Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
DES PROSTITUÉES
1
Docteur P. DURBAN
Neuro-Psychiatre
LA P S Y C H O L O G I E
DES P R O S T I T U É E S
L I B R A I R I E M A L O I N E S.A.
27, rue de l'École-de-Médecine - PARIS - VI
1969
CHAPITRE I
GÉNÉRALITÉS SUR LA
PROSTITUTION FÉMININE
L
E problème de la prostitution féminine est de la plus
grande complexité et s'étend sur bien des domaines.
Notre livre n'effleurera que son histoire générale,
sans doute enracinée parmi les expressions les plus archaï-
ques de l'humanité — ne l'a-t-on pas appelée « le plus
vieux métier du monde » — pour s'intéresser à ses
facteurs sociaux et surtout psychologiques. Ils ne seront
étudiés que dans le contexte de notre civilisation, et plus
précisément dans la F r a n c e de ce dernier tiers du xxe
siècle. Ainsi les théories dont nous ferons nos conclusions
n'auront qu'une valeur relative, qu'il ne faudrait point
généraliser abusivement aux formes que la prostitution
p e u t présenter à travers temps et espaces. Reconnaissons
que l'étude de la psychologie de la prostituée demeure
élémentaire malgré des efforts sérieux portant sur ces
toutes dernières années. Sans doute l'homme se détourna
longtemps de cette question comme d'un sujet « tabou ».
Plus encore que son conjoint, la femme en général fit
preuve d'une incompréhension ordinaire, forcée, vite agres-
sive, au moins méprisante. D'ailleurs, il faisait partie de
cette atmosphère de « tabou » de tourner en dérision
facile ce que l'on n'osait observer avec rigueur. Certains
croyaient même faire preuve de charité en jouant l'indif-
férence. De telles attitudes paraissaient « complexuelles »
au spécialiste de psychologie. Or, c'est à une figure des
plus abyssales de la femme que nous avons affaire dans
cette étude.
Nous allons envisager de la façon la plus rapide les
avatars de la prostitution féminine dans les civilisations
passées et lointaines. Dès l'aube de l'humanité, il paraît
évident que la femme, surclassée p a r la force musculaire
et la brutalité instinctuelle, hormonale, de son mâle apprit
qu'elle bénéficiait d'une carte maîtresse sur un plan déci-
sif de ses relations avec lui. L'homme assurait sa satis-
faction sexuelle en même temps qu'il affirmait une supré-
matie globale (laquelle devient aléatoire en notre siècle).
Comment la femme n'aurait-elle pas très vite tiré profit
du rôle essentiel — certes — qu'elle prenait dans la dite
satisfaction ? Une tendance à jauger sa propre valeur en
t a n t qu'objet sexuel désirable, source de jouissance excep-
tionnelle, paraît bien l'une des manifestations les plus
élémentaires et profondes de la psychologie de la femme.
Cette racine conditionnera son penchant essentiel à la
coquetterie, à toute démonstrativité sexuelle, qu'elle soit
brute ou sublimée. Nul n'osera nier que bien des traits
de nos compagnes s'intègrent dans un tel faisceau.
L'attirance profonde, plus ou moins consciente et
avouable, plus ou moins ébauchée, vers une forme de
tarification du coït, expression première de la prostitution,
ne paraît pas éloignée de cette source. Ainsi, dès l'aube
de l'humanité la femme dut tenter une adaptation spé-
ciale à sa condition relativement désarmée où la vouait
sa physiologie, avec la ruse et l'habileté que la nature
sait offrir en compensation à tout être fragilisé. Pour le
psychologue junguien, héritier d'un certain platonisme,
l'hypothèse d'innéité d'un tel caractère pourrait être entre-
vue. Nous nous garderons bien d'aborder ici ce plan
psycho-métaphysique.
L'étude de la prostitution féminine dans les sociétés
primitives dépasse les limites de ce livre.
