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ECU 2 :

VALORISATION DES
SUBSTANCES
NATURELLES : CAS DES
METABOLITES
SECONDAIRES

1
OBJECTIFS PÉDAGOGIQUES

-Connaitre la définition des différents types de métabolites;


-Identifier les grands groupes de métabolites secondaires;

-Savoir l’importance des métabolites secondaires dans la fabrication des


médicaments;

-Donner les étapes de l’étude pharmacologique de substances naturelles et leur


application;

-Connaitre les méthodes de conservation des substances naturelles

PLAN DU COURS

INTRODUCTION

I- DEFINITIONS

CHAP I: INTERET DES METABOLITES SECONDAIRES

II- Les grands groupes de métabolites 2aires

II.1- Les terpénoïdes

II.2- Les alcaloïdes

II.3- Les composés phénoliques

CHAP II: UTILISATION PHARMACOLOGIQUE ET CONSERVATION


DES SUBSTANCES NATURELLES

I- Utilisation pharmacologique des substances naturelles

II- Conservation des substances naturelles

CONCLUSION

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INTRODUCTION

Les substances naturelles et les métabolites secondaires produits ont ouvert et


ouvrent encore des potentialités considérables à valoriser :
- Molécules d’intérêt pharmacologique, agronomique et cosmétique,
- Outils moléculaires pour l’exploration du monde vivant,
- Médiateurs chimiques pour la compréhension des interactions entre les
organismes vivants dans les écosystèmes
Le terme « Substance Naturelle » inclut:
-les métabolites secondaires de faibles masses moléculaires (alcaloïdes,
terpénoïdes, polyphénols…),
-les substances de hautes masses (peptides, protéines, acides nucléiques,
polysaccharides)
-les biomatériaux.
Un intérêt doit être porté aux métabolites secondaires, au regard du
développement de la chimie, de la biologie, de la pharmacie et de nombreuses
autres disciplines scientifiques.

DÉFINITIONS

1- Métabolisme : c’ est l'ensemble des réactions chimiques qui se déroulent


au sein d'un être vivant pour lui permettre notamment de se maintenir en
vie, de se reproduire, de se développer et de répondre aux stimuli de son
environnement.

2- Métabolite est un composé organique intermédiaire ou issu du


métabolisme. On réserve ce terme en général aux petites molécules et aux
monomères, par opposition aux macromolécules. Ainsi, le glucose est un
métabolite, contrairement au glycogène, qui est un polysaccharide de
poids moléculaire très élevé.

a- Les métabolites primaires sont indispensables à la nutrition, assurent la


croissance, le développement d'un organisme. Les métabolites primaires
rassemblent les acides aminés, les lipides, les sucres ou les acides
nucléiques, par exemple.

b- Les métabolites secondaires sont des produits de la phase obscure (cycle


de Calvin) de la photosynthèse. Ce sont des molécules qui, par exclusion,
n'appartiennent pas au métabolisme primaire.

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Les métabolites secondaires sont historiquement plus spécifiques aux plantes,
bactéries et champignons, mais on découvre également des métabolites
spécifiques à certains groupes d’animaux, que l'on peut donc qualifier des
métabolites secondaires. On les retrouve dans des compartiments particuliers ou
à des moments précis de la vie.
Contrairement aux métabolites primaires, les métabolites secondaires ne
participent pas directement à l’assimilation des nutriments et donc, au
développement de l'organisme (la plante, typiquement). Cependant, ces
composés ne sont pas totalement différents des métabolites primaires. En effet,
ils dérivent parfois des mêmes voies de biosynthèse et certains, comme la
chlorophylle et la lignine ont des fonctions indispensables pour la croissance de
la plante, et pourraient donc faire partie des métabolites primaires.
À ce jour, plus de 100 000 métabolites secondaires ont été identifiés et on
estime que chaque végétal produit au moins une centaine de molécules
différentes. Les métabolites secondaires participent à la vie de relation de la
plante (ou de leur organisme hôte), et ils ont des rôles très variés. Ils peuvent
servir de défense (sécrétions amères ou toxiques pour les prédateurs) ou au
contraire, attirer certaines espèces ayant des rôles bénéfiques (pollinisateurs). Ils
peuvent également permettre la communication entre les plantes, par des
messages d’alerte par exemple, ou faire partie de la structure de la plante (tanins
et lignine).

