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LA NOTION DU COMMERÇANT EN DROIT MAROCAIN

(S4 EE/ EG)

Professeur : ASMAA BENMOUSSA

2019-2020

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INTRODUCTION

CHAPITRE I : L’ATTRIBUTION DE LA QUALITE DE COMMERÇANT

Section 1 : L’accomplissement d’actes de commerce


Paragraphe 1 : La notion d’acte de commerce
A. Les actes de commerce par nature
- Les actes de commerce relatifs aux activités de distribution
- Les actes de commerce relatifs aux activités de production
- Les actes de commerce relatifs aux activités de services
B- Les actes de commerce par accessoire
C- Les actes de commerce par la forme
Paragraphe 2 : Le régime des actes de commerce
A- Les actes commerciaux à l’égard des deux parties
§1. Les règles de procédure
§2. La preuve
§3. L’exécution des obligations
§4. La prescription des obligations
§5. L’inexécution du contrat
B- Les actes commerciaux à l’égard d’une seule partie : les actes mixtes
Section 2 : L’exercice du commerce à titre professionnel et habituel en
son nom et pour son compte

CHAPITRE II : LE STATUT DU COMMERCANT


Section 1 : les conditions d’exercice du commerce
Paragraphe 1 : Le principe de la liberté du commerce
Paragraphe 2 : Les limitations à la liberté d'entreprendre
A- Les règles de capacité pour exercer le commerce
B- Les incompatibilités
C- Les prohibitions
Section 2: Les obligations imposées au commerçant
Paragraphe1: L'obligation incontournable de s'inscrire au registre du
commerce
A- L’organisation du RC
B- Les effets de l’inscription au RC
Paragraphe 2 : Les obligations comptables et fiscales
A- Les obligations comptables
B- Les obligations fiscales

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INTRODUCTION

Qu'est-ce que le droit commercial ?

Le droit commercial peut être défini comme une branche du droit


privé, qui régit les relations entre deux sortes d'individus : Aux
commerçants (c'est-à-dire ceux qui exercent des actes de commerce à titre
professionnel et habituel), ainsi qu'aux non-commerçants lorsqu'ils
accomplissent occasionnellement un acte de commerce.

L'acte de commerce est une notion centrale : toute personne qui


exerce un acte de commerce se verra appliqué le droit commercial à son
égard.

Est qualifié d’acte de commerce toute opération qui se rapporte à


l’exercice du commerce. Ainsi, le droit commercial est à la fois le droit
des commerçants et des actes de commerce.

Le droit commercial est élaboré pour donner aux professionnels du


commerce les moyens juridiques pour agir, ainsi que pour contrecarrer les
comportements abusifs de certains commerçants, tant dans la relation avec
d’autres commerçants, tant dans la relation avec des non commerçants.

Quelles sont les sources du droit commercial (art 2 cc)?

La première source du droit commercial est la loi. Cela résume toutes


les dispositions contenues dans le Code du Commerce.

Le Code de commerce actuel adopté par la loi 15-95 est divisé en 5


livres qui régissent le commerçant (livre I), le fonds de commerce (livre II), les
effets de commerce (livre III), les contrats commerciaux (livre IV) et le régime
des entreprises en difficultés (livre V)

La deuxième source du droit commercial, ce sont les usages et


coutumes. Beaucoup de règles sont créées par la répétition de pratiques (les
usages spéciaux et locaux priment les généraux art 3 cc).

La troisième source est le droit civil dans la mesure où il ne contredit


pas les principes fondamentaux du droit commercial, mais également la
jurisprudence commerciale, issue des tribunaux de commerce mais

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surtout de la Chambre commerciale de la Cour de cassation et la doctrine :
écrits, articles, commentaires rédigés par des juristes, professeurs,
théoriciens ou praticiens.

