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de la muqueuse buccale
15
Celui qui ne sait pas ce qu'il cherche,
ne comprend pas ce qu'il trouve.
Claude Bernard
349
Traité de sémiologie et clinique odonto-stomatologique
Fig. 15-3 Tumeur gingivale indurée, peu Fig. 15-4 Voilà ce que donne un examen incomplet et non suivi de la
mobile, saignotante, d'évolution rapide, cavité buccale : il s'agit d'un épithélioma du plancher buccal, au niveau du
dans une bouche tabagique, septique, évo- frein de la langue, qui aurait pu être évité, car il s'est développé sur une
quant d'emblée un carcinome épider- ulcération traumatique de ce frein, vue six mois auparavant, mais négli-
moïde. gée chez un patient alcoolo-tabagique.
Elles doivent faire penser immédiatement à des tuel, mais cet équilibre peut être modifié par des
tumeurs malignes (fig. 15-3). L'état de cette facteurs divers dont il convient d'apprécier le rôle
muqueuse donne l'alarme (fig. 15-4). plus ou moins déterminant selon chaque cas.
La flore buccale est très riche ; elle comporte
des germes aérobies, anaérobies, des virus, des
Rappel anatomo-physio-pathologique champignons, des parasites.
A l'état d'équilibre, cette flore est saprophyte ;
mais elle peut devenir pathogène dans certaines
Il importe de rappeler plusieurs points : conditions : c'est ce déséquilibre qui produira
• La muqueuse buccale comporte deux couches, les lésions.
l'épithélium en surface, d'origine ectodermique,
très fin et souple ; le chorion, sous-jacent, d'ori-
gine mésodermique, plus épais, contenant vas-
cularisation et innervation. Étiologie des lésions
• Elle a une vascularisation très riche. Son inner-
vation détermine la sensibilité tactile, gustative Pour produire des lésions, il faut, le plus souvent,
et thermique. des causes locales et générales.
• Elle a de multiples fonctions, principalement un
Les causes favorisantes locales. Ce sont le
rôle protecteur ainsi qu'un important pouvoir d'ab-
tabac, l'alcool, les caries, les racines dentaires, les
sorption et d'élimination, ce qui en fait une voie
dents fracturées, par les blessures qu'elles peu-
d'administration privilégiée des médicaments.
vent provoquer, les épines irritatives de toutes
Son pouvoir d'élimination, permet, en contrepar-
sortes avec les traumatismes des prothèses, le
tie, l'évacuation de dépôts médicamenteux, de
bimétallisme, l'action des dépôts de poussières
sels toxiques et de germes pathogènes.
dans certaines professions, la mauvaise hygiène,
• Elle possède un pouvoir bactériostatique spéci- en somme, tout ce qui fait la septicité bucco-den-
fique, mais augmenté par l'action de la salive, du taire. Ces facteurs locaux ont un rôle essentiel
mucus et de l'appareil lymphoïde. dans la formation et l'apparition des lésions, sur-
• Elle a un pouvoir cicatrisant remarquable qui per- tout des lésions précancéreuses et cancéreuses.
met, très rapidement, la guérison, et presque
toujours sans cicatrice, de toutes les agressions Les causes favorisantes générales. Elles inter-
des traumatismes ou des lésions infectieuses. viennent principalement dans les maladies
• A l'état normal, il existe un équilibre qui assure à infectieuses et virales, dans les intoxications
cette muqueuse son aspect anatomique habi- endogènes ou exogènes (accidentelles, médica-
350
Pathologie de la muqueuse buccale
menteuses, professionnelles), dans les avitami- - l'existence de prothèses pouvant cacher une
noses, dans les maladies sanguines, dans les lésion,
troubles endocriniens, dans l'allergie... - un éclairage parfois mal adapté à l'examen,
Elles agissent principalement par diminution de la - la localisation de certaines régions anatomiques,
résistance de la muqueuse, par modification du souvent difficilement accessibles (base de
chimisme salivaire, de la formule sanguine, par langue, plancher buccal).
l'éveil brutal d'un micro-organisme latent sous l'in- Il faut, coûte que coûte, lever ces difficultés pour
fluence d'une action exogène, médicamenteuse, faire un bon examen. Cet examen doit être
physique ou autre. orienté, comme en dermatologie, à la recherche
de la lésion élémentaire. Il se fait :
Sont encore à considérer : • par l'inspection de cette lésion élémentaire
• Le rôle : pour en déterminer la forme, la teinte, l'étendue,
- du terrain qui varie selon les individus et qui est les divers caractères communs ou particuliers. Il
sous la dépendance de la race, du sexe, de l'hé- ne faut pas se contenter de cette seule lésion
rédité, de l'âge, des données physiologiques et élémentaire et on doit examiner secondaire-
pathologiques du moment ; ment toutes les autres régions de la muqueuse
- des conditions de vie, du climat, de la profes- buccale. On doit penser aussi faire, dans cer-
sion ; tains cas, un examen cutané, en particulier des
- de la pathologie infectieuse qui est l'une des zones périlabiales, une affection de cette région
causes prédisposantes, puisque la diminution pouvant avoir une expression clinique
des défenses immunitaires va créer un désé- muqueuse, et inversement ;
quilibre biologique au niveau de la cavité buc- • par la palpation, pour en apprécier la consis-
cale ; tance, les contours, les limites, la mobilité ou la
- de l'alimentation où entrent en jeu les carences fixité, les rapports avec les plans voisins, la sen-
en vitamines A, B et surtout C et PP ; sibilité ;
- des troubles endocriniens pouvant influer sur le • par l'anamnèse, en fin d'examen pour évaluer le
comportement biologique de la muqueuse buc- début d'apparition de la lésion, ses modifications
cale, en particulier chez la femme (règles, gros- éventuelles, la notion de permanence ou d'évolu-
sesse, ménopause) ; tion, celle de première intention ou de récidive ;
- des maladies sanguines, dont la traduction par • par l'examen des autres systèmes portant sur
des lésions de la muqueuse buccale est fré- les aires ganglionnaires régionales (avec la
quente ; recherche de l'adénopathie satellite) ; sur la
- du système nerveux. sécrétion salivaire (sécheresse buccale principa-
• Les notions d'idiosyncrasie (prédisposition cons- lement), le parodonte, l'état dentaire, l'hygiène
titutionnelle, sensibilisation) qui peuvent interve- buccale ;
nir. • par les examens complémentaires enfin, mais
Toutes ces causes font apparaître et comprendre qui seront toujours déterminés par la clinique,
la notion très importante « d'organisme tout ». comme la cytologie, la biopsie, les examens de
Létat buccal local, et la septicité bucco-dentaire laboratoire, l'examen radiographique, et même
fréquente, jouent un rôle considérable dans l'ap- des photos en couleur si possible, qui pourront
parition, la modification et l'aggravation des affec- être utilisées à loisir pour apprécier chaque détail
tions de la muqueuse buccale. et juger de l'évolution et des résultats.
La lésion élémentaire doit poser le diagnostic
morphologique et clinique, le diagnostic écolo-
gique.
Principes fondamentaux d'examen
de la muqueuse buccale
Résultats de l'examen
Cet examen doit répondre à une méthode stricte
et soigneuse. Il tâchera, dans un premier temps, Plusieurs lésions peuvent apparaître sur la
de lever quelques difficultés qui peuvent le rendre muqueuse buccale dans les conditions évoquées.
parfois incommode. Ce sont : Elles peuvent être ou bien le signe clinique princi-
- les replis muqueux pouvant cacher certaines pal, donc la lésion élémentaire qui motive la
lésions, consultation, ou bien celui qui aura attiré l'atten-
- les différents enduits recouvrant, par endroits, la tion du praticien et qui lui semblera devoir faire
muqueuse : enduits saburraux, plaque et tartre l'objet d'autres investigations. Ces signes qui doi-
dentaire, candidose..., vent attirer l'attention sont les suivants :
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Traité de sémiologie et clinique odonto-stomatologique
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Pathologie de la muqueuse buccale
Toutes ces gingivites, ou stomatites érythéma- rentes pathologies, avec leurs conséquences buc-
teuses de causes locales, sont faciles à traiter : cales, sont évidentes.
l'approche clinique par l'examen attentif de la Deux notions sont essentielles :
muqueuse, et surtout l'interrogatoire, doivent y - la notion de terrain,
parvenir le plus souvent. - l'examen général à la recherche d'un trouble,
même mineur.
Gestes utiles :
Dans les causes générales, il faut penser :
- Suppression des causes locales responsables :
détartrage soigneux, soins dentaires, rétablisse- • A u x fièvres éruptives :
ment de l'articulé. - langue rouge framboisée, de la scarlatine surve-
- Observation d'une hygiène rigoureuse sous les pro- nant du quatrième au huitième jour de la mala-
thèses qui seront éventuellement supprimées ou die, associée à l'exanthème classique du visage,
rectifiées. du tronc, des membres, sur lequel apparaîtront
- Examen radiologique dans les parodontites, per- de petites taches très rouges, le tout suivi par la
mettant d'apprécier plus particulièrement l'état du desquamation habituelle ;
parodonte. - rougeur diffuse de la muqueuse buccale, en
- Suppression du produit responsable de l'intolérance regard des dernières molaires maxillaires princi-
locale, du bimétallisme.
palement, sur laquelle se détachent de minus-
cules points blancs surélevés (signe de Koplik de
Gestes inutiles ou nuisibles : la rougeole) ;
- Prescription intempestive de vitamines, de bains de - rougeur diffuse de la muqueuse buccale, surtout
bouche, de médicaments de toutes sortes, applica-
au niveau de l'orifice du canal de Sténon qui
tions locales de pommades, de topiques, injections
locales de médicaments, vaccins, ...qui, loin d'amé- apparaît turgescent, œdématié, très rouge lui
liorer la situation, ne font qu'induire en plus une aussi, avant la tuméfaction de la région paroti-
pathologie iatrogène*. dienne (dans les oreillons, cf. pathologie des
- Prescription d'anti-inflammatoires et d'antibiotiques glandes salivaires) ;
pour les mêmes raisons, mais qui trouvent leurs - stomatite érythémateuse de la rubéole et de la
indications complémentaires en cas d'infection véri- varicelle. Le diagnostic est ici plus facile, puisque
table associée. à l'érythème muqueux s'ajoute tout le contexte
pathologique.
