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North versus Williamson ? Oppositions et complémentarités dans la Nouvelle


Economie Institutionnelle

Working Paper · January 2004

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Didier Chabaud Claude Parthenay


Université de Paris 1 Panthéon-Sorbonne University of Ottawa
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Yannick Perez
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North versus Williamson ? Oppositions et
complémentarités dans la Nouvelle Economie
Institutionnelle

Didier CHABAUD1, Claude PARTHENAY2, Yannick PEREZ3

Working Papers du Groupe Reseaux Jean Monnet N◦ 14 (www.GRJM.net)

Résumé : Lorsque l’on compare les écrits de North et Williamson, il apparaît, qu’au-
delà des différences d’angles de vue, leurs réflexions respectives ont permis de faire
progresser le programme de recherche de la Nouvelle économie institutionnelle tout en
renforçant l’unité. Dans un monde de rationalité limitée, sans exclure les comportements
opportunistes et la recherche de l’intérêt individuel à partir d’une rationalité calculatrice, il
faut prendre en compte les autres facteurs explicatifs des comportements (idéologies chez
North, atmosphère chez Williamson). Loin de « l’économie du Nirvana », les agents sont
contraints par des chemins de dépendance institutionnels dans lesquels ils cherchent des
solutions « remédiables ».

Abstract : When one compare the writings of North and Williamson, it appears, that
beyond the differences in perspectives in the research program of the New institutional
economy, it's possible to reinforce the links. In a world of limited rationality, without
excluding the opportunist behaviours and research from the individual interest, it is necessary
to take into account the other explanatory factors of the behaviours (ideologies for North,
atmosphere for Williamson). Far from "the economy of the Nirvana", the agents are
constrained by institutional path-dependency in which they seek "remediable" solutions.

1 Université de Cergy-Pontoise, ATOM (Université de Paris I) & ADIS-GRJM (Université de Paris XI).
2 CEPN (Paris XIII) & Université de Cergy-Pontoise.
3 ADIS-GRJM (Université de Paris XI).

1
La Nouvelle Economie Institutionnelle (NEI) tend à s’imposer comme un programme
de recherche spécifique (Ménard [2000a], Ménard [2000b], Brousseau & Glachant [2002]).
L’intégration d’un nouveau programme de recherche dans un champ scientifique présuppose
une double capacité de ce courant.
1) Le programme doit construire et forger ses propres outils (Coase [2000]),
2) Le programme doit s’imposer dans le champ considéré soit en réalisant des
fertilisations croisées avec d’autres courants de pensée, soit en apparaissant comme un
courant dont les propositions doivent être prises en compte. En ce sens, si le paradigme
keynésien a réussi à s’imposer rapidement, il n’en va pas de même du paradigme coasien dont
l’article inaugural date de 1937 (Werin [2000]), alors que sa redécouverte et relecture date du
début des années soixante-dix.
Cependant, la condition minimale de construction d’un nouveau courant de pensée est
qu’il n’existe pas de contradictions insurmontables entre les auteurs qui s'en réclament . De ce
point de vue, même si la référence à Coase et au concept de « coûts de transaction » est à
l’évidence partagée par North et Williamson, il n’en reste pas moins que les champs
d’investigation de ces deux auteurs sont différents (macroéconomie et dynamique de long
terme pour North, microéconomie et efficience organisationnelle pour Williamson). Cette
division du travail et le déploiement des deux calendriers de recherche ont-ils conduit à des
ruptures ou des oppositions irrémédiables entre les deux auteurs ? L’insistance sur la
recherche de l’efficacité organisationnelle de Williamson est-elle compatible avec
l’acceptation, par North, de l’existence d’institutions inefficaces ? L’insistance de North sur
les mécanismes institutionnels comme régulateurs en situation d’incertitude des agents est-
elle compatible avec celle de Williamson sur les comportements opportunistes des agents
perturbateurs des fonctionnements organisationnels ? La réponse à ces questions passe par
une analyse comparative des deux lignes de travaux. Nous soutiendrons dans cet article
qu’au-delà de différences de champ et d’angles de vision, la NEI constitue bien un
programme de recherche homogène. Ainsi, nous montrerons que des points d’accord existent
entre ces deux auteurs même s’ils sont marqués par des différences de sensibilité (section 1).
L’ampleur de leurs divergences sera ensuite évaluée (section 2), permettant de souligner la
cohérence de la théorie autour de quelques points forts conceptuels (section 3).

2
1 - Le Tordesillas de la nouvelle économie institutionnelle

L’idée d’un partage du champ d’étude4 de la NEI en deux branches est revendiquée
tant par Williamson que North. Quoique partageant un même accord sur l’importance des
coûts de transaction et les hypothèses retenues, ces deux branches auraient des niveaux
d’analyse différents.

