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Ali Boumendjel. Une affaire française.

Une histoire
algérienne 

Un militant légaliste devenu progressivement l’un des cerveaux les plus influents du
mouvement national et un ardent activiste de la « dissolution de la colonisation ». Partisan
réservé de la lutte armée du FLN, Ali Boumendjel est emprisonné le 9 février 1957 et assassiné
quarante-trois jours plus tard créant une onde de choc sans précédent en métropole.

Lutte clandestine, arrestation, torture et assassinat déguisé en suicide Précipité du sixième étage


de l’immeuble où il était retenu par… sont autant de marches conduisant à la stèle des martyres
« héroïsables » et qui auraient pu permettre à Boumendjel « l’intellectuel » d’entrer dans
l’Histoire officielle. Mais son origine bourgeoise, son parcours atypique (ni maquisard, ni paysan
en armes), son ouverture aux courants politiques rivaux et son entregent ont fait de cet « homme
frontière », un passeur entre les cultures et les courants que l’analyse simpliste de la colonisation
exclue.
S’il n’est pas venu grossir le rang des martyrs anonymes, on le doit au contexte particulier de
sa mort et paradoxalement aux raisons mêmes qui l’excluent du roman national. Son assassinat
se produit lors de la « bataille d’Alger » également qualifiée de « grande répression d’Alger . À
la même période, son camarade Henri Alleg prépare la scandaleuse publication de La Question,
qui relate les tortures pratiquées par l’armée française . C’est également le procès de Djamila
Bouhired défendue par Jacques Verges qui introduit pour la première fois le concept de stratégie
de rupture. Malika Rahal fait l’hypothèse que la vie de Boumendjel ainsi que ses référents
politico-culturels expliquent en partie la mobilisation autour de son décès. Selon elle, sa mort
aurait, en outre, contribué à modifier la perception métropolitaine de la guerre, de la torture et
même du FLN. Il s’agit de montrer comment la construction sociale d’un individu peut aussi
révéler des phénomènes de l’ordre du politique.(...). L’un des pères spirituel du courant islamiste
algérien Malek Bennabi a également été mis à l’écart par le FLN dès 1956 et accusé de faire le
« jeu du colonialisme » car il condamnait lui aussi la politique qui se limitait à un réquisitoire
anticolonialiste et qui négligeait d’aborder les sérieux problèmes internes de la société
musulmane.

Yasmine Seghirate-El Guerrab. Afrique contemporaine 2010 ; (n°236), p .p 148 . 150

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