Elle ne semble pas avoir existé chez les anciens
Germains. En Gaule, elle était punie de mort. Les Visigoths
la traitaient p a r la fustigation et l'expulsion. Chez les
Slaves antiques, elle aurait été mieux prisée que la
chasteté ; la virginité était pour eux la chose la plus
méprisable. Dans ces derniers temps, les OULED-NAÏL,
tribu algérienne des Hauts-Plateaux, envoyaient leurs
adolescentes se prostituer dans les quartiers réservés
(« bousbirs ») d'Afrique du Nord. Ces filles, après avoir
quitté leurs campements après la puberté, y revenaient
assez vite, enrichies par cette pratique. Elles se mariaient
alors et devenaient d'excellentes épouses et mères.
Notre coup d'œil sur les sociétés primitives sera parti-
culièrement bref et insuffisant. Il doit cependant mettre
en évidence le fait suivant : Dès le début de l'ère histori-
que, la prostitution était liée aux cultes. En Asie Mineure
le code de HAMMOURABI (XIX siècle av. J.-C.) nous décrit
les prostituées exerçant au temple, mais aussi les filles
de joie résidant dans les palais. De même, en Palestine
existait une prostitution culturelle vouée à ASTARTÉ,
auprès de la prostitution profane. Syriens et Phéniciens
répandirent la forme sacrée dans toute la Méditerranée.
En Lydie les femmes se prostituaient au temple, et comme
à Babylone, elles remettaient aux prêtres l'argent reçu.
Aux Indes, la prostitution sacrée paraissait limitée aux
actes sexuels entre prêtres et bayadères dont les danses
voluptueuses symbolisaient le coït.
La prostitution au temple existait aussi au Japon,
mais semble avoir été absente de l'ancienne Chine. Au
Mexique, elle prospérait sous l'égide de XOCHIQUETZAL,
déesse de l'amour, alors qu'une prostitution profane était
réservée a u x soldats.
Une civilisation archaïque nous propose u n fonde-
ment tantôt patriarcal tantôt matriarcal.
En contexte patriarcal surtout nous voyons apparaî-
tre très tôt les premières formes de proxénétisme fami-
lial, « hospitalier », social, rituel. La femme et la jouissan-
ce que le mâle peut en tirer prend ici figure d'offrande
choisie en l'honneur des étrangers, des dieux... Les proto-
babyloniens considéraient la féminité comme seulement
vouée à la reproduction et au plaisir ; une mythologie de
la fécondité obligeait toute femme à se sacrifier au moins
une fois à la prostitution sacrée. De tels rites furent cou-
rants dans la Mésopotamie antique, qui honora bien des
divinités p a r ces pratiques mystico-prostitutionnelles. De
même, la Chaldée connut une forme « hospitalière » où
pères, maris, frères, maîtres absolus des choses et gens
de la maison, offraient femmes et filles du foyer aux
visiteurs de choix. Nous retrouverions ces m œ u r s chez
les Esquimaux actuels. Le mariage des anciens ne tenait
point compte des sentiments et pulsions sexuelles ; ses
buts principaux étaient la préservation de l'intégrité de la
race et de la fortune, dans la classe riche. Ces principes
faisaient le lit de la prostitution — émonctoire et le r u t
tarifié des professionnelles drainait l'ensemble des époux
médiocrement attirés p a r une couche conjugale aux attraits
relatifs.
Mais la prostitution s'affirmait aussi dans u n contexte
matriarcal que nous pouvons soupçonner, dès l'âge paléo-
lithique, dans une fresque vieille de vingt mille ans, où
l'on voit un homme prosterné devant une femme riche-
m e n t parée, de haute stature, aux zones sexuelles forte-
m e n t mises en valeur.
Il est vrai que l'homme préhistorique ignora long-
temps le rapport de cause à effet unissant coït, féconda-
tion, reproduction. Peut-être réagissait-il devant de tels
mystères en sublimant un m y t h e de la féminité dont sa
compagne dut bénéficier. Mais lorsque le mâle sut enfin
percer quelques secrets de la procréation, il paraît logique
d'admettre qu'il profita de ces premiers éléments de
connaissance pour démythifier son image de la femme et
accroître sa dure domination sur elle, comme en Babylonie
antique.
Pourtant, proche de cette dernière, nous voyons
l'Egypte accorder une place privilégiée à l'élément fémi-
nin. Rappelons ici nos différents travaux, parus, en parti-
culier, aux Annales Médico-Psychologiques, poursuivis
avec M A. TEILLARD, psychanalyste jungienne. L a
psychanalyse de Jung, sur laquelle nous nous étendrons
prochainement, soutiendrait le caractère « anima » de
cette brillante civilisation pharaonique.