1.1- « Un même accord sur l’importance des coûts de transaction »

Les deux courants partagent un même accord sur l’importance des coûts de
transaction et de la transaction.

En effet, les coûts de transaction occupent dans les deux cas une position centrale,
même s’ils sont éclairés dans des perspectives différentes. Williamson [1985] insiste sur les
coûts de transaction comme paramètre de référence dans le choix des structures de
gouvernance des relations inter-individuelles : c’est l’hypothèse d’alignement entre les
attributs de la transaction et les structures de gouvernance, l’alignement étant effectué de
manière à minimiser la somme des coûts de production et de transaction.
North insiste quant à lui sur l’impact des coûts de transaction dans le développement
économique. Les institutions modifient les coûts de transaction supportés par les agents, et
rendent ainsi plus ou moins aisé le développement des échanges, et plus largement la
performance économique. Historiquement, le développement des échanges s’est accompagné
d’une baisse du coût de la transaction proprement dit, mais d’une hausse (plus importante
selon North) des coûts de transaction indirects associés à l’échange – i.e. du coût des
institutions qui assurent l’exécution (enforcement) des engagements. Il convient alors de
différencier le niveau d’analyse auquel on se situe, notamment en mettant en exergue les
institutions qui sont regroupées sous la dénomination de “secteur transactionnel” (North
[1994a]).
Cette différence d’accent conduit à des choix de méthodes différents. Ainsi, North a
longtemps cherché à mesurer les coûts de transaction, tandis que Williamson a toujours
considéré cette tâche comme délicate. Cette opposition provient des différences de niveau
d’approche. Le point de vue global de North le conduit à utiliser des outils quantitatifs

4 Par le traité de Tordesillas de juin 1494, le Pape avait fixé la ligne de démarcation entre les possessions
portugaises et espagnoles sur les terres découvertes par Christophe Colomb.

3
macroéconomiques simples, tandis que celui de Williamson nécessiterait des mesures très
précises, difficiles à conduire lorsque l’on étudie une transaction entre deux agents
économiques. North met l’accent sur les ressources consacrées au secteur des transactions au
sein de l’économie globale. Il estime, qu'entre 1870 et 1970, le secteur des transactions a vu
sa part progresser dans le PNB de 25 à 45%. Le pourcentage des salariés employés dans des
départements achats et marketing ou comme managers, superviseurs, ou employés a cru de 3
à 25% dans les mines, 4 à 30% dans l’industrie, et de 13 à 18% dans les transports et de 6 à
28% dans les services (Wallis et North [1986 : 107-108]). Cette dimension est occultée par
l’analyse de Williamson, non par volonté de l’éliminer, mais parce que ses analyses le
conduisent à rechercher des formes de gouvernance génériques.

Au-delà des coûts de transaction, c’est la transaction elle-même qui est centrale pour
ces deux auteurs. Chez Williamson, elle constitue l’unité fondamentale d’analyse, ses attributs
déterminent les structures de gouvernances adoptées. Chez North, la transaction est également
centrale – quoique cela ne soit pas affirmé ou revendiqué à notre connaissance – dans la
mesure où les caractéristiques des institutions, d’une part, déterminent la forme
d’encadrement et le niveau de développement des transactions, et, d’autre part, peuvent
susciter l’émergence de certaines institutions intermédiaires. Ainsi, la présence de dispositifs à
même de sécuriser les transactions a-t-il joué un rôle important dans le développement des
foires de Champagne ou de la Hanse (cf. Milgrom, North et Weingast [1990]), tandis que
l’absence d’une institution équivalente est perçue comme importante dans le blocage du
développement du souk. En cela, on retrouve l’éclairage différent sur la transaction. Ce qui
importe pour Williamson est de comprendre les caractéristiques des attributs d’une transaction
particulière5, tandis que pour North la transaction est équivalente à l’échange marchand, quels
que soit les attributs particuliers de ce dernier. La forme que prendront les transactions sera
directement reliée aux institutions en place, créées dans la société, et North ne se préoccupera
pas de telle ou telle transaction bilatérale particulière. On constate encore la présence des
différences de niveaux d’analyse : Williamson, pour une transaction donnée, cherchera à
saisir les structures de gouvernance mises en place pour l’encadrer, tandis que North se
préoccupera lui des institutions mises en place pour l’encadrer.

1.2- Un même accord sur les hypothèses et méthodologie

5 Les trois attributs de la transaction sont l’incertitude, la fréquence et la spécificité des actifs. Pour une
présentation synthétique, voir Williamson [1985, chap. 2].

