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LES VICES DU CONSENTEMENT :

La nécessité du consentement ne suffit pas. Encore faut-il qu’il soit exempt de vices.
Mais de quels vises peut-il s’agir ? En d’autres termes, l’existence d’une volonté viciée influe-
t-elle sur la validité de l’échange des consentements ? En théorie, la réponse à cette question
doit être nuancée, car existe deux hypothèses qui traduisent une différence d’intensité de
l’atteinte portée à la volonté d’une personne : la volonté peut être viciée, alors même qu’elle
existe, ce qui est le cas de l’erreur. Mais la volonté peut être viciée à un point tel qu’elle remet
en cause l’existence du consentement, ce qui est le cas du dol ou de la violence.
1-L’erreur :
L’erreur peut être définie comme la fausse représentation qu’un contractant se fait de quelque
chose ou d’une personne. La réalité est altérée par celui qui contracte. Cette définition laisse
donc place à de multiples erreurs que ce soit sur l’objet du contrat (par exemple un chalutier
pris pour un cargo) sur le prix de l’objet ce qui dissimule une erreur sur sa qualité, sur
l’identité du contractant, voir même sur la nature du contrat (un bail prix pour une vente).
Selon le code civil trois conditions doivent être réunies pour qu’une erreur vicie le
consentement :
- L’erreur doit exister lors de la conclusion du contrat. C’est à ce moment que la fausse
représentation que l’on se fait peut vicier le consentement. Toute erreur commise avant ou
après la conclusion du contrat ne peut conduire à l’annulation du contrat.
-l’erreur doit être prouvée par la personne qui s’en prétend victime. C’est cette
personne qui doit prouver la gravité de l’erreur, c'est-à-dire qui doit en montrer le caractère
essentiel.
- l’erreur doit être essentielle. Cette notion est éclairée par l’art 82 du code civil : «
l’erreur est essentielle lorsque sa gravité atteint un degré tel que si cette erreur n’aurait pas été
commise, la partie qui s’est trompée n’aurait pas conclu le contrat ».
Le code civil dans son art 82 évoque à titre indicatif seulement deux types d’erreurs
essentielles : l’erreur sur les qualités substantielles de la chose et l’erreur sur l’identité ou sur
les qualités du cocontractant.
L’erreur sur la substance peut présenter deux aspects : tantôt l’erreur porte sur les qualités
substantielles objectives, c'est-à-dire sur les qualités que l’on s’attend à trouver normalement
dans une chose. Par exemple, constitue une qualité objective d’une voiture achetée d’occasion
le fait d’être à même de rouler, dans la mesure où il ne s’agit pas d’une épave. Tantôt l’erreur
porte sur les qualités substantielles subjectives, c’est à dire Sur des qualités que le
cocontractant considère comme fondamentales au regard de l’objet du contrat. Ainsi en serait-
il d’un achat portant sur des poussins destinés à la ponte d’œufs alors que l’acheteur estimait
qu’il s’agissait de volailles de chair.
L’erreur sur l’identité ou sur les qualités du cocontractant est essentielle dans les contrats
conclus intuitu persona, c'est-à-dire dans les actes pour lesquels la considération de la
personne au plan de son identité ou de sa qualité est fondamentale, déterminante pour la
conclusion du contrat. Par exemple, on peut concevoir qu’une erreur sur la qualité d’une
personne soit essentielle lorsqu’un contrat d’apprentissage de conduite automobile est conclu
avec une auto-école dont l’enseignant n’a pas de diplômes.
En réalité, il ne s’agit là que d’exemples donnés par le code civil pour faciliter le travail des
magistrats. De manière générale, c’est aux tribunaux qu’il appartiendra d’apprécier pour
chaque cas d’espèce si l’erreur invoquée est essentielle ou indifférente.
Effets de l’erreur :
Dès lors que l’erreur répond aux conditions indiquées ci-dessus, on doit s’attendre à ce que la
nullité du contrat la sanctionne. Le principe est posé par le code civil. Encore faut-il préciser
qu’il s’agit d’une nullité relative, c'est-à-dire d’une nullité qui ne peut être demandée que par
la victime de l’erreur. La victime peut renoncer à l’action en nullité, par confirmation
expresse ou tacite. La nullité peut ne pas être prononcée si le cocontractant accepte de
remédier aux effets de l’erreur.
