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archives des maladies

du

cœur
et des

vaisseaux
pratique
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J.-J. Monsuez

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Archives des maladies du cœur et des vaisseaux Pratique (ISSN 1261-694X), 2017, un an : 10 numéros.
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ISSN : 1261-694X
Arch Mal Coeur Vaiss Prat 2017;2017:1–2
Dossier / Avant propos

La myocardite et ses mystères


Myocarditis and related mysterious uncertainties

M. Desnos

M. Desnos

a définition de la myocardite (i.e., inflammation du myocarde), précise et acceptée par tous,


L laisse penser que cette affection est bien connue et que la conduite à tenir est codifiée.
Il n'en est rien car, malgré les progrès considérables apportés par les biopsies endomyocardi-
ques, puis par l'immunologie et la virologie et enfin, par l'imagerie par résonance magnétique, la
myocardite (cardiomyopathie inflammatoire) garde beaucoup de ses mystères et reste encore
difficile à appréhender pour de nombreuses raisons [1,2].
La première est représentée par l'étendue extrême du spectre clinique de la maladie qui peut
survenir à tous les âges de la vie et qui va des formes asymptomatiques aux morts subites, en
passant par l'élévation isolée des enzymes cardiaques lors d'une péricardite aiguë bénigne, un
tableau de cardiomyopathie dilatée chronique, une forme pseudo-infarctoïde, un choc
cardiogénique. . . La grande variabilité des manifestations cliniques est probablement en rapport
avec l'étendue et la localisation du processus inflammatoire myocardique, la maladie systémique
associée, le « terrain ». . .
La liste innombrable des étiologies potentielles ne simplifie pas l'approche clinique d'autant que
le plus souvent, en pratique, aucune cause ne peut être retenue avec certitude. L'inflammation
du myocarde est une réponse non spécifique à de multiples gâchettes, infectieuses et non
infectieuses. L'atteinte virale est la cause la plus fréquemment retenue [3], en sachant que les
autres agents infectieux (bactéries, parasites, champignons, protozoaires) sont rarement incri-
minés. Les causes non infectieuses regroupent des atteintes toxiques, d'hypersensibilité (en
particulier médicamenteuses) et immunologiques (notamment les maladies systémiques).
Une des difficultés majeures dans la prise en charge de la myocardite est liée à l'incertitude du
diagnostic [4]. L'étalon-or du diagnostic est la biopsie endomyocardique qui doit comporter de
nombreux prélèvements et s'accompagner d'analyses immuno-histochimiques et virologiques
spécialisées. Ces données permettent assez souvent un diagnostic positif et étiologique, une
évaluation pronostique et peuvent guider la thérapeutique. La classification historique de Dallas
en 1986 a été complétée en 1991 par une description clinico-pathologique en quatre groupes
(myocardite fulminante – aiguë – chronique active – chronique persistante). Cependant, cette
biopsie, même dans les meilleures mains et dans les équipes expérimentées, peut être à l'origine
de complications graves et n'est pas toujours contributive, notamment en raison du caractère
focal de l'atteinte inflammatoire du myocarde. C'est pourquoi en pratique clinique, elle est
rarement réalisée, en particulier dans notre pays où elle est réservée aux atteintes graves.
Le plus souvent, le diagnostic retenu est celui de myocardite cliniquement probable reposant sur
un faisceau d'arguments. Rappelons à ce propos qu'un taux normal de troponine n'élimine pas le
diagnostic, qu'il n'existe aucun signe spécifique d'échocardiographie et que, si l'IRM a repré-
senté un apport majeur au diagnostic clinique de cette affection [5], en particulier grâce à ses
développements récents [6], cet examen d'imagerie ne peut pas, à lui seul, faire le diagnostic.
L'hétérogénéité clinique extrême, les multiples étiologies, l'incertitude du diagnostic, expliquent
que l'épidémiologie et la fréquence de la myocardite soient mal connues, d'autant qu'il est
probable qu'un grand nombre de formes modérées guérissent spontanément et passent ina- Service de cardiologie, hôpital
perçues [4]. Marie-Lannelongue, 133, avenue
Le dernier élément complexifiant la prise en charge de la myocardite est la thérapeutique qui de la Résistance, 92350 Le-
reste un sujet débattu. En dehors des approches symptomatiques et étiologiques, le traitement Plessis-Robinson, France
des formes aiguës ou chroniques par immunosuppresseurs ou immuno-modulateurs, même si
certains essais ont montré des effets bénéfiques, doit encore confirmer son utilité.
C'est pourquoi il nous a paru intéressant dans cette livraison des "Archives des Maladies du Adresse e-mail :
m.desnos@ccml.fr
Cœur et des Vaisseaux Pratique"de faire le point sur les aspects les plus fréquents et les plus
récents de cette maladie.
François Delahaye détaille la conduite à tenir devant une myocardite virale à la lumière des Disponible en ligne sur
« recommandations » européennes de 2013 [7]. ScienceDirect le 13
novembre 2017

https://doi.org/10.1016/j.amcp.2017.10.001
© 2017 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
1
Dossier / Avant propos M. Desnos

Qui mieux que Loïc Guillevin pouvait nous préciser les der- [3] Pollack A, Kontorovich AR, Fuster V, et al. Viral myocarditis—
niers développements et la prise en charge des atteintes diagnosis, treatment options, and current controversies. Nat Rev
myocardiques des maladies systémiques, qui viennent de Cardiol 2015;12:670–80.
faire l'objet d'un « Position Paper » de la Société européenne [4] Heymans S, Eriksson U, Lehtonen J, et al. The quest for new
de cardiologie [8]. approaches in myocarditis and inflammatory cardiomyopathy. J
Pascal Guéret précise dans la fiche technique la place de Am Coll Cardiol 2016;68:2348–64.
l'imagerie par résonance magnétique nucléaire [5,6]. [5] Friedrich MG, Sechtem U, Shculz-Menger J. Cardiovascular
Enfin, Laurent Andréoletti détaille les conceptions actuelles de magnetic resonance in myocarditis: a JACC white paper. J Am Coll
la pathogénie de la myocardite virale [3,4]. Cardiol 2009;53:1475–87.
Je suis persuadé que ce dossier vous aidera à mieux connaître [6] Lagan J, Schmitt M, Miller CA. Clinical Applications of multi-
et prendre en charge cette pathologie non exceptionnelle, parametric CMR in myocarditis and systemic inflammatory disea-
même si la myocardite conserve encore aujourd'hui beaucoup ses. Int J Cardiovasc Imaging 2017. http://dx.doi.org/10.1007/
de ses mystères. s10554-017-1063-9.
Bonne lecture ! [7] Caforio AL, Pankuweit S, Arbustini E, et al. Current state of
knowledge on aetiology, diagnosis, management, and therapy of
Déclaration de liens d'intérêts myocarditis: a position statement of the European Society of
L'auteur déclare ne pas avoir de liens d'intérêts. Cardiology Working Group on myocardial and pericardial disea-
ses. Eur Heart J 2013;34:2636–48.
Références [8] Caforio ALP, Adler Y, Agostini C, et al. Diagnosis and manage-
[1] Sagar S, Liu PP, Cooper Jr LT. Myocarditis. Lancet ment of myocardial involvement in systemic immune-mediated
2012;379:738–47. diseases: a position statement of the European Society of Car-
[2] Trachtenberg BH, Hare JM. Inflammatory cardiomyopathic syn- diology Working Group on myocardial and pericardial disease. Eur
dromes. Circ Res 2017;121:803–18. Heart J 2017;38:2649–62.

2
Arch Mal Coeur Vaiss Prat 2017;2017:3–6
Dossier / Mise au point

Myocardites virales
Viral myocarditis

F. Delahaye Service de cardiologie médicale-coronaires/valves et


insuffisance cardiaque, hôpital Louis-Pradel, CHU de
Lyon, 59, boulevard Pinel, 69677 Bron cedex, France F. Delahaye

Disponible en ligne sur ScienceDirect le 13


novembre 2017

e diagnostic de myocardite est difficile du


L fait de l'hétérogénéité des présentations
cliniques. L'incidence réelle de la myocardite
Définitions de l'OMS et de
est elle aussi difficile à déterminer parce que la
biopsie endomyocardique, qui est l'étalon-or, l'International Society and
est rarement faite. Les études des morts subi- Federation of Cardiology
tes cardiaques chez les sujets jeunes rappor-
tent une prévalence très variable des Une myocardite est une maladie
myocardites à l'autopsie, de 2 à 42 % des inflammatoire du myocarde diagnosti-
cas. Une myocardite prouvée par la biopsie quée par des critères histologiques
est rapportée chez 9 à 16 % des adultes qui (critères de Dallas), immunologiques
ont une cardiomyopathie dilatée non isché- et immunohistochimiques établis. Cri-
mique, et chez 46 % des enfants qui ont tères de Dallas : preuve histologique
une cause identifiée de cardiomyopathie dila- d'infiltrats inflammatoires dans le myo-
tée. Chez les patients qui ont des symptômes carde associés à une dégénérescence
légers et une dysfonction ventriculaire gauche et une nécrose myocytaires d'origine
minime, la myocardite se résout souvent non ischémique. Critère immunohisto-
spontanément, sans traitement spécifique. chimique : on définit un infiltrat inflam-
Cependant, dans un pourcentage de cas pou- matoire anormal comme contenant au
vant atteindre 30 %, les myocardites prouvées moins 14 leucocytes par mm2 incluant
par la biopsie peuvent progresser vers une jusqu'à, au maximum, 4 monocytes par
cardiomyopathie dilatée et sont associées mm2 et au moins 7 lymphocytes T
à un mauvais pronostic. Le pronostic varie CD3 + par mm2.
aussi selon la cause de la myocardite. Le Une cardiomyopathie inflammatoire
traitement est souvent symptomatique. Mais est une myocardite associée à une
les analyses immunohistochimiques et molé- dysfonction cardiaque. Les cardiomyo-
culaires de la biopsie et la recherche d'auto- pathies inflammatoires, impliquées
anticorps sont importantes pour identifier les dans la pathogénie des cardiomyopa-
patients qui peuvent bénéficier d'un traitement thies dilatées, comportent les sous-
spécifique. types idiopathiques, auto-immuns et
Pour faire avec certitude le diagnostic de myo- infectieux.
cardite virale, il faut la preuve histologique Le diagnostic d'une cardiomyopathie
d'une myocardite associée à une polymerase dilatée est un diagnostic clinique car-
chain reaction (PCR) virale positive. actérisé par une dilatation et une
Les virus en cause sont : altération de la contraction du ventri-
 des virus à ARN : coxsackie A et B, écho, cule gauche ou des deux ventricules,
polio, grippe A et B, respiratoire syncytial, qui n'est pas expliquée par des condi-
oreillons, rougeole, rubéole, hépatite C, tions de charge anormales ou une cor-
dengue, fièvre jaune, chikungunya, junin, onaropathie. Les cardiomyopathies
lassa, rage, HIV ; dilatées comportent les sous-types
 des virus à ADN : adéno, parvo B19, cyto- idiopathiques, familiaux/génétiques,
mégalo, herpès 6, Epstein-Barr, varicelle/ viraux et/ou immuns, et alcooliques/
zona, herpès simplex, variole, vaccine. toxiques.
La pathogénie fait l'objet d'un article spéci-
Adresse e-mail :
fique dans ce dossier.
francois.delahaye@chu-lyon.fr

https://doi.org/10.1016/j.amcp.2017.10.002
© 2017 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
3
Dossier / Mise au point F. Delahaye

Tableau I. Présentations cliniques des patients qui ont une cardiopathie inflammatoire prouvée par la biopsie.
Syndrome Douleur thoracique aiguë Commençant souvent dans les
coronaire aigu une à quatre semaines après
une infection respiratoire ou
gastro-intestinale
Souvent associée à des
symptômes sévères et
récidivants
En l'absence de preuve
angiographique de
coronaropathie
Modifications du segment ST et de l'onde T Sus- ou sous-décalage de ST
Inversion de T
Avec ou sans dysfonction globale ou régionale du ventricule gauche
et/ou du ventricule droit à l'échocardiographie ou l'IRM
Avec ou sans augmentation de la troponinémie qui peut avoir une
évolution temporelle similaire à celle de l'infarctus du myocarde ou bien
un taux augmenté de façon prolongée pendant plusieurs semaines ou
mois
Insuffisance cardiaque Insuffisance cardiaque nouvelle ou en progression depuis deux Dyspnée
nouvelle ou aggravée semaines à trois mois Èdèmes périphériques
en l'absence de Gêne thoracique
coronaropathie Fatigue
et d'autres causes
d'insuffisance cardiaque
Fonction ventriculaire gauche et/ou ventriculaire droite systolique altérée,
avec ou sans épaississement pariétal, avec ou sans dilatation du
ventricule gauche et/ou du ventricule droit à l'échocardiographie ou l'IRM
Symptômes commençant possiblement après une infection respiratoire
ou gastro-intestinale ou dans le péri-partum
Signes ECG non spécifiques, bloc de branche, bloc atrioventriculaire, et/
ou arythmie ventriculaire
Insuffisance cardiaque Symptômes d'insuffisance cardiaque (avec exacerbations récidivantes)
chronique en l'absence depuis plus de 3 mois
de coronaropathie et
d'autres causes
d'insuffisance cardiaque
Fatigue, palpitation, dyspnée, douleurs thoraciques atypiques, arythmie
chez un patient ambulatoire
Altération de la fonction systolique du ventricule gauche et/ou du
ventricule droit à l'échocardiographie ou à l'IRM suggérant une
cardiomyopathie dilatée ou une cardiomyopathie non ischémique
Signes ECG non spécifiques, parfois bloc de branche et/ou arythmie
ventriculaire et/ou bloc atrioventriculaire
Situation potentiellement Arythmie potentiellement létale et mort subite récupérée
létale en l'absence de
coronaropathie
et d'autres causes
d'insuffisance
cardiaque
Choc cardiogénique
Fonction ventriculaire gauche sévèrement altérée

modifications électriques jusqu'aux situations mortelles, choc


PRÉSENTATIONS CLINIQUES cardiogénique et arythmie ventriculaire (Tableau I). La maladie
Il y a de nombreuses présentations différentes, des symptômes peut atteindre des individus de tous âges, mais elle est plus
modestes de douleurs thoraciques et de palpitations avec fréquente chez les sujets jeunes. En cas de suspicion de

4
Myocardites virales
Dossier / Mise au point

Tableau II. Critères diagnostiques en cas de suspicion clinique de myocardite.


