Explorer les Livres électroniques
Catégories
Explorer les Livres audio
Catégories
Explorer les Magazines
Catégories
Explorer les Documents
Catégories
BP : 1515
TOGO
MEMOIRE
(DEA)
THEME :
Je tiens à exprimer ma profonde gratitude à tous ceux qui, de près ou de loin, ont contribué à
l’achèvement de ce travail.
Mes pensées vont aussi à tout le corps professoral de la Faculté de Droit de l’Université de
Lomé pour l’ensemble des conseils éclairés et les encouragements stimulants.
Mes pensées vont enfin à mes amis ainsi qu’à ma famille pour leur soutien sans faille, leur
aide et leurs encouragements.
SOMMAIRE...........................................................................................................................vii
INTRODUCTION GENERALE..............................................................................................1
CONCLUSION GENERALE..............................................................................................118
1
Le syntagme « nouveau constitutionnalisme » africain doit être appréhendé à l’aune de nouveaux principes
constitutionnels, marqués au double sceau de l’africanisation et du syncrétisme. Voir dans ce sens BRETON (J.-
M.), « Trente ans de constitutionalisme d'importation dans les pays d'Afrique noire francophone entre mimétisme
et réception critique : cohérences et incohérences (1960-1990) ».
2
Pour CONAC (G.), « Les transitions démocratiques sont les périodes au cours desquelles un pays modifie ses
structures politiques pour passer d’un régime autoritaire à un régime démocratique ». In CONAC (G.),
« Quelques réflexions sur les transitions démocratiques en Afrique »,
http://democratie.francophonie.org/article.php3?id_article=1314&id_rubrique=753; Voir aussi Salmon (P.),
« Processus démocratique en Afrique : impact et perspectives », Actes du colloque national, Cotonou,11 avril
1994, p.13 : Salmon Pierre « l'émergence des systèmes politiques fondés sur des nouveaux principes : le
pluralisme, l'alternance, l'Etat de droit ».
3
Pour rendre compte de ce changement, Narcisse Mouelle Combi écrit : « s’il fallait représenter le processus de
démocratisation des Etats africains par un symbole géométrique, l’on pourrait bien ne tracer qu’une droite affine,
avec à une extrémité les crises sociopolitiques et à l’autre les élections pluralistes. Et, pour reprendre à Bertrand
De Jouvenel l’image du chemin de fer, on pourrait penser que sur le grand rail de la démocratie, ces Etats sont
comme des trains qui se succèdent à diverses gares, les uns plus lentement que les autres, brûlant certaines étapes
ou faisant des arrêts incommodes, mais avec une destination incontournable : les consultations électorales ». In
MOUELLE KOMBI (N.), Consultations électorales et respect de l’expression des citoyens, Revue Africaine de
Politique Internationale, n°16, 1994, p.41.
4
QUANTIN (P.), « Pour une analyse comparée des élections africaines », Politique africaine, n ° 69, 1998, p. 16.
5
Le Professeur HOLO définit le pluralisme politique «[…] comme la faculté juridiquement organisée au profit
des partis ayant des projets de société différents de se succéder au pouvoir selon les règles juridiques de
dévolution du pouvoir fondées sur la souveraineté du peuple ». HOLO (Th.), « Quel avenir pour la démocratie
en Afrique ? », in Processus démocratique en Afrique : impact et perspectives, Actes du colloque international de
Cotonou, 11-14 avril 1994, Salmon (P.), sous dir., Bruxelles, ULB/CERI, p. 120.
6
Ardant(P.), Institutions politiques et Droit constitutionnel, LGDJ, 2007, p.153.
7
Art. 21.1 de la déclaration universelle des droits de l'homme.
8
Art. 25 du pacte international relatif aux droits civils et politiques.
9
COUMBA DIOP (M.), « Les figures du politique en Afrique : des pouvoirs hérités aux pouvoirs élus », Dakar,
Codesria, 1999, 461 p.
10
Selon MASCLET (J.-C.), « le droit électoral est celui qui régit les élections par lesquelles le citoyen désigne
ses représentants », in MASCLET (J-C), Droit électoral, Paris, PUF, 1989, p.11.
11
Cornu (G.), Vocabulaire juridique, PUF, 8e édition, 2007, p.226.
12
MASCLET (J.-C.), «Contentieux électoral », in Perrineau (P.) et Reynié (D.), Dictionnaire du vote, Paris,
PUF, 2001, p. 251.
13
SEELAM (M.J.D.), « Mettre en place un cadre législatif propre à prévenir la violence électorale, a améliorer
le suivi des élections et a assurer une transition politique sans heurt », U.I.P., 124e Assemblée et réunions
connexes, Panama, 15-20 avril 2011, p.2.
14
Il existe des organes non juridictionnels tels les commissions électorales qui connaissent du contentieux
électoral dans sa globalité ou certains aspects uniquement. Le code électoral togolais du 07 février 2003 avait
prévu en son article 23, la mise en place au sein de la CENI d’une sous-commission chargée des réclamations
électorales. Cette disposition n’est plus en vigueur. Aussi, le contentieux de la liste électorale est confié à la
Commission électorale au Burkina Faso.
15
GARRONE (P.), « Le contentieux électoral-questions de fond », Commission européenne pour la démocratie
par le droit, Séminaire UNIDEM, Madrid, Espagne, 23-25 avril 2009.
16
TAGHIZADEH (J.), « Le Conseil gardien et le contrôle de l'éligibilité aux élections nationales en Iran »,
Actes du VIe congrès français de droit constitutionnel, Montpellier, 9-11 juin 2005, p.1.
17
Sous cette appellation, il faut entendre celles des députés, des sénateurs et du président de la République.
Définition proposée par Cornu (G.), Op. cit., p.349.
18
L’expression « Ancien régime » désigne en France, la période de la monarchie absolue, « société
traditionnelle » par opposition à la « société nouvelle » de 1789, selon Taine.
19
Dans l'ancien système de la vérification des pouvoirs, au lendemain des élections, chaque assemblée
examinait la situation de chacun de ses membres et procédait éventuellement à l'invalidation des parlementaires
qui avaient été élus irrégulièrement. Ce contrôle était souvent plus politique que juridique et il avait donné lieu,
notamment sous la IVe République, à de sérieux abus. Ainsi, pour ne prendre que cet exemple, lors des élections
législatives de 1956, 11 députés poujadistes ont été, à la suite d'une décision parfaitement arbitraire, remplacés à
l'Assemblée nationale par des candidats de la majorité arrivés en deuxième position. Cf. ROUX (André), « Une
analyse comparative des organes en charge du contrôle électoral, en particulier les organes judiciaires – le cas
français », Séminaire Unidem sur « Le contrôle du processus électoral », Madrid, Espagne, 23 – 25 avril 2009,
p.2.
20
Le Conseil constitutionnel français a été créé par la Constitution du 4 octobre 1958 mais n'a été installé que le
5 mars 1959.
21
Les solutions adoptées ici et là étaient variées. Si par exemple en Côte d’Ivoire c’est une chambre
Constitutionnelle qui a été créée au sein de la Cour suprême, au Sénégal, c’est celle-ci qui, en matière
Constitutionnelle, statue toutes sections réunies, c'est-à-dire dans sa formation plénière.
22
Les juridictions administratives et judiciaires ne sont pas exclues du règlement du contentieux des élections
présidentielles et législatives. Ces juridictions connaissent suivant les pays du contentieux lié à la liste électorale
et même du contentieux lié à la candidature. Au Congo Brazzaville, c’est le Tribunal de Grande Instance qui
connait du contentieux de la liste et du contentieux de la candidature. En Mauritanie, le contentieux de la liste est
confié à la Chambre administrative de la Cour Suprême.
23
POKAM (H.P.), « Les commissions électorales en Afrique subsaharienne : Analyse de leurs enjeux et de leurs
usages par les acteurs politiques au cours du processus d’invention de la neutralité électorale », in séminaire «
Gouverner les sociétés projetées », 31 janvier 2005, p.2. Disponible en ligne sur
http://www.cean.sciencespobordeaux.fr/pokam.pdf
24
En 2010, la quasi-totalité des Etats ont célébré leurs indépendances acquises pour la plupart dans les années
1960. A cette occasion, plusieurs rencontres ont été initiées pour des bilans prenant en compte des domaines liés
au développement. Cependant le contentieux électoral a été ignoré.
25
C’est le champ matériel de notre étude. Celui-ci traduit non seulement l’actualité mais aussi et surtout les
enjeux majeurs que renferment les élections législatives et présidentielles de même que l’ampleur des débats
autour des juridictions constitutionnelles.
26
Il s’agit du champ géographique de notre étude. Afin d’éclairer les analyses qui vont suivre, les exemples cités
seront pris particulièrement au Burkina-Faso, au Cameroun, en Centrafique, au Congo, en Côte-d’Ivoire, au
Gabon, au Mali, au Niger, au Togo et à l’ex-Zaïre (actuelle République démocratique du Congo). Le nombre
élevé de ces Etats ne doit pas être trompeur car ils ont tous à la fois des similitudes historiques, culturelles et
politiques. Sur le plan historique, tous ces Etats ont connu la même colonisation française (belge pour l’ex-Zaïre
) et ont les mêmes institutions politiques et juridiques. Sur le plan culturel ou linguistique, ils ont en partage
l’usage du français comme langue officielle, au moins pour une large part. Enfin, ces Etats connaissent le même
processus qui a ébranlé, quasiment à la même époque, les pouvoirs en place et initié les différents processus de
démocratisation. De sorte que, malgré leur nombre et sans doute de leurs particularités, ces Etats connaissent des
convergences qui justifient une étude d’ensemble.
Quoi qu'il en soit, la tenue d'élections libres et régulières est une question d'intérêt
général qui concerne les démocraties de longue date aussi bien que les Etats qui effectuent
leur transition de l'autoritarisme à la démocratie ou de la guerre à la paix30.
27
Le Petit Larousse, 2008.
28
Le concept est cependant resté, à ce jour, sans définition internationalement agréée. La raison en est que les
organisations universelles et régionales, ainsi que les ONG, utilisent les adjectifs "libres" et "régulières" de
manière souvent interchangeable avec ceux d'"honnêtes", "authentiques", "impartiales", "sincères", "régulières",
"périodiques", "démocratiques" ou "transparentes".
29
Art. 76, repertoire suppl.2, vol.III, (1955-1959), disponible sur :
Untreaty.un.org/cod/repertory/art.76/french/rep_supp2_vol3_art76_f.pdf.
30
GHEBALI (V.Y.), « Elections libres et régulières » extrait - consolidation de la paix et reconstruction post-
conflit, Le monde des parlements, N° 26, juillet 2007, pp.8-9.
31
D'une perspective négative, la démocratie représentative exclut d'autres formes de gouvernement telles que le
gouvernement direct, qui ne s'avèrerait pas pratique à l'intérieur d'une société très vaste et complexe.
32
Pour QUANTIN (P.), par “démocratie électorale“ on entendra ici un régime dans lequel la compétition pour le
contrôle du gouvernement d’un Etat est réglée d’une manière durable grâce à des élections considérées
suffisamment libres et honnêtes par les principaux groupements intéressés pour que ceux-ci préfèrent s’y
conformer plutôt que de poursuivre la lutte par d’autres moyens. QUANTIN (P.), « Pour une analyse
comparative des élections africaines », Politique africaine, n ° 69, 1998, p. 16.
Les élections régulières sont des élections qui sont régies par les procédures
définies dans la constitution ou la loi. Dans ces conditions, la date du scrutin est
connue et toutes les activités électorales se déroulent conformément à la loi. La
législation est conforme aux pratiques électorales universellement acceptables, les
institutions électorales sont crédibles et les règles sont toutes bien comprises et
acceptées. Cette conformité est vérifiée à l’occasion du contentieux électoral qui dans
son fondement (Chapitre I) et dans son organisation (Chapitre II) se doit de respecter
les exigences de la démocratie et conforter sa position d’enjeu majeur de gouvernance,
de paix et de stabilité dans les pays d’Afrique noire francophone.
33
GHEVONTIAN (R), « La sincérité du scrutin », Avant- propos, Cahiers du Conseil constitutionnel, n° 13,
janvier 2003, p.80.
34
DJEDJRO MELEDJE (F.), « Le contentieux électoral en Afrique », Pouvoirs, 129, 2009/2, pp. 139-140.
Les élections constituent un des piliers de la démocratie et il est courant de la définir par
certains critères dont la liberté et l’égalité des citoyens.
Ces deux principes posés par la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789
sont repris par les différentes constitutions des Etats africains. Ce constat fera dire à Francis Djedjro
Meledje que « La Constitution, par les principes qu’elle pose : de représentation politique,
La liberté est la faculté d'agir selon sa volonté en fonction des moyens dont l’on
dispose sans être entravé par le pouvoir d’autrui. Elle sous-tend que les individus possèdent
une sphère d’autonomie. L’idée qu’il convient de protéger une sphère d’autonomie contre les
35
DJEDJRO MELEDJE (F.), op. cit., p. 143.
36
MASCLET (J.C.), Rapport de synthèse, Colloque international sur le contentieux électoral et l’Etat de droit,
Les Cahiers de l’Association Ouest africaine des Hautes Juridictions Francophones, 14-16 mai 2002, p.41.
37
GHEVONTIAN (R.), « La notion de sincérité du scrutin », Les Cahiers du Conseil constitutionnel, n° 13,
2002, P. 82.
La liberté du vote postule une neutralité de l’Etat qui passe tout d'abord par la
neutralité et l'objectivité respectées dans l'organisation des élections car s'il appartient
bien à l'État d'édicter les actes préparatoires aux élections, il est absolument
indispensable que ceux-ci puissent être contrôlés par le juge. La neutralité de l'État
doit également se manifester au niveau de la campagne électorale. La tenue d’élections
libres, démocratiques et pluralistes ne peut être envisagée sans la reconnaissance de la
liberté du vote; ce droit est néanmoins encadré par des conditions d’âge ou de
nationalité. Aussi, ce principe, dans son affirmation (A) induit-il le secret du vote(B).
38
Il s’agit des droits fondamentaux définis comme droits subjectifs de défense contre l’État. La fonction
traditionnelle des droits constitutionnels et conventionnels étant, en effet, de constituer une limite à l’action des
pouvoirs publics.
39
Ces droits sont les suivant : Soit l’Etat ne doit pas empêcher ou entraver certaines actions de l’individu, soit il
ne doit pas porter atteinte à un état de l’individu, soit enfin il ne doit pas porter atteinte à certaines positions
juridiques.
40
ALEXY, cité par VERPEAUX (M.), « La liberté », AJDA, 20 juillet/20 août 1998, numéro spécial, p. 144.
La liberté de vote postule que chaque électeur soit vraiment en mesure d’exprimer en
d’exprimer en toute liberté son choix sans aucune pression, ni chantage, ni violences, ni
ni contrainte 41 . La reconnaissance constitutionnelle ou statutaire formelle du droit des
citoyens à exprimer leur suffrage est commune à la plupart des Etats. Elle joue un rôle
fonctionnel et favorise la confiance.
Le principe consacré dans les démocraties pratiquant le système des élections
disputées et en particulier dans les Etats d’Afrique noire francophone est la liberté de vote. Ce
principe est consacré dans le code électoral de la République du Mali en ces termes :
«L'élection est le choix librement exercé par le Peuple en vue de désigner les citoyens appelés
à la conduite et à la gestion des affaires publiques selon les principes de la démocratie
pluraliste 42 ». Cette liberté se manifeste non seulement par la préférence accordée à un
candidat parmi ceux qui se présentent, mais aussi par la faculté de mettre un bulletin blanc
dans l’urne ou même de ne pas participer à l’élection. Ainsi, au Congo, l’art. 98 précise que
les bulletins nuls ne sont pas considérés comme suffrages exprimés. Les bulletins nuls
peuvent prendre l’aspect d’une enveloppe sans bulletin ou d’un bulletin sans enveloppe, de
plusieurs bulletins dans l’enveloppe, de bulletins entièrement ou partiellement barrés ou de
bulletins comportant des mentions injurieuses. Tous, loin de traduire un manque de civisme
sont l’expression de la liberté du vote43.
41
HOLO (Th.), « Les défis de l’alternance démocratique en Afrique », Conférence internationale sur Les défis
de l’alternance démocratique, Cotonou, Benin, 23-25 Février 2009, p.9.
42
Art. 2 al. 1er de la Loi N° 06-044/ Du 4 septembre 2006 portant loi électorale.
43
Loi du 24 novembre 2001 portant loi électorale en République Démocratique du Congo.
44
L’Art. 76 de la Loi n° 09.016 portant code électoral de la République centrafricaine dispose que : « Le choix
de l’électeur est libre. Il est interdit à toute personne présente dans le bureau d’influencer ce choix ».
45
Cette interdiction est matérialisée à l’art. 70 du code électoral de la République de Guinée adopté le 24 mai
2010 en des termes non équivoques: « le président du bureau de vote dispose de pouvoir de police à l’intérieur
du bureau de vote et peut en expulser toute personne qui perturbe le déroulement des opérations de vote.
Nulle force armée ne peut sans son autorisation, être placée dans une salle de vote ni à ses abords immédiats, ni y
intervenir de quelque manière que ce soit.
Nul ne peut pénétrer dans la salle de scrutin porteur d’une arme apparente ou cachée à l’exception des membres
des forces publiques légalement requis ».
B- Le secret du vote
À titre individuel, l'électeur doit pouvoir exprimer son choix en toute liberté, à l'abri de
toute pression. Mais à partir du moment où ces pressions sont exercées sur les individus, elles
sont très difficiles à déceler. En réalité, ce qui importe est qu'au bout du compte, l'électeur
effectue son vote en toute conscience et en suivant sa seule volonté.
La seule garantie de cette exigence est donc le caractère secret du vote qui permet d'en
assurer la liberté. Ce principe, trop souvent négligé, parce que, sans doute considéré à tort
comme accessoire ou secondaire, est pourtant de toute première importance. S'appliquant en
46
Décision n° 036/CC du 14 mars 2007.
47
Les art.79, 80 et 81 de la Loi n° 2010-33 portant règles générales pour les élections en République du Bénin
organisent les opérations de dépouillement ainsi que la signature des procès-verbaux. Ils précisent que Le
dépouillement suit immédiatement la clôture du scrutin, qu’il est conduit sans désemparer jusqu’à son
achèvement complet, qu’il est public et qu’il a lieu dans le bureau de vote.
48
GHEVONTIAN (R), op.cit., p.86.
49
GICQUEL (J.), Droit constitutionnel et institutions politiques, Montchrestien, Paris, 1993, p 154.
50
Constitution du Burkina Faso adoptée par le Référendum du 02 Juin 1991 et révisée en 1997, 2000, 2002.
51
La Loi n°92-16 du 07 Février 1992 portant Code Electoral de la République du Sénégal consacre à son Art.
L.72, al. 1er que « Le scrutin est secret. Le vote a lieu sous enveloppe. Avant l’ouverture du scrutin, le bureau
doit constater que le nombre des enveloppes correspond à celui des inscrits.». Cette formule est reprise par la
majorité des Etats d’Afrique noire francophone.
52
HOLO (Th.), « La constitution garante de l’alternance démocratique », Conférence internationale, Les défis de
l’alternance démocratique FNUD ET IDH, Cotonou 23 au 25 février 2009, p.5.
53
La Loi N°2007 - 012 du 14 juin 2007 portant modification de la loi n° 2000-007 du 05 Avril 2000, elle-même
modifiée.
Ensuite, l’exigence de l’usage d’une enveloppe qui est facultative. Le bulletin doit être
doit être placé sous une enveloppe afin qu’il soit dissimulé aux regards lors du vote54. L’art.
67 du Code électoral de la République de Guinée dispose en son al. 1er que : « Le vote a lieu
avec des bulletins et des enveloppes fournis par la CENI 55».