Dans les gingivo-stomatites de causes locales et • A u x maladies infectieuses graves et prolon-
dans les formes érythémateuses banales chro- gées, où sécheresse et rougeur de la muqueuse
niques, le geste local est essentiel. buccale sont associées (fig. 15-9).
L'antibiothérapie elle-même, t r o p souvent • A u x grandes carences :
employée, ne fait souvent que cacher la cause - avitaminose PP en particulier, avec des manifes-
réelle de l'affection. tations buccales importantes : glossite érythé-
Si l'affection persiste après la suppression des mateuse, stomatite érythémateuse puis ulcé-
causes locales, c'est que le diagnostic étiologique reuse, aphtoïde avec le développement de
a été insuffisant. Mais parfois encore les diffé- l'infection ;
Fig. 15-8 Érythème localisé à une région de la face dor- Fig. 15-9 Face interne de la joue : érythème tel qu'on le
sale de la langue, dû à une brûlure chimique. retrouve souvent dans les fièvres éruptives et les
grandes infections, dans le diabète et d'autres patholo-
gies générales.
353
Traité de sémiologie et clinique odonto-stomatologique
Fig. 15-10 et 15-11 Erythème et anémie de Biermer. A noter, en opposition, la pâleur des téguments.
Diagnostics autres que la maladie sanguine : carence protéique ou vitaminique.
Fig. 15-12 et 15-13 Erythème très marqué : sécheresse buccale, muqueuse vernissée, lisse, dans un syndrome de
Gougerot-Sjôgren.
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Pathologie de la muqueuse buccale
Fig. 15-14 Érythème diffus de la langue devant faire Fig. 15-15 Purpura au niveau de la muqueuse palatine :
penser à une glossite médicamenteuse : antibiotiques, thrombopénie, maladie hémorragique plasmatique.
psychotropes.
- Dans le diabète, mise en état de la bouche sous trai- Un signe est caractéristique, c'est que, à l'opposé
tement antibiotique, même pour un simple détar- de la lésion érythémateuse, la pression ou la vitro-
trage. pression sur la lésion purpurique ne produit
- Dans les anémies, en cas d'intervention sanglante aucune modification de sa teinte.
(extractions par exemple) attendre, si possible, une Ces taches sont de couleur rouge foncé, parfois
période de rémission, faire une bonne hémostase bleu foncé et même violet. Elles peuvent saigner
locale, prescrire un antibiotique, pendant les soins,
facilement, et siègent de préférence à la face
surveiller la numération globulaire et la formule san-
guine dans les jours qui suivent. interne des joues, au niveau du voile du palais, au
- Dans les syndromes secs et les manifestations niveau du plancher buccal, sur la langue, à la paroi
médicamenteuses, mise en état de la bouche et postérieure du pharynx.
soins locaux par bains de bouche fréquents pour Lorsque l'examen clinique révèle ces taches au
réhydrater au mieux la muqueuse ; prescription d'un
niveau de la muqueuse buccale il faut absolu-
antifongique souvent nécessaire.
ment en rechercher d'autres sur la peau, surtout
au niveau des chevilles, du thorax et des bras. Ces
taches purpuriques se retrouvent :
Purpuras et pétéchies • Dans les t h r o m b o p é n i e s , que les plaquettes
soient détruites en périphérie ou qu'elles soient
Ce sont des taches rouges, rouge foncé, mar- insuffisamment produites par la moelle osseuse
r o n , bleuté ou violacé parfois, au niveau de la (fig. 15-15). La forme la plus courante de throm-
muqueuse buccale et souvent de la peau. bopénie est le purpura t h r o m b o p é n i q u e idio-
Lorsqu'il y a érythème, il y a congestion vascu- pathique.
laire, d'où rougeur plus ou moins diffuse de la il existe d'autres purpuras thrombopéniques
cavité buccale ; mais la paroi des éléments vascu- périphériques qui peuvent se voir au cours d'in-
laires n'est pas atteinte. toxications médicamenteuses et allergiques,
Lorsqu'il y a purpura, il y a fragilité vasculaire, et d'infections virales ou dans les maladies auto-
les globules rouges s'extravasent hors des vais- immunes tel que le lupus*. Parfois, la cause est
seaux. Selon l'abondance de cette extravasation, centrale comme dans les aplasies médullaires,
la muqueuse buccale peut être parsemée de dans les leucémies ou les envahissements
petites taches punctiformes ou lenticulaires plus médullaires par des cellules cancéreuses.
ou moins nombreuses, isolées les unes des Parfois, le purpura n'est pas dû à une diminution
autres, qu'on appelle pétéchies. du chiffre des plaquettes.
Si le saignement sous-muqueux est plus abon- • Dans les maladies hémorragiques, dites plas-
dant, la lésion se traduit par des taches plus matiques, parce qu'elles sont dues à une défi-
larges. La collection sanguine prend parfois la cience des protéines plasmatiques de la coagula-
forme de petites bulles hémorragiques d'aspect tion qui provoque des hémorragies, surtout après
très particulier en grains de cassis. des traumatismes, même très mineurs, et se tra-
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Traité de sémiologie et clinique odonto-stomatologique
duit par des taches purpuriques cutanées et muqueuse nasale, de la muqueuse buccale, mais
muqueuses (fig. 15-16 et 15-17). Ceci s'observe : peuvent aussi siéger à la peau (visage, mains,
dans les hypoprothrombinémies acquises, bras). Elles apparaissent vers l'âge de 20 à 30 ans,
principalement dues : à une maladie hépatique sont parfois pulsatiles, donnant l'aspect de petits
sévère, à un déficit en vitamine K, à des traite- angiomes capillaires, rouges ou bleutés, de taille
ments anticoagulants par les antivitamines K, à variable (fig. 15-18 et 15-19).
des traitements antibiotiques prolongés. Tous ces diagnostics, par l'apparition de ces
Quant à certaines hémopathies héréditaires, lésions purpuriques buccales, ne peuvent être
dues au manque d'un des facteurs de la coagu- portés qu'après un interrogatoire très complet,
lation, comme dans l'hémophilie A, la plus fré- des examens biologiques associés et surtout
quente (déficit en facteur VIII), leur expression l'avis de l'hématologiste.
hémorragique est différente, la plus typique
serait la survenue d'une hémorragie après une I Gestes utiles :
avulsion dentaire chez un sujet de sexe mascu- ! • Par son examen, l'odonto-stomatologiste mettant le
lin. C'est donc par esprit de système qu'elle est doigt sur une maladie grave, doit alerter l'hématolo-
rappelée ici. giste pour une enquête clinique et biologique plus
• Dans les anomalies de la fonction plaquet- poussée. En cas d'érythème localisé, ou plus diffus,
taire qui peuvent être d'origine médicamen- et de saignement de la muqueuse, l'état hématolo-
teuse (cause fréquente) par prise d'aspirine, gique doit être vérifié (thrombopénie, prise d'aspi-
rine, taux de prothrombine, etc.).
d'anti-inflammatoires non stéroïdiens, d'anti-
I • En pratique courante, il faut se méfier des lésions
agrégants plaquettaires.
vasculaires anciennes, car elles exposent toujours
• Dans les maladies constitutionnelles, comme la l'opérateur, même le plus consciencieux à des pro-
maladie de Willebrand. blèmes de saignement, complication parfois banale
Des lésions des parois des vaisseaux cutanés mais souvent mal vue et mal acceptée par le malade
peuvent parfois provoquer des purpuras : 1 et l'entourage.
- fragilité capillaire, en particulier dans les avitami-
noses sévères : déficit en vitamine C (scorbut) ; Ces taches purpuriques peuvent être malheureu-
- vascularites, principalement celles dont l'expres- sement confondues avec des érosions trauma-
sion stomatologique est fréquente : granuloma- tiques, parfois dues à des prothèses. C'est l'ins-
tose de Wegener*, maladie de Behçet*. pection soigneuse de ces lésions élémentaires et
Les télangiectasies hémorragiques héréditaires l'interrogatoire qui font les diagnostics différen-
peuvent être rapprochées de ces purpuras : c'est tiels pour aboutir au diagnostic définitif positif.
le cas de l'angiomatose hémorragique f a m i - Toute intervention intempestive, non préparée,
liale, ou maladie de Rendu-Osier*, maladie héré- expose le malade à des risques hémorragiques
ditaire autosomique dominante touchant indiffé- certains, à des risques infectieux possibles, pou-
remment les deux sexes. Ces télangiectasies sont vant entraîner une aggravation regrettable de son
dues à une dilatation des parois vasculaires qui état. Toute lésion purpurique doit attirer l'atten-
sont très amincies ; elles siègent au niveau de la tion et faire demander un bilan hématologique.
Fig. 15-16 Pétéchies dans la région du voile du palais Fig. 15-17 Purpura thrombopénique avec hémorragies
très riche en petits vaisseaux. de la muqueuse palatine, même en l'absence de toute
prothèse.
356
Pathologie de la muqueuse buccale
Fig. 15-18 Télangiectasies hémorragiques. Fig. 15-19 Face interne de la joue : lésion plus grosse,
Taches rouge foncé d'une angiomatose hémorragique rouge au départ, prenant une teinte plus foncée.
familiale. Lésions en « grains de cassis ». On note, à côté de la lésion principale, des taches plus
claires, plus rouges. Anomalie de la fonction plaquettaire.