CHAPITRE I : L’ATTRIBUTION DE LA QUALITE DE COMMERÇANT

Selon le code de commerce (articles 6, 7, 8, 9,10), sont commerçants


ceux qui exercent des actes de commerce et en font leur profession
habituelle. La qualité de commerçant repose entièrement sur le seul point
de savoir si la personne remplit certaines conditions:

- La personne doit exercer des actes de commerce


- La personne doit en faire sa profession habituelle
- La personne doit exercer le commerce en son nom propre et pour
son propre compte

Section 1 : L’accomplissement d’actes de commerce

Paragraphe 1 : La notion d’acte de commerce


Les actes de commerce sont pour l’essentiel des actes accomplis par
les commerçants dans l’exercice de leur commerce. La théorie traditionnelle
en distingue trois catégories :

- les actes de commerce par nature


- les actes de commerce par accessoire
- les actes de commerce par la forme

A. Les actes de commerce par nature

Un acte est commercial par nature si son objet est commercial (et
consiste donc en un achat suivi d'une revente, donc s'il y a distribution).
Cela peut aussi correspondre à des activités de production ou de services

Le code de commerce (art 6) énumère les actes de commerce par


nature. Par exemple, les achats et les reventes de biens en l’état ou après
transformation, les opérations de transport, de banque et d’assurance, les
contrats de courtage ou de commission, ainsi que toutes activités pouvant
être assimilées (art 8cc).

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Les actes de commerce relatifs aux activités de distribution

À partir du moment où un acte correspond à une activité de


distribution, il est considéré commercial par nature. Ainsi, quand il y a
achat puis revente dans une intention spéculative et donc dans un but de
profit.

Ne sont pas commerciales les activités qui ne réunissent pas les trois
éléments :

- les activités qui ne font que de la vente sans achat mais font un
profit : les activités agricoles (civiles, donc à l'exception de ceux
qui font de l'élevage industriel et qui achètent donc en externe de la
nourriture).
- les activités qui achètent et vendent sans profit (les coopératives
de consommation, qui ont pour but de donner accès à des biens
pour des prix modérés).

Les actes de commerce relatifs aux activités de production

Tous les actes relatifs à des activités de production sont commerciaux


par nature. Ainsi les activités industrielles (qui achètent des biens pour les
revendre mais après les avoir transformés) et d'édition (livres, mais aussi
disques, peintures, films, gravures, etc...).

Les actes de commerce relatifs aux activités de services

Toutes les activités de services ne sont pas des activités commerciales.


Ne sont pas commerciales toutes les activités de services libérales (à
caractère intellectuel). Ainsi les médecins, avocats, notaires, architectes,
enseignants...

En revanche sont commerciales les activités de services suivantes :


transports, location, spectacles publics, activités financières et
intermédiaires.

Pour les transports, il y a déplacement (terrestre, maritime ou aérien)


de voyageurs ou de marchandises. L'activité de transport par taxis est civile,
car elle traite uniquement de faibles quantités.

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La location d'un immeuble est civile. L'activité de location est
commerciale lorsqu'elle porte sur un meuble.

L'organisateur de spectacles publics qui loue les services d'un


comédien, de compositeurs, dès lors qu'il possède une intention de profit,
exerce une activité commerciale.

Les activités financières bancaires font du commerce de l'argent et les


activités d'assurances obtiennent des primes et les versent aux victimes des
indemnités. Dans les deux cas, il y a commerce. Mais les mutuelles exercent
une activité civile, car elles ne recherchent pas de bénéfice.

Les activités intermédiaires qui sont exercées par des intermédiaires et


des médiateurs qui favorisent la rencontre entre une offre et une demande.
Ce sont par exemple les courtiers (qui rapprochent deux personnes en vue
de la conclusion d'un contrat et touchent une commission), les
commissionnaires (idem, mais qui interviennent aussi en sus dans la
rédaction du contrat. Ils agissent pour le compte d'une des parties, le
commettant) et les agents d'affaires (qui prennent en charge les intérêts
financiers d'une personne et en assure la gestion. En cas de recouvrement
des créances, ils lancent et mènent à terme les procès, par exemple) sont des
activités commerciales.

