribue aussi
à la production d’une information de qualité qui laisse supposer que cette entité dispose d’un
système d’information adéquat et il permet l’amélioration de l’efficacité et de l’efficience des
opérations. En outre, ce système permet d’assurer en permanence la conformité de l’entreprise
aux réglementations applicables.
Historiquement, les experts-comptables ont toujours joué un rôle important pour aider les
entreprises dans la conception et la mise en œuvre du système de contrôle interne 155.
En premier lieu, l’expert- comptable doit analyser le système de contrôle interne mis en place
par la société. Pour ce faire, il peut examiner la documentation existante, faire des entretiens,
des visites, des observations directes, des flow-charts156, etc.
154
Le COSO est un référentiel de contrôle interne défini par le Committee Of Sponsoring Organizations of the Treadway
Commission.
155
Makram Yaiche, mémoire en vue de l’obtention du diplôme d’expertise comptable « le pilotage du système de contrôle
interne : démarche, outils et rôle de l’expert-comptable », septembre 2010, page 61.
156
C’est une méthode de description des procédures schématique basée sur les diagrammes de circulation.
67 | P a g e
Chapitre 2 : La démarche d’accompagnement des entreprises en difficulté
Enfin, l’expert-comptable doit expliquer à son client les forces et les faiblesses de son système
de contrôle interne et lui proposer les mesures de sauvegardes adéquates.
L’expert-comptable peut accompagner son client dans la conception d’un tableau de bord
efficace selon une démarche 158 :
Ensuite, et à travers cette prise de connaissance, il doit déterminer les facteurs clés de succès,
et ce afin de sélectionner les missions et les principaux objectifs constituant les points clés à
contrôler à priori. Les facteurs clés de succès correspondent à des éléments (produits, marchés,
moyens financiers, etc.) qui ont une influence significative sur les résultats ou sur la marche de
l’entreprise.
Par la suite, il doit choisir les indicateurs du tableau de bord. Un indicateur est une information
chiffrée choisie pour rendre compte de l’évolution d’un facteur clé, il peut prendre la forme
d’un écart entre l’objectif et la réalisation, la quantité vendue, chiffre d’affaires, effectif
employé, etc.
157
H.BOUQUIN, « le contrôle de gestion : contrôle de l’entreprise », éditions PUF, 1986, p.268.
158
Rached GABSI, « Contrôle de gestion », Tome II, édition CLE, 2002, P61.
68 | P a g e
Chapitre 2 : La démarche d’accompagnement des entreprises en difficulté
Enfin, une fois le tableau de bord est validé par l’utilisateur, une procédure de formation et
d’accompagnement pourra être entreprise.
159
Nadia YAICH, « Amélioration de la maturité du contrôle interne : rôle de l’expert-comptable », juillet 2017, p 83.
160
Yadh ELLOUMI, « Le rôle de l’expert-comptable dans le redressement des entreprises en difficulté économique »
1998, p52.
161
Yadh ELLOUMI, « Le rôle de l’expert-comptable dans le redressement des entreprises en difficulté économique »,
1998, p52.
162
Ordre des experts-comptables français, « Guide d’accompagnement des entreprises en difficulté », édition 2018, p182.
69 | P a g e
Chapitre 2 : La démarche d’accompagnement des entreprises en difficulté
Pour pouvoir élaborer un plan de restructuration, le dirigeant devra disposer des informations
récentes et claires sur la situation comptable et financière de l’entreprise que souvent seul
l’expert-comptable peut produire.
De ce fait, ce dernier peut être chargé d’exprimer un avis sur les possibilités de restructuration
de l’entreprise et de contribuer le cas échéant à la conception de son redressement 164.
Le recours par l’expert-comptable à des outils plus élaborés comme le diagnostic est
nécessaire.
À travers cette analyse, ce dernier se prononcera sur la viabilité de l’entreprise, ses forces et
faiblesses, et les opportunités et les menaces de l’environnement. L’objectif est ici de pouvoir
démontrer que l’entreprise est en capacité de se redresser et de préciser comment.
