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SANTÉ-ÉDUCATION 2002
* 1er FÉVRIER 2002 *
De l’observance…
D'après Haynes et col l'observance, appelée aussi compliance, adhérence ou
fidélité thérapeutique, est définie comme « le degré de concordance entre le
comportement d'un individu (en termes de prise médicamenteuse, suivi de ré-
gime ou changements de style de vie) et la prescription médicale » (Com- SOMMAIRE
pliance in health ; John Hopkins University Press 1979).
• ÉDITO : DE L’OBSERVANCE… ......... 1
Dans une maladie chronique, comme le diabète de type 2, où le malade (H. MOSNIER-PUDAR)
prend 75 à 95 % des décisions thérapeutiques, l'adhérence au traitement doit • L’observance des prescriptions
être abordée au cours de la consultation. Pas d'une manière soupçonneuse ou thérapeutiques du diabète de
culpabilisatrice, mais de façon à rechercher le moyen de faire mieux. En effet type 2 : peut-on faire mieux ? ............ 2
le défaut d'observance est une réalité difficile à connaître : difficile à dire par (A. GRIMALDI)
le malade, parce qu'il pense qu'elle est difficile à entendre par le médecin, qui
• Comment faire avaler ses pilules au
risque d'y voir une contestation de son autorité, difficile à entendre par le pa- diabétique de type 2 ? ........................ 4
tient lui même, au risque d'une baisse de « l'estime de soi ». (M. TRAMONI)
De plus, dans le diabète de type 2, une observance aléatoire ne s'accom- • Pour un au-delà de l’information
pagne d'aucun phénomène symptomatique, ni d'aucune aggravation remar- en médecine ........................................ 6
quable, au moins dans le court terme, pouvant passer alors inaperçue. Ailleurs, (C. BRETON)
et cela peut être le cas du diabète de type 1, une mauvaise observance peut en- • Être malade - avoir une maladie ....... 7
traîner des décompensations sévères et mettre en jeu le pronostic vital. Ainsi les (J. SZPIRKO)
conséquences de la « non-observance » dépendent pour beaucoup de la gravité • L’adolescent et l’observance
et de l'évolutivité propre de la maladie, de l'efficacité des traitements, de leur au traitement ..................................... 12
finalité curative ou préventive et enfin du type même de la prescription. Elles (P. ALVIN)
dépendent aussi du degré de la mauvaise observance, de sa durée… Malgré • Le diabète insulinodépendant
tout pour la plupart des maladies, le niveau optimal d'observance requis pour à l’adolescence ................................. 15
obtenir le résultat thérapeutique désiré n'est pas connu. ➥ (N. TUBIANA-RUFI)
• Activités du Groupe Régional
Le bureau du DESG Nord du DESG ................................... 16
(C. DELATRE, M. LEVISSE, C. STUCKENS)
■ Président : Serge HALIMI (Hôpital Nord, GRENOBLE) • SANTÉ - ÉDUCATION - PARIS 2002
■ Vice-Président : Jean-Louis GRENIER (Hôpital V. Provo, ROUBAIX) Abstracts ............................................. 17
■ Vice-Présidents adj. : Ghislaine HOCHBERG (Paris)
Bernard CIRETTE (Centre Hospitalier, NEVERS)
Le DESG de langue française remercie :
Claude COLAS (Paris)
■ Secrétaire générale : Helen MOSNIER-PUDAR (Hôpital Cochin, PARIS) LES LABORATOIRES
SERVIER,
■ Secr. général adjoint : Simone JEAN (Hôpital St-Joseph, PARIS)
■ Trésorier : Jean-Michel RACE (Hôpital Sud, AMIENS) LES LABORATOIRES :
BAYER-DIAGNOSTIC
■ Présidents d'honneur : Paul VALENSI (Hôpital J.Verdier, BONDY)
BECTON-DICKINSON,
Fabienne ELGRABLY (Hôtel-Dieu, PARIS)
HOECHST-HOUDÉ, LIFESCAN,
■ Responsable du Journal Diabète Éducation : Guillaume CHARPENTIER
LILLY, MEDISENSE, MERCK-
(Hôpital Gilles de Corbeil - CORBEIL ESSONNES)
LIPHA, NOVO-NORDISK,
■ Responsables des Groupes Régionaux : Anne-Marie LEGUERRIER (Hôpital Sud RENNES)
PARKE-DAVIS, ROCHE
Bernard CIRETTE (Centre Hospitalier, NEVERS)
■ Responsable de la Formation des formateurs : Judith CHWALOW (Hôtel-Dieu, PARIS) de leur collaboration et de leur soutien
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maladie chronique incurable, comportant changement : l'indifférence, la réflexion, ficace mais bien souvent renforce la po-
à long terme un risque de complications la préparation à l'action, le passage à litique de l'autruche ou fait fuir le pa-
et nécessitant l'abandon de comporte- l'action, enfin le maintien du nouveau tient ;
ments quotidiens agréables au profit de comportement. Cette dissection a le mé- ■ à l'inverse, la banalisation consiste
nouveaux comportements plutôt moins rite de mettre l'accent sur l'adéquation à minimiser les difficultés rencontrées
agréables, ne peut être que source d'an- du comportement médical lors de par le malade pour modifier ses habi-
goisse. Aider le malade à se motiver, chaque étape. Au stade de l'indifférence, tudes alimentaires ou son activité phy-
c'est chercher à transformer cette an- il importe moins de rappeler le risque sique ou même prendre régulièrement
goisse en énergie positive pour la réso- que d'interroger le malade sur les rai- ses comprimés ;
lution de problèmes. Une question préa- sons de profondes son indifférence. Au
lable se trouve posée : quelle est la stra- stade de la réflexion, il importe de sou- ■ banalisation des contraintes et dra-
tégie adoptée spontanément par le ma- peser avec le malade le pour et le contre matisation des complications sont sou-
lade (“coping”) pour faire face au stress du changement comportemental en ne vent en fait associées et verrouillent
induit par la maladie ? minimisant surtout pas les arguments complètement la relation médecin / ma-
contre. Enfin, pour assurer le maintien lade ;
■ l'évitement, conséquence du déni ou
refus conscient de la maladie ; du comportement, il importe d'en rappe- ■ parfois vient s'ajouter un jugement
ler les avantages mais aussi d'en discu- moralisateur sur « l'absence de volonté
■ la stratégie émotionnelle, qui re-
ter les difficultés et d'envisager les du malade » ;
court à l'auto-suggestion pour minimiser
conduites à tenir en cas de rechute.
les risques. Le malade fait alors souvent ■ enfin les spécialistes hospitaliers
appel à des croyances de santé, voire à pratiquent volontiers la médicalisation
des rituels comportementaux censés 5°) Changer la relation biotechnologique pour éviter la prise en
conjurer le sort… charge psychosociale. Face au déséqui-
■ enfin, la stratégie de résolution de
médecin-malade libre du diabète, ils multiplient les hos-
problèmes qui vise à analyser les pitalisations de jour et les bilans riches
risques, inventorier les solutions, fixer Placées au centre de la relation méde- d'examens complémentaires inutiles et
des objectifs… cin / malade dans la maladie chronique, inutilement répétés, quand ce ne sont
les difficultés à suivre le traitement sup- pas des hospitalisations prolongées pour
Le sujet équilibré ayant des res- cures, cures d'insuline à la pompe ou
sources psychologiques importantes uti- posent en réalité de changer cette rela-
tion. L'absence de symptôme habituel au cures de régime basses calories, dont
lise habituellement les trois stratégies, l'inefficacité à terme est aujourd'hui bien
en donnant en l’occurrence la priorité à cours du diabète non insulino-dépendant
crée de plus une source de conflits rela- démontrée.
la stratégie de résolution de problèmes.
tionnels structurels. En effet, la relation
Ces contre-attitudes tiennent au mo-
Mais pour résoudre le problème posé médecin / malade est harmonieuse
dèle culturel médical dominant de la
par le diabète non insulino-dépendant, lorsque le « corps subjectif » vécu par
maladie aiguë grave inadapté pour la
encore faut-il que le patient soit le malade et le « corps objectif » ex-
prise en charge de la maladie chronique,
convaincu : ploré par le médecin sont concordants.
comme l'a bien montré Jean-Philippe
■ qu'il a un risque (quelle représenta- La discordance est source de malenten-
ASSAL. Ces deux modèles s'opposent
tion du risque ?); dus, qu'il s'agisse d'un malade qui
en effet point par point. L'objectif lors
■ non seulement, le patient doit être
souffre « partout depuis toujours », et
de la maladie aiguë grave est la guéri-
convaincu qu'il a un risque, mais il doit dont l'examen et le bilan sont désespéré-
son, alors que lors de la maladie chro-
aussi être convaincu qu'on peut l'éviter ; ment négatifs ou à l'inverse d'un malade
nique ce ne peut être que l'amélioration
qui ne se plaint que d'un « excès de
■ il ne suffit pas d'estimer qu'il est voire la stabilisation ou la prévention
bonne santé » et dont le bilan biolo-
possible d'éviter les complications de la des rechutes ou un simple accompagne-
gique révèle la catastrophe métabolique.
maladie, encore doit-il être convaincu ment.
qu'il peut personnellement les éviter ; Changer la relation médecin / malade,
La relation médecin / malade dans la
■ enfin, pour adopter des change- c'est d'abord éviter les contre-attitudes
maladie aiguë grave se fait sur un mode
ments de comportement, il faut que le médicales. On peut distinguer les princi-
parent / enfant. On dit que le malade
patient ait le sentiment que celà en vaut pales contre-attitudes suivantes :
donne sa confiance au médecin qui lui
la peine. Une bonne estime de soi, des ■ la résignation, le médecin rappelle
offre en retour compétence et dévoue-
projets de vie, un support social en par- rituellement au malade les conseils hy- ment. Dans la maladie chronique, au
ticulier familial important, sont autant giéno-diététiques, sachant qu'il ne les contraire, la relation est idéalement de
d'atouts favorables. suit pas. Le malade sait d'ailleurs que le type adulte / adulte, le malade ayant des
médecin le sait et le médecin sait que le croyances et des connaissances et de-
Reste que le prix n'est pas le même à
malade sait… Par delà « l'hypocrisie re- vant acquérir des compétences. Lors de
payer pour tous, dépendant notamment
lationnelle » se noue un pacte tacite où la maladie aiguë grave le malade est
de la personnalité du patient.
l'un et l'autre attendent plus ou moins passif, alors qu'il est actif lors de la ma-
consciemment la survenue des compli- ladie chronique. L'observance est excel-
4°) accompagner les cations ; lente lors de la maladie aiguë grave, elle
étapes du changement ■ à l'inverse un certain nombre de n'a pas de sens lors de la maladie chro-
médecins, notamment spécialistes, nique et doit être remplacée par le
croyant motiver leur patient, utilisent la concept de difficultés à suivre le traite-
Les psychologues comportementa- dramatisation du type : « les cigarettes ment (DAST). Enfin, si l'angoisse est à
listes ont individualisé 5 étapes dans le ou les jambes » qui est certes parfois ef- calmer lors de la maladie aiguë, elle est ➥
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à transformer lors de la maladie chro- ni de banaliser en insistant sur le carac- ✱ ou bien à la maladie. A ce niveau,
nique ; il s'agit en effet de transformer tère rapide et indolore de l'injection au il est en effet démontré que l'observance
l'angoisse en force de motivation. Les stylo ; augmente parallèlement à la menace res-
moments d'angoisse sont les moments ✱ et bien sûr les événements de vie
sentie ainsi qu'à l'intensité des symp-
privilégiés pour les changements com- (décès d'un proche, naissance d'un petit tômes, et à l'inverse diminue avec la
portementaux et donc pour l'éducation enfant, départ à la retraite…) amenant le durée de l'affection. Elle est donc parti-
thérapeutique du patient. malade à décider lui même de change- culièrement faible dans les pathologies
ments comportementaux et à réclamer asymptomatiques et chroniques comme
Au cours du diabète de type 2, les
l'aide des soignants. le diabète de type 2 où le patient ne se
moments principaux d'angoisse sont les
sent pas vraiment malade, ni menacé
suivants :
Finalement, améliorer l'observance du dans l'immédiat.
