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Les livres de ceux qui font le web No.

Erin Kissane
La stratégie de contenu est la nouvelle tendance
du Web. Mais d’où vient-elle ? Pourquoi est-elle
si importante ? Et que signifie pour vous ce grand
retour du contenu ? Erin Kissane explore dans
ce guide les origines de la stratégie de contenu
et montre, avec concision et expertise, comment
mener à bien cette discipline complexe. Une lecture
indispensable pour les experts en stratégie de contenu
les plus chevronnés mais aussi pour tous ceux qui
songent à une reconversion.

Ce document est la propriété exclusive de jean SYLVESTRE (jsylvestre@sdcinfo.com) - 29 août 2011 à 16:39
stRatégiE dE cOntEnu WEB
Au sommaire Principes fondamentaux * Un bon contenu est un Erin Kissane
contenu adéquat * Un bon contenu est un contenu utile * Un bon
contenu est orienté utilisateur * Un bon contenu est un contenu clair

strAtégie de
* Un bon contenu est un contenu cohérent * Un bon contenu est un
contenu concis * Un bon contenu est un contenu entretenu * Le métier
de la stratégie de contenu * Influence n°1 : l’éditeur * Influence n°2 : le
conservateur * Influence n°3 : le marketer * Influence n°4 : l’expert en
sciences de l’information * Outils et techniques * Méthodologie * Ce que
nous créons * Définition du projet * Études et évaluation * Stratégie et
conception * Planification de la création de contenu * Planification de la

contenu WeB
gestion de contenu * Ressources

9 782212 132793
ISBN : 978-2-212-13279-3
Code éditeur : G13279
Les livres de ceux qui font le web

préface de Kristina Halvorson

12 €

Couv-strat-contenu-web-FR.indd 1 08/06/11 17:51


3
Les livres de ceux qui font le web No.

Erin Kissane
La stratégie de contenu est la nouvelle tendance
du Web. Mais d’où vient-elle ? Pourquoi est-elle
si importante ? Et que signifie pour vous ce grand
retour du contenu ? Erin Kissane explore dans
ce guide les origines de la stratégie de contenu
et montre, avec concision et expertise, comment
mener à bien cette discipline complexe. Une lecture
indispensable pour les experts en stratégie de contenu
les plus chevronnés mais aussi pour tous ceux qui
songent à une reconversion.

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stRatégiE dE cOntEnu WEB


Au sommaire Principes fondamentaux * Un bon contenu est un Erin Kissane
contenu adéquat * Un bon contenu est un contenu utile * Un bon
contenu est orienté utilisateur * Un bon contenu est un contenu clair

strAtégie de
* Un bon contenu est un contenu cohérent * Un bon contenu est un
contenu concis * Un bon contenu est un contenu entretenu * Le métier
de la stratégie de contenu * Influence n°1 : l’éditeur * Influence n°2 : le
conservateur * Influence n°3 : le marketer * Influence n°4 : l’expert en
sciences de l’information * Outils et techniques * Méthodologie * Ce que
nous créons * Définition du projet * Études et évaluation * Stratégie et
conception * Planification de la création de contenu * Planification de la

contenu WeB
gestion de contenu * Ressources

Les livres de ceux qui font le web

préface de Kristina Halvorson

Couv-strat-contenu-web-FR.indd 1 08/06/11 17:51


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Erin Kissane

STRATÉGIE DE
Préface à l’édition française par Muriel Vandermeulen
CONTENU WEB
ÉDITIONS EYROLLES
61, bld Saint-Germain
75240 Paris Cedex 05
www.editions-eyrolles.com

Traduction autorisée de l’ouvrage en langue anglaise


intitulé THE ELEMENTS OF CONTENT STRATEGY de Erin Kissane
(ISBN : 978-0-9844425-5-3), publié par A Book Apart LLC

Adapté de l’anglais par Charles Robert,


avec la collaboration de Muriel Vandermeulen

© 2011 Erin Kissane pour l’édition en langue anglaise


© Groupe Eyrolles, 2011, pour la présente édition,
ISBN : 978-2-212-13279-3
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Dans la même collection

HTML5 pour les Web Designers, Jeremy Keith, 2010, 96 pages.


CSS3 pour les Web Designers, Dan Cederholm, 2011, 132 pages.

Aux Éditions de l’Alambic

Stratégie de contenu Web – La revanche de l’éditorial,


Muriel Vandermeulen, 2010, 232 pages.

En application de la loi du 11 mars 1957, il est interdit de reproduire intégralement ou


partiellement le présent ouvrage, sur quelque support que ce soit, sans autorisation de
l’éditeur ou du Centre Français d’Exploitation du Droit de Copie, 20, rue des Grands
Augustins, 75006 Paris.
TABLE DES MATIÈRES

1 Introduction

4
chapitre 1
Principes fondamentaux

14
chapitre 2
Le métier de la stratégie de contenu

41
chapitre 3
Outils et techniques
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75 En conclusion

77 Piste bonus : par où commencer ?

80 Ressources

84 Index
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PRÉFACE À L’ÉDITION FRANÇAISE

Comme le souligne Erin Kissane, à l’heure où n’importe qui


peut publier sur le Web, la nécessité pour les annonceurs (entre-
prises, institutions, organisations avec ou sans but lucratif ) de
concevoir, produire, fournir et entretenir des contenus perti-
nents, utiles et utilisables les contraint à s’orienter de plus en
plus vers la gouvernance de leurs contenus numériques. Or,
depuis quelques années, des deux côtés de l’Atlantique, un
métier sort de l’ombre, qui répond à cette demande de plus en
plus fréquente, et surtout, qui devient indispensable au bon
déroulement des projets de publication en ligne  : la stratégie
de contenu Web. Un métier ? Oui, parfaitement, et c’est bien,
entre autres, ce que nous apporte ce précieux abrégé : un éclai-
rage tout à la fois efficace, simple et précis sur les origines de
ce métier.
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Ainsi, l’auteur retrace ici la généalogie sinueuse de notre


discipline, qui puise ses sources dans les pratiques de l’édi-
tion « pure » aux sciences de l’information, en passant par le
marketing et la conservation de musée. Elle nous explique que
certaines des qualités et aptitudes essentielles de ces métiers
ont contribué à formaliser celui de consultant en stratégie de
contenu. De sorte que certains lecteurs découvriront probable-
ment que, comme Monsieur Jourdain à propos de la prose, ils
font de la stratégie de contenu depuis des lustres, sans l’avoir
jamais su. Tandis que d’autres, du côté des annonceurs ou des
chefs de projets Web, reconnaîtront enfin qu’il n’est pas donné
à tout le monde d’orchestrer, dans un projet Web, tout ce qui
touche aux contenus, soit au cœur de la publication en ligne.
Puisque, comme nous le rappelle également Erin Kissane, ce
qui fait vivre un site Internet, c’est précisément son contenu.
Tout le monde, donc, ne peut faire de la stratégie de contenu
Web. Au contraire. Outre des compétences particulières, le
métier recourt aussi à des outils et techniques spécifiques. En
décrivant ses approches et méthodes, Erin Kissane continue
de démontrer que la stratégie de contenu est une discipline à
part entière, rigoureuse et éprouvée. Et certains lecteurs seront
surpris, une fois de plus, de constater qu’à chaque étape du
cycle de vie d’une publication, correspond un panel de procé-
dures, de contrôles et de livrables, destiné non seulement à la
gestion des contenus, mais, surtout, à leur bonne gouvernance.
Si le terme de « stratégie de contenu Web » est encore peu
usité chez nous et que ses représentants essuient encore valeu-
reusement les plâtres, cet ouvrage, écrit par une excellente
praticienne en la matière, légitime pleinement ce métier essen-
tiel à la qualité du Web en général. Et contribuera certainement
au développement et à la reconnaissance de standards et de
bonnes pratiques de gouvernance éditoriale en ligne.

Muriel Vandermeulen
Auteur de Stratégie de contenu Web – La revanche de l’éditorial
Directrice de We Are the Words
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AVANT-PROPOS

“ Comme vous pouvez le constater, le fléau se répand, et nous devons


tous, chacun d’entre nous, être prêts à nous battre. »
Erin Kissane, « Attack of the Zombie Copy »

Le contenu est une bête velue et susceptible. Il faut chercher,


passer au crible, créer, sélectionner, corriger, programmer, et
tout cela avant même de commencer à penser à la publication.
Quelle mise en page est la plus adaptée à ce contenu ? Quelle
organisation  ? Quel méta-schéma  ? Quelles plates-formes  ?
Oubliés les plans de post-lancement, le manque de ressources,
la satisfaction des parties prenantes et... brr. Pas étonnant que
l’on veuille se planquer sous le lit.
Ce monstre poilu ne fait pas peur à Erin Kissane. En fait,
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tout au long de sa vie d’adulte, elle a su l’apprivoiser, d’une main


ferme mais tendre. Aux côtés de son héros, Kissane a collaboré
avec d’innombrables designers, développeurs, spécialistes de
l’expérience utilisateur et du marketing, éditeurs et écrivains,
sur des projets de toutes tailles. C’est une bonne nouvelle pour
vous : quel que soit le rôle que vous jouez, elle comprend ce que
vous faites et sait pourquoi c’est important. Et comme elle tient
à vous, elle veut vous aider à comprendre comment la stratégie
de contenu peut vous rendre la vie un peu plus simple, et le
fruit de votre travail encore plus génial.
Il n’y a pas si longtemps, j’ai écrit un article qui appelait les
lecteurs à « reprendre le flambeau de la stratégie de contenu ».
Le livre que vous tenez entre les mains est ce flambeau. Alors
brandissez-le haut et fort et ouvrez la voie. Soyez confiants dans
votre quête d’un meilleur contenu. Stratégie de contenu Web est
là pour éclairer votre chemin.
Sortez de sous le lit. On a du pain sur la planche.

Kristina Halvorson
Auteur de Content Strategy for the Web
PDG de Brain Traffic
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INTRODUCTION

“ « La stratégie de contenu est au copywriting ce que l’architecture de


l’information est au design. »
Rachel Lovinger

“ « La stratégie de contenu régit la création, la publication et


l’entretien de contenus utiles et utilisables. »
Kristina Halvorson

Dans l’industrie du web, est appelé « contenu » tout ce qui


véhicule de l’information porteuse de sens pour l’être humain.
Tous les sites Web ont du contenu. Une entreprise dont
le site Web ne comporte que trois pages peut sans doute se
contenter d’un seul rédacteur. En revanche, celles qui comptent
des centaines, voire des milliers d’éléments de contenu numé-
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rique ont besoin de quelqu’un capable de prendre du recul et


de déterminer quoi communiquer à travers tout ce contenu. De
quelqu’un qui sache comment le communiquer au mieux, qui doit
le produire, etc. –  une sorte de rédacteur en chef doublé d’un
contrôleur aérien. Il leur faut un expert en stratégie de contenu.
Ces dernières années, des dizaines de livres, d’articles et de
billets de blogs ont vanté les mérites de la stratégie de contenu.
Pour récapituler, une bonne stratégie de contenu :

• aide les entreprises à comprendre et à produire les types de


contenu dont leur public cible a réellement besoin ;
• permet aux organisations de développer des programmes de
publication réalistes, durables et mesurables afin de garder le
contrôle, à long terme, sur les contenus ;
• permet de diminuer les coûts en rationnalisant les efforts de
publication et en optimisant les ressources existantes ;
• permet de développer une communication intégrée sur les
différents canaux, de sorte que les contenus en ligne, les
supports imprimés, les conversations sur les réseaux sociaux
et la gestion des connaissances internes suivent les mêmes
objectifs (de manière adaptée à chaque canal) ;

1
• évite le déraillement de projets web qui souvent, accusent
d’importants retards parce que le temps et les efforts requis
pour produire du bon contenu ont été sous-estimés.

Et nous n’en sommes qu’au début. Notre discipline est à


peine naissante, et nous n’avons eu jusqu’à présent qu’un vague
aperçu de l’impact potentiel d’Internet sur nos modes de vie et
nos habitudes de travail. La stratégie de contenu est en plein
essor, car partout dans le monde, des organisations commen-
cent à réaliser qu’elles en ont désespérément besoin pour gérer
leur communication en ligne, ainsi que la rapide expansion de
cette dernière. Et à moins que la planète ne soit frappée par une
comète, cette tendance n’est pas prête de s’inverser.

Ce que vous trouverez dans ce livre


Ce livre n’est pas un argumentaire en faveur de la stratégie de
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contenu. Ce n’est pas non plus un tutoriel, un manuel d’exer-


cices ou un ensemble de livrables tout prêts. Ce n’est pas une
méthode miracle qui transformera votre licence de Lettres en
un salaire annuel de 100  000 euros en dix étapes. Et ce n’est
certainement pas une compilation exhaustive. Ce livre est
plutôt une sorte de guide de référence rapide qui contient les
principes, les compétences et les pratiques fondamentaux de
notre discipline, répartis en trois sections :

• « Principes fondamentaux » expose les valeurs communes


de notre discipline.
• « Le métier de la stratégie de contenu » explore l’expertise
accumulée dans les domaines qui ont le plus contribué à
notre travail.
• «  Outils et techniques  » fait un rapide état des lieux des
approches, méthodes et livrables utilisés quotidiennement
dans la pratique de la stratégie de contenu.

C’est un peu comme si vous aviez un manuel (très) abrégé,


la présentation d’un panel de mentors potentiels et la clé de
l’armoire à fournitures. Commencez où vous le souhaitez
et arrêtez-vous où bon vous semble. En fin de volume, vous

2 S T R AT É G I E D E C O N T E N U W E B
trouverez des exemples et des ressources supplémentaires.
Et quand vous en aurez fini avec cet opus, joignez-vous aux
ardentes conversations en ligne sur le sujet, si ce n’est déjà fait.
Quand je suis bloquée sur un projet ou intimidée par la feuille
blanche, il y a une poignée de livres auxquels je me raccroche
pour me remémorer les options dont je dispose : ce que je peux
essayer d’autre, quel critère utiliser pour évaluer mon travail
et comment aborder différemment les obstacles dressés devant
moi. Si ce livre devient un de vos ouvrages de référence, mon
objectif sera atteint.
En avant.
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I N T R O D U C T I O N 3
1 PRINCIPES
FONDAMENTAUX
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EN STRATEGIE DE CONTENU, il n’y a pas de manuel de tactique


universelle dans lequel on pourrait piocher pour élaborer un
plan. Au lieu de cela, notre discipline repose sur quelques
principes fondamentaux qui font la pertinence et la qualité
d’un contenu. La première section de ce livre présente ces
fondamentaux.

UN BON CONTENU EST UN CONTENU ADÉQUAT


Publiez du contenu adapté à l’utilisateur et à votre activité.

Au fond, il n’existe vraiment qu’un seul principe fondamental :


un bon contenu doit être adapté à votre activité, à vos utilisa-
teurs et à son contexte. Son mode de diffusion, son style, sa
structure, et par-dessus tout sa substance, doivent être adéquats.
La stratégie de contenu consiste à déterminer ce que chacun de
ces éléments signifie pour votre projet, et comment atteindre
vos objectifs en partant de là où vous êtes.

4 S T R AT É G I E D E C O N T E N U W E B
Adapté à l’utilisateur (et au contexte)
Intéressons-nous un instant à James Bond. L’agent secret a beau
être malin et coriace, il se serait fait hacher menu des centaines
de fois sans l’équipe ultra-compétente qui le soutient. Quand il
doit poursuivre le méchant, cette dernière mobilise une Aston
Martin  DB5. Quand il est empoisonné par une femme fatale
aux relations douteuses, l’équipe lui apporte l’antidote dans
une ampoule injectable tout droit sortie d’un film de science-
fiction. Lorsqu’il émerge d’un marais infesté d’alligators dressés
au combat, elle lui offre la douche, le rasage et un costume sur
mesure. Elle ne le prend pas de haut, ne lui fait pas perdre son
temps. Elle anticipe ses besoins, mais ne lui offre pas en perma-
nence tout ce dont il pourrait avoir besoin.
Un contenu est adapté aux utilisateurs quand il les aide à
accomplir leurs objectifs.
Un contenu est parfaitement adapté aux utilisateurs quand il
leur permet de se sentir brillants au cours d’une mission critique,
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en leur offrant précisément ce dont ils ont besoin, exactement


quand ils en ont besoin, et sous la meilleure forme possible. Tout
cela vous oblige à sonder l’esprit de vos utilisateurs de manière
approfondie, sinon d’analyser finement leurs particularités à tous.
Ce numéro de télépathie est en partie lié au contexte, qui
englobe bien plus que les seules méthodes d’accès ou la bonne
compréhension des objectifs des utilisateurs. Daniel Eizans,
expert en stratégie de contenu, suggère qu’une analyse sensée du
contexte d’utilisation requiert non seulement de comprendre les
objectifs des utilisateurs, mais également leur comportement : que
font-ils ? Qu’éprouvent-ils? De quoi sont-ils capables ? (fig 1)
C’est une idée pertinente. Mon contexte sera vraisemblable-
ment très différent si j’appelle les urgences un samedi soir et mon
allergologue un jour de semaine. Si je regarde un plan de métro
à trois heures du matin, il est probable que je veuille savoir quels
sont les trains qui circulent à ce moment, pas pendant les heures de
pointe le lendemain. Quand je cherche des informations au sujet de
votre entreprise sur mon téléphone, il est plus vraisemblable que
j’aie besoin de vos coordonnées que de votre dernier bilan comp-
table. Mais la prédiction du contexte du lecteur, si bien étudié soit-
il, ne sera jamais une science exacte. Donnez toujours aux lecteurs
la possibilité de consulter plus d’informations s’ils le souhaitent.

P R I N C I P E S F O N D A M E N TAU X 5
FAIRE SENTIR
facteurs environnementaux, état psychologique,
activité physique, habitudes,
Physique Émotionnel niveau de stress,
handicaps, préférences, désirs, envies, besoins
stimuli sensoriels

APPRENDRE
Cognitif hypothèses cognitives,
capacité d’apprentissage,
éducation

fig 1 : Le contexte d’utilisation couvre les actions, contraintes, émotions, conditions


cognitives, etc. d’un utilisateur. Et il affecte en retour la façon dont l’utilisateur interagit
avec le contenu. (« Personal-Behavioral Context: The New User Persona. » © Daniel Eizans,
2010. http://bkaprt.com/cs/1/)1
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Adapté à votre activité1


Un contenu est adapté à votre activité lorsqu’il vous aide à
accomplir vos objectifs commerciaux de manière durable.
Ces objectifs commerciaux peuvent consister à accroître les
ventes, améliorer votre service technique ou réduire les coûts
d’impression de votre documentation – l’enjeu étant d’accomplir
ces objectifs à l’aide de procédés durables. Un contenu durable est
un contenu que vous pouvez créer (et entretenir) sans faire faillite,
sans compromettre sa qualité et sans pousser vos employés à la
dépression. Ce besoin de durabilité vous paraît peut-être d’une
évidence crasse, mais on a vite fait de créer un plan ambitieux
prévoyant de publier des tonnes de contenu sans considérer les
efforts de longue haleine que nécessite ensuite sa gestion.
Au fond, « adapté à l’activité » et « adapté à l’utilisateur » revien-
nent à la même chose  : sans lecteurs, auditeurs ou spectateurs,
un contenu n’a pas de sens ; et un contenu créé sans prendre en

1. Adresse complète : http://www.slideshare.net/danieleizans/context-as-


a-content-strategy-creating-more-meaningful-Web-experiences-through-
contextual-filtering

6 S T R AT É G I E D E C O N T E N U W E B
considération les besoins des utilisateurs nuit aux éditeurs dans la
mesure où les utilisateurs négligés partent pour ne jamais revenir.
Ce principe propose une façon intelligente de servir vos
propres intérêts  : ce qui nuit à vos utilisateurs vous nuit en
retour.

UN BON CONTENU EST UN CONTENU UTILE


Attribuez un but clair et spécifique à chaque élément
de contenu ; évaluez ce contenu en fonction de son but.

Peu de personnes décident sciemment de créer du contenu qui


ennuie, embrouille et irrite les utilisateurs. Pourtant le Web
regorge de contenus vagues, inutiles et ennuyeux. Mais ce type
de contenu n’est pas neutre pour autant : il provoque directe-
ment une perte de temps et d’argent, et agit à l’encontre des
objectifs des utilisateurs et de l’entreprise.
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Pour savoir si une page (ou un module, une section)


comporte un contenu adéquat, vous devez déterminer ce que
ce contenu est censé accomplir. Plus la spécificité est grande,
meilleurs seront les résultats. Considérez les objectifs que
pourrait desservir un contenu de type « produit » :

• « Vendre des produits » : un tel objectif, vague et dépourvu de


sens, risque de produire plus de slogans fumeux qu’autre chose.
• « Vendre ce produit » : vendre un produit consiste à réaliser
une séquence de plusieurs sous-tâches : présenter les avantages
et caractéristiques du produit, montrer des résultats et démon-
trer la valeur du produit et demander aux gens de l’acheter. Si
votre objectif est aussi vague, c’est que vous ignorez laquelle de
ces sous-tâches votre contenu doit (le cas échéant) servir.
• « Décliner les avantages de ce produit et en faire la démons-
tration  »  : voilà en effet un objectif qu’un contenu peu
remplir. Mais si vous ne savez pas qui est supposé profiter des
avantages du produit, il vous sera difficile d’être spécifique.
• « Montrer comment ce produit peut aider les infirmières » :
si vous pouvez déterminer ce dont les infirmières ont
besoin, vous pourrez créer du contenu qui sert cet objectif.
(Et si vous ne pouvez pas déterminer ce dont elles ont besoin

P R I N C I P E S F O N D A M E N TAU X 7
avant d’essayer de leur vendre ce produit, sachez que vos
soucis dépassent de loin le seul contenu.)