Enfin, le dépôt dans l’urne. L’électeur doit glisser lui-même son bulletin dans l’urne,
laquelle a été fermée. L’urne doit n’avoir qu’une ouverture. L’exigence de l’urne est
consacrée par la loi électorale Centrafricaine à son Art. 64 en ces termes: « Il est installé, dans
chaque bureau de vote, un ou plusieurs isoloirs à raison d’un pour un maximum de trois cents
cinquante (350) électeurs. Les isoloirs doivent être placés de manière à ne pas dissimuler au
public les opérations électorales tout en assurant le secret de vote56 ». Elle doit rester en
place. Le déplacement de l’urne constitue une irrégularité susceptible d’être sanctionnée par
l’annulation de l’élection.
L’élection suppose un choix et n’a de sens que si elle met réellement en compétition,
non seulement, plusieurs acteurs politiques, mais aussi, des projets de société différents et
54
Tous les Etats ne consacrent pas l’utilisation de l’enveloppe. Celle-ci étant considérée pour des raisons
financières comme superflue.
55
Code électoral de la République de Guinée en vigueur le 22 mai 2010.
56
Loi n° 09.016 portant Code électoral de la République centrafricaine.
A- La liberté de candidature
57
GUEYE (B.), « La démocratie en Afrique : succès et résistances », Pouvoirs, 2009/2, n° 129, p. 7 et s.
58
« Les partis politiques forment la pierre angulaire de la société démocratique et assument, plus que toute autre
institution, une fonction représentative dans une démocratie. Le rôle d’un parti politique consiste à rassembler et
à représenter les intérêts sociaux, servant ainsi de structure pour la participation politique ». In « Le rôle des
partis politiques dans une transition démocratique », Rapport de la conférence organisée à Kinshasa par le NDI
du 26 au 28 juin 2001.
59
MIRANDA (J.), « Les candidatures dans les élections politiques », AIJC, 1996, p. 441.
60
Art. 13 de la Constitution Burkina Faso.
61
MIRANDA (J.), op.cit, p. 443.
62
DE VILLIERS (M.), « Aspects contentieux des élections », Atelier de formation électorale, Commission
européenne pour la démocratie par le droit, Commission de Venise, Erevan, Arménie, 5-8 mai 2003, p. 26.
63
La loi n°2009- 09 du 16 janvier 2009 portant Code électoral sénégalais.
64
Cour Constitutionnelle du Mali, Arrêt CC 96-003 du 25 octobre 1996.
65
BENDOUROU (O.), « Le conseil constitutionnel et les droits fondamentaux », in «Revue marocaine
d’administration locale et de développement» (REMALD), n° 56, mai-juin 2004, p.29.
66
Arrêt n° 90-2-CC du 12 octobre 1990 de la Chambre constitutionnelle de la Cour suprême de Côte d’ivoire.
67
Décision n° E 0001/95 du 22 novembre 1995 du Conseil constitutionnel de Côte d’Ivoire.
68
Arrêt n° E 01-2000 du 06 octobre 2000, Cour suprême de Côte d’ivoire, JORCI, n° 40 du jeudi 12 Oct. 2000.
69
LAMOUROUX (S.), « La disparition de la sanction automatique d’inéligibilité pour les comptables de fait :
quel avenir pour la sanction électorale ? », Revue Française de Droit Constitutionnel, n° 55, 2003/3, p. 609.
C’est dans ce sens que le Chapitre III du Code électoral togolais71 traite des conditions
conditions d’éligibilité et d’inéligibilité. Ainsi, à l’Art. 83, il est prévu que « Tout Togolais
Togolais peut faire acte de candidature et être élu sous réserve des conditions d’âge et des cas
des cas d’incapacité ou d’inéligibilité prévus par la loi ». Et l’Art. 84 précise que « Ne sont
pas éligibles les militaires de tous grades en activité de service ainsi que les fonctionnaires
auxquels leur statut particulier enlève le droit d’éligibilité ».
70
Rec., p.79.
71
La Loi N°2007 - 012 du 14 juin 2007 portant modification de la loi n° 2000-007 du 05 Avril 2000, elle-même
modifiée.
72
Art. 197 de la Loi N°2007 - 012 du 14 juin 2007 portant modification de la loi n° 2000-007 du 05 Avril 2000,
elle-même modifiée.
73
Art. 35 de la Constitution togolaise du 14 oct. 1992 modifiée par la loi n°2002-029.
74
Zambia: The Reality Amidst Contradictions – Human Rights in Zambia since the 1996 elections”, Human
Rights Watch, 1er juillet 1997, Vol. 9, N° 3.
Quant à la capacité, elle tient tant à la jouissance des droits civils et politiques
qu’à la santé mentale. Ainsi, l’inéligibilité d’un candidat peut être motivée par une
interdiction pour motifs liés à la santé mentale ou des condamnations pénales pour des
délits graves75.
En second lieu, la liberté de candidature connaît des limitations spécifiques
liées aux professions, activités ou fonctions exercées par le candidat. Ce sont les
inéligibilités au sens propre du terme. Elles ont pour but de préserver la liberté de
l’électeur et l’indépendance de l’élu. Ces cas d’inéligibilité s’appliquent
principalement et dans la majorité des Etats d’Afrique noire francophone aux élections
législatives. Dans cette optique, les corps de l’armée et les magistrats sont exclus des
mandats électifs.
Le contenu de ces deux catégories de restrictions varie suivant les pays et
suivant les types d’élections. Cependant, elles doivent intervenir dans un cadre de
stricte égalité.
75
L’art.47 de la Loi du 24 novembre 2001 portant loi électorale en République du Congo dispose que : « Nul ne
peut être candidat aux fonctions de Président de la République : s’il ne jouit d’un état de bien-être physique et
mental dûment constaté par un collège de trois médecins assermentés désignés par le juge constitutionnel».
D'une manière générale, le principe d'égalité joue un rôle majeur dans la conception
conception démocratique de l'État de droit. Il n'est donc pas étonnant que, s'agissant plus
plus spécifiquement du droit électoral fondamental, ce principe occupe une place toute
particulière et conditionne le respect de l'exigence de sincérité. Par essence, ce principe
d'égalité est, d'une manière générale, polymorphe et, naturellement, il se présente, dans le
domaine électoral, sous différentes formes76. Il postule l’universalité du suffrage (Paragraphe
I) et interdit les distorsions territoriales entre les circonscriptions (Paragraphe II).
Le principe d'égalité s'applique, en matière électorale, aux électeurs et aux élus. Cela
concerne tant l'exercice du droit de suffrage actif et passif 77 que le principe même de
représentation. Le Conseil constitutionnel français a rappelé dans une décision que la qualité
de citoyen ouvre le droit de vote et l'éligibilité dans des conditions identiques à tous ceux qui
n'en sont pas exclus pour une raison d'âge, d'incapacité ou de nationalité, ou pour une raison
tendant à préserver la liberté de l'électeur ou l'indépendance de l'élu ; que ces principes de
valeur constitutionnelle s'opposent à toute division par catégories des électeurs ou des
éligibles ; qu'il en est ainsi pour tout suffrage politique78». Il en résulte que le suffrage est
universel(A) et égal(B).
A- Le suffrage universel
76
GHEVONTIAN (R.), op. cit., p.83.
77
Le droit de vote actif et passif évoque le droit de vote et d'éligibilité.
78
Rec. p. 66, cons. n° 7. Cette formule sera en partie reprise dans la décision n° 98-407 DC du 14 janvier 1999,
Quotas par sexe II, (Rec. p. 21) dans laquelle le Conseil constitutionnel précisera qu'aucune distinction ne peut
être opérée entre électeurs ou éligibles « en raison de leur sexe ».
79
Art. 3 al. 2 de la Constitution du 20 juillet 1991et Art. 2, 24 et 29 de la Constitution du 27 novembre 1996.
80
Constitution de la République du Gabon Révisé par la Loi n° 13/2003 du 19 août 2003.
B- Le suffrage égal
Le suffrage est non seulement universel, mais aussi égal. Il n'a de véritable sens que
dans un système de réelle concurrence électorale, où plusieurs candidats et/ou partis distincts,
avec des programmes alternatifs, sont proposés au choix égal des citoyens. C’est pourquoi, à
l’exigence d’égalité quantitative comme moyen d’approcher l’équité de la représentation
politique, s’ajoute une exigence d’égalité qualitative entre les citoyens. Le principe de
l’égalité des suffrages, implique qu’aucun vote ne peut avoir plus de valeur qu’un autre. C’est
une conséquence de l’universalité du suffrage.
81
VEDEL (G.), Manuel élémentaire de droit constitutionnel, Paris, Sirey, 1949, p. 335.
82
Constitution de la République de Côte d'Ivoire du 23 juillet 2000.
83
L’art.2 et 3 de la Constitution camerounaise du 18 janvier 1996 dispose en substance : « Le vote est égal et
secret ; y participent tous les citoyens âgés d'au moins vingt (20) ans ».
Par ailleurs, à la règle de la stricte égalité des électeurs, répond aussi celle de
l’égalité nécessaire des candidats, les deux étant conçues sur le mode
complémentaire : pour que la liberté de choix des électeurs soit préservée, et la
sincérité du scrutin assurée, tous les candidats doivent être traités de façon égale, en
particulier pendant tout le déroulement de la campagne électorale.
84
GOODWIN-GILL (G.S.), Elections libres et régulières, Nouvelle édition augmentée Première partie : quelques
pas de plus vers la démocratie, Union interparlementaire, Imprimé en France, 2006, p.172.
85
Loi n° 2010-33 portant règles générales pour les élections en République du Bénin.
Ainsi, dans le souci de préserver l’égalité entre les candidats, le contentieux électoral
donne la possibilité d’annuler les élections en cas d’abus de propagande dans le sens où cet
abus aurait eu une influence déterminante sur le scrutin.
Aussi, dans le respect de la liberté d’expression, la loi prévoit que les médias
audiovisuels privés assurent un accès minimal aux différents participants aux élections, en
86
Selon l’article 129 de la loi n° 018/2005 du 6 octobre 2005, peut entraîner l’annulation de l’élection s'il est
reconnu par la Cour Constitutionnelle qu'elle a faussé le résultat du scrutin, « la participation à la propagande
électorale, par des déclarations publiques écrites ou verbales des autorités administratives ».
87
Loi n°014-2001 /AN portant Code électoral, ensemble ses textes modificatifs.
88
Loi N°2007 - 012 du 14 juin 2007 portant modification de la loi n°2000 portant code électoral au Togo.
89
CASAGRANDE (C.), « Les candidats et les électeurs en période de campagne électorale », Atelier de
formation électorale, Commission européenne pour la démocratie par le droit, Commission de Venise, Erevan,
Arménie, 5-8 mai 2003, p.7.
90
Art 92 de la Loi n° 2010-33 portant règles générales pour les élections en République du Bénin.
91
RAHMOUNI (H.), Cours de droit constitutionnel, Hassan II University Mohammedia, Maroc,
http://www.hassanrahmouni.com/Cours/Cours03Chapitre1.pdf.
92
En ligne sur le site Wikipedia ; http://fr.wikipedia.org/wiki/Syst%C3%A8me_%C3%A9lectoral.
93
Ce principe signifie que le ou les élus des différentes circonscriptions doivent être également représentatifs des
électeurs ou, plus largement, de la population. La règle posée par le Conseil constitutionnel invite donc à
apprécier, pour chaque circonscription électorale, le ratio population de la circonscription / nombre d’élu(s)
correspondant. Des ratios voisins permettront de conclure au respect du principe « des bases essentiellement
démographiques ». GUISELIN (E.-P.), GELIN-RACINOUX (L.), RENAUD DE LA FAVERIE (B.), III -
jurisprudence constitutionnelle, Joyau (M.), sous dir., Chronique de jurisprudence constitutionnelle, RJP,
Yearbook 8, p.163.
94
C.C. 85-196 D.C., 8 août 1985, Rec. p.63.
En effet, ayant constaté des distorsions dans le découpage électoral au Togo et dans la
perspective des élections législatives de 2007, les parties signataires de l’APG ont fait des
recommandations au point 1.2.4 relatives au découpage des circonscriptions électorales.
Ainsi, les parties prenantes au Dialogue National tout en convenant de s'en tenir aux
circonscriptions électorales existantes ont reconnu la nécessité d’un redécoupage électoral
basé sur un recensement général de la population96.
La mission de l'Union européenne, qui a observé les législatives du 14 octobre au
Togo a entériné cette recommandation, en demandant, aux autorités de revoir le découpage
électoral qui a défavorisé l'opposition lors des élections législatives de 2007, car, "La
proportion entre le vote populaire à l'échelle nationale et le nombre de sièges attribués n'est
pas équilibrée. Ce déséquilibre est le résultat du système électoral adopté et surtout du
découpage électoral", selon le rapport final de la mission d'observation de l'UE97.
"Il n'est besoin que de 11.469 voix à Assoli (nord) pour l'obtention d'un siège alors que
127.071 voix sont nécessaires dans le golfe (sud)", souligne le rapport. Rappelons que
l’ensemble des partis politiques de la majorité comme de l’opposition au Togo avaient avalisé
ce découpage pour les législatives du 14 octobre 2007.
95
Loi n° 07/96 du 12 mars 1996, portant dispositions communes à toutes les élections politiques en République
Gabonaise modifiée par l’ordonnance n° 010/PR/2008 du 28 février 2008.
96
Accord Politique Global togolais, août 2006.
97
Rapport final – MOE UE Togo 2007, pp. 16-17.
C’est dans cet ordre d’idées qu’en France, l’ordonnance portant répartition des
sièges et délimitation des circonscriptions pour l’élection des députés a été présentée le
29 juillet 2009 par le secrétaire d’État à l’intérieur et aux collectivités territoriales. Ce
texte modifie la carte électorale en vigueur depuis 1986 afin de tenir compte de
l’évolution de la population et de rendre en principe la représentativité des députés
plus homogène : désormais les départements de moins de 125 000 habitants au lieu de
108 000 auparavant ne disposeront plus que d’un seul député. 33 circonscriptions sont
supprimées et sont compensées par la création de 22 circonscriptions en métropole et
dans les collectivités d’Outre-mer et de 11 circonscriptions pour les Français de
l’étranger.
L’ordonnance a reçu l’aval du Conseil d’État, ainsi que de la Commission
consultative du découpage électoral, présidée par l’ancien président du Conseil
constitutionnel, Yves Guéna. Une loi portant ratification de l’ordonnance fût présentée
au Parlement à l’automne 2009. Le nouveau découpage devrait entrer en vigueur lors
des prochaines élections législatives, prévues en 2012 99».
Ainsi, un processus électoral fiable sous-entend au préalable une actualisation
quotidienne des données démographiques en vue d’une bonne maitrise du corps
électoral. A ce niveau, tous les acteurs de la vie du pays sont associés afin d’éviter les
soupçons de mauvaises manipulations des fichiers électoraux dont on accuse souvent à
raison l’administration publique africaine.
98
CHAGNOLLAUD (D.), Droit constitutionnel contemporain, Tome 1, Théorie générale, Les régimes
étrangers, 5ème édition, Paris, D., 2007, p.217.
99
Vie publique, Au cœur du débat public, « Découpage électoral : un projet toujours controversé », écrit le 4-08-
2009.
Il y était invité par l’insertion dans l’article 125 du code électoral d’un deuxième
alinéa libellé : « il est procédé à la révision des limites des circonscriptions, en fonction de
l’évolution démographique, après le deuxième recensement général de la population suivant
la dernière délimitation ». Devant apprécier la conformité de cette disposition bien
intentionnée, le Conseil constitutionnel y verra un texte inopérant, en ce sens que le
législateur ne peut se lier pour l’avenir et s’obliger par avance à respecter telle ou telle
modalité pour les modifications envisagées. Inopérant, mais non contraire à la Constitution,
de sorte que cette disposition a fait tout de même son entrée dans le code électoral où elle
prend place à l’art L.125, al. 2.
Au Canada, il existe une loi sur la révision des limites des circonscriptions électorales.
Cette loi a créé des commissions de délimitation des circonscriptions électorales
indépendantes ayant pour mandat de faire rapport sur la révision de la représentation des
provinces à la Chambre des communes. Chaque commission est constituée de trois membres,
la présidence étant occupée soit par un juge nommé par le juge en chef de la province en
question, soit par une personne qui réside dans la province alors nommée par le juge en chef
du Canada. Les deux autres membres sont nommés par le président de la Chambre des
communes " parmi les personnalités de la province qui lui semblent compétentes ".
Le directeur général des élections, dès qu'il reçoit du statisticien en chef, après chaque
recensement décennal un état certifié de la population, procède au calcul du nombre de sièges
de députés à attribuer à chacune des provinces et en fait publier les résultats sans délai. Il doit
également adresser un exemplaire de l'état certifié des résultats de recensement au président
100
KINGSLEY (J.−P.), « Administration et application du processus électoral: le modèle Canadien », Cahiers du
Conseil constitutionnel, n° 13, janvier 2003, p.10.
101
La périodicité des élections est consacrée par le Pacte international relatif aux droits civils et politiques qui
dispose à son art. 25.b. que : «Tout citoyen a le droit et la possibilité, sans aucune des discriminations visées a
l’article 2 et sans restrictions déraisonnables : b) De voter et d’être élu, au cours d’élections périodiques,
honnêtes, au suffrage universel et égal et au scrutin secret, assurant l’expression libre de la volonté des
électeurs; ».
102
COLLIARD (J.-C.), « Les systèmes électoraux dans les Constitutions des pays de l'Union européenne », Les
Cahiers du Conseil constitutionnel, n° 13, 2002, p.93.
103
DELPEREE (F.), « La sincérité du scrutin », Cahiers du Conseil constitutionnel, n° 13, janvier 2003. P.100.
Les applications concrètes des textes constitutionnels et législatifs ainsi que les
interventions du juge électoral appellent un déploiement considérable de ressources
humaines et matérielles. Elles supposent la mise en place et la maîtrise d'un vaste
système où cohabitent justice et équité, indépendance et transparence. Réunies, ces
données permettent l'exercice des droits civils et politiques. Ces droits concourent au
« pacte de confiance » qui définit le système démocratique.
Bref, pour garantir un scrutin sincère, il faut que le contentieux fasse l’objet
d’une bonne organisation. Selon le petit robert, organiser c’est combiner, disposer les
éléments d’un ensemble pour en assurer le bon fonctionnement. Ceci nous conduit à
104
ROY (J.-L.), « Le pacte de confiance, garantie de la démocratie », Perspectives électorales, mars 2006.
Sur la nature107 de ces juridictions, le débat semble obsolète puisque comme le signale
Dominique Rousseau, « l’important n’est pas de savoir ce qu’est le Conseil constitutionnel
mais ce qu’il fait 108 » et « Étant garant et protecteur de l’Etat de droit et de la démocratie, ses
originalités, peuvent être cyniquement vues comme secondaires109». En dépit des controverses
liées à sa nature, il apparait que le conseil constitutionnel est doté d’un statut qui tout en
assurant l’indépendance de l’organe (Paragraphe I), garantie celle des individus, membres de
ces cours et conseils (Paragraphe II).
L’institution des juridictions constitutionnelles sur la base de textes 110 assure leur
indépendance effective par rapport aux divers autres pouvoirs en raison même de la nature des
105
Il s’agit du passage du système de la vérification des pouvoirs à l’attribution du contentieux électoral au
Conseil constitutionnel.
106
A titre illustratif, l’on peut citer l’art. 9 al. 2. de la Constitution Malgache de 1991 qui dispose que « La
Haute- cour Constitutionnelle est le juge en dernier ressort du contentieux électoral et assure la régularité des
opérations électorales ». Dans le même sens, l’art.104. al.2 de la Constitution de la République du Niger
dispose que « la Cour constitutionnelle interprète les dispositions de la Constitution. Elle contrôle la régularité, la
transparence et la sincérité des opérations de vote à l’occasion du référendum, des élections présidentielles,
législatives et locales. Elle est juge du contentieux électoral et proclame les résultats définitifs des élections ».