B- Les actes de commerce par accessoire (art10 CC)

Ce sont des actes de commerce qui sont par leur nature des actes
civils mais on les qualifie quand même d'actes commerciaux car ils sont
accomplis par un commerçant dans l'exercice de sa profession. Exemple :
l’achat d’un équipement ou d’une machine outil par un industriel, achat de
camion de livraison pour un grossiste.

On juge de la commercialité d'un acte par accessoire lorsqu’il réunit


deux conditions :

- l'acte civil doit être accompli par un commerçant. Peu importe que
l'autre partie à l'acte soit un simple particulier

- Il faut que l'acte soit rattaché à l'activité principale du


commerçant, que ce soit un complément nécessaire et normal. En bref,

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que ce soit utile. Exemples : les contrats d'assurances, de location
d'immeubles passés par un commerçant ou de transport.

C- Les actes de commerce par la forme

Ce sont tous les actes qui sont désignés comme actes de commerce par
la loi. Un acte est commercial par la forme à partir du moment où il est
désigné comme tel par la loi.

Ce sont d’abord certains titres de paiement (les lettres de change, par


exemple)

Tous ceux qui apposent leur signature sur la lettre de change font un
acte de commerce et ils s’obligent commercialement. La conséquence est que
le Tribunal de commerce sera compétent pour connaître les litiges qui
pourraient en résulter.

Et les actes de sociétés commerciales : Les sociétés en nom collectif,


les sociétés en commandite simple, les SARL et les SA sont des sociétés qui
sont nécessairement commerciales. Les actes accomplis par ces sociétés
ont un caractère commercial, même ceux d'objet civil, etc… L'acte est
commercial par la forme car voulu ainsi par la loi.

Paragraphe 2 : Le régime des actes de commerce

Un acte juridique, c'est d'abord une manifestation de volonté. Il est


juridique au sens où il produit des effets de droit. L'acte de commerce se
place parmi une diversité d'actes juridiques : administratifs, judiciaires,
civils et commerciaux.

L'acte de commerce s'inspire fortement du modèle de l'acte civil. Mais,


il s’en distingue sur pas mal de points.

A- Les actes commerciaux à l’égard des deux parties

§1. Les règles de procédure

Les contestations relatives aux actes de commerce sont de la


compétence du Tribunal de Commerce.

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§2. La preuve

En droit commercial, lorsque l’acte est commercial entre les deux


parties, le principe est celui de la liberté de la preuve. Ce principe a trois
conséquences :

 L’acte de commerce peut être prouvé par tout moyen ;

 L’acte de commerce ne doit pas être obligatoirement écrit ;

 La date de l’acte de commerce peut être prouvée par tout moyen.

§3. L’exécution des obligations

En matière d’exécution des actes de commerce, certaines particularités


peuvent être notées : premièrement en cas de mise en demeure, une
coutume autorise la mise en demeure par tout moyen, dans la pratique les
commerçants la réalisent par lettre recommandée avec accusé de réception
ou par télégramme, deuxièmement concernant la solidarité, en droit civil
la solidarité ne se présume pas, il faut qu’elle soit stipulée dans le contrat.
En matière commerciale, la solidarité se présume.

§4. La prescription des obligations

Le délai de prescription des obligations en droit commercial est de 5


ans. Cela permet aux commerçants de ne pas conserver indéfiniment les
preuves. En droit civil, elle est de 30 ans le cas échéant.

§5. l'inexécution du contrat

En cas d’inexécution du contrat, la sanction est plus rigoureuse en


droit civil, puisqu'on s'expose à la résolution judiciaire du contrat. En droit
commercial, chaque contrat constitue un maillon dans une chaîne
d'opérations successives qu'il s'agit de ne pas rompre. Il y a donc simple
réfaction du contrat : le juge peut décider d'aménager les conditions du
contrat.