Suivez le même procédé pour chaque séquence de contenu


de votre projet, et vous obtiendrez une liste de contrôle utile,
reprenant l’ensemble de vos objectifs. Si cette perspective vous
décourage, imaginez à quel point il serait plus difficile d’éva-
luer, de créer ou de réviser les contenus sans objectif en tête.

UN BON CONTENU EST ORIENTÉ UTILISATEUR


Adoptez le cadre cognitif de vos utilisateurs.
Dans le cadre d’un projet Web, une conception orientée utili-
sateur signifie que le produit final doit répondre à des besoins
réels des utilisateurs et satisfaire de vrais désirs humains.
Concrètement, cela signifie que le temps où l’on calquait le plan
d’un site Web sur un organigramme est révolu.
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Dans le livre The Psychology of Everyday Things, l’expert en


sciences cognitives Donald Norman souligne qu’il est capital de
comprendre le modèle mental de l’utilisateur avant de concevoir
un produit. Dans le système de conception orientée utilisateur qu’il
préconise, le design doit « garantir (1) que l’utilisateur comprenne
ce qu’il doit faire et (2) qu’il puisse dire ce qui se passe ».1
Un contenu, «  orienté l’utilisateur  » signifie qu’au lieu de
persister à utiliser les modèles mentaux et le vocabulaire propres
au client, le contenu adopte le cadre cognitif de l’utilisateur, en
partant du modèle du monde propre à celui-ci jusqu’aux termes
et expressions spécifiques qu’il utilise, etc. C’est cette partie qui
a mis un peu plus de temps à émerger.
Permettez-moi de vous conter une petite histoire à titre
d’illustration.
Alors que vous accrochez votre collection de portraits de
caniches nains au mur, vous réalisez qu’il vous faut un marteau.
Vous vous rendez à la quincaillerie et demandez à la vendeuse
où vous pourriez en trouver un. «  Outils et accessoires de
construction », répond-elle. « Allée cinq. »

1. Donald Norman, The Psychology of Everyday Things, (New York : Basic Books,
1988), p. 188

8 S T R AT É G I E D E C O N T E N U W E B
- Bienvenue au rayon outils et accessoires de construction. Vous
trouverez ici de nombreux outils pour la construction et autres
activités annexes. En quoi puis-je vous aider ?
- Bonjour. Je cherche un marteau pour accrocher des cadres.
- Vous voulez dire un ramponneau (usage domestique) ?
- ... oui ?
- Les marteaux dont la tête fait moins de huit centimètres se trouvent
au rayon outils pour usage domestique, au bout de l’allée neuf.
[...]
- Bienvenue au centre des outils domestiques ! Nous sommes le
fruit de la fusion entre le rayon des outils pour usage domestique
et le rayon des petits objets tranchants. Souhaitez-vous prendre
rendez-vous pour une démonstration ?
- J’ai simplement besoin d’un ramponneau. Pour... la maison ?
- Souhaitez-vous un ramponneau domestique premium ou un
ramponneau domestique standard ?
- Je vois un marteau, là, juste derrière vous. C’est exactement
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ce qu’il me faut.
- ACCÈS REFUSÉ ! Veuillez retourner à l’entrée du magasin et
recommencer votre recherche.
Un contenu dont le sens et la forme font fi des utilisateurs
font fuire ces utilisateurs. La plupart des organisations pros-
pères l’ont compris, et pourtant de nombreux sites sont toujours
construits à partir d’organigrammes internes, alimentés
d’énoncés de mission à usage interne et truffés de jargon et de
noms propriétaires en lieu et place de concepts simples.
Si vous êtes le seul à offrir un produit ou un service attractif,
vous ne verrez peut-être pas tout de suite les effets d’un contenu
sibyllin, mais votre part du gâteau finira immanquablement
dans la bouche d’un autre, qui propose exactement la même
chose, mais en orientant son offre sur l’utilisateur.

UN BON CONTENU EST UN CONTENU CLAIR


Cherchez la clarté en toute chose.

Quand on dit qu’une chose est claire, c’est qu’elle fait son
effet, qu’elle « nous parle » – le courant passe. Un bon contenu

P R I N C I P E S F O N D A M E N TAU X 9
s’adresse à ses destinataires dans une langue qu’ils compren-
nent et est organisé de manière à être utilisé facilement.
Les experts en stratégie de contenu comptent généralement
sur d’autres personnes –  des rédacteurs, des éditeurs et des
spécialistes multimédia – pour produire et réviser les contenus
que les utilisateurs lisent, écoutent et regardent. Sur certains
projets de grande envergure, on peut ne jamais rencontrer les
gens chargés de la production du contenu. Cependant, si on
veut aider ces producteurs à créer du contenu vraiment clair,
on ne peut se contenter d’élaborer un plan, de le leur balancer à
la figure, puis de quitter le navire.
Les chapitres suivants vous apprendront à créer des chartes
utiles, établir un workflow de publication, organiser des ateliers
de rédaction et d’édition, et développer des outils tels que des
modèles de contenu : bref, tout ce qui permet d’aider les créateurs
de contenu à produire des contenus clairs et utiles à long terme.
Bien entendu, la clarté est également une vertu à laquelle
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nous devons tendre perpétuellement dans notre propre travail.


Objectifs, réunions, livrables, processus –  tous ces éléments
doivent profiter d’une adoration de la clarté.

UN BON CONTENU EST UN CONTENU COHÉRENT


Exigez la cohérence, dans les limites du raisonnable.

Pour la plupart des gens, le langage est notre première inter-


face avec les autres personnes et avec le monde extérieur. La
cohérence du langage et de la présentation assure la cohérence
de l’interface, réduit la charge cognitive pour les utilisateurs et
facilite la lecture aux lecteurs. À l’inverse, l’incohérence accroît
l’effort cognitif, entrave la compréhension et distrait le lecteur.
C’est pour cela que nous avons des chartes éditoriales.
Nombre d’entre nous qui sont arrivés à la stratégie de contenu
par le biais du journalisme ou de l’édition sont très attachés à
un style particulier (j’ai, pour ma part, un faible pour le Chicago
Manual of Style), mais une personne compétente placera toujours
la cohérence interne bien avant ses préférences personnelles.
Par ailleurs, la cohérence ne doit pas toujours être totale-
ment uniforme  : un site destiné aux médecins, aux patients

10 S T R AT É G I E D E C O N T E N U W E B
et aux assureurs, par exemple, utilisera probablement un ton/
registre différent pour chacune de ces trois audiences, et un
autre encore pour le contenu destiné au public général. Il s’agit
là d’une cohérence saine, orientée lecteur. À l’inverse, une
entreprise qui permet à chacune de ses équipes «  Produits  »
de créer des types de contenu très différents néglige les prin-
cipes de cohérence dans le but, probablement, de satisfaire des
besoins propres plutôt que les besoins du lecteur.

UN BON CONTENU EST UN CONTENU CONCIS


Renoncez au contenu inutile.

Certaines organisations adorent publier beaucoup de contenu.


Peut-être pensent-elles que le fait de publier sur sa page «  À
propos » son organigramme, ses objectifs et missions, sa philo-
sophie et une vidéo corporate captivante justifiera, après coup,
Ce document est la propriété exclusive de jean SYLVESTRE (jsylvestre@sdcinfo.com) - 29 août 2011 à 16:39

les heures et les jours passés à produire ce contenu. Peut-être


pensent-elles que Google ne gratifiera leur labeur que si elles
pondent des dizaines d’articles sur leur blog chaque semaine.
Dans la plupart des cas, c’est, je pense, une question d’entropie :
le Web offre l’espace pour publier tout et n’importe quoi, et il
est bien plus simple de le traiter comme un placard sans fond
que de s’imposer des contraintes.
Alors, en quoi est-ce un problème de publier trop de
contenu  ? Premièrement, plus il y a de contenu, plus il est
difficile de trouver ce que l’on cherche. Ensuite, en dispersant
des ressources déjà limitées, on fait inévitablement baisser la
qualité. De plus, c’est souvent le signe d’un problème de fond :
tout publier signifie souvent «  publier tout ce qu’on peut  »
plutôt que de « publier tout ce dont nos utilisateurs ont vrai-
ment besoin ».
Il existe de nombreux moyens pour identifier les contenus
inutiles : l’analyse du trafic, les études utilisateurs et l’analyse édito-
riale doivent conjointement être prises en compte. Vous pouvez
également commencer par repérer les écueils les plus courants :

• Les énoncés de missions, visions et autres valeurs fonda-


mentales. Si les gens de votre organisation sont profondé-

P R I N C I P E S F O N D A M E N TAU X 11
ment attachés à des principes abstraits, cela se traduira dans
leur travail. N’est pas visé ici le petit nombre d’organisations
qui mettent leur produit au cœur de leur mission, comme le
font, souvent, les organisations caritatives. Elles n’en sont
pas moins tenues également de fournir dans leur contenu les
preuves suffisantes du suivi de leurs actions, par exemple.
• Les communiqués de presse. S’ils peuvent être utiles à un
public très restreint, leur publication à l’état brut sur un site
Web offre le parfait exemple de l’erreur du « on a toujours
fait comme ça ».
• Les longues et indigestes mentions juridiques. Quelques
lourdeurs juridiques sont certes acceptables, mais si vous
voulez prouver que vous respectez vos utilisateurs, prenez
le temps de simplifier le jargon et de traduire les périphrases
inutiles (avec l’aide d’un avocat) dans un langage simple.
• Les interminables listes de fonctionnalités. La plupart ne
servent aucunement aux utilisateurs. Quant aux autres, elles
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pourraient généralement être classées par catégories pour


faciliter la recherche et la compréhension.
• Une documentation redondante. Pourquoi proposer trois
FAQ différentes à un même public ? Ne peuvent-elles être
combinées ou transposées en une aide contextuelle ?
• La médiathèque. Vos vidéos et animations commencent par une
longue introduction arborant votre logo en lévitation ? Elles s’éti-
rent sur 30 longues minutes pour dix minutes de contenu impor-
tant ? Sucrez, éditez, et prévoyez des outils de navigation.

Quand vous aurez éradiqué sans pitié le contenu inutile


au niveau du plan de site, préparez-vous à en faire autant au
niveau de chaque section, page et phrase (et à apprendre aux
autres à faire de même).

UN BON CONTENU EST UN CONTENU ENTRETENU


Ne publiez rien sans plan de contenu.

Le média de la presse écrite est à l’arbre mort ce que l’infor-


mation en ligne est à la plante vivace. Or, comme nous l’avons
compris il y a environ 12  000 ans, les plantes nous sont plus

12 S T R AT É G I E D E C O N T E N U W E B
utiles quand on les soigne et les cultive pour répondre à nos
besoins. Le contenu, aussi, a besoin de soin et d’entretien.
Un contenu factuel doit être mis à jour quand paraît une
nouvelle information, et supprimé quand il ne sert plus à rien.
Les contenus générés par les utilisateurs doivent être nourris et
nettoyés. Les contenus chronotypiques, comme un flash info ou
des informations évènementielles, doivent être semés dans les
temps et taillés une fois leur floraison passée. De manière plus
importante encore, sans doute, un plan de contenu, une fois mis
en place, doit être entretenu jusqu’au terme de son cycle de vie
prévu si l’on souhaite qu’il porte ses fruits et que les efforts paient.
La critique est aisée, certes. Mais il est vrai que si le contenu
est souvent mal entretenu, c’est parce que les plans de contenu
reposent sur les épaules de personnes déjà surmenées, qui
doivent le produire, le réviser et le publier sans négliger leurs
autres responsabilités. On peut donc éviter ce problème, mais il
persistera tant que l’on ne reconnaitra pas que les activités liées
Ce document est la propriété exclusive de jean SYLVESTRE (jsylvestre@sdcinfo.com) - 29 août 2011 à 16:39

au contenu et à la publication sont chronophages et complexes ;


tant que ces tâches ne seront pas intégrées dans les descriptions
de fonction, les évaluations et l’organisation des ressources.
Compter sur un système de gestion de contenu pour
remplacer ce type d’entretien prodigué par un humain est à peu
près aussi efficace que de garer des engins agricoles devant un
champ, partir en vacances et espérer que le travail sera fait au
retour. Un tracteur a beau être plus efficace qu’une charrue à
bœuf, il faut tout de même qu’un homme décide où, quand et
comment l’employer.
Quel que soit le chemin qui nous mène à la stratégie de
contenu ou le type d’activité que l’on pratique dans ce domaine,
ces principes et postulats communs sont à la base de notre
travail. Ils ne sortent pas de nulle part, bien évidemment. Si la
stratégie de contenu est une discipline encore jeune, elle trouve
sa source dans des métiers qui, eux, n’ont rien de nouveau.
Pour saisir toute la portée et l’apport de la stratégie de contenu -
et comprendre en quoi ce n’est pas « juste un travail d’édition »
ou « un synonyme du mot marketing », intéressons-nous aux
métiers qui ont posé les fondations de notre pratique.

P R I N C I P E S F O N D A M E N TAU X 13
2
LE MÉTIER
DE LA STRATÉGIE
DE CONTENU
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C’EST PARCE QU’IL A SOUVENT démontré qu’il pouvait faire


dérailler un projet Web et parce qu’il est étroitement lié à la stra-
tégie commerciale que le contenu requiert une attention toute
particulière. Le responsable de la stratégie de contenu va, tout au
long de chaque projet, mettre en balance les attentes en matière
de contenu et les ressources disponibles, et prévenir l’équipe des
insuffisances qui nécessiteraient de réduire les volumes de contenu
ou de renforcer les ressources. Il va parcourir les terres politique-
ment instables de la publication décentralisée, et longtemps après
que le travail des architectes de l’information et des designers a été
validé, contrôler l’impact des changements de stratégie organisa-
tionnelle sur la production de contenu en cours.
En clair, c’est une sentinelle qui scrute l’horizon et guette les
problèmes.
Faire de la stratégie de contenu, que l’on définit comme
étant la planification et la direction de projets de contenu et de
publication en ligne, c’est aller au front1. L’expression anglaise

1. To run point en anglais (NdT)

14 S T R AT É G I E D E C O N T E N U W E B
provient du vocabulaire militaire et fait référence au soldat ou
à la troupe qui se trouve en première ligne : le point man. Tout
aussi influent et approprié, le terme désigne, en anglais améri-
cain, le cowboy à la tête d’un troupeau de bétail. La version
actuelle de l’article « Take point » de Wikipédia relève, sur un
ton typiquement prosaïque, que c’est « une position dangereuse
qui nécessite vigilance et capacité de faire face à des attaques
inopinées » (http://bkaprt.com/cs/2/)1. En effet.
En tant que point man, l’expert en stratégie de contenu travaille
avec d’autres responsables, chargés de différents aspects du
projet : architectes de l’information, directeurs techniques, direc-
teurs artistiques et chefs de projet. Et en plus de diriger les tâches
liées au contenu, il joue un rôle clé dans ce que les conseillers en
affaires appellent la «  gestion des risques  ». Paradoxalement, si
votre responsable de la stratégie de contenu repère un problème
en phase avancée dans le projet et qu’il encaisse le coup – soit en
faisant des heures supplémentaires, soit en demandant un petit
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délai  – cela signifie que la stratégie marche. Si quelqu’un doit


rencontrer un problème, ce doit être le responsable du contenu,
et non les créateurs de contenu, le référenceur ou la personne
chargée de la migration d’une base de données.
Ainsi, si vous êtes la personne préposée à la stratégie de
contenu, vous devez naturellement être capable de sentir les
problèmes arriver et de réagir rapidement quand ils se présen-
tent. Une des meilleures façons de vous préparer à vos défis
futurs, c’est de franchir les frontières de votre formation initiale.
Cela veut dire que vous devez vous familiariser avec les autres
domaines dans lesquels la stratégie de contenu puise sa source.

Un arbre généalogique confus


Les marketers ont tendance à considérer la stratégie de contenu
comme une forme de marketing – comme le font certains rédac-
teurs techniques, bien que cela soit une insulte dans la bouche
de ces derniers. Les experts en gestion des connaissances
disent souvent que c’est un moyen d’améliorer les processus
et d’établir des normes. Les éditeurs et rédacteurs Web de

1. Adresse complète : http://en.wikipedia.org/wiki/Take_point

L E M É T I E R D E L A S T R AT É G I E D E C O N T E N U 15
longue date ont tendance à dire que c’est ce qu’ils font depuis
toujours. Aucun d’entre eux n’a foncièrement tort, ni complète-
ment raison non plus. Alors que font rage les débats tentant de
définir notre discipline, cette dernière est, de plus en plus clai-
rement, la proie d’une cooptation par des disciplines voisines
ou d’une dénaturation, du fait que sur Internet, certaines de ces
disciplines, précisément, font plus de bruit que d’autres.
C’est pour cela que nous devons connaître nos racines. Si
vous savez qui vous êtes et comment vous en êtes arrivé là, il
devient beaucoup plus difficile de vous mettre dans une case.
Et si vous connaissez un minimum les trucs, les us et l’histoire
de votre tribu, vous ne devrez pas tout réinventer vous-même.

L’origine des espèces


Je me plais à imaginer notre domaine comme une sorte de
vigoureux hybride, mais il tient davantage du monstre de
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Frankenstein assemblé à partir de pièces détachées et animé par


l’angoisse des délais. Autre comparaison appropriée : cette créa-
ture de l’antiquité grecque, appelée chimère, monstre cracheur
de feu avec une tête de lion d’un côté, une tête de serpent de
l’autre, et une tête de chèvre poussant en plein milieu de son
corps. (Je vous laisse une minute pour visualiser la chose.)
Les designers ont un panthéon auquel se référer  : Paula
Scher et Saul Bass, mais aussi Bodoni et Gutenberg. Les déve-
loppeurs ont leurs héros culturels, comme Alan Turing et le
Sieur Tim Berners-Lee. Ces disciplines ont un héritage et des
principes communs. Le design est communication. Un code élégant
vaut mieux qu’un code négligé.
Bien qu’il lui manque la tête de chèvre, l’expert en stratégie
de contenu a également un héritage. Il en a plusieurs, en fait,
dont chacun peut nous en apprendre beaucoup. Un déco-
dage génétique complet nécessiterait un livre en soi  : nous
nous contenterons donc d’aborder les quatre métiers les plus
influentes : l’éditeur, le conservateur, le marketer et l’expert ès
sciences de l’information.

16 S T R AT É G I E D E C O N T E N U W E B
INFLUENCE N° 1 : L’ÉDITEUR
Le travail éditorial et la stratégie de contenu sont tellement liés
que l’on se demande souvent en quoi ils diffèrent. Vue de l’ex-
térieur, la stratégie de contenu ressemble parfois terriblement
à l’activité éditoriale propre aux magazines et aux journaux. Le
milieu journalistique, et celui de l’édition en général, ont, en
effet, beaucoup à nous apporter.
Pour le monde extérieur, le titre d’éditeur aurait tendance à évo-
quer le spectre d’un Humphrey Bogart ou d’un Cary Grant en par-
dessus, grincheux, buveur de scotch et borderline. Alternativement,
ceux qui, enfants, ont été traumatisés par leur professeur de français
imaginent parfois que l’éditeur est un pinailleur qui donne des coups
de règle au moindre écart de conjugaison.
Certes, il est utile d’être sensible à la correction de la langue et
indispensable de se passionner pour les histoires bien racontées.
Mais le véritable travail de l’édition rassemble surtout et simul-
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tanément d’excellentes compétences organisationnelles, une


habitude à développer des idées de communication concrètes et
une capacité à traiter, à la fois avec fermeté et diplomatie, toute
l’équipe impliquée dans la création d’un livre, d’un journal ou
d’un site Web, depuis la conception jusqu’à la sortie. L’éditeur ne
se contente pas de choisir des histoires et de les commenter dans
la marge au stylo-plume : il développe des thèmes et des trames
narratives, il gère les réactions aux autres publications et les évène-
ments extérieurs, il cultive l’équilibre et la variété entre les articles
ou les livres, il évalue et dirige des auteurs et autres créateurs de
contenu, et bien d’autres choses encore.
Outre les coups sur les doigts, les éditeurs ont beaucoup à
nous apprendre sur la gouvernance du contenu.

Les responsables de contenu travaillent pour l’utilisateur


Dans le monde de l’édition, si vous ne parvenez pas à gagner,
conserver et récompenser l’attention de vos lecteurs –  qu’ils
soient amateurs de journalisme «  people  » ou de littérature
pointue – vous êtes au chômage. Un éditeur digne de ce nom

L E M É T I E R D E L A S T R AT É G I E D E C O N T E N U 17
ne travaille ni pour les auteurs, ni pour une maison d’édition,
mais pour des lecteurs.
Bien que nous autres, spécialistes du contenu, devions
souvent servir d’intermédiaires entre les équipes de produits,
les services de marketing et de communication institutionnelle,
les projets particuliers et l’équipe de développement, nous
travaillons aussi pour les lecteurs. Dans Content Strategy for the
Web, Kristina Halvorson écrit1 :

...en ligne, vous n’avez pas un public captif. Vous avez un public
qui fait plusieurs choses à la fois, qui est distrait, prêt à quitter
votre site à tout moment, et qui a des objectifs bien précis en tête.
Si votre contenu ne répond pas à ces objectifs, rapidement, vos
visiteurs partiront.