4
Tant sur la démarche que sur les hypothèses, North et Williamson se rejoignent.

Les analyses conduites relèvent dans les deux cas de l’individualisme


méthodologique, d’une explication du comportement des acteurs individuels en termes de
rationalité. Cette dimension est affirmée chez Williamson, qui bâtit sa théorie en partant
d’hypothèses comportementales individuelles et se focalise sur l’explication des instances qui
encadrent les transactions interindividuelles6. Cette dimension est non moins présente chez
North qui insiste sur la nécessité de partir des calculs des individus pour saisir les choix ou
pour comprendre l’évolution des institutions (North [1986]), et qui réaffirme un présupposé
individualiste (North 1990a : 5]) à l’étude des institutions. Lorsque North rend un hommage
appuyé au cadre d’analyse développé par Marx, qui est « le plus puissant des énoncés
existants sur le changement séculaire précisément parce qu’il inclut tous les éléments laissés
de côté dans le cadre néoclassique : institutions, droits de propriété, Etat et idéologie »
(North [1981 : 61])), il n’en souligne pas moins, comme limitation importante, le fait que les
« classes sont des groupes beaucoup trop larges et différenciés pour servir d’unité première
d’action. Le calcul individualiste de l’économie néoclassique est un bien meilleur point de
départ » (North [1981 : 61]). Cet accord méthodologique se retrouve également à propos des
hypothèses fondamentales de leurs constructions théoriques.

Les hypothèses retenues sont également proches. North [1990a : chapitre 3] distingue
ainsi la vision des motivations humaines de l’analyse de l’environnement. L’analyse insiste
sur la pluralité des motivations des agents, en notant que celles-ci ne sont pas seulement
égoïstes, et qu'elles ne sont pas obligatoirement compatibles avec l’idée de maximisation7.
Une présentation claire du rattachement de North à l’analyse en termes de rationalité limitée
(ou procédurale) est fournie dans North [1990b]. En cela, North illustre bien la difficulté
d’échapper aux schémas mentaux qui nous ont formés, et qu’il reprend dans sa théorie en
considérant que « les individus analysent l’environnement en traitant l’information à l’aide de
schémas mentaux préexistants à travers lesquels ils perçoivent l’environnement et résolvent
les problèmes auxquels ils sont confrontés » (North [1990a : 20]).

6 Voir notamment Williamson [1975 et 1985 : chapitre 1].


7 Notons que cet aspect n’a pas toujours été affirmé. North [1986] présente encore une analyse fondée sur des
individus maximisateurs, alors même que les fondations de son analyse laissent la part belle aux limitations
informationnelles des agents.

5
Il ressort alors que North et Williamson se rejoignent dans l’affirmation de la filiation
avec Herbert Simon (North [1990a : 22-23], Williamson [1975, 1985]), même si cette
hypothèse de rationalité limitée est appliquée à des problèmes différents. Pour North, les
institutions permettent de réduire les incertitudes (pp. 27 et sv), ce qui l'amène à insister sur le
fait que l’aspect central de la limitation de la rationalité est le coût de mesure, le coût
d’obtention de l’information qu’elle occasionne. Pour Williamson, la rationalité limitée dans
un contexte d'incertitude « rend les contrats inévitablement incomplets », et permet l'exercice
de comportements opportunistes.
Le partage des hypothèses fondamentales étant étayé, il convient maintenant de
mesurer et de caractériser les différences entre ces deux auteurs.

2- Des oppositions en trompe-l’oeil ?


Si les deux branches s'accordent sur les hypothèses, plusieurs différences peuvent
être avancées, tenant à la vision en termes d’efficacité et à la prise en compte de la dynamique
économique. Nous montrerons que ces deux ensembles de travaux sont fondamentalement
cohérents, quand bien même les oppositions ont été fortes par le passé. L’explication de cet
apparent paradoxe réside dans le fait que tant les analyses de North que de Williamson ont
évolué au cours du temps, et se sont rapprochées.

2.1- La vision de l’efficacité : du désaccord à la convergence ?


Lorsque North [1981] abandonne la vision en termes d’efficacité des institutions
défendue dans North et Thomas [1973] (cf. North [1990a : 7]), il apparaît alors que les deux
auteurs divergent. North [1981] laisse, en effet, la possibilité aux institutions inefficaces
socialement d’exister (du fait de leur soumission à des agents recherchant leur intérêt
individuel) alors que Williamson [1985], tout en reconnaissant que la pression concurrentielle
prend du temps à s’exercer, fait encore de la recherche d’efficacité un vecteur de progrès
central8. L’opposition peut sembler importante, dans la mesure où, pour North, l’efficacité
économique n’est en rien acquise. Au contraire, les agents qui contrôlent l’Etat cherchent
avant tout à favoriser les institutions qui leur permettent de prélever une part importante de la
rente. Ils ne sont pas, dès lors, préoccupés par une recherche d’efficacité économique, mais

8 Cf. notamment Williamson [1985: 22-23, et n. 14 page 23]. Egalement page 17 l’accent est mis sur l’efficacité
et le fait que les innovations organisationnelles méritent un examen en termes de coûts de transaction.