B- Les actes commerciaux à l’égard d’une seule partie : les actes


mixtes

L’acte mixte est un acte conclu entre un commerçant et un non


commerçant, il présente donc une double nature et est en principe soumis à
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un régime dualiste. Chacune des parties se voit appliquée les règles
imposées par la nature (civile ou commerciale) que revêt l’acte à son égard.
Par exemple un agriculteur (donc non commerçant) vend des légumes à un
négociant qui les achète dans l’intention de les revendre. Toutefois :

Sur la compétence : le commerçant ne pourra assigner la personne


non commerçante que devant le TPI, et, en revanche, le non commerçant qui
assigne en justice le commerçant aura le choix entre le TPI et le TC.

La prescription des obligations nées, à l’occasion de leur commerce,


entre commerçants, ou entre commerçants et non commerçants est unique :
5ans.

Section 2 : L’exercice du commerce à titre professionnel et


habituel en son nom et pour son compte

Pour avoir la qualité de commerçant, il faut d'abord exercer le


commerce à titre habituel. Quelques actes isolés ne donnent pas à celui
qui les accomplit la qualité de commerçant. Il y a un besoin de répétition, de
continuité de manière à produire des bénéfices et à permettre de subvenir
aux besoins de l’existence. Et il faut que ce soit fait à titre professionnel.
Donc soit dans une entreprise, soit au moins dans un fonds de commerce
avec une clientèle.

Exemple : le chirurgien dentiste qui achète des prothèses dentaires


pour les revendre à ses patients n’est pas commerçant, la vente des
prothèses n’étant qu’une activité accessoire à son activité principale de
chirurgien dentiste.

En revanche une personne peut avoir une activité principale de nature


civile et une activité secondaire commerciale ou l’inverse, elle exerce alors
deux professions distinctes, elle aura la qualité de commerçant en ce qui
concerne la profession de nature commerciale. Exemple : le médecin qui
exploite personnellement une clinique privée ajoute à son activité de médecin
une activité commerciale secondaire qui lui confère la qualité de
commerçant.

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Le commerçant doit enfin réaliser ces actes de commerce en son
nom et pour son compte, c’est-à-dire à ses risques et périls. Ceux qui
agissent pour le compte d’autrui n’ont donc pas la qualité de commerçant.
Ainsi, le salarié d’un commerçant ou le gérant salarié d’un fonds de
commerce ne sont pas des commerçants.

CHAPITRE II : LE STATUT DU COMMERCANT

Section 1 : Les conditions d’exercice du commerce


Paragraphe 1 : Le principe de la liberté du commerce
Toute personne peut faire du commerce. La liberté d’entreprendre est
constitutionnellement garantie au Maroc.

L’article 35 de la constitution de 2011 prévoit en effet que « l’Etat


garantit la liberté d’entreprendre … ». Mais, il y a un risque d'abus, d'où la
nécessité d'aménager ce principe et donc de poser des limites à la liberté
d'entreprendre et des conditions de capacité.

Paragraphe 2 : Les limitations à la liberté d'entreprendre


A- Les règles de capacité pour exercer le commerce

La capacité juridique, c'est l'aptitude légale à avoir des droits et des


obligations et de pouvoir les exercer. Il y a dans la loi deux séries
d'incapables :

- les mineurs : l’âge de majorité, toutes lois nationales confondues, est


désormais fixé par les dispositions du statut personnel à dix huit ans pour
tous.

Le mineur ne peut donc pas s’établir en tant que commerçant. Il en


résulte que les actes accomplis par lui en violation de cette incapacité sont
nuls d’une nullité relative qui ne peut être mise en œuvre que par l’incapable
lui-même devenu majeur, ou par son représentant légal.

Le mineur peut néanmoins bénéficier d’une telle capacité soit par


l’effet d’une autorisation spéciale du juge, soit par celui d’une déclaration
anticipée de majorité : l’une et l’autre doivent être inscrites au registre de
commerce (article 13). A défaut, elles sont inopposables au tiers de bonne
foi, c’est-à-dire au commerçant qui ignorait l’incapacité.