✱ la découverte de la maladie, et l'an-
patient vis-à-vis de son traitement sup-
nonce du diagnostic ; ■ D'autres facteurs sont plus modu-
pose d'améliorer l'observance du méde-
✱ le dépistage des premières compli- cin vis-à-vis de son patient. Il s'agit en lables :
cations asymptomatiques (mais c'est quelque sorte d'une révolution culturelle ✱ la relation médecin-patient évidem-
déjà tard !); au cours de laquelle le médecin centré ment essentielle pour l’observance dans
✱ l'aggravation des complications et sur le malade et non sur la maladie doit la mesure où c'est de cette alliance thé-
l'apparition des premiers symptômes devenir un spécialiste du changement rapeutique et des négociations régulières
(c'est bien trop tard !); comportemental portant son intérêt plus entre soignant et soigné que va résulter
✱ l'heure de l'insuline, moment clé
sur les difficultés et les échecs que sur la qualité de l'adhésion du patient à son
qu'il ne s'agit ni de dramatiser en mena- les succès. traitement.
çant le malade des piqûres quotidiennes, André Grimaldi ✱ mais aussi, les caractéristiques du
traitement lui même qui jouent un rôle
majeur dans l'obtention et le maintien de
l'observance du patient. Il s'agit avant
SANTÉ - ÉDUCATION 2002 tout de :
- son efficacité, et ce d'autant plus
qu'elle est objectivement chiffrable
sur la glycémie, et même directe-
Comment faire avaler ment par le malade s'il pratique
l'auto contrôle ;
Observance (%)
tant plus régulièrement et de façon cor- 80 83,1
respondant à l'ordonnance : *
✱ que le médicament antidiabétique
60 65,8
lui est prescrit en une prise unique quo-
40
tidienne (l'adhésion diminue de 22 %
avec chaque augmentation d'une prise
par jour) ; 20
✱ qu'il ne prend qu'un seul traitement
0
antidiabétique oral ; 1 prise 2 prises 3 prises
✱ que son diabète est plus récent ;
✱ qu'il a moins d'autres traitements
concomitants ; Observance du schéma thérapeutique
✱ et que son niveau social est plus
* P <0,05 vs 1 prise/jour
élevé.
100
correctement pris (%)
prise la mieux respectée est celle du ✱ Enfin, le médecin doit pouvoir dis- difficulté, c'est que le médecin l'infir-
matin pour tous les types de traitement. poser de médicaments favorisant par mière et le pharmacien sont identifiés si
eux mêmes leur observance à long l'on peut dire à la qualité objective du
Quels enseignements tirer de ces terme, grâce d'une part à leur efficacité médicament tandis que le patient c'est
différentes études pour améliorer l'ob- et à leur bonne tolérance indispensables subjectivement qu'il l'entendra. Car si le
servance du diabétique de type 2 à son pour gagner la confiance du diabétique, médicament représente pour celui qui le
traitement : d'autre part à la simplification du prescrit le soin, pour le patient ce même
✱ Il faut avant tout prendre le temps schéma thérapeutique, diminuant le médicament représente certes souvent le
d'informer et d'éduquer ce patient qui nombre de prises quotidiennes. soin, mais aussi sa maladie, sa souf-
doit être intimement convaincu de la né- france et le manque. C'est dire l'ambiva-
Martine Tramoni - Neuilly-sur-Seine
cessité du traitement prescrit et en com- lence du rapport médecin patient et de
prendre les enjeux et les bénéfices. BIBLIOGRAPHIE chacun des deux au médicament.
✱ Il faut vite identifier les facteurs de 1) D.A. Sclar, L.M. Robison, T.L. Skaer, W.M.
Dickson, C.M. Kozma, C. E. Reeder. Sulfonylurea L'adhésion à la prise de médicament
risque de non observance : ils font est liée certes à la maladie et à sa per-
pharmacotherapy regimen adherence in a Medicaid
certes partie intégrante de la maladie population : influence of age, gender and race. The ception, à la connaissance de la valeur
diabétique, mais il importe aussi de sa- diabetes Educator, 1999, Vol 25, 4, 531-538
thérapeutique du médicament, à la
voir reconnaître le profil du patient non 2) A.D. Morris, G.M. Brennan, T.M. Maedonald,
crainte ou au vécu de ses effets secon-
P.T. Donnan. Population-based adherence to prescri-
observant, pour reprendre avec lui la né- bed medication in type 2 diabetes : a cause for daires, au désir de se soigner et de se
gociation vers l'alliance thérapeutique. concern. Diabetes 2000, 40 (suppl 1), A76
soigner avec ce médicament là, c'est à
✱ Dans le suivi à long terme de toute
3) F. Venturini, M.B. Nichol, J.C. Sung, K.L. Bai-
ley, M. Cody, J.S. McCombs. Compliance with sulfo-
dire à l'épistémologie médicale de cha-
maladie chronique, comme le diabète de nylureas in a health maintenance organization : a cun, et donc à la complexité humaine, à
type 2, il faut savoir régulièrement éva- pharmacy record-based study. The Annals of Pharma- la souffrance, au savoir, au manque, aux
cotherapy, 1999, 33, 281-288
luer l'observance et la remettre en cause représentations, à la blessure de la mala-
4) A.H. Paes, A. Bakker, C.J. Soe-Agnie. Impact of
devant une apparente résistance au trai- dosage frequency on patient compliance. Diabetes die, et à l'histoire de chacun, bref à ce
tement. Care, 1997 ; 20 : 1512-1517 qui nous spécifie comme humain et qui
est déplacé sur cet objet médicament, et
sur le rapport au médical.
l'art médical. Car parler de maladie et le médicament, la dépression, la notice, la maladie, et surtout de son propre sta-
de médicament c'est aussi parler de trau- médicament et image du corps, le médi- tut, de ses propres fonctions, de ses
matisme et de blessure, qui entraînent cament et la dépendance, etc. compétences.
chez beaucoup de patients un processus
de refoulement ou de déni. Ce n'est pas Tout malade possède en effet un sa- Il s'agira dans ce texte de prendre
de compréhension qu'il s'agit souvent voir sur son rapport au médical et au appui sur l'analyse de quelques pro-
mais de processus de protection psy- médicament, c'est ce savoir du malade blèmes relationnels afin de rendre per-
chique. Quel médecin n'a pas été qu'il est indispensable d'écouter, tout ceptibles aux lecteurs certains méca-
confronté à un confrère malade ignorant en entendant la valeur constructive ou nismes qui interviennent dans la relation
tout de sa maladie ? Il faut savoir que parfois destructrice pour chaque per- médecin / malade. Ceux-ci se dégagent
lorsque le médecin parle objectivement sonne et en acceptant de renoncer à d'une manière exemplaire lors de l'an-
de la maladie ou des médicaments c'est l'idéal publiquement proposé d'être en nonce d'un diagnostic d'une maladie
subjectivement que cela va être entendu. face d'un sujet purement rationnel, chronique. La difficulté ne tient pas spé-
transparent à lui-même, voulant son cifiquement à la façon de formuler une
Psychanalyste et médecin écoutant de bien, acceptant les théories médicales, annonce - comme beaucoup le suppo-
nombreux patients développer leurs n'étant pas modifié par le traumatisme sent -, mais en la façon de rester attentif
idées quant à leurs théories médicales et que représente parfois l'information aux réactions à cette annonce.
leurs décisions quant aux thérapeutiques, sur le médicament et la blessure de sa
je voudrais aborder plusieurs points. Les Le mode d'accueil des réactions du
maladie. Il s'agit pour nous tous d'en- "malade" détermine une valeur qualita-
théories ou fantasmes psychosomatiques, tendre la blessure que représente aussi
l'image du médicament chimique, être tive de la relation, et l'étude de diffé-
la maladie et donc le médicament et le rents modes d'accueil nous permettra de
cobaye, le sens de la maladie, les his- médecin lui-même. Il s'agit d'accepter
toires de l'enfance, la maladie naturelle, formuler certains paramètres repérables
la rationalité de l'irrationalité. dans une "clinique de la relation". Nous
les médicaments naturels ou chimiques,
la culpabilité de la maladie déplacée sur Catherine Breton tenterons également de cerner l'inci-
dence de cette relation dans "l'obser-
vance" ou la "non-observance" des pres-
criptions et des règles d'hygiène de vie
SANTÉ - ÉDUCATION 2002 pour des patients atteints de maladies
chroniques.
Éclairage psychanalytique
Être malade - avoir une maladie de la fonction soignante
avec des demandes d'analyse. Ce repé- Par ailleurs - et c'est là un aspect fon- nance en poche. De plus, chez le phar-
rage nécessite une attention de tout soi- damental de la subversion du modèle du macien déjà, ou chez lui, le malade ef-
gnant, quel que soit son statut, dès lors rapport au savoir opéré dans la psycha- fectue une sélection des prescriptions,
qu'il est mis en situation d'avoir à écou- nalyse -, l'expert ou le sachant, en psy- sur des critères dont la rationalité
ter une demande ou une plainte. chanalyse, est non pas le psychanalyste, échappe à tout le monde et, souvent,
mais l'analysant. C'est l'analysant qui l'envoi de la feuille de maladie à la sé-
Dans cet article, nous privilégierons instruit le procès de sa propre subjecti- curité sociale, à la mutuelle renforce
l'étude de la position médicale, qui vité, en tant que titulaire d'un savoir l'action thérapeutique du médecin.
constitue une sorte de paradigme de la insu qu'il s'agit de faire émerger. Cette L'évaluation de la "qualité du médecin"
relation soignante, au point que c'est en démarche n'est possible que si un psy- est tout à fait subjective, sans rapport
référence à cette position médicale que chanalyste "tient sa place". Il est essen- direct avec la qualité de son examen cli-
des psychiatres, des infirmiers certes, tiel pour cela qu'il ne se prenne ni pour nique, ou la pertinence de ses prescrip-
mais aussi des psychologues, des psy- un médecin ni pour un para-médical, ni tions.
chothérapeutes, tentent d'établir des dif- pour un psychologue, même s'il s'agit là
férences entre leurs disciplines. Ces dif- de formations antérieures à sa propre De cela, le médecin s'accommode
férences préservent ce paradigme en lui analyse, lorsque celle-ci s'est révélée di- plus ou moins, en regard d'une clientèle
donnant une dimension universelle. dactique. qui sélectionne des prestataires de ser-
C'est dans ce mouvement que certains vices, sur des critères indéterminés -
cherchent à inclure la psychanalyse Le savoir du psychanalyste le même si chacun construit à ce sujet les
comme un élément dans le vaste en- concerne au premier chef, puisqu'il a ap- "raisons" qui lui conviennent. Chaque
semble de pratiques de soins. Or, la psy- pris - contre lui même, contre sa propre médecin sait, en effet, qu'il ne se réduit
chanalyse propose un autre rapport au formation antérieure - que le savoir est pas à sa fonction thérapeutique, qu'il est
savoir que celui qui, jusque-là, se propo- inséparable d'enjeux insus, inconscients, "autre chose"; cet "autre chose" que
sait comme universel à travers le mo- et que différentes modalités soutiennent chaque médecin pressent est toutefois
dèle médical. Il s'agit là d'une sorte les enjeux de chacun, dans une singula- rarement élucidé, comme s'il fallait
d'évidence non questionnée. Que les rité qui échappe à tout projet de classifi- "n'en rien savoir". (Cette méconnais-
psychanalystes aient proposé un autre cations, y compris celles schématique- sance de bon aloi n'est d'ailleurs pas une
rapport au savoir et à la clinique a fait ment évoquées par la notion de struc- caractéristique exclusive des médecins :
scandale, et ce scandale dure toujours. tures. nous la retrouvons chez tout individu).