6
par la recherche d’un intérêt individuel (cf. l’analyse des institutions espagnoles au 16ième
siècle, ou celle du fonctionnement du souk)9.

On doit néanmoins limiter l’opposition entre les deux auteurs.


Tout d’abord, la vision en termes d’efficacité développée par Williamson s’explique
par le fait que les agents, dans un contexte concurrentiel, cherchent la structure de
gouvernance la moins coûteuse. Or, leur symétrie de principe liée à leur clairvoyance (far-
sighted) fait que les agents ne s’engagent dans des relations de long terme avec investissement
dans des actifs spécifiques que si ils ont pu mettre en place des clauses de sauvegarde, qui les
protègent contre l’opportunisme de leur partenaire.
Ensuite, la vision en termes d’inefficacité développée par North se situe sur un plan
différent. Le terme est utilisé « pour spécifier le développement d’un ensemble de contraintes
qui ne conduira pas à la croissance économique » (North [1989])10. Le groupe d’agents qui
contrôle l’Etat développe des institutions qui sont favorables à une captation de la rente, et à
la pérennité de leur situation11. Pour le dire différemment, ces agents, opportunistes, essaient
de sauvegarder leur position, au prix d’institutions socialement inefficaces. Chez North, les
individus à la tête de l’Etat développent des institutions qui sauvegardent leurs intérêts : elles
sont ainsi efficaces à leurs yeux (adaptées à la maximisation de leur satisfaction). Williamson,
en se focalisant sur les structures de gouvernance, s’intéresse au contraire à la mise en place
de structures qui sont efficaces pour les partenaires de la transaction, i.e. qui sont pour eux
« socialement efficaces ». Autrement dit, l'hypothèse de rationalité limitée implique
l'existence d'institutions qui peuvent être inefficaces par captation de la rente de certains
acteurs qui agissent ainsi de façon rationnelle (North). Cette rationalité est bien de même
nature que celle des agents qui, dans un contexte institutionnel donné, se dotent d'un cadre
contractuel pour encadrer leurs transactions et limiter les comportements opportunistes
(Williamson).
Ainsi l’opposition qui est apparente lorsque l’on se focalise sur l’idée générale
d’efficacité (i.e. de la survie des formes les moins coûteuses) se résout d’elle-même si l’on
considère l’efficacité comme le fait d’avoir des actions adaptées aux objectifs des individus

9 Il est intéressant de noter le parallèle entre cette analyse et la vision parétienne ou marxienne des institutions,
celles-ci étant contrôlées par des agents égoïstes.
10 Pour une discussion de l’efficacité paretienne cf. North [1986], celle-ci étant conçue comme peu opératoire
dans un cadre d’analyse institutionnaliste, dans la mesure où l’on touche au cadre dans lequel se situent les
agents calculateurs.
11 C’est ce facteur qui explique aussi la dynamique des institutions, le fait que des révolutions et évolutions se
produisent à long terme.

7
(i.e. des actions rationnelles). En somme, l’opposition apparente entre les deux courants de la
nouvelle économie institutionnelle provient avant tout d’une différence d’optique, et de
niveau d’analyse, mais ne renvoie en rien à des options théoriques incompatibles.

2.2- Dynamique historique et statique comparative : désaccord ou


différence ?
Sur ce point, la différence semble forte. North [1990a] souligne que l’évolution des
institutions renvoie à un problème d’interaction entre les institutions et les organisations. Il
insiste sur le fait que le sentier de développement institutionnel est façonné par des effets de
bouclage (lock-in) et des effets en retour (feedback). Il élabore ainsi une théorie
évolutionniste. Cette dimension historique, non présente chez Williamson, entraîne t’elle une
opposition théorique entre les deux auteurs ? En effet, Williamson se préoccupe plus des
“vagues de l’océan” que des “lames de fond” de l’histoire, pour reprendre l’image employée
par Fernand Braudel. L’insistance sur la dynamique historique par North est-elle recevable
dans le cadre williamsonien ? Le doute existe sur ce point, tant Williamson met l’accent sur
une méthodologie de statique comparative qui semble éluder les trajectoires, les effets
d'enfermement dans un sentier lié à la spécificité des actifs. Néanmoins, la centralité des actifs
spécifiques dans la théorie de Williamson conduit obligatoirement à être attentif à la
“microhistoire” des transactants. Ainsi, la référence appuyée au cas GM-Fisher Body est
révélatrice de l’importance de l’histoire dans l’évolution d’une relation (cf. Klein, Crawford et
Alchian [1978], Williamson [1985]).
L’évolutionnisme de North est quant à lui relativement différent des théories
évolutionnistes « traditionnelles ». North [1990a : 94-95] rend ainsi hommage aux travaux
évolutionnistes de Arthur et David, mais insiste sur le fait qu’en dernière instance ce sont les
organisations, comme acteurs du changement institutionnel, et non les dimensions
technologiques, qui sont centrales. La focalisation sur les phénomènes de rendement croissant
est réductrice si elle ne traite pas de leurs conséquences transactionnelles, et nécessite de
prendre en compte les imperfections des marchés et leurs conséquences en termes de coûts de
transaction. Il rejoint ainsi, quoique à un autre niveau d'analyse, l'insistance mise par
Williamson sur la centralité des coûts de transaction dans les choix organisationnels.
Alors que l’importance des trajectoires et des dynamiques historiques est réaffirmée
par North [2003], il n’y a pas dans la réflexion économique de Williamson de prise en compte
de l’Histoire, même si l'insistance sur la spécificité des actifs conduit à prendre en compte les
phénomènes d'irréversibilité.