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CHAPITRE I :

INTERET DES
METABOLITES
SECONDAIRES :
origine et rôle

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Les groupes de métabolites secondaires
On distingue classiquement trois grandes catégories de métabolites secondaires
chez les végétaux :
• les alcaloïdes et composés azotés
• les composés phénoliques
• les composés terpéniques

A ces groupes, on ajoute


• les hétérosides, constitués de dérivés glycosylés de composés
terpéniques, phénoliques et plus rarement d’alcaloïdes. Ces
glycosylations affectent largement leurs propriétés biochimiques (dont
l’extractibilité dans différents solvants) mais également leurs effets
biologiques (toxicité, propriétés pharmacologiques).
• les molécules désignées sous le terme de « composés mixtes » ou
« composés d’origine mixte », qui correspondent à des condensations de
molécules provenant des catégories citées plus haut. Mais souvent, les
composés mixtes peuvent être rattachés à l’une des catégories
précédentes.

I- LES TERPENOÏDES
I.1- Origine et localisation
Les terpénoïdes sont des molécules à nombre de carbones multiple de 5, et dont
le précurseur est l’isopentényl diphosphate ou IPP. Ce sont des lipides
synthétisés à partir de l’acétyl-CoA, ce sont donc des molécules hydrophobes.
Il existe 20 000 molécules connues avec comme motif commun cette base
isoprène. Les terpénoïdes sont stockés dans les vacuoles au niveau de l'écorce,
des épines, des racines ou encore des feuilles. On en retrouve également dans le
latex.

I.1.1- Isopentényl diphosphate ou pyrophosphate

- Formule brute: C5H12O7P2

- Formule semi-développée:
CH2=C(CH3)–CH2–CH2–O–POO––O–PO(O–)2

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- Formule développée:

I.1.2- Biosynthèse de l’isopentényl pyrophosphate

I.2- Classification des composés terpéniques

La classification des terpenoïdes repose sur le nombre d’unités terpéniques


C5 : hémiterpènes (une unité isoprène)
C10 : monoterpènes (deux unités isoprène)
C15 : sesquiterpènes (trois unités isoprène)
C20 : diterpènes (quatre unités isoprène)
C30 : triterpènes
C40 : tetraterpènes (caroténoïdes)
C45 et C50 : queues terpéniques des molécules d’ubiquinone et de
plastoquinones; Au-delà : polyterpènes (caoutchouc…)

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Certains composés importants sont des produits du catabolisme des terpènes,
par exemple certains arômes de la tomate et l’acide abscissique (une hormone
en C15 de réponse au stress hydrique, très importante chez les plantes) sont des
produits du catabolisme de caroténoïdes (C40).

ISOPRENE

Formule brute: C5H8

Formule développée :

Exemples des terpénoides :

C10 Monoterpènes (ex: limonène)

Unité de base C5:


isoprène C40 Tetraterpènes (ex: β-carotène)

<300
OH

Polyterpènes (ex: caoutchouc)

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I.2.1- Monoterpènes

Ce sont des composés à 10 carbones. Ils sont souvent volatils, aromatiques (sens
olfactif) et biologiquement actifs (bactériostatiques, signalisation plantes-
insectes). Ils sont largement présents dans les résines et les huiles essentielles.
On distingue les monoterpènes linéaires, des monoterpènes monocycliques et
bicycliques

Monoterpène bicyclique
Monoterpènes monocycliques

I.2.2- Sesquiterpènes
Ce sont des composés à 15 carbones. Ils sont universellement présents chez les
végétaux ; C sont les sesquiterpène linéaires. Exemple : le farnésol présent dans
de nombreuses huiles essentielles, abondamment utilisé en parfumerie.
Les sesquiterpènes monocycliques et polycycliques (exemple : le
caryophyllène), un sesquiterpène bicyclique en partie responsable du piquant du
poivre.

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I.2.3- Diterpènes

Ce sont des composés terpéniques à 20 carbones.

Ex:
dérivés diterpènes: queue phytol des chlorophylles a et b
résidus terpéniques du tocophérol (vitamine E) et de la phylloquinone
(vitamine K1).

I.2.4- Triterpénoïdes
Ce sont des composés dérivés d’une unité à 30 carbones: le squalène.
- En fonction du nombre de cycles, les monoterpènes pentacycliques, des
monoterpènes stéroïdiens (tétracycliques).
- Les composés stéroïdiens sont largement représentés dans le monde animal,
- De nombreux phytostérols sont spécifiques des végétaux: saponosides et
cardénolides

Squalène

Les stéroïdes

Les stéroïdes sont des triterpénoïdes représentant une importante catégorie de


lipides, présents dans le règne animal et végétal (le cholestérol, les vitamines D,
les hormones sexuelles : œstrogène et progestérone, testostérone et
androstérone...).