Dès lors que leur praxis s'est mise à Dans les situations de non-obser-
questionner le modèle médical, ils se
sont trouvés accusés de ne pas tenir une
Problèmes généraux de vance, le médecin se trouve dans une
l’observance position similaire celle qu'il rencontre
fonction "thérapeutique". Cet aspect mé- dans son rapport à l'hystérie :
rite d'être explicité d'un bref détour.
■ la maladie n'est pas bien répertoriée
Pour spécifier un type de relation dans la nomenclature médicale ;
Le rapport au savoir s'évalue dans susceptible de conduire à une "plus
des situations privilégiées que l'on re- ■ le/la malade n'est pas conforme à
grande observance", en particulier dans
trouve dans toutes les disciplines, médi- les maladies chroniques, il importe de ce qu'il/elle devrait être ;
cales ou non. Quelle que soit la disci- formuler aussi pourquoi cette obser- ■ le/la malade souhaite "guérir" d'une
pline, celle-ci s'appuie sur des références vance pose problème, non seulement au maladie, plus ou moins dramatique, et
et des façons d'en user ; cela constitue niveau de l'acte lui-même prendre ou ne pour laquelle il/elle trouve des "béné-
un "savoir", qui est thésaurisé et que des pas prendre un médicament à heure fixe, fices secondaires" auxquels il/elle ne
experts sont chargés de gérer, d'éprouver suivre ou ne pas suivre telle ou telle veut pas renoncer ;
et de transmettre. Le modèle médical prescription alimentaire ou d'hygiène de
instaure nécessairement entre le "sa- ■ …
vie - mais aussi en regard des représen-
chant"- quel que soit son statut et les tations de ces mises en actes. Ces repré- C'est que la "maladie hystérique" af-
étudiants ou les disciples d'une part, les sentations, qui ne sont pas toujours ra- fecte le corps du malade à travers les
" malades " d'autre part, une relation de tionnelles, sont inconscientes ; elles n'en mots qui ont une fonction de représenta-
pouvoir. Ceux qui ont du savoir en di- sont pas moins actives et déterminantes, tion symbolique (de signifiant), qui n'ont
vulguent une partie vers ceux qui en ont trouvant d'ailleurs écho chez le médecin rien à voir avec les mots qui ont une va-
moins ; les soignés bénéficient de cette qui, lorsqu'il se sent remis en cause, ne leur conceptuelle dans le champ du sa-
manne qui leur est offerte alors qu'ils sait plus toujours quelle attitude assu- voir que le médecin a acquis tout au
s'offrent eux-mêmes à être lus, déchif- mer. long de ses études.
frés, interprétés, du savoir d'un autre.
Si la préoccupation est moins forte En effet, chaque civilisation, chaque
Nul ne peut tout savoir, et, nécessai- pour les maladies qui ne sont pas quali- discipline construit une représentation
rement, le malade dépend du savoir de fiées de chroniques, c'est que l'obser- spécifique du corps. Or, l'efficacité re-
celui auquel il se confie. Cette pratique vance soit y est de moindre importance, marquable des constructions de la méde-
est tellement habituelle et générale qu'a soit peut être remise à plus tard. La di- cine occidentale ne gomme pas certaines
priori seul un "esprit tordu" s'aviserait mension psychologique de la relation conceptions populaires, poétiques ou re-
de la remettre en question. Or, c'est à médecin / malade n'est pas ignorée, ligieuses qui utilisent les mêmes termes
cette remise en question qu'œuvre la même si elle est difficilement repérée. pour exprimer des choses différentes.
psychanalyse, et c'est avec cet éclairage Un médecin sait en effet que certains Parfois les nominations d'organes, en
qu'il devient possible d'interroger autre- malades se sentent déjà mieux au dé- médecine, croisent des métaphores :
ment ce qui - jusqu'alors - allait de soi. cours d'une consultation, avec l'ordon- "avoir du cœur", "le droit du sang",
“Santé - Éducation 2002” - 01/02/2002 9
"avoir de l'estomac", par exemple. Il dans cette relation, et ces tentatives ne pondre, de la traiter, il se trouve que les
s'agit de registres différents, qui se su- se pratiquent pas toujours dans le malades ne respectent pas exactement
perposent, se nouent, sans que l'on calme… les prescriptions du médecin, qu'il
puisse abolir les effets de leur pouvoir ■ des effets générés sur le malade par
s'agisse de produits et/ou de règles d'hy-
évocateur. les attitudes et les réactions - conscientes giène de vie. Certains malades se plain-
ou inconscientes du médecin. dront de n'avoir pas été bien soignés, et
Il n'est pas possible d'ignorer ou d'ex- remettront en cause leur médecin. Ainsi,
clure d'autres conceptions que celles Un bref rappel épistémologique per- le médecin qui veut être ''efficace'' doit
proposées dans le champ médical, mettra de mieux caractériser la relation user de tout son art. C'est dire que, en
puisque ce sont justement ces concep- médecin / malade à travers la façon dont plus de son savoir (anatomie, physiolo-
tions autres qui soutiennent pour chaque chacun établit son rapport à l'autre. gie, pathologie… et thérapeutique) dont
humain ses valeurs de références, ses il dispose, le médecin doit user de
conceptions sur le bien et le mal, le vrai conviction, de persuasion.
et le faux, le juste et l'injuste, le beau et La relation médecin / ma-
le laid, et l'orientent dans la quête d'un lade Nous voyons bien là l'illustration
sens à donner aux questions sans ré- d'une autre dimension, qui est celle que
ponses. Cette diversité irréductible nour- nous avons connue à l'origine de la psy-
rit, entre autres, le débat entre médecins La relation médecin / malade est une chanalyse, quand elle se démarquait en-
sur des questions éthiques, la douleur, relation de “pouvoir” comme nous core à peine de la médecine : c'est en
l'avortement, la procréation médicale- l'avons déjà évoqué. L'exercice de ce termes d'influence et de suggestion que
ment assistée, le diagnostic antenatal, pouvoir est nécessaire dans les pratiques les phénomènes relationnels avec le pa-
etc. de soins. tient y étaient décryptés. Ainsi, la méde-
cine peut-elle être considérée comme
Or, "l'homme médecine", "l'homme une science bordée par la sorcellerie où
L'observance dans les de pouvoir", dans toutes les civilisa- elle retrouve ses origines.
tions, est un "sorcier". C'est lui qui est
maladies chroniques censé détenir les clés du savoir relatif au Le médecin se l'avoue parfois sous la
sens à donner aux symptômes et à la forme d'une dénégation, qui peut s'énon-
Le médecin ne cherche pas toujours à souffrance, ainsi qu'à la façon de la gué- cer sous une forme affirmative lui per-
approfondir les causes de non-obser- rir et de l'exorciser. Cette conception est mettant de maintenir insu ce savoir en
vance dans le cas des maladies chro- toujours vivante aujourd'hui, même en disant que "la médecine est un art" (2).
niques comme dans le diabète ou l'hy- France, comme l'ont "mis à jour" de
nombreux ethnologues, en particulier Toutefois, il semble nécessaire de
pertension. Quand il s'en préoccupe, il souligner que si la médecine aspire à la
se sent remis en cause, comme s'il se Jeanne Favret-Saada, dont la thèse reste
toujours d'actualité (1). science, c'est parce que son objet n'est
sentait, en quelque sorte, coupable de pas le malade, mais la maladie (3)*.
non-influence sur personne en danger. Dans la sorcellerie, la maladie
concerne non seulement un individu, qui C'est dans cet art que le médecin tra-
Dans l'énoncé précédent nous sem- duit sa compétence, conformément à
blent résider certaines clés essentielles à est dit touché par le sort, mais aussi la
communauté à laquelle il appartient et l'enseignement de ses maîtres, qu'il a ac-
la compréhension du problème de la quis au cours de longs efforts qui lui ont
non-observance : qui participe à la fois à cette souffrance
individuelle et aux rituels de conjuration donné le titre et le statut de médecin.
■ du côté du malade : la façon dont il
du mal. Ce statut n'est pas exclusivement et
tente de s'attribuer des catégories de
l"'être"(un homme, une femme, un Le savoir du médecin diffère du sa- spécifiquement référé à la pratique d'un
Bourguignon, etc.), sans jamais y parve- voir du sorcier dans le sens où le méde- acte médical... Il situe un homme (ou
nir, au point d'avoir besoin de spécifier cin représente la médecine dont il est un une femme) : le médecin dans une posi-
ces catégories (un vrai homme, une rejeton élaboré dans un corpus et une tion sociale particulière, même si au-
vraie femme, etc.), sans que la catégorie histoire des sciences qui vise à distin- jourd'hui cette position semble parfois
du vrai n'épuise non plus le manque à guer, depuis Descartes, le sujet de l'objet dévalorisée par rapport à un temps passé
être. En effet, la caractéristique de l'être de son savoir. plus ou moins mythique : quelque chose
est justement de ne pouvoir se dire, de "ÊTRE" médecin semble perdu.
comme chacun peut l'éprouver plus ou Le médecin décode la souffrance par
Nous allons examiner ce qu'il en est
moins douloureusement pour soi-même ; une grille de lecture plaquée sur la pa-
du côté du patient. Il est demandeur de
role du patient qui lui permet d'identifier
■ du côté du médecin : la façon dont soins, de remèdes à une souffrance. Il se
des signes, à spécifier à l'aide de ques-
il se représente lui-même, à travers la qualifie de "malade", et le médecin aura
tions et d'examens complémentaires
valeur accordée au mot "médecin", va- à évaluer la maladie :
dont la fonction échappe au savoir du
leur subjective souvent déterminante patient. Le patient est ainsi, en quelque ■ la diagnostiquer, la nommer, la si-
dans le choix de cette profession qui,
plus que toute autre, hormis celle de
sorte, lu, dans un système de références tuer dans le cadre de son savoir ; ➥
qui lui échappe totalement.
prêtre, confère de "l'être" supposé à * Aborder la question du malade consisterait à
celui qui en a le titre. Or, la non-com- Pourtant quelque chose, nous l'avons savoir manifester une attention envers des singula-
pliance fonctionne comme une remise vu, résiste dans la maladie, dans le sens rités. Or, il est aisé de constater que les promo-
teurs d'actions collectives, comme les associations
en cause de cet "être-médecin", ce qui où les malades "sont de mauvaise com- savantes ou des laboratoires pharmaceutiques, en-
provoque souvent des tentatives de récu- position". Quelle que soit la façon visagent paradoxalement de construire des typolo-
pération de ce qui semble "être perdu" d'identifier la souffrance, la façon d'y ré- gies qui nous reconduisent à la case départ.