8
2.3- L’accent sur les phénomènes d’exécution (enforcement)

Pour North l’accent sur l’exécution marque une grande différence entre l’approche des
coûts de transaction de Williamson et la sienne. Selon lui, Williamson fait l’hypothèse que
« les conditions d’exécution sont imparfaites (autrement l’opportunisme ne paierait jamais),
mais n’en fait pas une variable explicite de son analyse. Une telle approche ne rend pas
l’analyste capable de traiter de l’évolution historique, dans laquelle les problèmes clés du
changement institutionnel, de la contractualisation, et de la performance renvoie au degré
avec lequel il est possible d’assurer l’exécution des contrats à faible coût » (North [1990a :
54-55, n 1]).
Il nous semble que, sur ce point, North condamne rapidement Williamson. Le
problème des difficultés d’exécution des contrats est important chez Williamson, pour saisir le
choix et l’évolution des structures de gouvernance et leur contenu. Ainsi, la discussion des
clauses d’otage, et plus largement des clauses de sauvegarde est articulée aux coûts de
règlement des litiges. En outre, son analyse de la firme moderne repose largement sur
l’utilisation des outils analytiques de la « branche de la mesure », même s’il ne reconnaît que
rapidement sa dette lorsqu’il écrit que sa « discussion de l’organisation du facteur travail et
des entreprises donne une grande importance aux aspects de mesure”, qui “apparaissent en
l’état comme très importants voire essentiels » (Williamson [1985 : 211]).
La différence réside simplement dans le fait que Williamson ne cherche pas à saisir le
problème de l’évolution par lui-même. Il raisonne à cadre institutionnel donné et, ce faisant,
n’étudie pas comment l’évolution des techniques d’exécution peut permettre de saisir une
évolution des pratiques contractuelles des agents. Par contre, les caractéristiques du système
institutionnel à l’oeuvre dans l’exécution des contrats (système judiciaire, notamment)
déterminent les coûts du recours au système judiciaire pour régler les litiges et faire respecter
les clauses contractuelles. Les atouts et limites d’investigation du système judiciaire
expliquent alors les précautions et contenus donnés aux accords entre agents.
Ce n’est donc pas parce qu’il n’étudie pas le problème d’exécution par lui-même que
Williamson 1) ne le prend pas en compte, et 2) ne dispose pas de l’appareillage théorique pour
l’étudier. Simplement l’attention est portée sur d’autres thèmes de recherche, ce qui le conduit
à négliger la dimension historique. Plus que d’une opposition fondamentale, il nous semble
qu’il s’agit d’écarts liés à une différence de niveau d’analyse : la vision northienne des effets

9
de lock-in consiste à constater que dans un contexte institutionnel donné, les coûts de
changement de ce contexte sont élevés et, en conséquence, le non respect des règles a de
fortes chances d'être inefficace. A l'inverse, dans une relation contractuelle donnée, le
comportement opportuniste d'un agent n'implique pas une remise en cause de la règle en tant
que telle.

2.4- L’accent sur les motivations : opposition ou inachèvement du propos ?

Williamson [1985 : 47-51] insiste sur l’opportunisme, en mentionnant le fait que les
agents recherchent leur intérêt personnel avec malice, tandis que North [1990a] insiste sur la
diversité des motivations, et n’hésite pas à mettre en exergue la présence d’altruisme. Plus que
l’altruisme, North insiste sur l’importance des idéologies, ayant fondé la dynamique de ses
travaux récents sur ces questions (Denzau & North [1994], North [2003]). Même si ce
concept est défini de manière large, renvoyant aux systèmes de pensée et valeurs en cours
dans une société (North [1981]), il semble pouvoir donner lieu à un clivage entre ces auteurs.
En effet, North insiste sur la possibilité des comportements coopératifs, voire
altruistes, en soulignant leur connexion avec les systèmes de valeur en vigueur dans une
religion, une ethnie, voire une société. La position de Williamson peut sembler inconciliable,
compte tenu de l'accent mis sur l'opportunisme et la faible place laissée à la confiance, qui
n'est pas de mise dans les relations d'affaires (Williamson [1993]). Un tel jugement semble,
cependant, à discuter.