Présentations Douleur thoracique aiguë, péricardique ou pseudo-ischémique
cliniques Dyspnée nouvelle récente (quelques jours jusqu'à trois mois) ou aggravée, au repos ou à l'effort, et/ou fatigue, avec
ou sans signe d'insuffisance cardiaque gauche et/ou droite
Dyspnée subaiguë/chronique (> 3 mois) ou aggravation de la dyspnée, au repos ou à l'effort, et/ou fatigue, avec ou
sans signe d'insuffisance cardiaque gauche et/ou droite
Palpitations et/ou symptômes d'arythmie inexpliqués et/ou syncope et/ou mort subite cardiaque récupérée
Choc cardiogénique inexpliqué
Critères ECG/Holter/épreuve d'effort
diagnostiques ECG et/ou Holter et/ou épreuve d'effort anormal de façon nouvelle ; un des éléments suivants : bloc atrioventriculaire
du 1er au 3e degrés, bloc de branche, modification de ST-T (sus ou sous-décalage de ST, inversion de T), pause
sinusale, tachycardie ventriculaire ou fibrillation ventriculaire et asystolie, fibrillation atriale, diminution de l'amplitude
des ondes R, troubles de la conduction intraventriculaire (QRS élargis), ondes Q anormales, microvoltage,
extrasystoles fréquentes, tachycardie supraventriculaire
Marqueurs de cytolyse myocardique
Augmentation de la troponinémie
Anomalie fonctionnelle et structurale à l'imagerie cardiaque (échocardiographie, angiographie, IRM)
Anomalie de la structure et de la fonction ventriculaire gauche et/ou ventriculaire droite nouvelle inexpliquée (y
compris les anomalies découvertes incidemment chez des patients apparemment asymptomatiques) : anomalie de
fonction systolique ou diastolique globale ou segmentaire, avec ou sans dilatation ventriculaire, avec ou sans
épaississement pariétal, avec ou sans épanchement péricardique, avec ou sans thrombus endocavitaire
Caractérisation tissulaire par l'IRM
Èdème et/ou rehaussement tardif du gadolinium d'allure myocarditique classique
Une myocardite est cliniquement suspectée s'il y a au moins une présentation clinique et au moins un critère diagnostique, en l'absence
de coronaropathie angiographiquement détectable (sténose coronaire  50 %), d'une maladie cardiovasculaire préexistante et d'une
cause extracardiaque qui pourrait expliquer le syndrome (par exemple, valvulopathie, cardiopathie congénitale, hyperthyroïdie. . .). La
suspicion est d'autant plus forte qu'il y a plus de critères présents
Si le patient est asymptomatique, il faut au moins deux critères diagnostiques

myocardite, il faut exclure une coronaropathie et d'autres attein- convexe dans l'ischémie myocardique) et diffus sans aspect
tes cardiovasculaires, hypertension artérielle par exemple, et en miroir. Un bloc atrioventriculaire en présence d'une dilata-
des maladies inflammatoires extracardiaques, qui pourraient tion ventriculaire gauche légère peut être due à plusieurs
expliquer la présentation clinique. causes (dont les laminopathies), mais il peut aussi suggérer
une maladie de Lyme, une sarcoïdose cardiaque, une myo-
cardite à cellules géantes.

DIAGNOSTIC
Le groupe de travail sur les maladies myocardiques et péri- Échocardiographie
cardiques de la Société européenne de cardiologie (ESC),
dans son document publié en 2013, considère que la biopsie Elle aide à éliminer une maladie cardiaque non inflammatoire,
myocardique doit être l'étalon-or pour faire un diagnostic de telle qu'une valvulopathie, et à surveiller les modifications de la
myocardite certaine. Cependant, cela implique que tous les taille des cavités, l'épaisseur pariétale, la fonction ventricu-
patients qui ont une suspicion de myocardite doivent avoir laire, et la présence d'un épanchement péricardique. Une
des biopsies myocardiques, ce qui n'est pas la pratique dysfonction ventriculaire globale, des anomalies segmentaires
habituelle. de contraction, ou une dysfonction diastolique avec fraction
d'éjection préservée peuvent survenir dans la myocardite. Une
myocardite prouvée par l'histologie peut ressembler à une
cardiomyopathie dilatée, ou hypertrophique, ou restrictive ;
EXAMENS DE PREMIÈRE INTENTION EN CAS DE elle peut imiter une cardiopathie ischémique. La myocardite
PRÉSENTATION CLINIQUE COHÉRENTE AVEC fulminante se présente souvent avec un ventricule gauche non
UNE MYOCARDITE dilaté, épaissi et hypocontractile, parce que la réponse inflam-
matoire intense entraîne un œdème interstitiel et une perte de
Électrocardiogramme la contractilité ventriculaire.
Il est habituellement anormal dans la myocardite bien que les
signes ECG ne soient ni spécifiques ni sensibles. Certaines
modifications ECG sont plus suggestives de myocardite que
d'autres. Par exemple, le sus-décalage de ST-T dans la myo- Imagerie par résonance magnétique
cardite est habituellement concave vers le haut (il est plutôt L'IRM fait l'objet d'un article spécifique dans ce dossier.

5
Dossier / Mise au point F. Delahaye

Biomarqueurs TRAITEMENT MÉDICAL CONVENTIONNEL


La vitesse de sédimentation et la protéine C réactive sont
souvent augmentées dans la myocardite. Si le patient est hémodynamiquement instable, il doit être
Si les troponines cardiaques sont plus sensibles d'une atteinte hospitalisé dans une unité de soins intensifs cardiologiques
myocytaire que la créatine kinase, elles ne sont pas spécifi- disposant de l'assistance respiratoire et de l'assistance car-
ques ; une troponinémie normale n'exclut pas la myocardite. diopulmonaire mécanique.
Cela vaut aussi pour le BNP, les cytokines, et les nouveaux Si le patient est hémodynamiquement stable, il doit être
marqueurs tels que la galectine 3. hospitalisé pour surveillance jusqu'à ce qu'un diagnostic défi-
nitif soit établi, parce que la situation peut évoluer rapidement
et qu'une urgence cardiopulmonaire est possible et imprévi-
sible, même si la fonction systolique est initialement
Sérologies virales préservée.
Elles sont d'utilité limitée dans la myocardite virale parce que la En cas d'insuffisance cardiaque, un traitement par diurétique,
prévalence des anticorps IgG circulants aux virus cardiotropes inhibiteur de l'enzyme de conversion de l'angiotensine ou
est élevée dans la population générale en l'absence de mala- antagoniste des récepteurs de l'angiotensine II et bêtablo-
die virale. quant doit être institué. Si les symptômes persistent, un anta-
goniste des récepteurs des minéralocorticoïdes doit être
associé. Les anti-inflammatoires non stéroïdiens sont
contre-indiqués (augmentation de la mortalité dans des modè-
les expérimentaux de myocardite ; pas de données cliniques
CRITÈRES PROPOSÉS POUR LE DIAGNOSTIC chez l'homme).
D'UNE MYOCARDITE CLINIQUEMENT Une arythmie doit être prise en charge selon les recomman-
SUSPECTÉE dations de l'ESC sur les arythmies. Une stimulation temporaire
est parfois nécessaire. Les indications du défibrillateur sont
Le groupe de travail de l'ESC propose des critères pour aider controversées, car la myocardite peut récupérer complète-
au diagnostic de myocardite (Tableau II). ment. En cas d'arythmie ventriculaire sévère (tachycardie
Investigations de second niveau : En cas de suspicion clinique ou fibrillation ventriculaire), l'utilisation d'une « lifevest » peut
de myocardite, le groupe de travail de l'ESC recommande une permettre d'attendre que la myocardite soit guérie.
coronarographie et des biopsies endomyocardiques. Dans les Chez les athlètes et les non-athlètes, l'activité physique doit
équipes expérimentées, le taux de complications de celles-ci être réduite pendant la phase aiguë et pendant au moins six
est bas (0–0,8 %). mois après la phase aiguë.
La biopsie endomyocardique doit être réalisée tôt dans l'évo- Si un traitement antiviral est envisagé, cela doit être discuté
lution de la maladie. Il faut plusieurs prélèvements, d'une taille avec un infectiologue.
d'au moins 1 à 2 mm, dans le ventricule droit et dans le
ventricule gauche. Les tissus obtenus doivent être analysés
en histologie, en immunohistochimie et en PCR virale.

En pratique

Importance du suivi : patient instable en USIC, patient


PRISE EN CHARGE stable à surveiller car aggravation possible.
La myocardite aiguë se résout dans les 2 à 4 semaines dans
environ 50 % des cas, mais environ 25 % des patients vont
développer une dysfonction cardiaque persistante et chez 12 à
25 % des patients l'état peut s'altérer de façon aiguë et entraî-
ner le décès ou évoluer vers une cardiomyopathie dilatée Déclaration de liens d'intérêts
terminale avec besoin de transplantation cardiaque. L'auteur déclare ne pas avoir de liens d'intérêts.

6
Arch Mal Coeur Vaiss Prat 2017;2017:7–11
Dossier / Mise au point

Myocardites des maladies


systémiques
Myocardial involvement in systemic disease
L. Guillevin
L. Guillevin Service de médecine interne, centre de référence
des maladies auto-immunes et systémiques rares,
hôpital Cochin, université Paris Descartes, 27, rue du
Faubourg-Saint-Jacques, 75014 Paris, France

Disponible en ligne sur ScienceDirect le 13


novembre 2017

e cœur et les vaisseaux sont une des une atteinte interstitielle avec des lésions de
L cibles des maladies systémiques et auto-
immunes. L'atteinte cardiaque est de fréquence
vascularite, inflammatoire des tout petits vais-
seaux. Il y a aussi une infiltration interstitielle
variable selon la maladie considérée mais lymphoplasmocytaire de topographie péri vas-
lorsque le myocarde est intéressé le pronos- culaire. Une des difficultés pour le clinicien est
tic vital est souvent engagé à court et à long d'identifier la myocardite comme étant spéci-
terme. C'est pourquoi, une atteinte myocar- fique du lupus car une insuffisance cardiaque
dique doit être traitée rapidement, de façon peut avoir ou être favorisée par d'autres cau-
intensive et adaptée. ses : anémie, insuffisance rénale, troubles
Le propos de cet article se limitera plus spé- métaboliques. . .
cifiquement aux atteintes du myocarde et La traduction clinique de la myocardite lupique
n'abordera pas ou seulement de façon margi- n'a pas de spécificité. Les anomalies électro-
nale, les atteintes des autres tuniques cardia- cardiographiques sont présentes chez environ
ques. Nous centrerons plus particulièrement 10 % des patients. La myocardite peut égale-
notre attention sur le lupus, la sclérodermie et ment être asymptomatique et seules des explo-
les vascularites. rations cardiaques mettent en évidence des
anomalies de la contractilité myocardique. Le
BNP ou le NT pro-BNP peuvent être élevés.
LUPUS SYSTÉMIQUE L'électrocardiogramme peut montrer des ano-
malies de la repolarisation, des troubles du
Clinique et principales explorations rythme ou de la conduction intraventriculaire
complémentaires ou auriculo-ventriculaire. On a aussi décrit
Les séreuses sont largement touchées dans un QT allongé, notamment chez des patients
le lupus systémique et notamment le péri- porteurs de l'anticorps anti-SSA/52 kd. Cet
carde. Cette atteinte est fréquente mais le allongement favoriserait les troubles du
traitement est habituellement simple et le rythme ventriculaire, responsables du décès
pronostic est dans la quasi-totalité des cas, des patients. L'échographie cardiaque est
favorable. L'endocarde est plus rarement utile à l'évaluation du myocarde. En cas de
touché. On sait que cette dernière atteinte forte suspicion d'atteinte myocardique, une
est en rapport avec la présence d'antiphos- IRM cardiaque est souvent réalisée et détecte
pholipides. Le myocarde est moins souvent des hypersignaux, des anomalies de la contrac-
l'objet d'une atteinte spécifique du lupus mais, tilité du myocarde et une diminution de la frac-
comme dans les autres maladies auto-immu- tion d'éjection.
nes, sa présence peut être sévère à court et
à long terme. Sa fréquence est très variable Une situation particulière : troubles
selon les séries allant jusqu'à plus de 90 % de conduction auriculo-ventriculaires
dans des séries autopsiques anciennes. Clini-
de l'adulte et du nouveau-né de mère
quement, la fréquence est inférieure à 10 %
des cas. Elle est même vraisemblablement très lupique
inférieure car les séries publiées sont le fait de
centres hospitaliers qui regroupent les formes L'adulte
les plus graves. Les biopsies du myocarde (en Le bloc auriculo-ventriculaire (BAV) complet Adresse e-mail :
règle générale, presque jamais faites) montrent est rare, environ 1 % des cas. Le siège peut loic.guillevin@aphp.fr

https://doi.org/10.1016/j.amcp.2017.10.003
© 2017 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
7
Dossier / Mise au point L. Guillevin

