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SYSTÉMIQUE ?
André R. de Nayer
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André R. De Nayer 2
Résumé
Mots-clés
Schizophrénie – Gène – Étiologie – Systémique – Homo sapiens.
Abstract
Systemic theories are not able to explain the origin of schizophrenia. A
genetic causality is definitely a necessary condition. The role of gene in schizophrenia
is to be fully understood with implication of new concepts such as epigenomic
imprinting. Viable models should leave room for environmental factors interacting
with a genetic predisposition. The author presumes that the etiology of schizophrenia
appears with the homo sapiens.
Key words
Schizophrenia – Gene – Etiology – Systems – Homo sapiens.
ambiante, idéologie qui fut reprise plus tard en peinture et en sculpture sous
forme de l’exaltation de l’art brut, loin de tout académisme.
Le culturel a également été interpellé dans le sens où la famille était
considérée comme essentielle au fondement de la maladie. La mère fut tout
d’abord accusée d’être schizophrénogène, ensuite l’absence du père,
forclusion, fut impliquée et finalement l’ensemble de la famille fut décrétée
dysfonctionnelle, le schizophrène étant confiné dans le rôle du patient
désigné garant et révélateur de l’homéostasie familiale. Les émotions
exprimées (EE), les doubles messages, les coalitions, la triangulation, ont été
mis en exergue comme autant de mécanismes favorisant les transactions
psychotiques.
relation mère-enfant émergea dans les années 50 : le malade pense que s’il
se porte bien, sa mère tombera malade ; en restant malade, il préserve le bien-
être de sa mère aussi bien psychologique que physique. Hill (1955) établit le
principe d’une interdépendance réciproque entre la mère et l’enfant, à savoir
l’échange et la réciprocité des besoins mutuels.
Deuxième étape : la pathologie et le traitement de la famille dans les années
50 et au début des années 60. « Le concept de famille pathogène »
Spiegel (1957) et Bell (1961) font l’hypothèse que le malade est un
symptôme de la pathologie familiale et que par conséquent, le prendre en
charge en dehors de la famille donne de mauvais résultats. La famille doit
être traitée comme une unité bio-sociale, de façon à établir un nouvel
équilibre. Midelfort (1957) montre l’importance des facteurs culturels dans
la relation malade – thérapeute et pense qu’une origine ethnique et religieuse
identique augmente les chances de succès. Il ajoute que les perturbations
chez d’autres membres qui semblent normaux, peuvent être repérées après
un examen plus précis de leur comportement.
Bowen (1959) observe que chaque membre de la famille a sa propre
conception de la famille et de là, montre un comportement différent selon
qu’il est à l’intérieur ou à l’extérieur de la famille. Cet auteur s’intéresse
ensuite à l’hypothèse des trois générations3 pour rendre compte du
développement du processus schizophrénique.
1) La prévalence
La prévalence est un moyen incomplet pour mesurer l’impact d’une
pathologie chronique, étant donné les rémissions complètes ou les cas
asymptomatiques qui peuvent se présenter. On préférera, dès lors, la notion
de prévalence durant la vie entière.
La majorité des études chiffrent la prévalence durant la vie entière,
pour la schizophrénie de 1.4 à 4.6/1000, et cela dans des populations aussi
différentes que celles vivant en Allemagne, au Danemark, aux Etats-Unis, en
Suède, à Taiwan, en Iran, en Croatie, en Inde, en Bulgarie, et en Russie.
On note quelques exceptions comme celle des Huttérites, une secte
protestante du Sud Dakota vivant retirée en communauté. Depuis le XVII
2) L’incidence
L’incidence peut être définie comme étant le nombre de nouveaux cas
dans une population de 1000 individus. Elle est d’un plus grand intérêt que
la prévalence pour la schizophrénie car elle représente, avec moins de
distorsion, la probabilité de l’occurrence d’une pathologie à un moment de
la vie, dans une population donnée. Dans la majorité des études, on se réfère
à la première admission hospitalière. Ce point de vue est critiquable du fait
du long délai entre le début de la pathologie et l’hospitalisation. On a dès lors
recours au premier contact ambulatoire. Les résultats indiquent que la
première admission à l’hôpital se chiffre à 0.17/1000, tandis que le premier
contact ambulatoire est évalué à 0.54/1000. On retrouve une grande similarité
entre les études norvégiennes, anglaises, irlandaises, allemandes, danoises,
islandaises, taiwanaises et canadiennes. L’équivalence des taux d’incidence
dans les pays en voie de développement et industriels contrecarre l’idée que
la schizophrénie serait une maladie de la civilisation (Torrey 1980).
Rotstein (1976) à Moscou cite des chiffres semblables, 1.5 de naissance pour
les femmes schizophréniques, comparé à 2.0 dans la population générale.