Tout d'abord, il convient de cerner la portée de cette opposition. Williamson s'est, de


longue date, interrogé sur les perceptions et mobiles des individus, avant d'infléchir sa
position sur l'opportunisme ces dernières années. Historiquement, Williamson [1975, 1996a] a
introduit dans son cadre théorique un concept destiné à prendre en compte les différences de
perception et lecture des événements : « l’atmosphère ». Ce concept renvoie aux valeurs en
oeuvre dans le contexte relationnel ou social des agents. Simplement, il considère ne pas avoir
fait d’avancée dans l’opérationnalisation de ce concept et restreint son utilisation à des cas
très précis (Williamson [1996a]). S'agit-il alors d'une opposition avec North ou, plus
simplement, du constat d'une question ouverte sur l'agenda de recherche pour laquelle
l'analyste ne dispose pas d'une vision stabilisée ?

10
Par ailleurs, Williamson a nuancé sa présentation de l'opportunisme. Celui-ci est
désormais présenté comme désignant le fait que « certains individus sont opportunistes
certaines fois et (qu’) il est coûteux d’établir le degré de confiance différentiel à accorder aux
individus ex ante » (Williamson [1996b : 48]). Il convient en somme de se garder d’une
vision naïve de la coopération compte tenu de l’incapacité à s’assurer ex ante de la bonne foi
durable du partenaire (Charreaux [1999 : 70n2]). Des agents en relation mettent en place ex
ante des dispositifs de nature à éviter ou à diminuer les manifestations d’opportunisme, mais
leur quête est rendue délicate par leur rationalité limitée. Ainsi, le problème n’est pas que
l’hypothèse d’opportunisme empêche de penser la coopération. Elle empêche seulement de la
postuler, et oblige à s’intéresser aux modalités de construction et de stabilisation d’une
coopération mutuellement profitable. Dès lors, les idéologies, ou « l'atmosphère »,
constitueraient des paramètres influençant l'action individuelle (voire collective), sans pour
autant éliminer irrémédiablement la possibilité de comportement opportuniste.
Dans le même temps, la trajectoire de North l'a conduit à renforcer l'interrogation sur
la formation de la psychologie individuelle, et l'évolution de celle-ci au cours du temps.
Cependant, North ne conclut pas a priori sur la vision du comportement individuel, il cherche
des clés pour saisir les phénomènes et comportements individuels, et les trajectoires
historiques tandis que Williamson prend ces dimensions pour données en montrant que celles-
ci sont des paramètres influençant les acteurs12.

3- Vers une unité renforcée ?


La théorie des coûts de transaction constitue un programme de recherche en
développement : son contenu, ses points de vue et ses prises de position théoriques évoluent.
Ainsi, une opposition conceptuelle valable un temps, peut très bien disparaître par la suite
(tout comme l’unité peut se muer en opposition). Des différences, parfois importantes, entre
North et Williamson ont été mises en exergue. Plusieurs d’entre elles existaient encore au
début des années 90.
Il nous semble que l’accent récemment mis par Williamson sur le concept de
remédiabilité (remediableness) est de nature à renforcer l’unité théorique de la théorie des
coûts de transaction, tout en permettant de faire coexister les différences de sensibilité de

12 Cependant, et à l'instar de North, cette position confronte les deux auteurs à un problème : si les idéologies
sont importantes et impactent les comportements individuels, la question suivante apparaît : comment
comprendre la dynamique des acteurs dans un monde où de multiples environnements institutionnels formels et
informels coexistent, sachant que les acteurs, comme les organisations, sont présents sur des pays différents ?

11
chacun des courants. Après avoir présenté et recadré ce concept, nous montrerons dans quelle
mesure il modifie l’état des oppositions.

3.1- La remédiabilité : un “concept pragmatique” ?