être nodal et susceptible de régresser sous traitement. Les


blocs tronculaires, fasciculaires et de branche sont irréversi- SCLÉRODERMIE SYSTÉMIQUE
bles. Exceptionnellement, les BAV peuvent être dus à un Le pronostic redoutable des formes systémiques de la sclé-
traitement prolongé par les antimalariques de synthèse. Ils rodermie est bien connu, les atteintes viscérales étant respon-
sont irréversibles. Ils ont surtout été signalés lorsque l'on sables du décès des patient(e)s. La cause de décès la plus
utilisait la chloroquine ou la quinacrine et pas l'hydroxychlo- fréquente est la fibrose pulmonaire, qui précède en fréquence
roquine, rarement cardiotoxique. la crise rénale sclérodermique ou l'hypertension artérielle
pulmonaire. La myocardite, bien que moins fréquente que
l'atteinte respiratoire, est d'évolution redoutable. Elle peut
être isolée, associée à d'autres manifestations cardiaques
Les BAV congénitaux comme une péricardite, ou à diverses atteintes viscérales.
Description clinique : Malgré l'absence d'études épidémiolo-
Les BAV congénitaux sont rares (1/20 000 naissances). Ils giques prospectives, il semble que les atteintes cardiaques
sont observés chez les nouveau-nés de mères atteintes de surviennent chez les patients plus âgés, seraient un peu plus
lupus et porteuses de l'anticorps anti-SSA ou anti-SSB. Leur fréquents chez les noirs (qui ont souvent aussi des formes plus
présence est directement liée à l'anticorps et on peut donc les sévères de sclérodermies diffuses). Le score cutané élevé ne
observer également dans le syndrome de Gougerot-Sjögren et paraît pas être associé à l'atteinte myocardique. La prévalence
dans certaines connectivites mixtes ou indifférenciées. Le de la myocardite va de 9 à 30 % selon les séries de la
lupus maternel est le plus souvent asymptomatique. Chez littérature. Dans une importante série italienne comprenant
le nouveau-né, une cardiomyopathie fœtale peut aussi être 1012 patients, elle est mesurée à 30 %. Cette série compilait
présente et être responsable d'une mort fœtale. Après l'accou- l'ensemble des manifestations cardiaques et pas seulement
chement, le nouveau-né peut présenter des manifestations les myocardites isolées. Toutefois, il faut noter que les signes
lupiques transitoires. Le BAV est définitif et doit être appareillé. cardiaques sont souvent intriqués et que la péricardite est en
Plus tard, dans le cours de leur existence, les enfants atteints règle générale associée à une myocardite sous-jacente, diag-
de BAV congénital peuvent développer une cardiomyopathie, nostiquée ou non. D'ailleurs, dans les définitions retenues pour
probable séquelle de lésions survenues in utero. Il faut rap- la cardiomyopathie de la sclérodermie, de nombreux auteurs
peler que ces sujets ne sont alors ni porteurs d'anticorps, ni de considèrent que la péricardite en fait partie. Les manifestations
manifestations cliniques du lupus. des myocardites sont d'une part l'insuffisance cardiaque mais
Bien que la responsabilité d'un anticorps IgG anti-SS-A (Ro) aussi des troubles du rythme et/ou de la conduction. Les blocs
et/ou anti-SS-B (La) soit actuellement bien établie, la présence auriculo-ventriculaires lorsqu'ils sont considérés comme isolés
du BAV est inconstante chez les patientes porteuses de l'anti- traduisent toujours une myocardiopathie, le plus souvent
corps. La plupart d'entre elles accouchent d'enfants exempts spécifique de la sclérodermie. Les troubles rythmiques sont
de signes cardiaques et lorsque la situation se présente, le fréquents et peuvent être causes de décès. Il s'agit soit de
BAV n'est pas nécessairement présent lors de grossesses troubles auriculaires ou ventriculaires. L'électrocardiogramme
ultérieures (ou précédentes). Le risque de BAV est évalué peut aussi montrer des potentiels ventriculaires tardifs. Les
selon les études à 1 pour 20 grossesses chez les femmes troubles conductifs auriculo-ventriculaires peuvent rendre
lupiques ayant des anti-SS-A (Ro) ou à 1 à 2 p. 100. En cas de nécessaire la pose d'un stimulateur cardiaque.
premier enfant né avec un BAV, le risque de BAV lors d'une L'échographie cardiaque montre des anomalies de nature
seconde grossesse est évalué entre 1/6 et 1/2. diverse : une augmentation de la pression artérielle pulmo-
Le trouble de conduction est très précoce durant la grossesse. naire en rapport avec une hypertension artérielle pulmonaire
Les tentatives thérapeutiques (corticoïdes, immunoglobulines, (HTAP), qu'elle soit primitive ou secondaire à une pneumopa-
échanges plasmatiques) sont inefficaces. thie interstitielle. Une cardiomyopathie gauche peut aussi être
impliquée dans l'HTAP, d'où la nécessité d'explorer les patients
par un cathétérisme cardiaque mesurant les pressions droi-
tes, les résistances pulmonaires ainsi que la pression capil-
Traitement laire « bloquée ». L'échographie comme les explorations
hémodynamiques invasives mettent en évidence une dys-
La myocardite lupique est considérée comme une manifesta- fonction ventriculaire droite souvent plus marquée que
tion sévère du lupus. Elle requiert un traitement symptoma- l'atteinte ventriculaire gauche.
tique cardiovasculaire et un traitement spécifique du lupus. Cependant, tous les malades ne relèvent pas d'une explora-
La corticothérapie par voie orale à forte dose initiale, mais tion invasive par un cathétérisme cardiaque, que l'on réserve
rapidement diminuée est conseillée. Les bolus de méthylpred- à l'exploration des HTAP de mécanisme complexe ou de
nisolone n'ont d'intérêt que dans les formes aiguës de myo- causes intriquées. C'est pourquoi l'imagerie par résonance
cardite. Un traitement immunosuppresseur est également magnétique (IRM) est devenue l'exploration la plus fréquem-
proposé par le cyclophosphamide par voie intraveineuse, en ment prescrite chez les patients présentant ou suspects de
suivant le schéma du protocole EUROLUPUS (500 mg toutes cardiomyopathie. Un œdème myocardique peut être observé,
les deux semaines pendant 3 mois). Le rituximab comme les de même que des signes de fibrose. Leur fréquence est de
autres biomédicaments n'ont pas fait la preuve de leur effica- 10 à 60 % selon les séries de la littérature. Celles-ci sont
cité. L'hydroxychloroquine complète l'arsenal thérapeutique. hétérogènes, ce qui explique ces chiffres disparates et donc
En cas de BAV fœtal, les traitements sont le plus souvent peu fiables.
inefficaces. Après la naissance, outre la pose d'un stimulateur La myocardite s'observe plus fréquemment dans la scléroder-
cardiaque définitif, une surveillance de la fonction cardiaque mie systémique diffuse que dans la forme limitée, environ deux
ultérieure est conseillée.

8
Myocardites des maladies systémiques
Dossier / Mise au point

fois plus dans certaines cohortes (23 % vs 12 %). Dans cette multiples. L'évolution est favorable sous traitement par
maladie à large prédominance féminine, on note que les immunoglobulines intraveineuses. La mortalité est due à
atteintes cardiaques concernent une proportion d'hommes une insuffisance cardiaque ou à d'autres complications vas-
plus importante. Le profil immunologique montre une fréquence culaires (nécrose myocardique). La nature de l'atteinte car-
plus élevée des anticorps anti-topoisomérase 1 (anti-Scl70), diaque est ischémique. Elles surviennent le plus souvent au
ce qui reflète en fait la plus forte représentation de la forme cours des premiers mois de la maladie. Habituellement, les
diffuse de sclérodermie. Aucun marqueur immunologique complications cardiaques tardives sont rares mais il est recom-
associé à la forme cardiaque ne se dégage de l'analyse des mandé de surveiller les patients à long terme, même guéris
grandes séries. afin de détecter une éventuelle maladie athéromateuse qui
Le pronostic de la myocardite de la sclérodermie est extrê- aurait pu être favorisée par l'atteinte vasculaire endothéliale.
mement péjoratif avec une mortalité élevée, soulignée dans Une majoration de la fréquence tardive de survenue d'une
toutes les cohortes publiées. Parmi les causes de mortalité insuffisance coronaire ou cardiaque doit être surveillée et
précoce d'une cohorte australienne, la cardiomyopathie est prévenue.
identifiée comme une cause spécifique du décès dans 15 %
des cas. Elle est de 36 % des cas dans une cohorte italienne. La périartérite noueuse
Sur le plan thérapeutique, il y a peu à dire car les traitements
de fond de la sclérodermie sont peu efficaces, y compris les L'atteinte myocardique est le plus souvent la conséquence
immunosuppresseurs qui sont cependant proposés systéma- d'une coronarite. La fréquence de l'atteinte coronaire est moin-
tiquement en cas d'atteinte cardiaque. Les fortes doses de dre que dans la maladie de Kawasaki mais elle peut avoir les
corticoïdes sont contre-indiquées dans la sclérodermie. La mêmes conséquences. L'examen des coronaires montre une
greffe de cellules souches n'est pas recommandée car la alternance de sténoses et de dilatations, localisées ou le plus
cardiomyopathie est une contre-indication à ce traitement. souvent, réparties de façon diffuse. Une coronarite nodulaire
avait déjà été observée par Küssmaul et Maier dans leur
description princeps. On a montré, au travers de séries autop-
siques, que les atteintes coronaires étaient sous-estimées et
VASCULARITES seraient d'environ 40 % des cas. Cependant, ces constata-
tions sont anciennes, antérieures à la prescription systéma-
La fréquence des atteintes cardiovasculaires est variable tique des corticoïdes et parfois des immunosuppresseurs.
selon les vascularites et elles sont rarement au premier plan Depuis « l'ère thérapeutique », les lésions des gros troncs
des manifestations cliniques. Les mécanismes des atteintes coronaires sont devenues exceptionnelles, d'autant moins
vasculaires varient selon la maladie en cause. fréquente que l'on ne fait pas de coronarographie systéma-
tique. Les coronarographies n'ont été faites que chez des
Type de vascularite malades ayant des douleurs évocatrices d'angor (< 1 % des
cas), ce qui peut sous-estimer la réelle fréquence des atteintes
Selon la vascularite en cause, le calibre et la nature des coronaires angiographiquement visibles. Il est cependant vrai-
vaisseaux atteints varie. La périartérite noueuse (PAN) et la semblable que les atteintes plus distales sont plus fréquentes,
maladie de Kawasaki sont des vascularites nécrosantes qui en rapport avec la taille des vaisseaux habituellement concer-
touchent les artères de moyen calibre mais des artères de petit nés par les vascularites : vaisseaux de moyen calibre au cours
calibre, des artérioles et des capillaires sont intéressés, de de la PAN (comprenant donc les vaisseaux coronaires), artè-
même que les capillaires et les veinules dans la granuloma- res de petit calibre et artérioles au cours vascularites asso-
tose éosinophilique avec polyangéite (Churg et Strauss) ciées aux ANCA. L'évolution des lésions angiographiques
(GEPA), la polyangéïte microscopique (PAM), la granuloma- peut être appréciée sur les résultats connus pour d'autres
tose avec polyangéite (Wegener) (GPA). Sauf exception, les vaisseaux, rénaux ou digestifs. Cette évolution radiologique
artérites non nécrosantes et notamment les artérites à cellules authentifie l'évolution vers l'endartérite fibreuse. Les modifica-
géantes n'ont pas d'atteinte myocardique. Nous ne traiterons tions électrocardiographiques observées chez des malades
pas ici des atteintes cardiaques de la GPA qui ne sont pas asymptomatiques sont plus fréquentes. Elles n'ont rien de
différentes de celles des autres vascularites associées aux spécifique. Très rarement, l'atteinte coronaire se traduit par
ANCA, si ce n'est leur fréquence exceptionnelle. une mort subite due à un probable trouble du rythme satellite
d'une cardiopathie ischémique sous jacente. Un hémopéri-
La maladie de Kawasaki carde par rupture d'un anévrysme coronaire survient excep-
Décrite au Japon par Kawasaki, des milliers d'observations ont tionnellement. Si l'évolution sous traitement se fait vers la
été rapportées de par le monde. C'est une maladie du nour- cicatrisation des lésions et la disparition des anomalies radio-
risson et du jeune enfant (moyenne d'âge 1 an) qui atteint logiques, la survenue d'une coronarite tardive peut survenir et
parfois l'adulte. Le pronostic global est bon (2 % de mortalité), est parfois le fait d'une athéromatose accélérée favorisée par
malgré des manifestations cardiaques fréquentes. Son étiolo- la prise prolongée de corticoïdes.
gie est inconnue. Dans un contexte fébrile, apparaissent une
La granulomatose éosinophilique avec
conjonctivite, une angine, une pharyngite, un exanthème du
tronc, un œdème des mains et des pieds avec érythème de la polyangéite (Churg-Strauss) (GEPA)
paume des mains et de la plante des pieds et des adénopa- Cette maladie est caractérisée sur le plan histologique par une
thies cervicales ne suppurant pas. Une insuffisance cardiaque, vascularite nécrosante des vaisseaux de petit calibre avec une
une diarrhée, une protéinurie, une méningite et une hépatite granulomatose péri et extravasculaire, souvent très impor-
peuvent survenir. La coronarographie montre la grande fré- tante. La maladie fait partie des vascularites associée aux
quence des anévrysmes des artères coronaires, parfois anticorps anti-cytoplasme des polynucléaires neutrophiles