163
Ordre des experts-comptables français, « Guide d’accompagnement des entreprises en difficulté », édition 2018, p182.
164
Ordre des experts-comptables français, « Guide d’accompagnement des entreprises en difficulté », édition 2018, p181.
165
Elloumi Yadh, « le rôle de l’expert-comptable dans le redressement des entreprises en difficulté économique », Mémoire
pour l’obtention du diplôme d’expertise comptable, 1998
70 | P a g e
Chapitre 2 : La démarche d’accompagnement des entreprises en difficulté
En cas de liquidation judiciaire, les conséquences pour le dirigeant sont multiples sur son état
psychologique et sur son patrimoine 166 . L’expert-comptable peut l’assister, l’orienter et le
conseiller, et ce en lui expliquant les différentes étapes de la procédure de liquidation judiciaire
ainsi que ses droits et obligations durant toute cette période délicate.
Toutefois, puisqu’il s’agit d’une mission sans assurance, aucune expression d’assurance ne peut
être insérée dans le rapport, et ce pour ne pas induire l’utilisateur en erreur.
Conclusion
166
Ordre des experts-comptables français, « Guide d’accompagnement des entreprises en difficulté », édition 2018, p182
167
Ordre des experts-comptables français, « Guide d’accompagnement des entreprises en difficulté », édition 2018, p183
71 | P a g e
Conclusion de la troisième partie
L’expert-comptable est un partenaire de confiance pour ses clients. Bien que son premier
rôle dans la plupart des entreprises soit l’audit des comptes, la tenue de la comptabilité et
l’établissement des comptes annuels, celui-ci a toutefois de plus en plus un rôle de conseiller
auprès de ses clients. À ce titre, il peut épauler, assister les entreprises en difficulté, et faire
prendre conscience aux dirigeants, très en amont, des actions à entreprendre.
Dans le cadre de cette dernière partie, et en absence d’une norme qui traite la mission
d’accompagnement des entreprises en difficulté économique, nous avons présenté un guide
d’accompagnement qui a pour but de proposer une démarche de soutien de ces entreprises afin
que les experts-comptables puissent aider les dirigeants à redresser leurs entreprises.
72 | P a g e
CONCLUSION GÉNÉRALE
CONCLUSION GÉNÉRALE
Le dispositif légal mis en œuvre pour redresser les entreprises comporte aussi bien des mesures
de prévention que celle de traitement des difficultés.
Notre étude a démontré, après avoir défini le cadre législatif des entreprises en difficulté
économique, que l’expert-comptable se trouve au cœur du dispositif de sauvetage de
l’entreprise en difficulté.
Alors que les procédures collectives sont obligatoires, les mesures de conseil et
d’accompagnement sont facultatives, mais vitales pour la survie de l’entreprise.
Face à un environnement complexe pour les dirigeants, l’expert-comptable est le mieux placé
pour les guider et les accompagner dans leurs démarches. Sur ce point, nous avons présenté au
74 | P a g e
Conclusion générale
Notre étude a démontré que l’expert-comptable peut proposer à son client tout un panel
d’assistance allant du diagnostic de l’entité et la validation du choix du plan de redressement
jusqu’à l’accompagnement au niveau de la phase de liquidation judiciaire.
Enfin, à travers cette étude, nous avons insisté sur le fait qu’il est vrai que le premier rôle d’un
expert-comptable dans la plupart des entreprises soit l’audit des comptes, la tenue de la
comptabilité et l’établissement des comptes annuels, celui-ci peut toutefois s’orienter vers
l’accompagnement des entreprises en difficulté. En effet, en tant qu’un professionnel
multidisciplinaire, ce dernier est bien positionné pour sauver les entreprises en difficulté en tant
qu’accompagnateur, conciliateur ou administrateur judiciaire.
75 | P a g e
BIBLIOGRAPHIE
BIBLIOGRAPHIE
1. Articles
2. Ouvrage
Amboulou Hygin Didace, « Le droit des entreprises en difficulté dans l’espace
OHADA » édition l’Harmattan, 2015.
