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Les lig nes de B o u aké -la-Neuv e – 20 16 – N° 7

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Les lig nes de B o u aké -la-Neuv e – 20 16 – N° 7

LES LIGNES DE BOUAKÉ-LA-NEUVE


Revue électronique des sciences humaines
de l'Université de Bouaké

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Les lig nes de B o u aké -la-Neuv e – 20 16 – N° 7

LES LIGNES DE BOUAKÉ-LA-NEUVE


Revue électronique des sciences humaines
de l'Université de Bouaké
Azoumana Ouattara : Directeur de Publication
Université de Bouaké, Décanat
27 BP 529 Abidjan 27
République de Côte d'Ivoire
Téléphone: (225) 22 41 85 74
Fax: (225) 22 41 85 74
Courriel: azou_o@yahoo.fr
Site Internet: www.leslignes.org
ISSN : 2221-9730

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Les lig nes de B o u aké -la-Neuv e – 20 16 – N° 7

DIRECTEUR DE LA PUBLICATION

Prof. Ouattara Azoumana

CHEFS DE LA REDACTION

- - Prof. Abolou Camille Roger ;


- - Prof. Poamé N’goranLea.

COMITE DE REDACTION

- Prof. Babo Alfred;


- Prof. Irie Bi Gohi Mathias
- Prof. Kouassi Yao Edmond
- Prof. TroDeho
- Dr. Kouamé Séverin ;
- Dr. NiamkeyAka ;
- Mme BahoueliMatafri

COMITE DE LECTURE

- Prof. Amani Konan Fergus;


- Prof. Ibo Lydie ;
- Prof. Babo Alfred ;
- Prof. Kouakou Antoine ;
- Prof. JackoArsenne ;
- Prof. KossonouKouabena François
- Prof. Dja DadieCelestin ;

COMITE SCIENTIFIQUE

- Prof. Akindès Francis, Université de Bouaké/IRD ;


- Prof. Balima Théophile, Université de Ouagadougou ;
- Prof. Brey Gérard, Université de Besançon ;
- Prof. Bidima Godefroy, Université de la Louisiane ;
- Prof. MwambaCabakulu, Université Gaston Berger de Saint-Louis ;
- Prof. Canivez Patrice, Lille III ;
- Prof. DeverinYveline, Université Toulouse-le-Mirail ;
- Prof. Dibi Kouadio Augustin, Université de Cocody ;
- Prof. Kervegan Jean-François, Université de Paris I, Panthéon-Sorbonne ;
- Prof. Konaté Yacouba, Université de Cocody ;
- Prof. Miran Marie, Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales, Paris ;
- Prof. NubukpoKomlanMessan, Université de Lomé ;
- Prof. Poamé Lazare, Université de Bouaké ;
- Prof. SavadogoMahamadé, Université de Ouagadougou.

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SOMMAIRE

1. DIARRASSOU BA Bazoumana et YMBA Maïmouna, Partir pour rester en vie: l’ulcère


de Buruli dans le processus de dépeuplement de la zone rurale de Kongouanou (région des
lacs, centre Côte-d’Ivoire)

2. TCHETCHE Obou Mathieu, Perceptions liées aux facteurs de guérison : étude de cas
dans un contexte urbain ivoirien

3. Frédéric Armel MEMEL, Pulchérie Sophie TAPE, et Jérôme ALOKO-N’guessan, Les


défis de la gouvernance urbaine dans la commune de Treichville en Côte d’Ivoire

4- IMOROU Abou-Bakari et Comlan Julien HADONOU, La gouvernance locale à


l’épreuve des enjeux politico-ethniques au Bénin : une analyse à partir de deux communes à
dominance rurale

5. DAYORO Z. Arnaud Kevin et TIE Gouin Bénédicte Edwige, Offre de soin en Côte-
d’Ivoire a l’épreuve de la démocratisation sanitaire.Une étude de cas dans le district sanitaire
d’Abidjan

6. KOUAME Dhédé Paul Eric, Production rizicole et sécurité alimentaire dans le


département de Gagnoa

7. Bosson Eby Joseph, Loba Akou Don Franck Valéry, Konan Kouamé Pascal,
Koukougnon Wilfried Gautier, Coulibaly Sidiki Youssouf, Analyse du mode d’accès et de
conservation de l’eau dans un quartier défavorisé : L’exemple de « Jérusalem » à la Riviera
Palmeraie (Commune de Cocody, Abidjan).

8. Koudzo SOKEMAWU, L’insécurité foncière : un obstacle au développement des activités


agricoles dans le canton de Lavie (Préfecture de Kloto) au Togo

9. Agbroffi Diamoi Joachim, Le sens politique de l’Abyssa-nzima de Côte-d’Ivoire et du


Ghana

10. KOUAME Yao Emmanuel, Morphologie compositionnelle et sémantique du Gouro

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LIGNE
EDITORIALE

Les enseignants-chercheurs de l’Université de Bouaké n’ont pas été épargnés par la guerre de
2002 en Côte d’Ivoire. Leur engagement scientifique a constitué l’essentiel de leur capacité de
résilience. Les lignes de Bouaké-la-neuve est un des résultats de cette posture qui comporte le
pari d’une éthique du partage des savoirs. Elle est une revue interdisciplinaire dont l’objectif est
de comparer, de marquer des distances, de révéler des proximités insoupçonnées, de féconder
des liens, de conjuguer des efforts d’intellection et d’ouverture à l’altérité, de mutualiser des
savoirs venus d’horizons différents, dans un esprit d’échange, pour mieux mettre en discussion
les problèmes actuels ou émergents du monde contemporain afin d’en éclairer les enjeux
cruciaux. Ce travail de l’universel fait appel aux critiques littéraires et d’arts, aux bioéthiciens,
aux géographes, aux historiens, aux linguistes, aux philosophes, aux psychologues, aux
spécialistes de la communication, pour éclairer les problèmes publics qui n’avaient auparavant
pas de visibilité mais surtout pour tracer des perspectives nouvelles par des questionnements
prospectifs. La revue accueillera les contributions favorisant le travail d’interrogation des
sociétés modernes sur les problèmes les plus importants : la résurgence de la question
des identités, les enjeux éthiques des choix pratico- technologiques, la gouvernance des risques,
les défis environnementaux, l’involution multiforme de la politique, la prise au sérieux des droits
humains, l’incomplétude de l’expérience démocratique, les promesses avortées des médias, etc.
Toutes les thématiques qui seront retenues couvriront les défis qui appellent la rencontre du
travail de la pensée pensante et de la solidarité.