107
S’agissant de la nature tant controversée de ces Cours ou Conseils, toutes les thèses furent défendues avec une
égale conviction : celle de la nature juridictionnelle fut soutenue avec autorité, celle de la nature politique
également et enfin celle de la nature sui generis, c'est-à-dire à la fois politique et juridictionnelle. Voir dans ce
sens, ROUSSILLON (H), Le Conseil Constitutionnel, Dalloz 2001, p.15 et ROUSSEAU (D.), sur le Conseil
Constitutionnel, la doctrine de Badinter et la démocratie, Descartes et Cie, Paris, 1997, p.59.
108
HAMON (F.), TROPER (M.), Droit constitutionnel, Paris, L.G.D.J., 2005, p. 816.
109
DRAGO (G.), « Réformer le conseil constitutionnel ? », Pouvoirs, 2003/2, n° 105, p. 78.
110
Les cours et tribunaux constitutionnels sont des instances dont la création doit être régie par un texte
constitutionnel, comme toutes les autres instances constitutionnelles, plus spécialement le Parlement, le Sénat et
le Gouvernement, texte qui consacre l’existence des juridictions constitutionnelles en tant qu’institutions
constitutionnelles et donc partie intégrante de l’édifice constitutionnel, de sorte qu’on ne puisse les supprimer,
tout comme pour le Parlement et le Gouvernement.
111
FAVOREU (L.), « Le Conseil constitutionnel régulateur de l’activité normative des pouvoirs publics »,
R.D.P. 1967, pp. 254-255.
112
Loi organique n° 97-01/PR du 8 janvier 1997 portant organisation et fonctionnement de la Cour
constitutionnelle.
113
Loi organique n° 9/91 du 26 septembre 1991 modifiée par la loi n° 13/94 du 17 septembre 1994 sur la Cour
constitutionnelle.
Dans l’arrêt Valente c. La Reine de 1985, le juge Dain, qui rédigea l’opinion de
la Cour suprême du Canada, notait que « le contrôle judiciaire sur […] l’assignation
des juges aux causes, les séances de la Cour, le rôle de la Cour, ainsi que les domaines
connexes de l’allocation de salles d’audience et de la direction du personnel
administratif qui exerce ces fonctions a généralement été considéré comme essentiel
ou comme une exigence minimale de l’indépendance institutionnelle ou collective115».
114
Loi n° 97-010 du 11 février 1997 portant loi organique déterminant les règles d’organisation et de
fonctionnement de la Cour constitutionnelle ainsi que la procédure suivie devant elle.
115
Valente v. The Queen, 1985, 2, S.C.R., p.673.
116
FAVOREU (L.), op. cit., p.227.
117
Idem., p. 255.
118
Art.21 de la Loi organique n° 97-01/PR du 8 janvier 1997 portant organisation et fonctionnement de la Cour
constitutionnelle.
119
Art. 14 du Règlement intérieur de la Cour constitutionnelle du 13 mai 1997.
120
Décision n°01-HCC/D.4 du 28 juin 1991 portant Règlement intérieur de la Haute-Cour constitutionnelle
malgache.
121
CC, déc. n° 2001-448 DC, 25 juillet 2001, Loi organique relative aux lois de finances, Rec., p. 99, cons. 25.
Dans le même sens, voir. la décision CC, déc. n° 2001-456 DC, 27 décembre 2001, Loi de finances pour 2002,
Rec., p. 180, cons. 46 et 47.
122
DI MANNO (T), « L’autonomie financière des cours constitutionnelles en Europe », in Douat(E.), (dir.), Les
budgets de la justice en Europe – Études comparées France, Allemagne, Royaume-Uni, Italie, Espagne et
Belgique, Mission de recherche « Droit et Justice », La Documentation française, coll. « Perspectives sur la
justice », 2001, p. 53 et s., p. 60.
123
JACQUELOT (F.), « L’autonomie financière des cours constitutionnelles : l’expérience du Conseil
constitutionnel français », Exposé présenté lors de la conférence organisée par la Commission de Venise à
Sarajevo sur les budgets des Cours constitutionnelles, les 14 et 15 octobre 2004.
124
Concrètement, c’est le Président de la juridiction qui arrête annuellement un projet de budget. Ce projet est
transmis au ministère des Finances qui l’inscrit, sans modification, dans une partie du projet de loi de finances.
Ensuite, il est approuvé sans discussion par le Parlement.
125
Au sein de la juridiction, c’est le Président qui est ordonnateur des dépenses et qui les mandate. Le trésorier
de la juridiction, choisi et nommé par le Président et responsable devant lui, exerce les fonctions de comptable.
Par conséquent, l’organisation de la juridiction constitutionnelle échappe au principe classique de séparation des
ordonnateurs et des comptables qui exige que la décision d’une dépense soit prise par une autorité distincte de
celle qui l’exécute.
126
JACQUELOT (F.), op. cit., non paginé.
Par ailleurs les juges constitutionnels se distinguent des juges ordinaires par leur
désignation. Il existe cinq (5) modes principaux de désignation des membres constitutionnels
127
VIGNON (Y.B.), cité par Dime Li Nlep (P.), « La garantie des droits fondamentaux au Cameroun », Bénin –
Mémoire pour l’obtention du DEA en Droit international des Droits de l'Homme, Université Abomey-Calavi,
2004, p.87.
128
COMMARET (D.N.), « Une juste distance ou réflexions sur l'impartialité du magistrat », D. 1997,
Chroniques, p. 262.
129
Ce délai est de sept ans au Gabon, six (6) ans au Niger, neuf (9) ans au Cameroun.
130
FERRETTI (R.), « La composition du Conseil Constitutionnel », La Gazette des communes des départements
et des régions, 2004, non paginé.
Quel que soit le mode de nomination, les organes politiques interviennent. Les Etats
africains de l’espace francophone n’innovent pas dans ce domaine. Ce mode peut être
considéré comme un facteur de légitimation de la justice constitutionnelle parce ce que les
juges sont amenés à se prononcer sur les lois votées par le Parlement. Le contrôle sera mieux
accepté par les organes politiques.
Néanmoins, le risque d’une politisation de la nomination et de la cour constitutionnelle
demeure. Dans certains Etats ce risque est atténué par l’exigence d’une majorité renforcée
pour élire les juges. Cela signifie qu’un seul parti ne peut pas imposer ses choix et implique
que les partis s’entendent sur les candidatures. En Allemagne, les deux grands partis
politiques s’entendent à l’avance. La répartition des postes se fait à la proportionnelle.
En Afrique noire francophone, les juridictions constitutionnelles ont une composition
diversifiée 136 . Dans beaucoup de pays, les juges constitutionnels doivent être magistrats,
131
En Allemagne, les membres du tribunal de Karlsruhe sont élus par le Parlement. L’élection se fait à la
majorité des 2/3. En Pologne, les 15 membres du tribunal constitutionnel doit être élus par les sénateurs et
députés. Au Pérou, c’est le Congrès qui désigne les juges constitutionnels à la majorité des 2/3. Le système
électif existe au Portugal, en Croatie, en Lettonie, en Azerbaïdjan…
132
Aux Etats-Unis, la nomination des juges à la Cour suprême relève d’une proposition du Président, approuvée
par le Sénat. Le Sénat a un droit de veto. C’est ainsi que des membres proposés par le Président Reagan avait été
refusés par le Sénat. En Belgique, le roi nomme les membres de la Cour constitutionnelle sur une liste établie par
le Parlement. En Russie, les membres sont nommés par le Parlement sur proposition du Président de la
fédération.
133
C’est le système au Canada, en Irlande, en Norvège, en Afrique du Sud, au Congo et dans la plupart des Etats
d’Afrique. En Afrique du sud, les membres sont nommés par le Président sur proposition du Président du conseil
supérieur de la magistrature. Au Congo Brazzaville, les membres de la Cour sont nommés par le Président de la
République en raison de trois (3) sur sa propre initiative et les autres sur proposition des Présidents de chaque
chambre du Parlement et du bureau de la Cour suprême parmi les membres de cette juridiction en raison de deux
membres par autorité (art.144 CC). Jusqu’à la révision du 23 juillet 2008, le Conseil constitutionnel français
était la seule cour constitutionnelle dont le système de nomination était discrétionnaire. Depuis 2008, les
nominations sont soumises à l’avis de la commission permanente compétente du parlement. Si les commissions
parlementaires donnent un avis négatif à la majorité des 3/5, la proposition sera rejetée.
134
C’est le système hybride. Il est pratiqué au Togo où la Cour constitutionnelle est composée de sept (7)
membres dont deux sont élus par l’Assemblée nationale sur proposition du président de l’Assemblée, un (1)
membre nommé par le président de la République, un (1) membre nommé par le Premier ministre, un (1)
magistrat élu par ses pairs, un (1) avocat élu par ses pairs et un (1) enseignant de la faculté de Droit élu par ses
pairs pour un mandat de sept (7) ans non renouvelable.
135
Il s’agit du cas particulier de la Grèce où les juges à la Cour spéciale supérieure sont tirés au sort parmi les
juges de la Cour de cassation et tous les professeurs de droit du pays.
136
Au Bénin, la Cour constitutionnelle comprend trois membres désignés par le Président de la République et
quatre membres désignés par le Bureau de l'Assemblée nationale. Ils sont tous désignés pour cinq ans
renouvelables une fois. Au Mali, la Cour constitutionnelle comprend neuf membres nommés comme suit : trois
par le Président de la République, trois par le Président de l'Assemblée nationale et trois par le Conseil supérieur
de la magistrature. Ils sont nommés pour sept ans renouvelables une fois. Au Mali, comme au Bénin, le Président
de la Cour constitutionnelle est élu par ses pairs pour la durée du mandat. En outre, les autorités de nomination
n'ont pas la même durée de mandat. Ainsi, au Bénin, le président est élu pour cinq ans renouvelables une fois et
les députés pour quatre ans. Les députés sont rééligibles. On constate aussi que les membres des deux Cours
constitutionnelles sont nommés et non élus.
137
En France, aucune condition n’est requise. Cependant, près de 90% des membres nommés sont titulaires de
diplômes juridiques et ½ ont été parlementaire ou ministre. Aux Etats-Unis, il n’y a pas non plus de condition
mais en réalité ils ne proposent que des juristes confirmés, généralement des magistrats.
138
FAVOREU (L.), « La légitimité du juge constitutionnel », In: Revue internationale de droit comparé. Vol. 46
n° 2, Avril-juin 1994, p.571.
139
SCOFFONI (G.), « La légitimité du juge constitutionnel en droit comparé : les enseignements de l'expérience
américaine », in: Revue internationale de droit comparé. Vol. 51, n°2, Avril-juin 1999, p.254.
140
COLLIARD (C.-A) et LETTERON (R.), Libertés publiques, 8e édition, Paris, D., 2005, p.177. 569 p.
141
Voir « Ethique à Nicomaque » (IVème siècle av. J.C.). L’éthique à Nicomaque, principal ouvrage d’Aristote
traitant de la philosophie morale, est un exposé des différentes questions relatives à l’action humaine, en vue
d’apprendre à l’homme non seulement à connaitre la vérité mais à vivre selon la vérité.
Le principe d’« indépendance » est affirmé d’une manière ou d’une autre dans les
textes d’une large majorité des États d’Afrique noire francophone143. On le retrouve soit dans
la Constitution, soit dans les textes régissant la profession tels que le statut de la magistrature
ou la loi organique sur la Cour constitutionnelle.
Ainsi, les dispositions juridiques qui régissent les juridictions constitutionnelles jouent
un rôle fondamental dans la réalisation de l’indépendance du juge constitutionnel. On peut
dans cette perspective s’arrêter sur quelques considérations.
D’abord l’exigence de conditions rigoureuses pour l’accession à la magistrature
constitutionnelle constitue un élément favorable à l’indépendance, du fait qu’elle circonscrit
les opportunités de désignation en les limitant à une élite restreinte, avec la réduction des
risques de désignation parmi des magistrats agissant sur les directives de ceux auxquels ils
doivent leur élection ou nomination. Au Mali, « Outre les critères d’expérience et de
compétence, le choix des membres de la Cour constitutionnelle tient également compte de
l’intégrité morale et professionnelle des intéressés144 ».
Dans le même sens, l’exigence d’un âge avancé pour la désignation contribue à
l’indépendance, du fait qu’elle circonscrit les ambitions de promotion du juge constitutionnel,
promotion à laquelle il risque d’aspirer à travers l’exploitation de sa position.
En outre, la prohibition pour l’autorité qui a élu ou nommé le juge constitutionnel de le
démettre en dehors de dispositions limitatives constitue aussi une garantie d’indépendance.
Ensuite, la prohibition du renouvellement du mandat du juge constitutionnel lui assure
l’autonomie de décision et le libère de l’obsession de satisfaire l’autorité en vue d’un
renouvellement de mandat. Au Niger, les membres de la Cour sont nommés pour six(6) ans.
142
EISENMANN (C.), Cité par TAWIL (E.), in « L’organe de justice constitutionnelle – aspects statutaires »,
VIème congres de l’association française des constitutionnalistes, Montpellier, Juin 2005, p.1.
143
Selon l’Article 88 de la Constitution de la République du Sénégal, projet du 13 décembre 2000, texte adopté
par référendum du 7 janvier 2001, « Le pouvoir judiciaire est indépendant du pouvoir législatif et du pouvoir
exécutif. Il est exercé par le Conseil constitutionnel, le Conseil d'Etat, la Cour de Cassation, la Cour des Comptes
et les Cours et Tribunaux ». En RDC, l’Article 149 de la Constitution précise que « Le pouvoir judiciaire est
indépendant du pouvoir législatif et du pouvoir exécutif. Il est dévolu aux Cours et Tribunaux qui sont : la Cour
constitutionnelle, la Cour de cassation, le Conseil d’Etat, la Haute Cour militaire, les cours et tribunaux civils et
militaires ainsi que les parquets rattachés à ces juridictions ».
144
Loi n° 97-010 du 11 février 1997 portant loi organique déterminant les règles d’organisation et de
fonctionnement de la Cour constitutionnelle ainsi que la procédure suivie devant elle.
145
L’art 105 al.4 de la Constitution de la VIe République dispose que : « Les membres de la Cour
constitutionnelle sont nommés pour six (6) ans par décret du Président de la République. Leur mandat n’est pas
renouvelable ». Cette interdiction est réitérée à l’Art.3 de la Loi n° 2000-11 du 14 août 2000 déterminant
l’organisation, le fonctionnement et la procédure à suivre devant la Cour constitutionnelle.
146
L’art.51, al. 1er de la constitution du Cameroun du 18 janvier 1996, dispose que « le conseil constitutionnel
comprend onze (11) membres, désignés pour un mandat de neuf (9) ans non renouvelable ».
147
Voir art 165 de la Constitution du Tchad du 31 mars 1996 (Révisée par l’Assemblée Nationale en mai 2004 et
amendements en attente d’adoption par référendum à la fin de l’année 2004).
148
PORTELLI (H.), Droit constitutionnel, 7e édition, Paris, D., 2007, p.289.
149
Aux termes de l’art 51.5. de la Constitution camerounaise du 18 janvier 1996, « Les fonctions de membre du
Conseil constitutionnel sont incompatibles avec celles de membre du Gouvernement, du Parlement ou de la Cour
suprême. Les autres éléments du statut tels les incompatibilités, les obligations, les immunités et les privilèges,
sont fixés par la loi ».
150
Voir dans ce sens la Loi n° 97-010 du 11 février 1997 portant loi organique déterminant les règles
d’organisation et de fonctionnement de la Cour constitutionnelle ainsi que la procédure suivie devant elle au
Mali. Selon l’Article 7 de cette loi, « Sauf le cas de flagrant délit, les membres de la Cour constitutionnelle ne
peuvent être poursuivis, arrêtés, détenus ou jugés en matière pénale qu’après avis de la Cour constitutionnelle ».
151
NGUELE ABADA (M.), « L’indépendance des juridictions constitutionnelles dans le constitutionnalisme des
Etats francophone post guerre froide : l’exemple du Conseil constitutionnel Camerounais », disponible en ligne
sur www.droitconstitutionnel.org/congresmtp/textes5/ABADA.pdf.
Il est dès lors acquis, dans les Etats de droit, que les élections sont fondées sur des
des grands principes relatifs au suffrage à savoir, l’universalité, l’égalité, la liberté et encore
encore les caractères direct et secret154. Ce corpus de règles a donné naissance à ce qui a été
a été appelé “ droit électoral ”155, Il apparaît que ce droit électoral répond au caractère matériel
matériel traditionnel du droit, à savoir la prescription de comportements assortis de
sanctions156. Ainsi, la validité et l’effectivité de la règle électorale, c’est le contrôle qu’exerce
le juge et les sanctions qu’il peut prononcer 157 . C’est pourquoi, « Largement sollicité, le
Conseil constitutionnel est devenu […] le juge de l'application de la loi
électorale 158 ». L’originalité du droit électoral se manifeste de manière relative dans le
caractère des règles applicables mais beaucoup plus nettement dans la notion de juge
électoral. La qualification de juge électoral est attachée exclusivement à l’objet du recours et à
la mission confiée au juge, celle d’examiner le recours électoral (Paragraphe I) afin de
sanctionner les éventuelles irrégularités en usant de ses pouvoirs (Paragraphe II).
152
Seulement faut-il préciser que la majorité des Etats d’Afrique noire francophone consacrent un mandat
renouvelable. Ce qui ne met pas les juges à l’abri des sollicitations politico-partisanes diverses.
153
ROUSSEAU (D.), Cité par TAWIL (E.), op.cit., p.12.
154
GARONNE (P.), « Les principes constitutionnels du droit électoral », in Les nouvelles tendances du droit
électoral dans la Grande Europe, Commission européenne pour la démocratie par le droit, colloque Science et
technique de la démocratie, actes des 17 et 18 avril 1999, n°25, p.11.
155
Le droit électoral a fait l’objet en France d’une codification en 1964. Il est à remarquer que le code électoral
actuel comprend le texte de la codification officielle de 1964, évidemment mis à jour, mais aussi divers textes
extérieurs (utiles à sa compréhension) ainsi que des annexes consacrées aux élections que le code électoral
n’aborde pas (à savoir les élections présidentielles et européennes). Ainsi, il apparaît déjà que le droit électoral
n’est pas d’un accès le plus aisé pour les personnes non spécialisées.
156
HaMON (F.), TROPER (M.), BURDEAU (G.), Droit constitutionnel, Manuel, Paris, L.G.D.J., 2001, p. 13.
157
DELPEREE (F.), « Le contentieux électoral en Europe », Les Cahiers du Conseil constitutionnel, n° 13 /
2002, p.100.
158
CAMBY (J.-P.), « Le contentieux des élections des députés : éléments pour un bilan », Les Cahiers du
Conseil constitutionnel, n°5, 1998, p.92.
D'une manière générale un recours est le fait d'en appeler à une tierce personne
une institution, pour obtenir la reconnaissance d'un droit qui a été méconnu. Encore
« saisine », le recours peut être amiable ou contentieux, et selon l'objet du différend, il
être civil, ou administratif ou électoral. Le procès institué soit devant une juridiction,
devant des arbitres constitue un recours159. En matière électorale, le recours se fait à
d’une requête portée devant une juridiction notamment le Conseil ou la Cour
constitutionnelle. Pour que la requête soit accueillie, il faut d’abord que le recours soit
fondé(A) et qu’il présente en outre certains caractères(B).
A- Le litige électoral :
159
BRAUDO (S), Dictionnaire de droit privé, en ligne sur http://www.dictionnaire
juridique.com/définition/recours.php
Par actes préparatoires, on entend donc les décisions prises par les autorités
compétentes qui sont autant de préalables à la tenue des opérations électorales : convocation
du corps électoral, durée de la campagne électorale, répartition du temps de parole sur les
chaînes de radiodiffusion et télévision, découpage électoral, enregistrement des
candidatures… La contestation de la légalité de ces décisions relève du contentieux ordinaire
des actes administratifs. Ce qui justifie la compétence des Tribunaux ordinaires dans certains
cas surtout en matière du contentieux de la liste électorale161.