L’action en nullité se prescrit en dix (10) ans à compter de la découverte du vice et, au plus
tard, dans tous les cas, en quinze (15) ans à dater de la conclusion du contrat.
2-Le dol :
Le dol est constitutif d’un vice du consentement lorsque trois conditions sont réunies : la
manœuvre doit être malhonnête, déterminante et être le fait du cocontractant.
Une manœuvre malhonnête :
Les manœuvres peuvent résulter d’un mensonge déloyal. Bien entendu, l’exagération
habituelle d’un commerçant pour vanter un produit n’est pas considérée comme un dol. En
revanche, l’abus de la faiblesse et de l’inexpérience du contractant est un dol. De même, on
peut considérer la réticence, c'est-à-dire le fait de dissimuler des renseignements déterminants
dans la réalisation du contrat, comme une manœuvre dolosive surtout si l’une des parties est
un profane alors que l’autre est un professionnel. Ainsi il y a dol pour réticence, lorsqu’à
l’occasion d’une vente de voiture d’occasion un vendeur n’attire pas l’attention de son client
sur le fait que le compteur kilométrique a été bloqué.
Par ailleurs, le code civil invite à considérer le silence intentionnel comme un dol, c’est que
l’absence de renseignements peut être de nature à pousser les personnels à se fier aux
apparences et, plus spécialement, un acquéreur à contracter alors qu’il ne l’aurait pas fait si le
partenaire n’était pas resté muet, c'est-à-dire s’il avait donné des indications sur le bien qui
fait l’objet du contrat.
Une manœuvre déterminante :
Le dol vicie le consentement si la manœuvre est telle que si elle n’avait pas été exercée, il n’y
aurait pas eu de contrat. Le dol doit être déterminant, ce qui conduit à distinguer le dol
principal du dol incident.
Le dol principal est un fait en l’absence duquel la personne n’aurait pas conclu le contrat.
Quant au dol incident, c’est celui en l’absence duquel une personne qui s’en prévaut peut, tout
au plus, prétendre à une réparation civile, mais non à l’annulation du contrat.
Une manœuvre provoquée par le cocontractant ou son représentant :
Selon le code civil les manœuvres doivent avoir été pratiquées par l’une des parties au contrat.
La manœuvre qui serait le fait d’un tiers ne peut conduire à l’annulation du contrat car on
sanctionnerait alors un contractant qui n’a commis aucune faute.
Mais ce principe reçoit une atténuation lorsque le contractant avait connaissance des
manœuvres pratiquées par le tiers.
2- La violence :
La violence est une manifestation contraignante qui provoque une crainte chez la personne qui
contracte. C’est donc la crainte qui vicie le consentement, et non la violence à proprement
parler. La crainte peut résulter d’une violence physique, à l’extrême une séquestration, ou
morale, par exemple des menaces. Ceci précisé, la violence n’est cause de nullité du contrat
que lorsque trois conditions sont réunies : la violence doit être illégitime, déterminante et le
fait du cocontractant.
Une violence illégitime :
Selon le code civil, la violence doit avoir été inspirée sans droit. Ce qui permet de dissocier
les violences légitimes de celles qui ne le sont pas. Par exemple, la menace d’ester en justice
constitue une violence légitime.
Violence déterminante :
Pour satisfaire à cette condition, il faut que la crainte soit fondée et qu’elle altère le
consentement.
La crainte est fondée « lorsque la partie qui l’invoque devait croire, d’après les circonstances,
qu’un danger grave et imminent la menaçait elle-même, ou l’un de ses proches, dans sa vie, sa
personne, son honneur ou ses biens ». il faut donc que la menace soit sérieuse, grave, ce qui
pose un problème d’appréciation. Le législateur invite à le régler concrètement, c'est-à-dire en
tenant compte de chaque situation individuelle, à partir d’éléments tels que sexe, âge,
condition sociale, santé…,ce qui, est plus protecteur.