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OFFRE DE SOIN EN CÔTE-D’IVOIRE A L’EPREUVE DE LA


DEMOCRATISATION SANITAIRE. UNE ÉTUDE DE CAS DANS LE
DISTRICT SANITAIRE D’ABIDJAN

SUPPLY OF HEALTH CARE IN CÔTE-D’IVOIRE TO ACCESSIBILITY


HEALTH PROOF. A CASE STUDY OF ABIDJAN SANITARY DISTRICT

DAYORO Z. Arnaud Kevin, Enseignant-Chercheur


dayorokevin@yahoo.fr
TIE Gouin Bénédicte Edwige, Doctorante en sociologie
tiebenedicte@yahoo.fr
Université Félix Houphouët Boigny (FHB), Abidjan, Côte d’Ivoire,
Département de Sociologie
Laboratoire d’Étude et de Recherche Interdisciplinaires en Sciences Sociale LERISS)
Groupe de Recherches en Socio-Anthropologie Appliquées à la Santé et au Vieillissement
(GRESA)

Résume
La problématique de la prise en charge sanitaire de la population demeure une préoccupation
pour les pays développés et ceux en développement. Pour faire face à cette réalité, diverses
stratégies sont mises en place pour répondre aux besoins sanitaires de la population. Au nombre
de ces stratégies adoptées, il y à la démocratisation sanitaire. Cet article analyse le mode
d’application de la démocratie dans le système de santé en Côte d’Ivoire. Pour atteindre cet
objectif, l’approche qualitative à travers l’entretien semi-directif a été mobilisée pour collecter
les données. Ainsi, l’échantillon de l’étude est composé de 35 acteurs (professionnels de la
santé, membres du Conseil d’Administration, présidents des associations de Centre de Santé
Urbain à base Communautaire (CSUCom et Directeurs Départementaux). Les résultats révèlent
que la démocratisation sanitaire est perçue par les acteurs comme la mise en œuvre de la
politique des soins de santé communautaire. La politique de la démocratie sanitaire plombe
aussi les rapports entre les usagers et les professionnels de la santé. À cet effet, leurs interactions
sont des rapports de leadership, de méfiance, de conflit et d’évitement. Le dysfonctionnement
des CSUCom a des répercussions sur la fréquentation de ces centres. Les usagers préfèrent se
diriger vers d’autres structures sanitaires pour ce faire soigner.

Mots clés : Démocratie, santé, usagers, participation, Côte d’Ivoire.

ABSTRACT
The problem of the sanitary care of the population lives concern for the developed countries and
those in development. To face this reality, diverse strategies are organized to answer the sanitary
needs for the population. Among these adopted strategies, it in the sanitary democratization.
The analysis of accessibility implementation in the health system in Côte d’Ivoire is the
objective assigned to our study. In order to achieve this objective, a qualitative approach
through a semi structured interview has been mobilized or used. Thus the sample of the study is
composed of 35 actors including 10 health professionals 10 members of management board, 10
people from the community, 3 presidents of associations and 2 departmental manager appointed
on a reasoned choice. Results reveal that health care accessibility is seen by actors as

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community health care policy implementation. Health care policy also spoil relations between
users and health professionals. For that purpose relations between them are relations of
leadership Conflict mistrust and avoidance. These relations highlight many challenges linked to
health care accessibility Social economic and
Key words: health challenges, Accessibility, health users, participation, Côte d’Ivoire.

Introduction

La prise en charge sanitaire de la population a toujours été la préoccupation des pays développés
et ceux en développement (Djukanovic et Mach, 1975). Pour ce faire, chaque pays
institutionnalise des systèmes sanitaires pour satisfaire les besoins en soins de santé exprimés ou
non par les populations.
En Côte d’Ivoire, au cours des années 1960 et 1970, l'État dans sa politique sociale offrait la
gratuité1 des soins et des médicaments à la population. En effet, du fait de la croissance
économique2 du pays, le système sanitaire ivoirien a connu un essor important (Tambla, 2002).
Au cours de cette période, des formations sanitaires se sont développées par la construction de
centres de santé. Des personnels qualifiés résultant d'une politique volontariste de
développement des ressources humaines étaient aussi mis à la disposition de la population.
Toutes ces dispositions permettaient à la population de bénéficier de la gratuité des soins et des
médicaments qui étaient entièrement pris en charge par l'État.
Mais, les années 1980 vont mettre fin à cet essor de la politique sanitaire. Cette période est
marquée par la crise économique et une démographie galopante, avec comme conséquence,
l'incapacité de l'Etat à poursuivre ses efforts de développement sanitaire. Toutefois, les
problèmes de santé des populations demeurent et prennent de l’ampleur.
Face à son incapacité à prendre en charge les problèmes de santé de sa population, l’État de
Côte d’Ivoire comme les États des pays en développement va adopter des politiques de santé
mises en place par les différents États et les institutions internationales telles que l’Organisation
Mondiale de la Santé (OMS) et le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF). Ces
politiques sont entre autres, la déclaration d'Alma-Ata en 1978; la Charte d’Ottawa en 1986 et
au niveau régional, l'Initiative de Bamako en 1987.
D’abord, la déclaration d’Alma-Ata encourage la mise en œuvre des soins de santé primaire
(SSP) en vue d’assurer la santé à toutes les couches sociales. Ensuite, la Charte d’Ottawa vient
promouvoir les soins de santé communautaire pour favoriser l’accès et l’équité des soins. Enfin,
l’Initiative de Bamako reprend au niveau régional, la promotion de la santé communautaire.
Les résolutions de l’Initiative de Bamako prennent en compte essentiellement deux volets de
l’offre de soins : le volet financier appelé « recouvrement des coûts » et le volet organisationnel
« participation des usagers » (Tizio et Flori, 1997).
Le premier volet fait référence au recouvrement des coûts. Les usagers sont appelés à payer
pour leurs soins. Ce volet poursuit trois grands objectifs : lutter contre la désaffection des

1
La gratuité des soins consiste à offrir certaines prestations sanitaires (prise en charge des enfants de 0 à
5 ans, des femmes enceintes, etc.) sans toutefois que les usagers les paient.
2
Les progrès constatés au cours des 15 premières années de l'indépendance de la Côte d’Ivoire sont
qualifiés de « Miracle économique ».

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structures de santé publique, améliorer l'efficience des dépenses de santé et améliorer l'équité
(Tizio et Flori, idem: 839).
Le second volet c'est-à-dire la partie organisationnelle des centres de santé appelle à une
participation active des usagers. Les populations sont associées à la gestion de leurs problèmes
de santé. Ces populations qui pendant de longues périodes assistaient en téléspectateurs sont
désormais invitées à donner leur avis sur la question de leur santé.
Ainsi, la mise en œuvre de l’Initiative de Bamako a permis de construire des centres de santé
communautaire. En Côte d’Ivoire, elle s’est traduite par la décentralisation sanitaire sous le
«Projet Santé Abidjan (PSA)». Sous l’égide de la Coopération Française, l’État ivoirien a
autorisé en 1992, la création de Centres de Santé Urbains à base Communautaire (CSUCom),
(MSP, 2007). De 1992 à 2012, 42 centres de santé urbains à base communautaire ont été
construits dans le district d’Abidjan. Ces centres de santé sont financés et organisés selon les
résolutions de l’Initiative de Bamako.
Depuis la création de ces structures sanitaires, elles ont permis de prendre en charge la
population ivoirienne. En effet, les statistiques du Ministère de la Santé et de la Lutte contre le
Sida révèlent que 80% des activités des prestations sanitaires en Côte d’Ivoire sont pratiquées
par les CSUCom. En 2012, l’ensemble des 42 CSUCom a effectué plus de 6 763 636
consultations. Au niveau des accouchements, environ 483 714 accouchements, dont 88 350
survenues à domicile pratiqués par les CSUCom. Ces accouchements ont été pris en charge et 1
925 968 consultations prénatales ont été effectuées par les sages-femmes des CSUCom. En
santé préventive, ce sont 2 432 975 enfants qui ont été vaccinés. Les CSUCom emploient aussi
plus de 800 agents (médecins, infirmiers, sages-femmes, etc.). Ces structures, qui fonctionnent
sur fonds propres font gagner environ 100 milliards FCFA à l’État depuis leur création
(Direction de l’Information, de la Planification et de l’Évaluation (DIPE), 2012 cité par Koné,
2012).
Malgré le rôle joué par les CSUCom dans le système sanitaire ivoirien, certains d’entre eux tels
que les CSUCom d’Abobo Sagbé3, d’Arras III (Treichville4), de Gonzagueville5 et de Vridi6 3
(Port-Bouët)7 sont confrontés à des crises internes. Ils ne respectent pas les résolutions de
l’Initiative de Bamako. En effet, le constat de terrain révèle que le fonctionnement de ces
centres de santé ne tient pas compte de la cogestion (la gestion des médecins et des usagers)
dont fait référence l’Initiative de Bamako. Les usagers de ces centres de santé sont mis à l’écart
du fonctionnement de ces structures. Par conséquent, les professionnels de la santé y demeurent
seuls gestionnaires.
Dès lors, comment la démocratisation sanitaire est-elle mise en œuvre dans le système sanitaire
ivoirien ? De façon spécifique, quelles sont les représentations sociales construites par les