Toutefois la grande majorité des Juridictions constitutionnelles africaines à l’instar de
leur homologue française admettent leur compétence pour statuer sur de tels actes, soit dans le
cadre d’une requête dirigée contre l’élection d’un parlementaire, soit, mais à titre
exceptionnel, avant le déroulement des opérations électorales si les griefs invoqués mettent en
cause la régularité de l’ensemble des opérations 162 . Cette jurisprudence a été étendue à
l’élection présidentielle en France163.
En définitive, et comme le souligne M. Jean Louis Debré, le conseil intervient avant le
scrutin en qualité de juge pour par exemple « examiner la légalité des décrets convoquant les
électeurs […]164». Plusieurs décisions ont été rendues dans ce sens165.
En ce qui concerne le contentieux de l’opération électorale proprement dite, son objet
est de contester les résultats de l’élection. Sont ici susceptibles d’être sanctionnées toutes les
irrégularités capables d’affecter la sincérité des élections mais encore faut-il qu’un recours en
contestation soit introduit.
160
CAMBY (J-P), cité par KESSOUGBO (K.), « La Cour constitutionnelle et la régulation de la démocratie au
Togo », RJP, Vol.59, 2005, p.64.
161
Le Benin, la Guinée-Bissau et le Niger font exception puisque la Juridiction constitutionnelle y est
compétente en matière de contentieux de la liste électorale.
162
Voir Conseil constitutionnel, décision Delmas du 11 juin 1980.
163
VILLIERS (M.), « Aspects contentieux des élections », Atelier de formation électorale, Erevan, Commission
de Venise, 7 mai 2003, p. 25.
164
DEBRE (J.-L.), « Le rôle du Conseil constitutionnel français dans les scrutins nationaux », Intervention de
M. Jean-Louis Debré, Président du Conseil constitutionnel, à l’occasion de la visite des Juges de la Cour
suprême des Etats-Unis, 16 juin 2007.
165
Voir dans ce sens la Décision DCC 09-068 du 15 juin 2009 de la Cour Constitutionnelle du Benin qui décida
que « Le Décret n° 2009-094 du 23 mars 2009 portant convocation du corps électoral et nomination des
membres du Comité National de Supervision au Conseil Economique et Social n’est pas contraire à la
Constitution » à la suite d’un recours en inconstitutionnalité de ce décret introduit par M. Bonaventure Hetchili.
L’étude de cette rubrique se fera à la lumière des principes généraux que sont : la
saisine, les délais, l’instruction et les voies de recours.
La saisine du juge constitutionnel statuant en matière électorale est soumise au respect
de prescriptions formelles. A cet effet, la requête adressée à la juridiction doit être écrite. Elle
se présente sous la forme d’une lettre et doit explicitement mentionner l’objet de la saisine qui
doit impérativement tendre à la proclamation d’un candidat166.
Cette requête doit comporter le nom, le prénom, l’adresse, la signature ou l’empreinte
digitale de son ou de ses auteurs. Les requêtes sont déposées ou adressées à la Juridiction.
Elles sont généralement déposées au siège de la Juridiction contre récépissé, constituant la
preuve du dépôt de la requête et ce en toute matière167.
Les personnes autorisées à saisir le juge électoral ne sont pas les mêmes que
celles autorisées à saisir le juge constitutionnel. Les autorités étatiques168 ont un rôle
secondaire et doivent faire preuve de neutralité169. En revanche, les premiers concernés
sont les candidats eux-mêmes et les partis politiques qui participent au scrutin. Dans
certains cas, les électeurs ont également la possibilité de saisir le juge170.
Dans les États francophones d’Afrique noire, pour les deux scrutins nationaux,
les candidats ou leurs représentants peuvent saisir le juge constitutionnel d’une requête
électorale. Ils sont, en effet, les premières victimes des éventuelles irrégularités
électorales. La saisine des partis et formations politiques est moins répandue mais il ne
faut pas négliger le fait que les partis politiques accompagnent les candidats qu’ils
désignent durant tout le processus électoral et la saisine du candidat équivaut à une
saisine du parti, qui investit tous ses moyens financiers et juridiques dans la bataille171.
166
MASCLET (J.-C.), Droit électoral, PUF, 1989, p.336.
167
ROUSSEAU (D.), « Le contrôle des élections politiques nationales », Troisième séminaire international
d'Erevan sur « Le contentieux électoral devant la cour constitutionnelle » organisé par la Commission de Venise
en coopération avec la Cour constitutionnelle d’Arménie, Erevan, Arménie, 15-16 octobre 1998, non paginé.
168
Entendre par là le Président de la République, le Premier ministre, les parlementaires.
169
Les autorités étatiques ne sont pas exclues du contentieux, par le biais des représentants locaux de l’État en
France et au Mali ou d’agents du Gouvernement au Cameroun et au Gabon. Mais ce recours doit être exercé
dans les délais.
170
La saisine est ouverte aux électeurs, au Gabon, à Madagascar, au Niger et au Rwanda pour l’élection
présidentielle ; au Burkina Faso, au Cambodge, en France, au Gabon, à Madagascar, en Mauritanie, au Niger et
au Rwanda pour les élections parlementaires.
171
L’Algérie, le Bénin, le Burkina Faso, la Guinée-Bissau, Madagascar, le Mali, la Mauritanie et le Sénégal
n’autorisent pas les groupes politiques à saisir le juge constitutionnel d’une réclamation portant sur l’élection du
président de la République. Le Burkina Faso, le Cameroun, la Guinée-Bissau, le Liban, Madagascar, le Maroc, la
Mauritanie et le Sénégal ont adopté la même solution pour l’élection des parlementaires. L’Algérie, le Bénin et
le Mali permettent, en revanche, aux partis de saisir la Cour pour ce deuxième scrutin.
172
MASCLET(J.C), op.cit., p. 343.
173
En Algérie, au Bénin, au Burkina Faso, au Congo, en France, en Guinée-Bissau, au Mali, en Mauritanie, au
Rwanda, au Sénégal, au Tchad et au Togo pour les élections présidentielles, en Algérie, au Burkina Faso, au
Cambodge, au Cameroun, en Guinée-Bissau, au Mali, en Mauritanie, au Rwanda, au Sénégal et au Togo pour les
élections parlementaires. Toutefois, l’on observe une tendance à accorder un délai plus long pour les élections
parlementaires. Ainsi, par exemple, au Togo, le délai est de 48 heures pour l’élection du président de la
République et de 72 heures pour l’élection des députés.
174
En général, il s’agit de la proclamation provisoire lorsqu’elle est prévue dans les textes.
175
ACCPUF, Bulletin, n° 5, MAI 2005, « La proclamation des résultats et le contentieux électoral », pp. 53-54.
176
C’est le cas en Algérie, au Bénin, au Burkina Faso, au Congo, en Guinée-Bissau, à Madagascar, au Mali, au
Maroc, en Mauritanie, au Niger, au Sénégal, et au Togo.
177
Le président du Conseil constitutionnel français désigne 10 rapporteurs adjoints parmi les magistrats du
Conseil d’État et de la Cour des comptes.
178 Au Benin, au Togo et au Sénégal, la Cour ou le conseil statue en audiences secrètes.
179
Au Gabon, au Mali et au Rwanda, la Cour statue en audiences publiques
Tout ceci se déroule dans un délai assez bref 181 même si pour d’autres pays,
minoritaires d’ailleurs, cette affirmation est inexacte182. Le juge aura donc pour obligation,
obligation, après saisine, d’user de ses pouvoirs pour trancher le litige.
180
C’est un recours qui permet au juge de rectifier une erreur non juridique qui serait intervenue dans la décision.
181
Ce délai est de Huit(8) jours au Burkina Faso, au Benin et au Togo.
182
Au Gabon, délai moyen de six(6) mois à Madagascar ce délai est de deux(2) mois.
183
WODIE (F.), Institutions politiques et droit constitutionnel en côte d’ivoire, Presses Universitaire de Côte
d’Ivoire, 1998, p.317.
184
MASCLET (J.-C.), op. cit., p. 356.
185
GENEVOIS (B.), « Le nouveau rôle du juge de l'élection », Pouvoirs, n° 70, 1994, p. 77.
186
Pour décider si une formalité est substantielle ou non, le juge se pose une question précise : l’omission de
cette formalité ou les irrégularités commises lors de son accomplissement ont-elles eu une influence
déterminante sur le sens de la décision administrative attaquée ? En cas de réponse positive, la formalité est
considérée comme substantielle.
187
GHEVONTIAN (R.), « La notion de sincérité du scrutin », Les Cahiers du Conseil Constitutionnel, n° 13,
2002, p. 89.
C’est pourquoi, l’élection peut-être valable quoiqu'on y relève des cas isolés de
corruption ou d'abus d'influence, lorsqu'il est avéré qu'ils n'ont pu agir que sur un nombre
restreint d'électeurs, et que l'annulation de leurs suffrages, en les supposant acquis à l'élu, ne
l'empêche pas de conserver une majorité appréciable. C'est la raison pour laquelle l'écart de
voix joue souvent un rôle décisif dans le contentieux électoral.
Cependant, en cas de manœuvres frauduleuses massives, l'atteinte à la sincérité du
scrutin est présumée. Une telle atteinte à la sincérité du scrutin conduit le juge à tirer des
conséquences.
Ainsi, en Afrique noire francophone, le juge de l’élection n’est pas, comme celui de
l’excès de pouvoir, emprisonné dans l’alternative annulation-rejet. Il peut aussi rectifier les
résultats, avec les conséquences que cela comporte pour les candidats élus188. Le contenu de
la décision varie tant en fonction des conclusions des parties que de l’appréciation
qu’appellent les circonstances de l’affaire. Le juge électoral dispose de pouvoirs spécifiques
qui apparaissent à l’examen des diverses décisions qu’il prend.
Le juge électoral peut reformer les résultats s’il apparaît que des erreurs ou des
illégalités ont affecté le décompte des voix. Cette modification des résultats arithmétiques du
suffrage comporte naturellement des conséquences pour les candidats. Elle peut conduire à
proclamer un candidat élu à la place d’un autre ou à modifier l’ordre de classement attribué à
188
MASCLET(J.-C.), op. cit., pp. 357 et s.
Le juge électoral peut en premier lieu confirmer l’élection s’il estime que les
faits allégués ne sont pas établis ou qu’ils ne sont pas de nature à modifier le résultat,
nonobstant l’existence d’une illégalité dans le déroulement de la campagne électorale
ou des opérations électorales.
Il peut en second lieu annuler l’élection s’il estime que les faits constatés ont eu
sur le résultat une incidence telle que celui-ci ne traduit plus la volonté du corps
électoral. Si pour l’élection présidentielle, une annulation totale semble peu probable,
il n’en va pas de même pour les annulations partielles étant donné que ces annulations
partielles dans certains bureaux de vote n’affectent pas le résultat final. Cependant, la
juridiction constitutionnelle électorale dispose, en matière d’élections parlementaires
de pouvoirs très étendus.
189
GHEVONTIAN(R.) ; « Les pouvoirs du Conseil constitutionnel français en matière électorale », Séminaire
UNIDEM sur « Les standards européens du droit électoral dans le constitutionnalisme contemporain, Sofia, 28 -
29 mai 2004, p.9.
190
En fait, le juge électoral se trouve confronté ici à une difficulté matérielle majeure : la réformation le
transforme en bureau de recensement et il doit donc pouvoir donner un résultat précis en termes de voix avant de
proclamer le nouvel élu. Très souvent, cela est impossible faute de pouvoir quantifier à l’unité près l’impact réel
de la fraude. Du coup, et parfois à regret, il doit se contenter de la simple annulation ce qui ouvre la perspective
d’une nouvelle élection à laquelle tous les candidats peuvent se présenter, y compris l’auteur ou le bénéficiaire
de la fraude. Et la sociologie électorale nous montre clairement que dans la plupart des cas l’électeur ne tient
guère compte de considérations morales au moment d’effectuer de nouveau son choix. Le risque est d’autant
plus grand que la sanction d’inéligibilité, qui pourrait éventuellement frapper l’auteur ou l’instigateur de la
fraude ne peut être prononcée que par le juge pénal qui n’intervient que très tard après l’élection et parfois même
après l’expiration du mandat.
191
MILACIC (S.), « Le juge face à la norme électorale », Strasbourg, 30 octobre 2008, CDL-UD, France, 2008,
005, pp. 6-7.
192
En dehors de la Guinée-Bissau et du Rwanda qui confient cette compétence respectivement à la commission
électorale indépendante et à la Cour suprême, les autres Etats laissent la charge à la juridiction constitutionnelle.
Cette affirmation n’est valable que pour les élections présidentielles. Pour les législatives, hormis les deux pays
précités, le Congo et la Maurétanie reconnaissent cette compétence au Ministre de l’intérieur.
193
Il convient de nuancer pour dire que La proclamation des résultats définitifs ne conclut pas forcément le
processus électoral et le juge électoral peut toujours être saisi d’une requête électorale. C’est le cas au Gabon, en
Guinée-Bissau, en Mauritanie, au Niger. Au Bénin, et Congo, cela n’est possible que pour contester l’élection
d’un parlementaire. Source : ACCPUF, op.cit., bulletin N° 5.
Selon Assane Mbaye « Depuis quelques années, l’euphorie consécutive aux conquêtes
démocratiques et l’épanouissement corrélatif du constitutionnalisme ont laissé place à une
réalité plus mitigée, une sorte de « reflux », suscitant perplexité et interrogation face à des
systèmes démocratiques et institutionnels jugés ineffectifs au sens où ils n’ont pas
globalement produit les résultats escomptés; ces systèmes sont devenus instables, et,
paradoxalement, alimentent les crises et les conflits, parfois violents, plutôt que de les
réguler194».
Une autre caractéristique de ces élections est cette impression que l'issue est connue
d’avance du fait même du peu de renouvellement qu’elles devraient normalement opérer.
A travers ces malheureuses situations, c’est le contentieux électoral qui est mis en
cause pour les décisions orientées qu’il sert aux candidats à la suite des élections. Le juge ne
se comporte donc pas en homme juste qui, d’après la définition d’Aristote est : “ celui qui est
capable, lorsqu’il doit partager entre deux personnes, de donner à chacun une part
proportionnellement égale à ce qui lui revient”196.
194
MBAYE (A), « Alternatives pour l’effectivité des constitutions en Afrique de l’ouest », in Alternatives
constitutionnelles et institutionnelles en Afrique de l’ouest, Atelier de Lomé pour le colloque de Polokwane, 28-
30 mai 2008, p.2.
195
THOKO (M.), “The Electoral Process and the Democratic Changeover of Political Power between Parties”,
International Conference organized by the Institute of Human Rights and Promotion of Democracy on the topic
of Challenges of democratic succession in Africa, Cotonou, Benin, 23-25 February 2009, p.7.
196
ARISTOTE, Ethique a Nicomaque, Livre, Vol. 2.
197
Définition de la démocratie donnée le 19 Novembre 1863 par Abraham Lincoln, Président américain sur le
champ de bataille de Gettysburg.
A l’appui des propos d’Omar Sakho selon lesquels, « s’il est vrai que les discours
officiels sur la finalité assignée à la justice – l’ordonnancement harmonieux des droits et
libertés à pied d’œuvre dans la société – sont truffés de belles formules propres à élever la
conscience collective au niveau des valeurs de dignité et de respect de l’autre, quels que
soient les aspects considérés de son droit ou sa liberté, on aurait tort toutefois de croire que
l’application des décisions du suffrage universel va de soi dans ce domaine particulièrement
complexe198».
198
OUMAR SAKHO (P.), « Quelle justice pour la démocratie en Afrique », Pouvoirs 2009/2, n° 129, p.59.
199
GABORIAU (S.), « L’impartialité du juge n’est pas la neutralité. Pour une conception engagée de la fonction
judiciaire », p.10. Disponible en ligne sur http://medel.bugiweb.com/usr/4Gaboriau.pdf.
Pour Michel Rosenfeld, « rendre la justice exige que […] l'on applique les lois;
or les lois sont loin d'être toujours bonnes, claires et complètes200 ». Il existe des
lacunes dans la couverture législative de l’élection. En effet, la Constitution et le code
électoral qui lient le juge peuvent le priver de son pouvoir d’infléchir la norme par
200
ROSENFELD (M), « Bush contre Gore: trois mauvais coups portés à la Constitution, à la Cour et à la
Démocratie », Les Cahiers du Conseil constitutionnel, n° 13, 2002, p.113.
Même si l’examen des textes montre des efforts fournis pour élaborer de nouveaux
dispositifs et règles inédits dans la perspective de gérer effectivement les relations politiques
et d’assurer le développement démocratique, l’on doit reconnaitre avec le Professeur Jean Du
Bois De Gaudusson que l’un des reproches faits aux réformes entreprises en Afrique serait de
manquer d’imagination et de réalisme. Bien des œuvres constituantes se bornent à reprendre
des dispositions et modèles élaborés en d’autres lieux et en d’autres temps sans toujours tenir
compte de la situation sociale et politique201. Ce qui aboutit à consacrer un droit électoral
souvent incomplet, inadapté, inopérant voire muet sur certains points aussi importants que le
financement des élections.
Dans cette matière en effet, les modalités financières des élections, recouvrant tout à la
fois leur coût pour les budgets nationaux et l’apport des bailleurs de fonds internationaux, leur
impact sur le bon déroulement de la campagne et des opérations de vote proprement dites sont
susceptibles de favoriser ou non une libre expression du suffrage et donc d’apaiser ou non la
vie politique. Cette affirmation pose le problème du dépassement du plafond des dépenses
électorales et de la corruption électorale.
Selon Loada et Ibriga, la corruption électorale peut se définir au sens large comme des
manipulations illégitimes des préférences des électeurs par les partis politiques et les
candidats, et au sens étroit, comme l'achat c’est-à-dire corruption active et ou la vente des
voix des électeurs, corruption passive202. Le suffrage des électeurs n'est plus, dans ce cas,
sollicité sur la base d'un programme politique que les partis ont l'obligation de concevoir dans
la perspective de la conquête du pouvoir, mais en fonction de considérations purement
matérielles.
201
DE GAUDUSSON (J.), « Défense et illustration du constitutionnalisme en Afrique après quinze ans de
pratique du pouvoir », Mélanges en l’honneur de Louis Favoreu, Le renouveau du droit constitutionnel, Dalloz,
2007, p. 620. Mais l’éminent professeur revient à la charge pour soutenir qu’ « […] au-delà des similitudes
textuelles, la convocation systématique du mimétisme devient plus encore caduque pour rendre compte d’une
Afrique déjà en elle-même multiple, mais qui apparaît de plus en plus diverse ».In DU BOIS DE GAUDUSSON
(J.), « Le mimétisme postcolonial, et après ? », Pouvoirs, 2009/2, n° 129, p.55.
202
LOADA (A.) et IBRIGA (L.M.), Droit constitutionnel et institutions politiques, collection Précis de droit
burkinabè, Université de Ouagadougou, PADEG, mars 2007, pp. 464-465.
203
Voir Rapport du séminaire international sur « la corruption électorale en Afrique de l'Ouest », CGD,
Ouagadougou les 27 et 28 novembre 2003, p 1.
204
SOCPA (A.), « Les dons dans le jeu électoral au Cameroun », Cahiers d'études africaines, n° 157, 2000, p.97.
205
Décision N° E-10/10 du 17 Mars 2010.
Le code électoral reste aujourd’hui une arme redoutable aux mains des autorités
politiques, leur servant à éliminer les adversaires les plus sérieux de la compétition électorale
par des moyens législatifs tels que l’obligation de résidence continue, la nationalité des
parents, l’âge d’éligibilité, le parrainage par des élus, le cautionnement extravagant au regard
du niveau de vie207.