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Les étrangers sont réputés majeurs pour exercer le commerce
lorsqu’ils ont atteint dix huit ans révolus et ce même si sa loi nationale
prévoit un âge de majorité supérieur à celui édicté par la loi marocaine (loi
54-17)

- certains majeurs placés sous tutelle, qui ont des troubles


psychologiques, soit sont prodigues (font des dettes à répétition), soit sont
aliénés. Si ces personnes réalisent des actes isolés, ces actes de commerce
seront nuls.

Si le jugement de tutelle a été publié au RC, l’incapable peut demander


la nullité relative des actes de commerce qu’il a passés. En revanche, s’il n’a
pas été publié au RC, ils sont inopposables au tiers de bonne foi, c’est-à-dire
au commerçant qui ignorait l’incapacité.

Il apparaît donc que l’incapacité a pour but de protéger les personnes


présumées inaptes à défendre leurs intérêts.

La femme commerçante a une situation particulière : jusqu'à une


certaine époque, la femme mariée n'avait pas la capacité juridique d'exercer
librement la profession de commerçante sans autorisation de son mari.
Depuis le nouveau code de commerce (NCC), la femme mariée peut exercer le
commerce sans autorisation de son mari, toute convention contraire est
réputée nulle (art.17 C.Com). La femme mariée a cessé d'être incapable.

B- Les incompatibilités

Le législateur déclare que l'exercice du commerce est incompatible


avec l'exercice d'autres professions. Par exemple, les avocats, architectes,
fonctionnaires, notaires n'ont pas le droit de faire du commerce.

Toute infraction entraîne des sanctions disciplinaires. Par ailleurs,


tous les actes accomplis par l'une de ces personnes au mépris de
l'interdiction sont valables. Celui qui les exerce de façon habituelle acquiert
malgré lui la qualité de commerçant pour les actes qu'il a passés. Il subit
donc toutes les conséquences (liquidation judiciaire, tribunal de commerce,
etc).

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C- Les prohibitions

Il y a deux sortes de prohibitions : la loi et les clauses contractuelles.

 Deux types de clauses contractuelles empêchent d'exercer le


commerce :
- Les clauses de non-rétablissement, insérées dans un contrat de
vente d'un fonds de commerce. Cela interdit au vendeur de s'établir
(ou de se rétablir) à proximité du fonds de commerce qu'il vend, afin
d'éviter qu'il attire toute la clientèle qu'il vend avec le fonds de
commerce.
- Les clauses d'exclusivité, insérées dans un contrat et qui obligent
un commerçant à ne vendre exclusivement qu'un certain type de
produit.
 Les limites causées par la loi

La loi interdit de faire le commerce de biens ou de marchandises qui


constituent le monopole de l'État (exemple : la production du phosphate).

La loi interdit l'exercice du commerce à des personnes qui ne


possèdent pas certains diplômes : on ne peut pas être pharmacien sans le
diplôme. Idem pour les agents de change qui ont besoin d'acquérir un office
ministériel.

La loi interdit l'exercice du commerce à titre de sanction accessoire à


toute personne condamnée pour certains crimes et même certains
délits tels que le vol, l'abus de confiance et l'escroquerie. Cette interdiction
peut également être attachée par la loi à certains faits : Exemple : la
déchéance commerciale encourue par les personnes contre lesquelles est
prononcée une faillite personnelle.

L’interdiction n’est pas obligatoirement perpétuelle : Les tribunaux


qui condamnent le commerçant fixent la durée de l’interdiction avec un
minimum de cinq ans. Si le jugement ne prononce pas l’interdiction, elle
existe automatiquement sans limitation de durée.

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Les personnes frappées d’interdiction peuvent demander à la
juridiction qui les a condamnés de les relever de l’interdiction (la
réhabilitation) ou d’en fixer la durée.