Fig. 15-20 Hyperplasie gingivale de causes locales : Fig. 15-21 Là encore, les causes locales sont essen-
mauvaise hygiène, malocclusion. Un érythème gingival tielles : malpositions, supraclusie et autres anomalies
est presque toujours associé. occlusales, mauvaise hygiène.
357
Traité de sémiologie et clinique odonto-stomatologique
Gestes utiles :
- Suppression des facteurs locaux responsables (soins
dentaires, tartre, épines irritatives, etc.), hygiène buc-
cale redoublée. Rééquilibration de l'occlusion. Fig. 15-22 On s'achemine ici vers la formation d'une
- Si la lésion hyperplasique ne guérit pas ou réci- véritable tumeur bénigne de la gencive.
dive, lorsque les causes locales sont supprimées, il L'existence de diastèmes interdentaires est une cause
faut penser à une cause générale associée qui favorisante en plus des causes locales habituelles.
doit être déterminée par l'interrogatoire et un bilan
biologique.
Gestes nuisibles :
La gingivectomie pure et simple n'a aucun intérêt, car
la récidive est certaine si les facteurs locaux ne sont
pas supprimés et si l'hygiène buccale n'est pas rigou-
reuse.
358
Pathologie de la muqueuse buccale
Fig. 15-25 Epulis banal, simple ou granu- Fig. 15-26 Epulis à cellules géantes, Fig. 15-27 Diapneusie. Tumeur de
lome gingival hyperplasique de 35 à 37. inflammatoire, développé à partir la muqueuse jugale qui s'est déve-
d'un alvéole dentaire déshabité. loppée par un phénomène de
succion, d'aspiration dans l'espace
libre entre la prémolaire et la
molaire.
Fig. 15-28 « Crête flottante ». Fibrome traumatique en Fig. 15-29 Ici encore, fibrome traumatique par dédou-
« feuillets de livre». blement de la muqueuse gingivale par une prothèse
mandibulaire trop agressive.
Fig. 15-30 Papillome banal de la langue. Fig. 15-31 Kératoacanthome, véritable nodule kérato-
sique.
Le diagnostic a été confirmé par l'anatomo-pathologie.
359
Traité de sémiologie et clinique odonto-stomatologique
- on n'oubliera pas les tumeurs bénignes qui Il faut penser aux kystes de la muqueuse
regroupent, sous le nom de « bourgeons char- buccale, essentiellement de la lèvre et du plan-
nus », plusieurs formes tumorales diverses et où cher :
seule la biopsie peut mettre une étiquette histo- - au kyste mucoïde, ou salivaire, se caractéri-
logique précise. Leur siège d'élection est la por- sant, au niveau de la lèvre inférieure principale-
tion antérieure de la langue. ment, par une tumeur d'aspect transparent, véri-
Il faut penser aux tumeurs vasculaires : table ampoule ou cloque légèrement bleutée,
- à l'angiome muqueux, siégeant plutôt sur la contenant un liquide épais, clair, filant (fig. 15-
lèvre, ou bien plan et lisse de couleur lie de vin, 37);
ou bien tubéreux, arrondi, framboise (fig. 15-32 - à la grenouillette, tumeur de la glande sublin-
et 15-33); guale allongée, s'aplatissant sous la langue, de
- à l'hémangiome, si la tumeur est développée couleur bleu violacé, contenant un liquide épais,
aux dépens des cellules bordant les capillaires filant, « blanc d'œuf» (fig. 15-38) ;
sanguins, ou au lymphangiome si elle est déve- - au kyste muqueux traumatique, pas aspiration
loppée aux dépens des cellules bordant les élé- de la muqueuse labiale (fig. 15-39 et 15-40).
ments lymphatiques (fig. 15-34 à 15-36).
Fig. 15-32 Angiome muqueux de la lèvre inférieure, Fig. 15-33 II ne s'agit pas d'une plaque érythémateuse
petite tumeur assez fréquente près de la commissure. banale de la langue. C'est un angiome formé de plu-
sieurs petits mamelons, chez un sujet jeune.
-Fig. 15-34 Hémangiome capil- Fig. 15-35 et 15-36 Lymphangiome face ventrale de la langue (fig. 15-35).
laire. Vue plus globale (fig. 15-36) du dos de la langue.
A noter la multitude de petites lésions ponctiformes, le tout sur un processus tumo-
ral plus diffus.
360
Pathologie de la muqueuse buccale
Fig. 15-37 Kyste mucoïde de la lèvre inférieure. Fig. 15-38 Grenouillette, véritable kyste mucoïde du
plancher buccal.
Fig. 15-39 Kyste muqueux traumatique (tic de suc- Fig. 15-40 Kyste mucoïde ou kyste muqueux trauma-
cion). tique de la face ventrale de la langue.
Il faut penser aux tumeurs bénignes du tissu Cas particuliers de quelques tumeurs bénignes
conjonctif :
- à la tumeur d'Abrikossof ou rhabdomyome, Une volumineuse tumeur plurilobée, ou fibro-
développée aux dépens du tissu musculaire matose du palais
strié, néoplasme bénin d'origine mésenchyma- Mme D., 50 ans, consulte parce qu'elle est fort
teuse, rare, sur la langue essentiellement. gênée par une « grosseur » du palais. Elle est sui-
Il faut penser aux tumeurs nerveuses, bien plus vie par un médecin généraliste pour une hyperten-
rares : sion artérielle et une cirrhose hépatique éthylique.
- au schwannome ou neurinome, néoplasme Lexamen endobuccal fait découvrir une très
nerveux développé aux dépens de la gaine de importante tumeur palatine plurilobée, mais dont
Schwann ; l'aspect semble cependant tout à fait rassurant : la
- au neurofibrome, où le processus tumoral teinte de la muqueuse palatine est normale, il n'y
associe une composante schwannienne et une a ni ulcération ni adénopathie. L'évolution du pro-
composante fibroblastique (on retrouve ces cessus tumoral a été très lente (fig. 15-41).
tumeurs dans la neurofibromatose de la maladie Le diagnostic différentiel de cylindrome, tumeur
de Recklinghausen*). solitaire du palais, ferme, et non douloureuse, qui
Devant ces tumeurs cliniquement bénignes, la pourrait être évoqué ne concorde pas avec la
biopsie ou l'exérèse biopsique est de règle. Ces tumeur actuelle décrite. La radiographie le confir-
examens concluent à leur nature histologique mera d'ailleurs.
précise. Une biopsie est effectuée en plusieurs endroits
(fig. 15-42). Le résultat de cet examen est le sui-
Gestes utiles : vant : « lésion fibromateuse très riche en colla-
- Exérèse chirurgicale et examen anatomo-patholo- gène du palais, sans aucun signe histologique de
gique. malignité ».
- Suppression de la cause locale responsable. Mme D. ne donne suite à notre proposition d'in-
- Contrôle de la cicatrisation dans les mois à venir. tervention que trois mois après. Elle est alors opé-
361
Traité de sémiologie et clinique odonto-stomatologique
Fig. 15-42
rée : exérèse simple et mise à plat de la tumeur. La biopsie conclut à : « un aspect de fibromatose
Une plaque amovible en résine à but compressif bénigne et localisée du maxillaire supérieur ».
et devant maîtriser l'épithélialisation est mise en Après étude des moulages, l'intervention chirurgi-
bouche (fig. 15-43). cale est pratiquée et se termine par la mise en
La pièce opératoire est confiée au laboratoire pour place d'une plaque amovible en résine comme
examen anatomo-pathologique qui confirme : dans le cas précédent pour protéger et guider la
« aspect de fibromatose gingivale, sans signes cicatrisation (fig. 15-48).
histologiques de malignité ». Lexamen anatomo-pathologique de la pièce
Les suites opératoires sont banales. La patiente est conclut : « tumeur fibromateuse gingivale sans
revue trois mois après ; la cicatrisation est parfaite signe histologique de malignité, accompagnée de
et permet la réalisation d'une prothèse (fig. 15-44). lésion d'hyperpiasie et d'inflammation de l'épithé-
Le point de départ de cette fibromatose est peut- lium de surface probablement en rapport avec un
être traumatique, mais c'est l'importance de la traumatisme local ».
prolifération tumorale bénigne qu'il faut noter. Les suites opératoires sont simples et Mlle B. est
confiée à l'orthodontiste, dont le traitement
Un cas de fibromatose du palais consistera à ramener le bloc prémolaire-molaire
Mlle B., 28 ans, sans antécédents médicaux parti- intéressé en bonne position et en bonne occlu-
culiers, nous est adressée parce qu'elle présente sion.
une volumineuse hyperplasie de la 24 à la 28 acco- Il est tout à fait possible de classer cette lésion
lée à la face palatine de ces dents et débordant sur comme une fibromatose localisée à point de
le palais (fig. 15-45). Cette hyperplasie forme une départ gingival probable. D'après la littérature exis-
masse tumorale d'apparence et de consistance tante, on sait peu de choses sur ces lésions : on
fibreuses évoluant depuis plusieurs années et parle de formes familiales et de formes idiopa-
repoussant le bloc prémolaire-molaire intéressé thiques. Bien qu'il ne s'agisse pas d'une forme
du côté vestibulaire. Il en résulte un trouble impor- systématisée, la possibilité d'une origine médica-
tant de l'occlusion à ce niveau (fig. 15-46 et 15-47). menteuse ou hormonale pourrait se poser. Dans
Le côté opposé est strictement normal. ce cas, elle a été éliminée.