9
Dossier / Mise au point L. Guillevin

(ANCA), même si ceux-ci ne sont présents que dans moins de d'évaluation « standards » (échographie, électrocardio-
30 % des cas, avec une spécificité anti-MPO. gramme, paramètres biologiques). La réalisation systéma-
tique d'une IRM cardiaque a montré plus fréquemment
qu'attendu une diminution de la fraction d'éjection, des hyper-
La présence d'ANCA se manifeste par une fluores- signaux myocardiques et plus rarement une hypokinésie seg-
cence cytoplasmique diffuse (c-ANCA) ou péri nuclé- mentaire du myocarde.
aire (p-ANCA). Le pronostic de la GEPA tient essentiellement à l'atteinte
La fluorescence diffuse correspond aux ANCA dirigés cardiaque. Si la cardiomyopathie n'est pas la plus fréquente
contre la protéinase 3 (PR3). des manifestations, c'est la première cause de décès. Dans
La fluorescence périnucléaire correspond à des anti- notre série de 348 malades, la survie des patients avec une
corps dirigés contre la myéloperoxydase (MPO). atteinte cardiaque était de 78,2 % vs 91,6 % en l'absence
90 % des malades atteints de formes systémiques de d'atteinte cardiaque.
GPA ont des ANCA alors que seulement 50 à 75 %
des formes localisées en présentent. Cet anticorps Pronostic et traitement
est très spécifique de la maladie, même s'il n'est pas Le pronostic des vascularites systémiques est conditionné,
pathognomonique. entre autres, par la présence d'une atteinte cardiaque et ceci
Les p-ANCA (entre autres anti-MPO) sont observés est particulièrement vrai pour la GEPA. Les décès peuvent être
dans certaines vascularites comme la PAM (50 %), la conséquence d'une insuffisance cardiaque survenant au
la GEPA (< 30 % des cas). On les retrouve aussi dans cours de la phase aiguë d'une vascularite non contrôlée par
certaines infections, la rectocolite hémorragique, la le traitement, par un trouble du rythme ou par une par une
maladie de Crohn, des angéites non nécrosantes. insuffisance cardiaque séquellaire et réfractaire aux traite-
ments vasodilatateurs, tonicardiaques et à la déplétion.
Les corticoïdes peuvent aussi aggraver une insuffisance car-
L'atteinte myocardique est la conséquence de l'atteinte des diaque préexistante par le biais de la rétention hydrosodée mais
vaisseaux coronaires ou d'une myocardiopathie spécifique. Le aussi à cause de l'accélération de lésions d'athéromatose.
mécanisme le plus probable de l'insuffisance cardiaque est L'atteinte cardiaque fait partie du Five Factor Score (FFS), score
une ischémie myocardique par une vascularite des petits permettant de prédire la mortalité des vascularites, au moment
vaisseaux (artérioles, capillaires et veinules). La cardiomyo- de leur diagnostic. Les paramètres qui le composent sont les
pathie spécifique de la vascularite s'observe dans 28 % des suivants : créatininémie supérieure à 150 mmol/L, cardiomyopa-
cas. L'insuffisance cardiaque est souvent la conséquence de thie spécifique de la vascularite, manifestations gastro-intestinale
l'atteinte coronaire mais peut aussi être la conséquence d'une sévères et âge supérieur à 65 ans. Le 5e point est l'absence
hypertension artérielle maligne ou sévère d'origine rénale. Elle d'atteinte ORL. Lorsque le FFS est à 0 la mortalité à cinq ans est
est le plus souvent gauche mais peut être globale. Si des de 12 %, lorsque le FFS est égal à deux ou plus, la mortalité se
atteintes cardiaques peuvent se rencontrer dans toutes les situe autour de 50 %.
vascularites associées aux ANCA, c'est au cours de la GEPA Nous n'aborderons pas ici le traitement symptomatique des
(Churg-Strauss) qu'on les observe le plus fréquemment. manifestations cardiaques des vascularites car il ne se distin-
L'insuffisance cardiaque peut être sévère, inaugurale mais gue pas des thérapeutiques prescrites dans d'autres étiologies.
elle révèle rarement l'angéite. À l'inverse, elle peut être parfois Nous ne détaillerons pas le traitement général de la vascularite
tardive et faire partir des séquelles de la maladie. La fréquence mais insisterons sur une approche thérapeutique qui doit tou-
de la cardiomyopathie dans la GEPA est de 16 % dans notre jours comporter une corticothérapie et un immunosuppresseur,
série de 348 patients. ou le rituximab dans la GPA et la PAM. En cas de cardiopathie
S'il n'y a pas de particularité clinique de la cardiomyopathie de réfractaire au traitement symptomatique, persistant alors que la
la GEPA, sa présence classe la maladie dans un phénotype maladie de fond a été mise en rémission complète, une trans-
particulier. En effet, on décrit maintenant deux phénotypes de plantation cardiaque n'est pas contre-indiquée et peut être
la GEPA, selon la présence ou l'absence d'ANCA. Les patients proposée.
sans ANCA ont une fréquence plus marquée de manifesta-
tions cardiaques, dont la cardiomyopathie (19 %), que les
malades avec ANCA (8 %). Les études cherchant à isoler LA SARCOÏDOSE
des « clusters » cliniques, ainsi qu'une étude génétique inter-
nationale confirment les deux phénotypes de la GEPA. Ceci Cette maladie systémique protéiforme n'est, a priori, pas une
traduit aussi des mécanismes pathogéniques distincts selon maladie auto-immune dans la mesure où aucun auto-anticorps
qu'il y ait ou non une atteinte cardiaque. L'absence d'ANCA n'a été à ce jour découvert. L'incidence est estimée ente 3 et
chez les patients avec cardiomyopathie suggère la responsa- 10 pour 100 000. Un pic d'incidence est noté entre 25 et
bilité de l'éosinophile dont on connaît la toxicité vasculaire et 45 ans. La maladie touche les deux sexes. L'atteinte cardiaque
de mécanismes lymphocytaires. À l'inverse, dans les formes est présente dans 2–3 % des cas, mais elle est de 20 à 30 %
sans ANCA, on n'impliquerait plutôt une toxicité directe des dans les études autopsiques.
ANCA, associés à des mécanismes cellulaires. Cette hétérogé- L'atteinte cardiaque touche principalement le ventricule gauche
néité phénotypique de la GEPA est aujourd'hui corroborée par mais elle peut atteindre aussi le ventricule droit les oreillettes et
des études génétiques qui montrent des polymorphismes géné- le péricarde (que nous n'aborderons pas).
tiques distincts selon le phénotype clinique ci-dessus décrit. Le diagnostic de sarcoïdose cardiaque peut être fait devant
La fréquence des atteintes cardiaques est probable- une insuffisance cardiaque, la découverte systématique d'un
ment sous évaluée par les investigations de dépistage et trouble du rythme ou de la conduction ou plus rarement devant

10
Myocardites des maladies systémiques
Dossier / Mise au point

un trouble rythmique aigu qui peut se compliquer du décès du L'évolution de l'atteinte cardiaque de la sarcoïdose est meil-
patient. leure qu'elle ne fut grâce au traitement médical corticoïde et
Nous ne détaillerons pas les manifestations cliniques de la immunosuppresseur et au traitement symptomatique des
myocardite qui sont superposables à celles qui ont été décrites signes cliniques cardiaques, médicamenteux ou non. La mise
dans les chapitres précédents. Nous insisterons sur l'intérêt en place d'un stimulateur cardiaque (en cas de BAV) ou d'un
majeur qu'il y a à dépister une myocardite, soit devant un élément défibrillateur implantable (en cas de troubles du rythme ven-
clinique considéré comme banal (malaise, syncope) ou devant triculaires) a réduit le risque de mort subite.
une anomalie de l'électrocardiogramme, quelle qu'elle soit. A
fortiori, les explorations complémentaires seront faites chez les
malades symptomatiques. L'échographie cardiaque peut mon-
trer des anomalies segmentaires de la contractilité et/ou de En pratique
l'épaisseur de la paroi ventriculaire gauche, notamment au
niveau de la partie basale du septum. L'enregistrement électro- L'atteinte cardiaque engage le pronostic et doit être
cardiographique des 24 heures peut détecter surtout des trou- traitée rapidement.
bles du rythme et plus rarement des troubles de la conduction
transitoires. L'IRM est un examen très sensible que nous recom-
mandons chez tous les patients chez qui une atteinte cardiaque
est suspectée. Elle peut montrer des hypersignaux avec un
rehaussement tardif sous gadolinium, sous épicardique, focalisé
ou multifocal, soit des signes évoquant des cicatrices de pous-
sées antérieures. La scintigraphie 18FFDG-PET est très sensible CONCLUSION
pour détecter les lésions myocardiques actives. La biopsie myo-
cardique est rarement faite car le diagnostic de sarcoïdose a été La myocardite est une manifestation sévère de nombreuses
porté par d'autres moyens. Si elle est faite, elle montre de façon maladies auto-immunes et systémiques. Elle est heureuse-
inconstante un granulome. On porte donc le diagnostic d'atteinte ment peu fréquente et traitée rapidement (traitement sympto-
cardiaque de la sarcoïdose lorsque des signes cardiaques cli- matique et de fond de la maladie auto-immune) elle peut
niques sont présents, ou des anomalies électrocardiographiques régresser avec plus ou moins de séquelles. Cette atteinte
chez un patient déjà diagnostiqué, avec le plus souvent une cardiaque reste toutefois responsable d'une mortalité non
confirmation histologique extracardiaque. L'atteinte cardiaque négligeable.
est la deuxième cause de décès après l'atteinte respiratoire et
l'on estime qu'une cause cardiaque pourrait rendre compte Déclaration de liens d'intérêts
d'environ 15 à 25 % des décès par sarcoïdose. L'auteur déclare ne pas avoir de liens d'intérêts.

11
Dossier / Fiche technique Arch Mal Coeur Vaiss Prat 2017;2017:12–15

Imagerie par résonance magnétique


dans les myocardites
Magnetic resonance imaging of myocarditis

P. Guéret a a
Service de cardiologie, hôpital Amboise-Paré,
P. Guéret
B. Dubourg b hôpitaux universitaires Paris Île-de-France Ouest, 9,
avenue Charles-de-Gaulle, 92104 Boulogne, France
b
Service d'imagerie, hôpital Charles-Nicolle, centre
hospitalier universitaire de Rouen, 43, rue Gambetta,
76000 Rouen, France

Disponible en ligne sur ScienceDirect le 17


novembre 2017

a présentation clinique des myocardites spécifique, manque de résolution spatiale et


L est très hétérogène, allant des formes
asymptomatiques aux formes suraiguës fulmi-
reste irradiante.
L'IRM est donc clairement supérieure dans
nantes, en passant par les tableaux subaigus cette pathologie [1,2] car elle fournit des
ou chroniques. Le groupe d'experts de la informations sur la fonction ventriculaire et
Société européenne de cardiologie insiste sur la caractérisation tissulaire myocardique
sur l'importance de la biopsie myocardique qui sont très contributives au diagnostic dès
pour assurer un diagnostic de certitude [1], l'apparition des signes cliniques. Les éléments
reléguant au second plan les méthodes d'ima- suivants sont étudiés :
gerie. Mais, en pratique, il faut reconnaître que  la fonction ventriculaire gauche est évaluée
la biopsie est rarement effectuée, d'autant en ciné-IRM en utilisant les séquences dites
qu'elle n'est pas dénuée de risques. Dans Balanced Steady State Free Precession
notre pays, la démarche diagnostique repose (bSSFP) qui permettent le calcul des volu-
essentiellement sur les examens non invasifs mes ventriculaires, de la fraction d'éjection
d'imagerie cardiaque. et de la masse myocardique avec une
La présence d'infiltrats inflammatoires myo- grande précision due à l'excellente résolu-
cardiques avec nécrose et/ou altération des tion en contraste et à la large couverture
myocytes adjacents qui définie histologique- volumique. Les altérations sont plus ou
ment la myocardite explique les altérations de moins importantes en fonction de l'étendue
la fonction myocardique que l'on observe avec de l'inflammation et de son retentissement
les méthodes d'imagerie. fonctionnel et concernent la fonction globale
L'échocardiographie est souvent l'examen de et régionale (hypo ou akinésie). Le ventri-
première ligne mais les anomalies observées cule droit est plus rarement atteint. Dans le
(dilatation ventriculaire gauche plus ou moins même temps, on recherche un épanche-
sévère, hypo ou akinésie segmentaire), même ment péricardique (30 à 60 % des cas selon
si elles sont complétées par les méthodes de les séries rapportées) dont on apprécie la
post-traitement donnant accès aux indices de localisation, l'abondance et la tolérance.
déformation myocardique (« strain myocar- Mais ces altérations fonctionnelles ne sont
dique ») ne sont pas spécifiques. Cet examen pas spécifiques de la myocardite et doivent
reste utile pour la mise en évidence d'un épan- donc être obligatoirement complétées par la
chement péricardique associé, pour calculer recherche d'anomalies morphologiques et Auteur correspondant :
la pression systolique pulmonaire, pour éva- par la caractérisation tissulaire ; P. Guéret,
luer la fonction diastolique et elle contribue au  les anomalies morphologiques peuvent Service de cardiologie, hôpital
diagnostic différentiel en éliminant une valvu- revêtir la forme d'une augmentation transi- Amboise-Paré, hôpitaux
lopathie par exemple. La scintigraphie myo- toire et localisée de l'épaisseur pariétale universitaires Paris Île-de-France
cardique, même en utilisant des marqueurs ventriculaire secondaire à l'œdème myocar- Ouest, 9, avenue Charles-de-
dique (Fig. 1 et 2), conséquence de Gaulle, 92104 Boulogne, France.
comme les anticorps anti-myosines marqués Adresse e-mail :
à l'Indium 111 ou le Galium 67 n'est pas très l'augmentation de la perméabilité de la pascalgueret46@gmail.com

https://doi.org/10.1016/j.amcp.2017.10.004
© 2017 Publié par Elsevier Masson SAS.
12
Imagerie par résonance magnétique dans les myocardites
Dossier / Fiche technique

Figure 1. Myocardite aiguë antérolatérale. Séquences Cine bSSFP en petit axe basal en mésosystole, avant (A) et quelques minutes après
(B) injection de gadolinium, montrant une prise de contraste précoce intra myocardique antéro-latéro-médiane. C. Séquence de T2 mapping
en incidence 4 cavités montrant un œdème myocardique de la paroi latérale (T2 latéral = 64 ms vs T2 septal = 52 ms). D. Séquence de
rehaussement tardif en 4 cavités montrant un aspect tardif nodulaire intramyocardique dans la paroi latérale.