Toute personne qui, en dépit d’une interdiction, d’une déchéance, ou


d’une incompatibilité, exerce habituellement une activité commerciale, est
réputée commerçant (art11 CC).

Section 2 : Les obligations imposées au commerçant

Les commerçants sont tenus par deux grands types d'obligations :

Paragraphe 1 : L'obligation incontournable de s'inscrire au registre


du commerce (articles 27à 78 CC)

Le registre du commerce est un répertoire officiel des personnes


physiques et morales qui exercent le commerce. Il permet de réunir et de
diffuser un certain nombre de renseignements sur ces personnes et leurs
entreprises.

A- L’organisation du RC

Le RC est constitué par des registres locaux et un registre central.

Le registre local est tenu par le secrétariat greffe du tribunal de


commerce compétent territorialement (c'est-à-dire le tribunal où se trouve
l’établissement principal du commerçant ou le siège de la société). Le greffier
tient trois types de dossiers :

 un fichier alphabétique des personnes immatriculées

 un dossier individuel constitué par la demande


d’immatriculation

 les dossiers annexes contenant les actes et pièces déposés par


les personnes morales

Un registre central national est tenu par les soins de l’administration,


il est constitué par des dossiers contenant un exemplaire de toutes les
déclarations reçues par tous les greffiers du Maroc.

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Toute personne physique ou morale marocaine ou étrangère
exerçant une activité commerciale sur le territoire marocain doit s'inscrire au
registre du commerce (agence, succursale, Etablissements Publics à
caractère Industriel ou Commercial EPIC).

Les commerçants personnes physiques ou morales doivent se faire


immatriculer dans les trois mois de l’ouverture de l’établissement ou de
l’acquisition du fonds de commerce au greffe du tribunal de commerce du
lieu de leur entreprise.

Le commerçant personne physique doit mentionner dans sa


déclaration d’immatriculation le nom de son entreprise, l'objet de son activité
commerciale et le nom du propriétaire du local dans lequel il exerce son
commerce, etc...

Les sociétés n'acquièrent la personnalité morale qu'à compter de leur


immatriculation. Elles doivent indiquer la forme juridique de la société (SNC,
SARL, SA...), le montant du capital social, l'objet social, l'adresse du siège, la
durée de la société.

Lorsque le greffier qui reçoit les demandes d'inscriptions considère que


le dossier est complet, il l'accepte et attribue au commerçant un numéro
d'immatriculation.

Ce numéro est exigé de l’entreprise, dans l’établissement de ses


factures, notes de commandes, tarifs et documents publicitaires, ainsi que
dans toutes ses correspondances.

Le registre du commerce réunit des documents qui doivent être


actualisés à chaque fois qu'un évènement modifie la situation du
commerçant (cession du fonds de commerce, redressement judiciaire).

En cas de décès sans qu’il y ait cession de fonds de commerce, de


cessation d’activité ou de déchéance d’un commerçant ou de dissolution
d’une société, le commerçant personne physique ou morale doit absolument
demander sa radiation du registre du commerce : le commerçant inscrit
qui vend son fonds de commerce ou qui le donne en location gérance reste

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responsable des obligations contractées par son successeur, jusqu’à la
radiation de la mention.

B- Les effets de l’inscription au RC

Quel est le but du registre du commerce ?

Le RC est fait pour renseigner le public, informer les tiers, toute


personne avec qui le commerçant peut être en relation, notamment ses
futurs créanciers. Il permet également de s'informer sur la solidité financière
d'une entreprise. C'est un centre d'information pour toute personne qui veut
négocier avec un commerçant.

Toute personne peut en obtenir communication en demandant,


moyennant une certaine somme, des copies, des extraits ou des certificats.
Les inscriptions au RC sont diffusées tous les jours par l’intermédiaire du
bulletin officiel.

Quels sont les effets de l'inscription ?

Pour une personne physique, l'immatriculation entraîne à son profit


une présomption simple de la qualité de commerçant avec toutes les
conséquences juridiques qui s'en suivent.