10 “Santé - Éducation 2002” - 01/02/2002
malade qui ne peut dire avec précision Il s'agirait en particulier d'illustrer prescriptions ou de règles d'hygiène de
(mais qui le peut ?) les difficultés qu'il combien il est nécessaire de différencier vie. Il importe à ce moment que ce per-
ressent pour : implication d'un malade dans un projet sonnel soignant puisse dénouer dans son
de traitement, culpabilisation à travers statut et dans son rôle les pièges tendus
✱ intégrer sa maladie dans sa vie per-
des menaces, qui, même si elles sont par les auxiliaires être et avoir. Dès lors
sonnelle, professionnelle ;
formulées pour "le plus grand bien" du le "malade" peut s'attacher à un "lieu" -
✱ tirer des conséquences ; malade, n'en restent pas moins des me- celui où il rencontre un interlocuteur
✱ faire des projets. naces. L'histoire nous enseigne à ce privilégié - qui constitue une sorte de
sujet que c'est toujours au nom "du plus référence qu'il transporte avec lui et qui
Une amélioration du mode relationnel
grand bien" que s'est commis le pire. lui donne une sorte de carte d'identité
instauré fidélise souvent la clientèle du
Réaliser une observance parfaite, ou subjective, une appartenance et un sta-
médecin.
"simplement" n'importe quel idéal, n'in- tut. C'est particulièrement important
Ce mode relationnel ne tient pas ex- téresse pas le psychanalyste, ni le laïc pour certains malades chroniques lors de
clusivement compte de l'information à en médecine. Le plus grand bien est in- perturbations émotionnelles. La relation
dire ou à entendre, mais nécessite une accessible. Le moins pire leur suffit ! établie avec le malade met en jeu des
prise de conscience… de quoi ? De la processus affectifs qui tressent des liens,
Une approche différente du para- mais ne sont toutefois pas à confondre
demande de reconnaissance qui accom-
digme de la relation médecin / malade avec une relation transférentielle, même
pagne toute parole, demande de recon-
permet de dégager comment - à travers si cela peut en constituer l'amorce.
naissance insue et toujours présente,
la prise en compte dans chaque cas de
aussi bien dans la plainte du patient que Jean Szpirko - Paris
ce que dit le malade, du vocabulaire
dans la façon dont le médecin énonce ses
qu'il utilise - une attention peut relancer,
propres recommandations. Insistons : la Cet article a été publié dans “Santé
provisoirement, une observance, jus-
façon dont se manifeste le médecin, ou le Mentale” numéro 38 de mai 1999.
qu'au prochain rendez-vous. Il s'agit,
personnel soignant impliqué, inclut éga-
dans chaque entretien, non pas exclusi-
lement une demande de reconnaissance Bibliographie
vement de prescrire, de conseiller ou
qui éclate parfois de sa démesure, sous
d'écouter passivement, mais aussi de se 1. Jeanne FAVRET-SAADA Les mots, les sorts, la
couvert de rationalisations plus ou moins
situer comme témoin attentif à un dis- mort - Paris, Gallimard 1977
bien élaborées. Ce mode relationnel im-
cours singulier qui a besoin d'être ponc- 2. Jean SZPIRKO "A la croisée des champs" in
plique, pour le médecin, d'établir une re- L'analyse, l'analyste - Paris, Ed Solin 1991
tué dans le temps par d'autres rendez-
lation avec le malade, renonçant pour un 3. Jean CLAVREUL, L'ordre médical - Paris, Le
vous. Un gain sur l'observance peut être Seuil 1978
temps au savoir médical pour permettre
escompté, toujours sans garanties. 4. Sigmund FREUD, 1938. Résultats, idées, pro-
au malade de dire, dans des termes à lui, blèmes II - PUF 1985, p 287, et 1925 - Quelques
parfois imprévus, voire inappropriés, ce Cette démarche de suivi du malade conséquences psychiques de la différence anatomique
que personne ne peut dire à sa place. permet aussi que les para-médicaux entre les sexes, in la vie sexuelle, p. 123, chapitre
IX.PUF 1969
exercent au mieux leurs propres compé- 5. Emile BENVENISTE, Problèmes de linguistique
Il ne s'agit pas de substituer à une
tences, leurs propres fonctions. En effet, générale I chapitre XVI p 193-195 - Gallimard
position de médecin une position de
un personnel soignant peut également 6. Ces attitudes sont à distinguer de celles propo-
psychanalyste, mais de permettre au mé- sées par Elisabeth KUBLER ROSS pour l'annonce de
effectuer un accompagnement, sans
decin, dans le cadre de sa fonction, de la mort.
même qu'il soit nécessaire d'évoquer une 7. Jacques LACAN, Le séminaire, Encore - Livre
tenir compte d'une sorte d'inattendu, de
éventuelle nécessité d'observance de XX - Ed du Seuil 1975
hors nomenclature médicale, qu'exprime
le malade. Ce discours, même parsemé
de questions précises, comporte une
forte demande de reconnaissance, sans
forcément qu'il y ait des réponses à pro- SANTÉ - ÉDUCATION 2002
duire : il suffit souvent de témoigner de
l'attention.
Le problème est que les médecins ne
sont pas familiarisés avec cette dé- L’adolescent et l’observance
marche, pas plus que les délégués médi-
caux formés par les laboratoires phar-
maceutiques soit à argumenter en fonc-
au traitement
tion d'attentes statistiquement identi-
fiées, soit à manier des techniques de Les travaux sur l'observance théra-
ventes qui s'appuient sur des simulacres L'observance, autrement nommée peutique des adolescents concernent
d'écoute, puisqu'il s'agit uniquement de compliance, adhérence ou fidélité principalement les traitements des mala-
repérer des critères déjà répertoriés. thérapeutique, est définie comme “le dies chroniques, la contraception orale
degré de concordance entre le com- et les rendez-vous de consultation. L'ob-
Il s'agirait donc de sensibiliser le mé-
portement d'un individu (en termes servance est un domaine privilégié d'ex-
decin à ce que peut être un entretien
de prise médicamenteuse, suivi de ré- pression des malentendus possibles dans
non stéréotypé, qui prend en compte la
gime ou changements de style de vie) la relation de soins. Nous n'aborderons
singularité et l'affectivité des interlocu-
et la prescription médicale” (1). Elle ici que les aspects médicaux somatiques
teurs, sans pour autant que soit exclue
a fait l'objet de très nombreuses de la question, mais rappelons pour mé-
une intention précise : favoriser l'obser-
études auprès des patients adultes. moire que l'observance avec le "psy"
vance puisque c'est son métier.
“Santé - Éducation 2002” - 01/02/2002 13
événements le concernant et qu'à l'in- le cadre du diabète, ceci a été bien mon- cents sont capables et même soulagés
verse, il soit d'autant moins observant tré chez de jeunes adolescents (12). d'admettre qu'il leur arrive de ne pas
qu'il se perçoit comme les subissant pas- Mais là encore les choses ne sont pas être régulièrement fidèles à leur traite-
sivement. Pourtant, les nombreuses simples. Par exemple, la perception du ment. Engager ainsi la discussion sur
études sur la direction interne ou externe degré de vulnérabilité personnelle ou de l'observance, en prenant soin de bien
du lieu de contrôle (locus of control) et gravité de la maladie peut s'exprimer de distinguer chaque aspect du traitement,
l'observance à l'adolescence ne permet- façon contraire en fonction de son inten- autorise l'adolescent à lui-même en par-
tent pas de confirmer cette hypothèse. sité : une peur ou un sentiment de me- ler et permet d'aborder les éventuelles
Enfin, on suppose volontiers qu'un ado- nace excessifs peuvent très bien entraî- difficultés ou résistances exprimées à ce
lescent devrait être d'autant plus obser- ner une inhibition plutôt qu'une stimula- niveau. Pour chaque cas, il importe alors
vant qu'il est mieux informé de sa mala- tion à l'observance ; quant à la percep- de procéder à une analyse qui, avec le
die ou du rationnel de son traitement. tion de l'efficacité du traitement, elle ap- concours de l'adolescent lui-même, per-
Là encore, les résultats des études dans paraît indépendante de l'observance dans mette de dégager au mieux les facteurs
ce domaine sont loin d'être univoques. certaines études auprès de jeunes at- spécifiquement en cause (14).
teints d'hémopathie maligne ou d'épilep-
Facteurs familiaux sie. Les recherches faisant appel aux Cela étant, il est illusoire de croire
modèles théoriques de prédiction du qu'une explication rationnelle et scienti-
Le rôle de la famille est important
comportement permettront peut-être de fique de la maladie, de ses symptômes
dans l'équilibre affectif et les comporte-
mieux cerner, parmi ces facteurs subjec- et éventuelles complications, puisse suf-
ments en général des enfants et des ado-
tifs, ceux réellement “prédictifs” de l'ob- fire à garantir une bonne observance.
lescents malades (10, 11). Un certain
servance (13). Certains adolescents savent mais ne
nombre de qualités familiales sont clai-
“veulent pas savoir”. Les tricheries avec
rement des facteurs favorisant l'obser-
Facteurs liés à la relation médicale le traitement ont alors valeur de com-
vance : expectative positive des parents
promis protecteur entre une connais-
quant aux résultats du traitement ; fa- Il est souvent tenu pour acquis que la sance peut-être trop lourde à supporter
mille soutenante ; rappels par les pa- qualité de la relation médecin-malade et l'ignorance, dans une tentative d'évite-
rents des prises médicamenteuses. A est déterminante pour la qualité de l'ob- ment de la dépendance. L'observance,
contrario, nombreux sont les travaux servance. Ne nous en déplaise, la réalité qui sous-tend l'acceptation du “rôle de
ayant montré l'influence négative des n'est certainement pas aussi simple malade” ou la pérennisation de celui
dysfonctions familiales (interactions, compte-tenu de la quantité des autres d'“enfant malade”, peut être douloureu-
communication, cohésion) sur l'obser- facteurs en jeu (voir supra). Il reste que sement vécue comme la marque d'une
vance. Quant à l'anxiété des parents, son les facteurs liés à la relation de soins dépendance à la maladie, aux traite-
impact sur l'observance de l'adolescent sont d'autant plus intéressants qu'ils per- ments, aux médecins, aux parents, etc.
semble pouvoir s'exercer dans des direc- mettent d'envisager des stratégies direc-
tions contraires selon le contexte. tement utilisables par le médecin pour Une mauvaise observance, dans ses
optimiser l'observance. formes mineures, correspond bien sou-
Facteurs liés à la maladie et au
vent à une tentative d'échapper au poids
traitement De fait, plusieurs études ont bien
de la réalité quotidienne de la maladie.
montré que l'observance des adolescents
Les études ayant cherché une relation Cette attitude, certes maladroite et non
aux médicaments et plus encore aux
entre le caractère plus ou moins ancien dénuée de sentiments de culpabilité,
rendez-vous est très influencée par l'in-
du début de la maladie ont abouti à des peut simplement inaugurer le mouve-
dice de satisfaction vis à vis de l'accueil,
résultats très contradictoires. Il en est de ment plus général d'adolescence. D'un
des soins et de la communication dans
même pour le degré de sévérité de la certain point de vue, on peut même
la relation médicale. Enfin, toutes les
maladie. considérer qu'elle participe de la santé
études concordent pour conclure qu'une
du développement.