L’intérêt et l’attention du lecteur sont des choses précieuses


et essentielles : c’est le mantra de l’éditeur professionnel. Voici
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l’un de mes extraits préférés du magnifique livre d’Arthur


Plotnik, The Elements of Editing2 :

La seule alliance permanente de l’éditeur est avec son public, son


lectorat. Il est de la responsabilité de l’éditeur de capter l’attention
de ce lectorat  ; de l’édifier, de le divertir, de le caresser dans le
sens du poil, de le remuer... Les auteurs connaissent leur sujet. Les
éditeurs se spécialisent dans la connaissance du lectorat.

Les grands auteurs savent ce que leurs lecteurs veulent et


ont besoin d’entendre. Mais c’est à l’éditeur – et maintenant à
l’expert en stratégie de contenu – que revient la responsabilité
de déterminer les attentes du lectorat et d’adapter le contenu
en fonction de ces attentes. Paradoxalement, nous ne pouvons
véritablement servir nos clients et nos employeurs qu’en
travaillant sans relâche pour nos lecteurs.

1. Kristina Halvorson, Content Strategy for the Web, (Californie  : New Riders,
2009), p. 75
2. Arthur Plotnik, The Elements of Editing, (New York : Collier Books, 1982), p. 25

18 S T R AT É G I E D E C O N T E N U W E B
Les histoires comptent
Les êtres humains sont des conteurs intarissables. Nous
pensons, nous enseignons et nous échangeons en créant des
histoires. Et les penseurs qui font les opinions, les professeurs
qui inspirent leurs élèves, les politiciens qui gagnent les élec-
tions, et bien entendu, les éditeurs qui vendent des livres et des
magazines ont tous une chose en commun : ils savent raconter
de bonnes histoires.
Pour quelqu’un dont la communication est le métier, c’est
l’histoire qui fait tout.
Et d’où qu’ils viennent dans le monde de l’édition, les éditeurs
savent comment aider les autres à produire les plus belles, les
plus captivantes histoires qu’ils puissent raconter. Les respon-
sables du contenu qui sont passés par le journalisme ou l’édition
maîtrisent généralement les bases du storytelling. Dans le cas
contraire, nous avons beaucoup à apprendre des principes de la
narration propres à ces disciplines, que ce soient les rudiments,
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d’abord, comme l’écriture du chapeau qui accroche le lecteur


(et est soutenu par des informations factuelles et des citations)
jusqu’aux techniques de narration plus élaborées destinées à
fournir les niveaux narratifs plus profonds.
Si vous éprouvez des difficultés à appliquer le storytelling,
il peut vous être utile de revenir aux principes élémentaires
prodigués dans les écoles de journalisme, et dont les principaux
concepts sont notamment :

• La pyramide inversée. Ce terme décrit la structure clas-


sique d’un article d’actualité. Les principales informations
générales apparaissent en début d’article, puis viennent,
par ordre décroissant, les informations de moins en moins
importantes.
Le terme « important » veut dire, ici, important pour le lecteur.
Vous remarquerez que c’est exactement l’inverse de ce qu’on
peut lire dans certains contenus marketing parfaitement super-
ficiels, qui commencent par des assertions du type : « Le monde
des affaires internationales est de plus en plus compliqué. »
• La règle des 5 W + 1 H. Cette formule sert à rappeler aux rédac-
teurs qu’ils doivent raconter chaque histoire à partir des ques-
tions essentielles qui la constituent  : que (what) s’est-il passé,

L E M É T I E R D E L A S T R AT É G I E D E C O N T E N U 19
qui (who) est impliqué, quand (when) et où (where) cela s’est-il
produit, pourquoi (why), et comment (how). Transposé à un
contenu marketing, ce modèle servirait à énoncer quoi – quel
produit a été fabriqué –, pour qui – ce produit a-t-il été conçu
spécifiquement –, pourquoi – cette cible devrait se procurer ce
produit –, comment – ce produit fonctionne-t-il –, et quand et où
– ce produit est-il disponible à l’achat.
• Une image vaut mille mots. Au lieu de vanter ad nauseam
les fonctionnalités high-tech de votre gadget ou de trans-
poser combien votre client est fier de publier ses énoncés de
mission, donnez du concret. Publiez des résultats, des statis-
tiques, des études de cas, des témoignages, et des démonstra-
tions du produit en action. Oubliez les boniments.

Évidemment, ces principes ne sont qu’un point de départ. On


n’apprend pas à raconter une histoire en reproduisant une liste
d’astuces ou un podcast sur les techniques de narration. Vous
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pouvez apprendre beaucoup de choses en analysant des structures


narratives et en travaillant votre technique, mais il vous faudra
également creuser, lire, voir et écouter les excellentes histoires
que racontent les romanciers, les journalistes, les scénaristes, mais
aussi, oui, les blogueurs et les marketers. Non seulement vous
améliorerez vos compétences en stratégie de contenu, mais vous
aurez d’autant plus de conversation en société.
Pourquoi vous soucier de tout cela si vous ne créez pas le
contenu vous-même, vous demandez-vous ? En premier lieu,
parce que la plupart des projets en stratégie de contenu trai-
tent, précisément, de trame et de narration : les messages clés,
slogans, objectifs et plans de communication servent tous
à guider le lecteur à travers une série d’idées et de concepts.
Ensuite, parce que si vous devez mettre en place des règles et
procédures pour les créateurs de contenu, vous devez vous-
même maîtriser suffisamment le sujet, de manière à leur donner
les bons outils pour raconter des histoires fortes.
Pour conclure, un mot sur les relations avec les spécialistes
en storytelling.
L’un des aspects les plus stressants du métier d’éditeur, c’est
d’être capable de motiver, rassurer, et parfois brusquer un
auteur afin qu’il produise le meilleur travail possible sans diluer

20 S T R AT É G I E D E C O N T E N U W E B
son ton et son point de vue uniques. C’est sacrément difficile,
et cela demande un certain équilibre, toujours instable, de tact
et de franchise. Quand vous abordez un créateur de contenu,
prenez le temps de discuter avec lui sans condescendance et
sans blesser son égo : l’effort en vaut la peine.

L’édition, un métier difficile


Dans la brève histoire d’Internet, on peut isoler deux types de
grands déraillements liés au contenu :

• les projets qui prennent du retard suite à une incapacité à


produire les contenus appropriés pour le lancement, et
• les projets qui déraillent à cause d’une mauvaise planifica-
tion de la supervision, de la production, de la révision et
de la distribution du contenu –  ce que Jeffrey MacIntyre
de Predicate, LLC appelle à juste titre «  Le problème du
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deuxième jour » (http://bkaprt.com/cs/3/)1.

Ces deux problèmes sont dus à une sous-estimation du


temps, de l’attention, des compétences et de l’argent nécessaires
à la planification, création et publication de contenu, à la fois
dans l’immédiat et à long terme. C’est une activité que notre
espèce pratique depuis plus de 4 000 ans : nous en connaissons
donc un rayon sur la question. Mais avant Internet, la vaste
majorité des gens qui devaient se soucier des nuances de l’édi-
tion étaient... les éditeurs.
Maintenant que des organisations aussi diverses que des
hôpitaux, des bibliothèques, des commerces en tous genres et
des vignobles familiaux ont compris que faire affaire en ligne
supposait de traiter du contenu, une communauté beaucoup
plus nombreuse s’est appropriée les détails subtils du processus
de publication. Dès que vous devez produire du contenu utile et
qualitatif, quel que soit le niveau, au-delà du blog personnel, vous
devez suivre un processus éditorial pour appuyer la création, la
révision, la publication, le suivi des performances et l’entretien

1. Adresse complète  : http://predicate-llc.com/media/presentation/the-day-2-


problem-a-tour-of-editorial-strategy/

L E M É T I E R D E L A S T R AT É G I E D E C O N T E N U 21
constant du contenu. (Vous aurez également besoin de ressources
– en temps, surtout – qui, comme chacun le sait, coûtent de l’ar-
gent). En tant que spécialistes en stratégie de contenu, nous
pouvons aider nos équipes et nos clients à communiquer de
manière plus efficace en utilisant des outils classiques du milieu
de l’édition, c’est-à-dire :

• un workflow éditorial proprement documenté, compre-


nant des procédures de validation et des contrôles de qualité
rigoureux ;
• un calendrier éditorial intégrant les campagnes et planifiant
bien à l’avance les thèmes traités ;
• un plan média, indiquant quels contenus sont adaptés à
quels canaux et quels publics.

Mais surtout, les éditeurs peuvent nous en apprendre beau-


coup sur la manière de publier régulièrement du contenu
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original et utile aux publics visés. Ils peuvent notamment nous


apprendre à engager et diriger des rédacteurs capables d’écouter
des experts, puis de rassembler des informations et de créer du
contenu dont la portée dépasse la biographie des cadres de l’en-
treprise et les rapports annuels.
Nos clients et nos employeurs commencent à comprendre
qu’il ne leur suffit pas d’engager un rédacteur Web à la fin d’un
projet et d’espérer que quelqu’un d’autre s’occupera de gérer le
contenu. En tant que spécialiste de la stratégie de contenu, nous
devons maîtriser les bonnes pratiques éditoriales afin d’aider
nos clients à mieux faire la transition vers le nouveau monde
de la publication distribuée en ligne.

Le contenu coûte cher


Le contenu utile coûte cher. C’est un fait que les éditeurs ont
compris depuis longtemps, mais que les agences Web décou-
vrent à peine.
Ne parlons pas des efforts que nécessite la publication d’un
quotidien. Considérons seulement les personnes impliquées
dans la publication d’un livre : le responsable des acquisitions,
l’éditeur, le directeur de collection, le réviseur, le correcteur,

22 S T R AT É G I E D E C O N T E N U W E B
le graphiste, le compositeur, le chef de projet, le graphiste de
couverture et les équipes de vente et de marketing. Dans le
milieu de l’édition traditionnelle, tous ces gens sont payés. De
même que les comptables, les secrétaires, les imprimeurs, ainsi
que tous les employés autres que les stagiaires.
Imaginez maintenant que le directeur marketing apprend
qu’il doit relire et réviser quarante pages de contenu provenant
d’un autre service, s’assurer que le nouveau guide des normes
de la marque soit bien appliqué à toutes les newsletters et à tous
les courriels, et produire un épisode de la nouvelle série vidéo
de l’entreprise. Le tout en trois semaines, sans augmentation de
budget, et sans négliger ses autres responsabilités.
Des recommandations de stratégie de contenu faites sans
prendre en compte les ressources disponibles ont peu de
chances d’aboutir. Quand on travaille avec des organisations de
grande taille, on peut parfois se contenter de signaler que nos
recommandations nécessitent des ressources supplémentaires.
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Auprès d’entreprises plus modestes, on ne peut espérer que


nos clients ajouteront un budget de vingt heures par semaine
d’un coup de baguette magique pour mettre en place un plan
de «  marketing de contenu  » complet –  ou toute autre tâche
chronophage. Dans certains cas, nous devrons limiter nos
ambitions à investir seulement les effectifs et budgets existants.
Quelle que soit la situation, il est de notre responsabilité de :

• Cerner les ressources existantes  : y a-t-il des gens dispo-


nibles pour travailler sur les contenus ? Sont-ils compétents
pour le faire  ? De quel type de formation ont-ils besoin  ?
Y a-t-il d’autres auteurs ou rédacteurs dans l’entreprise qui
puissent être libérés pour venir en renfort ? Y a-t-il du budget
pour engager des freelance ou de nouveaux employés ?
• Concevoir le dossier de la stratégie de contenu : en quoi les
changements recommandés répondront-ils aux objectifs
globaux de l’organisation ? Remplaceront-ils des processus
moins rentables, et le cas échéant, quelles ressources libèreront-
ils ? Contribueront-ils directement à faire augmenter les recettes
en boostant les ventes ? À réaliser des économies en réduisant
l’activité du service clientèle ? À décrocher de nouveaux contrats
en améliorant l’image de marque de l’entreprise ?

L E M É T I E R D E L A S T R AT É G I E D E C O N T E N U 23
• Préparer les clients et dirigeants à un changement orga-
nisationnel  : peut-on introduire les nouveaux systèmes
et processus suffisamment tôt avant la mise en ligne des
contenus  ? S’il faut embaucher de nouveaux employés,
peut-on aider à rédiger l’annonce ou formuler des conseils ?
Peut-on recommander des freelances fiables et doués ?

Au bout du compte, nous –  et nos clients  – devons nous


rappeler que la création (mais aussi la révision et l’entretien)
du contenu n’est possible que moyennant des ressources
humaines, payées pour le faire.
Soulever la cherté du contenu entraîne une autre question,
trop vaste pour être traitée dans ce livre. Dans le domaine de
la stratégie de contenu, commence à émerger une sous-spécia-
lisation, dédiée à la dimension commerciale de la production
et de la distribution de contenu à grande échelle. Bien que de
nombreuses organisations produisent du contenu à des fins de
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marketing ou pour récolter des fonds, certaines sont spécia-


lisées dans le contenu lui-même. Les éditeurs bien sûr, mais
également le monstre tentaculaire que l’on nomme industrie
du divertissement, ainsi que les nombreux nouveaux types
d’entreprises qui sont apparues pour profiter du modèle de
distribution à très bas coût d’Internet. Les spécialistes du
contenu doués en stratégie financière et avides d’expérience
apprécieront vraisemblablement cette niche à la fois intéres-
sante et lucrative.

INFLUENCE N° 2 : LE CONSERVATEUR 1


Le mot curator vient du latin cura qui signifie soin. À l’ori-
gine, les «  curators  » géraient les ressources publiques dans
la Rome antique : les réserves de blé et d’huile, les aqueducs,
les registres de compatibilité publics et les routes avaient tous
leur propre curateur. Dans l’Angleterre du quatorzième siècle,
le mot s’est mis à désigner les ecclésiastiques chrétiens dont la
principale responsabilité était de soigner et guérir spirituelle-
ment leurs paroissiens. Ce n’est que dans les années 1660 que le
1. En anglais, le terme est curator (NdT)

24 S T R AT É G I E D E C O N T E N U W E B
terme commence à être utilisé dans le sens de « conservateur,
personne responsable des collections d’un musée, d’une galerie
d’art, d’une bibliothèque, etc. » (http://bkaprt.com/cs/4/)1.
À propos de cette évolution sémantique, le critique d’art
David Levi Strauss écrit que les conservateurs « ont toujours
été un savant mélange de bureaucrate et de prêtre  » (http://
bkaprt.com/cs/5)2, combinant tâches administratives et soin de
l’âme. Et comme l’écrit l’éditeur de contenu Dan Zambonini,
ces conservateurs de musées et de galeries ne s’intéressent pas
simplement à leurs collections –  ils les aiment (http://bkaprt.
com/cs/6) 3.
Voilà qui nous amène au cœur de notre travail d’éditeur de
contenu4. Nous devons méthodiquement planifier l’acquisi-
tion, la classification et l’entretien pratique des contenus dont
nous avons la charge. Mais nous devons tout autant protéger
son essence et sa véracité, et le protéger contre les menaces de
perte de qualité ou d’originalité. Dans ces deux contextes, le
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conservateur de musée peut nous offrir des outils, des cadres


et des leçons utiles.

Une nécessaire immersion


Dans une interview de 2006, feu Anne d’Harnoncourt, directrice
du Philadelphia Museum of Art pendant vingt-six ans et fille du
célèbre conservateur et directeur de musée René d’Harnoncourt,
se vit demander un conseil pour les jeunes conservateurs. Son
conseil fut : « Regarder, regarder et regarder, puis regarder encore,
car rien ne remplace le regard... pour être avec l’art. 5 »

1. Adresse complète (inscription requise)  : http://www.oed.com/


viewdictionaryentry/Entry/45960
2. Adresse complète : http://www.artlies.org/article.php?id=1655&issue=59&s
=1
3. Adresse complète  : http://blog.braintraffic.com/2010/06/curation-
nation/#comment-57973136
4. Le terme « curator » ou « content curator », utilisé en anglais par analogie
avec le conservateur de musée ne fonctionne pas en français. C’est pourquoi
l’analogie est faite avec le métier d’éditeur et se dit éditeur de contenu
5. Hans Ulrich Obrist, A Brief History of Curating, (Zürich: jpr|ringier & Les
Presses du Réel, 2009) p. 179

L E M É T I E R D E L A S T R AT É G I E D E C O N T E N U 25
Le contenu que la plupart d’entre nous traite (en général) n’a
rien avoir avec l’art. Mais cette notion d’être avec l’art – ce que
le critique Michael Fried appelle présence1  – est doublement
pertinente dans notre travail2.
En un sens, elle peut faire référence à notre propre état d’im-
mersion dans le contenu que nous traitons  ; notre recherche
d’une connaissance qui va bien au-delà de la simple familiarité.
Dans la même interview, d’Harnoncourt parle de l’exposition
révolutionnaire de son père sur l’art amérindien, en 1939, à San
Francisco. Elle se rappelle que son père3

passa des années de sa vie à véritablement apprendre à connaître


les gens qui avaient fabriqué ces objets  ; aussi lorsqu’il les
présentaient, que ce fût une peinture sur sable, ou un totem de
la côte nord-ouest, ou quelque autre chose, il essayait de faire...
quelque chose qui respectait vraiment le contexte dans lequel
l’objet avait été fabriqué, et qui lui permettait tout de même de
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parler à un public qui n’était pas habitué à considérer ces objets


très, très beaux et puissants comme tels.

Ce degré d’expertise, de sensibilité et de discernement exigé


des grands conservateurs peut sembler excessif pour l’éditeur de
contenu dont les « collections » se limitent à quelques bases de
données, mais cette description du travail de conservateur force la
comparaison. Pour bien faire notre travail, nous devons mettre en
équilibre la compréhension du contexte dans lequel le contenu est
créé (source, objectifs commerciaux, workflow) et la compréhen-
sion du contexte dans lequel il sera lu et utilisé (besoins des utili-
sateurs, canaux de diffusion). Et c’est l’immersion dans ces deux
mondes qui permet de créer le bon équilibre.

1. Presentness (NdT)
2. L’essai de John Walsh Pictures, Tears, Lights and Seats contient une fine analyse
du mot « presentness » et de son lien avec le travail de conservateur. John B.
Cuno, Whose Muse: Art Museums and the Public Trust, (Princeton : Princeton
University Press, 2004) p. 84
3. Hans Ulrich Obrist, A Brief History of Curating, (Zürich: jpr|ringier & Les
Presses du Réel, 2009) p. 173

26 S T R AT É G I E D E C O N T E N U W E B
En second lieu, les notions de présence et de concentration
propres au travail du conservateur animent également notre
discipline, et vise les utilisateurs finaux.
Dans une vraie exposition de musée ou de galerie, les visi-
teurs sont généralement invités à prendre le temps d’être avec
l’art – ou les objets, ou tout autre contenu. Les conservateurs
et commissaires d’expositions savent que les gens ont certains
besoins pour pouvoir se concentrer  : des voies dégagées, un
bon éclairage, aucune distraction.
Imaginez que, visitant un musée, vous vouliez approcher
d’un Matisse, mais que vous vous heurtiez à une paroi de verre
installée à trois mètres du tableau. Pour franchir cette paroi – qui,
entre-temps, est devenue opaque, afin que vous ne puissiez
surtout pas voir le tableau – vous devez décliner votre nom, votre
adresse, puis présenter une pièce d’identité. Une fois ces forma-
lités accomplies, vous découvrez que le « tableau » est en fait une
reproduction miniature  ; pour voir l’original, il vous faut aller
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dans une autre pièce, remplie de panneaux publicitaires. Enfin,


vous atteignez le tableau. La description est écrite en tout petits
caractères, gris foncé sur un fond gris clair. Impossible de lire ce
qui est écrit. Qu’importe : l’œuvre d’art est enfin accessible.
C’est alors que des clowns surgissent des placards et font
sonner des klaxons en brandissant des publicités pour du denti-
frice et des pilules amincissantes. C’est ça le contenu en ligne.
Le fait que sur Internet, tout le monde lit tout et n’importe
quoi démontre une immense soif de contenus. Sans compter la
distraction suscitée par l’e-mail, les autres sites Web et la vraie
vie, nous avons conçu des dizaines de milliers de sites Web sur
le postulat que même si nos sites évoluent de telle manière qu’il
devient difficile, irritant voire absurde de les consulter, nos
lecteurs reviendront pour notre contenu. Ne peut-on vraiment
pas faire mieux? Bien sûr que si. Nous devrions même consi-
dérer qu’il est de notre devoir, en tant qu’experts en stratégie
de contenu, de nous assurer que tous les efforts et l’attention
investis dans la création et la gestion de contenus de qualité ne
soient pas ruinés par des interfaces qui entravent, irritent et
distraient l’utilisateur.
Dans un article paru en 2009 sur A List Apart, l’éditrice et
designer Mandy Brown enjoint les Web designers à créer de

L E M É T I E R D E L A S T R AT É G I E D E C O N T E N U 27
l’espace pour les lecteurs. À l’instar de d’Harnoncourt, Brown
conseille aux designers, pour y parvenir, de s’autoriser à se
laisser absorber par le texte (http://bkaprt.com/cs/7)1 :

En tant que designer, la seule manière de vous assurer qu’une


page est lisible, c’est de la lire vous-même ; oubliez vos habitudes
de designer et prenez le temps de lire le contenu. Ce n’est pas
une tâche aisée, mais lire sur le Web non plus. Cet effort vous
aidera peut-être à compatir avec la détresse du lecteur. Le Web
est encore un lieu bruyant et encombré, mais il est également sans
limite. On peut donc certainement trouver l’espace suffisant pour
permettre la lecture – un espace dans lequel le texte parlerait au
lecteur, sans que celui-ci ait trop d’efforts à faire pour l’entendre.