Figure 2. Myocardite aiguë étendue sévère. Séquence de T2 mapping en petit axe médio-ventriculaire montrant un œdème prédominant en
latéral (T2 = 67 ms). Séquence de rehaussement tardif dans les incidences petit axe médian (B) et 4 cavités (C) montrant une prise de
contraste sous-épicardique diffuse prédominant en latéral. Ces anomalies s'accompagnent d'une dysfonction ventriculaire gauche
(FEVG = 45 %).

membrane cellulaire secondaire à l'inflam-  hyperémie et fuite capillaire : la vasodilatation localisée fait
mation. Cet œdème est classiquement partie intégrante du processus d'inflammation. L'augmenta-
visualisé sur des séquences pondérées tion du volume sanguin dans la zone pathologique conduit
T2 mais des séquences quantitatives (car- à une accumulation du gadolinium au cours de la phase
tographies ou mapping) qui permettent de vasculaire précoce de la cinétique de cet agent de contraste.
mesurer directement le T1 ou le T2 contri- L'hyperémie peut être visualisée sur les séquences de per-
buent à différentier les formes actives et fusion en premier passage, néanmoins la faible résolution
chroniques de myocardite [3] ; spatiale de ces séquences qui privilégient la résolution

13
Dossier / Fiche technique P. Guéret, B. Dubourg

Figure 3. Myocardite aiguë septale et contrôle à trois mois. Séquences de T2 mapping (A et C) et de rehaussement tardif (B et D) dans
l'incidence petit axe basal. Myocardite aiguë septale avec œdème septal (T2 = 72 ms) (A) associé à une prise contraste sous-épicardique
(B). Contrôle trois mois plus tard montrant la régression de l'œdème (T2 = 48 ms) (C) et de la prise de contraste septale (D).

Tableau I. Éléments de diagnostic de suspicion de myocardite.


Symptômes évocateurs récents ou + Signes récents de souffrance + Etiologie virale suspectée
persistants myocardique
Dyspnée Dysfonction ventriculaire en imagerie Histoire récente d'infection virale ou
myocardite récente
Ou orthopnée Ou anomalies ECG de la repolaristion, Ou absence de facteur de risque vasculaire
récentes ou persistantes Ou âge inférieur à 35 ans
Ou palpitations Ou élévation de Troponine Ou symptômes non expliqués par une maladie
coronaire documentée
Ou malaise à l'effort Ou tests de détection d'ischémie myocardique
normaux
Ou douleur thoracique

temporelle fait que cette anomalie est rarement visualisée. dire ne correspondant pas à un territoire vasculaire coro-
En revanche, le rehaussement précoce (dès les premières naire) est recherchée. Elle est mieux visualisée en proto- ou
minutes après injection) représente un fort argument diag- mésosystole ;
nostique. Historiquement, sa recherche faisait appel aux  rehaussement tardif : Le rehaussement tardif du gadolinium
séquences fast spin echo en T1 ; cependant, elle est main- est traditionnellement associé à des altérations cellulaires
tenant très souvent analysée sur des séquences Cine clas- irréversibles (nécrose et fibrose). Cependant, il convient de
siques bSSFP réalisées dès les premières minutes après tempérer cette affirmation à la phase aiguë des myocardites.
injection de gadolinium. Une prise de contraste sous-épi- En effet, il est fréquent d'observer dans cette pathologie la
cardique et/ou intramyocardique non systématisée (c'est-à- disparition des prises de contraste initiales associée à une

14
Imagerie par résonance magnétique dans les myocardites
Dossier / Fiche technique

récupération fonctionnelle ad integrum lors des contrôles suffisamment d'éléments diagnostiques de suspicion sont
IRM effectués quelques mois plus tard (Fig. 3). La localisa- réunis et uniquement chez des patients symptomatiques
tion intra myocardique du rehaussement tardif, médioparié- (Tableau I). De nouvelles séquences d'IRM sont en cours
tal ou sous-épicardique, est très évocatrice du diagnostic et de développement et de validation clinique afin d'améliorer
permet de différencier la myocardite de l'ischémie, situation encore la performance diagnostique globale de cet examen.
dans laquelle le rehaussement tardif est localisé dans les
couches sous-endocardiques et dans une topographie cor- Déclaration de liens d'intérêts
respondant à un territoire artériel coronaire. L'identification Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d'intérêts.
et la localisation de ces prises de contraste peuvent même
dans certains cas guider la biopsie myocardique lorsqu'elle
s'avère nécessaire. De plus, l'étendue de ce rehaussement
tardif revêt une valeur pronostique car elle est corrélée au
remodelage ventriculaire gauche. Mais il faut savoir que la RÉFÉRENCES
sensibilité diagnostique de ce critère est en grande partie
liée à l'étendue des altérations histologiques sous-jacentes [1] Caforio ALP, Pankuweit S, Arbustini E, et al. Current state of
dans la paroi myocardique. knowledge on aetiology, diagnosis, management and therapy
À la phase chronique, les prises de contraste tardives peuvent of myocarditis: a position statement of the European Society of
correspondre à des foyers de fibrose (potentiellement aryth- Cardiology Working Group on Myocardial and Pericardial Disea-
mogènes) mais également à une forme chronique active de la ses. Eur Heart J 2013;34:2636–48.
maladie. Les séquences étudiant l'œdème et notamment les [2] Friedrich MG, Sechtem U, Schulz-Menger J, et al. Cardiovas-
séquences de mapping permettent de mieux différencier ces cular magnetic resonance in myocarditis: a JACC white paper.
deux entités. J Am Coll Cardiol 2009;53:1475–87.
En conclusion, l'IRM cardiaque est actuellement la méthode [3] Lurz P, Luecke C, Eitel I, et al. Comprehensive cardiac magnetic
diagnostique la plus précise et la plus fiable en cas de resonance imaging in patients with suspected myocarditis: the
myocardite. Cependant, elle ne doit être envisagée que si MyoRacer-trial. J Am Coll Cardiol 2016;67:1800–11.

15
Dossier Arch Mal Coeur Vaiss Prat 2017;2017:16–20

Physiopathologie cardiovasculaire

Mise au point sur la


physiopathologie des myocardites
virales
Update on viral myocarditis physiopathogenesis Y. N'Guyen

Y. N'Guyen Laboratoire de virologie, EA 4684 CardioVir,


L. Andreoletti SFR CAP-Santé, UFR médecine de Reims,
51, rue Cognacq-Jay, 51100 Reims, France

Disponible en ligne sur ScienceDirect le 4 novembre


2017

es infections virales restent dans les pays phase de myocardite aiguë. Cette phase
L développés la principale étiologie des
myocardites, dont la présentation clinique
cliniquement asymptomatique peut être le
fait :
peut aller des formes asymptomatiques jus-  de l'absence de clairance virale et de la
qu'à des tableaux d'insuffisance cardiaque persistance d'une activité protéasique
aiguë et d'arythmie ventriculaire à l'origine d'origine virale entraînant une dégrada-
de morts subites cardiaques en phase aiguë tion du cytosquelette et de la fonction
et jusqu'à la constitution d'une cardiomyopa- contractile cardiomyocytaire,
thie dilatée en phase chronique [1].  de la genèse d'une auto-immunité dirigée
contre des antigènes cardiaques libérés
pendant la phase de myocardite par
mimétisme moléculaire. Dans les deux
PHYSIOPATHOLOGIE COMMUNE cas, on aboutit progressivement à un rem-
AUX MYOCARDITES VIRALES placement du tissu myocardique fonction-
nel par un tissu fibreux cicatriciel ;
On distingue classiquement trois phases suc-  la cardiomyopathie dilatée : ce remodelage
cessives dans l'évolution d'une myocardite [1] : cardiaque aboutit à la constitution d'une car-
 la myocardite aiguë : destruction cardiomyo- diomyopathie dilatée, caractérisée par une
cytaire aiguë liée d'abord à l'effet cytopa- augmentation du diamètre télédiastolique
thogène des virus en cause avec altération rapporté à la surface corporelle. Bien que
de l'architecture cardiaque favorisant la dif- ce phénotype fréquent soit commun à de
fusion des particules virales infectieuses nombreuses autres étiologies [2], on estime
vers d'autres cardiomyocytes sains voisins que 10 % des cardiomyopathies dilatées
mais aussi secondairement à la réaction sont la conséquence d'une myocardite, anté-
inflammatoire de l'hôte. En fonction de rieurement connue ou non [3]. Une cardio-
l'étendue des lésions, peut survenir une myopathie dilatée peut donc être le stade
insuffisance cardiaque aiguë avec dilatation terminal d'une myocardite et seules des
télédiastolique et des troubles du rythme lié investigations anatomopathologiques et viro-
à l'effet bathmotrope positif favorisé par logiques sur biopsie endomyocardique ou la
l'infiltration de cellules réactionnelles. recherche d'anticorps anti-cellules cardia-
L'immunité innée et adaptative peuvent ques peuvent confirmer l'éventualité d'une
empêcher la survenue d'une telle phase myocardite et son mécanisme et ainsi
(cf. infra) tout comme elles peuvent entraî- ouvrir l'opportunité de traitements spécifi-
ner en cas de réponse adaptée la résolution ques antiviraux ou immunosuppresseurs Auteur correspondant :
de la myocardite aiguë avec restitution ad en plus du traitement symptomatique de L. Andreoletti,
integrum sans évolution vers les phases l'insuffisance cardiaque. Lorsqu'une biopsie Laboratoire de virologie, EA 4684
ultérieures de myocardite chronique et de endomyocardique est réalisée dans le CardioVir, SFR CAP-Santé, UFR
cardiomyopathie dilatée ; cadre d'un scénario où le rapport bénéfice/ médecine de Reims, 51, rue
 la myocardite chronique : persistance d'une risque est favorable [4], la présence d'inflam- Cognacq-Jay, 51100 Reims,
inflammation myocardique à bas bruit en mation myocardique autrefois selon les France.
l'absence de guérison spontanée après la critères de Dallas et maintenant détectée Adresse e-mail :
landreoletti@chu-reims.fr

https://doi.org/10.1016/j.amcp.2017.10.005
© 2017 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
16
Mise au point sur la physiopathologie des myocardites
virales
Dossier
Physiopathologie cardiovasculaire

par immunohistochimie permet d'accréditer l'hypothèse base fondamentale de notre compréhension physiopatholo-
d'une myocardite méconnue tandis que la détection de gique des myocardites chez l'Homme [1]. En effet, l'inoculation
génomes viraux sur cette même biopsie endomyocardique intra-péritonale d'entérovirus et notamment de CVB chez la
et la recherche d'anticorps anti-cellules cardiaques dans le souris conduit au développement d'une myocardite aiguë qui,
sérum permettent de confirmer un mécanisme viral ou auto- en l'absence de décès de l'animal, dure 14 jours avant que l'on
immun, seuls ou en association dans cette myocardite. ne puisse plus détecter à partir des prélèvements cardiaques
Actuellement, en présence d'inflammation isolée sur biopsie de l'animal, de particules virales par recherche d'effet cytopa-
endomyocardique sans détection de génomes viraux ou thogène sur culture cellulaire. Cette absence de détection par
d'anticorps anti-cellules cardiaques, le traitement proposé culture correspond soit à une clairance virale avec absence de
est orienté dans une logique immunosuppressive [1]. détection de CVB par polymerase chain reaction (PCR) soit
à une persistance virale avec PCR CVB positive même si la
culture virale ne montre plus d'effet cytopathogène [5]. La
AGENTS VIRAUX RESPONSABLES DE propension des souris à réaliser une clairance virale dépend
MYOCARDITE du fond génétique de la souris (moindre en cas de fond
génétique correspondant à une immunodépression), de la
Les entérovirus humains – et plus spécifiquement les virus souche virale et de son inoculum. Les principaux évènements
Coxsackie B (CVB) – le Parvovirus B19 (PVB19), le virus survenant durant une myocardite à CVB de la phase aiguë
Human Herpes Virus 6 (HHV-6) et les adénovirus, sont les jusqu'au stade de CMD sont résumés ci-après et au sein de la
agents viraux les plus fréquemment impliqués dans les cas Fig. 1.
documentés de myocardite virale aiguë de l'enfant et de l'adulte Après virémie suite à une pénétration dans l'organisme par
jeune immunocompétent de moins de 35 ans. HSV-1 (Herpes voie respiratoire ou oro-fécale, des protéines de capside du
simplex virus 1), les myxovirus et paramyxovirus – incluant le CVB (qui sont des virus non enveloppés avec capside icosaé-
virus respiratoire syncytial – les virus influenza et para- drique) se fixent sur les cardiomyocytes préférentiellement
influenza, l'Epstein Barr virus ou le cytomégalovirus (CMV) grâce au récepteur commun aux adénovirus : Coxsackie Ade-
ont également été associés à des tableaux de myocardite novirus receptor (CAR). Ce récepteur appartenant à la super-
[1]. Il est intéressant de noter que l'immunité innée exerce famille des immunoglobulines est exprimé à la jonction serrée
vraisemblablement un rôle protecteur notable contre ces virus des cardiomyocytes. Son accessibilité y est majorée en cas
communs qu'une immense majorité de la population rencontre de myocardite et l'expression de CAR est augmentée en
dans sa vie alors que seule une petite partie de la population cas de cardiomyopathie dilatée. L'autre récepteur des CVB
présentera une myocardite symptomatique cliniquement [1]. est le récepteur decay accelerating factor (DAF), inhibiteur
La fréquence de détection des différents génomes viraux est de la convertase de la fraction C3 du complément
illustrée dans le Tableau I. (C3 convertase). Après pénétration dans le cardiomyocyte,
l'ARN du CVB va se comporter comme un ARN messager et
des protéines virales dont les protéases 2A et 3C vont être
PHYSIOPATHOLOGIE DES MYOCARDITES traduites, on parle d'ARN viral positif. Ces protéases virales
À ENTÉROVIRUS vont entraîner le clivage de nombreuses protéines cellulaires :
protéines du cytosquelette comme la dystrophine, facteurs
Les données concernant la physiopathologie des myocardites d'initiation de la transcription, ainsi que des protéines impli-
à entérovirus sont issues de modèles animaux et constituent la quées dans la réponse cellulaire à l'interféron ou la régulation
de l'apoptose. Cela aboutit à une contractilité réduite du car-
diomyocyte par découplage dépolarisation-contraction, à une
production d'ARN viral complémentaire non traduit (ARN
Tableau I. Fréquence de détection virale par biologie négatif) qui servira de matrice à la genèse de nombreux autres
moléculaire dans des échantillons de tissu cardiaque brins d'ARN positifs permettant eux même la production de
provenant de patients atteints de myocardites aiguës nouvelles particules virales pouvant infecter des cellules myo-
ou de cardiomyopathies dilatées. cardiques voisines (cluster). L'infection se termine par l'apop-
tose du cardiomyocyte infecté suite à l'activation des caspases
Virus Myocardite Cardiomyopathie cellulaires par les protéases virales. Cette infection initiale
aiguë dilatée entraîne une mise en route des acteurs de l'immunité innée
Entérovirus 14–33 % 8–35 % comme les macrophages résidents cardiaques qui sont de
Parvovirus B19 < 1–37 % 51 % polarité tant M1 que M2 (cf. infra) et des récepteurs cellulaires
ubiquitaires reconnaissant des motifs moléculaires associés
Human Herpes Virus 6 11 % 6–22 %
à des pathogènes comme les toll like récepteurs 3, 4,7 et 8 ou
Adénovirus 8,1–23 % 2–12 % par des hélicases à ARN (RIG-1). Tout ceci aboutit à la sécré-
Cytomegalovirusa 3% 0,8 % tion de cytokines pro inflammatoires permettant d'attirer
Epstein Barr Virusa <1 % 2% davantage de cellules de l'immunité innée (monocytes, cellu-
les natural killer (NK) et polynucléaires neutrophiles) qui sont
Herpes Simplex Virusa <1 % ND
également responsables d'une destruction de cardiomyocytes
Virus Influenzaa < 1–2 % ND et d'une diminution de la contractilité cardiaque au même titre
ND : non disponible. que la mise en place d'une réponse immunitaire adaptative au
a
Cause rare chez l'immunocompétent ; les prévalences indiquées sont celles travers de la présentation d'antigènes viraux ou cellulaires
retrouvées surtout chez des patients transplantés d'organes solides. démasqués durant la myocardite grâce aux cellules dendriti-
ques issues des macrophages et aux cellules présentatrices