En revanche, si le nombre des médi- meilleure supervision médicale (rendez-
caments à prendre n'influe pas sur l'ob- vous plus rapprochés, temps et attention Toutes différentes sont les situations
servance, celle-ci est très corrélée au accordés en consultation, etc.) améliore de non-observance avérée. Elles ne sont
nombre de prises par jour et se péjore l'observance des adolescents, du moins jamais fortuites et traduisent en général
dès lors que ce nombre dépasse deux. sur le court terme. un climat de profonde insécurité, où se
Quant aux effets secondaires des traite- mêlent angoisses, révolte, déni mais
ments, leur interférence avec l'obser- aussi sentiments plus ou moins forts de
vance n'apparaît pas du tout constante. L'observance en pratique culpabilité. L'important est de savoir en
Ainsi, un impact négatif et dramatique clinique décoder la véritable signification, qui
des effets secondaires a pu être noté au- peut recouvrir rejets de tous ordres, sen-
près d'adolescents transplantés sous cor- timents d'injustice, préoccupations liées
ticothérapie, mais pas chez d'autres ado- Qu'elle pose problème ou non, l'ob- à l'image corporelle ou a la sexualité,
lescents transplantés ou cancéreux. servance invite à réfléchir sur ce qu'elle idées suicidaires etc. A l'extrême, ces
peut traduire en termes de qualité de vie comportements peuvent être l'expression
Facteurs liés aux perceptions de la
de l'adolescent malade et sur ce à quoi de véritables attaques, conséquence de
maladie et du traitement
elle nous confronte en termes de qualité la haine et de la violence dirigées contre
Les perceptions personnelles et les de l'acte de soins. L'idéal serait donc la partie malade du corps. Elles s'inscri-
systèmes de croyance influencent par- qu'elle puisse être abordée sereinement, vent alors dans une problématique plus
fois beaucoup plus les comportements comme une affaire familière et partagée généralement dépressive. Dans ces cas,
que la réalité objective ou les impératifs entre le médecin, l'adolescent, et ses pa- l'aide d'une équipe médicale ou d'un
rationnels d'une situation donnée. Dans rents le cas échéant. Beaucoup d'adoles- psychothérapeute entraînés à la méde-
“Santé - Éducation 2002” - 01/02/2002 15
cine des adolescents peut être précieuse En pratique et pour terminer, rajou- concordance in compliance with cancer chemotherapy.
Adolescence 1988 ; 23 : 599-611
(15, 16). tons qu'indépendamment de la qualité
8. Michaud PA, Frappier JY, Pless IB : Compliance
de l'observance, la capacité du méde- d'adolescents souffrant d'une maladie chronique. Arch
Quoi qu'il en soit, il importe certaine- cin à en discuter avec l'adolescent est Fr Pediatr 1991 ; 48 : 329-36
ment de chercher le traitement le plus un très bon témoin de la “santé” de la 9. Johnson SB, Freund A, Silverstein J, Apperson
simple et le plus flexible, compte tenu relation de soin à cet âge. Hansen C, Malone J. Adherence-health status rela-
des capacités d'adaptation du moment tionships in childhood diabetes. Health Psychology
1990 ; 9 (5) : 606-31
du patient, car vouloir le mieux a tout Patick Alvin - Bicêtre
10. Wolman C, Resnick MD, Harris LJ, Blum RW.
prix s'avère parfois l'ennemi du bien. BIBLIOGRAPHIE Emotional well-being among adolescents with and wi-
S'il faut absolument rester ferme sur ce 1. Haynes RB, Taylor DW, Sackett DL. Compliance thout chronic conditions. J Adolesc Health 1994 ; 15 :
in health care. Baltimore, Maryland : The Johns Hop- 199-204
qui est indispensable, il ne faut surtout
kins University Press, 1979 11. Odièvre M. Les fratries d'enfants atteints de ma-
pas, hors circonstances exceptionnelles, 2. Alvin P, Marcelli D. La question de l'observance ladie chronique. Arch Pédiatr 1999 ; 6 : 1149-51
user de la manipulation, la menace ou la à l'adolescence. In : Alvin P, Marcelli D. Médecine de 12. Castro D. Aspects psychologiques de la com-
peur. Celles-ci, du fait même de leur in- l'adolescent. Paris, Masson 2000 : 272-9 pliance au traitement chez l'enfant diabétique insuli-
3. Alvin P. La non-compliance thérapeutique : une nodépendant. Ann Pediatr (Paris) 1991 ; 38 : 455-8
tention comminatoire, ont toutes les
vérité pénible à dire ou difficile à entendre ? Arch Pé- 13. Frappier JY, Otis J, Alvin P, Campos Z. Deter-
chances de renforcer l'image négative diatr 1997 ; 4 ; 395-7 minants of medication compliance in adolescents with
que l'adolescent a déjà de lui-même et 4. Wright EC. Non-compliance or how many aunts chronic diseases. J Adoles Health 1995 ; 16 : 161
de détériorer la relation thérapeutique has Mathilda ? Lancet 1993 ; 342 : 909-13 14. Koocher GP, McGrath Ml, Gudas LJ. Typolo-
5. Cromer BA, Tarnowski KJ. Non compliance in gies of nonadherence in cystic fibrosis. Dev Behav
ainsi que l'observance. En revanche, un Pediatr 1990 ; 11 : 353-8
adolescents : a review. J Dev Behav Pediatr 1989 ;
regain de temps et d'attention de la part 10 : 207-15 15. Marcelli D, Alvin P. Submission or cheating in
du médecin comme des soignants, une 6. Alvin P, Rey C, Frappier JY ; Compliance théra- chronic illness in adolescence : the therapist's stand.
attitude dénuée de tout jugement, des peutique chez l'adolescent malade chronique. Arch Int J Adolesc Health 1994 ; 7 : 65-71
Pédiatr 1995 ; 2 : 874-82 16. Oppenheim D. Comment aborder les problèmes
rendez-vous plus rapprochés et la garan- 7. Tebbi CK, Richards ME, Cummings KM, Zevon de non-compliance en pédiatrie. Neuropsychiatrie En-
tie de la confidentialité sont tous suscep- MA, Mallon JC. The role of parent - adolescent fance Adolesc 1996 ; 44 (6-7) : 248-57
tibles de favoriser une meilleure obser-
vance.
En pratique, ceci ne peut être vérita- Paris, 30 mars-4 avril 1999. In Diabetes & Metabo-
blement mené à bien par les soignants lism 1999, vol 25, suppl 1, XXXIV (066) SANTÉ - ÉDUCATION
• Tubiana-Rufi N. Le diabète insulinoprive à l'ado-
que s'ils ont compris, outre l'impératif lescence. Médecine de l'Adolescent. Alvin P et Mar- 2002
incontournable de leurs compétences celli D. Masson Ed. 2000 ; p 167-71
techniques dans le domaine de la mala- • Du Pasquier-Fediaevsky L, Tubiana-Rufi N. et le
groupe collaboratif PEDIAB. Discordance between
die, le caractère primordial d'une ap- physician and adolescent perceptions of adherence to
proche centrée sur la personne.
L'adolescence ne se réduit pas à une cent diabétique peut-il faire le travail Une enquête a été menée avec DIA-
“fin d'évolution” de l’enfance Elle est psychique propre à cette étape de la MENORD sur le passage des enfants
une crise organisatrice. C'est pourquoi, à vie ? Il doit en même temps faire ce tra- vers le suivi d'adultes.
l’adolescence, l’individu doit faire un vail nécessaire pour devenir adulte, et la
certain travail psychique indispensable, maladie et son traitement lui imposent Une réflexion menée à partir de la
appelé le travail de “subjectivation”. Il une emprise qui le ramène à la dépen- formation a servi de base à la démarche
s'agit d’intégrer dans son psychisme dance et à la soumission. de création de formations, sous l'égide
deux éléments : devenir le sujet de son de l'AJD, pour les soignants des services
corps, et de sa propre pensée. L'adoles- Cette maladie chronique implique une de pédiatrie de la région.
cent doit se reconnaître dans son nou- dépendance immense pour le corps, et
veau corps pubère, et s'approprier ses elle a aussi une emprise sur le fonction- A présent, les groupes pédagogie -
propres pensées. nement psychique : l'obligation de pen- formation, éducation nutritionnelle,
ser au diabète est pluriquotidienne. pompe (élaboration d'un programme
L'adolescence est aussi un temps de d'éducation avec les soignants de 9 ser-
remise en jeu de l'Œdipe, avec un Comment l’adolescent diabétique vices et 3 prestataires), diabétiques en
double versant, incestueux et parricide. peut-il négocier cet antagonisme entre difficulté, poursuivent et présentent leur
l'emprise de la maladie et son besoin activité lors de la réunion régionale an-
A cette étape de la vie, un travail de d'autonomie ? Il va négocier en faisant nuelle ouverte à tous les soignants.
séparation attend les adolescents. Ils un compromis. Ce compromis va se tra-
doivent renoncer aux liens infantiles duire par une attaque du cadre de soins De nouveaux thèmes vont être ap-
avec les parents, mais ces liens leur pro- que le diabétologue tente de mettre en profondis : utilisation des ressources
curaient une certaine sécurité dans l’en- place. propres à la famille, éducation du pa-
fance. tient à risque podologique, activité phy-
Ils essaient de se défaire de la mala- sique.
Ils doivent négocier la perte de cette die, d'être indépendants et autonomes.
sécurité, tout en modifiant leur relation Ils aménagent cette relation de dépen- Une dynamique régionale meilleure
aux parents. La puberté est donc une pé- dance, en mettant en place toute sorte sera assurée par un relais trimestriel par
riode qui apporte un tumulte et une de défenses qui malmènent la relation un correspondant dans chaque site, des
désorganisation dont l’adolescent doit médecin-malade activités de chaque groupe, et par une
nécessairement faire l’expérience pour
réflexion sur le développement de l'édu-
pouvoir ensuite se réorganiser et dépas- Ces attaques du cadre sont à com- cation thérapeutique dans la Région.
ser ce cap-là. prendre paradoxalement comme une ten-
tative de survie, c'est en ce sens que le
Tout ce travail psychique d'adoles- C. Delatre (1), M. Levisse (2),
médecin doit en tenir compte dans la re-
cence vise à la prise d'autonomie., à sor- C. Stuckens (3)
lation qu'il a avec son patient adoles-
tir de la dépendance infantile. Face à (1) Maison du Diabète, Marcq-en-Baroeul ; (2)
cent.
toutes les contraintes pluriquotidiennes Rediab, Boulogne-sur-Mer ;
qui encadrent sa vie, comment l’adoles- Christiane Guitard-Munnich - Paris (3) Service de Pédiatrie, CHRU, Lille.