362
Pathologie de la muqueuse buccale
Fig. 15-49
Fig. 15-46 et 15-47
363
Traité de sémiologie et clinique odonto-stomatologique
364
Pathologie de la muqueuse buccale
les cas de leucémie aiguë ou subaiguë, plus rare- brillante, une consistance ferme mais devenant
ment dans les cas de leucémie chronique. Dans la friable et hémorragique. Un signe important est à
leucémie, l'hyperplasie typique se manifeste sur la noter : c'est l'infiltrat brutal avec ulcérations,
gencive par une coloration rouge foncé, une surface nécrose, saignement et douleur (fig. 15-55 à 15-58).
Fig. 15-53 Hyperplasie gingivale diffuse de cause gêné- Fig. 15-54 Gingivite hyperplasique de grossesse avec
raie : grossesse. formation épuliforme nettement localisée au secteur
prémolaire - molaire - maxillaire.
Fig. 15-55 Leucémie aiguë. Hyperplasie gingivale Fig. 15-56 Leucémie aiguë myéloïde. On notera la for-
rouge foncé, gencives brillantes, hémorragiques avec mation des tumeurs hyperplasiques autour des dents
ulcérations et douleurs. restantes. Les dents favorisent d'ailleurs ces formations
tumorales.
Fig. 15-57 et 15-58 Un cas de leucémie chronique. Lhyperplasie gingivale est moindre, moins bourgeonnante, moins
hémorragique.
365
Traité de sémiologie et clinique odonto-stomatologique
I
Gestes utiles : doit faire le diagnostic de la pathologie géné-
Mise en état de la bouche, suppression des facteurs rale responsable et des causes locales asso-
irritatifs locaux et des foyers infectieux. ciées.
366
Pathologie de la muqueuse buccale
Dans bien des cas, les patients signalent être sui- sous-jacente peut être décelée ; elle conclut
vis par leur médecin pour cette pathologie, ce qui d'autre part à l'intérêt de la collaboration entre
facilite la démarche clinique de l'odonto-stomato- diverses disciplines médicales.
logiste.
Fig. 15-61 Fig. 15-62 Aphtes multiples : ici, les lésions sont éro-
sives, d'autant plus qu'elles intéressent la muqueuse
palatine, moins souple et plus tendue que dans d'autres
régions de la muqueuse buccale.
367
Traité de sémiologie et clinique odonto-stomatologique
Cette lésion n'est absolument pas comparable stade vésiculeux préalable, la maladie herpé-
avec certains aphtes plus creusants, véritables tique pouvant être classée, sur le plan nosolo-
ulcérations, retrouvés en particulier dans cer- gique, dans le cadre des affections vésiculeuses
taines pathologies (aphtes géants de la maladie qui seront décrites plus loin.
de Crohn par exemple ou du SIDA), compte tenu
de leur étendue et de l'infection surajoutée. Gestes utiles :
Prescription des soins locaux habituels, d'un immuno-
Gestes utiles : régulateur ; d'un antiviral, antiherpétique, en applica-
Bains de bouche à l'aspirine effervescente en alter- tions locales et par voie générale, et, en cas de surin-
nance avec des bains de bouche alcalins et à l'eau fection, d'une antibiothérapie.
chloroformée. Bilan clinique dans les formes majeures.
Prescription d'un antifongique, d'un antiviral, d'un gel
anesthésique de contact pour faciliter l'alimentation. Dans le zona, plus rarement (fig. 15-65).
Suppression des foyers infectieux bucco-dentaires et Dans le lichen érosif, où le diagnostic est impor-
observation d'une hygiène buccale stricte. tant, puisqu'une surveillance de cette affection
est de règle, car elle peut dégénérer en carci-
Dans l'herpès, où l'on peut voir des lésions éro- nome épidermoïde (fig. 15-66).
sives isolées ou des lésions groupées en bou- Dans la syphilis, où les lésions érosives,
quets (fig. 15-63 et 15-64). Lapproche sémiolo- rouges, arrondies doivent faire penser aux syphi-
gique tient compte de la lésion érosive qui suit le lis secondaires (fig. 15-67 et 15-68).
Fig. 15-63 Lésion érosive palatine dans le cas d'un her- Fig. 15-64 Lésions érosives d'un herpès labial
pès (photo aimablement prêtée par le Dr Sauveur, Paris-
Vil).
Fig. 15-65 Caractère unilatéral des lésions palatines et Fig. 15-66 Ce lichen gingival muet et surveillé depuis
labiales dans un zona buccal (photo aimablement prêtée plusieurs années trouve ici sa transformation en lichen
par le Dr 0. Picard, hôpital Saint-Antoine, Paris). érosif.
368
Pathologie de la muqueuse buccale
Fig. 15-67
Lésions
linguales
de la syphilis
secondaire Fig. 15-68 Des lésions érosives de la syphilis peuvent
(photo siéger aussi sur les régions cutanées (photo aimable-
DrO. Picard). ment prêtée par le Dr C. Husson, hôpital Tarnier, Paris).
I
Geste utile dans ce cas : Gestes utiles :
Prescription des réactions sérologiques qui seront for- - Prescription d'un antifongique ; d'un antiviral en
tement positives. applications locales et par voie générale.
- Suppression de la cause locale et correction prothé-
La lésion érosive se retrouve encore : tique pour augmenter la dimension verticale lors-
qu'elle en est responsable.
• Dans la perlèche, atteinte inflammatoire des
commissures labiales, souvent entretenue par la • Dans les pathologies sévères, principalement
macération due aux mouvements de la bouche, dans l'infection auVIH et le SIDA. En effet, toute
où causes locales et générales sont souvent érosion qui ne disparaît pas dans un délai de
associées. L'origine peut être infectieuse, myco- huit à dix jours doit être surveillée particulière-
sique, allergique ou nutritionnelle (fig. 15-69). A ment. Elle précède parfois une transformation
ces causes générales possibles, s'ajoute parfois en ulcération et peut être rapportée à une
une cause traumatique ; elle peut être consécu- pathologie à fort déficit immunitaire. Lapproche
tive à une abrasion dentaire physiologique, ou à du contexte clinique général et local, à la
une usure d'anciennes prothèses qui réduit la recherche d'autres signes bucco-dentaires, est
dimension verticale, accentue le pli commissu- importante.
ral, entretient l'érosion où vient s'ajouter une
candidose longue à disparaître. Les érosions peuvent être liées
enfin à des causes locales :
Érosion au point d'injection d'anesthésie locale,
brûlure, écorchure superficielle, frottement, mor-
dillements des lèvres et des joues... (fig. 15-70 et
15-71).
L'interrogatoire, les examens complémentaires
(biopsie et sérologie) doivent permettre de
faire la part des lésions banales et des lésions
majeures dépistées lors de l'examen de la
muqueuse buccale.
Ulcérations
369
Traité de sémiologie et clinique odonto-stomatologique
Fig. 15-70 Érosion d'origine traumatique. Frottement Fig. 15-71 Érosion par mordillement de la lèvre infé-
de la muqueuse sur une dent fracturée. rieure.
Fig. 15-72 Gingivite ulcéreuse par absence d'hygiène Fig. 15-73 Gingivo-stomatite ulcéreuse avec zones
bucco-dentaire. nécrotiques : mauvais terrain, absence d'hygiène.
370
Pathologie de la muqueuse buccale
Fig. 15-74 et 15-75 Ulcérations nécrotiques chez un patient en phase terminale d'un lymphosarcome.
Fig. 15-76 à 15-78 Stomatite ulcéreuse généralisée sévère d'origine carentielle, malgré un état bucco-dentaire satis-
faisant (avant et après traitement).
l'élément causal et déterminant, mais l'état buc- Les lésions ulcéreuses ne forment pas toujours
cal septique y contribue largement. Les facteurs à elles seules un tableau clinique, mais elles
locaux sont certes très importants, mais ils agis- peuvent être un symptôme d'une maladie
sent souvent à la faveur de conditions particu- générale parfois grave (fig. 15-76 à 15-78).
lières, de troubles trophiques modifiant l'état
Causes médicamenteuses, plus rares de nos
général ;
jours. Entrent alors en jeu la notion de biotro-
- dues à l'éruption des dents et surtout de la dent
pisme, la notion d'effet pharmacologique, le rôle
de sagesse mandibulaire, provoquant parfois
de l'infection associée. Les médicaments respon-
des stomatites d'éruption ou stomatites odon-
sables des stomatites ulcéreuses sont surtout le
tiasiques, avec apparition le plus souvent d'ulcé-
mercure et le bismuth. Ils sont peu utilisés actuel-
rations unilatérales pouvant aller jusqu'à la
lement ; les antibiotiques combattent leurs com-
canine du côté opposé. Dans ce cas, les fac-
plications infectieuses. Les causes iatrogènes
teurs neurotrophiques jouent aussi un grand rôle
sont finalement à prendre en considération
et influent sur le terrain et l'état général.
lorsque les autres étiologies auront été épuisées.
Causes générales. Ce sont les affections sévères Dans toutes ces gingivo-stomatites ulcéreuses,
du tube digestif, les affections rénales, les maladies l'examen clinique, doublé d'un interrogatoire
hépatiques, les états cachectiques avec les malnu- précis, permet la plupart du temps de faire le
tritions, les affections sanguines (leucose, mononu- diagnostic étiologique. Des examens complé-
cléose infectieuse), les maladies à forte dépression mentaires peuvent être nécessaires dans cer-
immunitaire (SIDA, cancers) (fig. 15-74 et 15-75). tains cas.
371
Traité de sémiologie et clinique odonto-stomatologique
Fig. 15-79 Ulcération et dent de Fig. 15-80 Ulcération labiale par un Fig. 15-81 Ulcération du bord de la
sagesse en désinclusion. instrument rotatif surchauffé. langue venant se loger dans une grosse
cavité de carie.
372
Pathologie de la muqueuse buccale
Fig. 15-83
Aphtes
multiples mais
ici la lésion
élémentaire
est toujours la
même (photo
Dr Sauveur).