L’Assemblée Nationale béninoise a voté toutes tendances confondues le 22 septembre
1995, par 72 voix pour, 1 contre et six abstentions, l’amendement Tévoédjro-Ladikpo
obligeant chaque candidat à l’élection présidentielle à fournir la preuve de sa renonciation à
toute nationalité autre que celle du Benin. A quelques mois de l’élection présidentielle de
1996, le texte visait en particulier à disqualifier Nicéphore Soglo, le Président en exercice,
détenteur de la nationalité française. La Cour constitutionnelle a invalidé la clause
d’élimination qui modifiait en fait l’article 44 de la Constitution208.
Par ailleurs, le juge se trouve parfois en présence de dispositions constitutionnelles ou
législatives qui fixent en matière de cautionnement un montant dont le seul but est de
dissuader certains candidats. Le cas du Sénégal l’atteste209.
Ces différentes situations déplorables et fatales pour la démocratie sont toutes dues à
l’imperfection des textes qui organisent les élections.
206
ROUSSEAU (D.), Droit du contentieux constitutionnel, 8ème Edition, Paris, Montchrestien, 2008, p.504.
207
HOLO (Th.), « Démocratie revitalisée ou démocratie émasculée ? Les Constitutions du renouveau
Démocratique dans les Etats de l’espace francophone africain : régimes juridiques et systèmes politiques »,
Revue Danoise des Sciences Juridiques et Administratives, n° 16, 2006, p.34.
208
BOLLE (S.), « La paix par la Constitution en Afrique ? La part du juge constitutionnel », Colloque
international de Cotonou de l’Académie Alioune Blondin Beye pour la paix, Cotonou, 19, 20 et 21 juillet 2004,
p. 7.
209
La caution pour être candidat à l'élection présidentielle de 2012 au Sénégal a été fixée à 65 millions de FCFA
(plus de 99.000 euros) soit plus de deux fois et demie le montant exigé des prétendants pour le scrutin de 2007,
Le directeur général des Elections, Tanor Thiendella Fall, a précisé que la hausse du montant a été décidée pour
"décourager ceux qui viennent surtout pour faire leur marketing politique personnel". Source : Article disponible
dans l’hebdo Afreeknews, écrit le Mardi, 30 Août 2011.
En effet, c’est la manière dont le juge conçoit et accomplit sa mission qui est
en cause. Le juge a tendance à s’autolimiter, à interpréter littéralement et
restrictivement ses compétences et à se prononcer quasi systématiquement sur des
questions de régularité formelle et non de fond.
L’un des exemples révélateurs de cet état de fait est celui de la Cour suprême
du Cameroun qui, en 1992, a proclamé la réélection très serrée du Président sortant,
après avoir considéré qu’en l’absence de contestation en bonne et due forme par un
éligible, un parti politique ou un candidat, il ne lui appartenait ni « [d’]apprécier », ni
de « sanctionner le cas échéant » les irrégularités relevées par la Commission
Nationale de Recensement Général des Votes. Cette interprétation très littérale de la
loi ne pouvait convaincre et rassurer car elle confinait malencontreusement la Cour
210
GUEYE (B.), « La démocratie en Afrique : succès et résistances », Pouvoirs, 2009/2, N° 129, pp.8.
211
MBAYE (A.), op. cit. p.4.
212
On peut remarquer à ce propos que cette formule signifie que le professeur Eisenmann renonce, à juste titre, à
une distinction qu’il avait proposée dans sa thèse sur la Justice constitutionnelle en Autriche entre les pouvoirs
du juge dans le cas d’une interprétation donnée in abstracto et dans le cas une interprétation in concreto. Il
écrivait alors que le juge n’est constituant que s’il a le pouvoir de donner une interprétation « dans l’abstrait, en
dehors de tout procès sur un acte ». En réalité, le Pouvoir du juge est le même dans les deux cas. Voir dans le
même sens BRUNET (P.), « Le juge constitutionnel est-il un juge comme les autres ? Réflexions
méthodologiques sur la justice constitutionnelle », in : La notion de justice constitutionnelle, sous. dir. de O.
Jouanjan, C. Grewe, E. Maulin et P. Wachsmann, Paris, D., 2005, pp. 115-135.
213
TROPER (M.), op.cit., « Le pouvoir des juges constitutionnels », Publié dans laviedesidees.fr, 7 avril 2010,
p.1.
214
GUASTINI (R.) cité par MERCIER (J.), in « Le droit constitutionnel réinterprété », Publié dans
laviedesidees.fr, le 14 mai 2010, p.2.
215
Décision 14 DC du 16 février 1993, Recueil des décisions et avis, 1991-1992-1993, P. 71.
216
DELPEREE (F.), « Le Conseil constitutionnel : état des lieux », Pouvoirs, n° 105, p.11.
217
Journal « Le Point », n° 1328, février 1998.
La tendance systématique des politiques africains à placer dans l’enceinte des Cours et
Conseils un des leurs pour en avoir théoriquement et formellement le contrôle, a éveillé le
soupçon du citoyen sur la mauvaise foi du politique.
Cette intuition est d’autant fondée que l’Afrique donne l’impression d’être infectée par
le « virus du tout politique » qui renvoie la compréhension et le fonctionnement de la société à la seule
221
entrée politique .
La preuve d’une telle affirmation est fournie par le Sénégal. Au Sénégal, la composition du
Conseil constitutionnel est totalement maîtrisée par le Président de la République qui nomme
222
discrétionnairement tous les juges . Cette situation qui crée un déséquilibre vis-à-vis du pouvoir
législatif est fatale pour le principe d’indépendance des juges. Il s’agit de façon caricaturale d’une
prise en otage du Conseil par le Président de la République.
218
JEANNEAU (B.) ET ROUSSEAU (D.) Cités par Gicquel Jean, Droit constitutionnel et Institutions
Politiques, 12e édition, Paris, Montchrestien, 1993, p.717.
219
KOKOROKO (D.), « L’apport de la jurisprudence constitutionnelle africaine à la consolidation des acquis
démocratiques : Les cas du Benin, du Mali, du Sénégal et du Togo », Revue Béninoise des Sciences Juridiques et
Administratives, n°18, 2007, p. 35 et s.
220
KPODAR (A.), « Réflexion sur la justice constitutionnelle à travers le contrôle de constitutionnalité de la loi
dans le nouveau constitutionnalisme : Les cas du Benin, du Mali, du Sénégal et du Togo » , Revue Béninoise des
Sciences Juridiques et Administratives, n°16, 2006, p.140.
221
AIVO (F.J.), Le juge constitutionnel et l’état de droit en Afrique, l’exemple du modèle béninois, l’Harmattan,
Etudes africaine, Paris, 2006, p.129. Dans le même sens Demba Sy démontre que malgré son statut protecteur,
le juge en général et le juge constitutionnel en particulier reste marqué par des influences politiques et la
corruption. Voir : SY (D.), « la condition du juge en Afrique : l’exemple du Sénégal », Afrilex, Archives, N°3,
Juin 2003, p.13.
222
Art. 89 al. 3 de Constitution de la République du Sénégal, projet du 13 décembre 2000, texte adopté par
référendum du 7 janvier 2001.
Poussant loin la réflexion, l’on peut affirmer que la pression politique exercée par le politique
sur la cour est accentuée par la possibilité de renouvellement du mandat des juges que prévoient les
223
législations de certains Etats africains . En effet, le juge constitutionnel qui a vocation à voir son
mandat renouvelé a intérêt à répondre favorablement aux sollicitations du politique et à user de son
pouvoir pour ne pas le mécontenter.
Une autre disposition figurant dans les textes des Etats africains et qui crée un malaise est celle
qui accorde au Président de la Juridiction constitutionnelle une voie prépondérante en cas de partage
des voies pendant la prise de décisions au sein de l’institution. En effet, selon l’article 32 alinéa 3 du
Règlement intérieur de la Cour constitutionnelle Congolaise : « Le Président de la Cour a la voix
prépondérante en cas de partage égal des voix ».
De même, l’article 51 de la Constitution du 18 janvier 1996 organisant la
nomination des membres du Conseil constitutionnel du Cameroun s’inscrit dans cette
logique en attribuant une voie prépondérante au Président du Conseil en cas de partage
des voies.
223
Au Mali, selon l’art.1 al. 1 de la Constitution : « La Cour constitutionnelle comprend neuf membres qui
portent le titre de Conseillers. Ils sont désignés pour un mandat de sept (7) ans renouvelable une fois ».
224
HOLO (Th.), « Démocratie revitalisée ou démocratie émasculée ? Les Constitutions du renouveau
Démocratique dans les Etats de l’espace francophone africain : régimes juridiques et systèmes politiques »,
Revue Danoise des Sciences Juridiques et Administratives, n° 16, 2006, p.34.
B- La défiance du politique :
225
BANDINTER (R.), Cité par Kokoroko (D.), op. cit. 117.
226
KESSOUGBO (K.), « La Cour constitutionnelle et la régulation de la démocratie au Togo », Revue Juridique
et Politique (R.J.P.), indépendance et coopération, volume 59, 2005, p.353-392, 392 p.
227
LUCHAIRE (F.), « Douze bizarreries constitutionnelles – bien françaises », in Mélanges CONAC (G.), Paris,
Economica, 2001, p. 151.
228
BENABDALLAH (M. A.), « L’autorité de chose jugée des décisions du Conseil constitutionnel », note sous
C.C. 29 août 2000, Autorité de chose jugée, p.5.
229
DELVOLVE (G.), Rép.cont.adm, D., V° chose jugée, p.366.
230
Art 36 de la Constitution de la République du Niger révisée par la loi n°2004-15 du 13 Mai 2004
L'élection est un choix réalisé au moyen d'un suffrage auquel toutes les
personnes disposant du droit de vote, le corps électoral, est appelé à participer dans le
but de désigner une ou plusieurs personnes pour exercer un mandat électoral. Ainsi, le
juge doit veiller à ce que le choix des électeurs ne soit pas vicié. A ce titre, « Le ou les
électeurs ainsi que l’un ou l’autre des candidats sont protagonistes du contentieux
électoral classique232 ». Cependant, l’on constate dans la procédure contentieuse que
l’intérêt de l’électeur est ignoré (A) et que même lorsque cet intérêt est pris en compte,
il rencontre des difficultés dans l’administration de la preuve (B).
Une nette impression selon laquelle le contentieux électoral n’est pas organisé dans
l’intérêt des électeurs se dégage de la jurisprudence du juge électoral. Abordant dans ce sens,
François LUCHAIRE affirme que le juge électoral « donne trop l’impression de ne voir dans
le contentieux électoral que des conflits entre deux personnes, l’élu et son concurrent le plus
immédiat233 ». Cette assertion se vérifie à travers deux constats.
D’abord, s’agissant de la saisine, peu de pays africains ouvrent le droit de recours
électoral aux électeurs. Le recours de l’électeur est prévu à de rares exceptions. Mais on peut
se demander si l’électeur connait bien l’existence des recours qui lui sont ouverts. Le
contentieux électoral est avant tout aujourd’hui une affaire entre les candidats et les
formations politiques, un contentieux dans lequel, pour l’opinion, le juge apparaît comme un
arbitre entre les forces politiques en présence. Ce qui fait du contentieux électoral un
contentieux sans électeurs pour reprendre les termes de Jean Claude MASCLET234.
231
BOLLE (S.), «Les juridictions constitutionnelles africaines et les crises électorales », Les cours
constitutionnelles et les crises, 5ème Congrès, ACCPUF, Cotonou, 22-28 juin 2009, p.4.
232
GENEVOIS (B.), « Le nouveau rôle du juge de l’élection », Pouvoirs, n° 70, 1994, p.69.
233
LUCHAIRE (F.), cité par Rousseau (D.), Droit du contentieux constitutionnel, Paris, Montchrestien, p.307.
234
MASCLET (J.C.), Rapport de synthèse, Colloque international sur le contentieux électoral et l’état de droit,
Les Cahiers de l’Association Ouest-Africaine des Hautes Juridictions Francophone, p.45.
Cependant, peu de Cours ont institué une procédure de filtrage des recours électoraux.
Il s’agit du Burkina Faso où, conformément au code électoral de 2001, l’organe compétent en
la matière est le président du Conseil constitutionnel, à qui sont adressées les requêtes.
L’exemple de la France est édifiant. En France, un filtrage s’opère par le biais des
commissions départementales de recensement pour l’élection du président de la République
qui centralisent un nombre important de réclamations électorales.
Les procédures de filtrage donnent lieu à des résultats satisfaisants dans l’ensemble de
ces pays. C’est là un mécanisme qui non seulement permettrait de soulager le juge électoral
mais aussi et surtout d’associer l’électeur au contentieux afin de respecter son droit légitime
qu’est celui de choisir librement ses dirigeants. Il faut donc que l’électeur s’approprie le
contentieux électoral et que celui-ci devienne un contentieux populaire235.
Ensuite, sont particulièrement choquantes les décisions par lesquelles le juge électoral,
constatant que des irrégularités ont été commises par les deux candidats, décide qu’elles
s’annulent mais ne constituent pas une cause d’annulation de l’élection. Evidemment, l’intérêt
de l’électeur aurait voulu que le juge électoral annule le scrutin aux motifs que le choix des
électeurs a été vicié par ces irrégularités. Le juge électoral sénégalais donne l’illustration de
ces « forfaits » dans sa décision n° 10/93 portant proclamation des résultats des législatives de
1993. Saisi d’une demande d’annulation des élections législatives, le Conseil constitutionnel
sénégalais énumère les actes frauduleux constituant à l’évidence des manquements à la
législation électorale mais ne tire pas les conséquences juridiques de ces violations.
235
A ce propos, COLLIARD (J.-C.) considère que « La démocratie étant l’affaire de tous, le contrôle de
l’opération démocratique peut être ouvert à tous », COLLIARD (J.-C.), « Le contentieux électoral », Séminaire
UNIDEM sur l’“Organisation des élections par un organe impartial”, Commission de Venise, Belgrade, 24-25
juin 2005, p.3.
B- La difficulté de la preuve
Plus fréquemment, le juge analyse les moyens mais la lecture des motifs de sa
décision de rejet donne à penser qu’il opte délibérément pour une solution défavorable
à l’opposition. La proclamation au Tchad des résultats des élections présidentielles de
2001 et législatives de 2002 illustre cette dénaturation : le Conseil constitutionnel s’est
borné pour l’essentiel à constater que les plaignants n’avaient pas rapporté la preuve
236
DIOP (O.), Partis politiques et processus de transition démocratique en Afrique noire francophone :
recherches sur les enjeux juridiques et sociologiques du multipartisme dans quelques pays de l'espace
francophone, Publibook, 2007, p. 671.
237
Cour Suprême du Togo, Chambre Constitutionnelle, Arrêt n°03 du 20 septembre 1993.
Des candidats « mal élus » ont ainsi pu échapper par cet artifice du juge électoral à
toute sanction mettant en cause la sincérité du suffrage se trouve mise en cause puisque le
peuple qui s’est exprimé d’une façon donnée peut se voir imposer un élu ou des élus qui ne
sont pas issus de son choix réel.
Cette dureté de procédure est encore renforcée par le refus de certaines juridictions de
considérer des irrégularités établies, lorsque leurs preuves ne sont apportées que par les
assesseurs ou les délégués du candidat auteur de la requête alors qu’elle n’a aucun pouvoir
d’investigation à mieux et davantage utiliser son pouvoir d'ordonner des mesures d'instruction
en confiant à ses rapporteurs le soin de mener les enquêtes locales et en exigeant des
administrations qu'elles fournissent tous les documents et informations dont elles disposent,
dès lors que le requérant aurait apporté un commencement de preuve, des éléments de faits ou
des allégations. Ainsi ce dernier ne supporterait plus la lourde charge de la preuve.
En outre, pour éclairer sa lanterne dans la résolution des litiges électoraux, le juge doit
être à même de « rentrer en contact avec les réalités électorales ». Il s’agit pour le juge
électoral d’observer les élections. Les cours pourront ainsi déployer des délégués dans les
bureaux de vote afin d’observer le déroulement du scrutin et faire des rapports en relevant les
éventuelles fraudes et irrégularités. Ce procédé qui s’inscrit dans la mission générale de
surveillance des élections du juge électoral, lui permet d’obtenir des informations sur le
déroulement des élections et de ne pas se tromper pendant l’instruction notamment en ce qui
concerne la preuve des irrégularités ou d’adopter une attitude « paresseuse » en déboutant les
requérants pour défaut de preuve239. Seulement quelques cours jouissent de cette prérogative
et l’exercent240. Mais la majorité n’a pas encore trouvé l’opportunité de ce procédé.
238
Conseil Constitutionnel du Tchad, Décisions n°s PCC/SG/01 du 12 juin 2001 et 004/PCC/SG/02 du 18 mai
2002.
239
Trop souvent le juge électoral déboute les requérants pour défaut de preuve. La récurrence de ce motif de rejet
a fini par convaincre l’opinion que le juge électoral ne prend pas son rôle au sérieux. L’observation électorale
pallierait cette insuffisance.
240
Seules les institutions béninoise, burkinabé, gabonaise, malienne, nigérienne et tchadienne observent les
opérations de vote.
A- Le manque de transparence :
241
Voir l’intervention de M. Aboudou-Salami (M.-S.) lors du Séminaire sur le thème : « le contentieux électoral
dans la perspective du perfectionnement des scrutins ultérieurs », Lomé, Togo, 02 au 07 mars 2009.
242
VEDEL (G.), « Neuf ans au Conseil constitutionnel », Le débat, n° 55, mars-août 1989.
243
LUCHAIRE (F.), « Contribution au débat sur les opinions dissidentes dans les juridictions constitutionnelles
», Cahiers du Conseil constitutionnel, 2000, n° 8, p. 111.
244
ROUSSEAU (D.), cité par Yannick LECUYER, « le secret du délibéré, les opinions séparées et la
transparence », RTDH, n°57, 2004, p.198
245
Ce qui est entendu en France par « opinions dissidentes » est rendu aux Etats-Unis par le terme d’ « opinions
séparées » (separate opinions), terme général qui englobe à la fois les opinions individuelles (concurring
opinions) et les opinions dissidentes (dissenting opinions) étant ici précisé que ce dernier terme s’applique
uniquement aux opinions qui désapprouvent le dispositif du jugement rendu.
246
Cour permanente de justice internationale, devenue après la guerre Cour internationale de justice.
247
Cour européenne des droits de l’homme, mais non Cour de justice des Communautés.
248
ZOLLER (E.), « La pratique de l’opinion dissidente aux Etats-Unis », en ligne sur http://cda.u
paris2.fr/Zoller%20Opinion%20dissidente.pdf.
Par ailleurs, la pratique de l’opinion dissidente répond à une autre nécessité que
le simple besoin de transparence, il s’agit de rendre les juges responsables de leurs
décisions.
Ainsi, l’introduction des opinions séparées, bien loin d’affaiblir cette
respectabilité, la renforcerait de plusieurs façons : elle contraindrait la majorité à
rédiger les décisions avec plus de précision et de rigueur de manière à se prémunir
contre les arguments contraires ; elle permettrait aux conseillers minoritaires de
préparer les évolutions futures ; elle inciterait les autorités de nomination à choisir des
personnalités assez qualifiées pour participer à un débat de ce type249. Parce que le
juge dissident adresse deux messages à l’endroit de ses collègues : l’un consiste à
évoquer prophétiquement un changement qui s’annonce et à le rapprocher du droit.
L’autre consiste à révéler une réalité, une vérité qui existe mais qui demeure
invisible au droit et qui est niée par le droit.
Certes, l’on pourrait objecter en soutenant à la suite de François Luchaire que
l’introduction des opinions dissidente affaiblirait l’autorité de la chose jugée attachée
aux décisions rendues en matière de contentieux électoral. Cependant, ce risque serait
écarté si l’on prenait soin de n’autoriser l’expression de ces opinions qu’après la
prestation de serment du Président proclamé élu ou l’entrée en fonction de la nouvelle
Assemblée.