“Santé - Éducation 2002” - 01/02/2002 17
DESG de Langue Française - Diabetes Éducation Study Group O2 Adaptation aux patients diabétiques de
langue et de culture arabe d’un programme
d’éducation thérapeutique en groupe et en
hospitalisation
S.Lemozy-Cadroy, O.Tazi, F.Ayat, A.M.Volatier, F.Lorenzini, H.Hanaire-Brou-
tin. - Service de Diabétologie Maladies Métaboliques-Nutrition, CHU Ran-
gueil, Toulouse.
Au cours de l'éducation thérapeutique, l'acquisition de compétences par le
patient se fait dans un contexte social et culturel qui constitue son cadre de
référence. Nous accueillons de façon hebdomadaire un groupe de patients
diabétiques pour un programme d'éducation thérapeutique structuré, au
cours d'une hospitalisation de 5 jours.
Dans le but d'en améliorer la pertinence auprès de patients de langue et de
culture arabes, nous avons adapté ce programme de manière spécifique,
avec association quotidienne et continue à l'équipe multiprofessionnelle d'un
traducteur et médiateur interculturel.
De 1995 à 2000, 52 patients, dont 69 % de femmes, ont bénéficié de ce
programme (âge 56±9 ans, ancienneté du diabète 10±7 ans). Ces patients
avaient en majorité un diabète de type 2 (92 %), présentaient un surpoids
(IMC 28±5), et un déséquilibre glycémique (HbAlc 8,8±1,6 %). La majorité
des patients étaient traités par insuline (63 % à l'entrée, 69 % à la sortie),
éventuellement associée aux anti-diabétiques oraux (13 % à l'entrée, 25 % à
la sortie).
Nous avons évalué l'autonomie de ces patients et de leur entourage à
l'égard de l'autosurveillance glycémique (ASG) et des injections d'insuline,
SANTÉ - ÉDUCATION en cours d'hospitalisation, et trois mois plus tard pour les patients suivis
dans notre service. Vis à vis de l'ASG, une majorité de patients (62 %) est
autonome à l'entrée, au prix de l'aide d'un proche pour 53 % d'entre eux
Paris 2002 (essentiellement pour la tenue d'un carnet approprié). L'acquisition de l'auto-
nomie s'est faite pendant l'hospitalisation pour 33 % des patients, avec
1er février 2002 l'aide d'un proche dans 1/3 des cas. Moyennant l'aide de l'entourage,
64 % des patients sont autonomes à l'entrée à l'égard de l'injection d'insu-
Résumés des communications line, et 22 % le sont devenus en hospitalisation. En adjoignant la coopéra-
tion d'un proche (dans 57 % des cas pour l'ASG et dans 25 % des cas pour
l'injection d'insuline), l'autonomie est ainsi obtenue chez 95 % des patients
O1 Pour les soignants : un nouveau site internet pour l'ASG, et 90 % pour l'injection d'insuline. Sur ces 52 patients, 20 ont
pour l’éducation nutritionnelle des personnes été revus à 3 mois : le niveau d'autonomie acquis est maintenu, pour l'auto-
diabétiques d’origine étrangère vivant en surveillance glycémique et les injections d'insuline. Quoique encore élevée,
France l'hémoglobine glyquée est améliorée (8±1,5 % vs 8,8±1,6 %, p < 0,01,
N.Baclet, D.Romand, M.Bardeau, C.Bastien, V.Bazzaoui, E.Bernard, C.Flullliall, n = 20).
F.Gamoull, Y.Gucrilleau, N.Massebœuf D.Nouet, A.Rigoir, M.C.Sage, A.Siaud, L'adaptation d'un programme d'éducation thérapeutique pour patients de
F.Strnad, Groupe NOVODIET, 75010 Paris. langue et de culture arabes a permis une acquisition d'autonomie dans la
Un des motifs d'échec de la prise en charge des personnes diabétiques étran- grande majorité des cas et souligne la pertinence de l'association de l'en-
gères vivant en France est lié à une connaissance insuffisante de leurs habi- tourage proche à la démarche d'éducation. Parallèlement, une amélioration
tudes alimentaires. Les outils facilement disponibles reposent principalement sur de l'équilibre glycémique est observée à 3 mois.
les tables de composition d'aliments. Mieux connaître la culture alimentaire des
populations migrantes faciliterait la communication et l'efficacité des conseils
nutritionnels. O3 Évaluation de l’acte d’éducation : proposition
Le but de notre travail, était de créer un outil accessible par Internet par tous d’une méthodologie d’observation des pra-
les diététiciens et le personnel soignant comprenant par région du globe : les tiques des soignants par la méthode de l’ana-
données sur le diabète dans la région concernée, les familles d'aliments ty- lyse du contenu
piques et la table de composition alimentaire, les modes de préparation, les re- P.Gross, C.Renard, M.C.Martins, D.Inghels, C.Gautier, N.Prieur - F.Bracq-
cettes et les menus, la structure et les horaires des repas, les coutumes et les Retourné, M.Lepeut - CETRADIMN - CH de Roubaix - 59056 Roubaix
fêtes, l’évolution des habitudes alimentaires en France, les principales caracté- Cedex 1
ristiques à prendre en compte pour l'éducation, les lieux d'approvisionnement
Position du problème - But de l'étude - En accord avec le consensus de To-
et une bibliographie.
ronto notre équipe a orienté sa pratique de l'éducation sur "l'approche
Un groupe de 16 diététiciens d'Ile de France s'est reparti en 8 binômes, cha- centrée sur le patient", particulièrement adaptée aux patients se situant aux
cun responsable d'une région du globe : Afrique, Asie, Inde, Maghreb, Pays premières étape de la spirale du changement de Prochaska (précontempla-
Européens de l'Est, Pays Méditerranéens Européens, Guyane, Moyen-Orient. tion, contemplation et préparation).
Les sources d'informations ont été : les ambassades, les livres de recettes étran-
Après 5 ans d'une pratique intuitive, nous avons désiré objectiver le dérou-
gers, l'OMS, Migration Santé, les livres touristiques et des enquêtes auprès des
lement de l'acte éducatif dans le but :
familles. Afin de tester cet outil nous avons inclus dans le site une page contact
contenant l'identité et les commentaires des utilisateurs. Après une phase pilote 1°) de produire une formalisation de l'acte éducatif au cours de l'interac-
d'un an nous compterons le nombre de connections et analyserons les commen- tion soignant - soigné menée selon le modèle de "l'approche centrée sur le
taires des utilisateurs afin d'améliorer l'outil. patient";
En conclusion, nous avons créé un outil moderne et innovant afin de faciliter la 2°) de permettre aux acteurs de mieux approcher le sens de leur pratique
prise en charge nutritionnelle des patients diabétiques d'origine étrangère vi- et de permettre une transformation de représentations que les acteurs ont
vant en France. Cet outil reste à évaluer. de leur travail d'éducation du patient ➥
18 “Santé - Éducation 2002” - 01/02/2002
P7 Faisabilité des cartes conceptuelles chez l’en- P9 Cycle de formation pour les jeunes diabétiques
fant diabétique et intérêt pour l’éducation D.Martin, I.Jourdon, M.J.Bizouarne, D.Nouet, C.Legrand, M.Vera, M.B.Ma-
thérapeutique dras, R.Gagnayre, J.Iguenane, J.J.Robert - Centre de Formation au Traite-
C.Pinosa*, C.Marchand*, N.Tubiana-Rufi**, B.Kakou**, R.Gagnayre*, ment à Domicile de l'Enfant (CFTDE), Hôpital Necker-Enfants Malades,
JF.d'Ivernois*. * Laboratoire de Pédagogie de la Santé, UPRES. JE 2137, UFR SMBH Léo- 75015 Paris
nard de Vinci, Bobigny. ** Service Endocrinologie et Diabétologie. Hôp. Robert Debré Paris Chaque année, le CETDE organise des groupes de formation pour les jeunes
Cette étude explore d'une part la faisabilité de l'utilisation des cartes diabétiques. Les objectifs sont de leur donner des connaissances de base
conceptuelles auprès d'un public d'enfants diabétiques et d'autre part l'inté- adaptées à l'âge et de les aider à faire face aux problèmes posés par le
rêt de cette technique pour faciliter leur apprentissage. Une carte concep- diabète, par la dynamique de groupe. Parallèlement, le même travail est ef-
tuelle est une représentation graphique de l'organisation des connaissances fectué avec les parents. Trois groupes d'âge différents sont organisés : 5-6
d'une personne à partir d'un concept donné. Élaborée au cours d'un entre- ans, 8-9 ans et 12-13 ans. pour chaque groupe, 6 à 8 enfants sont sélec-
tien, elle consiste, à aider l'apprenant à expliciter ses connaissances, ses re- tionnés à partir de la liste des patients régulièrement suivis dans l'Unité de
présentations, son vécu (verbatim). L’intérêt de cette technique dans l’éduca- Diabétologie. Les réunions ont lieu le mercredi, (le matin pour les 5-6 ans et
tion thérapeutique des adultes ayant été récemment démontré, il était impor- les 89 ans, toute la journée pour les 12-13 ans. Chaque session se déroule
tant de tester pour la première fois son utilisation auprès d'un public d'en- en 4 ou 6 séances, tous les un à deux mois, plus une séance d'évaluation à
fants atteint de maladie chronique. Une étude qualitative a été menée au- distance. Les parents et les enfants sont pris en charge en deux groupes sé-
près de 5 enfants de 8 à 13 ans. Des cartes conceptuelles ont été réalisées parés, animés par les infirmières formatrices, les diététiciens, les médecins et
en début et en fin d'hospitalisation. A l'issue de cette étude nous avons pu la psychologue. Le programme éducatif est établi par objectifs théoriques
établir que les cartes conceptuelles : 1 / sont utilisables auprès d'enfants. pratiques, diététiques, psychologiques et éducatifs, adaptés à chaque
Seuls la fatigue ou l'état psychologique (déni, révolte…) du sujet peut res- tranche d'âges ou niveau scolaire, permettant à un même enfant de suivre
treindre son administration. Cette limite n'est d'ailleurs pas spécifique à l'en- les 2 (ou 3) cycles d'éducation sans redondances. Les thèmes abordés dans
fant; 2 / sont peu coûteuses en temps et en moyen (20 mn par carte) ; elles chaque cycle sont identiques dans le groupe des parents et dans celui des
sont facilement utilisables par un membre de l'équipe formé à cette tech- enfants. La préparation des séances est un travail long et minutieux : toute
nique; 3 / permettent de mettre en évidence la nature et l'organisation des l'équipe se réunit régulièrement pour l'élaboration et la rédaction de “sé-
connaissances chez l'enfant ainsi que leur modification après une interven- quences pédagogiques”, à la conception et la réalisation de matériels péda-
tion éducative; 3 / sont riches de l'expression des enfants tant au sujet de gogiques (jeux, illustrations, décors…). Une séance d'évaluation est organi-
son traitement, de l'alimentation, du sport, que du vécu de la maladie. sée à distance (6 mois plus tard) sous forme d'ateliers de connaissances
Conclusion : cette étude montre la faisabilité des cartes conceptuelles auprès pour les enfants et de questionnaires de satisfaction pour les enfants et les
d'enfant diabétique et l'intérêt de cette technique à différents moments de son parents. Chez les enfants, tous les 8-9 ans ont trouvé les séances intéres-
apprentissage : en début de prise en charge éducative, afin d'établir le dia- santes, seulement la moitié des 12-13 ans. La moitié pense que le groupe
gnostic d’éducation et de définir les objectifs d'apprentissage prioritaires ; en leur a appris quelque chose. Aucun ne préfère apprendre seul avec un soi-
cours d'éducation, pour favoriser l'intégration de connaissances et développer gnant. La moitié des enfants se sent plus confiant pour expliquer le diabète.
les capacités de résolution de problème ; en fin d'éducation, pour apprécier La motivation des 12-13 ans est plutôt de retrouver les copains et de faire
l'intégration et l'appropriation par les enfants des nouvelles connaissances. Les plaisir aux parents ; chez les 8-9 ans elle est plutôt d'apprendre sur le dia-
cartes conceptuelles s'avèrent donc pertinentes pour aider les soignants à ré- bète. Pour les parents, le taux de satisfaction est élevé en ce qui concerne
pondre aux besoins d'éducation des enfants atteints de maladies chroniques. l'organisation, “l'effet groupe”, l'approfondissement des connaissances et
l'effet des réunions sur la prise en charge du diabète. Tous pensent que les
séances en groupe complètent les consultations individuelles.