NB : Une molécule de stéroïde se compose toujours de trois cycles


hexagonaux (A, B et C) et d'un cycle pentagonal (D).

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Formule générale d’une molécule de stéroïde

Exemples de Stéroïdes :

Progestérone Œstradiol

I.2.4- Tétraterpènes

Ce sont des composés terpénoïdes à 40 atomes de carbones. C’est le groupe des


caroténoïdes

- Exemple:
le bêta-carotène: pigment photosynthétique majeur,
le lycopène de la tomate pigment aux propriétés anti-oxydantes.

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I.3- Rôles pour la plante

Les terpénoïdes sont pour la plupart des anti-herbivores. Ils ont des effets
différents selon la plante, ils peuvent provoquer des convulsions, des allergies
de la peau. Ils ont un goût amer et peuvent également inhiber les
microsymbioses de l’appareil digestif. Les terpénoïdes contenus dans le latex
sont utiles à la plante pour lutter contre les prédateurs. En effet, quand des
insectes, comme les chenilles, pénètrent dans l’écorce d’un arbre producteur de
latex, celui-ci va réagir en leur envoyant un gel collant. Celui-ci empêche les
insectes de se nourrir et ces derniers finissent par mourir de faim. Les
terpénoïdes sont également utiles au développement de la plante :
• Les brassinostéroïdes stimulent la croissance des feuilles.
• Les gibbérellines (diterpènes) sont des hormones végétales impliquées
dans beaucoup de réponses de la plante. Elles provoquent aussi un
allongement de la tige et favorisent la floraison.
• Les caroténoïdes : ils sont impliqués dans la photosynthèse et l'aspect
coloré des végétaux (carotte, tomate,...), mais sont aussi précurseurs
d'hormones végétales (ABA et strigolactones).
• Les huiles essentielles ont une fonction de défense contre les herbivores
et les insectes.

I.4- Utilisations par l'Homme

De nombreux terpénoïdes ont la particularité de dégager de fortes odeurs. Ce


sont le menthol et le limonène qui permettent la fabrication d’huiles
essentielles. Ils sont utilisés comme antiseptiques et dans certains domaines
comme la cosmétique.
D’autres terpénoides ont des effets pharmacologiques et sont utilisés en
industrie. Ce sont :
- Le taxol, extrait de l’écorce de l’If du Pacifique, est un agent anti-
cancéreux. Il inhibe la division cellulaire par stabilisation de la tubuline et
du fuseau mitotique.
- Le latex de l’hévéa permet l’obtention du caoutchouc, utilisé dans de
nombreuses industries.

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II- LES ALCALOÏDES
II.1- Origine et localisation

Les alcaloïdes sont les principaux composants du métabolisme secondaire. Il en


existe environ 12000 répertoriés à ce jour. Ce sont des produits d'origine
végétale souvent basiques (goût amer) et plutôt hydrophiles. Les alcaloïdes sont
des hétérocycles possédant tous au moins un atome d'azote. Les principaux
précurseurs sont des acides aminés simples comme la tyrosine (tyr), le
tryptophane (trp), l'ornithine, l'arginine (arg) ou la lysine (lys).
Ils sont stockés dans les cellules végétales au niveau des vacuoles et possèdent
de nombreuses propriétés pour la plante. Ils jouent un rôle de défense et sont
également utilisés en médecine et pharmacie.

II.1.1- Les principaux précurseurs


Les alcaloïdes sont dérivés des acides aminés simples comme
- la tyrosine (tyr),
- le tryptophane (trp),
- l'ornithine,
- l'arginine (arg)
- la lysine (lys).

II.1.2- Classification des alcaloïdes


Il existe trois groupes d’alcaloïdes selon leur dérivé d’acide aminé ou la
possession dans leur structure, de d’un atome d’azote. On distingue :

II.1.2.1- Les alcaloïdes vrais


Ils dérivent d'acides aminés et comportent un atome d'azote dans un système
hétérocyclique. Ce sont des substances douées d'une grande activité biologique,
même à faibles doses. Ils apparaissent dans les plantes, soit sous forme libre,
soit sous forme d'un sel, soit comme N-oxide.

II.1.2.2- Les proto-alcaloïdes


Ce sont des amines simples, dont l'azote n'est pas inclus dans un hétérocycle. Ils
dérivent aussi d'acides aminés.

II.1.2.3- Les pseudo-alcaloïdes


Ils ne sont pas dérivés d'acides aminés. Ils peuvent cependant être indirectement
liés à la voie des acides aminés. Ils peuvent aussi résulter d'amination, ou de
réaction de transamination dans une voie connectée avec les précurseurs ou les
postcurseurs d'acides aminés.