Pour une personne morale, l'inscription a pour effet de lui attribuer la


personnalité morale avec toutes les conséquences juridiques qui s'en
suivent.

Quels sont les effets du défaut d'inscription ?

Au plan civil : une personne non-inscrite ne peut pas se prévaloir à


l'égard des tiers de sa qualité de commerçant, et ne peut pas bénéficier du
régime du droit commercial. Elle ne peut en revanche se soustraire aux
obligations et aux responsabilités que cette qualité entraîne (le tiers doit
apporter la preuve qu’il s’agit d’un commerçant). Ainsi le non inscrit est
notamment exclu:

 Du bénéfice de la propriété commerciale,

 De la possibilité de prouver par ses livres de commerce,

 Et de la possibilité d’invoquer la prescription au bout de 5 ans.


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Sont seuls opposables aux tiers, les faits et actes régulièrement
inscrits au registre de commerce, sauf s’il est établi qu’au moment où ils ont
traité, les tiers en avaient personnellement connaissance (exemple :
modification de la forme sociale de SNC à SA).

Au plan pénal :

 Toute personne qui ne procède pas dans les trois mois à son
inscription au RC malgré l’injonction d’y pouvoir dans le mois, est punie
d’une amende de 1000 à 5000 dh et une amende de même montant après
injonction d’y satisfaire dans les deux mois.

 Si une personne de mauvaise fois donne des renseignements


erronés ou incomplets, elle sera punie d’un mois à un an et/ou d’une
amende de 1000 à 50 000 dh.

Paragraphe 2 : Les obligations comptables et fiscales

Tout commerçant est soumis à des obligations comptables et fiscales.

A- Les obligations comptables

Les commerçants ont trois obligations :

 L’obligation d’avoir un compte bancaire ou postal

 L’obligation d’établir lors d’une vente ou d’une prestation de


service une facture

 L’obligation d’établir une comptabilité suivant certaines règles


précises fixées par la loi n°9-88 du 25 décembre 1992 ainsi que par les
dispositions du code de commerce.

La comptabilité est une technique qui permet d’enregistrer de


façon chronologique les opérations effectuées par l’entreprise pendant
un temps déterminé afin de déterminer le résultat de l’exercice
(bénéfices ou pertes) et de présenter la situation patrimoniale de
l’entreprise. L’exercice comptable contient 12 mois mais ne correspond pas
toujours à l’année civile.

Tout commerçant doit ainsi tenir trois livres comptables


d’enregistrement :
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 Le livre journal qui enregistre les mouvements affectant le
patrimoine de l’entreprise, opération par opération et jour par jour

 Le grand livre où les écritures du livre journal sont recopiées


mais cette fois dans des comptes différents (comptes de gestion, comptes
spéciaux)

 Le livre d’inventaire qui regroupe les données de l’inventaire


dressé au moins une fois par an.

Ces livres comptables doivent être cotés et parafés par le greffier du


tribunal de commerce. Ils doivent en principe être établis en monnaie
nationale, ils ne doivent pas comporter de blancs ou d’altération. En cas
d’erreur, il convient de passer l’écriture inverse de l’écriture erronée afin de
l’annuler.

Dans les trois mois suivant la clôture de chaque exercice, d’autres


documents comptables de synthèse doivent être remplis, il s’agit des
comptes annuels. Pour s’en tenir à ceux communs à l’ensemble des
entreprises commerciales, on peut citer :

 Le bilan, qui décrit les éléments actifs et passifs du patrimoine ;

 Le compte de résultats, qui décrit les produits et les charges de


l'année et fait apparaître les bénéfices ou les pertes de l'année ;

 L'annexe, qui complète et commente les informations du bilan et


du compte de résultats.

Les livres comptables, pièces justificatives et correspondances doivent


être conservés pendant 10 ans.