P8 Les cahiers de l’AJD : un document consen-
suel pour l’éducation des enfants et des ado-
lescents diabétiques P10 La tricherie chez le patient diabétique insu-
J.J.Robert, M.Vias, et les membres de la Commission Pédagogique de lino-dépendant en pédiatrie : fréquence, mo-
I'AJD. Aide aux Jeunes diabétiques - 17, rue Gazan, 75014 Paris. dalités et conséquences
Une enquête réalisée en 1986 auprès des Pédiatres hospitaliers a montré F.Toutain*, A.Duquenoy*, D.Bouige**, J.Bouloche*, P.Le Roux*, B.Le
le manque de moyens pour faire l’éducation des enfants et des adolescents Luyer* Service de pédiatrie*. Service de biochimie**GH Le Havre
diabétiques, et de leurs familles. Une Commission a alors été créée, dans But du travail - Apprécier la fréquence et les moyens de la tricherie au
le cadre de l'Aide aux Jeunes Diabétiques (AJD), pour réaliser un docu- cours de la consultation de diabétologie pédiatrique, sa répercussion sur la
ment de référence destiné aux formateurs, aux parents et aux enfants. Ce qualité du contrôle métabolique.
document avait l'objectif de répondre aux questions pratiques des parents, Patients et Méthodes - Comparaison des glycémies reportées sur le car-
et d'être compris de tous, tout en restant scientifiquement correct. La rédac- net d'autosurveillance et les glycémies extraites de l'autocontrôle enregis-
tion des connaissances de base, pour l'éducation d'un nouveau patient, a trées par One Touch aux mêmes dates, sur 2 ans. Cinquante neuf patients
réuni des dizaines de médecins, pédiatres pour la plupart et des diététi- diabétiques insulinodépendants depuis en moyenne 4 ans, âgés en
ciens (es) venant d'hôpitaux de toute les régions de France. Ce travail en moyenne de 11 ans, suivis au CH du Havre, sont inclus dans l'étude. La
groupe a bien montré l'importance de préparer minutieusement tout acte technique d'analyse de variance (ANOVA) est utilisée ainsi que le logiciel
éducatif : chaque mot a de l'importance. Un consensus s'est établi, le plus statgraphics plus.
souvent sans grandes difficultés, sur plus de 90 % des thèmes abordés. Ce
document de référence pour l'éducation est en accord avec les Recomman- Résultats - Il existe une corrélation positive entre la fréquence de la tri-
dations de Consensus de la Société Internationale de Diabétologie de l'En- cherie (moyenne : 6,6 %) et l'HbA1c (R : 0,44, p<1/10000). Plus la triche
fant et de l'Adolescent (ISPAD). Les Cahiers de l'AJD ont été publiés, à un est importante, plus le nombre de glycémies dans la cible augmente sur le
rythme trimestriel de 1993 à 1999, dans le Bulletin d’Information de l'AJD. carnet, essentiellement en diminuant le nombre de glycémies supérieures à
Des dizaines de milliers de tirés à part ont été distribués aux soignants et la cible (R : 0,29, p<1/10000), et plus le nombre de glycémies déclarées
aux familles. Une version entièrement revue et corrigée a été publiée en en plus est important (R : 0,44, p<1/10000, fréquence moyenne : 2,6 %).
2000-2001. Composés de 20 chapitres (5 théoriques, 9 pratiques, 4 diété- Discussion Une discordance entre HbA1c médiocre et carnet d'autosur-
tiques et 2 sur la vie avec le diabète), les Cahiers sont disponibles sur veillance avec des chiffres et des moyennes de glycémies acceptables
demande au Secrétariat de l'AJD. I’élaboration des Cahiers a permis de amène à suspecter une tricherie. Les patients peuvent modifier les valeurs
constituer un important groupe de travail pour l'éducation de l'enfant dia- de glycémies soit par absence de report des valeurs hautes ou par diminu-
bétique, dont la mission est maintenant de poursuivre la production de ma- tion de celles ci autour de 1,2 g/l, soit par rajout de glycémies normales
tériel pédagogique (perfectionnement des connaissances, mises à jour, sup- ou basses.
ports audiovisuels) et de développer des méthodes d’éducation (séquences Conclusion - L'identification de la tricherie conduit à une prise en charge
pédagogiques) adaptées à l’âge de l’enfant et de l’adolescent. en particulier psychologique de l'adolescent diabétique insulino-dépendant.
“Santé - Éducation 2002” - 01/02/2002 21
P11 Gestion de l’erreur du personnel soignant P13 Création d’un livret diététique régional
H.Amougay, PChopinet, P.Darsy, S.Favre, GCadoux, APicard Groupe des diététiciennes du DESG CHAMPACNE-ARDENNES - CH Châ-
Service de Médecine Interne et Diabétologie, Centre Hospitalier lons en Champagne, CH Charleville-Mézières, CH Chaumont, CH Epernay.
CHR Reims, CH Sainl-Dizier, CH Troyes
BP 2333 74011 Annecy Cedex
Ce livret est le fruit d'un travail commun des diététiciennes du DESG
Nous avons voulu par ce travail traiter des erreurs effectuées par le person- CHAMPAGNE-ARDENNES qui se sont réunies depuis mai 1998 (3 demi-
nel soignant lors de la prise en charge du patient diabétique en milieu hos- journées par an) pour travailler à sa réalisation.
pitalier.
Les objectifs sont :
Nous nous sommes pour cela appuyé sur notre expérience au quotidien - d'harmoniser les messages diététiques concernant le diabète au niveau de
lors des consultations et pendant nos semaines d'éducation diabétique. la région ;
Nous savons que le sujet est vaste et qu'il est difficile d'en aborder tous les - de mieux adapter les réponses aux besoins et attentes des patients
aspects.
A propos du contenu :
Toutefois, nous avons pu répertorier, sur une année, un certain nombre
Ce livret se veut modulable et évolutif, grâce à la création de fiches ne
d'erreurs fréquentes effectuées par le personnel soignant concernant la
contenant qu'un seul thème à la fois. Les messages sont simples et
prescription thérapeutique et celle d'un régime alimentaire, la gestion d'er-
concrets. Les items abordés sont :
reurs faites par le patient lors de son éducation, la prise en charge de son
vécu, le choix du profil des patients pour notre semaine d'éducation, un - des informations nutritionllelles de base (alimentation équilibrée du diabé-
manque de formation des soignants. tique, les glucides, les lipides…) ;
- des réponses aux besoins plus spécifiques des patients (équivalences, si-
Pour ces différents points, nous suggérons des moyens simples afin de les tuations particulières, voyages, sport, recettes…).
gérer au mieux, l'objectif premier étant d'améliorer la prise en charge de
nos patients. En pratique - Les fiches seront remises à chaque patient après un enseigne-
ment adapté à ses besoins et selon ses acquis. Chaque fiche pourra être ré-
Nous avons pu observer, au-delà de ces solutions proposées de façon actualisée sans être obligé de modifier l'ensemble du livret. Actuellement fina-
ponctuelle, que les éléments essentiels à privilégier dans notre relation soi- lisé, il reste à trouver une aide de financement pour sa réalisation pratique.
gnant-malade restent bien sûr l'expérience, la formation et l'amour porté à
nos patients. En conclusion - Ce travail commun a permis d'une part une remise en
question de nos pratiques professionnelles et d'autre part de dynamiser
l'ensemble des diététiciennes du DESG CHAMPAGNE-ARDENNES.
P12 Évaluation de supports écrits d’éducation nu-
tritionnelle pour diabétiques de type 1 et 2
auprès de 122 patients et soignants P14 Intérêt d’un logiciel prenant en compte le
comportement et les motivations dans la prise
Fl.Rossi, N.Baclet, M.Bardeau, E.Bernard, E.Corset, C.Flumian, C.Fouquet, en charge de patients en surpoids
Ch.Guerchais, Y.Guérineau, A.Guffroy, MC.Le Pestipon, N.Masseboeuf,
C.Meyer, A.Rigoir, D.Romand, MC.Sage, A.Siaud, F.Strnad, D.Tarhouni - Y.Girard, O.Pelleter, A.Siaud, A.Tréhiou - Service de diététique, Hôpital
Région lle-de-France. Cochin, 27, rue du faubourg Saint Jacques 75014 Paris
Une étude a été réalisée à l'aide de questionnaires pour évaluer les moda- L'importance du contexte social, professionnel, émotionnel dans la prise en
lités et la pertinence de l'utilisation de deux livrets “Alimentation et dia- charge des patients désirant perdre du poids n'est plus à démontrer. Pour-
bète”, destinés aux patients diabétiques de type 1 d'une part et de type 2 tant, trop souvent encore cette prise en charge se limite à la prescription
d'autre part, éduqués et suivis en hospitalisation et / ou en consultation. de conseils diététiques, et aucune autre dimension n'est abordée. Nous
avons évalué un logiciel des laboratoires Knoll : OMER (“Obésité : Module
Ces livrets ont été conçus dans l'objectif d'harmoniser et de rendre plus ac- d'Éducation et de Réflexion”) destiné aux patients. Ce CD-Rom se veut être
cessible les concepts et conseils nutritionnels délivrés aux patients. Les soi- un parcours interactif qui aide le patient à reconnaître les facteurs qui faci-
gnants ont distribué ces livrets aux patients, après réalisation d'une éduca- litent ou entravent sa perte de poids. Il propose d'identifier les objectifs du
tion nutritionnelle personnalisée, en pointant les thèmes prioritaires à patient. Par un questionnaire sur tous les aspects de la vie, il permet de
consulter. faire un profil du patient, qui pourra reconnaître ses atouts et difficultés,
L'enquête s'est déroulée sur 6 mois dans des centres hospitaliers d'lle choisir ses objectifs, avec ses critères de succès et se fixer ses échéances
de France et de province. 122 questionnaires ont été étudiés, 52 issus dans le temps pour les atteindre. Puis OMER permet d'évaluer l'avance-
des soignants et 70 des patients diabétiques à parité égal entre les ment du projet en terme d'objectifs et de plans d'action mis en œuvre.
types 1 et 2. Enfin des informations générales sur alimentation, activité physique… sont
donnés. Ce CD-Rom est présenté comme une aide pour les soignants, et ne
Les différents items abordaient les notions d pertinence des thèmes, de mo- prétend pas s'y substituer.
dalités de distribution des livrets ainsi que leur lisibilité et compréhension.