17
Dossier Y. N'Guyen, L. Andreoletti

Physiopathologie cardiovasculaire

Figure 1. Physiopathologie des myocardites à entérovirus (EV ; représentés par des icosaèdres bleus). CAR/DAF : Coxsackie adenovirus
receptor ou decay accelerating factor ; P2A : protéase 2A (représentée par des carrés verts au sein des cardiomyocytes en forme de
losange) ; Ag C : antigènes cardiaques démasqués durant la myocardite et représentés par des triangles roses ou des points noirs. Les
cytokines sont représentées par des ronds multicolores au sein de cadres bleus et comportent tant des cytokines pro Th1 comme les
interleukines 1,2,6,12, le tumor necrosis factor a et l'interferon g que des cytokines pro Th2 comme les interleukines 4,10 et le transforming
growth factor b. PNN : polynucléaire neutrophile ; NK : cellule natural killer ; Mf : macrophage avant transformation en cellule dendritique
(CD) puis en cellule présentatrice d'antigènes (CPA) après captation d'antigènes viraux ou cellulaires démasqués ; LT : lymphocytes T avec
LTh lymphocytes T helper et LTc lymphocytes T cytotoxique ; LB : lymphocytes B ; Auto Ac : autoanticorps.

d'antigènes (CPA). Les CVB vont essayer d'échapper à cette chronique puis d'une cardiomyopathie dilatée liée à une
réaction immunitaire adaptative par différents mécanismes infection virale cardiaque persistante ;
comme par exemple réduire au sein des cellules infectées  une évolution clinique immédiate non grave, clairance virale,
l'expression des molécules de complexe majeur d'histocom- genèse d'anticorps anti-cellules cardiaques par mimétisme
patibilité de Classe I nécessaires à la présentation d'antigène moléculaire et développement ultérieur d'une myocardite
aux cellules de l'immunité adaptative. Même si tous les déter- chronique puis d'une cardiomyopathie dilatée auto-immune ;
minants n'en sont actuellement pas connus, la polarité de la  une évolution clinique immédiate non grave, pas de clai-
réaction immunitaire (pro-inflammatoire _couple macrophage rance virale, genèse d'anticorps anti-cellules cardiaques par
M1/lymphocyte Th1_ou plutôt anti-inflammatoire _couple mimétisme moléculaire et développement ultérieur d'une
macrophage M2/lymphocyte Th2_) son intensité et sa préco- myocardite chronique puis d'une cardiomyopathie dilatée
cité d'installation vont conditionner l'évolution de la myocardite à la fois auto-immune et due à une infection virale cardiaque
selon une des modalités suivantes : persistante.
 une évolution clinique immédiate non grave, clairance virale Conceptuellement, on a plutôt tendance à attribuer actuelle-
et guérison ; ment une clairance virale à une réaction pro-inflammatoire
 une évolution clinique immédiate grave avec troubles du adaptée, une myocardite fulminante à une réaction pro inflam-
rythme et insuffisance cardiaque aiguë (myocardite fulmi- matoire trop marquée alors qu'une réaction de profil M2-
nante), clairance virale et guérison si le patient survit à la Th2 trop intense ou trop précoce serait plutôt liée à une meil-
défaillance cardiaque et aux troubles du rythme initiaux ; leure survie initiale mais peut être plus de persistance virale
 une évolution clinique immédiate non grave, pas de clai- voire de myocardite auto-immune. De manière intéressante,
rance virale et développement ultérieur d'une myocardite les myocardites chroniques à CVB sans clairance virale sont

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Mise au point sur la physiopathologie des myocardites
virales
Dossier
Physiopathologie cardiovasculaire

caractérisées par une réplication virale à faible niveau de CVB ce modèle murin, l'inoculation d'adénovirus entraîne bien une
tronqués jusqu'à 50 nucléotides à leur extrémité 50 non inflammation myocardique, avec production de cytokines
codante sans effet cytopathogène détectable en culture virale inflammatoires et une dysfonction cardiaque. L'inflammation
[6]. L'étude de ces nouvelles formes virales est en cours [6], et y est moins marquée que dans les modèles de myocardite
en quête de nouvelles cibles thérapeutiques potentielles, le à CVB et seule une augmentation de la masse du ventricule
traitement actuel des myocardites chroniques à CVB reposant gauche avec hypertrophie cardiomyocytaire a été observée
actuellement sur l'interféron Bêta [7], dont l'utilisation doit être à l'âge adulte chez les souris infectées en période néonatale
prudente chez les patients en insuffisance cardiaque. Toute- [11]. Le traitement expérimental par cidofovir liposomal utilisé
fois, la plus grande difficulté actuelle est de poser l'indication lors des cystites hémorragiques à adénovirus chez l'allogreffé
d'un tel traitement et de démontrer au sein d'une biopsie de moelle osseuse n'a pas été, à notre connaissance, utilisé
endomyocardique contenant un tissu cardiaque altéré comme lors de myocardites à adénovirus.
on voit dans les CMD la présence d'une inflammation myo-
cardique et d'une activité de réplication entérovirale (persis-
tance virale associée caractérisée par une faible réplication
génomique et la production de protéines). CONCLUSION
Notre compréhension des mécanismes physiopathologiques
viraux et inflammatoires associés au cours des myocardites
PHYSIOPATHOLOGIE DES MYOCARDITES virales reste partielle pour l'ensemble des virus cardiotropes
en médecine humaine. Ceci limite actuellement le développe-
À PARVOVIRUS B19
ment de solutions thérapeutiques spécifiques en dehors du
Après pénétration par voie respiratoire, les récepteurs du traitement symptomatique de l'insuffisance cardiaque associé
PVB19 sont l'antigène P ou l'intégrine a5b1. La détection à une surveillance en phase aiguë comme à distance de
de PVB 19 est très fréquente au niveau cardiaque et un seuil l'épisode de myocardite.
de 500 cp/mg d'ADN extrait est considéré comme nécessaire
à l'imputabilité du PVB 19 à une myocardite [8]. Le mécanisme Déclaration de liens d'intérêts
par lequel le PVB19 conduirait à une myocardite chronique et Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d'intérêts.
une CMD serait la genèse d'une dysfonction endothéliale [9]. Il
n'y a pas de traitement validé des myocardites à Parvovirus
B19. L'utilisation d'immunoglobulines n'a pas été démontrée
comme efficace (dans l'ensemble de toutes les myocardites, RÉFÉRENCES
virales ou non). [1] Dennert R, Crijns HJ, Heymans S. Acute viral myocarditis. Eur
Heart J 2008;29:2073–82.
[2] Maron BJ, Towbin JA, Thiene G, et al. Contemporary definitions
and classification of the cardiomyopathies: an American Heart
PHYSIOPATHOLOGIE DES MYOCARDITES
Association scientific statement from the Council on Clinical
À HUMAN HERPES VIRUS 6 Cardiology, Heart Failure and Transplantation Committee; Quality
Après contamination par voie salivaire surtout (entre autres of Care and Outcomes Research and Functional Genomics
parmi quasi tous les fluides corporels), le récepteur du virus and Translational Biology Interdisciplinary Working Groups; and
HHV6 est la protéine CD46 (inactivatrice du complément). Council on Epidemiology and Prevention. Circulation 2006;
HHV6 est un agent opportuniste pourvoyeur de myocardite 113:1807–16.
chez l'immunodéprimé lors d'une primo-infection ou lors d'une [3] Felker GM, Thompson RE, Hare JM, et al. Underlying causes
réactivation après phase de latence parfois prolongée. Le and long-term survival in patients with initially unexplained car-
mécanisme par lequel le virus HHV6 conduirait au dévelop- diomyopathy. N Engl J Med 2000;342:1077–84.
pement d'une CMD passerait par une (rarissime) intégration [4] Cooper LT, Baughman KL, Feldman AM, et al. The role of
chromosomique [10]. Un traitement par ganciclovir peut être endomyocardial biopsy in the management of cardiovascular
proposé. disease: a scientific statement from the American Heart Associa-
tion, the American College of Cardiology, and the European
Society of Cardiology. Endorsed by the Heart Failure Society of
America and the Heart Failure Association of the European
PHYSIOPATHOLOGIE DES MYOCARDITES Society of Cardiology. J Am Coll Cardiol 2007;50:1914–31.
À ADÉNOVIRUS [5] Tam PE. Coxsackievirus myocarditis: interplay between virus and
host in the pathogenesis of heart disease. Viral Immunol 2006;
Après virémie suite à une pénétration dans l'organisme par 19:133–46.
voie respiratoire surtout ou oro-fécale, les adénovirus se fixent [6] Lévêque N, Garcia M, Bouin A, et al. Functional consequences
eux aussi sur le récepteur CAR. La mécanistique et la phy- of RNA 5'-terminal deletions on coxsackievirus B3 RNA replica-
siopathologie d'une myocardite à adénovirus sont beaucoup tion and ribonucleoprotein complex formation. J Virol 2017;91.
moins bien connues du fait de la spécificité des souches http://dx.doi.org/10.1128/JVI.00423-17 [pii : e00423-17].
humaines d'adénovirus, à l'inverse des CVB. Un récent [7] Kühl U, Lassner D, von Schlippenbach J, et al. Interferon-Beta
modèle murin d'infection à adénovirus adapté aux souris improves survival in enterovirus-associated cardiomyopathy. J
confirme bien l'imputabilité des adénovirus présumée par la Am Coll Cardiol 2012;60:1295–6.
détection au sein des prélèvements réalisés lors des myocar- [8] Bock CT, Klingel K, Kandolf R. Human parvovirus B19-asso-
dites ou de rejets de greffons cardiaques chez l'Homme. Dans ciated myocarditis. N Engl J Med 2010;362:1248–9.

19
Dossier Y. N'Guyen, L. Andreoletti

Physiopathologie cardiovasculaire

[9] Tschöpe C, Bock CT, Kasner M, et al. High prevalence of cardiac [11] McCarthy MK, Procario MC, Twisselmann N, et al. Proinflam-
parvovirus B19 infection in patients with isolated left ventricular matory effects of interferon gamma in mouse adenovirus 1 myo-
diastolic dysfunction. Circulation 2005;111:879–86. carditis. J Virol 2015;89:468–79.
[10] Kühl U, Lassner D, Wallaschek N, et al. Chromosomally inte-
grated human herpesvirus 6 in heart failure: prevalence and treat-
ment. Eur J Heart Fail 2015;17:9–19.