Pour accommoder le lecteur, nous pouvons, en plus de nous


soucier d’aspects de design tels que l’espace et la composition,
conseiller à nos clients et à nos employeurs de réduire les sources
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de distraction dans les colonnes latérales, de lutter contre les


publicités qui empêchent l’accès au contenu, et de procurer aux
lecteurs l’équivalent d’un bon éclairage et d’une pièce calme. C’est
une des raisons pour lesquelles, dans certains types de projets, une
approche multidisciplinaire a plus de chances de produire de bons
résultats qu’une approche axée uniquement sur le contenu. Quand
des spécialistes en contenu peuvent influer sur la présentation et le
design, les lecteurs en tirent profit.

Les utilisateurs sont – aussi – des êtres humains


L’essentiel du travail de conception et d’organisation dans les
grands musées et les galeries d’art n’a rien de théorique, et n’a
même pas grand rapport avec le travail de conservateur. Les
conservateurs et autres employés de musée gèrent des objets
physiques et des êtres de chair et de sang dans des espaces bien
réels. Et ces êtres humains, étant des mammifères, ont certains
besoins  : des lieux où s’assoir, une température ambiante
raisonnable, des rampes d’accès et autres facilités pour handi-
capés, de l’eau potable et des toilettes. Dans les musées de plus

1. Adresse complète : http://www.alistapart.com/articles/indefenseofreaders/

28 S T R AT É G I E D E C O N T E N U W E B
grande taille, il leur faut également des gardes pour assurer leur
sécurité, un personnel accueillant pouvant donner des infor-
mations dans plusieurs langues, des plans bien conçus, et un
endroit pour manger un sandwich et boire un café.
Sur le Web, de nombreuses médiations interviennent dans
les interactions entre les uns et les autres, mais nous sommes
toujours des primates. Nous avons besoin d’aménagements
pour les innombrables handicaps que l’on peut rencontrer ; de
moyens d’annoter et de conserver des informations pour les
traiter ultérieurement, de manière à pouvoir faire des pauses ; de
moyens de balayer les contenus lorsque nous sommes pressés ;
d’outils conviviaux pour nous orienter et nous guider ; d’accès
à une véritable assistance humaine, sous la forme d’une aide en
ligne, d’un contact téléphonique ou par courriel ou de tout autre
canal raisonnable ; et de la possibilité de consommer le contenu
sur les dispositifs et dans les lieux que nous choisissons.
Mais ces questions ne relèvent-elles pas de l’expérience utili-
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sateur ? Si, tout à fait. Et en tant que défenseurs du contenu,


nous devons être prêts à intervenir dans la conception de l’ex-
périence utilisateur, qui concerne également notre contenu.
En clair, nous devons nous attacher à créer et à présenter les
contenus en respectant le fait que même lorsqu’ils surfent sur
le Web, les gens ont des besoins naturels.

« Scrupuleux » n’est pas un terme injurieux


Les conservateurs de musées et de galeries d’art manipulent
souvent des objets hors de prix et irremplaçables. En consé-
quence, ils recourent à des procédures formalisées et méti-
culeuses pour accepter, décrire et tracer les pièces sous leur
responsabilité. Des procédures similaires, appliquées au
contenu, peuvent réduire de manière significative le chaos qui
menace les projets de contenu de grande envergure, mais cela
ne suffit pas.
La plupart des spécialistes en contenu qui dirigent de gros
projets ont appris à appliquer des procédures rigoureuses pour
documenter les contenu longtemps avant le lancement d’un
nouveau site, pour une grande part parce qu’il est très pénible
de faire autrement. Si la taxonomie et les métadonnées susci-

L E M É T I E R D E L A S T R AT É G I E D E C O N T E N U 29
tent généralement une grande attention, il est en revanche très
facile d’oublier accidentellement d’autres données potentielle-
ment importantes :

• Quelles informations sur les sources et les types de contenu


doit-on répertorier pour faciliter l’affichage, la réutilisation,
la révision et le développement du contenu à l’avenir ?
• Quand un contenu est ajouté ou révisé, comment peut-on
notifier utilement les raisons de ce changement  ? Et
comment peut-on garantir que ces révisions correspondent
à une stratégie de communication plus globale ?
• Quelles procédures nous permettraient de tracer et réutiliser
nos sources de contenu à travers le temps ? Quels types d’ou-
tils de reporting, d’analyse et de publication permettent de
gérer le traçage et la réutilisation ? Comment peut-on struc-
turer notre contenu pour promouvoir des modèles de réuti-
lisation intéressants ?
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• Comment peut-on utiliser les outils d’analyse et autres pour


déterminer quels atouts on sous-exploite ?

Nous reviendrons à ces notions dans quelques pages, mais


pour l’instant, notons simplement que cette approche édito-
riale de la gestion de contenu à long terme est à la croisée d’un
domaine fréquemment occupé par les équipes IT, les services
marketing et les « webmasters » de l’ancien temps.

INFLUENCE N° 3 : LE MARKETER


Le marketing consiste à placer des produits sur le marché et à
persuader les gens de les acheter. Les « produits » en question
peuvent être des produits au sens propre (des œufs, un ordi-
nateur portable, un e-book) ou au figuré (des idées, des expé-
riences, un candidat aux élections). Les techniques employées
vont des plus grossières aux plus subtiles. La stratégie de
contenu n’est pas une branche du marketing, mais le marketing
est l’une des applications possibles de la stratégie de contenu, et
de nombreuses méthodes et pratiques couramment utilisées en
stratégie de contenu proviennent du marketing.

30 S T R AT É G I E D E C O N T E N U W E B
L’essence du marketing est issue de la rhétorique : la pratique
consistant à écrire ou à parler pour convaincre. Depuis sa
naissance, la rhétorique a été soumise à un certain degré de
suspicion. Au quatrième siècle avant J.-C., Platon comparait la
rhétorique à l’art occulte de la cuisine, qui donne bon goût à des
aliments malsains et qui est donc (comme la rhétorique) une
sorte de tromperie. (Évidemment, Platon suggérait aussi que
sa république utopique ne fonctionnerait que si tout le monde
mangeait et dormait par terre et ne se nourrissait que de pain,
de noix et de baies ; la viande, les tables et les lits menaient tout
droit à la damnation éternelle.)
Cette ambivalence culturelle entourant les arts de la persua-
sion prend tout son sens dans le monde du marketing.

Rhétorique et persuasion, que vous le vouliez ou non


Lorsque nous créons du contenu pour des entreprises et autres
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organisations, nous devons généralement faire plus qu’informer


ou divertir. En théorie, il y a des exceptions – les journaux en
ligne, par exemple – mais pour la plupart des entreprises et des
institutions, le contenu en ligne est également conçu pour intri-
guer, persuader, et au bout du compte, vendre.
Heureusement, cela ne veut pas dire qu’on peut comparer les
sites Web au publipostage. Parfois l’objectif « commercial » est
subtil au point d’être pratiquement invisible, et parfois il est aussi
direct qu’un « on a fabriqué ce truc cool avec lequel tu peux faire
des tas de trucs géniaux, tu veux pas l’acheter ? » Généralement,
on se trouve quelque part entre les deux. Et les principes de la
persuasion (rhétorique) et de vente (marketing) sont des sujets
que la civilisation occidentale moderne maîtrise parfaitement.
La rhétorique constitue l’une des trois parties du trivium – un
gros morceau de l’éducation classique à l’ancienne – et est égale-
ment un domaine d’étude académique hautement contesté. Je
vais tenter d’en brosser le portrait à gros coups de pinceau.
D’après Aristote, les trois types de rhétorique sont :

• L’argument rationnel (logos). Notre gadget apportera tel


avantage à votre entreprise, comme vous pouvez clairement
le voir sur ce tableur imprimé en Courier taille 6. Ta-da !

L E M É T I E R D E L A S T R AT É G I E D E C O N T E N U 31
• L’argument émotionnel (pathos). Nos souvenirs sont la
chose la plus précieuse de nos courtes et tristes vies. Ne
voudriez-vous pas acheter ce gadget pour vous assurer de
bons souvenirs ?
• L’argument d’autorité (ethos). En temps que leader d’opi-
nion dans les domaines de l’opinion et du leadership, je vous
le dis : achetez ce gadget. Vous ne le regretterez pas.

Les principes de la rhétorique sont enracinés dans notre


culture de la communication et nourrissent non seulement le
marketing, mais aussi les tribunes, les blogs, et bien entendu,
les discours politiques – qui ont d’ailleurs donné naissance à la
rhétorique, puisqu’elle a vu le jour avec les origines de la démo-
cratie mondiale.
Dans le langage des marketers, les «  messages  » sont des
idées générales que vous souhaitez transmettre directement au
cerveau de vos utilisateurs. Ils sont créés en combinant ce que
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vous avez à dire avec une approche rhétorique : comment vous


devez le dire. Ces messages ne sont pas des slogans ; ils sont
destinés à un usage interne et serviront à structurer, soutenir et
formaliser les contenus que vous produirez.
Pour prendre un exemple concret, considérons les messages
que pourraient concevoir un fleuriste de Brooklyn, un hôtel
de luxe pour hommes d’affaires et une université (s’ils étaient
percutants et sur-caféinés) (tableau 1).
En général, une équipe de marketing interne se sera chargée
de composer au moins quelques messages. Et souvenez-vous,
si vous travaillez sur la stratégie de contenu et que l’on ne vous
a donné que des messages généraux, vous avez parfaitement
le droit de demander des messages plus spécifiques pour vous
aider à façonner votre contenu. Ne pas le faire serait une erreur.
Bien entendu, la rhétorique ne se limite pas aux quelques
propos qu’en tient ce livre. C’est d’ailleurs une discipline qui
vaut la peine d’être étudiée par les spécialistes en contenu de
tous horizons. Voilà ce qu’en dit la consultante en contenu
Colleen Jones (http://bkaprt.com/cs/8/)1 :

1. Adresse complète http://www.leenjones.com/2009/02/rhetoric-mix/

32 S T R AT É G I E D E C O N T E N U W E B
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CLIENT IDÉE ARGUMENT ARGUMENT ARGUMENT
PRINCIPALE RATIONNEL ÉMOTIONNEL D’AUTORITÉ

Fleuriste Nos fleurs sont Nos fleurs durent 30 % Nos fleurs d’une intense Notre famille vend
local les plus fraîches. plus longtemps et sont fraîcheur vous rendront des fleurs depuis 100 ans,
les plus belles en raison la vie douce. la fraîcheur, ça nous
de leur fraîcheur. connaît.

Hôtel Nous faisons Choisissez-nous et vous Dès le moment où vous Nous avons servi plus
d’affaires moins de perdrez moins de temps passez la porte, vous d’hommes d’affaires
complications au comptoir. Garanti. êtes dans votre bureau en déplacement que
que d’autres privé, ou votre lounge quiconque, nous
hôtels. exécutive. comprenons leurs besoins.

Université Nos programmes Notre université Envoyez votre demande Nous sommes l’université
sont reconnus. se place dans le top 25 d’inscription pour étudier la plus sélective du pays
du classement mondial auprès des meilleurs et la réputation
et 70 % de nos diplômés professeurs de Poudlard. d’excellence de notre
poursuivent leurs études faculté est sans égale.
en maîtrise ou
en doctorat.

L E M É T I E R D E L A S T R AT É G I E D E C O N T E N U
tableau 1 : Les trois principaux types de rhétorique appliqués

33
à des clients hypothétiques.
La rhétorique, c’est l’art d’utiliser le langage pour persuader ou
influencer. Elle existe depuis Aristote. Comment peut-on ignorer
la rhétorique, l’art de persuader par le langage, alors que nous
nous évertuons à rendre nos sites Web, qui sont remplis de mots,
convaincants ? Ce serait comme essayer de cuisiner un délicieux
gâteau sans savoir ce que sont la farine, le lait ou le chocolat.

Il ne faut pas prendre les crimes pâtissiers à la légère, pas plus


que la riche tradition de la rhétorique. Et si le langage moderne
du marketing vous irrite, il vous faut peut-être juste une bonne
dose de rhétorique pour mettre votre cerveau en route et créer
du contenu persuasif. (Si ce sujet vous intéresse, lisez l’ouvrage
Clout-The Art and Science of Influencial Web Content, de Colleen
Jones en anglais. Il s’agit d’une excellente ressource pour les
spécialistes en contenu, qu’ils soient dans le marketing ou non ;
l’ouvrage comprend un chapitre entier sur la rhétorique qui est
beaucoup plus détaillé que ma ridicule petite synthèse.)
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L’évaluation est essentielle


Les spécialistes en marketing – et plus encore leurs confrères de
la publicité – atteignent leurs objectifs quand ils ont persuadé leur
public cible d’agir d’une certaine manière. En d’autres termes, ils
peuvent mesurer leur succès en mesurant combien de nouvelles
actions désirées ils ont inspiré. Dans le monde des supports écrits,
c’est un problème que l’on connaît depuis longtemps. Si vous
diffusez des publicités pour un shampoing à la télévision tout
en plaçant des encarts dans les magazines et des affiches sur les
bus, comment pourrez-vous déterminer quelle partie de votre
campagne est la plus utile ? C’est pour résoudre ce problème que
les spécialistes du marketing ont inventé les coupons et les codes
de réduction – on peut ainsi tracer leur efficacité.
Sur Internet, les choses sont différentes  : on peut tracer et
analyser quasi tout ce que font ceux qui consultent les publicités,
ainsi que les autres internautes. Ces 15 dernières années, les marke-
ters ont érigé en science l’analyse des performances en ligne, et la
littérature (si tant est qu’il s’agit de littérature) est sacrément abon-
dante en la matière – nous parlerons plus en détail au chapitre 3.

34 S T R AT É G I E D E C O N T E N U W E B
Pour l’instant, notez ce qui suit : si vous comptez travailler avec du
contenu sur Internet, vous allez devoir élaborer et respecter un
plan solide pour déterminer si votre travail est rentable ou non.
Si vous êtes arrivés à la stratégie de contenu par le biais du
marketing, peut-être avez-vous du mal à faire la distinction entre
les approches vraiment utiles et les approches à la « devenez riche
et célèbre grâce aux Google Ads ». J’aime beaucoup les ouvrages
Web Analytics Demystified et The Big Book of Key Performance
Indicators d’Eric T. Peterson, qui empruntent une approche plus
holistique de la mesure des performances que la plupart des livres,
qui se focalisent exclusivement sur les compteurs de visites et le
suivi des clics. Les deux livres sont épuisés, mais ils sont tous deux
téléchargeables sur le site de l’auteur (http://bkaprt.com/cs/9)1.

Un canal n’est pas un autre


Auparavant, dans le monde du marketing, « canal de distribu-
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tion  » signifiait «  moyens de distribuer des produits réels  ».


Aujourd’hui, le terme fait référence à une variété de choses
différentes. Alors soyons clairs : quand je dis « canal de distri-
bution » et « stratégie de canal », je parle du moyen d’apporter
un contenu à son public cible. Des moyens tels que :

• le site Web – ce que vous imaginez en pensant au site prin-


cipal d’une entreprise ;
• des sites dédiés à des sous-groupes du public principal (micro-
sites, sites thématiques) ou à des régions spécifiques (souvent
traduits ou contenant du contenu créé pour le public local) ;
• des blogs, intégrés ou non dans un autre site ;
• des newsletters ;
• les réseaux sociaux (Facebook, Twitter et leurs centaines de
millions d’amis) ;
• des webcasts, podcasts et séries vidéo ;
• des magazines en ligne ;
• des applications mobiles ;
• des applications développées par des tiers, publications et
des sites tiers ;

1. Adresse complète : http://www.webanalyticsdemystified.com/content/

L E M É T I E R D E L A S T R AT É G I E D E C O N T E N U 35
• des contenus éditoriaux téléchargeables (livres blancs,
e-books, rapports spéciaux).

Et la stratégie de canal  ? C’est là qu’il s’agit d’utiliser tout


ce que vous avez appris au sujet de vos utilisateurs et de vos
objectifs commerciaux afin de déterminer la meilleure façon
d’apporter votre contenu à des êtres humains. Les spécialistes
du marketing y travaillent depuis longtemps, et ont beaucoup à
vous apprendre à ce sujet.
Remarque : vous avez peut-être remarqué que je ne parle pas
vraiment de « contenu Web » dans ce livre. C’est parce que le
Web n’est qu’une partie du monde du contenu en ligne, et qu’il
n’est pas particulièrement utile de considérer la distribution
sous l’aspect « Web » vs « non Web ». « On va le mettre sur le
Web » n’est pas un plan de diffusion très utile, beaucoup moins
que « ce serait une bonne chose à résumer sur le blog, publier
en tant qu’article complet sur un site externe, et mentionner
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dans notre newsletter et sur les réseaux sociaux  », ou «  ce


contenu pourrait faire l’objet d’un podcast vidéo, en poussant
chaque thématique spécifique sur d’autres canaux ».

INFLUENCE N° 4 : L’EXPERT EN SCIENCES


DE L’INFORMATION
Les experts en sciences de l’information ont de nombreux
avatars. Il y a les bibliothécaires, les archivistes, les analystes de
données, les informaticiens, les éditeurs de contenus et autres
amateurs d’informations aux appellations les plus variées. Ils
ont tous une chose en commun : ils développent des moyens
efficaces de stocker, récupérer et disséminer des informations.
Si votre approche originelle vous vient de l’édition ou du
marketing, ouvrez-bien grand vos mirettes, ce qui va suivre
peut vous servir. Voilà pourquoi : les sciences de l’information
ont énormément contribué à la pratique moderne de l’archi-
tecture de l’information, qui évite à votre laborieux et coûteux
contenu de se transformer en une masse informe et obscure.

36 S T R AT É G I E D E C O N T E N U W E B
Architecture de l’information
L’architecture de l’information consiste à organiser l’informa-
tion, en référence à la structure d’un site Web et la taxonomie de
son contenu. Les gens qui travaillent dans ce secteur s’efforcent
de mettre de l’ordre dans le chaos et de bâtir des structures qui
aident les utilisateurs à trouver ce qu’ils cherchent et à accomplir
les tâches qu’ils se sont fixées. Les architectes de l’information
créent des objets merveilleux, comme des wireframes, des plans de
site, des diagrammes de pages et autres scénarios d’utilisation, et,
souvent, ils font aussi de nombreuses études utilisateurs.
Si vous travaillez avec un architecte de l’information, vous
n’aurez peut-être pas à vous préoccuper des détails du design
structurel, sauf dans les zones où la stratégie de contenu et l’ar-
chitecture de l’information se chevauchent. Les items de navi-
gation et les taxonomies constituent une intersection évidente,
surtout pour les éditeurs de contenu ayant une formation journa-
listique. Un wireframe (ou maquette) détaillé permet de rassem-
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bler un concept structurel et du vrai contenu –  ou, à tout le


moins, un bon contenu illustratif – bien avant que la conception
visuelle ne commence. Ce qui donne à l’architecte de l’informa-
tion et à l’éditeur de contenu le temps de découvrir les failles et
les conflits potentiels. Au-delà de certains livrables spécifiques,
on peut toutefois imaginer des collaborations encore plus inté-
ressantes. Le design nécessite souvent la contribution de l’éditeur
de contenu, des programmeurs, ainsi que de l’architecte de l’in-
formation ; les spécifications en matière de système de gestion de
contenu peuvent également bénéficier de cet apport.
Évidemment, si vous ne travaillez pas avec un architecte de
l’information, mais que vous êtes impliqué dans un projet de créa-
tion ou de refonte important, il vous faudra peut-être endosser les
deux rôles. Et même s’il faut compter des années de travail acharné
et des centaines d’heures d’étude pour devenir un bon architecte
de l’information (ou devenir bon dans n’importe quel domaine
digne d’intérêt), vous pouvez commencer à utiliser les techniques
et les outils de l’architecture de l’information presque immédia-
tement. Les personas et les scénarios peuvent être extrêmement
utiles, même gribouillés sur une nappe, du moment qu’ils sont
fondés sur des recherches et des hypothèses raisonnables. Même
un wireframe rudimentaire peut sauver du chaos un projet sans

L E M É T I E R D E L A S T R AT É G I E D E C O N T E N U 37
architecte, et tout éditeur de contenu peut tirer profit d’une solide
connaissance des principes d’ergonomie et de trouvabilité, tous
deux essentiels à l’architecture de l’information.

Gestion de contenu
Vous vous souvenez du temps où tous les sites Web étaient
composés de pages HTML codées à la main ? Quelle galère.
Si vous avez raté cette période du Web, considérez qu’elle est
l’époque des moines copistes du Web, un temps où l’ensemble
des connaissances de l’humanité étaient copiées à la main par
des types pâles et myopes. L’invention du Web a été comparée
à celle des caractères mobiles de Gutenberg, et à raison, mais
la révolution du contenu Web ne s’est vraiment produite que
lorsque les développeurs de logiciels ont transposé sur le Web,
sous la forme de systèmes de gestion de contenu, les systèmes
de bases de données et modèles d’affichage issus de l’ancien
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monde de l’informatique « hors ligne ».