Fig. 15-84
Aphtes en
période aiguë Fig. 15-86 et 15-87 Lésion labiale et jugale. Dans ce
associés à une cas, les lésions sont très nécrosantes, très profondes,
importante can- très douloureuses, très lentes à cicatriser. Le diagnostic
didose linguale. différentiel se pose avec une gomme ulcérée.
Fig. 15-85
Aphte géant de Fig. 15-88
la lèvre infé- Aphte génital.
rieure. C'est Linterrogatoire
une véritable doit tenter de
ulcération connaître cette
creusante, plus localisation
longue à guérir parfois associée
que l'aphte à des aphtes
banal. buccaux.
373
Traité de sémiologie et clinique odonto-stomatologique
Il faut penser à la grande aphtose deTouraine, tion tuberculeuse. Elle est très douloureuse et
qui, sur le plan clinique, regroupe des lésions buc- peut être accompagnée d'une adénopathie inflam-
cales et génitales constantes, des manifestations matoire. Le contexte clinique du patient, connu la
oculaires, mais aussi des manifestations articu- plupart du temps, facilite le diagnostic.
laires, cutanées, neurologiques, vasculaires et
digestives.
Gestes utiles :
- Bains de bouche alcalins en alternance avec des
bains de bouche à l'aspirine.
- Prescription d'un antifongique, d'un antiviral, d'un
immunorégulateur ; d'un gel anesthésique de
contact pour permettre l'alimentation.
- Suppression des foyers infectieux bucco-dentaires.
- Prescription d'une hygiène buccale redoublée.
- Enquête médicale confiée au spécialiste dans les
formes sévères d'aphtes géants, d'aphtose bipo-
laire, de maladie de Behçet et d'aphtose deTouraine.
Fig. 15-89
Troisième cas Ulcération
Devant syphilitique d'une
- une lésion ulcéreuse d'aspect vernissé dans le gomme (photo
fond et de consistance indurée, cartonnée, non aimablement
douloureuse, siégeant surtout sur la langue, les prêtée par les Drs
lèvres, le voile du palais, traduction du chancre Triller et Berretti).
syphilitique de la cavité buccale, lésion très
contagieuse, où l'adénopathie satellite est à
rechercher,
- ou bien une lésion ulcéreuse plus profonde avec
des bords taillés à pic, non douloureuse, sans
adénopathie satellite, g o m m e syphilitique
ulcérée de la période tertiaire,
il faut penser à l'ulcération syphilitique (fig. 15-
89 et 15-90).
I
Geste utile dans ce cas :
Prescription des réactions sérologiques qui doivent
être fortement positives.
Gestes utiles :
Devant de telles lésions, le diagnostic est plus facile
lorsque l'on connaît l'identité clinique du patient et sa
séropositivité ; dans le cas contraire, il faut penser à
une lésion évocatrice de l'infection au VIH, contrôlable
par un meilleur interrogatoire et un test sérologique.
374
Pathologie de la muqueuse buccale
Il faut penser à l'ulcération d'une gomme ou - un petit ganglion dur, mobile, dans l'aire anato-
d'un abcès froid tuberculeux, lorsque, plutôt mique correspondante de la lésion. Toutefois,
chez un homme, apparaît sur la face dorsale de la l'extension du processus néoplasique pouvant
langue, près de la pointe, une ulcération secon- sauter un relais, il faut examiner toutes les aires
daire à un abcès ou une gomme d'où sort un pus ganglionnaires régionales ;
verdâtre, grumeleux où l'on retrouve le germe en - plusieurs ganglions durs « en paquet d'olives » :
cause. Cette lésion est indolore. leur présence signe un stade avancé du cancer,
Il faut penser à un chancre de primo-infection et est de mauvais pronostic ;
tuberculeuse lorsque chez un enfant jeune on - l'adénopàthie inflammatoire est la conséquence
découvre, sur un bord lingual, une muqueuse de la surinfection de certains cancers ; dans ce
œdématiée en périphérie, présentant une ulcéra- cas, l'antibiothérapie va la réduire et en per-
tion framboisée, assez plane, à bords minces et mettre une meilleure appréciation à la palpation ;
décollés, non douloureuse. Il importe de connaître - l'adénopàthie fixée, volumineuse, est souvent
le résultat des tests tuberculiniques et rechercher de très mauvais pronostic.
leBK. Pratique d'une biopsie. C'est, selon le cas et les
Il faut penser au lupus tuberculeux buccal, sur- dimensions de la lésion, ou une biopsie sur zone
tout gingival, lorsque chez l'enfant ou l'adulte pathologique, ou un prélèvement profond à cheval
jeune apparaît, au niveau des dents antérieures sur la partie apparemment saine et la partie ulcé-
maxillaires, une ulcération gingivale arrondie de 1 rée.
à 2 cm de diamètre et parfois davantage, descen- Le prélèvement doit intéresser les bords de l'ulcé-
dant dans le vestibule, d'aspect framboise et bour- ration qui constituent la zone d'accroissement et
geonnant, à bords plats, nets, décollés, entourée d'évolution de la tumeur. On peut prélever plu-
de petits mamelons rouge framboise, recouvrant sieurs fragments lorsque la tumeur est volumi-
un os dénudé et râpeux. neuse.
Au début, les dents voisines de cette ulcération Réalisée habituellement sous anesthésie locale, la
sont saines, mais la gencive de plus en plus dénu- biopsie est essentielle pour confirmer le diagnos-
dée va les exposer à une très grande mobilité et tic clinique et classer la tumeur dans sa forme et
parfois à leur chute. son processus évolutif.
Gestes utiles :
- Examen sérologique et recherche du BK si le patient Ulcération cancéreuse type :
n'est pas un tuberculeux connu. le cancer de la langue
- Examen bactériologique du pus.
- Examen histologique. C'est le plus fréquent des cancers de la cavité
buccale. C'est un épithélioma* spino-cellulaire,
Sixième cas | Une ulcération qui ne doit pas être de pronostic sévère lorsque le diagnostic a été
tardif.
méconnue c'est l'ulcération cancéreuse.
L'avenir et peut-être la vie du patient porteur
d'une lésion précancéreuse, voire d'un cancer
buccal, sont entre les mains du premier prati-
cien qu'il consulte.
Le diagnostic de cette ulcération se fait sur les élé-
ments suivants :
- le fond est sale, sanieux, « bourbillonnant »,
hémorragique ;
- la base est indurée, cartonnée, en « carte de
visite » ;
- les bords sont durs et surélevés.
Plus qu'une ulcération, c'est une tumeur ulcé-
rée.
Linterrogatoire apprendra que cette lésion est
ancienne, d'évolution lente, restée longtemps
indolore ; elle est parfois surinfectée (fig. 15-92).
Fig. 15-92 Ulcération traumatique du bord de la langue,
Lorsque, à partir de ces éléments, le diagnostic cli- développée autour de la face linguale d'une molaire
nique d'ulcération cancéreuse a été porté, la suite mandibulaire dans une bouche septique (de plus alcool
de l'examen doit se faire de la façon suivante : + tabac).
Recherche de l'adénopàthie satellite. Elle doit On notera le bord supérieur de l'ulcération qui est induré
se faire systématiquement ; cette adénopathie a et surélevé : le cancer s'est installé sur cette ulcération
des caractères typiques : au départ traumatique.
375
Traité de sémiologie et clinique odonto-stomatologique
376
Pathologie de la muqueuse buccale
377
Traité de sémiologie et clinique odonto-stomatologique
Fig. 15-99 Important carcinome du plancher avec exten- Fig. 15-100 Très volumineuse tumeur cancéreuse
sion à la face ventrale de la langue. bourgeonnante du plancher débordant sur la gencive.
Plusieurs ulcérations ont envahi le bourgeonnement.
Fig. 15-101 Epithélioma du palais développé sous une Fig. 15-102 Ici, la lésion semble très banale. Elle est
prothèse. pourtant indurée et la biopsie sera positive.
Une ulcération traumatique en arrière de la tubérosité
maxillaire droite pourrait en être responsable.
Fig. 15-103 Une telle tumeur palatine peut être l'ex- Fig. 15-104 Forme palatine très évoluée.
pression d'un cancer du sinus maxillaire.
378
Pathologie de la muqueuse buccale
Fig. 15-105 La lésion gingivale, plus petite au départ Fig. 15-106 Epithélioma de la gencive débordant large-
sous la prothèse maxillaire, n'avait pas inquiété cette ment sur la muqueuse jugale.
patiente. Elle a évolué pour aboutir à ce carcinome épi- On notera un point hémorragique en avant de la lésion.
dermoïde.
379
Traité de sémiologie et clinique odonto-stomatologique
Fig. 15-110 Epithélioma de la commissure développé Fig. 15-111 Importante lésion de la muqueuse jugale
sur une leucoplasie, débordant sur la muqueuse jugale. où sont réunis tous les caractères d'un carcinome épi-
dermoïde.
Fig. 15-114 Importante lésion touchant pratiquement Fig. 15-115 Epithélioma basocellulaire ulcéré en sur-
toute une hémilèvre : epithélioma chez un alcoolo-taba- face.
gique majeur. On notera le bourrelet induré bordant la lésion.
Lautre hémilèvre présente une zone érythroplasique.