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Tableau des caractéristiques des différents types d’alcaloides

Dérivé d'acide aminé Hétérocycle azoté


Alcaloïdes vrais oui oui
Proto-alcaloïdes oui non
Pseudo-alcaloïdes non oui/non

II.2- Rôles pour la plante

Le principal rôle des alcaloïdes est de défendre la plante contre les mammifères
et les insectes. Leur mode d'action dépend de l'espèce végétale :

- Les plantes d'espèces « Lupinus » et « Delphinium » possèdent des


alcaloïdes qui entrainent des syndromes neurologiques, des vomissements
etc... Ces espèces notamment « Lupinus » ont provoqués de nombreuses
intoxication et la mort de bétails.

- Les plantes de type digitale telle que la digitaline, entrainent une


augmentation des contractions cardiaques voire un arrêt cardiaque selon
la dose.

- Les Solanacées sont des plantes possédant des composés toxiques qui
entrainent la formation de pores dans les membranes.

En général, lors de l'absorption par l'insecte, les alcaloïdes sont réduits en


molécules non chargées, toxiques en milieu alcalin. Mais quelques insectes ont
la faculté de reconvertir les molécules toxiques en molécules non toxiques, ces
insectes deviennent alors résistants à l'alcaloïde absorbé et peuvent par la suite
les réémettre à leur tour pour se protéger. L’herbivore détourne alors les
métabolites végétaux à son profit.

II.3- Utilisations par l'Homme

De nombreux alcaloïdes sont utilisés en pharmacie :


• La morphine est un antalgique majeur extrait des graines du Pavot
Somnifère (Papaver somniferum)
• La codéine est utilisée en tant qu’analgésique et antitussif
• La quinine permet de lutter contre le paludisme

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• La scopolamine est utile au traitement de certaines douleurs et pour la
prévention du mal des transports
• L'atropine dilate les pupilles, ce qui facilite les examens
ophtalmologiques
• La vinblastine est utilisée en chimiothérapie anticancéreuse.

D’autres alcaloïdes ont des usages plus courants. Ce sont :


- la nicotine employée dans la fabrication d’insecticides et de cigarettes
- la caféine qui a des propriétés stimulantes ou sédatives.
- la cocaïne est une drogue ayant une action stimulante.

La Nicotine La Caféine

La Cocaïne

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III- LES COMPOSES PHENOLIQUES

III.1- Origine et localisation

Les composés phénoliques sont des molécules aromatiques constituées d’un


groupement phényle (C6) et d’un hydroxyle (-OH). Il en existe environ 4500.
Appartiennent à cette famille, les métabolites secondaires tels que les tanins, les
coumarines, la lignine ou encore les flavonoïdes.
Ces composés sont typiques des plantes vasculaires et ont colonisé
l’environnement aérien. La plupart de ces composés phénoliques dérivent
d’acides aminés aromatiques tels que la tyrosine et la phénylalanine.

III.1.1- Les principaux précurseurs

La plupart de ces composés phénoliques dérivent d’acides aminés aromatiques:

- la tyrosine
- la phénylalanine.

III.1.2- Classification

Le terme de composés phénoliques couvre un groupe très vaste et diversifié de


produits chimiques. Ces composés peuvent être classés dans un certain nombre
de façons.
Harborne et Simmonds (1964) ont classé ces composés dans les groupes en
fonction du nombre d'atomes de carbone dans la molécule.

structures classes
C6 Phénols simples
C6–C1 Acides phénoliques et composés dérivés
C6–C2 Acétophénones et acides phénylacétiques
C6–C3 Acides cinnamiques, coumarines,
isocoumarines, chromones
C15 Flavanols, flavanones, flavonols, flavonones,
anthocyanines et anthocyanidines
C30 biflavonyles
C6–C1–C6,C6–C1–C6 Benzophénones, xanthones et stilbéne
C6,C10, C14 quinones
C18 bétacyanines

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Lignanes , neolignanes Dimères ou oligomères
lignine polymères
tanins Condensé et hydrolysable

III.2- Rôles pour la plante

Les composés phénoliques comme


- la lignine a des rôles structurels. Elle est accumulée dans les structures de
conduction de la plante ce qui lui confère sa rigidité et une croissance
indéfinie. La lignine est la macromolécule polymère la plus abondante
après la cellulose. Tous les herbivores sont sensibles à cette molécule,
elle a des propriétés de défense mécanique contre les attaques.