Les premiers systèmes de gestion de contenu étaient les
descendants lourds et coûteux des vieux systèmes de gestion de
documents. Les gestionnaires des contenus corporate et insti-
tutionnels (que l’on appelait généralement, l’époque, webmas-
ters) furent donc les premiers à faire de la gestion de contenu.
Tout le contenu qui, jusqu’alors, avait été torturé dans des blocs
HTML trouvait soudain refuge dans des bases de données, si
bien que lorsqu’il fallait revoir tous les contenus génériques, il
suffisait d’intervenir à un ou deux niveaux, et non plus cinq ou
dix. La refonte d’un site Web devenait complexe, alors qu’elle
avait paru pratiquement impossible jusqu’alors.
Bientôt, les logiciels de blogging et les systèmes de gestion de
contenu libres virent le jour, et alors que les premiers se sophis-
tiquaient de plus en plus, les seconds devenaient de plus en plus
simples, jusqu’à ce qu’il devienne impossible de distinguer les
uns des autres. Quiconque sachant plus ou moins manipuler
un ordinateur pouvait désormais publier du contenu en ligne ;
quant aux grands éditeurs en ligne, ils pouvaient désormais
travailler de façon plus efficace et à moindre coût.
En 2010, WordPress, l’application de blogging devenue
SGC la plus populaire, est utilisée par près de 30  millions de

38 S T R AT É G I E D E C O N T E N U W E B
personnes dans le monde et émule environ 12  % de tous les
sites Web (http://bkaprt.com/cs/10)1.
Mais nous ne sommes pas là pour parler de logiciels. Depuis
leur apparition, les systèmes de gestion de contenu ont été
considérés par de nombreuses entreprises comme un outil leur
permettant d’acheter et d’automatiser des processus éditoriaux
normalement chronophages et gourmands en ressources compé-
tentes et coûteuses. Aujourd’hui, les gens qui gèrent du contenu
le font habituellement à l’aide de systèmes de gestion de contenu,
mais ils remplissent aussi souvent d’autres tâches, et notamment :

• développer les spécifications du SGC ;


• définir le workflow des informations ;
• gérer le contrôle des versions ;
• gérer la protection des informations (archivage et
sauvegarde) ;
• implémenter et optimiser des outils et des procédures de
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recherche ;
• définir et mettre à jour des taxonomies, des systèmes de bali-
sage et des métadonnées.

Sur le Web, la gestion de contenu est assurée essentielle-


ment par d’autres profils. Parmi ceux qui gèrent les contenus,
il y a des éditeurs Web, des architectes de l’information, des
experts en expérience utilisateur, des webmasters, ou encore
des community managers, ou tout autre membre du personnel IT
général. D’un autre côté, il existe aussi un secteur professionnel
entier –  l’édition numérique  – avec des revues universitaires
et professionnelles, des formations et autres programmes de
maîtrise, qui traitent exclusivement de la conservation et de la
récupération de contenu.

Une formation polyvalente


En plus d’avoir hérité de plusieurs autres disciplines, la stra-
tégie de contenu ne pourra jamais se distinguer complètement

1. Adresse complète  : http://wpcandy.com/presents/a-look-at-wordpress-


market-share-numbers

L E M É T I E R D E L A S T R AT É G I E D E C O N T E N U 39
des disciplines sœurs qui l’entourent. L’éditeur de contenu
doit comprendre le design pour reconnaître une présentation
attrayante et lisible des contenus ; il doit comprendre l’acces-
sibilité pour permettre l’accès au contenu à partir d’une vaste
gamme d’appareils et pour des utilisateurs ayant un handicap ou
des besoins particuliers ; il doit comprendre le fonctionnement
des moteurs de recherche pour que les utilisateurs puissent faci-
lement trouver les contenus par le biais d’outils de recherche
internes et externes, et pour être à même de converser avec les
responsables marketing obsédés par le référencement.
Pour finir, il y a la question du développement du contenu.
Dans sa forme la plus pure, la stratégie de contenu ne produit
pas de contenu. Elle produit des plans, des directives, des calen-
driers et des objectifs, mais pas la substance elle-même, sauf
dans la mesure où des exemples sont nécessaires pour illustrer
des recommandations stratégiques. Cependant, si vous avez la
capacité de créer du bon contenu, vous aurez un réel avantage
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sur les éditeurs de contenu qui en sont incapables.


Et maintenant, assez parlé de théorie. Il est temps de nous
intéresser de plus près à l’application de toutes ces notions
abstraites dans la vraie vie.

40 S T R AT É G I E D E C O N T E N U W E B
3 OUTILS ET
TECHNIQUES
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LE TRAVAIL QUOTIDIEN DE L’ÉDITEUR DE CONTENU laisse les


gens perplexes pour une raison particulière. Notre activité varie
d’un projet à l’autre, et va du purement analytique au hautement
créatif. Dans un secteur où le travail des designers, architectes
de l’information, développeurs et webwriters occupe une place
centrale lors du lancement d’un nouveau site Web, l’éditeur de
contenu travaille, lui, en coulisses.
Son travail n’est pas directement visible, ni cliquable. Il est
rare qu’un internaute puisse repérer une composante d’un site
Web en se disant : « Voilà le résultat d’une bonne stratégie de
contenu ! ».
C’est peut-être à cause de cette opacité que je suis tentée de
définir la stratégie de contenu en fonction de ce qu’elle produit.
Mais bien qu’une liste de livrables et de méthodes puisse être
utile, elle n’explique pas, à elle seule, la pratique concrète de
notre discipline.
Dans ce chapitre, je présenterai une liste de techniques et
d’outils utilisés en stratégie de contenu, mais j’essaierai égale-
ment d’exposer les raisons pratiques pour lesquelles nous

OUTILS ET TECHNIQUES 41
devons œuvrer d’une certaine manière, et de parler des aspects
invisibles du travail qui n’apparaissent pas dans les livrables.
Tout cela étant une façon détournée de parler de méthodo-
logie. (Insérer ici le thème des Dents de la mer…) Alors parlons-
en un instant.

Méthodologies
Comme notre discipline est jeune, et comme nous travaillons
souvent avec les équipes chargées de l’expérience utilisateur et
du développement, qui disposent de leur propre méthodologie,
de nombreux débats ont eu cours, ces dernières années, sur la
meilleure façon de faire de la stratégie de contenu. La discipline est
suffisamment variée pour que tout expert en contenu doive plus ou
moins se spécialiser, ce que tendent à refléter nos méthodologies :

• Un éditeur de contenu s’occupant principalement de commu-


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nication marketing se concentrera généralement sur l’image


de marque et les messages, une diffusion cross-channel effi-
cace, la création d’un contenu persuasif et le développement
de processus de publication viables. Sa méthodologie doit
être adaptée à ces activités.
• À l’inverse, un éditeur de contenu focalisé sur la gestion
des informations aura besoin d’une méthodologie adaptée
aux analyses techniques, à la modélisation de données et à
la réutilisation des contenus à grande échelle sur plusieurs
systèmes (sites Web, intranets, systèmes de gestion des rela-
tions clients etc.).
• Le spécialiste en contenu qui collabore avec des consultants
en expérience utilisateur ou au sein d’une équipe de déve-
loppement pourra avoir besoin d’une méthodologie qui
fonctionne avec le contenu marketing, éducatif et technique,
et qui est adaptée à la recherche interne et externe, aux taxo-
nomies du contenu, au développement des spécifications
d’un SGC et à l’architecture de l’information.

Quels que soient votre situation ou votre degré de spéciali-


sation, vous aurez besoin d’une méthodologie qui appuie votre
travail – et il vous faudra sûrement l’adapter de temps à autre pour

42 S T R AT É G I E D E C O N T E N U W E B
assurer qu’elle convient toujours. Ma propre méthodologie est
simple et me vient de ma pratique en stratégie éditoriale en ligne,
qui m’a amenée à travailler avec des équipes chargées de l’expé-
rience utilisateur et du développement. Bien que les livrables et
les processus particuliers que j’utilise varient d’un projet à l’autre,
tout mon travail peut être classé en trois catégories :

• évaluer ;
• concevoir ;
• exécuter.

Il ne s’agit pas d’une chronologie pour chaque projet, même


si chaque projet inclut les trois phases, mais d’une séquence
reproductible, à suivre plus ou moins précisément selon le type
de projet et le temps alloué.

• L’évaluation a lieu au début et à la toute fin d’un projet, et


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parfois à la fin de chaque phase. Les études de tous types


tombent dans cette catégorie, de même que les tests d’ergo-
nomie et les analyses de trafic.
• La conception ne correspond pas ici à la conception
visuelle. Elle comprend les lignes directrices de la stratégie
de communication et les propositions relatives aux caracté-
ristiques publiques et internes du contenu. Elle comprend
également la conception de plans tactiques pour la création
et la révision du contenu, et la conception d’outils et de
processus pour la gestion à long terme du contenu.
• L’exécution renvoie à tout ce que l’on fait pour appliquer
nos stratégies dans la réalité : écrire et réviser du contenu,
définir des workflows de publication, indexer et agréger le
contenu, etc. Même sur les projets où je ne suis pas directe-
ment responsable de l’exécution, je crée des exemples pour
illustrer les recommandations, ce qui est également une
forme d’exécution.

Bien que vous soyez libre de vous en servir, je ne prétends


pas proposer la méthodologie ultime, mais plutôt un exemple
de méthodologie optimisée pour un certain type de travail.
Et maintenant, intéressons-nous au travail en lui-même.

O U T I L S E T T E C H N I Q U E S 43
CE QUE NOUS CRÉONS
Avant toute chose, un mot sur les « livrables » – ces éléments
que l’on remet ou « livre » aux clients. C’est un mot ridicule et
maladroit. Malheureusement, les périphrases que l’on pourrait
lui substituer sont tout aussi horribles, aussi permettez-moi de
l’utiliser.
Voici une liste non exhaustive des livrables que vous pour-
riez être amené à utiliser :

• Directives d’accessibilité
• Benchmarks
• Stratégie de distribution
• Spécifications SGC
• Plan de communication
• Stratégie communautaire et sociale
• Politique de gestion communautaire
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• Analyse concurrentielle
• Atelier de production de contenu
• Programme d’achat de contenu
• Guide de style
• Modèle de contenu
• Calendrier éditorial
• Gabarit de contenu
• Description de fonctionnalités
• Analyse des faiblesses
• Recommandations de métadonnées
• Proposition de projet
• Workflow de publication
• Audit qualitatif du contenu et conclusions
• Audit quantitatif du contenu et conclusions
• Évaluation des ressources (ressources, outils, temps)
• Évaluation du référencement
• Indicateurs de performance
• Taxonomies
• Analyse de trafic
• Tests d’ergonomie
• Portraits robot (personas)
• Conclusions d’études utilisateurs

44 S T R AT É G I E D E C O N T E N U W E B
• Plans d’études utilisateurs
• Scénarios utilisateurs
• Recommandations de présentation visuelle
• Wireframes
• Recommandations de workflow

À une exception près, j’offrirai un aperçu des documents et


des processus plutôt que des instructions détaillées. Vous trou-
verez des références pour bon nombre de ces documents dans
la section « Ressources » en fin d’ouvrage. Un des aspects plai-
sants de cette discipline bouillonnante, c’est que quelque part, à
cet instant précis, quelqu’un est probablement en train d’écrire
un article sur son blog sur le sujet qui vous intéresse.

Fils de cordonnier, le plus mal chaussé ?


La stratégie de contenu englobe un bien plus grand nombre de
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processus et de livrables que la plupart des disciplines apparen-


tées, et il y a un sujet que l’on aborde rarement : comment choisir
la meilleure approche pour chaque projet ? En conséquence, on
en revient souvent aux quelques techniques que l’on maîtrise le
mieux, même quand elles ne sont pas parfaitement adaptées à
un projet particulier. Ce faisant, on rate une occasion de perfec-
tionner notre travail et de le rendre plus intéressant.
Les réunions que vous organisez, les livrables que vous créez
sont tous basés sur deux types de stratégie : celle que vous déve-
loppez pour le projet, et celle que vous utilisez pour guider vos
propres communications avec vos collègues, vos employeurs et
vos clients. Ces personnes ne seront généralement pas le public
cible du projet, mais elles sont les destinataires de vos livrables.
Je ne suis pas en train de suggérer qu’il faudrait que l’on fasse
des études utilisateurs poussées pour chaque client ou chaque
document (on aurait du mal à boucler quoi que ce soit), mais
nous pouvons penser notre travail de manière stratégique.

Par phase : quelles échéances ?


La méthode la plus évidente consiste à regrouper les livrables
par phase, surtout si vous êtes consultant. Peut-être avez-vous

O U T I L S E T T E C H N I Q U E S 45
vos propres mots pour désigner chaque phase, mais que vous
travailliez seul ou en agence, vous êtes sans doute habitué à un
processus qui ressemble à quelque chose de ce genre (fig 2) :

Définition du projet Études et analyses Stratégie Implémentation Gestion

Projets de consulting (en général)

fig 2 : Chronologie classique d’un projet d’expérience utilisateur ou de stratégie de contenu

Si vous travaillez avec une équipe de design, le fait de diviser


votre projet par phase peut aider vos collègues des autres disci-
plines à comprendre comment votre travail va interagir avec
le leur. Cela peut également aider vos clients à comprendre la
place de votre travail dans l’ensemble du projet.
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Le problème avec cette méthode de penser la stratégie de


contenu et d’en parler, c’est que cela ne dit pas en quoi consiste
réellement le travail. Si vos équipiers ou vos clients ne sont pas
coutumiers de la stratégie de contenu, il vous faudra détailler
votre travail au-delà de la simple chronologie. Il peut donc être
bon de commencer par la fonction ou l’objectif de vos livrables.

Par fonction : pour quel résultat ?


Une autre façon de voir notre travail consiste à considérer ce
que chaque outil ou processus est censé accomplir. Voyez cela
comme le développement d’une méthodologie détaillée, spéci-
fique à chaque projet. Que vous travailliez sur un projet de stra-
tégie de contenu ou en tant que gestionnaire de contenu à long
terme, vous devez déterminer vos objectifs avec un maximum
de recul. Une fois que vous avez compris quel était l’objectif
principal, vous pouvez en déduire ce que vous devez produire.
Prenons un exemple. Je travaille aux côtés d’une équipe
dédiée à l’expérience utilisateur pour remanier le site Web d’un
grand cabinet de conseil. Le site de l’entreprise contient plus
de 5  000  éléments de contenu, et son système de publication
est distribué sur une dizaine de services et d’emplacements.

46 S T R AT É G I E D E C O N T E N U W E B
Le brief du projet explique que nos trois principaux objectifs
consistent à aligner la présence en ligne de l’entreprise avec son
image de marque, à faciliter la recherche d’informations pour
les clients potentiels et à apporter une cohérence aux sections
gérées par divers services.
À l’aide de ma méthodologie, je peux déterminer ce qu’il faut
que je fasse pour accomplir ces objectifs :

• Évaluer : audit quantitatif et qualitatif du contenu ; analyse


de trafic  ; étude de la concurrence  ; étude utilisateurs,
personas et scénarios (en collaboration avec l’équipe expé-
rience utilisateur) ; analyse du processus de publication.
• Concevoir  : brief communication (détaille les objectifs du
projet) ; recommandations détaillées pour la teneur globale
des messages, le type de contenu à ajouter, ce qu’il faut
supprimer, et comment communiquer avec les différents
publics du site ; recommandations sur les métadonnées (en
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collaboration avec l’équipe IT) ; charte éditoriale ; workflow


de publication ; plans d’approvisionnement et d’agrégation
de contenu  ; recommandations de communication trans-
canal ; indicateurs de performance et plan d’analyse.
• Exécuter: contenu modèle pour chaque type de contenu
important  ; gabarits de contenu pour aider au développe-
ment de contenu avant et après le lancement  ; ateliers de
création et de publication de contenu ; charte éditoriale.

Et voilà. Le fait de parler de l’aspect fonctionnel peut aider à


débarrasser le contenu des clichés et des habitudes de livraison
au compte-goutte, et il peut être utile de savoir ce que vous
essayez d’accomplir avec chaque livrable et processus avant de
vous lancer dedans à corps perdu.

Par méthode : comment ça marche ?


Vous pouvez également placer chaque livrable que vous déve-
loppez dans un continuum avec, d’une part, un objectif et un
travail d’analyse, et d’autre part, un travail créatif et subjectif.
Cette approche peut être particulièrement utile quand vous
travaillez avec des clients ou des collègues qui n’ont jamais vu

O U T I L S E T T E C H N I Q U E S 47
un document de stratégie de contenu et qui ne savent pas s’ils
doivent s’attendre à des feuilles de calcul toutes nues ou à des
recommandations conceptuelles verbeuses.
Si je classe les livrables que j’utilise le plus souvent dans un
tableau selon leur fonction (j’utiliserai simplement l’évaluation
et la conception dans cet exemple) et leur nature (analytique vs
créative), cela donne quelque chose de ce genre (fig 3) :
Dans la vraie vie, peu de documents de stratégie de contenu
sont analytiques à 100  %, et pratiquement aucun n’est 100  %

ÉVALUATION

Audit du contenu Brief du projet


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Analyse des faiblesses Réunion de lancement

Étude du workflow actuel Recommandations de workflow

Étude utilisateurs Utilisateurs fictifs


ANALYTIQUE

CRÉATIVE

Calendrier éditorial Plan de communication

Stratégie de canal de diffusion Recommandations pour


la conception des fonctionnalités
Charte rédactionnelle
Modèles de contenu
Directives communautaires et sociales
Charte éditoriale

CONCEPTION

fig 3 : Livrables et processus classés selon leur fonction et leur nature.

48 S T R AT É G I E D E C O N T E N U W E B
créatif, mais le fait d’avoir une idée de la nature de chaque docu-
ment peut aider à rationaliser le processus de développement.
Si vous travaillez en équipe, ce genre de distinction peut égale-
ment vous aider à orienter la répartition du travail en mettant
à profit les diverses compétences de vos collègues. Vous avez
une maniaque des données sous la main ? Faites-lui faire l’audit
du contenu et l’analyse des faiblesses. Et votre spécialiste en
contenu qui travaillait dans un magazine  ? Confiez-lui les
recommandations fonctionnelles et la charte éditoriale.

Par public : quel est le destinataire ?


Les programmeurs présentent rarement du code brut à leurs
clients en réunion. Pour chaque maquette visuelle ou prototype
d’interface qui arrive entre les mains du client (ou du manager),
on compte des dizaines, voire des centaines de dessins gribouillés
sur des nappes en papier et de tableaux que personne ne verra
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jamais en dehors du noyau de l’équipe. Il faut résister à la tenta-


tion de montrer au client tout ce que l’on produit.
Certains documents sont destinés à votre usage personnel,
pour affiner votre pensée et organiser votre travail  ; certains
sont plus utiles aux architectes de l’information, aux desi-
gners ou aux développeurs de SGC  ; certains sont conçus
pour proposer des idées au client afin qu’il les approuve ou les
amende. Tous ces documents peuvent avoir leur utilité, mais
il est rare qu’ils ciblent tous le même public. Certains clients
préfèrent échapper aux feuilles de calcul et aux présentations
détaillées : ils veulent avoir un résumé analytique et être mis
au fait des questions pertinentes soulevées au cours du déve-
loppement du document, pas le document brut. Inversement,
les membres de nos propres équipes doivent souvent maîtriser
des détails dont les clients et les managers n’ont pas besoin. Les
architectes de l’information, par exemple, doivent en savoir
beaucoup plus sur la nature, la structure et l’importance rela-
tive de chaque type de contenu que ce que le client veut voir.
Donnez aux gens ce dont ils ont besoin, et ne les submergez
pas de choses inutiles. Certains clients voudront absolument
tout voir, mais si vous vous fixez comme règle générale de
limiter ce que vous montrez, vos propositions seront probable-

O U T I L S E T T E C H N I Q U E S 49
ment approuvées plus vite et vous n’aurez pas besoin de dire
« on ne peut pas vraiment en parler pour le moment » plus de
trois ou quatre fois par présentation.
Prenez vos auditeurs en considération pour la sélection, la
présentation et la préparation des vos livrables, et même vos
clients et vos managers les plus surmenés pourront plus facile-
ment vous donner leurs impressions et leur approbation.

La part du défenseur
Pratiquement tous les projets font coexister deux types de besoins
en tension permanente  : les besoins du client et ceux des utili-
sateurs. Dans un projet qui marche, ces besoins tendent à être
complémentaires, mais vous rencontrerez parfois des situations
dans lesquelles le client et l’utilisateur semblent être en conflit.
Dans cette situation, le spécialiste en contenu est bien placé pour
jouer le défenseur des utilisateurs, car il lui est souvent plus aisé de
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trouver et citer des études utilisateurs pour étayer son propos que
le designer pris en otage par un client qui a un faible pour le mauve.
En pratique, cela signifie que lorsque quelqu’un décrète que
tel élément de contenu doit se trouver sur la page d’accueil (ou
une page d’atterrissage, ou tout équivalent moral), vous devez
déterminer dans quelle mesure cette option aide l’utilisateur.
Dans la négative, vous aurez peut-être du mal à rejeter catégo-
riquement la consigne ; ces instructions émergent souvent de
conflits politiques internes inextricables. Mais si vous parvenez
à comprendre le raisonnement derrière la demande, vous
pourrez peut-être suggérer des modifications qui rendent le
contenu plus utile, ou recommander un emplacement alternatif
idéal, qui profiterait davantage aux lecteurs.
C’est une délicate affaire de compétences relationnelles,
mais cela s’apprend. Quelques points à garder à l’esprit :

• Défendre les intérêts des utilisateurs ne fait pas de vous un


idéaliste sans esprit pratique. Comme nos collègues de l’édi-
tion nous l’ont appris, si votre contenu ne fonctionne pas
pour l’utilisateur, vous avez déjà perdu. Défendre les utilisa-
teurs est simplement une façon de vous assurer qu’un projet
accomplisse ses objectifs commerciaux.