Ben Abid Sofien, cours « droit des procédures collectives », 2018
Bouquin, « le contrôle de gestion : contrôle de l’entreprise », éditions PUF, 1986
Boulifa Ines, cours « système d’information et de gestion », 2011.
Daigne Jean-François, « Le management en période de crise : Aspects stratégiques,
financiers et sociaux, édition d’organisation », 1991.
Dora Amara, cours « Droit des procédures collectives », 2018.
Dhibi Salah, cours « droit des entreprises en difficulté économique », 2018.
Ghanmi Chiheb, cours « Audit et éthique financier », 2016.
Guyon Yves, « Entreprises en difficultés- Redressement judiciaire- Faillite », édition
Economica, Tome II, Paris, 2003.
Jaoua Fadhel, cours « commissariat aux comptes en Tunisie », Institut des hautes études
commerciales de Carthage, 2016.
Khaled Salma, cours « Droit des procédures collectives », faculté de droit et des sciences
politiques de Tunis, 2018.
M. Thieriet, « code des faillites et banqueroutes », Paris.
Mellouli Slaheddine et Frikha Sami, « les sociétés commerciales », la maison du livre,
2013.
Michel Kalika, « E-RH, réalité managériale », édition Vuibert, 2005.
77 | P a g e
Bibliographie
Rached GABSI, Contrôle de gestion, Tome II, édition CLE, 2002, P61.
3. Réglementation
Code des sociétés commerciales promulgué par la loi n° 2000-93 du 3 novembre 2000
tel que modifié et complété par la loi n° 2005-65 du 27 juillet 2005.
Code de commerce tunisien.
Code de commerce français.
Code pénal tel qu’il a été modifié par la loi n° 98-38 du 23 mai 1998.
Code des obligations et des contrats.
Code des devoirs professionnels.
Décret n° 2018-463 du 31 mai 2018, relatif à la détermination des critères et procédures
de notification des signes précurseurs des difficultés économiques.
Décret n° 2006-1546 du 6 Juin 2006, portant application des dispositions des articles 13,
13 bis, 13 ter, 13 quater et 256 bis du code des sociétés commerciales.
Loi n° 2016-36 du 29 avril 2016 relative aux procédures collectives.
Loi n° 2003-79 du 29 décembre 2003 modifiant et complétant la loi n° 95-34 du 17 avril
1995 telle que modifiée par loi n° 99-63 du 15 juillet 1999 relative au redressement des
entreprises en difficulté économique.
Loi n° 96-74 du 29 juillet 1996, modifiant et complétant la loi n° 98-9 du 1er février
1989 relative aux participations et entreprises publiques telle que modifiée et complétée
par la loi n° 94-102 du 1er août 1994.
Loi n° 97-71 du 11 novembre 1995, relative aux liquidateurs, mandataires de justices,
syndics et administrateurs judiciaires.
Loi n° 95-34 du 17 avril 1995 relative au redressement des entreprises en difficulté
économique.
Loi n° 88-108 du 18 aout 1988 relative à l’organisation de la profession et les modalités
de fonctionnement de l’OECT
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Bibliographie
4. Normalisation
5. Thèses et mémoires
6. Site Web
www.revuefrancaisedecomptabilite.fr
www.sic.experts-comptables.fr, Magazine de l’ordre des experts-comptables, article
publié sur le 72e congrès de l’ordre des experts-comptables, Charles-René Tandé, 2017.
www.lebigdata.fr, Magazine intelligence artificielle, cloud et big Data.
www.tustex.com, site boursier et économique Tunisien.
www.l-expert-comptable.com
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Bibliographie
7. Autre source
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TABLE DES MATIÈRES
TABLE DES MATIÈRES
BIBLIOGRAPHIE ............................................................................................................. 76
ANNEXE ............................................................................................................................ 86
ANNEXE
ANNEXE : DIAGNOSTIC À RÉALISER SUR L’ÉTAT DE
L’ENTREPRISE