20
Arch Mal Coeur Vaiss Prat 2017;2017:21–24
Actualités
Fédération française de cardiologie

Activité physique et diabète


Physical activity and diabetes

T. Pospiech a, O. Bocock b, H. Douard a


a
Service de cardiologie, épreuves d'effort, réadaptation, cardiologie du sport, hôpital Haut-Lévêque,
CHU de Bordeaux, avenue Magellan, 33600 Pessac, France
b
Service d'endocrinologie-diabétologie, hôpital Haut-Lévêque, CHU de Bordeaux, avenue Magellan,
33600 Pessac, France

Si la pratique régulière d'une activité forme d'activité physique réalisée dans mortalité totale, essentiellement lié
physique réduit de 20 à 30 % les compli- le but de maintenir ou d'améliorer sa à la diminution de certains cancers
cations cardiovasculaires en prévention condition physique. Quant à l'activité [3,5,7].
primaire dans les récentes méta-analy- sportive, elle correspond selon l'Organi- L'activité physique induit différents effets
ses (Fig. 1) [1], ce taux atteint 40 à 50 % sation mondiale de la santé (OMS) à la bénéfiques sur les métabolismes glu-
pour les patients diabétiques. réalisation d'un exercice physique dans cido-lipidiques. Sur le métabolisme glu-
Le diabète est une pathologie de plus en un cadre codifié, correspondant à un cidique, l'exercice favorise le
plus fréquente, avec différents profils de règlement, sous la forme d'exercices développement des capacités oxydati-
patients selon le type. Sa prévalence est et/ou de compétitions facilitées par les ves du muscle ainsi qu'une consomma-
estimée à 5 % de la population en 2015, organisations sportives. Il existe diffé- tion de glucose accrue; il augmente la
affectant ainsi plus de 3 millions de rents types d'exercice (en endurance, captation cellulaire du glucose sanguin,
personnes, auxquelles s'ajoutent les en résistance, contre résistance) avec que ce soit chez le sujet sain ou le sujet
millions de personnes diabétiques une préférence en prévention cardio- diabétique de type 2. En récupération
méconnues [2]. En France, elle aug- vasculaire et respiratoire pour le travail post effort, la sensibilité musculaire à l'in-
mente progressivement. Aux États- en endurance, mettant préférentielle- suline est majorée, et ce quel que soit le
Unis, le coût économique du diabète ment en jeu la filière aérobie (voie méta- type d'exercice. Ces effets favorables de
de type 2 était estimé à 172 billions de bolique utilisant l'oxygène). La part l'APS sont reflétés par une baisse du
dollars il y a 10 ans [3]. Le diabète est relative de chaque filière énergétique taux d'hémoglobine glyquée et une
en effet associé à une mortalité globale dépend du type d'exercice, de sa durée réduction de la prescription de médica-
mais également cardiovasculaire accrue, et de son intensité (Fig. 2 et 3). De ments antidiabétiques (insuline, anti-
avec notamment un risque d'infarctus du nombreux travaux ont démontré l'intérêt diabétiques oraux) [7–10]. Sur le
myocarde deux à trois fois plus élevé [4]. d'une pratique régulière de l'activité phy- métabolisme lipidique, l'exercice d'inten-
Il est malheureusement fréquemment sique, que ce soit en prévention cardio- sité modérée (à 50–60 % de VO2 max)
associé à d'autres facteurs de risque car- vasculaire primaire ou secondaire, avec favorise la lipolyse via la bêta-oxydation
diovasculaires comme l'hypertension un effet également favorable sur la des acides gras libres. Cela est associé
artérielle ou la dyslipidémie. Il s'agit par
ailleurs d'une pathologie chronique, 6.00%
potentiellement invalidante avec une
altération de la qualité de vie et un reten- 4.74% 4.85%
5.00% 4.63%
tissement psychosocial majeur. 4.39%
4.54%
L'activité physique est définie comme 4.20%
3.95% 4.58% 4.67%
« tout mouvement corporel produit par 4.00% 3.78% 4.37% 4.46%
la contraction des muscles squeletti-
ques, entraînant une dépense d'énergie 3.00%
supérieure à celle de repos » (métabo-
lisme basal égal à 1 MET = 3,5 mL O2/
min/kg) [5]. L'exercice physique est une 2.00%

1.00%
Auteur correspondant :
T. Pospiech 0.00%
Service de cardiologie, épreuves d'effort, 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013
réadaptation, cardiologie du sport, hôpital Haut-
Lévêque, CHU de Bordeaux, avenue Magellan, Extrapolation à partir du régime général Tous régimes d'Assurance maladie
33600 Pessac, France.
Adresse e-mail : Figure 1. Évolution de la prévalence du diabète traité pharmacologiquement en France de
thomas.pospiech@chu-bordeaux.fr 2006 à 2013 (INVS).

https://doi.org/10.1016/j.amcp.2017.10.011

21
Actualités T. Pospiech et al.

Fédération française de cardiologie

Figure 2. Contribution des différents substrats dans la dépense énergétique en fonction de l'intensité de l'exercice (pourcentage de VO2
max).
D'après [4].

Figure 3. Évolution de la contribution des différents substrats dans la dépense énergétique en fonction du temps.
D'après [4].

à une diminution du tissu adipeux sous- qu'une alimentation adaptée associée hebdomadaire d'au moins 150 minutes
cutané et de la graisse viscérale. De plus, à une adaptation des doses d'insuline d'activité physique modérée et/ou de
sur le plan musculaire, une orientation permettent de mener à bien des acti- 75 minutes d'activité physique intense
préférentielle vers les fibres musculaires vités sportives parfois soutenues en (par exemple, 30 minutes par jour ou
de type 1 (ou lentes) est induite, amélio- cas de diabète de type 1 [14]. À long 15 minutes par jour pendant 5 jours res-
rant la composition qualitative et quanti- terme, les études Pittsburg IDDM, pectivement) est recommandée. Ces
tative du matériel oxydatif intracellulaire EURODIAB et plus récemment Finn- durées peuvent même être doublées,
[11]. Les autres effets favorables asso- Diane ont montré une nette corrélation dans le cadre d'une activité aérobie
cient une diminution de la pression arté- entre le volume et l'intensité d'une pra- (classe I, niveau A) (Tableau I) [17,18].
rielle moyenne et du stress oxydatif, ainsi tique sportive régulière et la baisse des Ainsi, l'activité physique constitue une
qu'une perte de poids et un bien-être complications cardiovasculaires. La thérapie indispensable dans la préven-
psychologique moins quantifiable mais quantité d'exercice nécessaire recon- tion du diabète de type 2, ainsi qu'en
bien réel. L'ensemble de ces manifes- nue pour les diabétiques de type 2 est prévention des complications cardiovas-
tions bénéfiques a contribué au concept d'au moins 150 minutes d'activité par culaires liées à cette pathologie. Il s'agit
de « polymédicament » associé à la pra- semaine afin de diminuer les complica- d'une méthode facilement disponible,
tique régulière d'une activité physique tions spécifiques : macro-vasculaires : accessible à tous, peu onéreux, d'effica-
[12] (Fig. 4). Celle-ci fait également partie mortalité : – 44 %, accident vasculaire cité largement démontrée associée
intégrante de la prise en charge du cérébral : – 36 %, amputation des mem- à une sécurité reconnue (y compris
patient diabétique de type 1, pour lequel bres inférieurs : – 69 % ; micro-vasculai- vis-à-vis de l'hypoglycémie !) lorsque
le principal frein demeure toujours la res : neuropathie : – 29 % [15,16]. l'exercice est réalisé dans des condi-
peur de l'hypoglycémie induite [13]. En prévention cardiovasculaire, y tions adéquates et en suivant quelques
Mais il a été largement démontré compris chez le diabétique, la pratique règles basiques [19]. L'activité physique

22
Activité physique et diabète
Actualités
Fédération française de cardiologie

Figure 4. Effets physiologiques multiples des bénéfices de l'activité physique.


D'après [12].

Tableau I. Recommandations européennes pour l'activité physique.


Recommandations Classe Niveau
Il est recommandé pour les adultes en bonne santé de tous âges de participer au moins I A
150 minutes par semaine d'activité physique en aérobie modérée ou 75 minutes d'exercice intense
ou une combinaison équivalente des deux
Pour un bénéfice supplémentaire chez les adultes en bonne santé, une activité physique en aérobie I A
modérée jusqu'à 300 minutes par semaine ou jusqu'à 150 minutes d'activité physique intense ou une
combinaison équivalente des deux
D'après [17].

doit également s'intégrer dans une diabétiques, souvent en surpoids, n'est Références
démarche globale de modification des cependant pas fréquente ; l'incitation [1] Prévalence et incidence du diabète.
habitudes de vie, en limitant au maxi- des professionnels de santé dans cette Données épidémiologiques. Diabète.
mum la sédentarité, en association démarche de prévention primaire et Maladies chroniques et traumatismes.
à une alimentation équilibrée et un secondaire est donc essentielle. Dossiers thématiques. Accueil. [Internet.
contrôle des autres facteurs de risque Cité 11 août 2017. Disponible sur : http://
cardiovasculaire, quand ils sont pré- Déclaration de liens d'intérêts invs.santepubliquefrance.fr/Dossiers-
sents, notamment l'arrêt du tabac. Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens thematiques/Maladies-chroniques-et-
L'appétence pour l'APS des patients d'intérêts. traumatismes/Diabete/Donnees-

23
Actualités T. Pospiech et al.

Fédération française de cardiologie

epidemiologiques/Prevalence-et- [8] Umpierre D, Ribeiro PAB, Kramer CK, [15] Chen Y, Sloan FA, Yashkin AP. Adher-
incidence-du-diabete]. Leitão CB, Zucatti ATN, Azevedo MJ, ence to diabetes guidelines for screen-
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ciated with myocardial infarction in 52 exercise as therapy in 26 different vascular disease prevention in clinical
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24
Arch Mal Coeur Vaiss Prat 2017;2017:25–26
Actualités / Agenda

Agenda
Disponible en ligne sur ScienceDirect le 9 novembre 2017

& Euro chorus: interventional & Forum européen cœur,


& 37es journées de
l'hypertension artérielle cardiology and exercice & prévention
14–15 décembre 2017 cardiovascular surgery 22–23 mars 2018
Cité Universitaire de Paris, congress UICP, 16, rue Jean-Rey,
Paris, France 14–16 mars 2018 75015 Paris, France
Hôtel du Département,
Renseignements : AIMGROUP, via Fla- Strasbourg, France Renseignements :
minia, 00189 Rome, Italie. Jhta2017@ www.forumeuropeen.com.
aimgroup.eu. www.jhta2017.fr. Renseignements : www.eurochorus.fr.
& Cardio valves
& es & 29–30 mars 2018
28 journées européennes Journée des groupes de
de la Société française de travail de la Société française Parc Chanot, Marseille, France
cardiologie de cardiologie
17–20 janvier 2018 16 mars 2018 Renseignements : www.cardiovalves.fr.
Palais des Congrès, Paris, Chateauform' Les Jardins de
& Le printemps de la
France Saint-Dominique, 49, rue Saint-
Dominique, 75007 Paris, cardiologie
France 5–6 avril 2018
Renseignements : Société française de
Montpellier, France
cardiologie, 5, rue des Colonnes-du-
Trône, 75012 Paris. nathalie.groleau@ Renseignements : Société française de
cardiologie, 5, rue des Colonnes-du- Renseignements : Société française de
sfcardio.fr.
Trône, 75012 Paris. karine.lesfar@ cardiologie, 5, rue des Colonnes-du-
sfcardio.fr. Trône, 75012 Paris. karine.lesfar@
& Les rencontres lyonnaises de sfcardio.fr.
rythmologie & EHRA 2018: the annual
1–2 février 2018 & 27th European stroke
congress of the European
Hôtel Marriott Lyon Heart Rhythm Association conference
International, Lyon, France 18–20 mars 2018 11–13 avril 2018
Barcelone, Espagne Centre international de
Informations : Overcome. rythmolyon@ conférences, Athènes, Grèce
overcome.fr. Renseignements : www.escardio.org/
EHRA. Renseignements : www.eurostroke.eu.
& 2018: acute cardiovascular
& 38th international symposium & Euro Prevent 2018
care: 6th annual congress of
the acute cardiovascular care on intensive care and 19–21 avril 2018
association emergency medicine Ljubljana, Slovénie
3–5 mars 2018 20–23 mars 2018
Square–Brussels Meeting Renseignements : www.escardio.org/
Milan, Italie europrevent.
Center, Bruxelles, Belgique
Renseignements : www.escardio.org/ & Cœur et sport – 18e édition
Renseignements : www.intensive.org.
acute.
24–25 mai 2018
& 8e journée nationales du Centre des Congrès, Palais des
& 11e congrès scientifique de la Papes, Avignon, France
GACI
Société camerounaise de
22–23 mars 2018
cardiologie Renseignements :
Salons de l'Hôtel des Arts et www.clubcardiosport.com.
7–9 mars 2018
Métiers, 9, bis avenue d'Iena,
Palais des Congrès, Yaoundé,
75116 Paris, France & EuroHeartCare
Cameroun
Renseignements : alexandra. 7–9 juin 2018
Renseignements : www.camcarsoc.org. lecrouerour@medi8events.com. Trinity College, Dublin, Irlande

https://doi.org/10.1016/j.amcp.2017.10.006

25
Actualités / Agenda

Renseignements : www.escardio.org/ Renseignements : www.eums.org. Renseignements : www.iscat.net.