« Une condition est remédiable si une alternative supérieure réalisable peut être
implémentée avec des gains nets” (Williamson [1996a : 379]. Williamson fait de la
remédiabilité un critère d’analyse. Il l’utilise en effet comme base de comparaison, affirmant
que “l’économie des coûts de transaction fuit les idéaux hypothétiques et soutient que les
comparaisons pertinentes se font entre des alternatives réalisables, lesquelles sont toutes
imparfaites » (Williamson [1996a : 7]).
Dès lors, « le critère pertinent est ainsi celui de la remédiabilité, selon lequel un
résultat pour lequel aucune alternative supérieure ne peut être décrite et implémentée avec
des gains nets sera présumé être efficace » (Williamson [1996a : 7 et 195]). On a donc un
critère d’analyse éminemment « pragmatique », dans la mesure où il refuse l’idée de formes
d’organisation idéales à partir desquelles juger le réel (cf. Lotter [1997]).
Avant de présenter les conséquences de cette évolution conceptuelle, il est nécessaire
de pointer la rupture qu’elle marque par rapport aux approches traditionnelles, et la filiation
dans laquelle elle situe Williamson. Ce concept rattache Williamson aux analyses de Harold
Demsetz [1969], lorsque ce dernier critique « l’économie du nirvana », qui compare des
formes existantes à des formes idéales (inaccessibles). Il ouvre la voie à une discussion des
modèles de la rationalité « en surplomb » (Simon [1982]), ou de la rationalité substantive, qui
jugent de l’efficacité d’un choix en supposant connus tous les paramètres. Il conduit
également à s’interroger sur des jugements du réel réalisés à partir de modèles. Williamson
[1996a : 210] utilise ainsi ce concept pour critiquer les analyses conduites en termes de
dépendance du sentier (ou plutôt certaines de leurs conclusions) : le jugement d’inefficacité
qui est parfois fait à partir d’un constat de dépendance du sentier (path dependency) (Arthur
[1989]). Choisir, du fait de ces cas de dépendance, une technologie objectivement inférieure
ne semble rien apporter. Ainsi que le notent Liebowitz et Margolis [1992, 1995 et 1999], le
fait de savoir si le choix d’une technologie donnée est inefficient dépend de l’état des
connaissances. De plus, « même si on peut faire l’hypothèse que les parties savent que la
technologie B deviendrait la plus efficace après 30 ou 50 adoptions, les coûts additionnels de
l’action collective nécessaire pour détourner les individus de choisir la technologie A
devraient être pris en compte. S’il est irréaliste d’affirmer que les individus possèdent les

12
connaissances utiles pour qu’un changement de préférence (de A à B) arrive après 30 à 50
adoptions ou si, compte tenu de cette connaissance, les coûts d’orchestration de l’action
collective sont prohibitifs, alors l’inefficacité en question est effectivement irrémédiable par le
biais de l’ordre privé. (…) Les affirmations d’inefficacité qui ne peuvent être reconnues
qu’après les faits, et/ou qui ne peuvent pas être implémentées avec des gains nets sont sans
importance opérationnelle » (Williamson [1996a : n. 17 p. 210]).
Williamson veut ainsi souligner qu’un jugement extérieur ex post n’a pas d’utilité
normative s’il n’est pas remédiable, et qu’à l’inverse, les solutions choisies ex ante par les
agents qui pouvaient être considérées comme remédiables, peuvent apparaître bonnes. On
peut remarquer que l’évaluation se fait ici en référence aux coûts que supporteraient les agents
en agissant à leur niveau (private ordering) mais cela n’empêche en rien une solution
institutionnelle, ou la possibilité d’une solution collective conduite par des institutions au-delà
du private ordering. Tous les choix sont supposés refléter la rationalité (certes limitée) des
agents, rendant sans intérêt les critiques ex post, sauf si celles-ci peuvent démontrer la
remédiabilité du choix.
On peut cependant s’interroger sur la possibilité de porter un jugement sur les choix
des agents, notamment si l’on inclut la dimension institutionnelle. Comme le soulignent
Ostrom et Walker [1997 : 36] : « le choix auquel sont confrontés les citoyens n’est pas entre,
d’un côté, un marché imparfait et, de l’autre côté, une institution toute-puissante,
omnisciente, recherchant l’intérêt public. Le choix est, plutôt, entre un foisonnement
d’institutions lesquelles sont toutes sujettes aux faiblesses et aux défaillances… Cela inclut la
famille et les clans, les associations de voisinage, les organisations communales, les
associations de commerce, les coopératives de producteurs et de consommateurs, les
associations locales de bénévoles et les clubs, les collectivités locales, les régimes
internationaux, les industries de service public, les associations d’arbitrage et de médiation et
les organisations charitables ».
Subséquemment, un analyste extérieur risque de se heurter à d’importants problèmes
de mesure de ces situations, dès lors qu’il ne possèdera pas obligatoirement toutes les
informations pertinentes, rendant alors ce critère peu opératoire, sauf à se livrer à une
démarche comparative terme à terme (relevant des démarches de benchmarking)13.

3.2- Un concept porteur d’unification théorique

13 Pour une illustration de ces techniques on peut se référer à Jamasb, & Pollitt, [2001 et 2003] dans le secteur de
l’électricité par exemple.

