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J. François Outreville
Burgundy School of Business, Dijon, France
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All content following this page was uploaded by J. François Outreville on 25 February 2016.
MUTUELLES D’ASSURANCE,
ASYMETRIE D’INFORMATION
ET REASSURANCE
J. François Outreville
La capacité d’une compagnie d’assurance à diversifier les risques assurés et à faire face à
la liquidation des sinistres, dépend largement de la nature des risques souscrits et aux outils de
gestion des risques liés aux contrats et au portefeuille de contrats. La panoplie des solutions de
transfert des risques n’est plus limitée à la réassurance traditionnelle et inclus des produits de
transferts financiers.
1. Introduction
Les systèmes d'assurance maladie se voient entraîner dans des dépenses croissantes du fait
de l'évolution démographique et de l'amélioration des traitements médicaux. Afin de réaliser
l'équilibre de ses comptes, une société d'assurance a deux types de ressources principales, les
primes d'une part, les ressources dues aux placements et recettes accessoires d'autre part. Les
primes doivent permettre de faire face à un niveau normal de sinistres à payer mais en pratique le
risque à venir peut être illimité.
Si l'assurance maladie a été conçue comme un système de redistribution des risques où les
contributions encaissées à court-terme servent à financer les dépenses d'accident et de maladie
aléatoires des assurés, elle n'a pas été conçue comme un système de capitalisation financière à long-
terme pour des risques croissants. L’activité de l’assurance s’exerce souvent soit par des assureurs
privés dans le cadre d’une réglementation sociale, soit par des systèmes mixtes ou l’Etat intervient
comme assureur. Les systèmes de sécurité sociale dans de nombreux pays prennent bien souvent le
relais de l'assurance maladie traditionnelle pour des classes de risques particulières.
Les avantages et les coûts liés à l'existence d'un système d'assurance sont bien répertoriés
dans le cas de l'assurance maladie. Si l'assurance n'existait pas, il est probable que, comme au début
du siècle, un piéton muni d'un drapeau rouge marcherait devant une voiture pour signaler le danger.
Mais du fait de son existence, l'assurance contribue au développement des coûts de la santé. Les
asymétries d'information font partie des imperfections de marché caractérisant les activités de la
santé. Dans le cadre de l'assurance, les asymétries d'information donnent naissance à des
phénomènes de risque moral , d'anti-sélection et de coûts induits par le système lui-même.
2
Parmi ces imperfections, ce sont surtout les phénomènes de selection et les externalités qui
seraient susceptibles d'intervention publique. Le marché de l’assurance maladie est fondé, comme
tout marché d’assurance, sur l’existence de risques aléatoires dont la distribution n’est pas normale
et largement biaisées à droite. L’hétérogénéité de ces risques combinée au phénomène d’asymétrie
d’information a entrainé plusieurs auteurs à considérer que le marché de l’assurance maladie n’était
équitable que si l’assurance était obligatoire et si l’Etat intervenait comme acteur ou régulateur sur
ce marché (Dahlby [5], Eckstein et al. [6], Eisen [7]).
L'objectif de cet article est de présenter le problème de distribution des risques propre à
l’assurance maladie. Nous analysons ensuite, d’un point de vue essentiellement économique, les
principales alternatives de transfert des risques. Nous presentons dans la dernière section les
perspectives offertes par l’approche financière du problème de capacité d’assurance.
- possibilité (ou probabilité dans le sens actuariel) d’une insuffisance des montants de
primes encaissés dus à une évolution technique, sociale ou économique insuffisamment
appréhendée lors de la détermination du taux de prime;
- possibilité d’enregistrer, au cours d’un exercice donné, un nombre de sinistres supérieur
au nombre anticipé qui a permis d’établir les taux de prime;
- possibilité d’enregistrer, au cours d’un exercice donné, un coût moyen des sinistres
supérieur à celui résultant de l’exercice passé;
- possibilité d’une erreur dans l’évaluation de la perte maximum probable ou encore du
sinistre maximum possible.
Dans la majorité des systèmes d'assurance-maladie, l'adhésion est obligatoire afin d'éviter
les problèmes d'antisélection bien connus des assureurs: tout individu s'assure s'il anticipe avoir
recours à l'assurance pour le remboursement de dépenses de santé. Ce principe est d'autant plus
important que le système de tarification est basé sur le concept de mutualité des risques.