3
SAGBE est l'un des 24 quartiers que compte la commune d'Abobo et principalement le plus grand et le
plus peuplé de la commune.
4
La commune de Treichville est située au centre de la ville d’Abidjan. Elle s’étend sur une superficie de
77,45 Km2. C'est une presqu'île, construite sur un terrain plat.
5
Quartier de la commune de Port-Bouêt dans le District d’Abidjan, Gonzagueville s’étend sur tout le long
du littoral. Le quartier doit son peuplement à l’ouverture du wharf de la commune et davantage encore
à la création du premier port de Côte d’Ivoire en 1950.
6
Vridi 3 est l’un des quartiers dits précaires de la commune de Port-Bouët. Il est localisé au nord de la
presqu’île de Vridi, à proximité de l’entrée du canal.
7
La commune de Port-Bouët s’étend sur une superficie de 111,1 km2. Elle se situe dans la partie sud de la
ville d’Abidjan, entre l’océan Atlantique au sud et la lagune Ebrié au nord.

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professionnels de la santé et les usagers autour de la démocratisation sanitaire ? Quelle est la


structure des liens sociaux entre les professionnels de la santé et les usagers des CSUCom ?
Quels sont les enjeux liés à la démocratisation sanitaire ? Ces différentes interrogations donnent
lieu à un objectif général qui est de comprendre le mode d’application de la démocratie dans le
système de santé en Côte d’Ivoire. De cet objectif découle l’hypothèse suivante : la mise en
application de la démocratie dans le système de santé en Côte d’Ivoire est fonction de la
perception des professionnels de la santé et des usagers. Pour vérifier cette hypothèse, l’étude
se structure autour de 04 points : la méthodologie, les résultats, la discussion et la conclusion.
Mais pour mieux comprendre les résultats de la présente étude, il est bon de préciser l’ancrage
théorique.
I-IMPLICATION THÉORIQUE : L’analyse systémique
La présente analyse met en présence deux acteurs clés de la structure hospitalière dont la
relation conflictuelle produit un dysfonctionnement dans de l’offre de soins. Or un système par
le jeu de rôle des acteurs en présence, vise d’abord un équilibre dans la relation de pouvoir puis
ensuite cherche l’efficacité (adéquation ressources et objectifs) et si possible vise l’efficience
(résultats optimums pour peu de ressources). La structure hospitalière est représentée ici comme
un système et les acteurs suscités comme des sous-systèmes. « Un système est un ensemble
d'éléments reliés par un ensemble de relations. un système est un ensemble d’éléments en
interaction dynamique organisés en fonction d’un but (Von Bertalanffy L, 1991) La présente
analyse questionne les interactions (Von Bertalanffy L, idem) entre les acteurs clés, leurs
rapports au tout, l’organisation (Durand D, 1983, sous l’angle des aspects structurel et
fonctionnel ; le niveau de complexité (Edgard M, 1977). La structure en tant que système ne
peut se construire que de l’intérieur et c’est justement son rapport à l’environnement qui a
suscité l’approche de cogestion des structures de soins communautaires pour une plus grande
intégration des usagers et de leurs besoins en matière de santé. Toutefois, la relation de conflit
ne peut rendre favorable l’efficience et permettre au système hospitalier d’atteindre ses
objectifs. Dans le cas des CSUCom, le dysfonctionnement rend compte de la problématique de
l’efficacité. Car, l’une des approches de l’analyse systémique est l’efficacité. Pour assurer cette
efficacité, la relation de pouvoir entre les sous-systèmes doit être équilibrée et c’est ce que nous
désignons par le concept de démocratie sanitaire.

II-MÉTHODOLOGIE
Cette étude se déroule dans deux communes du district d’Abidjan, notamment, les communes
de Treichville (d’Arras III) et de Port-Bouët, (Vridi III et Gonzagueville).
Le choix de ces communes se justifie par le fait qu’elles abritent des centres de santé
communautaire, dont la mise en œuvre de la démocratie sanitaire suscite des crises internes.
Pour appréhender la réalité sur la démocratisation sanitaire, les professionnels de santé, les
membres du Conseil d’Administration, les leaders communautaires, les présidents d’association
et les directeurs départementaux de santé, pris ici comme des acteurs témoins:
- les professionnels de santé qui sont à la tête des centres de santé communautaires.
- Les membres du Conseil d’Administration. Ils ont géré les CSUCom pendant de
longues années avant d’être mis à l’écart du fonctionnement desdits centres. À cet
effet, ils sont détenteurs d’informations qui pourront servir à la compréhension de
l’offre de soin en Côte d’Ivoire à l’épreuve de la démocratisation sanitaire ;

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- Les leaders communautaires (chef de quartier, président d’association de jeunes,