Plusieurs chercheurs (Lindelius,1970 ; Buck et Hobbs,1975 ; Erlenmeyer et
al.,1978) n’ont pas constaté de différence de fécondité dans la fratrie de
schizophrènes par rapport à celle de la population générale.
a) Le modèle hétérogène
Selon ce modèle, la schizophrénie serait une collection de différentes
maladies, chacune associée à un locus majeur, hérité soit de manière
récessive, soit dominante. En plus, on assisterait à des cas sporadiques dus
à l’environnement. Ce modèle implique que dans une famille, on pourrait
observer des formes génétiques différentes, sans locus majeur commun et
différents sous-types de schizophrénie génétiquement différents.
b) Le modèle monogénique
Tous les cas de schizophrénie partageraient le même locus majeur à
pénétrance variable : la maladie ne s’exprimerait que chez les homozygotes
et dans des proportions variables chez les hétérozygotes. Ce modèle
aux parents du troisième degré avec 12.5% de gènes identiques, ils présentent
un risque plus élevé que la population générale.
L’étude de Slater et Cowie (1971) constitue un argument génétique
manifeste… cependant le fait que la concordance pour les jumeaux
monozygotes, qui partagent tous leurs gènes ou presque, n’est que de 77.6%
en cas de vie séparée et de 91.5% en cas de vie commune, démontre que les
facteurs génétiques à eux seuls ne sont pas suffisants. Il ne s’agit donc pas
d’une transmission Mendélienne :
Proximité génétique Pourcentage de schizophrènes
Population générale 0.9 %
Cousins 2.6 %
Qu’en est-il du statut social ? Les célibataires et, de façon moindre, les
femmes célibataires, sont sur-représentés lors de la première admission ou
du premier contact avec prise en charge médicale (68 et 39 %) dans l’étude
de Jablensky (1992), couvrant dix pays différents. Etant donné que la
schizophrénie et ses troubles pré-morbides sont associés à une diminution
des contacts sociaux, il semble évident que le fait d’être marié constitue une
sélection positive et un biais pour ces patients, probablement moins atteints.
Dans le cas contraire, on devrait supposer que le mariage pourrait
prévenir ou retarder le début d’apparition de la schizophrénie (Ödegaard,
1980).
Riecher et Rossler (1972) ont montré un taux 12 fois plus élevé de
premières admissions chez les hommes célibataires, comparés aux hommes
mariés. Ce taux est de 3.3 chez la femme célibataire.
Même si ces données semblent suggérer un effet protecteur du
mariage, la corrélation entre l’âge et le statut marital ne permet pas de
déterminer si le désordre est plus tardif du fait qu’ils sont mariés ou bien tout
simplement s’il est lié à l’âge.
Cette recherche demande donc à être approfondie.
Ohlund et Hultman (1992) mettent en exergue plus de pertes parentales
chez les schizophrènes, cet effet est particulièrement marqué chez les
femmes qui perdent précocement leur père.
Modèle environnemental
Murphy (1972) propose un modèle définissant quatre critères créateurs
de stress chez le schizophrène :
1) une situation demandant une action ou décision,
2) une complexité ou une ambiguïté à propos de l’information sur cette
tâche,
6) Facteurs périnataux
Modèle neuro-développemental
L’hypothèse principale est que le développement normal du cerveau
est interrompu durant des périodes critiques in utero ou post-natales et qu’il
en résulterait des lésions produisant les symptômes de la schizophrénie.
L’ontogenèse normale du cerveau peut être interrompue par des gènes
défectueux ou par des traumatismes environnementaux. Des chercheurs
évoquent la présence de troubles obstétriques à la naissance des futurs
schizophrènes. McNeil (1991) fait part de deux types d’études qui traitent
1) du risque des troubles obstétriques susceptibles d’apparaître chez les
femmes schizophréniques, et
2) des conséquences possibles de troubles obstétriques survenant chez
un nouveau-né à hauts risques génétiques pour la schizophrénie.
Le lien entre les saisons et les naissances a aussi été évoqué comme
étant un facteur prénatal favorisant.
Tramer (1929) rapporte dans une étude revue par Bradbury et Miller
en 1985 et Boyd (1986), un excès de naissances d’enfants schizophréniques
en hiver, à la fois dans l’hémisphère nord et dans l’hémisphère sud.
Cependant, à la lecture de ces études, le risque de schizophrénie est
contaminé par un artéfact, dû à l’âge et à la prévalence. En effet, étant donné
l’augmentation du risque de schizophrénie corrélé à l’âge, les individus nés
en début d’année atteignent un plus haut taux de schizophrénie que les
individus nés plus tard dans l’année.
De plus, les études de saisonnalité ont relevé que les dépressions, les
névroses et les troubles de personnalité et d’autres troubles mentaux sont
également plus élevés pour la cohorte de patients nés au début de l’année
(Häfner, 1987).
Lewis (1989) a montré que l’amplitude de l’incidence de l’âge était
suffisante pour simuler un effet de saisonnalité et a proposé une méthode
statistique pour corriger ce biais.
Lyon et Barr (1989) ont montré l’évidence d’un lien entre les épidémies
d’influenza et la naissance de bébés schizophrènes. Pour1000 décès par
influenza dans la population, le nombre de naissances de schizophrènes a
augmenté de 1.4% pour autant que l’épidémie a eu lieu durant les deux à trois
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