380
Pathologie de la muqueuse buccale
Quelle que soit la localisation de ces lésions can- Lexamen endobuccal révèle l'existence d'une
céreuses, elles ont toutes les caractères cliniques tumeur :
communs au fond, aux bords, à la base et à l'adé- - ovalaire, d'environ 2,5 cm sur 1,5 cm, située sur
nopathie correspondante. la gencive au-dessus de la 11, au voisinage du
Le traitement est basé le plus souvent sur des collet, débordant sur la 12 et la 21 ;
associations thérapeutiques. Plusieurs éléments - de couleur rouge brun, comportant en son
sont à prendre en considération avant le traite- centre une plage nécrotique de couleur plus
ment d'un cancer de la cavité buccale : grise ;
- la taille de la tumeur, - non hémorragique, faiblement ulcérée par
- la lymphophilie qui se traduit par l'extension gan- endroits ;
glionnaire, - de consistance mollasse, mobile sur un pédicule
- la possibilité de deuxième localisation, fré- qui semble l'attacher à l'os alvéolaire et à la gen-
quente dans les cancers de la cavité buccale (10 cive, se laissant cliver et dédoubler « en feuillet
à 15 % des cas). de livre ».
Les méthodes thérapeutiques proprement La pression exercée par la tumeur sur la 11 l'a
dites sont la chirurgie, la radiothérapie et la chi- chassée en bas et en dedans de 2 à 3 mm, provo-
miothérapie. quant un décalage et un trouble de l'articulé den-
La chirurgie est réservée aux tumeurs de petite taire.
taille. Elle intéresse la tumeur et les aires ganglion- La 11 est mobile. Il existe un diastème interincisif
naires correspondantes. Parfois, cette chirurgie médian d'environ 2 mm.
demande une reconstruction par différents moyens Lexamen apprécie les autres éléments de la
prothétiques. Le geste ganglionnaire doit être sys- cavité buccale qui ne révèle rien de particulier
tématiquement associé à l'exérèse tumorale. (fig. 15-116).
La radiothérapie comporte plus fréquemment les Linterrogatoire nous apprend :
radiations par voie externe et plus rarement la - que la tumeur évolue depuis huit à dix mois envi-
curiethérapie intratumorale. ron (d'abord toute petite, peu remarquée, elle a
La mise en état de la bouche avant tout traitement grossi jusqu'à atteindre le volume d'un œuf de
par les radiations ionisantes est obligatoire, en par- pigeon) ;
ticulier les extractions dentaires. - qu'elle n'a jamais été douloureuse ;
La chimiothérapie, compte tenu des effets - qu'elle gêne seulement la mastication.
secondaires fréquents et de la toxicité hématolo- Il porte aussi sur les antécédents et révèle que
gique, rénale, auditive, cardiologique ou neurolo- Mme B. a été opérée de l'intestin un an et demi
gique, demande une surveillance médicale auparavant.
constante (examens de laboratoire contrôlant la Mais cet interrogatoire est difficile, car la patiente
numération et la formule sanguines, examens : ne souhaite pas évoquer ses anciens problèmes
ORL, cardiologique, néphrologique et neurolo- de santé.
gique). Mais cette surveillance prolongée et régu- Lexamen exobuccal est tout à fait négatif :
lière des patients traités doit être très vigilante. - il n'y a pas de déformation à l'inspection, ni à la
Elle doit dépister en effet les récidives tumorales, palpation ;
les métastases (surtout pulmonaires et hépa- - il n'y a pas d'adénopathie.
tiques), les deuxièmes localisations pouvant inté-
resser tous les sites desVADS.
Un épithélioma de la gencive,
métastase d'un cancer du rectum
En octobre 1977, Madame B., âgée de 77 ans, nous
consulte à l'hôpital. Elle est adressée par son chi-
rurgien-dentiste traitant pour « un abcès dentaire
qui traîne au niveau d'une incisive centrale supé-
rieure et pour lequel l'antibiothérapie ainsi que l'ou-
verture et les soins de cette dent n'ont apporté
aucune amélioration. » Le motif de la consultation
(la lésion élémentaire) étant une lésion intrabuc-
cale, l'examen clinique porte essentiellement sur :
- l'examen endobuccal et la lésion concernée,
- l'interrogatoire.
381
Traité de sémiologie et clinique odonto-stomatologique
Conclusion
On peut dire à la lumière de cette observation qu'il
s'agit bien d'une métastase gingivale d'un cancer
du rectum. Cette observation appelle quelques
remarques dans la discussion :
• sur le plan de l'évolution de la maladie : après la
colostomie terminale, la malade part en conva-
lescence : l'état général est satisfaisant (59 kg),
la colostomie fonctionne bien. C'est à cette date
que se situe le début de l'épisode de la tumeur
buccale qui aurait évolué d'octobre 1976 à
octobre 1977, date à laquelle Mme B. nous a
consulté. Nous avons appris d'autre part que de
novembre 1977 à avril 1978 l'état de Mme B.
s'est détérioré et qu'elle a eu en particulier de
gros problèmes urinaires ;
382
Pathologie de la muqueuse buccale
383
Traité de sémiologie et clinique odonto-stomatologique
Premier cas
Fig. 15-123 Région digitale, c'est le « panaris herpé- Fig. 15-124 Quelques vésicules périlabiales dissémi-
tique ». nées avant leur rupture.
Linterrogatoire et l'examen clinique doivent le recher-
cher systématiquement.
384
Pathologie de la muqueuse buccale
Fig. 15-125 Primo-infection herpétique. Nombreuses Fig. 15-126 Lésions vésiculeuses linguales lors d'une
lésions vésiculaires au collet des dents et dans la région primo-infection herpétique. On notera l'enduit blan-
palatine (photo Dr. Sauveur). châtre candidosique de part et d'autre (photo Dr
Sauveur).
Fig. 15-128 Herpès réflexe ou traumatique. Cette Fig. 15-129 Herpès labial lors d'un épisode de grippe
lésion vésiculo-bulleuse s'est formée peu de temps avec fièvre.
après une extraction dentaire.
385
Traité de sémiologie et clinique odonto-stomatologique
à la primo-infection herpétique, chez un enfant Laffection dure dix à douze jours, elle est faible-
présentant une stomatite avec œdème de toute ment contagieuse (fig. 15-134).
la muqueuse buccale, érosions et ulcérations Il faut encore se rappeler :
nombreuses, siégeant en plusieurs points, - les f o r m e s graves chez l'enfant dénutri, aller-
entourées d'un halo rouge vif. gique, avec une surinfection possible par
Il existe une adénopathie cervicale douloureuse, manque d'hygiène pouvant produire des mutila-
une dysphagie intense, une fièvre élevée. tions importantes ;
Lévolution est favorable, mais la maladie va lais- - les formes à localisations diverses, où l'on
ser l'enfant très fatigué (fig. 15-130) ; retrouve en plus des lésions buccales des signes
à la stomatite herpétique de l'adulte, devant de primo-infection nasale, génitale ou oculaire.
une fièvre, d'emblée brutale et élevée, des
céphalées, des douleurs à type de brûlures buc- Gestes utiles et traitement :
cales, une dysphagie intense, une salivation exa- Ils concernent la prévention de la contagiosité, la
gérée, une haleine fétide (fig. 15-131), puis l'appa- recherche des éléments biologiques de confirmation
rition un ou deux jours après de bouquets de du diagnostic lorsqu'il est difficile d'emblée.
vésicules se déchirant rapidement, laissant des Le traitement a pour but, d'une part de favoriser et
d'accélérer la guérison des lésions, d'autre part de
ulcérations plates, à contours micropolycycliques,
réduire leur contagiosité.
recouvertes d'un enduit diphtéroi'de gris sale,
Il faut prescrire des bains de bouche calmants et alca-
avec des lésions érodées et ulcérées sur la partie lins, des immunorégulateurs et surtout un antiviral.
profonde du palais et sur le pharynx. Elle pro- Il faut ajouter un antifongique et parfois une antibio-
voque l'angine herpétique (fig. 15-132 et 15-133). thérapie, car il y a fréquemment une candidose buc-
Il y a, en outre, l'apparition d'un herpès labial. cale et des infections locales associées.
Fig. 15-130 Herpès diffus chez l'enfant. Fig. 15-131 Stomatite herpétique : lésions multiples,
Primo-infection herpétique avec asthénie, fièvre. fièvre, dysphagie, douleurs, céphalées.
Lcedème labial gêne fortement l'ouverture buccale.
Fig. 15-132 et 15-133 Stomatite herpétique profuse : ulcérations recouvertes d'un enduit diphtéroi'de sale.
386
Pathologie de la muqueuse buccale
Fig. 15-134 Herpès profus de la langue avec candidose Fig. 15-135 Lésion buccale de la varicelle au niveau de
profuse. la commissure.
D e u x i è m e cas
Syndrome mains-pieds-bouche
Troisième cas
Fig. 15-136 Lésion vésiculeuse de la varicelle sur une
Herpangine partie du corps colorée en rouge par de l'éosine.
387
Traité de sémiologie et clinique odonto-stomatologique
Il faut y penser devant une fièvre modérée, avec Les lésions bulleuses, rarement liées à une cause
céphalées, puis apparition de douleurs à type de locale, entrent dans le cadre d'affections géné-
picotements, de brûlures, de névralgies. Ladéno- rales diverses.
pathie précoce, constante, apparaîtra dans le terri-
toire douloureux en cause ; l'éruption se fera
48 heures après. Il faut penser : Premier cas
- à un zona mandibulaire, devant une éruption
intéressant la zone cutanée d'émergence du Stomatites bulleuses
nerf mentonnier, le menton, la lèvre inférieure, la
commissure labiale, la région prétragienne, la Deux affections bien particulières doivent faire
région temporale, le conduit auditif, la face évoquer le diagnostic :
muqueuse de la lèvre inférieure, la face - la première est plus fréquente et bénigne,
muqueuse de la joue, la moitié de la langue cor- - la deuxième est plus rare, mais plus grave.
respondante en avant du V lingual ; Devant :
- à un zona maxillaire, devant une éruption inté- - l'apparition d'une bulle centrale (c'est la lésion
ressant l'hémilèvre supérieure, le seuil narinaire, élémentaire), entourée d'un placard rouge vif,
la paupière inférieure, la joue, l'hémivoûte pala- cernée d'un halo de petites vésicules, prenant
tine, l'hémivoile du palais, la crête alvéolaire et le un aspect « en cocarde» (fig. 15-138),
vestibule supérieur ;
- à un zona ophtalmique, devant une érosion
vésiculeuse unilatérale, se manifestant dans le
territoire cutané du nerf ophtalmique, première
branche du trijumeau.