En serait-il de même avec le « miracle grec », lequel
d'ailleurs doit tellement à l'Egypte ? Depuis Solon, la
Grèce eut ses dictérions, où le déshonneur des prostituées
p a r u t moins écrasant qu'ailleurs. Les grandes hétaïres de
la Grèce jouirent d'une indiscutable considération.
DEMOSTHÈNE nous décrit comme suit la vie affectivo-
sexuelle des Athéniens : « tout d'abord l'épouse qui fait
« des enfants, les élève, entretient la maison », ensuite
« ... des amies hétaïres pour la satisfaction de l'esprit, des
« pallaques pour la satisfaction des sens, entre les deux ;
« des joueuses de flûtes et des danseuses pour la joie de
« l'ouïe et de la vue ».
Notons que le Japon récent connaissait une construc-
tion du même ordre, avec ses geishas, analogues aux
hétaïres.
Mais arrivons en à Rome, qui affirme devant l'histoire
la toute puissance de « l'animus », âme viriloïde opposée
à la féminité de l'anima ». Les Romains attachèrent à la
prostitution une notion d'infamie particulière. L'homme
lui-même en était éclaboussé : avant d'entrer dans un
lupanar, il se voilait la face en signe d'opprobre. C'est avec
des femmes punies de prison qu'était alimenté le quartier
spécial de Suburre. Le terme de « lupas » (louves) réservé
aux prostituées nous paraît significatif de l'horreur — à
fondement d'ailleurs magique — qui écrasait les malheu-
reuses « pallaques » romaines.
C'est dans ce monde brutal que naquit vraiment le
proxénétisme et la traite des « filles de joie ». Il fallut
attendre Théodore le Grand (379-395) pour envoyer en
exil les pères, époux, et maîtres qui prostituaient leurs
filles, compagnes ou esclaves. Cet empereur tenta aussi
de traquer les divers proxénètes professionnels qui emplis-
saient la Rome décadente. TIBÈRE avait déjà interdit à
ses chevaliers de livrer leurs filles à la prostitution.
JUSTINIEN et son épouse, la fameuse THÉODORA,
créèrent le premier foyer connu de réadaptation sociale.
Déjà les conciles d'Elvire et d'Aix avaient osé exprimer
les notions du p a r d o n à accorder aux prostituées, et de
l e u r reclassement p a r le travail et le mariage.
Ainsi, les dernières manifestations de l'esprit romain
m a r q u e n t une heureuse évolution humaine, laquelle ne
se retrouve certes point lors de ses origines. N'oublions
pas, en effet, que c'est deux siècles avant notre ère que
fut posé le principe de la réglementation p a r la « licencia
stupri », qui frappait d'indignité et d'infamie jusqu'à la
mort. Esclave légale, la prostituée demeurait attachée au
lunapar toute sa vie.
Rome et son « animus » portent une tache plus vile :
le proxénétisme d'état » • CALIGULA avait frappé d'impôt
la prostitution • THÉODOSE voulut l'abolir, mais cette taxe
f u t rétablie après lui.
Même les plus g r a n d s esprits du monde romain ont
admis la nécessité des prostituées de façon simpliste ;
« Elles sont dans la cité ce q u ' u n cloaque est dans le
« palais. Supprimez ce cloaque et le palais deviendra u n
« lieu infect » écrit Saint-AUGUSTIN.
Cette opinion i m p r è g n e r a le Moyen Age, où nous
voyons Saint-THOMAS d'AQUIN t r a i t e r « d ' œ u v r e méritoi-
re » l'organisation d ' u n bordel p a r les moines de Perpi-
gnan.