Si l’information sur le risque santé des individus est connue, la classification optimale des
risques est caractérisée par un équilibre financier dans chaque classe de risques. Malheureusement,
l’information sur la santé des individus n’est pas connue de l’assureur ou ne pourrait être révélée
qu’à un coût très élevé ou une décision illégale de dépistage des “mauvais” risques.
3
Quand les primes sont fixées à la moyenne d'un groupe, s'il n'y a pas homogénéité
statistique, les individus à risque élevé vont être plus nombreux à s'assurer que les individus à
risque faible. A la limite, selon la logique d’Akerlof [1], le marché disparaît si l'assureur ne propose
pas de contrats différenciés.
Du fait de l'existence de contrats d'assurance groupe, les individus supposés à faible risque
acceptent de participer au même titre que des individus supposés à risque élevé, à un système
d'assurance maladie. Si l'adhésion n'est pas obligatoire, ce résultat dépend largement du niveau
d'aversion pour le risque des individus.
Afin d’éviter que, dans un marché compétitif, les assureurs ne se livrent à une sélection des
meilleurs risques, l’Etat à souvent mis en place des systèmes de compensation des risques. Un tel
système existe par exemple en Suisse (Beck et Zweifel [2]), et en Allemagne et aux Pays Bas (Van
de Ven et Van Vliet [12]). Pauly [9],[10] considère que ce phénomène est la résultante d’un
contrôle des tarifs par l’Etat et non pas d’une compétition sur le marché pour sélectionner les
risques.
En assurance maladie il existe une distinction notable entre les soins ambulatoires et les
soins hospitaliers. Une observation de la distribution des risques montre que les soins ambulatoires
génère une distribution proche de la distribution normale, ce qui n’est pas le cas des soins
hospitaliers. L’argument de certains auteurs est donc de limiter l’assurance obligatoire aux risques
élevés (les soins hospitaliers) et de créer une couverture partielle obligatoire(Breyer et Zweifel [3]).
A ce jour, il n’existe malheureusement pas de définition du concept de couverture partielle.
1
Voir aussi Wilson [13], Browne [4] et Outreville [8].
4
3. La prise en charge des risques élevés.
L’idée a souvent été émise que si l’Etat prend en charge les risques les plus élevés (les soins
hospitaliers), le reste de la distribution des risques se rapproche d’une distribution dite normale.
Cette “normalisation” transforme des risques qui sont à l’origine hétérogènes, en une classe de
risques homogènes réduisant par le fait même le problème d’anti-sélection.
Une séparation des risques en classes distinctes (soins ambulatoires versus soins
hospitaliers) entraine aussi la possibilité d'évaluer de manière plus précise des taux de prime
suffisants et équitables pour les soins ambulatoires.
Il reste qu’un tel système peut générer d’un point de vue social une discrimination par la
richesse et une médecine à deux vitesses. Les programmes de Medicare et de Medicate aux Etats-
Unis, ou le système national de santé en Angleterre, sont souvent cités en exemple de cette
situation.
La réassurance est une opération par laquelle l’assureur (le cédant), qui demeure
responsable vis-à-vis de ses assurés pour les risques qu’il a accepté de couvrir, se décharge sur un
tiers, le réassureur (le cessionnaire) de tout ou partie du risque inhérent à son portefeuille.
Pour faire face aux écarts défavorables qui peuvent résulter des incertitudes de
l’établissement des tarifs, les assureurs doivent anticiper un montant de provisions permettant le
règlement intégral des engagements pris envers les assurés. Les provisions pour sinistres constatent
l’existence de sinistres encourus dans l’exercice financier en cours de réalisation ou dans les
exercices passés. Elles ne permettent pas de répondre au risque financier qui peut résulter de la
survenance de dépenses d’ordre exceptionnel engendrées par un seul (ou plusieurs) individus.
Ces dernières années, certaines tentatives visant à transférer directement les risques
assurantiels sur les marchés financiers ont retenu toute l’attention. Le transfert de risques en
réassurance classique implique des frais de transactions élevés qu’il convient de comparer aux frais
de gestion des provisions techniques et aux frais encourus pour maintenir la capacité financière des
compagnies à respecter leurs engagements.