Si les opinions dissidentes ne constituent pas le droit, elles ont par contre une
certaine autorité de persuasion. De plus, ces opinions peuvent devenir le droit dans la
249
TROPER (M.), op.cit., p.8
B- Un langage exagéré
Précisément, ce dernier élément, l’écart de voix, est ce qui motive in fine la décision
du juge électoral. Ce critère essentiel implique qu’un faible écart de voix entraînera
l’annulation alors qu’un écart de voix significatif justifiera le maintien des résultats malgré la
méconnaissance avérée de dispositions du Code électoral250.
Mais, que l'ampleur d'une victoire « blanchisse » de telles irrégularités conduit très
vite l'opinion et les candidats à considérer que plus la fraude est importante, plus elle est
productive de voix, et plus l'élu se met à l'abri d'une annulation de son élection. Comment ne
pas être tenté de qualifier de subjectives voire d'arbitraires ces affirmations du Conseil ?
250
DESMOULIN (G.), « Le contentieux des élections législatives : vers une application de la Convention
européenne des droits de l'homme ? », Revue du droit public et de la science politique, n°1, L.G.D.J, 1997, 37 p.
251
ROUSSEAU (D.), Droit du contentieux constitutionnel, Montchrestien, 6e éd., 2001, p.364.
Face à tout ce qui précède, il « se pose donc la question de savoir si, dans un tel
contexte, les élections concurrentielles ne sont pas un mécanisme de recyclage
d’anciens partis uniques en partis hyper dominants bénéficiant de surcroît de la
légitimité conférée par le suffrage universel253 ».
Il ne fait donc plus de doute qu’en Afrique, comme l’exprime Alioune Badara
Fall, « Le juge, ou de manière générale l'appareil judiciaire, est décrié, spolié et accusé
de tous les maux : lui dont la haute mission est de trancher les conflits et protéger les
citoyens contre les violations de leurs droits et libertés et contre tout arbitraire de la
part des pouvoirs publics, se trouve quotidiennement et violemment pris à partie et
soupçonné de partialité, de corruption, de négligence et même très souvent
d'incompétence254 ».
Toutes ces lacunes relevées dans la conduite du contentieux électoral ont créé
un déficit de confiance des citoyens et de la Communauté internationale vis-à-vis de
cette institution et de son organe. La conséquence de ce déficit de confiance est la
multiplication de procédés internationaux de surveillance des élections et de règlement
des conflits électoraux qui, loin de renforcer le contentieux électoral, le ruinent
davantage.
252
ROBERT (J.) cité par Ferdinand MELIN-SOUCRAMANIEN, « Le Conseil Constitutionnel, juge électoral »,
Pouvoirs, n° 105, 2003, p.125.
253
OTAYEK (R.), « Les élections en Afrique sont-elles un objet scientifique pertinent ? », in Des élections
comme les autres, Politique Africaine, N° 69, 1998, p.4.
254
BADARA FALL (a.) « Le juge, le justiciable et les pouvoirs publics : pour une appréciation concrète de la
place du juge dans les systèmes politiques en Afrique », Afrilex, N°3, Juin 2003, p.2.
Le contentieux électoral subi une concurrence qui se retrouve à deux niveau : d’abord
au niveau de la surveillance des élections pour déterminer leur crédibilité et ensuite au niveau
du règlement des conflits électoraux. Il s’agit de pratiques qui doivent leur existence à la
coopération internationale à la suite de l’internationalisation des élections.
En effet,« De nos jours, la coopération électorale comprend les activités réalisées par
des organismes électoraux ou des gouvernements nationaux, des organisations internationales,
des organisations non gouvernementales, des associations régionales d'organismes électoraux
ainsi que des universités ou des centres de recherche dans le but de renforcer la démocratie,
les élections et toutes les institutions et procédures qui s'y rattachent255 ».Cette forme récente
de coopération est apparue à la fin de la guerre froide parallèlement à la revalorisation de la
démocratie à l'échelle tant nationale qu'internationale. Elle a donné naissance d’une part à la
surveillance internationale des élections notamment l’observation internationale des élections
et d’autre part à la médiation internationale des élections.
Comme l’exprime Francis Djedjro, « Aujourd’hui, l’élection est devenue, dans les
pays en transition démocratique ou tout simplement en crise, une affaire internationale, ne
serait-ce qu’à travers les opérations de supervision et d’observation des processus électoraux ;
elle n’est plus la seule affaire de l’État. Les actions qui sont menées dans ce cadre par les
acteurs internationaux visent à améliorer l’organisation des scrutins, soit par l’allocation de
ressources nécessaires à la bonne organisation pratique de l’élection ou à l’indication des
principes directeurs du suffrage, soit par la dénonciation des irrégularités, soit enfin par leur
implication dans le règlement des contentieux256 ».
Cependant, il convient de préciser que ces procédés nobles sont souvent fatals pour le
contentieux électoral. Une réflexion qui prend en compte l’observation internationale (Section
1) et la médiation internationale (Section 2) des élections rendra compte de cette affirmation.
255
CARILLO (M.), « Perspectives électorales internationale : le point de vue du Mexique », Perspectives
électorales, mars 2006.
256
DJEDJRO (F.), op.cit., p.51.
Ces deux procédés qui complètent l'assistance électorale sur le plan politique258
accompagnent les « jeunes démocraties » et sont perçus aujourd’hui comme une
nécessité (Paragraphe I) au service de la légitimité démocratique (Paragraphe II).
257
BEIGBEDER (Y.), cité par GHEBALI (V.-Y.), "Elections libres et régulières", Revue trimestrielle de l’union
interpalementaire, Le Monde des Parlements, N° 26, Juillet 2007, p.8.
258
Communication de la Commission de l’Union Européenne sur les missions d'assistance et d'observation
électorales de l'UE, Commission des Communautés Européennes, Bruxelles, le 11.4.2000, com(2000) 191 final,
p.6.
259
La souveraineté c’est la compétence qu’un Etat possède; elle est par suite soumise aux limitations que l’Etat a
acceptées par conventions et à celles qui résultent des règles du droit international.
260
Cette expression est employée par ARCHIBUGI (D.) qui milite en faveur d’une démocratisation mondialisée,
ou d’une mondialisation démocratisée. Réfractaire au dogme de la souveraineté, il se fie au constitutionalisme, à
mi-chemin des politiques dites réalistes et des utopies, et prend au sérieux l’hypothèse d’un parlement mondial.
ARCHIBUGI (D.) cité par REMAUD (O.), « Vers une mondialisation démocratique », texte Publié dans
laviedesidees.fr, le 24 mars 2009.
261
Selon cette nouvelle conception, la démocratie est une garantie de paix et de stabilité au niveau international
(les démocraties auraient moins tendance à se faire la guerre).
262
Déclaration adoptée sans vote par le Conseil interparlementaire lors de sa 161e session au Caire le 16
septembre 1997.
263
HERMET (G.), Le passage a la démocratie, Paris, Presses de la Fondation nationale de science politique
(PFNSP), 1996,129 p.
264
BADIE (B.), l’état importe : l’occidentalisation de l’ordre politique, Paris, Fayard, 1992, p. 326.
265
FUKUYAMA (F.), La fin de l’histoire et le premier homme, Flammarion, Champs, 1993, 448 p.
266
CHEVALLIER (J.), L’état de droit, Paris, Montchrestien, 6e éd., 2003, 160 p.
267
BAYART (J.-F.), « La problématique de la démocratie en Afrique noire : La Baule et puis après ?», Politique
africaine, n° 43, 1991, p. 6.
268
CONAC (G.) cité par CHOUALA (Y.A.) « Éthique et politique internationale africaine du XXIe siècle : les
normes de civilité à l’épreuve du jeu réaliste des États », Politique et Sociétés, vol. 25, n° 2-3, 2006, p.192.
269
SINDJOUN (L.), « La loyauté démocratique dans les relations internationales africaines. Sociologie des
normes de la civilité internationale », Études internationales, vol. XXXII, no 1, 2001, p.31.
270
L’Etat qui ne satisfait pas à ces critères s’expose à son démembrement au nom du droit des peuples à disposer
d’eux-mêmes, dans la mesure où il y aurait manifestement ici déconnexion entre l’appareil d’Etat et le peuple,
véritable détenteur de la souveraineté dans l’Etat et de l’autodétermination.
271
Art. 2, paragraphe 3 de la Charte africaine de la Démocratie, des Elections et de la Gouvernance.
272
Art. 2, paragraphe 4 de la Charte susvisée.
273
Il faut préciser que la Déclaration de 2005 sur les principes pour l'observation internationale des élections est
la première du genre au plan universel et c’est donc elle qui fait autorité.
274
VASAK (K.), « Réflexion sur l’observation internationale des élections », Actes de la 3e réunion préparatoire
au Symposium de Bamako : Les élections, avril 2000. Disponible sur le site : www.democratie.francophonie.org
275
BOURGI (A.), « L'observation internationale des élections en question », 1999, en ligne sur :
reims.fr/Labos/CERI/L_observation_internationale_des_élections.htm.
276
Le 24 octobre 1648, le congrès de Westphalie met fin à la guerre de Trente Ans et rétablit la paix entre la
France, la Suède et l'empereur Ferdinand II. Les traités de Westphalie annoncent l'Europe territoriale moderne. À
l'idée d'unité du monde chrétien se substitue celle d'un système d'États indépendants.
277
Selon BODIN (J.), « La souveraineté est le pouvoir de commander et de contraindre sans être commandé ni
contraint par qui que ce soit sur la terre ». Bodin (J.), Les Six Livres de la République, Paris, 1576.
278
De son côté la doctrine Monroe — du nom du Président américain de l’époque — affirme « notre politique
consiste à ne jamais nous interposer dans les affaires intérieures d’aucune puissance de l’ancien monde »
Déclaration du 2 décembre 1823.
279
La résolution 36/103 de l’Assemblée du 9 décembre 1981 abonde dans le même sens : « Déclaration sur
l’inadmissibilité de l’intervention et de l’ingérence dans les affaires intérieures des Etats ».
Ensuite, le pays hôte doit fournir à la mission d'observation, toutes les garanties
nécessaires en matière de sécurité et de liberté aux divers stades du processus électoral surtout
en ce qui concerne l’accréditation officielle, l’accès aux technologies et aux responsables
électoraux, la liberté de mouvement sur l'ensemble du territoire, la publication sans entrave de
conclusions et recommandations 281.
Enfin, les exigences minimales d'un scrutin libre et régulier doivent exister a priori, à
défaut de quoi l'observation internationale n'aura pas lieu afin de ne pas servir à légitimer un
processus électoral non démocratique282. L’exemple de la Guinée en est une illustration. En
effet, les tergiversations du gouvernement guinéen à mettre en place une commission
électorale digne avait motivé les refus de certaines ONG, notamment la Commission
Internationale des Juristes de déployer des observateurs lors de l’élection présidentielle du 19
décembre 1993283.
Les missions d’observation électorale internationales doivent publier sans retard des
déclarations précises et impartiales et y présenter leurs constatations et leurs conclusions ainsi
que toute recommandation jugée utile pour l’amélioration du processus électoral général284.
280
Les Etats participants estiment que la présence d’observateurs, étrangers et nationaux, est de nature à
améliorer le déroulement des élections dans les Etats où elles ont lieu. En conséquence, ils invitent des
observateurs de tout autre Etat participant à la CSCE, ainsi que de toute institution et organisation privée
compétente qui le souhaiterait, à suivre le déroulement des opérations de leurs élections nationales, dans la
mesure prévue par la loi. Ils s’appliqueront également à faciliter un accès analogue pour les élections organisées
à un niveau inférieur au niveau national. Ces observateurs s’engageront à ne pas s'immiscer dans les opérations
électorales. Source : Document de la réunion de Copenhague de la conférence sur la dimension humaine de la
CSCE, Copenhague, 29 juin 1990.
281
Ces garantie doivent figurer si possible dans un mémorandum d'accord entre les observateurs et le pays hôte.
282
GHEBALI (V.-Y.), p.9.
283
BOURGI (A.), op.cit., non paginé.
284
Des copies de ces déclarations sont fournies aux autorités électorales et à toute autre entité nationale
compétente qui sont les premières concernées.
L’observation internationale des élections est menée dans l’intérêt des citoyens
du pays où se déroulent les élections et de la communauté internationale. Elle porte sur
le processus proprement dit et non sur un résultat électoral particulier, si ce n’est pour
s’assurer que les résultats ont été comptabilisés de façon honnête et exacte, dans la
transparence et le respect des délais.
Les missions d’observation électorale internationales doivent obtenir, voire
exiger, de tous les principaux candidats politiques qu’ils acceptent leur présence.
Elles doivent, en outre, faire preuve d’une stricte impartialité politique en
toutes circonstances. Les observateurs doivent en permanence faire montre d’une
stricte impartialité politique, y compris pendant leurs loisirs dans le pays hôte.
Toutes ces exigences sont reprises par l’Union Africaine dans les Directives
pour les missions d’observation et de suivi des élections de l’union africaine et visent à
rendre crédibles leurs rapports et servir la démocratie.
285
Selon le document portant « Principes directeurs devant guider l’envoi d’une mission d’observation
d’élections » adopté par la l’Organisation internationale de la francophonie à Marrakech en décembre 1996, dans
les 15 jours suivant son retour, la mission fait rapport au Président du CPF, par l’intermédiaire du Secrétaire
général de l’ACCT. Ce rapport doit contenir notamment : les objectifs de la mission, la liste des observateurs, les
termes de référence, le contexte global et l’importance des élections, l’itinéraire des observateurs dans le pays
demandeur, les méthodes d’observation utilisées, le résultat des élections, les modalités de la coopération avec
les autres missions internationales sur place, les conclusions de la mission et ses communiqués.
286
BOURGI (A.), op. cit., non paginé
Cette crédibilité s’observe sur le plan national par le degré de confiance accordé au
processus électoral par les citoyens (1) et sur le plan international par la reconnaissance (2).
Un jugement éclairé sur une élection ou une consultation populaire ne peut être basé
uniquement sur ce qui est observé le jour du scrutin287. Dans ce contexte, l’observation de la
période pré-électorale et de la campagne électorale proprement dite sont essentielles. Selon les
termes de l’organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, il ne s’agit pas
seulement de prendre la photo du jour du scrutin, mais de voir se dérouler le film de
l’événement288.
L’observation internationale jouit aujourd’hui d’une acceptation quasi-universelle et
contribue à augmenter la confiance des électeurs et à évaluer la légitimité d’un processus
électoral et de ses résultats289.
Dans cette optique, il apparait qu’au plan national, la simple présence d’observateurs
internationaux constitue, a priori, une garantie de confiance dans l’acte électoral 290 . La
présence des observateurs génère dans l’opinion publique nationale que les élections seront
authentiques et qu’elles ne seront pas entachées de fraudes ni de corruption renforçant ainsi la
conviction des électeurs et réduisant le taux d’abstention. Concrètement, une observation
287
VASAK (K.), op. cit.
288
Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, The OSCE/ ODIHR Election Observation
Handbook, p. 8.
289
Déclaration de principes pour l'observation internationale d'élections et Le code de conduite à l'usage des
observateurs électoraux internationaux, Washington, National Democratic Institute for International Affairs,
2005, p. 10. Ce document, adopté en même temps que le code de bonne conduite des observateurs, par plus de
20 organisations internationales, énonce des normes précises à respecter en matière d'observation électorale
internationale, définissent le rôle des observateurs et rappellent le droit de tout citoyen de participer au
gouvernement. Il précise que : « L’observation internationale d’élections peut renforcer l’intégrité des processus
électoraux, soit par la dissuasion et la dénonciation des fraudes et des irrégularités, soit par des recommandations
visant l’amélioration de ces processus. Elle peut également renforcer la confiance des citoyens, s’il y a lieu,
encourager la participation aux scrutins et réduire le risque de conflits autour des élections. Elle contribue par
ailleurs à renforcer la compréhension internationale par le partage de données d’expérience et d’informations
relatives au développement démocratique ». Ces documents sont destinés aux missions d'observation, mais ils
peuvent aussi éclairer les journalistes étrangers affectés à la couverture d'un scrutin.
290
Le degré de préparation de l’administration électorale, de même que les conditions du déroulement des étapes
préparatoires à un scrutin sont des éléments cruciaux au succès d’un événement électoral.
291
Surveillance de l'intégrité électorale, En ligne sur http://aceproject.org/ace-fr/topics/ei/eid
292
Les administrateurs électoraux, les politiciens et les observateurs nationaux apprennent à mieux connaître les
normes internationales pour la tenue d’élections libres et équitables en coopérant avec les observateurs étrangers
et en étudiant leurs rapports. Les missions d’observation électorale fournissent aux administrateurs électoraux
l’occasion d’échanger des connaissances professionnelles avec d’autres experts, en particulier sur les
mécanismes d’intégrité utilisés dans d’autres régimes.
293
CAROTHERS (T.), « The Observers Observed », Journal of Democracy, 8(3), 1997, p. 19.
294
Dans les situations conflictuelles ou dans les pays en voie de transition, la présence d’observateurs
internationaux peut, jusqu’à un certain point, décourager le recours à la violence et à l’intimidation. Leur
présence continue rassure les candidats, les surveillants et les électeurs qu’ils peuvent participer en toute sécurité.
Elle peut aussi convaincre les politiciens de l’opposition qu’il est préférable de se faire concurrence aux élections
que de s’engager dans des actes de désobéissance ou de violence.
295
ILLIASSOU (A.), TIDJANI ALOU(M.), « Processus électoral et démocratisation au Niger», Politique
Africaine, n° 53, 1994, p.132.
296
COMBACAU (J.) et Sur (S.), Droit international public, 7e éd., Paris, Montchrestien, LGDJ, 2006, p. 297.
297
RANJEVA (R.) ET CADOUX (C.), Droit international public, EDICEF, Cedex, 1992, p.91.
298
LE MANACH (C.), « La crise politique hondurienne, ou la communauté internationale face à ses
contradictions. Analyse d’une levée de boucliers contre une atteinte au credo démocratique en Amérique
Latine », Mémoire de recherche, Institut d’études politiques de Toulouse, 2010, p.19.
299
Seul chef d'Etat occidental à participer à cette cérémonie autour d'une vingtaine de ses pairs africains et du
secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon, Nicolas Sarkozy a été accueilli à l'aéroport de la capitale
politique ivoirienne, dans la matinée, par Alassane Ouattara. Source :
http://www.liberation.fr/monde/01012338712-sarokzy-en-cote-d-ivoire-pour-l-investiture-de-ouattara.
300
Aux législatives du 28 mars 1995, la Renaissance du Bénin, parti de Nicéphore Soglo, arrive en tête avec 21
députés sur les 83 sièges à pourvoir à l’Assemblée nationale. Le PRD (parti du renouveau démocratique) de Me
Adrien Houngbedji a suivi (19 députés). Le FARD-ALAFIA obtient 10 députés, le parti social-démocrate .
301
Ce sommet qui s’est tenu du 1er au 4 décembre 1996 a connu la participation de 19 Chefs d’Etats et 28 Chefs
de gouvernement et a donné lieu à une série de travaux d’embellissement spectaculaires de la ville de Cotonou.