Une violence commise par le cocontractant :
La violence doit être exercée par l’une des parties, ce qui se conçoit aisément dès lors que l’on
sait que le vice ne peut apparaître qu’à la conclusion du contrat. Cependant, tout comme le
dol, le législateur admet que la violence exercée par un tiers vicie le contrat au cas où il est
prouvé que l’autre partie en avait connaissance. En revanche, la violence résultant
d’évènements extérieurs à l’homme ne semble pas être une cause d’anéantissement du contrat.
Ainsi en est- il d’un contrat conclu sous l’empire de la nécessité.
3- La lésion :
La lésion est, selon une définition célèbre, « le préjudice matériel qui résulte pour l’une des
parties du défaut d’équivalence entre les prestations imposées par le contrat ». il faut
distinguer entre la lésion générale et la lésion spéciale.
La lésion générale :
Selon l’article 90 du code civil, deux types de situation lésionnaire sont admis. La lésion peut
être objective : elle résulte alors d’une comparaison des obligations réciproques. Mais elle
peut être également subjective dans la mesure où elle peut être établie par comparaison des
avantages et inconvénients qu’une partie retire d’un contrat, la disproportion créant la lésion.
Cependant cette comparaison ne constitue pas une condition suffisante. Le législateur en
ajoute une autre, afin de ne pas précipiter la remise en cause des contrats.
Il faut, en effet, prouver que le déséquilibre ou la disproportion est la conséquence de deux
éléments.
-D’une part, la personne qui se prétend lésé doit avoir conclu le contrat alors que son
psychisme était atteint par une passion effrénée ou par une légèreté notoire, c'est-à-dire
par une passion sans bornes ou par une immaturité connue d’un grand nombre de
personnes, notions qui, à n’en point douter, relèvent de l’appréciation souveraine des
juges du fond..
-D’autre part, il faut que le cocontractant ait tiré profit de cet état psychologique, l’ait
exploité, ce qui est constitutif d’un abus de situation, et le situe en dehors des frontières
de la bonne foi.
Lorsque l’action n’est pas frappée d’irrecevabilité et que les conditions de la lésion sont
réunies, le juge peut annuler le contrat ou essayer de le rééquilibrer en réduisant les
obligations de la partie lésée (pouvoir d’adaptation).
Les lésions spéciales :
On rencontre des lésions spéciales non seulement dans le code civil mais aussi pour des
matières qui ne sont pas traitées par le code civil.
- En matière de contrat d’adhésion, la lésion est présumée dès lors que l’on est en
présence de clauses léonines. Ainsi constitue une clause léonine celle qui porte sur la
rémunération d’une prestation fictive. Le juge peut alors modifier ces clauses ou
prohiber leur exécution.
- En matière de vente immobilière, et sauf si la vente, et la valeur de l’immeuble doit être
supérieur au 1/5 du prix de vente, l’estimation se faisant au jour de la vente. Le cas
échéant, le vendeur peut dans les trois ans de la vente, demander en justice le
versement du supplément du prix mais peut remettre en cause le contrat.
- En matière d’échange d’immeuble, l’action en lésion est ouverte à chaque coéchangiste
aux puisque l’article 415 du code civil précise que les dispositions concernant la vente
s’applique au contrat d’échange.
- En matière de partage, l’action en lésion est ouverte à tous copartageants aux mêmes
conditions qu’en matière de vente immobilière, et pour autant qu’ils s’agissent d’un
partage conventionnel. En revanche, les conditions sont différentes en ce sens que la
nullité peut être prononcée, sauf, bien entendu, s’il y a remise du supplément de la part,
cette remise pouvant être faite en espèce ou en nature. Enfin, il faut noter que la
prescription de l’action intervient un an à compter du contrat de partage.

- En matière des droits d’auteurs, l’article … de la loi… permet à l’auteur victime d’une
lésion à l’occasion d’un contrat (contrat d’édition), d’engager une action en adaptation
du contrat ou en rescision pour autant qu’il soit prouvé un déséquilibre entre le profit
résultant de l’exploitation de l’œuvre et la rémunération qui est allouée à l’auteur.

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