de femmes) : les CSUCom sont implantés dans des quartiers. Dans ce sens, la
population est concernée par les soins qui sont prodigués dans ces centres de santé
ainsi que le fonctionnement de ces CSUCom.
- En plus de ces acteurs, il y a également des acteurs témoins. Ces acteurs sont
sollicités parce qu’ils sont imprégnés des réalités sur la gestion et le
fonctionnement des centres de santé communautaires. Il s’agit:
 du président de la confédération pour le développement des établissements
sanitaires de Côte d’Ivoire (CODESCOMCI);
 du président de la fédération de la santé communautaire de Côte d’Ivoire
(FASCOMCI);
 du président du réseau national de la santé communautaire de Côte d’Ivoire
(RENASCOMCI).
Pour constituer l’échantillon de cette population, l’échantillonnage par choix raisonné a été
choisi. En effet les centres de santé communautaires ont été gérés par deux différentes entités.
La première est le Conseil d’Administration et la seconde les professionnels de la santé. Les
premières n’étant pas présentes, la base de données sur leur effectif est inexistante.
L’échantillonnage par choix raisonné (N'Da, 2006) a donc servi à constituer l’échantillon de
cette population. Pour la seconde catégorie de gestionnaire, l’organigramme a représenté la base
de données. Il a favorisé la construction de cet échantillon de cette population.
À partir des données de l’enquête exploratoire, le nombre des membres des professionnels de la
santé a été constitué. L’échantillonnage s’est donc construit sur le nombre des agents de santé
parce que ces derniers sont à la tête des CSUCom. Les membres du Conseil d’Administration
ont été interrogés également pour avoir géré ces structures sanitaires. Enfin, les usagers des
CSUCom ont été sollicités parce qu’ils sont utilisateurs de ces CSUCom.
L’échantillonnage est donc constitué de 35 individus dont 10 professionnels de la santé (trois à
Arras III, trois à Vridi 3 et quatre à Gonzagueville), 10 membres du Conseil d’Administration
(trois à Arras III, quatre à Vridi 3 et trois à Gonzagueville), 10 usagers des CSUCom (quatre à
Arras III, trois à Vridi 3 et trois à Gonzagueville), trois présidents des associations de CSUCom
et deux directeurs départementaux de la santé.
La constitution de l’échantillon des membres du Conseil d’Administration s’est donc faite sur
la base de la technique boule de neige Marpsat et Razafindratsima (2010). Cette technique
consiste à construire l’échantillon de l’étude à partir d’un premier répondant. Ce dernier indique
ou fournit le contact d’un autre au fur et à mesure jusqu’à ce que la saturation soit atteinte.
Après la construction de l’échantillon, les données ont été recueillies à partir des entretiens
libres menés auprès des acteurs clés et de témoins. Le guide d’entretien utilisé est structuré
autour de trois grandes thématiques :
- les représentations sociales de la démocratisation sanitaire ;
- la structure des liens sociaux entre les agents de santé et les usagers des CSUCom ;
- les enjeux liés à la démocratisation sanitaire.
Une fois la collecte des données réalisée, le traitement a été manuellement et a suivi selon les
étapes suivantes :
 transcription des données préalablement enregistrées à l’aide d’un dictaphone et
réalisation des fiches individuelles ;

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 analyse transversale des fiches de données et construction des fiches


thématiques ;
 codification des données et construction des catégories d’analyse.
III-RÉSULTATS
Les résultats de cette étude se composent en trois points :
- représentations sociales de la démocratisation sanitaire ;
- structuration des liens sociaux entre les agents de santé et les usagers des CSUCom ;
- Disfonctionnement des CSUCom : disponibilité des offres de soins et désertion de la
population.
Mais avant les résultats, il est important de présenter les CSUCom et les enjeux liés à la
démocratisation sanitaire, afin de mieux comprendre le fonctionnement desdites structures.

III-1-Présentation des CSUCom et pluralité d’enjeux autour de la démocratie


sanitaire

III-1-1- Présentation des CSUCom

Un centre de santé communautaire (CSUCom) est une structure sanitaire à gestion privée à but
non lucratif de niveau primaire géré par une association de quartier ou de localité, lié à la
collectivité territoriale et à l’État par une convention de concession de service sanitaire public.
Dans le cadre du service public confié par la collectivité territoriale, la mission des
établissements sanitaires à base communautaires se résume comme suit:
- assurer des soins de qualité correspondant au Paquet Minimum d’Activité (PMA) prévu
dans les structures de niveau primaire par l’arrêté ministériel n°74 du 9 décembre 1996
du ministère de la Santé;
- offrir des prestations curatives réalisées obligatoirement par des médecins en zone
urbaine, et/ou au minimum par un infirmier ou une sage femme diplômée de l’État en
zone rurale;
- offrir des soins à des tarifs accessibles à la population de leur lieu d’implantation et en
accord avec le ministère en charge de la santé publique;
- rendre accessibles et disponibles les médicaments essentiels dans de bonnes conditions;
- mettre en œuvre des programmes de santé publique avec l’appui de l’État ou des
partenaires au développement;
- initier des activités préventives et promotionnelles dans les lieux d’implantation.
Les organes gestionnaires et décisionnels impliqués dans le fonctionnement des
établissements sanitaires à base communautaires sont les suivants:
L’assemblée générale est l’organe suprême de décision de l’association. Elle est composée de
tous les adhérents de ladite association. Cette instance se réunit au moins une fois par an. Elle
doit être obligatoirement tenue dans le courant du premier trimestre de l’année n+1 (réf :
circulaire 3996 du 04/06/2007).
Le conseil d’administration (CA) assure la responsabilité morale et juridique de l’association et
de l’établissement sanitaire communautaire. Il représente l’organe d’exécution de l’association.
Le conseil d’administration est composé de six à 10 membres. Le président est élu pour trois ans
renouvelables une fois. Le conseil d’administration met en place les dispositions pour le
fonctionnement de l’établissement sanitaire en respectant la réglementation en vigueur. Il joue

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un rôle de manager, c'est-à-dire qu’il planifie, fait exécuter, contrôler et évaluer les activités de
l’établissement sanitaire communautaire.
À ce titre, le personnel, quel que soit son statut (fonctionnaire, agent de mairie, agent recruté par
le Conseil d’Administration) est placé sous l’autorité administrative du Conseil
d’Administration. Cette structure donne des instructions concernant l’exécution du travail, en
contrôle son accomplissement et vérifie les résultats (réf : code du travail : circulaire 3996 du
04/06/2007).
La gestion courante des établissements sanitaires communautaires est assurée par le comité de
gestion Comité de Gestion Communautaire (COGES-COM) regroupant:
- trois des membres du conseil d’administration désignés par le président dont l’un en
assure la présidence;
- trois membres du personnel de l’établissement sanitaire: les deux cadres de
l’établissement (le médecin-chef et le gestionnaire) et le délégué du personnel.
Le COGES-COM tient au moins une réunion chaque mois sur convocation de son président et
en cas de nécessité.

III-1-2- pluralité d’enjeux autour de la démocratie sanitaire


La mise en œuvre de la politique de démocratisation sanitaire favorise l’accès aux soins.
Ainsi, les enjeux liés à cette politique sont sociaux, sanitaires, économiques.
-enjeux sociaux :
Les enjeux sociaux de la démocratisation sanitaire sont perceptibles à travers la confiance des
acteurs vis-à-vis du système sanitaire. L’implication des usagers dans le fonctionnement des
structures sanitaires favorise une réappropriation des soins. À cet effet, les usagers sont actifs à
partir des sensibilisations et une collaboration naît entre eux et les professionnels de santé. Cette
implication des usagers influence l’accès aux soins des populations.
-enjeux sanitaires :
La démocratisation sanitaire permet de rapprocher les structures sanitaires des usagers. Pour ce
faire, chaque région, ville, commune ou quartier abrite un centre de santé. La population ne
parcourt plus une longue distance pour se faire soigner comme c’était le cas auparavant. C’est
ce que traduit ce verbatim :

Encadré 4 : extrait de discours d’un Membre du Conseil d’Établissement,


Vridi 3, A1
Source : notre enquête, 2014

« Les centres de santé à base communautaires sont des structures


construites pour éviter de parcourir de longues. La population a désormais
les hôpitaux à proximité. Cela évite les décès des mères et des enfants
pendant les accouchements. J’encourage cette politique parce qu’elle
facilite l’accès des soins. C’est une politique de proximité que l’État à fait,
cela pour pouvoir rapprocher l’administration médicale de la population »