Les produits de réassurance dits “finite risks” (FR) reposent sur l’idée que les risques se
compensent dans le temps et que le financement peut donc être aussi bien rétrospectif que
prospectif. La couverture rétrospective en excédent de sinistres (RXL) implique la prise en charge
par le réassureur des sinistres qui dépassent les provisions constituées par l’assureur (équivalent
d’un traité en “Stop Loss”) et le recouvrement sur plusieurs exercices.
Une variante à la réassurance consiste à financer un sinistre élevé une fois qu’il est survenu.
Cette approche doit être limitée aux risques relativement rares mais particulièrement graves. La
prise en charge conditionnelle par le réassureur est similaire à un crédit souscrit auprès d’une
banque. La différence tient principalement au fait que, les conditions du financement sont fixées au
préalable et éliminent donc les risques d’intérêt et de crédit. Contrairement à la réassurance
6
traditionnelle, cette solution ne permet pas le lissage des résultats mais garantit une gestion
ordinaire des affaires après un sinistre important dans le but d’éviter l’insolvabilité.
5. Conclusion.
Les principes de gestion des risques présentés dans cet article s’appliquent sans exception
aux mutuelles d’assurance maladie et accidents et sont liés à la capacité de ces entreprises à faire
face à la liquidation des dettes futures. La panoplie des solutions de transfert des risques s’est
élargie au fil des ans et ces dernières années, certaines tentatives visant à transférer directement les
risques assurantiels sur les marchés financiers ont aussi retenu l’attention des assureurs dans le
domaine des risques maladie et accidents.
6. Bibliographie.
[ 1] AKERLOF, G.A., “The Market for Lemons: Quality Uncertainty and the Market Mechanism,”
Quarterly Journal of Economics, vol. 84, 1970, pp. 488-500.
[ 2] BECK, K. et P. ZWEIFEL, “Cream-skimming in Deregulated Social Health Insurance,”
Paper presented at the 3rd European Conference on Health Economics, Stockholm, 1995.
[ 3] BEYER, F. et P. ZWEIFEL, Health Economics, Oxford Univ. Press, 1997.
[ 4] BROWNE, M.J., "Evidence of Adverse Selection in the Individual Health Insurance Market,"
Journal of Risk and Insurance, vol. 59, March 1992, pp. 13-33.
[ 5] DAHLBY, B.G., “Adverse Selection and Pareto Improvements through Compulsory Insurance,”
Public Choice, vol. 37, 1981, pp. 547-558.
[ 6] ECKSTEIN, Z., M. EICHENBAUM et D. PELED, “Uncertain Lifetimes and the Welfare Enhancing
Properties of Annuity Markets and Social Security,” Journal of Public Economics, vol. 26, 1985, pp. 303-320.
[ 7] EISEN, R., “Wettbewerb und Regulierung in der Versicherung: Die Rolle Asymetrischer Information,”
Schweizerische Zeitschrift fur Volkswirtschaft und Statistik, vol. 122, 1986, pp. 339-358.
[ 8] OUTREVILLE, J.F., “The Health Insurance Sector: Market Segmentation and the Trade in Health Services,”
in International Trade in Health Services, UNCTAD (ed.), Geneva, 1998.
[ 9] PAULY, M.V., “Is Cream-skimming a Problem for the Competitive Medical Market,”
Journal of Health Economics, vol. 3, 1984, pp. 87-95.
[10] PAULY, M.V., “Taxation, Health Insurance, and Market Failure in the Medical Economy,”
Journal of Economic Literature, vol. 24, 1986, pp. 629-675.
[11] ROTHSCHILD, M. et J. STIGLITZ, "Equilibrium in Competitive Insurance Markets: An Essay on
the Economics of Imperfect Information," Quarterly Journal of Economics, vol. 90, 1976, pp. 629-650.
[12] VAN de VEN, W.P.M. et R.C. J. VAN VLIET, “How can we Prevent Cream-skimming in a Competitive Health
Insurance Market,” in P. ZWEIFEL et H. FRECH (eds.), Health Economics Worldwide,
Boston: Kluwer, 1992.
[13] WILSON, C., "A Model of Insurance Markets with Incomplete Information,"
Journal of Economic Theory, vol.5, 1977, pp. 167-207.