Structure de la Lignine

- les flavonoïdes possèdent des rôles variés. Ce sont des phyto-œstrogènes,


qui ont une action néfaste sur l’activité testiculaire de certains prédateurs.
Ces molécules sont principalement responsables de la couleur, des
arômes et des parfums des plantes. Les flavonoïdes ont également
d’autres fonctions, à savoir un effet attracteur sur les pollinisateurs et un
effet protecteur des plantes contre les rayons UV.

Flavonol: 3-hydroxy-2-phénylchromén-4-one
Flavone: 2-phénylchromén-4-one

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- les coumarines interviennent dans un mécanisme de défense contre les
herbivores.

Coumarine
- les tanins ont également cette propriété. Ils sont stockés dans les vacuoles
de l’écorce, du bois et des feuilles. Certains mammifères comme les
moutons et les antilopes sont sensibles aux tanins. En effet, ils ont un
pouvoir d’astringence : ils agglomèrent les glycoprotéines de la salive qui
lubrifient la langue grâce à leur nombreux groupements hydroxyles ce qui
provoque le dessèchement de la bouche.
Ces composés phénoliques ont également des propriétés oestrogéniques, car ils
diminuent la fertilité des herbivores.

III.3- Utilisations par l'Homme

- La lignine fait partie des fibres alimentaires qui ont un rôle bénéfique
dans le transit intestinal et stimulent la flore bactérienne (diminution des
risques de cancer colorectal).
- Les flavonoïdes sont des substances cancéro-protectrices.
- Les coumarines et les tanins ont des propriétés anti-oxydantes. Les
coumarines dégagent une odeur rappelant la vanilline. Elles sont utilisées
en parfumerie et également par de grands chefs cuisiniers.

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Chapitre II :

Utilisation
pharmacologique et
conservation des
substances naturelles

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I- Utilisation pharmacologique des substances naturelles

Cette valorisation nécessite une approche multidisciplinaire associant


biologistes, naturalistes, chimistes de l’analyse ou de la synthèse organique,
scientifiques des ethnosciences…, ce qui aura de plus pour retombée, de
structurer la communauté scientifique. Les recherches devront s’appuyer sur
une nécessaire interdisciplinarité impliquant :

- Sciences de l’Homme, par leur contribution sur la diversité des savoirs


traditionnels relatifs à ladiversité biologique et son utilisation (ethnobotaniques,
ethnopharmacologie).

- Sciences de la Nature : Systématique et taxinomie pour la connaissance de la


diversité biologique, écologie pour la connaissance des interactions, sciences de
l’évolution, sciences de la conservation de la biodiversité aux différents niveaux
(du gène à l’écosystème).

- Biologie et physiologie pour la compréhension du fonctionnement du vivant.

- Chimie et biochimie pour la connaissance des structures moléculaires des


métabolites secondaires, de leur rôle et de leur dynamique.

I.1- Substances naturelles source de médicaments

Les substances naturelles ont été traditionnellement la source la plus efficace


pour la découverte de médicaments et elles sont toujours à l’origine soit de
molécules actives, soit de modèles pour la conception de nouveaux agents
thérapeutiques. Ainsi, encore aujourd’hui, plus de 60% des médicaments
sont soit des substances naturelles, soit des dérivés ou des analogues, soit
encore des molécules synthétisées sur le modèle de substances naturelles.

- En 2008, plus de 100 composés naturels ou dérivés étaient en phase


clinique avancée et une centaine en phase préclinique. De plus, les
substances naturelles ont été des outils moléculaires pour l’exploration des
fonctions biologiques régissant le monde vivant, permettant la découverte des
récepteurs, la compréhension du cycle cellulaire, la découverte des voies de
signalisation, des canaux ioniques...

Exemple-1: La colchicine (extraite de diverses plantes dont Colchicum


autunale) a permis de mettre en évidence des cibles comme la tubuline,
également cible d’antimitotiques comme le taxol.

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Exemple-2: Enfin, leur étude est à l’origine de la chimie organique dont elle a
contribué au développement. La connaissance des voies de biosynthèse des
substances naturelles ouvre des voies pour la synthèse biomimétique de
molécules d’intérêt et aussi pour l’utilisation de systèmes biosynthétiques dans
les biotransformations.

I.2- Etapes de l’étude pharmacologique des substances naturelles : étude


phytochimique et tests biologiques

Etape 1 : - Définition du matériel végétal (plante entière, fleurs, fruits, écorces,


racines…), le choix de l’espèce pouvant être orienté par son usage en médecine
traditionnelle, par une activité biologique démontrée de ses extraits bruts, pour
des critères chimiotaxonomiques… .