Gestes utiles :
-A titre prophylactique, isolement du malade pour
éviter toute contagion possible, et tout contact des
gens âgés avec les enfants.
-Atitre curatif : prescription d'antibiothérapie, d'anti-
viraux, d'antalgiques, de vitamines, de désinfec-
tions buccales fréquentes.
Sixième cas
Bulles
388
Pathologie de la muqueuse buccale
Gestes utiles :
Désinfection de la cavité buccale avec des bains de
bouche.
Fig. 15-139 Stomatite bulleuse sévère dans un éry- Antifongiques locaux car il existe une candidose buc-
thème polymorphe. cale associée.
Traitement par antibiothérapie et antiviraux.
Devant :
- des bulles siégeant souvent d'abord au niveau
d'une commissure labiale, atteignant progressi-
vement le vestibule, le palais, le voile ;
- des érosions douloureuses et fragiles leur suc-
cédant, localisées souvent pendant des
semaines dans la cavité buccale, s'accompa-
gnant de sialorrhée et de dysphagie ;
- l'absence de signes cutanés immédiats asso-
ciés (fig. 15-143 et 15-144),
il faut penser à un p e m p h i g u s vulgaire.
Fig. 15-140 et 15-141 Lésion typique « en cocarde » Fig. 15-142 Localisation génitale d'une lésion
sur le visage et sur le bras, caractéristique de l'éry- muqueuse d'un érythème polymorphe.
thème polymorphe, où les lésions muqueuses sont
associées.
389
Traité de sémiologie et clinique odonto-stomatologique
Gestes utiles :
Lorsque la bulle existe, il faut faire un cytodiagnostic.
Mais c'est l'étude histologique par immunofluores-
cence qui confirme le diagnostic.
Traitement par corticothérapie et immunorégulateurs.
D e u x i è m e cas
I
Gestes utiles dans ces deux cas :
- Soins locaux : bains de bouche bicarbonatés et avec
les antiseptiques habituels.
Fig. 15-143 et 15-144 Pemphigus vulgaire : lésions - Soins généraux : antalgiques, antibiothérapie car la
palatines d'érosion bulleuse chronique. surinfection est toujours présente, associée parfois
à une corticothérapie.
Fig. 15-145 Pemphigus vulgaire labial : érosion bul- Fig. 15-146 Pemphigus, lésion linguale dans une forme
leuse chronique. sévère.
390
Pathologie de la muqueuse buccale
mères donnant des érosions rouge vif, récidi- • Le pemphigus végétant, lorsque l'affection
vantes, très douloureuses et précédant de débute par une stomatite avec des lésions post-
quelques semaines l'éruption cutanée. bulleuses prenant vite un aspect bourgeonnant,
Léruption cutanée est souvent symétrique, aux végétant et suintant. En même temps, ou peu
coudes, aux mains, aux pieds. Un signe biolo- après, apparaissent des lésions cutanées à type
gique important est l'éosinophilie sanguine. de placards mamelonnés rouges ou violacés,
Affection souvent saisonnière, on lui retrouve suintant, à la périphérie desquels se produisent
des causes toxiques (iodure de potassium, des petites bulles.
brome, mercure) et des causes de sensibilisa- Le cytodiagnostic, comme dans le pemphygus
tion (physiques, chimiques, etc.). vulgaire, et la biopsie confirment le diagnostic.
dévolution est favorable chez le sujet jeune, plus La corticothérapie améliore le pronostic qui, de
grave chez les personnes âgées (fig. 15-147 à toute façon, est fatal au bout de deux à trois ans.
15-150).
Gestes utiles :
- Soins locaux : bains de bouche émolients ou bicar- Troisième cas
bonatés, corticothérapie locale.
-Traitements généraux: sulfamides, immunorégula- Lésions bulleuses iatrogènes
teurs, antibiothérapie, antipaludéens et antihistami-
niques. • Devant une stomatite bulleuse apparaissant
après la prise de médicaments déterminés,
• La pemphigoïde, forme clinique de la maladie habituellement : l'antipyrine, les bromures,
de During-Brocq, qui se manifeste chez le sujet l'iode et les iodures, les barbituriques, la phényl-
âgé par l'apparition de grosses bulles flasques butazone, certains antalgiques, certains antibio-
avec érosions secondaires. tiques, il faut penser à une toxidermie bul-
Fig. 15-147 à 15-150 Quelques autres formes de lésions bulleuses. C'est l'interrogatoire, l'examen clinique avec la
recherche des signes cutanés associés ou non, la présence des signes généraux ou non, et l'examen histologique, qui
orientent le diagnostic.
391
Traité de sémiologie et clinique odonto-stomatologique
leuse. Il existe souvent des lésions cutanées • De même, après une anesthésie locale, pendant
bulleuses, papuleuses ou pigmentées associées ou après une radiothérapie sur les régions
(fig. 15-151). bucco-cervico-faciales, ou une chimiothérapie, il
C'est l'interrogatoire, là encore qui permettra faut penser aux bulles allergiques. Dans ce
de retrouver le médicament responsable cas, il faut savoir attendre la cicatrisation ; les
dont la suppression doit être définitive. traitements locaux habituels doivent y aider
(fig. 15-152 et 15-153).
• Devant un malade présentant l'aspect d'un
grand brûlé, avec des bulles muqueuses, et des
bulles cutanées très volumineuses, sur fond éry-
thémateux induisant des érosions sévères qui
donnent au malade cet aspect caractéristique, il
faut penser à l'érythrodermie bulleuse ou syn-
drome de Lyell.
Cette érythrodermie bulleuse est due à une
réaction d'intolérance à un médicament (antibio-
tiques, sulfamides, antipyrine, corticoïdes le plus
souvent).
• Devant la notion de frottement par un instru-
ment rotatif au niveau de la commissure labiale
par exemple, lors d'une intervention, et devant
la notion d'une brûlure thermique, chimique,
Fig. 15-151 Lésions bulleuses iatrogènes : toxidermie d'une gelure, il faut penser aux bulles trauma-
bulleuse d'origine médicamenteuse. tiques.
Dans ce cas aussi, les traitements locaux
simples habituels aideront la cicatrisation dans
les délais normaux (fig. 15-154).
Fig. 15-153 Bulle labiale avant sa rupture, chez un Fig. 15-154 Bulle traumatique (brûlure).
malade sous radiothérapie.
392
Pathologie de la muqueuse buccale
393
Traité de sémiologie et clinique odonto-stomatologique
Deuxième situation
Fig. 15-157 Dépôt blanchâtre dans une candidose pro- Premier cas| Lorsque la lésion kératosique a l'as-
fuse. pect d'une tache, ou plutôt d'une plaque blanche,
que l'épithélium a perdu sa transparence à ce
niveau, il faut pensera une leucoplasie.
Ce terme de leucoplasie, essentiellement cli-
nique, implique tout à fait cette notion de forma-
tion blanche non détachable.
C'est l'épaisseur de la couche de kératine qui va
déterminer les différents stades de la leucoplasie
sur le plan clinique (fig. 15-160).
Les formes cliniques se distinguent alors en leu-
coplasies simples, kératosiques ou hyperkérato-
siques.
Il s'agit d'une forme simple, lorsque la lésion
blanche se manifeste par une tache ou une plaque
fine, opaline, nacrée, brillante et lisse, blanc pur ou
blanc bleuté. La palpation, à ce stade, est négative
Fig. 15-158 Perlèche bilatérale : dépôt blanchâtre can- (fig. 15-161).
didosique. Il s'agit d'une forme kératosique, lorsque la
lésion blanche se manifeste par une tache ou une
plaque d'aspect uniforme, à bords nets, finement
striée, de teinte blanchâtre, parfois légèrement gri-
sâtre. A la palpation, la lésion paraît épaissie et
adhérente à la muqueuse (fig. 15-162).
Fig. 15-159 Lésion caractéristique d'une langue géo- Fig. 15-160 Leucoplasie typique de la face ventrale de
graphique. la langue chez un fumeur. Parfois, le risque existe
qu'une telle localisation échappe à l'examen.
394
Pathologie de la muqueuse buccale
Il s'agit d'une forme hyperkératosique, lorsque conduisent à l'altération épitheliale qui apparaît
la plaque est bien plus épaissie, plus dure et inex- alors comme une réaction à une irritation locale.
tensible, à surface plane ou inégale (fig. 15-163 et Ce sont en réalité :
15-164). - le tabac : dans ce cas, il s'agit d'une kératose
Il s'agit d'une forme verruqueuse, lorsque la tabagique, où interviennent la chaleur de la
lésion est franchement hyperkératosique (elle fumée, les produits de combustion (les hydro-
peut atteindre plusieurs millimètres d'épaisseur), carbures benzéniques), le contact avec le tabac
hérissée de saillies hypertrophiques (« en langue lui-même ;
de chat ») prenant l'aspect d'une véritable verrue. -Yalcool: il s'agit alors d'une kératose alcoo-
Ces kératoses peuvent siéger dans la région lique, où la consommation abusive intervient
rétrocommissurale, formant alors un triangle à dans des conditions locales d'hygiène insuffi-
sommet postérieur ; sur les lèvres, la face interne santes. L'association alcool-tabac multiplie les
de la joue, sur la voûte palatine, sur le bord de la risques d'apparition et de dégénérescence ;
langue ou la face dorsale, sur le plancher buccal - les traumatismes chroniques (épines irritatives
(où elles peuvent être masquées par la langue). de toutes sortes), dans ce cas, il s'agit d'une
Les facteurs d'apparition de ces leucoplasies kératose traumatique.