De plus, la démocratisation sanitaire permet de vulgariser les soins. Il n’est plus question de
recourir uniquement aux grandes structures sanitaires telles que les Centres Hospitaliers
Universitaires (CHU), les Centres Hospitaliers Régionaux. Cette politique permet de

14
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désengorger ces hôpitaux. Le premier recourt des usagers ce sont les centres de santé
communautaires. Les CHU ou CHR sont sollicités lorsque ces structures n’arrivent plus à
répondre aux besoins des patients.
« Ils sont au premier plan dans le système sanitaire, c'est-à-dire ils s’occupent en premier lieu
des patients pour des cas mineurs et dans l’accouchement des femmes (Membre de la
communauté, comptable de formation, Arras III)».
-enjeux économiques :
La démocratisation sanitaire permet d’amoindrir les coûts des soins et des médicaments. Les
usagers se soignent à moindre coût par rapport aux soins dans les cliniques privées et les
grandes structures telles que les CHU et les CHR. Les coûts de soins sont fixés en fonction des
besoins et du niveau de vie de la population.
« Ils permettent à la population de se soigner pas chers et à proximité. S’il y a une urgence, pas
besoin d’aller au CHU ou plus loin, sauf pour les cas qui dépassent leurs compétences
(Membre de la communauté, enseignant de formation, Gonzagueville)». Aussi, les patients
ne parcourent plus de longues distances pour avoir accès aux soins. Cela évite aux usagers le
coût du transport. « Ils permettent de ne plus parcourir des kilomètres pour se faire soigner.
Les médicaments sont à moindre coût, les consultations sont gratuites pour certains cas
(Commerçant, Arras III) ».

III-2- Représentation sociale de la démocratisation sanitaire

Cette thématique permet de mettre en exergue la perception des acteurs de la démocratie


sanitaire. Les perceptions prennent en compte 02 points : la démocratisation des systèmes
sanitaires comme mise en œuvre des prix sociaux et de la politique de proximité aux malades et
l’assimilation de la démocratisation sanitaire à la mise en œuvre des soins de santé
communautaires.
III-2-1- Mise en œuvre des soins de santé communautaire comme forme
représentationnelle dominante de la démocratie sanitaire

La représentation sociale de la démocratisation sanitaire est liée au fonctionnement formel des


centres de santé, sous l’angle de l’administration des soins, de la disponibilité des médicaments
et des prestataires de soins. Les discours des membres de la communauté et de celui du Conseil
corroborent cet argumentaire.

Encadré 1 : extrait des discours respectifs de Membre de communauté, Vridi 3 et


du Conseil d’Établissement, Gonzagueville A1
Source : notre enquête, 2014
« Un centre de santé communautaire est comme un temple de soins mis à la
disposition de la population par l’État, qui appartient à la communauté et qui doit
être géré par la communauté. Ces centres permettent de mettre en œuvre la
démocratisation sanitaire ».
« La démocratisation sanitaire favorise la gestion des centres de santé par les
usagers. La mise en œuvre de cette politique se fait par la construction des centres
de santé communautaires, ces structures sont des centres de premier niveau selon la
pyramide sanitaire construite par l’État. En Côte d’Ivoire ici ces centres sont gérés
par la communauté ».

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Les lignes de Bouaké -la-Neuve – 2016 – N°7

III-2-2- De la démocratisation des systèmes sanitaires comme mise en œuvre des


prix sociaux et de politique de proximité aux malades
En plus de percevoir la démocratisation sanitaire comme la mise en œuvre de la
politique des CSUCom, les acteurs mettent en exergue le caractère social de cette politique :
«La démocratisation sanitaire permet la création d’hôpitaux qui aident les gens qui n’ont pas
les moyens financiers pour aller dans les cliniques pour se soigner. C’est un service social qui
aide beaucoup les gens» (Assistant social, Gonzagueville). Cette politique est également
perçue comme la vulgarisation des soins et le rapprochement des structures sanitaires des
populations.

Encadré 2 : extrait de discours Membre du Conseil Encadré 3: extrait de discours Membre de la


d’Etablissement, Vridi 3 A3 communauté, Gonzagueville A4
Source : notre enquête, 2014 Source : notre enquête, 2014

La démocratisation sanitaire à travers les centres « je pense que la démocratie sanitaire, c’est la
de santé à base communautaire, d’abord, on met mise en œuvre des centres de santé
cette politique-là, c’est pour rapprocher la communautaires. Les médecins de ces centres
population intéressée des centres de santé. Nous travaillent en collaboration véritable avec la
avons le CHU de Treichville qui est là bon, par communauté, donc la communauté a un droit de
exemple, ici s’il n’y a pas de centre de santé et regard là dessus et où on associe la population
qu’il y a des malades, cela va poser des problèmes. pour certaines choses, certaines sensibilisations et
Donc les premiers diagnostics, il faut mettre le autre. Les hôpitaux sont proches des malades et on
centre de santé dans les différents quartiers, même les trouve partout. Le malade n’a plus besoin de se
dans les villages où il faut en mettre c’est un déplacer pour se faire soigner, dans son quartier, il
principe que l’Etat a fait. Ce qui permet de y a un hôpital »
rapprocher l’administration médicale de la
population»

Globalement, la représentation sociale du processus de démocratisation des systèmes sanitaires


accorde une place centrale aux acteurs institutionnels (les professionnels de la santé et le
ministère de la santé). Les populations ou les bénéficiaires des prestations de soins ne
s’inscrivent pas au cœur de ce jeu de pouvoir. Toutefois, entre les schèmes de représentation
sociale et les interactions prestataires et bénéficiaires (offre/demande), il y’a un gap. En effet,
cette politique permet d’associer les usagers à la gestion des CSUCom, de rapprocher les
structures sanitaires des populations, de vulgariser les soins et de rendre accessibles les soins à
toutes les couches sociales. Aussi, la réalisation de cette politique favorise-t-elle une interaction
entre les professionnels de la santé et les populations. Comment se structurent donc les rapports
entre ces différents acteurs impliqués dans la mise en œuvre de cette politique ?
III-3- Structuration des liens sociaux entre les agents de santé et les usagers des
CSUCom
La structure des rapports entre les agents de santé et les usagers permet d’analyser les
différentes interactions entre les acteurs en compétition. Ces rapports sont construits autour des
enjeux. Ainsi, la démocratisation sanitaire fait naître de nouvelles formes de rapports.