De façon générale, les m o n a r q u e s de type « a n i m u s »
— comme CHARLEMAGNE — v o u l u r e n t organiser la régle-
mentation de la prostitution, avec u n soupçon de nostal-
gie romaine. Ainsi, entre autres exemples, Philippe
AUGUSTE décida de placer les maisons et quartiers
spéciaux sous l'autorité d ' u n « roi des ribauds ». A u t o u r
de ce personnage p r i t corps la « grande t r u a n d e r i e »
parisienne. Mais voyons l'attitude d ' u n prince moins
brutal : Saint-LOUIS. Chez lui, « animus » et « anima »
s'harmonisent de façon plus adaptée. Certes, il voulut
réglementer la prostitution, conçue comme u n mal néces-
saire. Ainsi, lors de ses croisades, son administration
s'occupait de l'entretien de milliers de « dames » à
l'usage du corps expéditionnaire. P a r contre, il créait
aussi en 1255 une œ u v r e de réadaptation et de reclasse-
ment des prostituées. Elle se maintint quelque temps et
s'appela « couvent des filles-Dieu » sous CHARLES V.
La complexité psychologique de Louis XIV lui fit
adopter une attitude ambivalente : en 1665, il créait u n
centre de redressement appelé « refuge » ; vingt ans plus
tard, le règlement LETELLIER apportait la répression vio-
lente p a r l'internement à la Salpétrière.
Ainsi l'incohérence m a r q u a de son sceau l'attitude
royale vis-à-vis de la prostitution et de ses problèmes.
A v a n t de quitter l'ancien régime, signalons que, en
1360, JEANNE, reine des Deux Siciles et Comtesse de
Provence, p a r u t être la première à tenter un essai de
« sanitarisme ». P o u r satisfaire ses besoins d'argent, elle
créa un bordel en Avignon et en confia la direction à
une abbesse ; celà n'avait rien d'original. Mais le règle-
m e n t stipulait que les filles devaient se soumettre une
fois par semaine, le samedi, à la visite d ' u n médecin.
Voilà qui est a n t é r i e u r de deux siècles à la première
règlementation sanitaire officielle du royaume de France,
d a t a n t des E t a t s d'Orléans.
Quelle figure historique le clergé prend-il d e v a n t ces
problèmes ? Nous le voyons très souvent avide de profits
de la prostitution, tel cet évêque de Genève qui savait
si bien administrer « tous les bordiaux de ses terres »
(nous dit le bon VOLTAIRE).
P o u r t a n t certains prêtres édifiaient des centres d'ac-
cueil pour le reclassement des repenties, efforts velléitai-
res et sans lendemain.
L'ancien régime avait fini sur une note réglemen-
tariste foncière ; « L ' e n c o u r a g e m e n t a u bordel public
« non seulement p r é v i e n d r a la p l u p a r t des mauvais effets
« du vice mais d i m i n u e r a aussi la q u a n t i t é de libertinage
« en général et la réduira a u x limites les plus étroites
« qu'on puisse lui assigner » écrivait MANDEVILLE en
1724.
L a surpuissance « a n i m u s » de Napoléon 1er ne
pouvait que s'inspirer de tels travaux. Il institua l'enre-
gistrement, l'inspection et la régularisation des prosti-
tuées (1805). Un v e n t romain soufflait-il s u r la F r a n c e ?
A u x t r a v a u x de MANDEVILLE doit faire p e n d a n t l'ironie
du vieux classique : « Un h o m m e sortait d ' u n lunapar.
« Courage, lui cria CATON, à la divine sagesse. Car, dès
« que l'âcre l u x u r e court dans leurs veines, voilà où ils
« doivent tous aller, a u lieu de courir après les femmes
« des autres ».
Notons, entre temps, et à titre de curiosité, la ten-
dance à la rebellion des prostituées lors de la première
Révolution. Sans doute éveillées aux « Droits de l'hom-
me », elles adressaient en 1790 à l'assemblée nationale
u n e pétition d e m a n d a n t l'abolition des titres déshono-
r a n t s (tels que « toupies, maquerelles, garces, putains,
etc... »).
Nos Républiques suivirent l o n g u e m e n t la législation
napoléonienne. E n 1903, la loi avait fait p r e n d r e à la
réglementation une forme décisive. Mais les textes du
13 avril 1946 abolissent les maisons et o u v r e n t en F r a n c e
l'ère « abolitionniste ».
Ces généralités historiques, évidemment très insuffi-
santes, nous d o n n e n t cependant u n vague aperçu de la
complexité et de l'étendue du problème de la prostitution.