Les résultats, en considérant les deux livrets, mettent en évidence : 17 patients, tous obèses, ont participé à cette évaluation qualitative. 4
n'ont pu continuer du fait de problème de disponibilité (éloignement, lon-
1) pour 78 % des soignants et 95 % des patients il n'y a pas de thèmes gueur des consultations). Pour 15 la première consultation d'OMER a été
manquants, ni de thèmes inutiles pour 87 % des soignants et 97° des pa- jugée bénéfique car permettant de réfléchir sur leurs motivations, leurs ob-
tients. Les thèmes favoris sont les équivalences glucidiques et les situations jectifs, leurs points forts et faibles, c'est une possibilité de se poser d'autres
particulières pour le type 1, les graisses et l'équilibre alimentaire pour le questions et d'y chercher des solutions. Inversement pour 2 il s'agit d'un
type 2 ; gadget. Après engagement de la perte pondérale OMER permet l'analyse
2) dans 86 % des cas, la distribution e accomplie par des professionnels, des atouts et des difficultés rencontrés au quotidien, mais après quelques
avec éducation nutritionnelle explication du contenu pour 89 % des soi- consultations la progression s'arrête, arrêtant par la même le recours au lo-
gnants et 76 % des patients ; giciel sans que les objectifs fixés au départ ne soient atteints. Ce point, as-
socié à quelques bugs informatiques fait que, jusqu'à solution de ces pro-
3) dans 67 % des cas, les livrets sont denses en informations mai acces- blèmes, nous ne proposons plus ce CD-Rom aux patients.
sibles faciles et agréables à parcourir pour 100 % des patient et pour 94 %
des soignants. 95 % des patients et des soignants le trouvent attrayants. Conclusions - OMER n'est pas déterminant dans la motivation de perdre
du poids, mais peut être une aide, plus, nous semble-t-il, pour des patients
Ces livrets remplissent donc bien leur rôle d'aide à l'éducation nutrition- avec des troubles du comportement. Il ne peut s'envisager que dans le
nelle de première intention et de suivi pour tous les patient diabétiques et cadre d'une prise en charge globale du patient par les soignants et après
répondent aux attentes des soignants. correction des problèmes informatiques rencontrés.
22 “Santé - Éducation 2002” - 01/02/2002
P15 Comment l’entourage participe à la consulta- P17 Quel vécu de la maladie chronique a le sujet
tion du sujet diabétique de type 2 diabétique de type 2 et son entourage ?
N.Pillette, P.Walker - Unité fonctionnelle de Diabétologie, CH Jacques N.Pillette, P.Walker - Unité fonctionnelle de Diabétologie-Nutrition, Centre
Cœur, Bourges Hospitalier Jacques Cœur, Bourges, France.
La consultation avec le médecin est un moment important et nous avons L'éducation thérapeutique nécessite d'apprécier le vécu de la maladie.
cherché dans l'unité de diabétologie d'un centre hospitalier général, à pré- Dans l'unité de diabétologie d'un CHG, nous avons entrepris d'analyser
ciser le rôle de l'entourage dans cette situation. cette problématique pour favoriser la participation de l'entourage à la
Objectif : Préciser la participation de l'entourage du sujet diabétique à la prise en charge du diabète.
rencontre médicale. Moyens : Un autoquestionnaire a été proposé, de Objectif : Préciser la perception de la maladie chronique, de l'entourage
mars à juillet 2001, à des sujets diabétiques de type 2, hospitalisés, dé- et du sujet diabétique.
couverts depuis plus d'un an, autonomes, dont l'entourage n'avait jamais Moyens : Un autoquestionnaire a été proposé, de mars à juillet 2001, à
bénéficié d'une démarche éducative. Résultats : 74 diabétiques soit 94 % des sujets diabétiques de type 2, hospitalisés, découverts depuis plus d'un
des sujets intégrables ont accepté de répondre (45 Femmes/29 Hommes ; an, autonomes, dont l'entourage n'avait jamais bénéficié d'une démarche
âge moyen 60,9ans ; durée médiane du diabète connu : 10 ans ; 38 sous éducative.
antidiabétiques oraux/36 sous insuline). 75 % des diabétiques identifiaient
dans l'entourage, une personne “ressource” (PR) soit 61 PR. 84 % des per- Résultats : 74 diabétiques soit 94 % des sujets intégrables ont accepté de
sonnes ressources ont accepté de répondre à l'enquête. 75 % des per- répondre (45 Femmes/29 Hommes ; âge moyen 60,9ans ; durée médiane
sonnes ressources étaient le conjoint. du diabète connu : 10ans ; 38 sous antidiabétiques oraux/36 sous Insu-
- Les PR participent à la prise de rendez-vous avec le médecin toutes les line). 75 % des diabétiques identifiaient dans l'entourage, une personne
fois pour 39 %, souvent pour 17 %, parfois pour 20 %, jamais pour 24 %. “ressource” (PR) soit 61 PR. 84 % des personnes ressources ont accepté de
- Les PR interviennent au cours de la consultation toujours pour 23 %, sou- répondre à l'enquête. 75 % des personnes ressources étaient le conjoint.
vent pour 11 %, parfois pour 43 %, jamais pour 23 %. Le diabète est une source d'anxiété pour 74 % des D et 77 % des PR
- Les PR ont plus souvent une participation antagoniste soutenant le D. 22 % des sujets D jugent leur état de santé mauvais alors que seulement
qu’antagoniste (p>0,5). 7 % des PR le jugent mauvais (p<0,05).
- Les PR sont satisfaites des informations reçues toujours pour 26 % souvent Les PR : 39 % se disent atteintes d'une pathologie nécessitant des soins au
pour 45 %, parfois pour 26 % et jamais pour 3 %. long cours et jugent que cette situation est favorable à leur prise en charge
Conclusion : Le médecin pendant la consultation à trois est en contact de du diabète. 56 % disent que le diabète a changé leurs habitudes de vie.
l'entourage actif du diabétique. C'est un moment privilégié pour réduire Les D : 82 % jugent que le diabète retentit sur la vie quotidienne, 32 % té-
l'anxiété en répondant aux demandes d'informations avec un langage moignent d'une gêne dans les relations sociales. 50 % disent que l'entou-
adapté au PR et au D, favorisant ainsi une meilleure prise en charge du rage est une source de stress.
diabète, tout en ne négligeant pas les entretiens individuels qui permettent Conclusion : Le vécu de la maladie diabétique dans la dynamique fami-
d'aborder d'autres problèmes. liale doit être évaluée préalablement à toute action éducative. L'éducation
thérapeutique doit en tenir compte pour favoriser l'implication de l'entou-
rage dans l'aide à la prise en charge du diabète.
P16 Quelle aide de son entourage attend le sujet
diabétique de type 2 ?
N.Pillette, P.Walker, Unité fonctionnelle de Diabétologie-Nutrition, Centre
P18 Prise en charge éducative des patients diabé-
Hospitalier Jacques Cœur, Bourges, France. tiques originaires du Maghreb
L'éducation thérapeutique est limitée par l'absence fréquente aux forma- Dr. S.Farad - Clinique Médicale “A” - CHU Bretonneau - 2, bd Tonnelle -
tions de l'entourage. Dans l'unité de diabétologie d'un CHG, nous avons 37044 Tours Cedex
entrepris d'analyser cette problématique pour favoriser la participation de
l'entourage à la prise en charge du diabète. Le diabète de type 2 est un problème majeur le santé publique, et touche
plus particulièrement certaines populations de migrants. En France la popu-
Objectif : Préciser la perception de l'aide, selon l'entourage ou le sujet lation de migrants la plus importante est celle en provenance d'Afrique du
diabétique. Moyens : Un autoquestionnaire a été proposé, de mars à Nord.
juillet 2001, à des sujets diabétiques hospitalisés, de type 2, découverts
depuis plus d'un an, autonomes, dont l'entourage n'avait jamais bénéficié Ces populations seraient plus à risque de développer un diabète en raison
d'une démarche éducative. Résultats : 74 diabétiques (D) soit 94 % des du stress psychosocial que constitue l'immigration mais aussi à cause des
sujets intégrables ont répondu (45 F/29 H ; âge moyen 60,9 ; durée mé- modifications d l'alimentation, de l'activité physique et des occupations
diane du diabète : 10 ans ; 38 sous ADO/36 sous Insuline). 75 % ont quotidiennes
dans l'entourage, une “personne ressource” (PR) soit 61 PR. 84 % des PR D'une façon générale, un changement dans le style de vie, s'éloignant peu
ont accepté de répondre à l'enquête. 75 % étaient le conjoint. à peu de leur culture d'origine : c'est le phénomène d'acculturation. Si
La perception de l'aide fournie (importante ou peu importante) diffère selon l'immigré maghrébin tentait de s'adapter à cette nouvelle société, il n'en
qu'on pose la question aux sujets diabétiques ou aux personnes ressources. reste pas moins attaché à ces tradition culinaires.
Pour les sujets diabétiques : les réponses pour qualifier l'aide sont équita- Ce qui en fait un patient pas tout à fait comme les autres et ce d'autant
blement partagées pour l'aide aux taches de la vie quotidienne, aux me- plus qu'il ne maîtrise pas la langue française. Il se distingue par son iden-
sures d'hygiène de vie, à la surveillance ou au traitement. 70 % jugent tité culturelle et ses croyances (de santé).
l'aide morale importante.
La méconnaissance de tous ces facteurs par les soignants, altère la trans-
Pour les personnes ressources : elles sont relativement plus nombreuses que les mission des messages éducatifs et crée des hiatus entre connaissances et
D à juger importantes l'aide à apporter aux taches de la vie quotidienne comportement.
(93 % p<0,01), aux mesures d'hygiène de vie (85 % p<0,01). Elles jugent im-
portantes l'aide à la surveillance du diabète (66 % NS). L'aide morale est plus Nous avons mis en place dans le service des semaines d'éducation spéci-
fréquemment considérée comme importante que pour les D (93 % p<0,01). fiques aux patients maghrébins réalisée en langue arabe avec l'aide d'une
interprète. Ces semaines ont lieu deux fois par an.
Conclusion : L'aide morale est la plus attendue. L'anxiété perçue par les
diabétiques et les personnes ressources est améliorée par le niveau de Les thèmes abordés sont la diététique en tenant compte des particularités
connaissance qui est un moyen d'y parvenir. D'autres stratégies doivent culturelles, l'activité physique, les hypoglycémies, l'auto surveillance glycé-
être développées dans ce sens en respectant la dynamique familiale exis- mique, le Ramadan, les voyages et le pied diabétique. C'est notre expé-
tante, dépendante de l'aide ou de son absence. rience que nous vous rapportons ici.
“Santé - Éducation 2002” - 01/02/2002 23