Etape 2 : - Extraction du matériel végétal par différents solvants de polarités


croissantes (ou, dans le cas des huiles essentielles, par hydrodistillation) et
résolution des mélanges complexes obtenus par chromatographies successives.

Etape 3 : - Identification des composés purifiés obtenus par analyses


spectroscopiques (UV, IR, SM, RMN…) conduisant à leur caractérisation
structurale.

Etape 4 : -Tests biologiques (activité cytotoxique, antioxydante, antifongique,


insecticide…)

NB. Le facteur limitant de cette évaluation peut être représenté par les faibles
quantités purifiées de composés (le plus souvent de l’ordre du mg).

Etape 5 : Les synthèses ou hémisynthèses organiques, lorsqu’elles sont


réalisables, constituent alors une intéressante alternative à l’étape.
Les résultats de cette étude phytochimique et biologique peuvent alors suggérer
différentes valorisation potentielles (matériel végétal « brut », extraits
spécifiques, composés isolés.

I.3- Applications des substances naturelles

Les applications des substances naturelles en pharmacologie (comme


antiparasitaires, antibiotiques, anticancéreux, immunosuppresseurs…), en

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agronomie (comme herbicides, insecticides, pesticides) et en cosmétologie
(comme actifs) sont innombrables. Ceci est dû pour d’une part, à leur utilisation
directe comme molécules actives (taxol, morphine…), mais aussi parce qu’elles
ont été des sources de nouveaux archétypes structuraux. Ainsi, la biodiversité
est une ressource pour identifier des « hits ». Ce qui conduit à la recherche de
ressources renouvelables pour passer des « hits » au « leads » (exemple du
Taxotère). La suite classique des actions est la caractérisation de
pharmacophores, l’optimisation des « leads » par la synthèse organique totale,
l’hémisynthèse, les biotransformations utilisant des enzymes ou des micro-
organismes.

- La modulation par la chimie de molécules naturelles, molécules « synthons »


précieuses par leur apport de la chiralité, ou de structures complexes coûteuses
(déacétyl-baccatine pour la synthèse du taxol, ou saponines stéroïdiennes pour
la production d’oestrogènes et d’anti-inflammatoires) montre les considérables
potentialités de l’hémisynthèse.

I.4- Quelques exemples d'actions concrètes de valorisation

I.4.1- Création d'une Chimiothèque

La mission principale est de fédérer les collections de produits de synthèse des


laboratoires publics français et d’en promouvoir la valorisation scientifique et
industrielle. Cette chimiothèque a été complétée par la constitution d’une
extractothèque, initiée à l’Institut de Chimie des Substances Naturelles (ICSN-
CNRS), constituée d’extraits principalement de plantes, mais aussi d’autres
organismes terrestres et marins et qui ont déjà fait l’objet de criblages
biologiques sur différentes cibles cellulaires ou enzymatiques.

I.4.2- Obtention de molécules d’intérêt

Plusieurs points sont à considérer :

a-) Le mode de sélection et de collectes des organismes producteurs.


Ce peut être pour les plantes l’approche ethnopharmacologique fondée sur
l’utilisation empirique, puis vérifiée d’une espèce (exemple de l’artémisinine,
un antipaludique), ou l’approche taxinomique, puis leur criblage sur un
microorganisme cibles.

b-) L’évaluation biologique.


Le criblage biologique d’une chimiothèque ou d’une extractothèque implique
l’organisation parallèle de ciblothèques, incluant les nouvelles cibles

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biologiques. L’apparition régulière de nouvelles cibles biologiques conduit à
réexaminer avec profit des substances naturelles déjà évaluées et à découvrir de
nouvelles applications pour une molécule déterminée, comme cela a été illustré
dans le passé par la cyclosporine, un antifongique d’intérêt mineur devenu un
immunosuppresseur d’intérêt majeur.

I.4.3- Criblage physico-chimique

Parallèlement au criblage biologique, des plates-formes pour le criblage


physico-chimique à haut débit et fondé sur des propriétés physiques et
chimiques (propriétés redox par exemple) en parallèle avec les propriétés
biologiques apporteraient des informations utiles.

I.4.4- Substances naturelles comme source d’innovations biotechnologiques

La valorisation pour leurs activités biologiques de biopolymères


(polysaccharides, héparines, amidon, lignine …) est à soutenir, d’autant que les
moyens analytiques permettent aujourd’hui de les analyser.

- Les huiles essentielles font l’objet d’un regain d’intérêt pour la santé et la
parfumerie et aussi pour l’industrie chimique et la synthèse.