302
Le président américain, Barack Obama, a reçu vendredi 29 juillet 2011 à la Maison Blanche, quatre de ses
homologues africains nouvellement élus à l’issu de scrutins jugés démocratiques. Il s’agit du Béninois Boni
Yayi, l'Ivoirien Alassane Ouattara, le Guinéen Alpha Condé et le Nigérien Mahamadou Issoufou. Une rencontre
destinée, selon Washington, à soutenir “les démocraties en développement”. Expliquant les raisons de cette
visite, M. Bruce Wharton, sous-secrétaire d’État adjoint chargé de la diplomatie publique au Bureau des affaires
africaines, a souligné qu’en invitant ces quatre présidents à Washington, le gouvernement Obama mettait en
relief l’importance qu’il y a «de tenir des élections crédibles, de bâtir des institutions démocratiques robustes et
d’encourager le développement économique en Afrique». Il a ajouté que « ces dirigeants ont été récemment élus
ou réélus à l’issue d’un processus démocratique, et dans certains cas après être venus à bout d’une longue
période de conflit ou de contestation de leur autorité ». Ce que le Président Américain Barak Obama n’a
d’ailleurs pas manqué de confirmer en commentant que « ces quatre chefs d’État peuvent servir de modèle au
progrès démocratique du continent, composante essentielle d’une Afrique stable, prospère et juste ». Source :
Afrique / Etats-Unis - Quatre chefs d’Etat africains invités à la Maison Blanche Article publié le : vendredi 29
juillet 2011 - Dernière modification le : vendredi 29 juillet 2011.
303
Voir G8 France 2011, Sommet de Deauville, p.5. En ligne sur www.g20-g8.com.
304
A titre illustratif, l’on peut évoquer la visite du Président américain au Ghana. Le 10 juillet 2009, Barack
Obama est arrivé à Accra pour une visite très attendue sur le continent africain304. Pour sa première visite en
Afrique depuis son arrivée à la Maison Blanche, Barack Obama accompagné de son épouse, a choisi de se rendre
au Ghana. Le président américain a entendu par cette visite soutenir la progression de la démocratie dans ce pays
anglophone d’Afrique de l’Ouest car le Ghana dont le président a été démocratiquement réélu en janvier 2009 est
en effet l’un des très rares pays africains à jouer le jeu de l’alternance démocratique. Source : Voir l’article de
Presse : « Pour Obama, l'avenir de l'Afrique appartient aux Africains », France 24, L’actualité internationale
24/24, 12/07/2009.
Lorsque les démarches positives, préventives et constructives n’ont pas abouti à faire
à faire cesser les violations, les sanctions, ultima ratio, interviennent 308 . L'éventail de ces
ces mesures est suffisamment large pour permettre des réactions graduées en fonction de la gravité des
309
gravité des cas d'espèce . Ces sanctions ont été prises à l’encontre de certains Etats d’Afrique
d’Afrique noire francophone dont les élections ont été jugées « irrégulières » par la
Communauté internationale à la suite des rapports des missions d’observation électorale310.
électorale 310 . Même si la pratique des sanctions liées à la conditionnalité démocratiques
démocratiques suscite des critiques311, l’on doit reconnaitre qu’elles sont d’un grand intérêt
intérêt pour la promotion de la démocratie en Afrique.
305
Linkage vient de « to link » en anglais qui signifie « lier ».
306
OTIS (G.), op.cit., p. 152.
307
DE WILDE D’ESTMAEL (T.), La dimension politique des relations économiques extérieures de la
communauté européenne. Sanctions et incitants économiques comme moyens de politique étrangère, Bruxelles,
Bruylant, 1998, p.359.
308
AUVRET-FINCK (J.), « Les procédures de sanction internationale en vigueur dans l’ordre interne de l’Union
et la défense des droits de l’homme dans le monde », In Revue trimestrielle de droit européen, p.1.
309
Elles vont, par ordre croissant, des démarches confidentielles ou publiques, à la modification du contenu des
programmes de coopération ou des canaux utilisés, au report des signatures ou de décisions nécessaires à la mise
en œuvre de la coopération, à la réduction des programmes de coopération culturelle, scientifique et technique,
au report de la tenue d’une commission mixte, à la suspension de contacts bilatéraux à haut niveau, à
l’ajournement de nouveaux projets, au refus de donner suite à des initiatives du partenaire, à des embargos
commerciaux, à la suspension des ventes d’armes et de la coopération militaire et à suspension de la coopération
avec les Etats concernés. Source : COM(95)216, annexe 2.
310
Les premières consultations sur la base de l’article 366 bis de l’Accord de Lomé ont été ouvertes en 1998
avec le Togo. Ainsi en juillet, suite aux manques de transparence des élections présidentielles, le Conseil, à
l’initiative de la Commission, décida d’ouvrir des consultations. Aucune solution n’ayant été trouvée à la fin des
entretiens et vu l’absence de mesures concrètes de la part des autorités togolaises, le Conseil décida le 14
décembre de mettre fin aux consultations et de ne pas reprendre la coopération avec le pays, sans toutefois
pénaliser la population. Candela Soriano (M.), « L’Union européenne et la protection des Droits de l’Homme
dans la coopération au développement : le rôle de la conditionnalité politique », pp. 19-20 et MANKOU (M.), «
Droits de l’homme, Démocratie et Etat de droit dans la Convention de Lomé IV », Revue Juridique et politique,
Indépendance et coopération, p.328.
311
Les répercussions des mesures négatives sur les populations ne sont pas exemptes de critiques. Beaucoup
étudiées, ces répercutions s’avèrent essentiellement humanitaires. La population, déjà victime des agissements
d’un régime non démocratique et irrespectueux des droits de la personne, est souvent la première victime des
sanctions. En outre, ces mesures peuvent amener une situation humanitaire pire que précédemment et rallier la
population à son gouvernement. Enfin, les mesures négatives ne favorisent habituellement que les droits civils et
La presque totalité des démocraties établies ont, dès les années 1960, inclus la
notion d'assistance électorale dans le cadre de leurs initiatives d'assistance à la
démocratie en faveur des pays en voie de développement. Si elle a d’abord pris la
forme d’une aide aux partis politiques puis d’une aide en vue de referendums
constitutionnels que ces démocraties établies apportaient aux Etats, l’assistance
électorale a très vite fait de s’étendre à l’organisation des élections.
Cependant, la participation des Nations Unies aux activités électorales a
véritablement commencé au cours des années 1960 et 1970312. À la fin des années
politiques, et les sanctions, telles que le retrait de l’aide ou la suspension d’accords commerciaux, exercent des
pressions non négligeables sur les droits sociaux et économiques.
312
Le premier engagement des Nations Unies dans les processus électoraux remonte aux années 1940 par
l'observation des premières élections dans la Péninsule koréenne. Ensuite le Trusteeship Council a assuré
l'observation ou la supervision de 30 plébiscites, référendums ou élections dans diverses parties du monde. Vers
la fin des années 1980, le PNUD a financé plusieurs petits projets visant à apporter une assistance technique
spécifique à différents processus électoraux ainsi qu'à la création des infrastructures nécessaires au déroulement
des élections.
313
Disponible en ligne sur http://aceproject.org/ace-fr/focus/rendre-efficace-lassistance-electorale/onePage.
314
TADJOUDINE (A.-D.), « La problématique des élections après un conflit et de la certification », Séminaire
de l’Organisation Internationale de la Francophonie, New York, USA, 11 décembre 2008.
315
Assi (E.), « Le Conseil Constitutionnel entre certification et souveraineté du peuple », disponible en ligne :
http://www.ado.ci/images/Entre_certification_souverainete_peuple_Lt_ASSI.pdf
316
10 Questions sur la certification des élections en Côte d’ivoire, Cellule de certification des élections/ONUCI ;
en ligne sur : http://www.onuci.org/leaflet/Depliant%20certification.pdf.
317
Le cas de la Côte d’Ivoire constitue une exception dans le sens où l’ONU n’a pas véritablement conduit
l’ensemble du processus électoral. Le Secrétaire général des Nations Unies a certifié des élections dont il n’est
pas l’organisateur, c’est un défi.
En Côte d’Ivoire, l’ONU devait certifier des élections qu’elle accompagne sans
les organiser, car l’organisation des élections est une compétence exclusive de la
Commission électorale indépendante. Il s’est alors agit pour le Représentant spécial du
Secrétaire général des Nations Unies de certifier que tous les stades du processus
fourniront toutes les garanties nécessaires pour la tenue d’élections ouvertes, libres,
justes et transparentes conformes aux standards internationaux pour aider la Côte
d’Ivoire à sortir des crises multiformes auxquelles elle est confrontée depuis plus
d’une décennie.
318
TADJOUDINE (A.-D.), op.cit, p.3.
319
Le Timor-Est en 2007 et le Népal en 2008. Le troisième mandat de certification concerne le processus
électoral en Côte d’Ivoire.
320
Le Certificateur est mandaté par le Conseil de Sécurité pour certifier que tous les stades du processus électoral
fourniront toutes les garanties nécessaires pour la tenue d’élections présidentielle et législatives ouvertes, libres,
justes et transparentes, conformément aux normes internationales.
321
Il s’agit de la résolution 1826 adoptée le 29 juillet 2008 par le Conseil de Sécurité des Nations Unies.
La certification attache l’idée selon laquelle les Etats africains qui la sollicitent sont
sont incapables de conduire et certifier eux-mêmes leurs élections car la certification des
des élections ajoute une nouvelle exigence institutionnelle et fonctionnelle au processus
processus électoral. Le contrôle de la régularité des élections reconnu aux juridictions
constitutionnelles n’est plus l’ultime opération en la matière. En clair, avec la certification, le
juge électoral n’a plus « le pouvoir du dernier mot », ce qui contribue à affaiblir son
autorité324. La certification apparait comme une opération qui est au-dessus des opérateurs du
contentieux ; en d’autres termes, elle assure le règlement du contentieux des contentieux.
Par ailleurs, l’observation et la certification ne sont pas sans poser des questions
d’ingérence car là où l’ordre juridique interne d’un État rencontre des éléments du système
international, il y a nécessairement des risques d’interférences.
En effet, comme le dit James Entwi, Ambassadeur des Etats unis en RDC, la
souveraineté en matière d’organisation des élections ne faisant plus l’objet des contestations
de partenaires, les Congolais doivent savoir en user avec responsabilité d’autant plus que ces
322
La certification implicite a porté sur 3 aspects qui sont : un environnement paisible et sécurisé, un processus
inclusif, c’est-à-dire sans exclusion et des médias libres et équitables.
323
Les 5 critères cadres sont la paix, l’inclusion de tous les citoyens qui ont le droit de figurer sur la liste
électorale ou qui sont éligibles, les médias d’Etat qui doivent être impartiaux et accessibles équitablement et
également aux candidats, la liste électorale et les résultats qui ne devront plus être remis en cause une fois
certifiés.
324
DJEDJRO (F.), op.cit., p. 153.
325
James Entwi, ambassadeur des Etats-Unis à Kinshasa s’est insurgé contre ceux qui réclament l’implication de
la communauté internationale dans le processus électoral à travers une certification. Pour le diplomate américain,
les Congolais ont les capacités de s’assumer en matière d’organisation des élections. L’ambassadeur a déclaré
que : «les Congolais ont et continuent de développer les capacités de gérer eux-mêmes leurs propres élections».
Le processus électoral en RDC connaît quelques ratés, mais cela n’induit pas que les Congolais étaient
incapables de se prendre en charge en cette matière. James Entwi estime qu’il faut enlever l’idée que «les
Congolais sont incapables de conduire et certifier eux-mêmes leurs élections » « Congo élections : les USA
opposés à la certification des élections », Le Congo, Hebdomadaire d’actualités congolaises, Dossier élections,
publié le 24 août 2011. Disponible sur www.lecongo.info.
326
DE GAUDUSSON (J.), op.cit., p.622.
327
DE GAUDUSSON (J.) pose cette question : «Instrumentalisé par les acteurs politiques, le droit n’en vient-il
pas à être saisi par la politique […] ? ». Cité par Bolle (S.), « Des Constitutions « made in » Afrique »,
Communication au VIe congrès de droit constitutionnel français, 9, 10, 11 Juin 2005, p.12. Cependant, ce terme
Dans son essai sur saint Augustin, Reinhold Niebuhr essaie, pour commencer, de
définir le réalisme en politique. Selon lui, dans le domaine de la politique le réalisme dénote
une disposition à prendre en considérant tous les facteurs et particulièrement les facteurs
d’intérêt personnel et de pouvoir qui, dans une situation politique et sociale donnée, opposent
une résistance aux normes établies. Cette résistance se répercute sur le droit électoral où les
principaux acteurs en considération d’intérêt partisans violent les dispositions
constitutionnelles, légales et règlementaires.
n’est pas utilisé aussi dans le sens de l’instrumentalisation mais plutôt dans un sens positif où cette incursion de
la politique dans le droit permet la recherche du compromis et l’évitement des conflits.
328
SCHAWRZ-LIEBERMANN VON WAHLENDORF (H.A.), cité par LISSOUCK (F.F.), « Pluralisme
politique et droit en Afrique noire francophone: essai sur les dimensions institutionnelles et administratives de la
démocratisation en Afrique noire francophone », in Thèse à la carte, Atelier national de reproduction des thèses,
2003, p.11.
329
TSAKADI (K.), « Quel avenir pour la médiation électorale en Afrique ? », Multipol, août 2006, p.2.
330
DESOUCHES (C.), « Exposé de problématique : la pratique de l’Organisation Internationale de la
Francophonie en matière de médiation », Retraite sur la médiation de la francophonie, Genève, 15-17 Février
2007, p 22.
Dans le cadre des Nations-Unies, par une déclaration faite lors d’une réunion
du Conseil de sécurité consacrée à la prévention des conflits en Afrique, le 28 août
2007334, le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-monn, a proposé de renforcer
les capacités de son institution dans le domaine de la médiation. A cet effet, une
équipe permanente d’experts en médiation a été mise en place au niveau du
Département des affaires politiques des Nations unies, le 5 mars 2008335.
Par la justice, c’est la sanction qui est envisagée. Tout crime appelle une sanction, il
s’agit de répondre à la demande de sanctions pour les crimes les plus graves. Par contre, en
dehors de la justice, il faut trouver les moyens de discuter, de se comprendre, de transiger et
de pardonner. Le pardon échappe au droit, c’est une valeur supra-juridique et supra-éthique.
C’est pourquoi, la communauté opte pour un règlement des conflits électoraux en dehors de la
justice.
La médiation est donc un des moyens de sortir de l’impasse dans l’intérêt de la nation
et pour y parvenir, il faut trouver un médiateur dont le rôle est de créer les conditions de
dialogue entre les parties au conflit. Pour ce faire, le médiateur se fixe une méthode, une
approche avec des procédures susceptibles de garantir le succès de son action dont le but
ultime est l’instauration de la paix.
337
KA (D.), « Processus de négociation et consensus », in rapport de la conférence organisée par le NDI sur Le
rôle des partis politiques dans une transition démocratique, Kinshasa, République Démocratique du Congo, du
26 au 28 juin 2001, p.9.
338
GOVENDER (K.) et GANDU (Y.), r a p p o r t e u r, « Vers le renforcement des capacités de médiation de
l’Union Africaine », rapport basé sur un séminaire organisé par la commission de l’union africaine (U.A.) Addis-
Abeba, Ethiopie, 15 – 16 octobre 2009.
339
Lire l'article sur Jeuneafrique.com : « Une crise postélectorale s'installe au Bénin », paru le 01 avril 2011 ».
340
Après avoir pris malgré lui acte de la victoire du fils de l’ancien président de la République gabonaise, Ali
Bongo, à la présidentielle d’août 2009 dans son pays, l’opposant André Mba Obame, suite aux révélations d’un
documentaire de la chaîne française France 2, s’est autoproclamé président de la République du Gabon. Cette
autoproclamation suivie de la formation d’un gouvernement parallèle s’est soldée par une vague de violences.
341
NOUGTARA (E.), « Analyse de la stratégie d’internationalisation des entreprises en Afrique par la méthode
de l’adaptation : Cas de Télétel Faso », Mémoire de Master of science in management, Option Marketing et
Commerce International, Ecole supérieur de commerce de Dakar, 2008.
342
NGODI (E.), « les conflits et la reconstruction en Afrique, cas de la région des Grands lacs », 10e assemblée
générale du CODESRIA, Kampala en Ouganda, du 3 au 12 décembre 2002, p.3.
343
La mondialisation désigne l'expansion et l'harmonisation des liens d'interdépendance entre les nations, les
activités humaines et les systèmes politiques à l'échelle du monde.
344
BAUMAN (Z.), Le Nouvel Observateur, 24/30.05.07.
345
Pour TEDOM, dans un premier temps, la paix suppose la sécurité. Politiquement, la sécurité repose sur la
confiance entre gouvernants et gouvernés ; elle renvoie à la nécessité pour les responsables politiques et
administratifs de garantir aux citoyens l’exercice de leurs libertés publiques, tout en assurant l’ordre, et de
maîtriser les différents conflits sociaux. Dans un second temps, la paix traduit la stabilité. Un Etat stable renvoie
à un Etat moderne, un Etat où le droit est au quotidien une réalité et où l’accès au pouvoir est subordonné au
respect de la sincérité des scrutins et l’économie libérale de règle. Autrement dit, la stabilité d’un Etat suppose la
solidité de ses institutions politiques mais également sa capacité à apporter des solutions politiques
démocratiques aux problèmes de la société. TEDOM (A.F.), Enjeux géostratégiques et conflits politiques en
Afrique noire, l’Harmattan, Paris, 2008, p.85.
346
Cette charte a été adoptée par la huitième session ordinaire de la conférence tenue le 30 janvier 2007 a Addis
Abeba en Ethiopie en vue, entre autre, d’enraciner dans le continent une culture d’alternance politique fondée sur
la tenue régulière d’élections transparentes, libres et justes, conduites par des organes électoraux nationaux,
indépendants, compétents et impartiaux.
347
Elle a été adoptée le 3 Novembre 2000 par les Ministres et Chefs de délégation des Etats et gouvernements
des pays ayant le français en partage à Bamako lors du Symposium International sur le bilan des pratiques de la
démocratie, des droits et des libertés dans l’espace francophone.
348
Cette déclaration porte sur la prévention des conflits et la sécurité humaine. Elle a été adoptée à Saint
Boniface le 14 mai 2006 dans le cadre de la Conférence ministérielle de la Francophonie sur la prévention des
conflits et la sécurité humaine.
A- Le primat du compromis:
355
DAUDET (V.) et NAVARRE-BRAGER (J.), « Le droit, source de conflits », Jurisdoctoria, n° 2, 2009, p.23.
356
BRIANT ET PALAU, « La médiation. Définitions, pratique et symbolique », Nathan, Université, 128,
1999, p.12.
357
STIMEC (A.), « De la négociation à la médiation : Jalons conceptuels et historiques », Agir, n° 24, Janvier
2006, p.3.
358
FOMUNYOH (C.), « Médiation des conflits électoraux », Centre for Humanitarian Dialogue, p.6. en ligne sur
http://3w.ndi.org/files/Mediation_des_Conflits_Electoraux_FRE.pdf
359
Un accord de paix entre les deux partis a été signé à Ouagadougou, le 4 mars 2007. Source : Cote d'Ivoire,
New peace agreement [archive], IRIN. Mis en ligne le 5 mars 2007, consulté le 16 juin 2009.
360
Le 26 juillet 2006, Le Président du Faso a été désigné comme le médiateur du Dialogue intertogolais, qui s'est
tenu à Ouagadougou en août 2006 et qui a abouti sur un accord entre le gouvernement et les partis de
l'opposition.Voir BASSOT (E.), « The situation in Togo on the eve of the 2007 parliamentary
elections [archive] », European Parliament. Consulté le 16 juin 2009.
361
Accord global et inclusif sur la transition en République Démocratique du Congo signé le 17.12.2002.
362
1e 22 janvier 2005, s'est tenue à Libreville sous la présidence de El Hadj Omar Bongo Ondimba, Président de
la République Gabonaise, Chef de 1’Etat et Médiateur dans 1a crise centrafricaine, une réunion relative à
l'organisation des élections en République Centrafricaine et à laquelle ont pris part le Président François Bozizé
et les candidats à l'élection présidentielle ou leurs représentants.
363
Cet accord prévoyait à son point III relatif à l’Eligibilité à la Présidence de la République ce qui suit :
« 1) La Table Ronde considère que l’article 35 de la Constitution relatif à l’élection du Président de la
République doit éviter de se référer à des concepts dépourvus de valeur juridique ou relevant de textes législatifs.