Notre tâche personnelle, des plus ardues, recherchera la
figure psychologique de la prostituée, une des plus diffi-
ciles à comprendre p a r m i les possibilités infinies de la
présentation de la Femme. Voilà pourquoi nous propo-
sons m a i n t e n a n t u n chapitre de définitions préalables,
indispensables devant les difficultés prévues.
Le plus élémentaire divisera le sens du verbe prosti-
t u e r en deux plans :
1° Livrer à la débauche.
2° Au figuré : avilir et dégrader.
Ne sous-estimons point cette deuxième notion, elle
est la plus valable dans sa généralité, la plus primitive
et profonde. C'est dans cet esprit que nous envisageons,
a u dernier chapitre de ce livre, le « mythe de la prosti-
tuée », vu en psychanalyse de JUNG. La Bible emploie ce
terme dans u n tel sens, p a r exemple, lorsqu'elle nous
décrit le Créateur fulminant contre la race humaine en
lui r e p r o c h a n t la « prostitution de son c œ u r oublieux ».
Cependant, il importe m a i n t e n a n t de nous intéresser
à la notion courante du dictionnaire, celle de débauche
dont la traduction ordinaire serait : « dérèglement dans
les moeurs ».
Mais tout de suite, nous voyons l'insuffisance de cette
dernière définition.
Dire que la prostituée est une « débauchée » sonne
creux. Sera-t-il valable de la définir comme « femme
livrée à la débauche » ou tout au moins aux « mœurs.
déréglées » ?
Cette t e n t a t i v e p a r a î t r a i t vite erronée, s'adressant
plutôt à ceux qui la r e c h e r c h e n t pour leurs plaisirs pro-
pres. L a « femme du monde » et non seulement celle du
« demi-monde » serait aussi justiciable, dans quelques
cas, de pareille appellation ; évitons, à ce sujet, de citer
les littérateurs m o n d i a u x de tous les âges, au j u g e m e n t
desquels nous aimerions nous référer ici. De même, à
l'heure actuelle, les filles de type « b e a t n i k » a u x « m œ u r s
déréglées » ne sont point de vraies prostituées.
L a langue vulgaire semblerait étendre le t e r m e de
prostituée à toute femme qui vend ses charmes, souli-
g n a n t ainsi u n des éléments les plus importants de la
prostitution : la vénalité.
Mais cette définition reste bien trop large. Elle
couvrirait, loin des limites de notre sujet, le fourmille-
m e n t des cas de « para-prostitution » auxquels nous
allons r é s e r v e r plusieurs études.
Bien que ni la loi, ni la jurisprudence, n'aient réelle-
m e n t déterminé les éléments constitutifs de ce problème,
la formule française en la matière, qui découle des
Instructions du Ministère de l ' I n t é r i e u r ( 1 juin 1919) et
s'identifie avec les lois romaines (Digeste) n o m m e « pros-
« tituée toute fille ou femme qui habituellement et sans
« choix fait commerce de son corps dans u n intérêt mer-
cenaire ». Cette formule consacrée n'a soulevé d'objec-
tion ni de la p a r t de l'opinion, ni de la part des tribunaux
(d'après M. BOIRON). Notons que la formule allemande,
sans doute m i e u x adoptée, tient à remplacer « toute
fille ou femme » p a r « toute personne »...
Seul, le lecteur non averti t r o u v e r a i t claires de telles
notions.
E n réalité, ces termes m û r e m e n t choisis et pesés
d e m a n d e n t c h a c u n une discussion qui nous servira à
délimiter « prostitution » et « para-prostitution », dans
la m e s u r e du possible. Cette limite est souvent subtile.
Schématisons donc les divers éléments de la défini-
tion : « Commerce du corps », « intérêt mercenaire »,
« h a b i t u d e », « absence de choix ». Nous allons y ajou-
ter l'élément s u i v a n t — plus sous entendu qu'absent
dans le texte lapidaire officiel — : « inhibition des fac-
teurs affectifs, émotionnels, voluptueux, qui dans la nor-
male, président à l'acte sexuel ».
Nous voilà devant a u t a n t de têtes de chapitres, que
nous allons envisager de la façon la plus objective et
p r a t i q u e m e n t expérimentale.
LE COMMERCE DU CORPS
L'INTERET MERCENAIRE