50 S T R AT É G I E D E C O N T E N U W E B
• Les personas et autres portraits robots d’utilisateur que vous
ou vos collègues avez créés sont votre meilleur soutien.
Revenez à ces outils quand vous avez besoin de valider une
opinion – la vôtre ou celle de quelqu’un d’autre.
• Il est très facile pour un spécialiste en contenu de se laisser
entraîner dans des conflits internes. Ne vous le permettez pas.

L’éditeur de contenu doit également se faire l’avocat du


contenu, ce qui est une proposition légèrement différente.
Quand quelqu’un propose une nouvelle fonctionnalité ou un
changement de programme majeur, vous devez déterminer
(avec tact) quels sont les besoins en contenu qui accompagnent
cette décision et décider si ceux-ci sont réalistes ou non.

DÉFINITION DU PROJET
Que vous travailliez comme consultant ou sur un projet interne,
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au-delà des simples tâches de publication et d’entretien de


routine, vous aurez besoin d’une phase de définition. Sur un très
gros projet, cette phase peut prendre des mois. Pour un petit
projet de rafraîchissement interne, elle peut prendre quinze
minutes. Ce qui compte, c’est que vous preniez le temps de
clarifier ce que le projet est censé accomplir, et de vous assurer
que chaque personne qui doit donner son accord le donne.

Que fait-on et pourquoi ?


Pour un consultant, la définition du projet commence géné-
ralement par un appel d’offres ou tout autre document intro-
ductif transmis par le client. Le travail de contenu ne peut pas
être dissocié des objectifs commerciaux ; l’éditeur de contenu
doit donc comprendre au mieux les objectifs du client. Si vous
arrivez après la signature du contrat, demandez systématique-
ment à voir ces documents, ainsi que les propositions soumises
en réponse, et assurez-vous que la stratégie de contenu est
représentée dans les réunions internes et lors de la réunion de
lancement avec le client.
Un projet complexe requiert généralement la préparation
d’un brief création, d’un brief communication ou d’un résumé du

O U T I L S E T T E C H N I Q U E S 51
projet : un document qui définit clairement ce que l’on attend
de votre équipe. Si vous voulez que le projet se déroule correc-
tement, assurez-vous de contribuer à ce document afin que les
besoins en matière de contenu soient intégrés dès le départ.
Si vous travaillez sur un projet interne, vous ne verrez sans
doute rien d’aussi formel qu’un appel d’offre et une proposi-
tion de projet, mais ne négligez pas pour autant la définition du
projet. Les projets internes sont, de façon notoire, difficiles à
cerner, et si les objectifs et les attentes des décideurs sont trop
vagues, le projet en souffrira par la suite.

Rencontrez les parties prenantes


Que vous soyez consultant ou employé, vous avez tout intérêt à
mener (ou suivre) des études sur parties prenantes.
Les parties prenantes sont les personnes, chez le client, qui
sont responsables de la réussite d’un projet ou y placent un intérêt
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important. Sur un gros projet, les parties prenantes compteront


probablement des cadres, des directeurs de service et des membres
du personnel interne qui travaillent en lien plus ou moins étroit
avec le contenu ou le site Web dans son ensemble. Un petit projet
ne nécessitera peut-être qu’un entretien avec quelques personnes
seulement ; sur un projet plus conséquent pour une grande orga-
nisation, il pourra s’agit de quelques dizaines.
Préparer l’interview des parties prenantes –  et devenir un
bon interviewer en général – demande de la réflexion et de l’ex-
périence. C’est une compétence qui vaut le coup d’être déve-
loppée, même si vous comptez sur d’autres personnes pour
mener ces interviews  ; en effet, quelle que soit la qualité de
votre plan d’entretien initial, vous devrez sans doute poser des
questions complémentaires en cours de projet.
Une fois que vous avez réuni un maximum d’informations
à partir des appels d’offres, des propositions de projet, des
réunions de lancement et des interviews des parties prenantes,
il est temps de les distiller en un outil exploitable. Au chapitre 5
de Content Strategy for the Web, Kristina Halvorson propose une
méthode exceptionnellement saine et pratique pour organiser
ce type d’informations, basée sur des processus développés en
collaboration avec Melissa Rach de Brain Traffic. Cette méthode

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consiste à classer les informations obtenues de vos clients et
de vos managers en objectifs commerciaux, tactiques, exigences et
objectifs du projet, pour ensuite porter toute son attention sur les
objectifs du projet. Pour paraphraser Kristina :

• Les objectifs commerciaux sont les buts fondamentaux


d’une organisation. Pour choisir un exemple connu, l’un des
objectifs commerciaux de Google est « Don’t be evil » (ne
soyez pas malveillant).
• Les tactiques sont les demandes détaillées et spécifiques
que vous entendrez en boucle lors de l’interview des parties
prenantes. «  Simplifiez la navigation  » et «  améliorez les
outils de recherche » sont deux demandes récurrentes.
• Les exigences correspondent aux éléments du projet qui ne
sont pas négociables : date de lancement, budget, personnel
disponible, etc.
• Les objectifs du projet viennent juste après les objectifs commer-
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ciaux et juste avant les tactiques, tout en respectant les exigences.


Ce sont les aspects que l’on peut véritablement traiter en stratégie
de contenu, tels que « changer notre site Web afin de refléter
notre nouvelle politique institutionnelle sur l’éducation ».

Sérieusement, cette partie mérite à elle seule de se procurer


le livre, alors n’hésitez pas, achetez-le et lisez-le.

Comment savoir si c’est de l’amour ?


Pour finir la phase de définition de projet, vous devrez déter-
miner ce que signifie, dans ce cas précis, la « réussite du projet,
et donc décider de ce qu’il faut mesurer. Certains parlent d’in-
dicateurs de succès. Cette expression est plutôt claire, mais je
lui préfère le terme emprunté au monde du jeu «  conditions
de victoire ». Aux échecs, la condition de victoire est l’échec et
mat. À la bataille, il ne faut pas perdre toutes ses cartes. Au jeu
de go, il s’agit de contrôler le plus grand territoire. Dans le cas
de tous ces jeux, l’objectif est clair. Faisons de même !
Un indicateur de succès qui ne peut être concrètement
mesuré, est un mauvais indicateur. Déterminez des objec-
tifs a minima et des objectifs ambitieux  ; définissez-les de

O U T I L S E T T E C H N I Q U E S 53
manière spécifique afin de pouvoir effectivement dire si vous
les avez atteints ou non. Si vous essayez d’accroître le trafic ou
les inscriptions, quel volume escomptez-vous atteindre  ? Ce
volume est-il possible et réaliste ? À quel moment devrez-vous
l’atteindre pour pouvoir parler de victoire ? Comment saurez-
vous si vous avez atteint d’autres objectifs moins ambitieux ?
Une fois que vous avez défini les conditions de victoire pour
votre projet, il peut être judicieux de consigner, dans le même
document, toutes les informations concernant la définition du
projet. Si vous comptez les montrer à votre client ou à votre
employeur, vous pouvez même créer un résumé formel sous
forme de brief projet ou de brief communication.

ÉTUDE & ÉVALUATION


Maintenant que vous connaissez tous les objectifs de votre
de projet et les moindres désirs de vos clients, il est temps de
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commencer les études concrètes.

Les utilisateurs : qui sont-ils, que veulent-ils ?


Les équipes de développement Web modernes commencent
généralement par mener une étude utilisateurs et développer
des outils qui placent les besoins des utilisateurs au centre du
projet  ; cela s’applique également aux projets traitant unique-
ment de contenu. L’étude utilisateurs permet de dépasser les
hypothèses, les suppositions et les stéréotypes et de découvrir
ce que vos lecteurs, spectateurs et auditeurs veulent vraiment.
Qui doit s’occuper de l’étude utilisateurs ? Cela dépend du
projet. Les architectes de l’information et les experts en expé-
rience utilisateur ont développé la plupart des techniques utili-
sées et font souvent le travail eux-mêmes, mais les éditeurs de
contenu peuvent également remplir ce rôle à merveille. Pour
ma part, je préfère toujours travailler avec un architecte de l’in-
formation ou un spécialiste UX quand c’est possible, y compris
pendant la phase d’étude utilisateurs.
Les équipes internes sont souvent tentées de se fier à la
compréhension informelle, progressivement accumulée, de
leurs utilisateurs. Ces connaissances ont une valeur certaine,

54 S T R AT É G I E D E C O N T E N U W E B
mais si vous ne les complétez pas par des études méthodiques,
vous risquez de rater des besoins importants mais impercep-
tibles. Si vous travaillez sur un projet interne informel et que
vous êtes tenté de faire un « premier jet » du contenu avant de
faire l’étude utilisateurs, souvenez-vous simplement que même
si vos répondez à toutes les exigences du projet et comprenez
parfaitement les attentes de vos employeurs, si personne ne lit,
ne regarde ou n’écoute votre contenu, vous avez échoué.

Interviews et simulations
Les interviews sont généralement la première étape, et comme
pour l’interview des parties prenantes, la sélection et l’inter-
view des participants est un art. La finesse avec laquelle vous
abordez ce travail peut radicalement affecter l’utilité des infor-
mations que vous obtiendrez.
Une fois que vous ou votre équipe avez terminé la phase
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d’interview initiale, vous pouvez commencer à développer les


«  portraits robots  ». Ce sont des utilisateurs fictifs qui font la
synthèse des informations que vous avez récoltées et donnent
à votre équipe une idée des besoins potentiels des utilisateurs et
des actions qu’ils peuvent entreprendre pour valider leurs idées.
Ces portraits robots comprennent les personas, les scénarios utili-
sateurs, les cas d’utilisation et les flux d’activité, qui ont tous été
décrits en détail dans d’autres ouvrages. En fin de compte, que
vous conceviez des documents soignés et formels ou que vous
dessiniez des bonshommes sur un tableau n’a que peu d’impor-
tance. Ce qui compte, c’est que quelqu’un fasse le boulot.
Pendant la phase d’étude utilisateurs, vous pouvez
commencer à passer en revue le contenu existant du projet. Il
est vrai que la perspective de mener de front ces deux types
d’études très différents peut être intimidante, mais il s’agit d’une
excellente manière de vous assurer que vous êtes complètement
immergé dans le monde de votre client – et de ses utilisateurs.

Vive les feuilles de calcul : inventaire de contenu


Avant d’aller plus loin, nous devons inventorier le contenu exis-
tant  ; cette étape est appelée audit quantitatif ou inventaire de

O U T I L S E T T E C H N I Q U E S 55
contenu. Le Web regorge déjà de conseils à ce sujet, je vais donc
faire court. En clair, vous allez devoir créer un plan de site extrê-
mement détaillé, qui représente chaque page et chaque élément
de contenu, ainsi que tout autre élément de contenu qui finira
probablement sur le site, mais qui réside ailleurs pour l’instant.
Un tel inventaire liste généralement, pour chaque élément
de contenu, les caractéristiques suivantes :

• le titre ;
• le format (texte standard, vidéo, PDF, etc.) ;
• l’URL ou autre emplacement ;
• le type de contenu (page d’atterrissage, article, page d’aide,
page de contact, etc.) ;
• le nom du «  propriétaire  » (la personne responsable de
l’entretien).

Là où je travaille, les gros inventaires impliquent des litres de


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café, quelques nuits blanches et une playlist musicale douteuse


mais réconfortante, notamment la bande originale du jeu vidéo
d’action-réflexion Katamari Damacy. Faire l’inventaire exhaustif
d’un site important prend un certain temps, mais c’est la seule
façon de vraiment comprendre ce avec quoi vous devez travailler.

Trier le bétail : audit qualitatif


À un certain stade, pendant ou après l’inventaire, il vous faudra
réaliser un audit qualitatif d’une partie ou de l’ensemble du
contenu existant. Comme vous l’aurez sûrement compris, il
s’agit d’évaluer la qualité du contenu. Cela peut sembler simple,
mais il y a un défi majeur : comment évaluer le contenu quand
on ne sait pas ce que l’on cherche ? Bien sûr, vous pouvez dire
si un contenu est mal écrit, mais avant de connaître plus spéci-
fiquement les besoins de vos utilisateurs, comment saurez-vous
si le contenu fonctionne ?
C’est impossible, et c’est là l’obstacle principal qui affecte le
timing d’un audit qualitatif. À moins que ce dernier ne soit entière-
ment hors de votre contrôle, prévoyez d’avoir fini votre étude utili-
sateurs et d’avoir quelques personas ou autres simulations sous la
main avant de commencer à évaluer la qualité des contenus. Cela

56 S T R AT É G I E D E C O N T E N U W E B
vous permettra de faire une évaluation sur la base des principes
fondamentaux définis dans la première partie de ce livre  : est-il
approprié ? Utile et orienté utilisateur ? Clair, cohérent et concis ?
A-t-il été correctement entretenu ou est-il obsolète ou inexact ?
C’est à vous de déterminer comment mesurer ces qualités, et
il vous faudra également décider si vous avez suffisamment de
temps et de ressources pour faire un audit complet de tout le
contenu que vous avez inventorié, ou bien si vous devez vous
concentrer sur les rubriques les plus critiques.
Plus tard, quand vous commencerez à recommander des
changements, vous devrez être capable d’indiquer à votre client
ou à votre manager quelle quantité de travail sera nécessaire
pour implémenter vos recommandations, ce que les audits
vous auront permis de déterminer. (Si vous travaillez en interne
ou en maintenance, c’est également une excellente base pour
les contrôles qualité et la mise à jour du contenu.)
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Autres ressources
Les audits de contenu ne sont pas la seule et unique méthode
d’évaluation des ressources. Pour les projets de moyenne et de
grande envergure, il vous faudra documenter le workflow de
publication : comment le contenu est planifié, créé, approuvé,
produit et entretenu. Vous devez également savoir qui est
disponible pour créer et réviser le contenu à court terme, et
avoir une idée du budget affecté afin de pouvoir émettre des
recommandations réalistes pour le développement et l’entre-
tien du contenu.
Si vous concevez un site Web en partant de zéro, vous n’aurez
pas beaucoup de contenu à auditer, mais il vous faudra tout de
même documenter les ressources disponibles  : les auteurs,
illustrateurs ou autres producteurs de contenu, les collections
de photos, le contenu multimédia disponible, les ressources de
production comme le nombre d’heures de studio, etc.
Enfin, c’est le moment idéal pour :

• effectuer les analyses du référencement et du trafic prévues


lors de la définition du projet ;

O U T I L S E T T E C H N I Q U E S 57
• faire les changements appropriés en matière d’ergonomie et
d’accessibilité ;
• documenter, le cas échéant, l’état actuel des initiatives d’in-
ternationalisation, de localisation et de traduction.

Vous vous apercevrez peut-être que vous pouvez intégrer


certains de ces processus dans l’inventaire de contenu et l’audit.
Une fois que vous aurez tout fini, préparez un bref résumé décri-
vant votre processus, les critères d’évaluation et les conclusions
principales. Un document qui détaille les résultats sera utile à
bien plus de gens que vos feuilles de calcul.

L’herbe du voisin est-elle plus verte ?


Une étude de la concurrence consiste généralement à faire des
mini-audits du contenu publié par des organisations concur-
rentes de la vôtre (ou de celle de votre client), même si pour
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certains projets, l’étude de la concurrence ne se limite pas


forcément à la concurrence extérieure. Si le projet concerne
un service d’une entreprise, peut-être devrez-vous étudier les
pratiques des autres services en plus des concurrents externes.
Pour les organisations à but non lucratif, il peut être préférable
d’étudier des sites qui accomplissent des tâches parallèles, ou
des organisations qui attirent un public similaire, plutôt que
de se limiter à étudier les organisations qui travaillent dans le
même secteur.
La plupart du temps, il est inutile de remplir des feuilles de
calcul avec des études détaillées. Passez en revue le contenu
que vous avez identifié et étudiez-le de manière systématique,
décrivez vos découvertes en termes généraux, soulignez les
caractéristiques qui vous paraissent particulièrement excel-
lentes ou mauvaises. Vous devriez finir par avoir une idée
globale de «  ce qui se fait  », ainsi qu’une liste de choses qui
semblent bien marcher et d’autres qu’il faut clairement éviter.

Synthèse
Une fois que vous aurez récolté toutes ces informations, il
sera temps de déterminer ce que vous avez réellement appris.

58 S T R AT É G I E D E C O N T E N U W E B
Vous pouvez saisir cette opportunité pour produire un rapport
formel de vingt pages, ou simplement envoyer quelques cour-
riels et discuter avec quelques personnes dans les couloirs  ;
l’idéal se trouve probablement quelque part entre les deux.
C’est le bon moment pour souligner les points importants
de vos audits et de vos études de la concurrence, y compris les
remèdes rapides (restaurer un lien rompu, corriger les coquilles
et les faits erronés, remplacer les fichiers inaccessibles par des
versions accessibles) qui peuvent être appliqués au site actuel
sans ralentir le reste du projet. C’est également le moment
d’amender le brief projet pour documenter les découvertes qui
ont changé votre conception fondamentale du projet.
Ce qui compte au final, c’est que vos collègues comprennent
les résultats de vos études de manière à mieux travailler, et que
votre client comprenne les implications de ces résultats pour le
restant du projet.
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STRATÉGIE ET CONCEPTION
Une fois que vous aurez défini des objectifs de projet et des indi-
cateurs de réussite clairs, et acquis une bonne idée des besoins des
utilisateurs et des ressources existantes, vous êtes prêt à commencer
la partie stratégique de la stratégie de contenu. Il s’agit de prendre
tout ce que vous avez appris au cours des deux premières phases
du projet et de développer un ensemble de concepts, de plans et
de directives pour créer et entretenir du contenu qui répond aux
besoins des utilisateurs et aux objectifs du projet.
En lisant les pages qui suivent, peut-être vous demanderez-
vous pourquoi toutes ces recommandations et directives ne
sont pas simplement créées et livrées en même temps. Sachez
que c’est parfois possible sur les projets de petite taille ou infor-
mels, et même sur les projets de plus grande envergure, pour
lesquels vous pourrez généralement présenter plusieurs types
de livrables au client en même temps. Je les présente ici dans
cet ordre, car chaque fournée nourrit généralement la suivante,
particulièrement sur les projets plus importants. Sans une
bonne compréhension des messages fondamentaux et de la
structure de votre site, vous ne pourrez pas émettre de recom-
mandations sur la façon de communiquer ces messages au

O U T I L S E T T E C H N I Q U E S 59
sein de la structure du site ; de même, il est insensé de vouloir
étoffer les détails avant que vos recommandations principales
n’aient été approuvées.
Comme le design et l’architecture de l’information, la stra-
tégie de contenu est un processus itératif, qui va progressi-
vement du général au plus spécifique. Dans les années  1990,
quand on chargeait un page contenant des images JPEG, celles-
ci apparaissaient d’abord floues puis devenaient peu à peu plus
détaillées. De la même manière, votre stratégie de contenu
évoluera progressivement, depuis les grandes lignes abstraites
jusqu’aux moindres détails.

Messages
Certains projets et certaines organisations nécessitent une
stratégie de contenu principalement axée sur la rationalisation
du contenu existant, qui comble quelques trous ici et là, et qui
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établit des workflows et des processus de gestion robustes et


durables. D’autres requièrent un travail de développement
créatif substantiel et la promotion de nouveaux concepts.
Dans les deux cas, vous devrez documenter les idées princi-
pales (les messages décrits au chapitre 1) qu’il faut communiquer à
vos utilisateurs. Chaque public distinct aura probablement accès
à des messages spécifiques, dans le cadre des messages globaux du
site. Si l’organisation a déjà une liste de messages à communiquer,
vous pouvez simplement adopter ceux qui ont le plus de sens
pour votre projet. Sinon, vous devrez collaborer avec les équipes
compétentes pour en développer une. N’ayez pas peur de donner
du travail à vos clients, ou à votre service de marketing/commu-
nication institutionnelle si vous travaillez en interne.
Même si vous pouvez sortir certains messages de votre
chapeau, la plupart émergeront probablement de la stratégie
de communication actuelle de votre client. Si vous n’avez pas
de stratégie de communication sur laquelle vous appuyer,
prévoyez de passer plus de temps à obtenir l’approbation de vos
recommandations, car elles risquent de provoquer des débats
internes substantiels.
Ne vous embourbez pas dans le développement des
messages. Les messages sont importants, mais ils sont un outil

60 S T R AT É G I E D E C O N T E N U W E B
interne, et en tant que tels, ne doivent être développés que
dans la mesure de leur utilité optimale. Passer une semaine
supplémentaire à bricoler des messages revient à perdre une
semaine que vous ne pouvez probablement pas vous permettre
de perdre. Comme le remarque Kristina Halvorson1 :

Les messages ne sont pas du contenu. Ils sont utilisés pour former
du contenu. Ainsi, en créant votre contenu pour chaque page et
chaque composant, vous devrez adapter le message au public et
au contexte de la page.

Une fois que vous aurez hiérarchisé les idées principales à


communiquer, validez-les avec le client, révisez-les et passez à
la suite.