16
Les lignes de Bouaké -la-Neuve – 2016 – N°7

La gestion des structures sanitaires qui était exclusivement assurée par les professionnels de la
santé est désormais secondée ou commandée par les usagers8. Cette nouvelle configuration des
centres de santé à travers les CSUCom va modifier les rapports entre les acteurs (agents de santé
et usagers). Les rapports qui structurent leurs interactions sont des rapports de leadership, de
méfiance et de conflit.
 Les rapports de leadership
Les usagers et les professionnels de la santé sont appelés à collaborer pour gérer les centres de
santé communautaires selon les textes régissant ces structures sanitaires. Les rapports de
leadership se manifestent par le refus des professionnels de la santé et des usagers de collaborer
dans le fonctionnement des CSUCom. Ces rapports s’expriment également par le refus des
professionnels de la santé d’être sous les ordres des usagers parce que ces derniers ont une
formation inférieur à la leur. Tous ces problèmes de leadership plombent les rapports entre les
agents de santé et les usagers. En effet, l’implication des « profanes » dans la gestion des centres
de santé fait naître des problèmes de leadership. Les professionnels de la santé qui étaient les
seuls responsables dans la gestion des structures sanitaires se voient concurrencer dans leurs
tâches par les usagers ou les patients depuis la mise en place des soins de santé communautaires.
En effet, la population du quartier où le centre de santé est construit est associée à la gestion
dudit centre. Cette population qui représente l’usager est mise au cœur du fonctionnement de la
structure sanitaire. Cette situation conduit un membre du conseil de l’Établissement à tenir ces
propos :
Encadré 4 : extrait de discours Membre de la Encadré 5 : extrait de discours Membre du conseil
communauté, Gonzagueville A2 d’établissement, Arras A2
Source : notre enquête, 2014 Source : notre enquête, 2014

« Oui, il y a le problème de leadership. Quand on


la gestion des CSUCom devrait être une gestion
était allé à Bassam, des injures, pas mal de bêtises
axée sur la communautaire, donc personnel
qui ont été dites là-bas. Certains médecins-chefs
technique et autre branche de la population qui
disent, j’ai fait dix ans d’études, je ne peux
vient à l’hôpital. Mais le véritable problème, c’est
accepter que je sois en collaboration avec le
que la représentation de la population pose souvent
gestionnaire et puis plein de choses. Ce sont des
problème, peut être que les personnes qui viennent
saletés. On ne peut travailler sans collaboration.
pour collaborer avec le personnel ne sont pas les
Dès l’instant que l’autre monte au dessus de
personnes indiquées. Leurs interventions mettent à
l’autre, l’autre aussi il a son pouvoir. Alors, s’il
mal le travail des médecins. Souvent ils se prennent
n’y a pas d’entente vous fonctionnez comment ?
pour les chefs des médecins donnant des ordres
Vous ne pouvez pas bien fonctionner ; alors il faut
alors qu’ils doivent collaborer. Leurs présences
s’entendre, il faut s’abaisser, il faut collaborer,
empêchent les professionnels de la santé de
développer des projets. Tant qu’il n’y a pas cela,
pleinement exercer leurs fonctions»
c’est difficile »

Aussi, la mise en œuvre de la démocratisation sanitaire n’a pas eu un avis favorable de la part
des professionnels de la santé et des cliniques. Ces acteurs voyaient en cette politique une
manière de les déposséder de leurs droits. Les cliniques perçoivent cette démocratisation
sanitaire comme une perte de leurs clientèles au profit d’un autre type de structure sanitaire. Ce

8
Les usagers des centres de santé communautaires sont non seulement les patients qui sollicitent ces
structures mais aussi les membres du Conseil d’Administration. Ces groupes d’acteurs représentent la
population de la localité où est construit le centre de santé.

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Les lignes de Bouaké -la-Neuve – 2016 – N°7

qui crée un sentiment de méfiance entre les professionnels de la santé et les usagers des
CSUCom. Ces propos rendent compte de cette réalité :

Encadré 6 : extrait de discours d’un Responsable communautaire, Vridi 3 A1


Source : notre enquête, 2014
« À la création, les médecins n’étaient pas favorables à l’époque que les instituts de
santé soient gérés par la population. C’était nouveau, comme d’habitude, il y a un
médecin qui fait la faculté de médecine, à l’époque il sort, c’est lui qui est bombardé,
c’est lui qui devient directeur. Maintenant, on vient lui dire que son patron est la
population. C’est la population qui va gérer, qui prend les orientations et lui, il ne
fait que faire des consultations; donc c’était nouveau, et ils n’étaient pas d’accord.
Mais comme c’est une volonté politique, ils se sont pliés, mais en dessous, il y avait
des remous. Ensuite, on avait affaire également aux syndicats des cliniques privées
qui sont en Côte d’Ivoire. Si vous prenez la pyramide des infrastructures, après
l’institut public, ce sont les instituts privés. Mais, on vient installer une autre forme
de structure intermédiaire qui n’est ni privée ni publique, qui est affectée à côté.
Donc les cliniques privées voient la clientèle qu’ils perdent. Or leurs tarifications ne
sont pas accessibles aux plus vulnérables. Donc eux aussi, ils rentrent dans un
conflit alarmant et d’autres sont rentrés dans un système de sabotage. Donc vous
avez en face de vous des médecins qui sont dans la structure, qui ne veulent pas
accepter l’autorité de la population, il y a un problème. Vous avez encore d’autres,
les cliniques privées qui vous combattent. Donc au même moment vous êtes en train
de gérer, ils vous mettent les bâtons dans les roues. Donc, cette jeune démocratie
sanitaire a fait qu’il y a eu beaucoup de problèmes».

 Les rapports de conflit


La démocratisation sanitaire a créé également des rapports conflictuels entre les agents de santé
et les usagers. En effet, les agents de santé s’opposent à l’implication des populations dans la
gestion des CSUCom. Cela se manifeste par le retrait de ces derniers.

Encadré 4 : extrait de discours d’un Responsable communautaire, Gonzagueville A2


Source : notre enquête, 2014

« Mais quand c’est le problème de personne qui amène le DD à prendre des


décisions, aller raconter des choses, jusqu’à envoyer un ministre d’alors pour faire
une cessation de collaboration avec un Conseil d’Administration, mais toi, tu es
ministre, tu cesses la collaboration avec le Conseil d’Administration. Mais qui
encadre ces structures-là finalement. […]. Mais venir remplacer ce qui est dévolu
aux communautés, outre passer son champ d’action pour rentrer, n’est ce pas, sur la
page blanche du collaborateur, c’est qu’il n’y a plus de collaboration […] enlever le
médecin-chef, ça il peut le faire, ça, c’est technique. Mais aller prendre la place qui
revient à la communauté, qui est de choisir ses dirigeants qui appartiennent aux
associations, à l’association gestionnaire, qui se donne un Conseil d’Administration
pour la gestion…».

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Les lignes de Bouaké -la-Neuve – 2016 – N°7

III-4-Disfonctionnement des CSUCom : disponibilité des offres de soins et


désertion de la population

Le dysfonctionnement des CSUCom a une conséquence sur l’offre et la demande de soins. En


effet, le retrait des usagers de la gestion des centres de santé à une répercussion sur le
fonctionnement de ces structures. Elle se situe à trois niveaux de l’analyse : les rapports
d’évitement, la non-fréquentation des CSUCom par les acteurs communautaires, soupçon de
politisation des offres de soins.
Les rapports d’évitement sont traduits par la cessation de tout contact avec les professionnels de
la santé. Pour éviter tout rapport avec les professionnels de la santé, certains usagers décident de
ne pas fréquenter les CSUCom. D’autres décident de se camoufler pour éviter tout contact avec
les professionnels de la santé.