- Un autre exemple est l’obtention de substituts du pétrole à partir du monde


vivant et qui représente un enjeu majeur.

La nature, source de carbone

La nature regorge de bien d'autres sources de carbone, en particulier le monde


végétal. Ainsi les arbres, les céréales, les plantes et les algues sont des sources
abondantes de molécules de tailles généralement importantes telles que la
cellulose, l'hémicellulose, la lignine, l'amidon, les huiles végétales, les
protéines, etc., auxquelles on peut faire subir une multitude de transformations
possibles pour les scinder et les convertir en intermédiaires chimiques simples -
glucose, glutamate, acide acrylique, acide lactique, isoprène, sorbitol, glycérol,
1,4-butanediol, furanes, furfural, épichlorhydrine, et divers types de monomère,
sans oublier l'éthanol, que l'on appelle « biocarburant », utilisables comme
précurseurs de matériaux et médicaments, qu'ils soient nouveaux ou déjà
existants sur le marché, et que l'on qualifiera de « biosourcés ».

I.4.5- Substances naturelles source de nouveaux procédés

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Elles ne doivent pas être considérées seulement comme une source de
molécules d’intérêt, car la connaissance des procédés biologiques par lesquels
ces molécules sont produites est aussi une voie de recherche très prometteuse. -
Ainsi parmi les questions qui méritent un approfondissement on peut citer celle
de savoir comment au cours du développement d’un organisme il est possible
d’influencer les voies de biosynthèse pour orienter vers la production de
métabolites particuliers, à l’exemple des phytoalexines élicitées chez les plantes
par la présence de molécules issues d’un pathogène, ou encore orienter le
métabolisme végétal pour accroître la teneur de constituants mineurs.

- La biochimie combinatoire et la canalisation métabolique ou «metabolic


channeling» sont des moyens de répondre à ces questions.

- Ainsi, au-delà de la bioprospection comme source de molécules ou d’objets,


les substances naturelles peuvent être une source d’inspiration pour
l’innovation, par les modèles qu’elle utilise ou par les procédés qu’elle met en
jeu pour produire ces objets (bioinspiration et biomimétisme).
La plante peut être considérée comme une usine pour la fabrication de
molécules. Une extrapolation des recherches dans ce domaine pourrait être la
biologie de synthèse, visant à créer de novo une cellule vivante en associant les
éléments du génie génétique, les nanotechnologies et les sciences de l’ingénieur.
Il convient de garder à l’esprit, le temps pris pour passer de l’aspect recherche à
l’aspect valorisation industrielle et de tenir compte de la durabilité d’un produit
en particulier dans des domaines comme ceux des actifs en cosmétique.

I- CONSERVATION DES SUBSTANCES


NATURELLES

II.1- Gestion durable

La biodiversité végétale est un gisement d’immenses potentialités, qui compte


tenu des menaces et de notre connaissance insuffisante, demande un
recensement systématique des flores. En effet, les savoirs traditionnels liés aux
milieux naturels à l’environnement sont également menacés de disparition par
l’évolution des sociétés humaines (modes de vie, urbanisation) et le lien entre
diversité biologique et diversité culturelle ne doit pas être rompue.
Le défi est de répondre durablement aux besoins des sociétés humaines en
apportant des bases scientifiques et technologiques pour rendre pérenne notre

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gestion des ressources connues et exploitées, et d’en découvrir de nouvelles en
réduisant la pression. Ce défi doit être relevé dans le respect des conventions
internationales, en particulier de la Convention sur la Diversité Biologique
(CBD). Et cela passe nécessairement par une collaboration avec les pays en voie
de développement des régions intertropicales possédant une riche biodiversité et
donc concerne les populations locales.
La conservation de la ressource, c’est-à-dire la protection et la gestion durable,
implique la mise en œuvre de mesures telles les suivantes:

- Mise en place de zones de protection environnementale ou de centres de


conservation. Sauvegarde d’aires de forêts. Développement d’indicateurs de
dégradation des milieux.

- Conservation des graines et patrimoines génétiques. En plus de banques de


graines, organisation de conservatoires in situ et conservation des milieux.

- Conservation des connaissances liées à l’utilisation traditionnelle des plantes


et autres organismes vivants et des facteurs culturels, en associant les
populations locales.