Concepts principaux
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Quand vous commencerez à comprendre la structure de votre


contenu, peut-être voudrez-vous commencer à présenter les
changements importants apportés au contenu et aux caracté-
ristiques du site à vos collègues et à vos clients. Ne faites pas de
maquette et ne parlez pas de pages spécifiques, le moment n’est
pas encore venu. Voyez cette phase du projet comme l’équi-
valent d’un pitch particulièrement sexy dans le monde de la
publicité  : vous présentez de nouveaux concepts et des idées
importantes, pas des améliorations et des révisions mineures.
Il y a deux raisons de présenter les changements conceptuels
importants avant le lancement du design structurel. D’une part,
en présentant explicitement ces changements radicaux comme
des stratégies, vous pourrez découvrir les failles de votre raison-
nement et apporter les corrections requises en cours de route
avant de commencer à développer des plans tactiques. D’autre
part, si vous travaillez pour une organisation vaste et complexe,
vous lui offrirez ainsi une chance de s’ouvrir à de nouvelles
perspectives. Cela permettra très probablement d’assouplir le
réflexe de contradiction et vous donnera (ainsi qu’à vos alliés
dans l’équipe du client) plus de temps pour dissiper les peurs

1. Kristina Halvorson, Content Strategy for the Web, p. 89.

O U T I L S E T T E C H N I Q U E S 61
et gagner le soutien des parties prenantes. Mais alors, qu’est-ce
qu’un concept majeur ?

• un changement de public cible substantiel ;


• de nouvelles caractéristiques importantes en matière de
contenu – blogs, podcasts, wikis et autres bases de connais-
sances, contenu éditorial (articles, essais, études de cas),
tutoriels vidéos, etc. ;
• un changement de ton et de registre important.

Les recommandations conceptuelles doivent systématique-


ment donner les raisons stratégiques du changement proposé,
et étayer ce raisonnement par les conclusions des études sur les
utilisateurs, les parties prenantes et la concurrence.
Une fois que les idées et les concepts généraux qui forme-
ront le contenu de votre projet ont été approuvés, vous pouvez
commencer à assembler des plans et des recommandations
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pour le contenu lui-même. Vous voudrez peut-être créer


un ensemble de directives détaillées et définir les besoins en
matière de contenu pour chaque section du site et chaque canal
de diffusion, ou bien vous estimerez que seules les lignes direc-
trices avec quelques modèles de contenu et des exemples de
bon et de mauvais contenu seront suffisantes.

Design structurel
À un certain stade du projet, quelqu’un doit décider de ce qui
ira sur le site Web, et parfois de ce qui sera diffusé sur d’autres
canaux également. Cet ensemble de décisions doit prendre en
compte tout le travail réalisé au cours de la phase de définition
du projet, ainsi que toutes les conclusions de l’étude utilisateurs
et de l’étude de la concurrence, afin de créer un design struc-
turel qui répond aux besoins des utilisateurs et sert les objec-
tifs commerciaux. Les résultats peuvent inclure un plan de site
et des wireframes (remplacés par des storyboards sur certains
projets), parfois accompagnés de diagrammes de flux.
Mais alors, est-ce du ressort de l’architecture de l’informa-
tion ou de la stratégie de contenu ?

62 S T R AT É G I E D E C O N T E N U W E B
C’est une excellente question, et il y a de nombreuses
réponses, toutes contradictoires ! L’architecture de l’information
est une sous-discipline de la stratégie de contenu. Les fonctions de
stratégie de contenu doivent faire partie de l’architecture de l’infor-
mation comme les cerises font partie du clafoutis. L’expérience utili-
sateur englobe tout, contenu ou non.
Je sais par expérience qu’un architecte de l’information
brillant (ou un spécialiste UX qui s’occupe de l’architecture
de l’information) peut facilement sous-estimer l’importance
d’un planning éditorial, du ton et du registre employés, et de
consignes détaillées pour la création de contenu. Et inverse-
ment, un spécialiste en contenu hautement qualifié a vite fait
de sous-estimer l’importance de l’architecture de l’information
au-delà du simple contenu : les détails subtils du comportement
des applications et du design de l’interaction en particulier. Je
suis admirative quand je vois collaborer un architecte de l’in-
formation préoccupé par les questions éditoriales et un éditeur
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de contenu qui adore parler de structure et de données. Mais


quelle que soit votre situation, il est important que vous ayez
des notions de design structurel, ne serait-ce que pour être à
même d’offrir un feedback et une assistance utiles.
Cela dit, ce livre ne porte pas sur l’architecture de l’informa-
tion. Ces vingt dernières années, l’architecture de l’information
– ainsi que ses cousins, le design de l’interaction et de l’expé-
rience utilisateur – sont devenus des secteurs très sophistiqués
avec des corpus de documentation spécialisée conséquents.
Même si vous ne plongez que le gros orteil dans les eaux du
design structurel, je vous recommande de prendre le temps
d’étudier les principes, les méthodologies et les livrables de
base de l’architecture de l’information.

Recommandations à l’échelle du site


Maintenant que vous avez un plan de site et des maquettes,
vous pouvez revenir aux objectifs commerciaux et aux besoins
des utilisateurs définis au début du projet et commencer à
approfondir les détails de votre plan de contenu.
Pour un gros site Web comportant beaucoup de contenu, il peut
être bénéfique d’établir des recommandations pour chaque section

O U T I L S E T T E C H N I Q U E S 63
du site, comme indiqué sur le plan du site et les wireframes. C’est
essentiellement un exercice d’organisation, car vous aurez déjà
collecté les informations pertinentes lors des phases précédentes.
Voyez cela comme votre dernière occasion de parler des
stratégies sous-jacentes, car à partir de maintenant, il s’agira
uniquement de planification tactique. Les recommandations de
contenu globales incluent généralement :

• les messages primaires et secondaires à communiquer dans


le contenu de chaque section ;
• le public primaire (et parfois secondaire) ciblé par le contenu
de chaque section ;
• des remarques sur l’intégration des nouvelles fonctionna-
lités importantes sur le site ;
• des recommandations préliminaires sur le ton et le registre ;
• des recommandations sur l’intégration de fonctionnalités
communautaires (commentaires, forums, etc.) ;
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• une analyse des publics principaux du site et de la manière


dont le contenu satisfera leurs attentes ;
• des recommandations sur les canaux de diffusion pour les
différents types de contenu avec lesquels vous travaillez (site
Web vs courriel vs réseaux sociaux, etc.).

Directives à l’échelle de chaque page


Les wireframes, ou maquettes, sont un outil formidable. Ils
permettent aux architectes de l’information de représenter la
structure d’un site sans se préoccuper du design, et donnent
aux éditeurs de contenu une ébauche pour commencer à orga-
niser le contenu. Mais bien qu’ils semblent généralement repré-
senter la fonction de chaque page, ils omettent nécessairement
de nombreux détails cruciaux pour les gens qui développeront
le contenu du site : ce que le contenu de chaque page est censé
accomplir, sa relation avec le contenu du reste du site, sa prove-
nance et la manière dont il doit apparaître à l’écran.
À moins que vous ne travailliez sur un projet de très petite
taille, vous devrez accompagner vos maquettes de consignes.
J’inclus à la fois des recommandations écrites détaillées, un
guide de style et des modèles de contenu (décrits ci-dessous)

64 S T R AT É G I E D E C O N T E N U W E B
pour communiquer ces consignes. Selon l’envergure et les
objectifs du projet – définis au cours de la phase de définition –
ces consignes écrites pourront comprendre :

• une charte éditoriale concernant chaque section et le site


dans son ensemble ;
• des stratégies de maillage interne au niveau de tout le site ;
• des notes sur l’intégration du contenu publicitaire, le cas échéant ;
• des directives et des politiques sociales et communautaires ;
• des recommandations sur la création de contenu multimédia
utile et accessible ;
• des recommandations sur les métadonnées (des données qui
décrivent d’autres données).

Une charte rédactionnelle doit inclure des notes sur le choix


de styles standards, sur la charte interne (dérivée du guide stan-
dard ou rajoutée), des spécifications pour les images et autres
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médias, et des directives concernant les styles hors standard


sur les réseaux sociaux ou d’autres canaux (les blogs des cadres
par exemple).
Le contenu des recommandations écrites et de la charte sera
renforcé par un livrable encore plus détaillé appelé modèle de
contenu.

Modèle de contenu en 60 secondes


Un modèle de contenu est un document simple qui sert deux
objectifs  : il complète les wireframes de votre site Web, et
permet d’obtenir de manière simple et efficace des informations
utiles de la part des gens qui les détiennent pour les transmettre
aux gens pouvant les communiquer. Chaque modèle contient
des informations sur un type de page (ou module de contenu)
spécifique de votre site Web  : pages d’atterrissage de chaque
section, articles, pages produits, biographies du personnel,
offres d’emploi, etc.
En fournissant une structure à tous vos experts pour leurs
ébauches de contenu, vous pouvez explicitement définir ce que
vous voulez et ce que vous ne voulez pas, mais aussi sauver vos

O U T I L S E T T E C H N I Q U E S 65
créatifs du clignotement hypnotique du curseur sur une page
blanche, qui ne cesse de faire des victimes.
Bien sûr, avant de pouvoir créer des modèles de contenu,
vous devez définir ce que chaque page est censée faire. Le but
de chaque page doit émerger de la combinaison de vos études
des utilisateurs et des parties prenantes, des messages que
vous avez documentés, et des maquettes avec lesquels vous
travaillez. Il vous faudra également avoir une bonne idée de
la façon dont la nouvelle structure, représentée par le plan de
site et les wireframes, s’adaptera au contenu déjà existant. Pour
cela, vous devrez revenir à votre inventaire de contenu et cher-
cher les similitudes entre les nouveaux besoins en matière de
contenu et les ressources existantes.
Vous pourrez ensuite réaliser un modèle de contenu en
quatre étapes simples (fig 4) :

1. Dans un document texte, listez chaque information devant


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impérativement figurer sur la page, puis les informations


facultatives.
2. Après le nom de chaque élément de contenu, notez ce que le
contenu est censé accomplir. Par exemple, si les résumés des
articles sont accessibles par le biais des moteurs de recherche
publics et des outils de gestion de contenu internes, ils
doivent être intelligibles pour un public extérieur. Une liste
d’avantages d’un produit doit dire en quoi le produit sera
utile au lectorat ciblé.
3. Listez vos spécifications pour chaque élément de contenu :
nombre de mots idéal, emploi des majuscules, liste vs para-
graphe vs rubrique, et toute remarque du type «  évitez le
jargon technique dans cette section  : utilisez des mots qui
parlent à un néophyte » ou « si vous pouvez remplacer cette
description par une capture d’écran et une bonne légende,
faites-le ».
4. Fournissez un contenu exemple pour chaque élément du
modèle. Pour les éléments pouvant être créés de différentes
manières (une liste ou un paragraphe, une capture d’écran
ou un clip vidéo), fournissez des exemples pour chaque
option si vous le pouvez.

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PLANIFICATION DE LA CRÉATION DE CONTENU
La création de contenu englobe l’écriture, l’illustration, la visua-
lisation d’informations, les métadonnées et leur équivalent
textuel, ainsi que la programmation d’interfaces, et fait appel à
des compétences de direction artistique et de leadership édito-
rial à l’ancienne.
Vous avez peut-être remarqué que je ne parle pas d’« écri-
ture Web ». J’ai une bonne raison. Il est vrai qu’écrire sur le Web
et sur le papier sont deux choses différentes, mais il est d’autant
plus vrai que « le Web » n’est qu’une partie du paysage de l’édi-
tion sur Internet. Nous écrivons pour le Web, mais aussi pour
des applications, des courriels, la téléphonie mobile, et tout un
tas de services qui courent dans plusieurs catégories.
Ce livre n’est pas un manuel d’écriture, ni un livre sur la
communication en général – pas parce que ces tâches ne sont pas
vitales et essentielles, mais parce que le monde n’a pas besoin
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d’un énième bouquin sur les bases de l’écriture Web et les prin-
cipes de la communication visuelle. Cependant, tout éditeur de
contenu doit comprendre les défis inhérents au développement
de contenu, et être capable de mener la production de contenu
dans une direction qui répond aux exigences du projet.
Il n’y a que trois manières de produire du contenu. Vous
pouvez vous adresser à des créateurs dédiés, à des experts
internes, ou vous pouvez complètement contourner le
problème en récupérant le contenu de quelqu’un d’autre. Dans
le monde imaginaire où de nombreux plans marketing voient
le jour, ces trois méthodes sont tout aussi utiles et entièrement
distinctes. Dans la réalité, elles sont complexes, désordonnées
et souvent inséparables l’une de l’autre.

Créateurs dédiés
• Avantages : des auteurs/producteurs de vidéo/communicants
indépendants ou internes dédiés auront tout le temps requis
pour créer le contenu dont vous avez besoin. De plus, ils seront
très compétents (vous ne les auriez pas engagés autrement).
• Inconvénients : quelle que soit la personne qui écrit votre
texte ou crée vos illustrations et vos vidéos, quelqu’un devra

O U T I L S E T T E C H N I Q U E S 67
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MODÈLE DE CONTENU

68
Nom de la section : titre de la page
Identifiant audit : 2.1.4 URL : http://www.turbomachine.fr

Publics cibles : Décisionnaires PME aéronautique (audience primaire), ingénieurs (audience secondaire).
Message primaire : Indiquez ici le premier message à communiquer dans le cadre du projet.
Messages spécifiques à chaque public : Intégrez les messages spécifiques aux publics énumérés plus haut, ou à des sections particulières
du site, ou encore à des lignes de produits données.

Objectif de la page : Générer des ventes en exposant les avantages du produit aux décisionnaires de PME de fabrication.

Style et registre : Style direct, phrases courtes et simples, verbes forts, à la voix active. Cette page est destinée
à un public restreint et spécialisé : aussi n’hésitez pas à utiliser occasionnellement des termes
de jargon si cela vous aide à communiquer clairement et efficacement. Privilégiez une interaction
éditoriale avec le « vous » plutôt que « Turbomachine » et « ses clients ».

Description du produit (« qu’est-ce que c’est ? »)

S T R AT É G I E D E C O N T E N U W E B
Nom du produit : TurboProp Ultra Deluxe Nom de la gamme : SuperTurbo Suite 2011

Courte description du produit (2-3 phrases) :


Décrivez brièvement le produit. En deux ou trois phrases, cette accroche doit répondre aux questions
Cette accroche doit comprendre au « qu’est-ce que c’est ? », « à qui cela s’adresse ? » et « comment ça marche ? ».
moins un mot-clé se rapportant au
produit, en plus de son nom.
Exemple de description produit :
Le turbopropulseur TurboProp Ultra Deluxe comporte plusieurs avantages par rapport au traditionnel
turboréacteur. Il récupère plus d'énergie ; sa poussée résiduelle d'échappement des gaz est faible

Vocabulaire produit inspiré de http://fr.wikipedia.org/wiki/Turbopropulseur.


(moins de 10 %), et la majeure partie de la poussée étant produite par l'hélice, elle produit un bien
meilleur rendement qu'un turboréacteur classique.

Fig 4 : Exemple de modèle de contenu pour les pages produits de TurboMachine.fr.


Fournissez de l’information réelle ou plausible pour chaque bloc de contenu. Idéalement, vous produirez
un à deux éléments concrets par bloc de contenu : chiffre ou statistique, exemple, …
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En cas de promotion ou avantage en Service commercial : Lien vers la page d’achat ou les coordonnées du service commercial.
vente croisée p.ex., indiquez les
téléphone et email du responsable
des ventes.
Avantages & fonctionnalités du produit (« en quoi va-t-il m’aider ? »)
Couple avantage/fonctionnalité n°1 :
• Commencez par définir l’avantage, puis étayez cet avantage en exposant la
ou les fonctionnalités reliées.
L’exposé des avantages est axé client
et est formulé de sorte que ce dernier • Couple avantage/fonctionnalité n°2
comprenne « l’avantage que ce
produit me procure à moi ».
• Couple avantage/fonctionnalité n°3
Les fonctionnalités sont propres au
produit décrit, et illustrent
Exemples :
concrètement les avantages énoncés. • Il récupère plus d’énergie – La poussée est aussi obtenue par combustion des gaz.
Soyez aussi spécifique que possible Toutefois alors, le turboréacteur ne récupère qu'une partie de l'énergie à l'aide d'une turbine,
lorsque vous énumérez les avantages
le turbopropulseur récupère par la même méthode un maximum d'énergie.
du produit. Dans quelle proportion
contribue-t-il à une économie • Sa poussée résiduelle d'échappement des gaz est faible – Cette énergie transformée en force de
de coûts ? Quelle hausse de
rotation est renvoyée vers l'hélice au travers d'un réducteur mécanique. La poussée résiduelle
rendement le client peut-il
en espérer ? d'échappement étant produite par l'hélice, elle ne dépasse pas les 10 %.

• Fournit un bien meilleur rendement qu’un réacteur classique grâce, précisément, au fait que
la majeure partie de la poussée est produite par l’hélice.

Informations facultatives (« qu’est-ce que cela comprend ? »,


« comment ça marche ? »)
Selon le produit, vous voudrez peut-être inclure des informations complémentaires, comme :
• Liste de fonctionnalités : Certains produits présentent une multitude de fonctionnalités
qu’il est impossible de résumer dans le top trois des avantages produits. Ces fonctionnalités
seraient décrites dans ce bloc complémentaire. Elles ne remplacent nullement les avantages
décrits en première page.

OUTILS ET TECHNIQUES
• Fiche technique : Tableau comparatif du produit TurboMachine et de produits concurrents,
ou de différents modèles au sein de la gamme TurboProp.

69
• Nouveau ! : Le cas échéant, prévoyez un paragraphe ou une liste à puces exposant brièvement
de nouvelles fonctionnalités ou une mise à jour du produit.
décider de ce que ce contenu doit communiquer. S’il doit
faire valoir les avantages d’un produit complexe ou décrire
un processus compliqué aux lecteurs, il n’est pas réaliste de
penser qu’un pigiste ou un éditeur Web saura écrire un texte
pertinent sur le sujet sans avoir accès à des experts internes.

Experts internes

• Avantages  : si vous affectez des collègues à la création de


contenu, ils auront certainement les connaissances appropriées.
Ils connaîtront généralement le public cible par cœur, surtout
s’ils viennent du marketing. De plus, ils connaîtront la culture de
l’entreprise – ce qui peut être un avantage ou un danger.
• Inconvénients : les gens ayant une expertise « thématique »
sont souvent trop occupés pour produire du contenu ou
inaptes à communiquer leur expertise d’une manière qui
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sert le public cible. L’un des grands défis de la stratégie de


contenu – et particulièrement de la production de contenu –
consiste à transférer les idées de vos experts vers le cerveau
de vos producteurs de contenu. Si vous comptez sur des
experts internes pour produire le contenu, sans éditeur
dédié ni processus d’approbation, vous cherchez les ennuis.

Édition de contenu

Vous pouvez essayer de vous passer des complications de


la collaboration avec des créateurs externes ou des experts
internes grâce à l’édition – ou agrégation – de contenu créé par
et pour quelqu’un d’autre.

• Avantages : en plaçant des liens soigneusement choisis vers


du contenu extérieur, en annotant et en cadrant ce contenu
d’une manière qui participe à la discussion, vous pouvez servir
les lecteurs qui n’ont pas le temps de trouver le contenu par
eux-mêmes, ou qui comptent sur votre point de vue éditorial.
• Inconvénients : peut passer pour une alternative rapide et bon
marché à la création d’un contenu original – après tout, ça ne doit

70 S T R AT É G I E D E C O N T E N U W E B
pas être bien dur d’amasser des liens vers le travail des autres !
Mais l’édition de contenu à grande échelle n’est ni simple ni peu
coûteuse. Pour bien faire, elle requiert le temps et l’attention de
quelqu’un qui a un flair pour les informations intéressantes et
qui a les compétences éditoriales nécessaires pour monter des
histoires convaincantes à partir de la matière qu’il recueille.

Pire encore, comme c’est une tendance populaire, l’édition


de contenu peut être choisie pour de mauvaises raisons – parce
que c’est le buzz du moment et que cela ressemble à une façon
simple de pomper de grandes quantités de contenu, et non
parce que cela répond aux besoins des utilisateurs. Et comme
les ressources sont limitées, une tactique qui ne répond pas
aux besoins des utilisateurs n’est rien d’autre que du gaspillage.
Comme le blogging, l’édition de contenu peut être une compo-
sante utile d’un plan de contenu plus vaste, mais elle demande
énormément de temps et d’attention à long terme.
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Pour en finir
Donc  ! Pour résumer, le développement de contenu est une
activité épineuse qui demande du temps et de l’argent. Mais il
y a de nombreuses solutions pour rendre tout cela plus simple
et plus efficace.

• Désignez un responsable éditorial ayant des compétences


organisationnelles et éditoriales certaines. Que vous vous
appuyiez sur des créateurs internes ou externes, cette
personne devra gérer le processus de développement de
contenu. Donnez à cette personne autant d’autorité et de
soutien que possible. Si les dirigeants de votre organisation
font clairement comprendre aux créateurs internes que les
requêtes de votre directeur éditorial sont de la plus haute
importance, d’un coup de baguette magique, le travail aura
tendance à se faire tout seul !
• Si vous employez des créateurs de contenu dédiés, aidez-les à
organiser des interviews en face à face, par téléphone ou par
courriel afin qu’ils recueillent les informations dont ils ont
besoin pour créer le contenu. Prévoyez plusieurs sessions

O U T I L S E T T E C H N I Q U E S 71
d’interviews, car la première soulève souvent autant de
questions qu’elle n’en résout.
• Ensuite, prévoyez une révision factuelle du contenu final
par l’expert en question afin de vous assurer que leurs infor-
mations sont parvenues intactes. Un expert qui ne parle que
son jargon ou qui est un piètre communicant peut tout de
même relire le résultat, mais vous devrez soutenir les créa-
teurs pour que le contenu soit facile à lire.
• Avant de commencer à demander du contenu (ou des infor-
mations brutes) aux experts internes, persuadez un de vos
dirigeants de parler avec eux – de préférence en groupe, et
idéalement en personne – du type de contenu dont vous avez
besoin, de la façon dont le contenu leur rendra service et
des deadlines applicables. Cela peut assouplir les résistances
internes, apaiser les nerfs de tout le monde et communiquer
l’importance stratégique du travail.
• Si vos sources internes sont réellement surmenées, cherchez
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un moyen concret de réduire temporairement leur charge


de travail – par exemple en reportant un autre projet ou en
interrompant un processus de routine non critique  – afin
qu’ils puissent produire le contenu dont vous avez besoin.
• Créez des descriptions détaillées du type de contenu que
vous souhaitez obtenir. Les modèles de contenu peuvent
être extrêmement utiles.
• La deadline approchant, et bien que vous ayez tenté de
vendre votre projet et de trouver plus de temps, le contenu
ne coule pas à flots : envisagez d’organiser quelques sessions
de travail sur une journée ou une demi-journée, et exigez
que les experts en retard assistent à une ou plusieurs de ces
sessions.