Encadré 5 : extrait de discours d’un membre de la communauté,


Gonzagueville A5
Source : notre enquête, 2014

« Je dis, je n’ai pas de contact avec eux donc je ne sais pas ce que je vais
dire de ça. Je ne sais pas qui gère. Et lui-même si vous lui demandez est
ce qu’il connaît le Président du comité de gestion d’habitat Crown. Je me
rends là-bas comme tous les individus, mais moi je suis habillé comme ça
et puis je vais. Mais quelqu’un qui est habillé comme ça et puis il va
quelque part toi qui es là, ça doit te donner à réfléchir, mais le monsieur
il est sans réaction ».

L’avènement des problèmes dans la gestion des CSUCom a déstructuré la confiance que les
populations plaçaient dans cette institution. Le manque d’informations sur le fonctionnement
des CSUCom et sur le personnel a entraîné la suspicion du personnel soignant.
À Vridi 3 par exemple, les acteurs en compétition, notamment la communauté, développent un
sentiment de méfiance vis-à-vis du personnel soignant. Cette attitude se justifie par une
représentation que la communauté de cette localité se fait des agents de santé. Ceux-ci les
incriminent. Pour ce faire, les rapports entre la communauté et le corps médical sont influencés
par la situation politique de la Côte d’Ivoire. Cette méfiance des acteurs communautaires vis-à-
vis des acteurs institutionnels dénote l’influence de la politique sur le quotidien des acteurs. La
situation politique a fragilisé le tissu social ivoirien. La crise ivoirienne se traduit par la
méfiance des acteurs locaux vis-à-vis des agents de santé.

Aussi, la méfiance des acteurs locaux peut exprimer le non-recours des structures sanitaires par
la communauté. En effet, la suspension de la communauté dans la gestion des CSUCom fait
naître des rapports d’évitement au sein de la communauté locale. À cet égard, elle fréquente de
moins en moins les CSUCom. Pour se repositionner à la tête des CSUCom, la communauté
décide donc de ne pas fréquenter ces structures. Elle a donc recours à d’autres centres de santé
tels que les cliniques privées, les hôpitaux généraux, les CHU, etc. Cette situation est mise en
exergue par les propos d’un Agent technique de la santé:

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Les lignes de Bouaké -la-Neuve – 2016 – N°7

Encadré 6 : extrait de discours d’un Agent technique de la santé, Vridi


3 A4
Source : notre enquête, 2014

«À Vridi 3, ici la population a peur de se rendre dans la structure


sanitaire communautaire à cause des problèmes politiques. La
communauté de Vridi 3 est composée en majorité des ressortissants du
nord que ce soient les nationaux ou les allogènes. Pour ces derniers, les
agents de santé sont des partisans de l’ancien régime c'est-à-dire le FPI
(Front Populaire Ivoirien). Ils refusent de se rendre dans le centre de
santé de peur qu’ils soient assassinés par ces derniers. Ce sont les
rumeurs qui circulent dans la communauté. Le centre de santé en
souffre parce que le taux de fréquentation est très bas ».

Ainsi, la persistance de ces rumeurs a favorisé la déperdition des patients. La peur de se voir
‘mal traitée’’ amène les populations à ne plus fréquenter les CSUCom comme auparavant.
L’offre de soin se trouve en inadéquation avec la demande de soin. En effet, les structures
sanitaires proposent aux patients toutes les prestations dont ils ont besoin, mais ces derniers
préfèrent se rendre dans d’autres centres de santé pour leurs soins. Les propos d’un membre de
la communauté rendent compte de cette réalité : « moi, je préfère me faire soigner à Treichville
parce que chez nous ici, les sages-femmes ont tué mon bébé. Lorsque je devais accoucher, elles
ont refusé de m’aider et j’ai perdu mon enfant, je ne leur fais plus confiance » (Membre de la
communauté 4, Vridi 3).
De manière générale, les CSUCom ont été construits pour atteindre un objectif, celui de
résoudre les problèmes de santé de la population. Le dysfonctionnement que connaît ce système
médical suscite des interrogations sur l’efficacité de ces structures sanitaires. Pour atteindre
cette efficacité, de nouveaux défis doivent être relevés en termes de gestion de ces structures. La
cogestion (professionnels de la santé et les usagers) permettra d’objectif assigné aux CSUCom.

III- Discussion
La discussion des résultats tourne autour de trois points : démocratisation sanitaire comme
politique des soins de santé communautaires, enjeux de la démocratisation sanitaire.
III-1- Démocratisation sanitaire comme politique des soins de santé communautaires
La démocratisation sanitaire est perçue comme la mise en œuvre de la politique des soins de
santé communautaires. Ce qui implique les usagers dans la gestion des structures sanitaires. Les
travaux de Letourmy et Naïditch (2009) effectués en France sur l’émergence de la démocratie
sanitaire dans ce pays montrent que la démocratie sanitaire a reçu une traduction officielle en
France avec la loi de 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de soins.
Elle prend en compte la modernisation des politiques publiques, la fixation d’un corpus de
droits pour les malades et l’action revendicative des associations. Cette politique de
démocratisation sanitaire exprimée notamment à travers les états généraux de la santé traduit un
besoin de rapprocher les citoyens et les décideurs.

20
Les lignes de Bouaké -la-Neuve – 2016 – N°7

Toutefois, les auteurs estiment qu’aujourd’hui, la participation des usagers à la gestion des
hôpitaux soulève diverses interrogations et ils constatent l’affaiblissement de la gestion
associative. Selon eux, l’impact de la démocratie sanitaire reste donc encore incertain.
Moquet-Anger (2004) oriente sa réflexion dans le même sens. Pour lui, pendant longtemps, les
usagers ont été mis à l’écart des décisions concernant leur état de santé. Il appartenait au
médecin de décider de ce qui est bon pour eux. Car pour eux, la connaissance médicale leur
permettait d’évaluer l’état de santé des patients et le traitement nécessaire.
Ainsi, l’absence de toute représentation des usagers dans les instances décisionnelles a été de
plus en plus remise en cause par les usagers, ce qui occasionne une crise de confiance de ces
acteurs. Face à une perte de confiance dans le système de santé naît l’idée d’un « droit à la
sécurité sanitaire ». À cet effet, l’auteur estime que la démocratisation sanitaire renvoie à l’idée
d’un « usager acteur », dont l’opinion est déterminante dans la relation de soins, et à des usagers
qui puissent intervenir avec succès dans la définition des politiques nationales et locales de
santé.
La représentation de la démocratisation sanitaire met en exergue le droit des usagers, le
rapprochement des structures sanitaires des usagers et leur participation à la gestion desdites
structures. En Côte d’Ivoire, cette politique est dénommée centre de santé communautaire.
Actuellement, cette politique en Côte d’Ivoire s’expérimente au niveau primaire de l’échelle
sanitaire et converge avec les principes de démocratisation sanitaire. Mais ce que ces travaux ne
mettent pas en exergue ce sont les idéologies non apparentes, mais fonctionnelles dans le
rapport de cogestion. Car si la structure sanitaire est un système, l’environnement socioculturel
avec les diverses idéologies de structuration des rapports participe de la différenciation dans la
mise en œuvre de la démocratie sanitaire. Ainsi, l’idéologie de rentabilité participe du processus
de mise à l’écart des acteurs commentaire et donc de l’appropriation des instances de décision
des CSUCOM. C’est pourquoi le paradoxe apparaît clairement lorsque ce sont des acteurs
sanitaires, formés à la co-gestion et chargés de faciliter le jeu d’équilibre de pouvoir. Cette
posture rencontre la perspective de Bourque et Favreau (2003) qui estiment qu’il est nécessaire
« d’additionner les expertises et composer avec les logiques paradoxales, à défaut de quoi le
développement des communautés ne pourra jouer son rôle dans l’amélioration de la santé et du
bien-être des collectivités » (Bourque et Favreau 2003: 305)