Toutes les entreprises sont tenues d’avoir des livres comptables. De ce


fait, la comptabilité est un moyen de preuve en cas de litige avec les
fournisseurs, les clients, l’Etat, le personnel, les organismes sociaux… Les
tiers peuvent faire valoir contre le commerçant le contenu de sa comptabilité
même irrégulièrement tenue (art 20 CC).

La production des documents comptables peut être ordonnée par le


juge soit d’office, soit à la demande de la partie adverse.

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Elle a lieu selon l’une de deux modalités : la représentation qui
consiste à extraire de la comptabilité les seules écritures qui intéressent le
litige soumis au tribunal ou la communication qui consiste à une
production intégrale des documents comptables, celle-ci ne peut avoir lieu, à
raison de sa gravité, que dans les affaires de succession, de partage, de
redressement ou de liquidation judiciaire ou dans les cas où les documents
sont communs aux parties au procès (art 24 CC).

Lorsque, sur ordre du juge, le commerçant refuse de produire sa


comptabilité ou déclare ne pas en avoir, le juge peut déférer le serment
décisoire à l’autre partie pour appuyer ses prétentions (art 25 CC).

B- Les obligations fiscales

Les commerçants doivent principalement payer trois sortes d'impôts :


l'impôt sur le bénéfice, l’impôt de patente et la Taxe sur la Valeur Ajoutée.

Les commerçants ont tout d'abord l'obligation de payer l'impôt sur les
bénéfices : il sera différent selon qu'il s'agit d'un individuel ou d'une société
commerciale.

- Les commerçants individuels sont assujettis à l'impôt général sur


le revenu (IGR) au titre des bénéfices industriels et commerciaux qu'ils
réalisent. Le bénéfice imposable est déterminé en fonction du résultat
comptable.

Le bénéfice doit faire l'objet d'une déclaration annuelle. Ce bénéfice


déclaré s'ajoute aux autres revenus pour calculer l'impôt : revenus fonciers
(tirés des biens immeubles) et mobiliers (tirés des biens meubles). Tous ces
revenus et le bénéfice constituent l'assiette sur laquelle sera calculé l'IGR.

Les bénéfices industriels et commerciaux sont imposés en même


temps que les revenus personnels du commerçant.

S'agissant des sociétés de capitaux, étant donné que le patrimoine


est séparé des biens des commerçants, l'impôt est calculé uniquement sur
les bénéfices de la société. C'est donc l'impôt sur les sociétés (IS). Le taux de
l’impôt sur les sociétés est proportionnel aux bénéfices, il varie entre 10% et

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31%, 37% pour les établissements de crédit et d’assurance, 8,75% pour les
entreprises qui exercent dans les zones franches (taux spécifiques).

Dans les sociétés de personnes (en nom collectif, en commandite


simple…), le régime de l'impôt est identique à celui appliqué aux
commerçants individuels. On calcule sur les bénéfices plus les revenus
personnels de chacun des associés.

La patente. C'est un impôt due par toute personne qui exerce à titre
habituel une activité professionnelle non-salariée. Elle se calcule sur la
valeur locative annuelle brute des immeubles ou tous emplacements servant
à l’exercice des activités professionnelles ou toute forme d’exploitation, et
selon un tableau dressé par le service des impôts où sont répertoriés et
classés chaque profession. Les taux varient entre 10 et 30%.

La TVA (Taxe sur la valeur ajoutée) est un impôt indirect qui frappe
toutes les opérations relevant d'une activité économique et donc
commerciale. Le taux de la taxe varie selon la nature des choses
commercialisées.

Le fisc impose une série de règles spéciales en ce qui concerne la


comptabilité. Un ensemble de documents et de renseignements doit lui être
fourni. Les agents du fisc peuvent se faire communiquer tous les documents
qu’ils jugent nécessaires. Des sanctions sont prévues en cas d’omission ou
d’inexactitude des livres de commerce. Une interdiction d’exercer une
profession commerciale peut être prononcée le cas échéant.

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