395
Traité de sémiologie et clinique odonto-stomatologique
Gestes utiles :
- Suppression de toutes ces causes locales et pros-
cription du tabac en particulier.
- Prescription d'une hygiène buccale rigoureuse.
- Lorsque la cause locale n'est pas retrouvée, pres-
cription de tests serologiques à la recherche d'une
pathologie associée.
- Biopsie ou exérèse biopsique, en particulier dans les
formes hyperkératosiques et verruqueuses, fissu-
rées, ulcérées, indurées, douloureuses, saignantes.
- Surveillance régulière des patients.
396
Pathologie de la muqueuse buccale
Fig. 15-168 et 15-169 Forme plus complexe d'un lichen plan de la joue.
Gestes utiles :
- Examens mycologiques, traitements antifongiques.
- Vitaminothérapie A à fortes doses.
- Corticothérapie en glossettes à sucer ou en injec-
tions sous-lésionnelles.
397
Traité de sémiologie et clinique odonto-stomatologique
Fig. 15-172 Fausse pigmentation ethnique : il s'agit Fig. 15-173 Métallose : un tenon radiculaire
d'un tatouage de la gencive. foré la racine en est responsable.
Fig. 15-174 et
15-175 Lésions
noires d'une
maladie bronzée
d'Addison.
398
Pathologie de la muqueuse buccale
Première situation
399
Traité de sémiologie et clinique odonto-stomatologique
Gestes utiles :
- Acide rétinoïque, ou trétinoïne, en attouchements.
- Corticothérapie locale en glossetttes à sucer ou en
injections sous-lésionnelles ; ou parfois générale
dans les formes érosives et huileuses.
- Vitamine A à fortes doses.
- Suppression de tous les irritants locaux et, selon le
cas, bilan clinique général. Fig. 15-179 Lichen bulleux de la joue.
- Prescription parfois d'un anxiolytique.
- Exérèse de la lésion dans certains cas, avec ana-
tomo-pathologie et surveillance ultérieure.
D e u x i è m e situation
Troisième situation
400
Pathologie de la muqueuse buccale
Fig. 15-182 et 15-183 Lésions typiques de papi liomatose orale floride en végétations croûteuses.
401
Traité de sémiologie et clinique odonto-stomatologique
D'autres cures de chimiothérapie ont lieu en 1985 Deuxième cas (fig. 15-185)
avec un traitement au laser.
En 1987, la patiente revient consulter : les lésions
exo- et endobuccales ont récidivé et sont plus
marquées. Les différentes biopsies confirment :
« papillomatose orale floride compliquée de
carcinomes verruqueux, avec infiltrations
superficielles du chorion en profondeur ».
Un bilan d'extension par résonance magnétique
nucléaire du massif facial montre « une tumeur
étendue de la partie externe du palais droit avec
extension au niveau du fond du sinus maxillaire
droit, infiltration de l'espace parapharyngé au niveau
de la fosse ptérygo-maxillaire droite. Infiltration de
l'arrière fond de la fosse ptérygo-maxillaire ».
Compte tenu de l'extension importante des
lésions, le seul traitement possible a été la radio-
thérapie associée à une autre chimiothérapie qui
ont amené une amélioration des lésions en super- Fig. 15-185 Cas clinique d'une érythroplasie de la com-
ficie et une diminution des douleurs. Mais ce trai- missure chez un jeune cuisinier alcoolo-tabagique d'une
tement a été interrompu du fait de l'altération de trentaine d'années.
l'état général de la patiente et de complications
thrombo-emboliques et infectieuses gravissimes.
Troisième cas (fig. 15-186)
Cette observation explique bien la plurifoca-
lité de cette papillomatose orale floride et
confirme encore le caractère quasi obliga-
toire de dégénérescence maligne d'une telle
lésion.
Candidoses buccales
402
Pathologie de la muqueuse buccale
malignes, les facteurs alimentaires en sont encore - les facteurs iatrogènes : antibiothérapie, cortico-
des causes fréquentes ; toutefois les pathologies thérapie, radiothérapie, psychotropes et antidé-
où les déficits immunitaires interviennent forte- presseurs, immunosuppresseurs, pilule contra-
ment en sont largement responsables : infection ceptive,
par le VIH, neutropénies entraînant un déficit du - la toxicomanie,
pouvoir phagocytaire des polynucléaires, toxico- - les facteurs alimentaires :
manie et facteurs iatrogènes tels que les antibio- - dénutrition,
tiques, les corticoïdes, la radiothérapie entraînant - carences vitaminiques, surtout vitamine A.
une sécheresse buccale ainsi que les psycho- Les causes locales sont :
tropes, les antidépresseurs et les immunosup- - le mauvais état dentaire, le mauvais entretien
presseurs. des prothèses, brûlures, morsures,
Après avoir évoqué et éliminé un diabète, une - l'abus local des sucres, du tabac, l'acidité sali-
prise récente d'antibiotiques ou d'antidépres- vaire.
seurs, une chimiothérapie, une radiothérapie, ou
Aspects cliniques des lésions où deux signes
une cause locale comme une mauvaise hygiène
sont majeurs : l'érythème et les dépôts blan-
buccale par exemple, il faut penser à une infec-
châtres.
tion par le VIH : ainsi l'interrogatoire et la connais-
sance de l'identité clinique du patient sont très Associé à ces deux symptômes existe un
importants. ensemble de lésions diverses à type de fissures,
d'érosions...
Il faut se méfier de toute candidose traînante et
Les signes fonctionnels sont le plus souvent
rebelle chez le sujet jeune.
modérés, dominés par une altération du goût, des
brûlures buccales ; mais parfois, leur absence,
Épidémiologie même devant une invasion massive, amène à por-
Candidoses buccales au quotidien ter le diagnostic sur l'aspect des dépôts saburraux
donnant à la langue cet aspect de couche mem-
Sans même envisager les autres causes déclen- braneuse, épaisse, blanchâtre, détachable. Parfois,
chantes, on peut penser que la multiplication des la sécheresse buccale est plus ou moins associée
traitements antibiotiques et par corticoïdes, pas à l'érythème.
toujours utiles et parfois mal conduits, y est certai- Les dépôts blanchâtres peuvent prendre une
nement pour beaucoup. teinte jaunâtre, grisâtre et même noirâtre, sous
Le portage asymptomatique de Candida albicans l'action de facteurs divers : thé, tabac, café, voire
au niveau de la muqueuse buccale est de 15 à des facteurs iatrogènes, abus de traitements
30 %. locaux en particulier (bains de bouche, pastilles à
Le portage saprophyte se traduit par la présence sucer).
exclusive de formes lévuriques, le développement Parfois, ces dépôts aboutissent à la langue noire
de filaments mycéliens étant un argument en villeuse.
faveur du caractère pathogène.
Levure hôte, saprophyte normal de la cavité buc-
cale, l'infection à Candida albicans est la forme la Première situation
plus fréquente des mycoses buccales.
Les Candida commensaux sont parfaitement tolé- Candidoses buccales aiguës
rés par un sujet sain. Linfection va se produire à
partir de leur pouvoir pathogène acquis, de leur Premier cas| |_a candidose linguale, où les
prolifération, de leur virulence accrue sous l'action signes fonctionnels sont peu importants, sauf par-
de différents facteurs. fois une sensation de brûlure. Elle débute rapide-
Les facteurs favorisants. Ils sont responsables de ment après une antibiothérapie avec sécheresse
la rupture de l'équilibre entre la levure et l'hôte. Ce buccale.
sont des causes physiologiques, des causes géné- Les signes mycosiques se caractérisent par une
rales, des causes locales. langue lisse, dépolie, érythémateuse réalisant la
Les causes physiologiques sont les âges extrêmes forme érythémateuse pure.
de la vie. En revanche, une langue sèche et lisse réalise la
Les causes générales sont : forme atrophique.
- les maladies endocriniennes : diabète, hypothy- Cette candidose linguale érythémateuse ou atro-
roïdie, grossesse... phique succède à l'apparition, puis à l'élimination
- les maladies cancéreuses : hémopathies, can- d'un enduit d'abord blanchâtre, puis noirâtre
cers bucco-pharyngés, recouvrant la langue.
- les déficits immunitaires : neutropénies, infec- Linterrogatoire doit faire préciser l'existence de ce
tion par le VIH, signe clinique antérieur (fig. 15-187 et 15-188).
403
Traité de sémiologie et clinique odonto-stomatologique
Fig. 15-187 et 15-188 Candidose linguale aiguë sous ses deux formes : érythémateuse et atrophique avec perlèche
associée.
Fig. 15-189 Muguet palatin, muqueuse rouge, sèche, Fig. 15-190 Autre muguet chez un enfant jeune, candi-
puis apparition d'efflorescences et de dépôts blan- dose aiguë, avec lésions herpétiques associées.
châtres d'aspect crémeux détachables.
404
Pathologie de la muqueuse buccale
Deuxième situation
405
Traité de sémiologie et clinique odonto-stomatologique
Fig. 15-195 Candidose hyperplasique de la commis- Fig. 15-196 Glossite losangique médiane typique.
sure : ici, la lésion s'étend en arrière sur la joue et est
formée de plusieurs plaques détachables, dont deux
plus grandes, séparées par une muqueuse saine.
406
Pathologie de la muqueuse buccale
Fig. 15-200 Villosités très marquées contrastant avec Fig. 15-201 Langue noire par abus de bains de bouche
le reste de la surface de la langue, après un traitement antiseptiques.
antibiotique.
407
Traité de sémiologie et clinique odonto-stomatologique
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