III-2- Démocratisation sanitaire comme légitimation des « compétences » de la


communauté
« Savoir identifier un malade » relève de l’expertise des médecins, mais « se savoir
malade » reste important dans la relation de soin. C’est une autre forme de compétence qui
politiquement légitime la participation des usagers dans le processus de démocratisation
sanitaire. Marianne Dony, Bernard Blero (1990) en parlait déjà pour dire que c’est une
problématique qui se renouvelle. Ils indiquaient déjà que la communauté peut participer à
dégager la priorité des structures hospitalières dans les hôpitaux comme dans les Centres
Universitaires. Dans la médecine préventive, ils aussi compétent pour participer à l’éducation
sanitaire, la protection sanitaire de la population, le dépistage et la lutte contre les maladies
transmissibles et sociales. Pour Yves Froger (2007), la compétence des malades va au-delà de
simples recommandations pour conférer à la communauté le droit « orienter le travail des
praticiens en application à des principes préalablement établis et maintenant bien connus, érigés
au rang d’impératifs démocratiques ». La démocratie sanitaire reconnaît donc le droit aux

21
Les lignes de Bouaké -la-Neuve – 2016 – N°7

communautés à influencer la politique managériale. Anne-Marie Fray (2009) indique que la


démocratie sanitaire rompt avec l’approche paternaliste qui consiste à décider de tout pour ce
qui est des besoins en soins des malades. L’auteur montre qu’il y a un enjeu à rompre avec la
gestion classique des hôpitaux. Mais cette dynamique doit pouvoir se reposer sur « des valeurs
de confiance et solidarité portant les projets communs ; des enjeux de coordination intra et inter
équipes ; une communication sur les objectifs ; des pratiques de management de proximités des
équipes ; un meilleur suivi du patient.

Mais le rapport à la compétence peut être dialectiquement récupéré. En effet, soit pour légitimer
les communautés (ce qui a été démontré plus haut), mais aussi pour les délégitimer en
mobilisant le capital expérientiel acquis dans la formation sanitaire et dans l’expérience de
donner les soins. Les médecins convoquent alors les idéologies quand le jeu de démocratisation
est « faussé », la compétence est choisie pour délégitimer la communauté. En effet, cette étude
met en exergue l’ambivalence de l’usage de la compétence comme une ressource pour faire
fonctionner le jeu de démocratie sanitaire.

Le jeu de démocratie sanitaire devient dans ce sens un espace de jeux d’acteurs dans le sens de
Crozier (1981), avec la possibilité pour les médecins de mobiliser leurs ressources cognitives et
expérientielles d’offre de soins et de gestion pour « fabriquer l’incompétence reconnue par les
instances institutionnelles. Dès lors dans une perspective organisationnelle, l’hôpital reste le
cadre de conquête et les rapports sociaux, les interactions ou les liens d’interdépendance
s’établissent entre les acteurs et les groupes en fonction des positions respectives de chacun
dans l’organisation sociale.

:
III-3- La démocratie sanitaire comme régulation de l’offre de soins basée sur la proximité
et la négociation sociale

La santé comme est un bien publique et en tant que tel, sa gestion requiert un travail de synergie
impliquant les malades eux-mêmes. La participation des malades et usagers à ce projet
communautaire est une exigence de gestion liée même à la nature de la santé. En tant que
produit culturel, la gestion de la santé doit prendre en compte non seulement les valeurs
culturelles de l’espace social de référence, les pratiques locales, l’environnement social local,
mais aussi la demande de soins. Dès lors l’interaction demande soin s’inscrit dans une logique
de régulation sociale. La demande de soins s’inscrit dans logique de négociation et de régulation
sociale. Suarez C (2008) en analysant les alternatives pour le système de soins, indique l’intérêt
de la participation des acteurs locaux à même aux mesures. L’auteur soutient tout comme nous
ici l’idée même de donner un rôle actif aux usagers du système de santé et plus de crédibilité
aux institutions sanitaires. Mieux, pour Laurent-Beq A, Pommier J (2003), la démocratie est
une condition de la société plus solidaire. Toutefois, la participation de la communauté doit être
légitimée pour permettre une plus grande implication des acteurs locaux au fonctionnement des
structures hospitalières. Pour Ghadi V et Naiditch M (2006), l’un des capitaux de cette
légitimation, c’est la connaissance, mais les usagers gagneront davantage en s’organisation en
structure associative. Le niveau de démocratie, le niveau d’instruction, la capacité de la société
civile à se mobiliser, la « culture associative », le respect des droits humains sont autant de
facteurs influant le niveau de participation et la qualité du partenariat entre les secteurs public et
privé. Les enjeux de cette politique sont également liés à ces facteurs.

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Les lignes de Bouaké -la-Neuve – 2016 – N°7

Globalement, cette étude montre la nécessité de prendre en compte le rapport complexe entre le
droit et le pouvoir dans le processus de démocratisation sanitaire. La recherche du pouvoir ou
de la domination conduisent les professionnels de santé à ‘’bafouer’’ le droit des représentants
communautaires. Dans la structuration informelle de la relation de pouvoir, les protagonistes
possèdent chacun un pouvoir qu’ils structurent autour de bien d’enjeux comme ceux
d’adaptation des compétences, de réduction des coûts liés à la dégradation d’indicateurs de
santé, de rétention en interne de compétences, de captation et de fidélisation de ressources. Dans
le cas de cette étude, le maintien des acteurs notamment des médecins-chefs à la direction des
centres de santé communautaires illustre cet aspect

Conclusion
L’analyse du mode d’application de la démocratie dans le système de santé en Côte d’Ivoire a
été le fil conducteur de ce travail. Il ressort en effet des résultats que la démocratisation sanitaire
est perçue par les enquêtés comme la mise en œuvre des soins de santé communautaires. Cette
politique sanitaire donne le pouvoir aux usagers quant à la gestion des structures sanitaires. Elle
vulgarise et rapproche les centres de santé des patients. Ces patients qui pendant de longues
périodes étaient considérés comme des acteurs passifs du système de santé sont désormais des
acteurs actifs. Cette nouvelle configuration des soins va influencer les rapports entre les patients
et les agents. Ainsi, des rapports de leadership, de méfiance et de conflit naissent. Les résultats
révèlent également un dysfonctionnement du système sanitaire. Ce qui a des répercussions sur
la fréquentation de ces centres. Les usagers préfèrent se diriger vers d’autres structures
sanitaires malgré la disponibilité des prestations. Au regard de ce précède, comme piste ou
stimulant à d’éventuels travaux de recherche concernant le même sujet, nous suggérons qu’une
réflexion soit menée sur la typologie des CSUCom et leur mode de gestion dans une perspective
sociohistorique. En effet, la comparaison de ces institutions sanitaires quant à leur source de
financement aiderait à mieux expliquer et comprendre le mode d’application de la démocratie
dans ces structures et les idéologies qui en découlent.

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