13
En dépit des difficultés méthodologiques d’opérationnalisation, le concept de
remédiabilité nous semble permettre d’unifier la pensée de la dynamique de North avec celle
de Williamson. Pour Williamson, le jugement sur l’efficacité d’une politique ou d’une action
n’a de sens que par rapport à une alternative réalisable. Démontrer la supériorité d’une
solution sur une autre ne peut pas se faire par rapport à un état idéal, mais par rapport à une
solution existante ou possible, en notant que l’on prend alors en compte également les coûts
de changement d’action ou politique. « L’économie des coûts de transaction met en exergue
des inefficacités remédiables ; c’est à dire les conditions pour lesquelles une alternative
réalisable peut être décrite qui, si elle était introduite, entraînerait des gains nets »
(Williamson [1996a : 240]).
Ainsi, la remédiabilité permet de modifier le rapport des travaux de Williamson aux
problèmes dynamiques, dans la mesure où elle conduit à prendre en compte les coûts de
transition d’une forme à l’autre. Une organisation changera ainsi de structure de gouvernance
si et seulement si elle pense réaliser des économies (gains nets 14) compte tenu des coûts liés
aux changement. On comprend ainsi pourquoi les structures organisationnelles ne s’adaptent
pas immédiatement aux modifications de leur environnement. On peut également comprendre
la critique que fait Williamson [1994] à Aoki [1990], lui reprochant de traiter des formes
d’organisations d’équilibre adaptées à leur environnement, alors que la réalité est dans les
formes transitoires15. Le concept de remédiabilité – en posant le problème des coûts
d’implémentation des formes d’organisation – introduit dans l’analyse des effets
d’irréversibilité, de lock-in liés aux actifs spécifiques (ou plus largement aux choix ex ante).
S’il n’élabore pas sa perspective en termes de trajectoires, Williamson introduit les concepts
qui y conduisent.
En imposant des contraintes aux agents, les institutions altèrent les structures de
gouvernance observables dans une économie. Elles sont alors pleinement dans l’agenda de
recherche. Néanmoins, plusieurs interrogations surgissent. Comment traiter de la dimension
institutionnelle ? Comment traiter les contraintes imposées au calcul économique des agents ?
Dans tous les cas, Williamson [1996a] débouche sur une vision beaucoup plus précise et
pertinente des institutions, politiques ou économiques. Particulièrement, les institutions
politiques (le marché politique) entrent dans le cadre des investigations de notre auteur, qui

14En termes de coûts de transaction et de production.


15 Cette critique serait très largement à réévaluer à l’aune des derniers travaux d’Aoki (voir principalement Aoki
[2001]) dans lesquels le foisonnement des faits stylisés et la prise en en compte de la dynamique institutionnelle
sont bien présents.

14
introduit une réflexion plus microanalytique qui le conduit à discuter le critère de Stigler, et à
sortir des visions « désincarnées » qui imaginent que l’Etat est le garant du bien public. Ce
faisant, Williamson [1996a : 240]) rejoint North : « que l’histoire importe n’implique pas,
cependant que seule l’histoire importe. L’intentionnalité et la recherche d’économies
expliquent bon nombre des phénomènes ».

La compatibilité des deux courants de la théorie des coûts de transaction est ainsi
renforcée. Cependant, l’étude de l’influence des institutions gagnerait à les combiner. Il est
important de cerner plus précisément les gains que permettrait cette combinaison. Or, de ce
point de vue, North [1990a], en introduisant une réflexion sur les coûts de modification des
institutions, permet de boucler le raisonnement. D'un côté, le concept de remédiabilité peut
permettre de cerner comment les individus peuvent, avec une rationalité limitée, proposer des
modifications organisationnelles. De l'autre côté, North, par la description du marché
politique, permet de mieux saisir les modifications institutionnelles. Nous avons donc bien,
encore une fois, cohérence mais n'est toujours pas résolu le point aveugle : seule la rationalité
de la recherche de l'intérêt individuel est prise en compte, sans que l'on parvienne à saisir
véritablement « l'atmosphère » ou « l'idéologie ».

Conclusion
S’inscrivant dans la lignée des travaux de Coase, Williamson et North partagent bien
un accord sur les concepts fondamentaux de la Nouvelle Economie Institutionnelle :
rationalité limitée, centralité de l’étude de la transaction, recherche d’une économie plus
réaliste. Leurs différences d’angles d’analyse auraient pu entraîner des divergences théoriques
fortes : dynamiques imparfaites de croissance chez North, analyse comparative statique de la
meilleure forme organisationnelle possible chez Williamson. Nous avons montré, au
contraire, qu’il y avait chez les deux auteurs une même volonté de développer une vision
théorique plus réaliste de l’économie. Ainsi, le concept de remédiabilité développé par
Williamson peut utilement compléter la vision du changement économique limité par des
chemins de dépendance institutionnels de North. Dès lors, la Nouvelle Economie
Institutionnelle apparaît bien comme un programme de recherche « progressif » (Ménard
[2002]). Ainsi, ce programme de recherche est inachevé : chacun des auteurs a poursuivi sa
démarche et ses interrogations, la question des idéologies semblant importante à analyser dans
les deux cas. Dans cette perspective, les travaux de North et Williamson qui seront achevés en

15
2005 seront d’une importance cruciale et conduiront très probablement à un nouveau besoin
d’évaluation critique de la position et des perspectives offertes par les deux branches de la
Nouvelle Economie Institutionnelle.

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