Le gouvernement de réconciliation nationale proposera donc que les conditions d’éligibilité du Président de la
République soient ainsi fixées : Le Président de la République est élu pour cinq ans au suffrage universel direct.
Il n ‘est rééligible qu’une fois. Le candidat doit jouir de ses droits civils et politiques et être âgé de trente-cinq
ans au moins. Il doit être exclusivement de nationalité ivoirienne né de père ou de mère Ivoirien d’origine. 2) Le
Code de la nationalité sera amendé par l’adjonction aux conditions de perte de la nationalité ivoirienne édictées
par son article 53, des mots suivants : exerçant des fonctions électives ou gouvernementales dans un pays
étranger ». Source : Accord de Linas-Marcoussis, Afrique Express, N° 263 du 29/01/2003.
364
Au point 9 relatif à l’éligibilité à la Présidence de la République, « Les parties ont rappelé que la question de
l’amendement à l’Article 35 de la Constitution avait été un obstacle majeur à l’avancée du processus de paix.
Elles ont reconnu que l’annonce faite par le Président de la République le 26 avril 2005 avait marqué un jalon
significatif dans la création d’une atmosphère favorable à la tenue des élections. Les parties se sont engagées à
tirer parti de cette réussite ». Elles ont en outre prévu en cas de nécessité d’avoir « de nouveau recours aux
dispositions de l’Article 48 de la Constitution, il faudrait en discuter avec la Médiation et les autres
signataires. ».
365
Cet accord a été signé le 20 août 2006 et s’inscrit dans la continuité des efforts engagés depuis 2004 en vue de
trouver un compromis politique.
366
OLINGA (A.-D.), « Politique et droit électoral au Cameroun : Analyse juridique de la politique électorale »,
Polis/R.C.S.P./C.P.S.R., Vol.6, n°2, 1998, p.37.
367
Au Togo, en vue de traduire en actes juridiques le contenu de l’A.P.G., et dans la perspective de
l’organisation des élections législatives du 14 octobre 2007, l’Assemblée nationale a modifié la Constitution en
son article 52 pour y introduire un mode de scrutin proportionnel à la plus forte moyenne en lieu et place du
mode de scrutin uninominal à un tour.
368
Cependant cette pratique pose le problème de la responsabilité des gouvernants et de l’essence même de
l’élection.
369
Code de bonne conduite des partis politiques, des medias et de l’administration en période électorale au
Burundi, Février 2010.
370
Code de bonne conduite des partis politiques et candidats indépendants en période électorale au Niger, le 25
Janvier 2011 avec l’appui technique du bureau de NDI au Niger sur financement du NED.
371
Code de bonne conduite des acteurs politiques, sociaux et des medias à l’occasion des élections présidentielle
et législative de 2010 en Centrafrique.
Ces codes de bonne conduite électorale paraissent salutaires et interviennent sur des
points sensibles mais ignorés du contentieux électoral. En effet, les conditions d’organisation
des élections sont déterminantes pour la fiabilité du scrutin. Il suffit d’un petit
dysfonctionnement pour que les différentes opérations préélectorales, électorales et
postélectorales, leur forme juridique, leur gestion et leur légitimité soient violemment
critiquées et que les résultats du scrutin soient contestés. C’est pour conjurer ce sort et mettre
les parties prenantes aux élections en confiance que les Organisations internationales et des
Organisations non gouvernementales encouragent et parrainent l’élaboration et la signature
par toutes les parties d’un code de bonne conduite par lequel elles s’engagent à respecter
certains principes démocratiques et à ne pas entraver le bon déroulement des opérations
électorales avant, pendant et après le scrutin.
Dans les situations de tension potentielle, les codes de conduite acceptés par toutes les
parties sont de plus en plus considérés comme un moyen pratique de contribuer à une élection
pacifique; dans le long terme, ces codes peuvent aussi renforcer la confiance dans le processus
démocratique en tant que mécanisme permettant d’instaurer un gouvernement représentatif et
d’effectuer un changement pacifique372.
En toute hypothèse, il revient aux juristes et au droit, quand ils ont épuisé leur capacité
de réflexion, d’interprétation et d’imagination, de reconnaitre leurs limites ; il est des épisodes
de la vie politique, souvent les plus tragiques, qui échappent au droit et ne sauraient se régler
en pure logique du droit et sur le seul terrain des arguments juridiques et des lectures de la
Constitution. On n’ignore pas que la force du droit constitutionnel réside d’abord dans la
volonté politique et le consensus des acteurs373.
En tout état de cause, lorsque l’on considère la médiation dans tous ses aspects et les
chances d’apaisement des processus électoraux qu’elle engendre, il est aisé de comprendre
qu’elle soit préférée au contentieux électoral qui est contraint de se ranger dans la zone
relégable.
372
GOODWIN-GILL (G. S.), op. cit., p.169.
373
DE GAUDUSSON (J.), op. cit., p.124.
Cependant, s’il est nécessaire que le contentieux électoral repose sur le droit électoral
pour qu’il soit présumé démocratique, force est de reconnaitre que cette présomption n’est pas
irréfragable. En effet, rien ne sert de proclamer des principes si ceux-ci ne sont pas appliqués.
Or, c’est dans la mise en œuvre du contentieux électoral que les Etats d’Afrique noire
francophone pêchent. Ce péché, s’il peut s’expliquer par l’incohérence et l’incomplétude des
textes qui sont pour la plupart importés, demeure particulièrement fondé sur la dépendance et
la partialité du contentieux électoral qui reste un outil de manipulation aux mains des hommes
politiques.
374
En droit, une procédure est soit l'ensemble des formalités nécessaire à la validité d'un acte soit l'ensemble des
démarches à suivre pour mener à bien une action en justice. La procédure est aujourd’hui dans le cadre du droit
processuel qui est envisagé comme le droit comparé de l’ensemble des procédures. Voir : CIAUDO (A.), « La
maîtrise du temps en droit processuel », Jurisdoctoria, n° 3, 2009, p.21.
Même si leur but n’est pas d’occulter le contentieux électoral mais l’apport de
solutions aux crises nées du déficit démocratique des Etats africains notamment en
électorale, force est de reconnaitre que l’observation internationale électorale et la
internationale des élections contribuent à son affaiblissement. Dans cette perspective,
une question purement existentielle se pose à l’endroit du contentieux électoral : « Etre
ou ne pas être? Telle est la question 376 ». La prétention ici n’est pas de prôner la
suppression du contentieux électoral mais plutôt son renforcement.
La justice en général et celle électorale en particulier constitue l’un des
attributs de la souveraineté. L’on comprend donc combien un affaiblissement, une
désaffection de la population vis-à-vis de cette institution ainsi que son abandon aux
mains de la communauté internationale est préjudiciable aux Etats africains. Des
actions urgentes en vue de la renaissance du contentieux électoral sont donc
nécessaires. Convaincu qu’il serait superflu de proposer des solutions en vue du
renforcement de l’indépendance et de l’impartialité de l’institution tant en ce qui
concerne l’organe en charge que la conduite du contentieux, notre approche de
solutions se résumera en deux points. Cette approche se fonde sur la considération
qu'il y a trois justifications essentielles de l’existence d’une juridiction électorale :
« apaisement des conflits politiques, facilitation et authentification des alternances et
des changements de majorité, protection des minorités contre les abus des majorités,
adaptation progressive de la constitution aux changements électoraux377 ».
D’abord il y a une nécessité pour le juge constitutionnel électoral d’œuvrer
pour un renforcement de la législation électorale. Cette proposition repose sur deux
constats : D’une part, il est difficile à l’autorité auteure d’un texte de mesurer son
applicabilité. Seul le juge électoral est susceptible de desceller à travers le règlement
des litiges qui lui sont soumis, les travers des textes constitutionnels, législatifs et
règlementaires pris en matière électorale.
375
TCHUISSEU NJOUEMEN (R. De D.), « Communauté internationale: Entre diplomatie et stratégie à
géométrie variable », Le Dossier, N° 31, 12 mars 2011, p.4.
376
SHAKESPEARE (W.), Hamlet, trad. fr. F.-V. Hugo, Paris, Librio, 2004, p.58.
377
FAVOREU (L.), « Brèves réflexions sur la justice constitutionnelle en Afrique », in Conac Gérard (dir.), LES
Cours suprêmes en Afrique, T. II, La jurisprudence, Paris, Economica, 1989, p.43.
En définitive, le droit électoral n’assure pas souvent l’égalité et la liberté des candidats
à la compétition électorale. Il revient donc au juge électoral, en sa qualité d’arbitre du jeu
politique379, d’œuvrer à l’amélioration de la législation dans le sens d’une plus grande égalité.
Mais dans cette optique, une œuvre jurisprudentielle quelque courageuse qu’elle soit demeure
insuffisante si elle n’aboutit pas à un perfectionnement des textes. C’est dans ce sens que les
Cours, Conseils ou Tribunaux constitutionnels chargées du contentieux électoral feraient
œuvre bonne en établissant après la clôture du scrutin des rapports présentant leurs
recommandations. Ces rapports faisant le diagnostic du processus électoral comporteraient
des propositions d’amélioration de la législation électorale. La publication380 de ces rapports
dans leur exhaustivité au Journal officiel, sur les médias ainsi que leur envoi aux autorités et
aux partis politiques leur conféreraient une autorité et une certaine force exécutoire. Cette
solution s’inscrit dans la mission générale de surveillance du scrutin assignée aux Cours381.
378
HAURIOU (M.), Précis de droit constitutionnel, Paris, Recueil Sirey, 2e éd., 1929, (rééditions du CNRS),
1965, p.636.
379
MEUNIER (J.), « Les décisions du Conseil constitutionnel et le jeu politique », Pouvoirs, n°105, 2003, pp.29
et ss.
380
La publication est importante car, tout comme cela se fait pour les rapports du Médiateur de la République en
France, elle donne demeure un moyen de pression aux mains des juges et confèrent une magistrature d’influence
à la Cour.
381
Certaines Cours béninoise, gabonaise, malgache, malienne et tchadienne font, jusqu’à maintenant, part de
leurs observations. La Cour constitutionnelle du Mali a exposé les raisons qui l’ont poussée à s’exprimer dans
ses observations et recommandations sur les élections générales de 2002: « La Cour constitutionnelle après avoir
accompli sa mission constitutionnelle relative à l’élection du président de la République et des députés à
l’Assemblée nationale, bien qu’aucun texte ni constitutionnel, ni législatif ne le lui prescrive, a cru devoir
produire un rapport général sur les élections politiques de 2002. Ce rapport […] évoque certaines des difficultés
que posent ou peuvent poser les dispositions de la Constitution et des lois de la République en matière
d’élections du président de la République et des députés à l’Assemblée nationale. Évoquer les contraintes liées à
l’application de nos textes fondamentaux en matière électorale permettra, certainement, aux décideurs d’analyser
lesdites contraintes afin de les juguler ».
382
Cette pratique des Cours est récente et a été mise en place dans le tournant des années 2000, notamment au
Bénin, au Mali et au Tchad. Une meilleure acceptation des résultats électoraux nécessite certainement une large
diffusion des rapports. Elle réduit également les risques d’accusation de partialité des Cours constitutionnelles et
finalement permet une meilleure appréhension de leur travail et de la réglementation électorale. L’objectif
premier de ces rapports demeure, néanmoins, le perfectionnement du système électoral. Aussi, les Cours et
Conseils concernés remarquent que leurs observations et recommandations ont débouché sur des amendements à
la législation électorale. Source : « La proclamation des résultats et le contentieux électoral », ACCPUF, Bulletin
n° 5, op. cit, p.175.
383
On considère généralement que l’expression « modes alternatifs de règlement des différends » recouvre tout
mécanisme permettant de trouver des solutions acceptables par des parties en différend en dehors des procédures
judiciaires traditionnelles (d’où le terme « alternatif »). Ils ne se substituent pas à celles-ci mais doivent
permettre de « vider les conflits » de leur substance à la satisfaction des parties.
384
CHEVALIER (P.), DESDEVISES (Y.), MILBURN (P.), Les modes alternatifs de règlement des litiges : les
voies nouvelles d'une autre justice, Perspectives sur la justice, Mission de recherche Droit et Justice, 2003,
p.288.
385
Proverbe africain faisant l’apologie de l’arbre à palabre.
Ainsi, en lieu et place d’une médiation internationale initiée par une communauté
internationale aux intérêts multiformes le juge électoral serait capable avant, pendant et après les
élections en sa qualité d’arbitre de la compétition électorale, d’aplanir les divergences et les
différends entre les parties en recherchant des solutions de compromis.
Ce mode de résolution des conflits devrait susciter un grand intérêt chez les chercheurs
africains car l’affirmation de Montesquieu selon laquelle les mœurs font toujours meilleurs
citoyens que les lois, est toujours d’actualité. D’ailleurs, le précepte populaire est sage qui
préfère l’arrangement au procès387. Les Etats de la SADC semblent l’avoir compris388.
Il s’agit d’un plaidoyer en faveur d’une gestion plus souple mais plus efficace du
contentieux électoral. C’est par ce canal que la juridiction électorale deviendra « une
juridiction au service du droit 389 » et que l’on pourra clamer en paraphrasant Dominique
Rousseau qu’aux gouvernants, les organes exécutifs et parlementaires ; aux citoyens, le
Contentieux électoral390.
Par ailleurs, une piste relative à la création d’une juridiction autonome, spécialisée
dans le contentieux électoral mérite d’être explorée.
386
Douze équipes de recherche ont travaillé sur ce thème dans le cadre d'un appel d'offres lancé en 1998 par la
Mission de recherche Droit et Justice. Selon une approche pluridisciplinaire, à partir d'un large éventail de litiges
(voisinage, famille, logement, consommation, travail, droit des affaires...) et en retenant les formes les plus
variées de la justice alternative (conciliation, médiation, procédures alternatives aux poursuites pénales...) en
œuvre dans les domaines tant judiciaire qu'administratif. Ces recherches se sont finalisées par une journée
d'étude le 18 juin 2001 organisée par la Mission au Conservatoire national des arts et métiers. Voir, « Les modes
alternatifs de règlement des litiges », Mission de Recherche Justice & Droit, 2001.
387
OUMAR SAKHO (P.), « Quelle justice pour la démocratie en Afrique ? », Pouvoirs, 2009/2, n° 129, p.61.
388
Ces pays affirmant que : « Les conflits liés aux élections sont l’un des facteurs principaux qui menacent la
démocratie et la stabilité politique dans la SADC. Historiquement, les institutions judiciaires conventionnelles
telles que les tribunaux, et plus particulièrement les tribunaux électoraux, ont traité les conflits et les
contestations liés aux élections. Des processus alternatifs de gestion et de résolution des conflits, tels que la
médiation, l’arbitrage et la conciliation, sont potentiellement une autre façon plus accessible, moins coûteuse et
plus rapide par lesquels les différends électoraux peuvent être traités ». Seuls quelques pays sont parvenus à
instituer ces processus au niveau de la SADC. Source : Principes de Gestion, de Surveillance et d’Observation
des Elections dans les Pays de la SADC tels qu’adoptés le 06 Novembre 2003, Traduit du texte original paru en
anglais sous le titre de ‘Principles for Election Management, Monitoring and Observation in the SADC
Region’(PEMMO), Publié par l’Institut Électoral d’Afrique Australe (EISA), Auckland Park Johannesburg,
Afrique du Sud, 2006, p.14.
389
FAVOREU (L.), La politique saisie par le droit. Alternances, cohabitation et conseil constitutionnel, Paris,
Economica, 1988, p. 7.
390
ROUSSEAU (D.), op. cit., p. 392.
I- OUVRAGES :
CONAC (Gérard), (dir.), Les Cours suprêmes en Afrique, Tome II, Paris, Economica,
1989, 299 p. ;
DECAUX (Emmanuel), Droit international public, 5e édition, Paris, Dalloz, 2006, 403
p. ;
RUZIE (David.), Droit international public, 19e édition, Paris, Dalloz, 2008, 299 p. ;
Mémoires :
COLLIARD (Jean-Claude), « Les systèmes électoraux dans les Constitutions des pays
de l'Union européenne », Les Cahiers du Conseil constitutionnel, n° 13, 2002, pp. 92-
99 ;
FALL (Alioune Badara), « Le juge, le justiciable et les pouvoirs publics : pour une
appréciation concrète de la place du juge dans les systèmes politiques en Afrique »,
Afrilex, n°3, Juin 2003, pp. 2-27 ;
SOCPA (Antoine), « Les dons dans le jeu électoral au Cameroun », Cahiers d'études
africaines, n° 157, 2000, pp.91-108 ;
Constitutions des pays d’Afrique noire francophone (Togo, Benin, Burkina Faso,
Mali, Centrafrique, Sénégal, Sénégal, Cameroun, Rwanda, Niger, Côte d’Ivoire,
Gabon) ;
V- DOCUMENTS OFFICIELS :
Accord Politique Global togolais, 20 août 2006 ;
Accord de Linas-Marcoussis de janvier 2003 ;
Code de bonne conduite des partis politiques, des medias et de l’administration en
période électorale au Burundi, Février 2010 ;
Code de bonne conduite des acteurs politiques, sociaux et des medias à l’occasion des
élections présidentielle et législative de 2010 en Centrafrique.
Programme d’Action de Bamako adopté par la IXème Conférence des chefs d’État et
de gouvernement des pays ayant le français en partage, Beyrouth, les 18, 19 et 20
octobre 2002;
http://democratie.francophonie.org
http://www.accpuf.org/
http://www.cour-constitutionnelle-benin.org/
http://www.conseil-constitutionnel.gov.bf
http://www.coursupreme.cm/
http://www.hcc.gov.mg
http://www.cc.insti.ml/
http://www.cour-constitutionnelle-niger.org
http://www.courconstitutionnelle.tg/
http://www.conseil-constitutionnel.fr
http://www.eisa.org
Dédicace………………………………………………………………………………………ii
REMERCIEMENTS………………………………………………………………………….iii
SIGLES ET ABREVIATIONS…………………………………………………………….....iv
SOMMAIRE………………………………………………………………………………….vii
INTRODUCTION GENERALE………..…………………………………………………….1
PREMIERE PARTIE : UN CONTENTIEUX ELECTORAL LEGITIMANT………………8
CHAPITRE I : UN CONTENTIEUX FONDAMENTALEMENT DEMOCRATIQUE……10
Section I : La garantie de la liberté……………………………………………………….......10
Paragraphe I : La liberté du vote……………………………………………………………..11
A- L’affirmation du principe……………………………………………………………........12
B- Le secret du vote…………………………………………………………… …………....14
Paragraphe II : La liberté de candidature…………………………………………………….16
A- Le contenu de la liberté de candidature……………………………………………..........17
B- Les aménagements à la liberté de candidature…………………………………………...19
Section II : L’apologie de l’égalité…………………………………………………………...21
Paragraphe I : L’universalité du suffrage…………………………………………………….22
A- Le suffrage universel……………………………………………………………………...22
B- Le suffrage égal…………………………………………………………………………...24
Paragraphe II : Le découpage électoral……………………………………………………….27
A- La règle des bases démographiques de la représentation………………………………....27
B- La règle de la révision périodique………………………………………………………...30
CHAPITRE II : UN CONTENTIEUX RELATIVEMENT ORGANISE……………...........34
Section I : La juridiction électorale……………………………………………………….......35
Paragraphe I : L’autonomie de l’organe de justice électorale………………………………...35
A- La maîtrise des textes normatifs…………………………………………………………..36
B- La gestion des affaires administratives et financières…………………………………….38
Paragraphe II : La garantie de l’indépendance des juges électoraux…………………………41
A- La désignation des juges……………………………………………………………….....41
B- La qualité juridique des juges …………………………………………………………....44
Section II : La conduite de la justice électorale………………………………………………47