PLANIFICATION DE LA GESTION DE CONTENU


Bien que certains consultants en stratégie de contenu aident à
l’entretien du contenu, la plupart quittent le projet bien avant
que ne surviennent les problèmes de gestion à long terme. Pour
ces consultants, il est particulièrement important de parler à la
fois de la production de contenu et de l’entretien régulier dans

72 S T R AT É G I E D E C O N T E N U W E B
les recommandations émises tout au long du projet, et d’éviter
au client d’y penser après coup.
Si votre client dispose d’un éditeur Web dédié et d’un
processus de publication raisonnablement efficace, il n’aura
peut-être besoin que d’une charte éditoriale et de conseils sur
la révision de contenu. Mais si le processus de publication de
votre client est plus précaire, vous devrez peut-être l’aider à
concevoir ou à restructurer ses workflows de publication et
d’approbation. Un calendrier éditorial peut servir de structure
pour le développement et la gestion de contenu en continu, et
peut également favoriser les discussions de stratégie globale
entre les créateurs de contenu et les personnes chargées de
développer la stratégie de communication de l’organisation.
Mais la vérité, c’est qu’aucun de ces outils ne peut remplacer
un éditeur interne compétent. Si votre client compte créer et
gérer plus d’une douzaine de pages de contenu, il aura besoin
d’un éditeur ou d’un éditeur de contenu interne pour que tout
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fonctionne correctement. Un employé déjà impliqué dans les


communications ou le développement Web aura peut-être les
compétences requises pour ce travail, ou l’organisation devra
peut-être embaucher un employé supplémentaire  ; quoi qu’il
en soit, quelqu’un devra s’occuper du bétail une fois votre
travail de consulting accompli.

La perspective interne
Ceux qui font de la stratégie de contenu au sein d’une organisation
ont tendance à remplir un rôle très similaire à celui d’un rédacteur
en chef traditionnel : ils planifient et supervisent la communica-
tion de nouveaux thèmes et de nouvelles idées, gèrent le calen-
drier et collaborent avec des écrivains et d’autres producteurs de
contenu. Mais ils travaillent également avec des designers, des
programmeurs, des chefs de projet, des directeurs commerciaux,
des équipes de marketing, des cadres supérieurs, des services
de ressources humaines, des responsables de l’évènementiel et
toute une foule d’autres parties prenantes pour produire, réviser,
approuver et publier du contenu – et pour s’assurer qu’il est régu-
lièrement évalué et au final, révisé ou supprimé.

O U T I L S E T T E C H N I Q U E S 73
Les tâches de gestion de contenu courantes comprennent :

• le contrôle éditorial régulier de tout le contenu ;


• les analyses de trafic et de trouvabilité ;
• la modération et la supervision de la communauté, compre-
nant la modération des commentaires et les interactions sur
les réseaux sociaux ;
• les sessions de planification éditoriale pour définir les chan-
gements de thème et présenter les nouvelles campagnes ;
• les efforts de traduction et de localisation continus.

Alors que de plus en plus d’organisations réalisent qu’elles


doivent se comporter comme des éditeurs, le monde du
leadership éditorial interne a tendance à s’intégrer dans la
pratique de la stratégie de contenu –  chose qui ne peut que
profiter aux deux disciplines.
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Un mot sur l’évaluation


Au sein de la stratégie de contenu, les techniques d’évaluation
et de décomposition du contenu commencent à peine se déve-
lopper. Les années à venir nous apporteront certainement leur
lot de nouvelles techniques et méthodes qui deviendront rapi-
dement des pratiques courantes.
Je ne saurai trop vous conseiller de commencer par la lecture
des trois chapitres consacrés à l’évaluation et à la décomposition
de l’ouvrage Clout de Colleen Jones et des livres de Peterson
recommandés au chapitre 2 (Web Analytics Demystified et The Big
Book of Key Performance Indicators).

74 S T R AT É G I E D E C O N T E N U W E B
EN CONCLUSION
J’ai commencé la première section de ce livre en remarquant
qu’on ne trouvait pas de livre de «  stratégies de contenu  ».
Dommage, cela serait beaucoup plus simple  ! Au lieu de ça,
nous avons un lot de principes, d’objectifs, d’approches et
d’outils.
Il pourrait être utile de considérer ces éléments comme
les axones, les synapses et autres structures physiques de nos
cerveaux. Les impulsions chimiques et électriques qui forment
nos pensées vont et viennent entre ces structures ; elles ne sont
pas les structures elles-mêmes. De la même manière, les valeurs,
les approches et les processus contenus dans ce livre ne sont
pas des « stratégies de contenu ». La stratégie de contenu, c’est
ce qui se passe dans l’espace intermédiaire.

Ce qui nous attend


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Il y a dix ans, la majeure partie du « contenu » était soit publiée


par le biais des processus de communication écrite tradition-
nels, ou créée par les pionniers de l’écriture Web et la première
génération d’éditeurs Web spécialisés.
Aujourd’hui, un glissement de terrain a bouleversé ces caté-
gories. Le contenu est publié sur Internet, sur des supports
écrits, sur des systèmes de réseaux sociaux multicanaux et sur
les applications des smartphones. Il est créé et géré par des gens
ayant des formations très diverses, des copywriters aux spécia-
listes de la gestion de données.
Alors que nos moyens de communication continuent d’évo-
luer, je peux prédire que la distinction entre la stratégie de
communication institutionnelle, la gestion des informations et
la stratégie de contenu va s’estomper et disparaître. Dans cette
même voie, nos processus et nos outils devront nécessairement
évoluer pour répondre aux besoins changeants de nos clients
et servir la nouvelle forme du contenu lui-même. Et pour le
moment, il reste difficile d’en saisir les implications.
Si vous lisez ce livre, vous faites probablement partie de cet
avenir incertain. Et vous vivrez sans doute assez longtemps
pour assister à plusieurs ruées vers l’or et aux périodes de désen-

E N C O N C LU S I O N 75
chantement qui s’ensuivront. Mais quels que soient la tournure
des évènements et les défis auxquels nous devrons répondre
dans les décennies à venir, il restera quelques constantes. Ce
sont ces constantes que ce livre –  particulièrement les deux
premières sections – tente de définir.
Mieux nous comprendrons les principes sous-jacents de
notre travail, mieux nous seront préparés à défendre le contenu
et ses lecteurs, longtemps après la démocratisation des domes-
tiques robotisés et des voitures volantes.
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76 S T R AT É G I E D E C O N T E N U W E B
PISTE BONUS : PAR OÙ COMMENCER ?
Laissez-moi vous révéler un petit secret au sujet de la stratégie
de contenu  : très peu de gens sont arrivés là intentionnelle-
ment. La plupart sont arrivés par le biais d’une discipline appa-
rentée, ont commencé à bricoler du mauvais contenu et ont
décidé de rester pour améliorer les choses. Pour tous ceux qui
veulent commencer à faire de la stratégie de contenu, c’est à la
fois une bonne et une mauvaise nouvelle. La bonne nouvelle,
c’est que tous les chemins mènent au contenu. La mauvaise,
c’est qu’aucun de ces chemins n’est pavé.
Paradoxalement, la meilleure façon de se « faire une place »,
c’est de commencer à faire de la stratégie de contenu, quel que
soit l’intitulé de votre poste actuel. Admettons que vous êtes
intéressé par le métier d’éditeur de contenu, mais que vous
n’avez pas beaucoup d’expérience avec le contenu Web. Si vous
avez de l’expérience dans l’un des secteurs apparentés, vos
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compétences vous seront sûrement utiles, et il faudra proba-


blement que vous preniez un peu de temps pour potasser au
moins deux autres de ces disciplines. La stratégie de contenu
est si jeune que très peu de personnes ont débuté leur carrière
dans cette discipline ; pour la plupart des gens, ce sera soit un
déplacement latéral, depuis un poste équivalent dans une disci-
pline apparentée, ou une promotion depuis un poste subal-
terne dans le milieu de l’écriture, de l’édition, du design ou de la
coordination de projets.
Quel que soit votre secteur d’origine, certaines caractéris-
tiques semblent indispensables. Vous ne pouvez pas avoir une
attitude ambivalente à propos du Web. Vous pouvez le détester
de temps en temps, mais il doit couler dans vos veines. Vous
devez aimer le travail bien fait, tout en comprenant que le
sens de « bien » varie constamment. Vous devez avoir un bon
relationnel et être un as de la synthèse rapide et de la recon-
naissance de motifs. Vous devez avoir de solides notions d’ar-
chitecture de l’information. Vous devez vous soucier du design
et de la programmation d’interfaces, et vous devez donc en
savoir suffisamment pour pouvoir vous en soucier.
Oh, et vous ne pouvez pas être dépourvu de sens de l’hu-
mour. Sans humour, je ne sais pas pourquoi, ça ne marche pas…

P I S T E B O N U S : PA R O Ù C O M M E N C E R ? 77
Mars a besoin d’éditeurs de contenu
Si vous vous sentez ici chez vous et que vous pensez avoir les
compétences requises, le chemin le plus simple consiste géné-
ralement à vous saisir du travail qui se rapproche le plus de
ce que vous voulez faire, et démontrer au passage que vous
pouvez le faire.
Si vous ne travaillez pas dans l’industrie du Web, commencez
à vous intéresser à la partie Web de votre industrie. Si vous
venez de finir vos études et que vous voulez vous former à la
stratégie de contenu, forgez-vous une expérience dans l’édition
Web, le marketing en ligne, la gestion des informations et le
Web en général.
La stratégie de contenu est pratiquée par des personnes
très sympathiques et bavardes. Si vous commencez par lire les
conversations sur les blogs dédiés, participer aux conférences
et aux réunions, et lire les livres et les magazines consacrés au
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sujet, vous finirez probablement par avoir une bonne idée de la


voie que vous pourriez emprunter. La vérité, c’est qu’on a besoin
de vous – on a beaucoup trop de travail. Alors rejoignez-nous !

78 S T R AT É G I E D E C O N T E N U W E B
REMERCIEMENTS
Merci à la brillante équipe de A Book Apart qui m’a invitée à
écrire ce livre et m’a permis de le mener à terme :
À Jeffrey, merci d’être le champion des causes justes dans le
monde de la création Web, et de m’avoir donné quelques coups
de pied au train dont j’avais bien besoin.
À Jason, merci d’être le designer le plus stimulant qu’une
nerd de l’écriture puisse espérer, et un fervent défenseur du
contenu.
À Krista, merci d’être une excellente correctrice et d’œuvrer
pour le bien de l’édition Web.
Un merci tout particulier à Mandy, pour ses talents d’éditrice
et son soutien imperturbable.
Ce livre n’aurait pas pu voir le jour sans les gens extraordi-
nairement généreux que compte la communauté des éditeurs de
contenu et leurs soutiens dans d’autres disciplines. Les travaux
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de Kristina Halvorson et de Melissa Rach de Brain Traffic


ont été fondamentaux  ; j’ai également une dette envers Ian
Alexander, Rick Allen, Relly Annett-Baker, Rahel Anne Bailie,
Margot Bloomstein, James Callan, Meghan Casey, Liz Danzico,
Daniel Eizans, Paul Ford, Clinton Forry, Adam Greenfield,
Matt Grocki, Dervala Hanley, Whitney Hess, Richard Ingram,
Robert K. Jenkins  III, Nicole Jones, Jonathan Kahn, Rachel
Lovinger, Jeffrey MacIntyre, Karen McGrane, Elizabeth
McGuane, Tim Meany, Craig Mod, Elizabeth Schlatter, Randall
Snare, Carolyn Wood, Rich Ziade et ceux que j’ai oubliés ; je
suis impardonnable.
Je remercie spécialement Colleen Jones et Tiffani Jones
Brown pour leur relecture attentive et leurs précieux conseils,
et je remercie Robert, Athena et Wil d’être venus au monde.
Merci et mille fois merci à PJ, qui a lu mes millions de
brouillons, qui m’a empêchée de sauter du haut de ma biblio-
thèque et qui rend ma vie infiniment plus drôle.

R E M E R C I E M E N T S 79
RESSOURCES
Cette section compile un certain nombre de livres et les
principaux sites Web communautaires (anglophones). Elle
ne comprend pas les douzaines de blogs, de billets, d’articles
de magazine en ligne déjà mentionnés dans ce livre, que je
recommande à mes lecteurs. Les liens doivent être mis à jour,
il est donc préférable de les conserver en ligne. Vous pourrez
les trouver, organisés par sujet, à l’adresse http://incisive.nu/
elements.

Stratégie de contenu : bases, outils, techniques


Si vous pensez vous lancer dans la stratégie de contenu,
commencez par Halvorson et Jones, puis lisez le reste.

Ann Handley et C.C. Chapman, Content Rules: How to Create


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Killer Blogs, Podcasts, Videos, Ebooks, Webinars (and More) That


Engage Customers and Ignite Your Business, John Wiley and Sons,
2011

Kristina Halvorson, Content Strategy for the Web, New Riders,


2009

Colleen Jones, Clout: The Art and Science of Influential Web


Content, New Riders, 2011

Ann Rockley, Managing Enterprise Content: A Unified Content


Strategy, New Riders, 2003

Richard Sheffield, The Web Content Strategist’s Bible, CLUEfox


Publishing, 2009

Magazine A List Apart, section content strategy : http://alistapart.


com/topics/content/content-strategy/

Stratégie de contenu sur Knol  : http://knol.google.com/k/


content-strategy

80 S T R AT É G I E D E C O N T E N U W E B
Stratégie de contenu sur Google Groups : http://groups.google.
com/group/contentstrategy/

Formation polyvalente essentielle


Si vous comptez travailler sur le Web, vous devez comprendre
les disciplines qui travaillent de concert pour faire des sites
Web. Ces ouvrages classiques vous permettront de rattraper
votre retard.

Dan M. Brown, Communicating Design: Developing Web Site


Documentation for Design and Planning, 2nd edition, New Riders,
2010

Jesse James Garrett, The Elements of User Experience: User-


Centered Design for the Web and Beyond, 2nd edition, New Riders,
2010
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Steve Krug, Don’t Make Me Think: A Common Sense Approach to


Web Usability, 2nd edition, New Riders, 2005

Peter Morville, Louis Rosenfeld, Information Architecture for


the World Wide Web: Designing Large Scale Web Sites, 2nd edition,
O’Reilly Media, 2006

Janice (Ginny) Redish, Letting Go of the Words: Writing Web


Content that Works, Morgan Kaufmann, 2007

Jeffrey Zeldman, Ethan Marcotte, Designing with Web Standards,


3rd edition, New Riders, 2009

Influences : l’éditeur
L’essence du travail éditorial ne repose pas sur les chartes et les
débats grammaticaux, mais sur la capacité à cultiver des rela-
tions, gérer le chaos et servir le lecteur. Ce n’est pas une profes-
sion qui s’apprend en lisant, mais ces trois livres très différents
pourront toutefois vous aider.

R E S S O U R C E S 81
Leonard S. Marcus, Dear Genius: The Letters of Ursula Nordstrom,
HarperCollins, 2000

Arthur Plotnik, The Elements of Editing, Collier Books, 1982

William Strunk Jr., E.B. White, eds., The Elements of Style,


4th  edition, Longman, 1999. Vous pouvez également retrouver
le texte original écrit par Strunk en 1918 en version complète à
l’adresse : http://en.wikisource.org/wiki/The_Elements_of_Style.

Influences : le conservateur
Les employés de musée ont beaucoup à apprendre à quiconque
s’intéresse au stockage d’informations précieuses ou cherche
à éduquer, intriguer et édifier. De la pratique à la théorie, ces
textes vous donneront un aperçu du travail de conservateur.
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Bettina Carbonell, ed., Museum Studies: An Anthology of Contexts,


Wiley-Blackwell, 2003

James Cuno, Whose Muse?: Art Museums and the Public Trust,
Princeton University Press, 2006

Nina Simon, The Participatory Museum, Museum 2.0, 2010. Texte


complet en ligne à l’adresse http://participatorymuseum.org/.

Influences : marketing et rhétorique


De nombreux ouvrages, articles et billets traitant de stratégie de
contenu prennent l’art de la persuasion pour acquis. Pour une
approche plus poussée et une réflexion sur l’éthique et les principes
de la rhétorique, servez-vous de ces ouvrages comme point de départ.

Patricia Bizzell, The Rhetorical Tradition: Readings from Classical


Times to the Present, Bedford/St. Martin’s, 2000

James Conger, The Necessary Art of Persuasion, Harvard Business


School Press, 2008. Texte complet disponible en ligne  :

82 S T R AT É G I E D E C O N T E N U W E B
http://www.annbadillo.com/leadership/files/necessary_art_
persuasion_jay_conger.pdf.

Influences : sciences de l’information


En complément des livres traitant d’architecture de l’informa-
tion cités plus haut, ces textes et ces sites offrent un aperçu des
choses bizarres et intéressantes qui se passent au carrefour du
contenu et de la technologie.

Ann Rockley, Steve Manning, Charles Cooper, DITA 101:


Fundamentals of DITA for Authors and Managers, 2nd  edition, The
Rockley Group, Inc., 2010

DITA XML.org : http://dita.xml.org/

Journal international de curation numérique  : http://ijdc.net/


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index.php/ijdc

Centre de curation numérique : http://www.dcc.ac.uk/

R E S S O U R C E S 83
INDEX
A F
A List Apart 27 Fried, Michael 26
architecture de l’information 37
Aristote 31
G
audit
qualitatif 56 gestion de contenu 13, 27, 30, 37, 38, 72
quantitatif 55 Gutenberg 16

B H
Bond, James 5 Halvorson, Kristina 1, 18
histoire 19
C
calendrier éditorial 22
I
Clout 34, 74 interview 55
conservateur 24, 82 inventaire de contenu 55
contenu
adéquat 4
J
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clair 9
cohérent 10 Jones, Colleen 32
concis 11
création 67 L
entretenu 12
gestion 13, 27, 30, 37, 38, 72 Levi Strauss, David 25
inventaire 55 livrables 44
modèle 65 logos 31
orienté utilisateur 8 Lovinger, Rachel 1
planification de la création 67
planification de la gestion 72 M
rationnaliser l’existant 60
utile 7 MacIntyre, Jeffrey 21
création de contenu 67 Mandy Brown 27
curator 24 maquette, voir wireframe
marketer 30
marketing 82
message 32, 60
D
métadonnées 29
design structurel 62 méthodologie 42
d’Harnoncourt, Anne 25 modèle de contenu 65

E N
éditeur 17, 81 Norman, Donald 8
ethos 32
étude 54
P
concurrentielle 58
utilisateur 54 pathos 32

84 S T R AT É G I E D E C O N T E N U W E B
personas 37, 51 stratégie de contenu
Peterson, Eric 35 méthodologie 42
plan de site 56, 62 métier 14
plan média 22 outils 41
Platon 31 synthèse 58
Plotnik, Arhtur 18
point man 15
présence (presentness) 26 T
projet taxonomie 29, 37
définir 51
objectifs 53
réussite 53 U
utilisateur
R orienté 8
rationalisation du contenu existant 60
rhétorique 31, 82 W
wireframe 37, 62, 64
S WordPress 38
Saul Bass 16 workflow 10, 22
Scher, Paula 16 de publication 57
sciences de l’information 36, 83
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simulation 55
Z
storytelling 19
stratégie de canal 1, 35, 36 Zambonini, Dan 25

INDEX 85
À PROPOS DE A BOOK APART
Le Web design est une affaire de maîtrise multidisciplinaire et
de haute précision. C’est justement l’idée qui se reflète dans
notre collection de petits livres, destinée à tous ceux qui créent
des sites Web. Nous traitons les sujets émergents et essentiels
du design et du développement Web avec style, clarté et surtout
concision, parce qu’un designer-développeur qui travaille n’a
pas de temps à perdre.
L’objectif de tous les livres de notre catalogue, c’est de faire
toute la lumière sur un sujet délicat, et de le faire vite pour nous
permettre de mieux retourner au travail. Merci de nous soutenir
dans notre mission : offrir aux professionnels les outils dont ils
ont besoin pour faire avancer le Web.
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À PROPOS DE L’AUTEUR
Erin Kissane est éditrice et spécia-
liste du contenu Web basée à New
York et à Portland dans l’Oregon.
Rédactrice du magazine A List Apart
pendant près de dix ans, elle a égale-
ment travaillé comme éditrice free-
lance et directrice éditoriale pour
les studios Happy Cog. En 2011, elle
a rejoint le cabinet de conseil en
stratégie de contenu Brain Traffic,
où elle dirige des projets et mange des gâteaux. Quand elle ne
travaille pas, Erin satisfait son avidité de livres et de café et écrit
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sur les fictions spéculatives et modernistes des années 1920 et


1930. Elle tient un blog à l’adresse incisive.nu.
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