II.2- Les aspects éthiques et juridiques de la ressource

Les droits de propriété intellectuelle sur les innovations technologiques sont


reconnus (aspects juridiques, droits des brevets), les droits des communautés
autochtones et locales doivent aussi être pris en compte, en particulier quand
sont impliquées les connaissances ancestrales et les pratiques traditionnelles des
communautés.
Les aspects éthiques et juridiques passent par :

- Les collectes très ciblées et restreintes fondées sur des observations


incorporant une approche écologique. Abandon du prélèvement sauvage et de
l’exploitation non durable, conduisant à l’extinction de la ressource, comme
c’est le cas avec la surexploitation de certaines espèces qui les met en danger
(bois de santal/ bois de rose/ bois tropicaux/ médecine traditionnelle chinoise et
collecte des espèces sauvages…).

- La mise en culture de plantes. Recherches sur l’influence de la mise en culture


(et des conditions de culture) d’une plante sauvage sur sa composition en
métabolites.

- L’amélioration de la résistance des clones cultivés aux phytopathogènes.

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- L’Evaluation des conséquences de la perte de diversité biologique.

- L’approche économique : développer les échanges de savoir-faire et les


activités de substitution et payer un juste prix pour un développement durable.
Nous n’avons pas le droit d’exterminer ce que nous n’avons pas créé. Un
humble végétal, un insecte minuscule contiennent plus de splendeurs et plus de
mystères que la plus merveilleuse de nos constructions. »

CONCLUSION
Il faut donc continuer à poursuivre la valorisation des métabolites secondaires
pour
la découverte de nouvelles cibles biologiques en continuant de cribler des
chimiothèques de substances naturelles ou des extractothèques (collections
d’extraits) sur des cibles pharmacologiques déterminées à fin de mettre en
évidence de nouvelles molécules « têtes de séries », potentiels médicaments ou
modèles de médicaments.
développer les recherches sur le rôle des médiateurs chimiques dans les
écosystèmes. Ceci concerne l’étude chimique des interactions biotiques, celle
des dialogues moléculaires entre partenaires pour l’établissement de symbioses,
l’étude du fonctionnement au niveau moléculaire des associations, l’étude des
relations hôtes/parasites… En bref, il s’agit de développer l’écologie
moléculaire.

Cette valorisation doit être réalisée dans un esprit de développement durable et


le respect des conventions internationales. Elle implique la mise en place de
grands instruments pour développer les évaluations et les criblages biologiques,
physico-chimiques, écologiques (plates-formes protéomiques, ciblothèques,
naturothèques…). Ce peut être une plate-forme centralisée ou des plates-formes
délocalisées et spécialisées travaillant en réseau avec les moyens nationaux ou
régionaux pour les faire fonctionner.

Les aspects formation sont une composante essentielle et l’ensemble devra


s’appuyer sur la nécessaire pluridisciplinarité associant les sciences de la
Nature, de l’écologie à la biologie, aux sciences physico-chimiques et aux
sciences de l’Homme.

LEXIQUE :

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Un pharmacophore est constitué par une partie pharmacologiquement active d'une molécule
servant de modèle. Les pharmacophores sont donc des ensembles d'atomes actifs utilisés dans
la conception de médicaments. Le pharmacophore est une représentation géométrique
idéalisée, seule la modélisation en 3D peut permettre une utilisation optimale pour la création
de nouveaux médicaments.

Un pharmacophore est l'ensemble des groupements fonctionnels disposés selon un


arrangement spatial adéquat, assurant la fixation du médicament sur le récepteur et donc
capable d'induire la réponse physiologique. Le squelette de la molécule assure le maintien de
cet échafaudage et ne joue a priori pas de rôle déterminant dans le déclenchement de la
réponse (pour autant qu'il n'empêche pas l'interaction pour raisons d'encombrement stérique).
En théorie les médicaments qui provoquent une réponse physiologique donnée sur un
récepteur donné devraient posséder le même pharmacophore.

Taxotère ou docétaxel appartient au groupe de médicaments qui combattent le cancer et que


l'on appelle des antinéoplasiques, et plus précisément au groupe des antinéoplasiques
désignés taxanes. Le docétaxel tue les cellules cancéreuses en parasitant l'action du matériel
génétique (ADN) qui est nécessaire à leur croissance et à leur reproduction.

Synthon : Entité moléculaire mise en œuvre dans la synthèse d’une molécule afin d’y introduire un
motif structural donné.
C’est une « molécule fictive » dont la représentation symbolise la réactivité. Ce concept est utilisé
dans la planification de rétrosynthèses de composés organiques complexes. Ils sont dérivés d'une
décomposition en fragments simples de la molécule que l'on cherche à assembler.

Chiralité : un composé chimique est dit chiral s'il n'est pas superposable à son image dans
un miroir, autrement dit s'il ne présente aucune symétrie d'axe.

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