EuroHeartCare.
&
& ISCAT 2018 – 12th & Paris-Echo 2019
ESC congress
international symposium 12–14 juin 2019
25–29 août 2018
on catheter ablation Palais des Congrès, Paris,
Munich, Allemagne
techniques France
Renseignements : www.escardio.org/ 3–5 octobre 2018
ESC2018. Marriott Rive Gauche, Paris, Renseignements : www.paris-echo.
France com.
& 13th European mechanical
circulatory support summit
5–8 décembre 2018
Eurosites George V, Paris,
France

26
Arch Mal Coeur Vaiss Prat 2017;2017:27–29
Actualités / Revue de presse

Revue de presse
J.-J. Monsuez

Service de cardiologie, hôpital René-Muret, hôpitaux universitaires de Paris Seine-Saint-Denis, 52,


avenue du Docteur-Schaeffner, 93270 Sevran, France

cardiovasculaires majeurs (mortalité pressure trajectory, frailty, and all


MALADIE CORONAIRE d'origine cardiaque 2 vs. 2,7 %, respec- cause mortality > 80 years of age.
tivement), mais en revanche les infarc- Circulation 2017;135:2357–68.
& Étude AIDA tus du myocarde dans le territoire du
vaisseau revascularisé sont plus fré- La pression artérielle augmente avec
Wykrzykowska J, Kraak RP, Hofma quents avec le stent biorésorbables l'âge et la prévalence de l'hypertension
SH, et al. Bioresorbable scaffolds (5,5 % vs. 3,2 %, p = 0,04), ainsi que artérielle est plus élevée chez les sujets
versus metallic stents in routine les thromboses de stent (3,5 % vs. âgés. Le bénéfice du traitement de
PCI. N Engl J Med 2017;376:2319– 0,9 %, p < 0,001). En pratique, l'étude l'hypertension artérielle chez les sujets
28. AIDA limite les espoirs des stents actifs de plus de 80 ans a été documenté par
biorésorbables dans la mesure où les plusieurs études cliniques, dont Hyper-
Les stents biorésorbables, qui ne lais- procédures d'implantation de ces maté- tension in the Very Elderly (HYVET),
sent à terme aucun matériel dans la riels sont plus longues, avec des quan- avec une réduction de 30 % du risque
paroi et la lumière vasculaire et n'expo- tités de produit de contraste plus d'accident vasculaire cérébral isché-
sent de ce fait pas à la survenue d'une importantes, un choix de prothèse plus mique, de 21% de la mortalité toute
néo-athérogenèse endoprothétique, ont limité et des résultats en termes de cause et de 64 % de l'insuffisance car-
été développés dans le but de préserver thrombose de stent moins favorables. diaque. La baisse de la pression arté-
la vasomotricité coronaire et de faire rielle systolique en dessous de
disparaître les complications des stents & Méta-analyse à 2 ans 120 mmHg réduit la mortalité des sujets
actifs (2 à 3 % de revascularisation de plus de 75 ans inclus dans Systolic
secondaire et 0,1 à 0,2 % de thrombose Ali ZA, Serruys PW Kimura T, et al. Blood Pressure Intervention Trial
de stent par an, respectivement). L'essai 2-year outcomes with the Absorb (SPRINT) de 33 % et la survenue d'acci-
ABSORB III a cependant montré qu'au bioresorbable scaffold for treatment dents cardiovasculaires de 34 %. Inver-
bout d'un an, le stent bioresorbable of coronary artery disease: a sement, le danger de l'abaissement de
Absorb, aussi efficace que le stent systematic review and meta- la pression artérielle systolique en des-
métallique actif à l'everolimus Xience analysis of seven randomised trials sous de 120 mmHg chez des malades
en termes de revascularisation secon- with an individual patient data de plus de 80 ans a été souligné par
daire, pouvait être associé à un nombre substudy. Lancet 2017;390: plusieurs études épidémiologiques,
accru de thromboses. 760–72. ainsi que quelques essais cliniques
L'étude Amsterdam Investigator-Initia- chez des sujets de plus de 85 ans. On
ted Absorb Strategy All-Comers Trial Une méta-analyse du bénéfice à 2 ans a tenté d'expliquer ce paradoxe appa-
(AIDA) a comparé les résultats de des stents biorésorbables réalisée sur 7 rent à la lumière d'un concept gériatrique
l'implantation du stent biorésorbable études randomisées a porté sur 55583 en vogue, la fragilité, traduction impar-
à libération d'everolimus au stent métal- patients implantés avec un stent Absorb faite de frailty, en anglais, qui associe
lique couvert à libération d'everolimus (n = 3261) ou un stent actif métallique une diminution des réserves physiologi-
avec un suivi plus long, de sorte à pré- (n = 2322) a, elle aussi, montré le sur- ques et une vulnérabilité qui majorent la
ciser les fréquences de revascularisa- risque de thrombose de stent (2,3 % vs. susceptibilité aux événements défavo-
tion secondaire et de thrombose. Les 0,7 %, p < 0,001), d'infarctus du myo- rables et aux stress physiologiques. Il
1845 malades inclus sont implantés carde dans le territoire de l'artère combine habituellement fatigabilité,
à la phase aiguë d'un infarctus du myo- implantée (5,8 % vs. 3,2 %, p = 0,003) perte de poids involontaire, activité phy-
carde (IDM) avec (26 %) ou sans (20 %) et de survenue du composite mortalité, sique réduite. Un des composants
sus-décalage de ST, pour angor instable infarctus du myocarde, revascularisa- d'évaluation de cette fragilité est la
(8 %) ou angor stable (40 %). Au tion (9,4 % vs. 7,4 %, p = 0,0059). vitesse de marche, qui a l'avantage de
décours d'un suivi de deux ans sa moindre subjectivité par rapport
(médiane 707 jours), aucune différence à nombre d'autres. Quelques publica-
n'est observée en ce qui concerne les tions ont rapporté la diminution progres-
HYPERTENSION ARTÉRIELLE sive de la pression artérielle à mesure
échecs de revascularisation (revascula-
risation secondaire 11,7 % vs. 10,7 %, que la fragilité progresse, la plus grande
respectivement) et les événements & Sujet âgé fréquence des effets secondaires du
traitement antihypertenseur chez les
Ravindrarajah R, Hazra NC, sujets âgés « fragiles ». Un travail récent
Adresse e-mail : jean-jacques.monsuez@aphp.fr Hamada S, et al. Systolic blood a résumé assez clairement les liens

https://doi.org/10.1016/j.amcp.2017.10.007

27
Actualités / Revue de presse J-J Monsuez

entre fragilité (évaluée par la vitesse de accrue, une vasodilatation endothélium- fibrillation atriale sont plus âgées que
marche) et bénéfice du traitement anti- dépendante réduite et une hyper-réac- les hommes (74,1  9,7 vs. 70,1
hypertenseur, en montrant que chez les tivité à l'angiotensine II, rapportée au  10,7 ans, p < 0,0001), sont plus sou-
sujets âgés non fragiles, une pression moins pour partie à la sécrétion vent symptomatiques à un moment ou
artérielle systolique élevée est associée d'auto-anticorps dirigés contre le récep- un autre de la maladie (95,4 vs. 89,8 %,
à une mortalité accrue, alors qu'en pré- teur AT1 de l'angiotensine II, qui ont une p < 0,0001). Les proportions de patients
sence d'une fragilité (vitesse de marche action agoniste sur le récepteur. Malgré recevant des anticoagulants oraux
réduite), elle est associée à une réduc- la résolution des symptômes à la fin de directs sont identiques et ont évolué
tion de mortalité. la grossesse, l'hyper-sensibilité à l'an- de façon semblable au cours de l'étude
L'explication de cette discordance appa- giotensine II persiste ensuite, et a été chez les femmes et chez les hommes
rente vient d'être apportée par une large incriminée parmi les causes possibles (de 5,9 à 12,6 % et de 6,2 à 12 %). Les
enquête épidémiologique menée de ce sur-risque. femmes bénéficient moins souvent que
auprès des médecins généralistes bri- Une étude comparative de femmes dont les hommes de cardioversion (14,9 vs.
tanniques entre 2001 et 2014, enquête une grossesse a été compliquée dans 20,6 %, p < 0,0001) et d'ablation (3,3 vs.
portant sur 144 403 patients âgés de les années précédentes d'une pré- 6,3 %). Au cours du suivi, les revascu-
plus de 80 ans. Elle montre que chez éclampsie (n = 12) ou qui en ont été larisations myocardiques sont beau-
les sujets « non fragiles », la mortalité indemnes (n = 12) confirme la plausibi- coup moins fréquentes chez les
augmente avec la réduction de pression lité de cette hypothèse. Elle montre en femmes (odds ratio 0,35), avec moins
artérielle systolique : 7,7 % personne- effet une diminution de leur vasodilata- de syndromes coronaires aigus (odds
année entre 120 et 139 mmHg, 15,2 tion endothélium-dépendante (iontopho- ratio 0,60) et de survenue d'insuffisance
entre 110 et 119 mmHg, 22,7 pour une rèse cutanée d'acétylcholine), une cardiaque (odds ratio 0,80). En revan-
pression artérielle systolique inférieure réduction de la vasodilatation induite che, le registre ne confirme pas le sur-
à 110 mmHg. Chez les sujets fragiles, le par le monoxyde d'azote (NO) et une risque d'accident thromboembolique et
même gradient est observé, mais plus hyper-réactivité à l'angiotensine II qui d'accident vasculaire cérébral, ni le
marqué : 16,8 pour 100 personne- peut être corrigée par un antagoniste risque réduit d'accident hémorragique.
année, 25,2, et 39,6 pour les tranches des récepteurs de l'angiotensine II.
de pression artérielle systolique corres- Les auteurs suggèrent en aval qu'une &
pondantes. En fait, le suivi de cette prévention du sur-risque des femmes TAVI : réadmissions
cohorte montre qu'au cours des 24 mois qui ont des antécédents de pré-éclam-
qui précèdent le décès (51 808 décès au psie puisse être envisagée en leur admi- Franzone A, Pilgrim T, Arnold N,
cours du suivi), la pression artérielle sys- nistrant un inhibiteur des récepteurs de et al. Rates and predictors of
tolique diminue et que cette diminution l'angiotensine II. hospital readmission after
est liée au déclin qui précède la fin de vie transcatheter aortic valve
et non au traitement antihypertenseur. implantation. Eur Heart J
Dans la mesure où la mortalité des 2017;38:2211–7.
sujets âgés fragiles est supérieure, leur
FIBRILLATION ATRIALE
baisse de pression artérielle systolique Les malades implantés d'une valve per-
est plus fréquente et la mortalité surve- & Femmes vs. hommes cutanée aortique sont ré-hospitalisés au
nant avec une pression artérielle basse décours de la procédure dans une pro-
elle aussi plus fréquente. Schnabel R, Pecen L, Ojeda FM, portion non négligeable. Dans le registre
et al. Gender differences in clinical suisse de Berne, 221 des 868 patients
presentation and 1-year outcomes (25,4 %) implantés entre 2007 et 2014
& Pré-éclampsie et risque in atrial fibrillation. Heart sont réadmis ultérieurement (308 réad-
cardiovasculaire ultérieur 2017;103:1024–30. missions), pour une cause cardiaque
(46,1 %), le plus souvent insuffisance
Stanhewicz AE, Jandu S, Les femmes atteintes de fibrillation cardiaque, mais aussi pour des motifs
Santhanam L, et al. Increased atriale ont un risque d'accident vascu- extracardiaques, chirurgie (11,7 %),
angiotensin II sensitivity contributes laire cérébral supérieur à celui des hom- troubles digestifs (9,7 %), cancers
to microvascular dysfunction in mes. Cette différence, prise en compte (4,9 %), affections respiratoires
women who have had dans le score CHA2DS2-VASc, n'a pas (4,6 %), insuffisance rénale (2,7 %).
preeclampsia. Hypertension été aussi bien précisée pour d'autres Les réadmissions sont plus fréquentes
2017;70:382–9. aspects évolutifs de la fibrillation atriale, chez les hommes, les patients en fibril-
notamment les manifestations d'insuffi- lation atriale, et ceux ayant une insuffi-
Le risque cardiovasculaire des femmes sance cardiaque, le recours aux traite- sance rénale (p < 0,05 pour les trois).
ayant eu une pré-éclampsie au cours ments anticoagulants oraux directs, le Les facteurs associés à la réadmission
d'une de leurs grossesses (3 à 5 % risque hémorragique, le maintien en sont le sexe masculin (RR = 1,33,
des grossesses) est multiplié au cours rythme sinusal et les récidives. p = 0,035), l'insuffisance rénale
de leur vie ultérieure, par un facteur de 2 Le registre européen Prevention of (RR = 2,4, p = 0,021). Ceux associés
à 3. La pré-éclampsie est en effet mar- Thromboembolic Events-European à la réadmission pour cause cardiovas-
quée par un défaut de placentation Registry (PREFER) a comparé ces dif- culaire sont les antécédents d'infarctus
associé une hyper-réactivité vasculaire férences intersexuelles chez 6412 mala- du myocarde (RR = 1,88, p = 0,004), les
périphérique. Les femmes atteintes de des atteints de fibrillation atriale (39,7 % hémorragies lors ou au décours de
pré-éclampsie ont une rigidité artérielle de femmes). Les femmes atteints de l'implantation (RR = 2,04, p = 0,007).

28
Revue de presse
Actualités / Revue de presse

sujets indemnes de maladie cardiovas- m2) ont un risque relatif de 1,24, et les
VALVULOPATHIES culaire en 1997. Leur devenir a été obèses (IMC > 30 kg/m2) un risque rela-
ensuite documenté par le registre natio- tif de 1,81. Un périmètre abdominal
& Valvulopathies nal d'hospitalisation pour sténose aor- supérieur à 88 cm chez la femme ou
tique et celui des décès parallèlement. 102 cm chez l'homme est associé
Larsson LC, Wolk A, Häkansson N, Après 15,3 ans (moyenne), 1297 sténo- à un risque relatif de 1,30. L'analyse
et al. Overall and abdominal ses aortiques sont colligées, 771 chez des données du registre permet d'attri-
obesity and incident aortic valve l'homme et 526 chez les femmes. L'obé- buer 10,8 % des sténoses aortiques
stenosis: two prospective cohort sité (indice de masse corporelle [IMC]) à l'obésité et l'obésité abdominale.
studies. Eur Heart J 2017;38:2192– et l'obésité abdominale (périmètre abdo-
97. minal) sont l'une et l'autres associées
à la survenue des sténoses aortiques. Disponible en ligne sur ScienceDirect le 14
La cohorte des hommes de Suède et Comparativement aux sujets dont l'IMC novembre 2017
celle des femmes suédoises suivies est compris entre 18, 5 et 22,5 kg/m2,
par mammographie a inclus 71 817 ceux en surpoids (25 < IMC < 29,9 kg/

29
Histoire de la médecine Arch Mal Coeur Vaiss Prat 2017;2017:30–32

La coronarite ostiale syphilitique


dans les débuts de la chirurgie
coronaire
Syphilis of the coronary arteries and early coronary
surgery

J.-J. Monsuez Service de cardiologie, hôpital René-Muret, hôpitaux


universitaires de Paris-Seine-Saint-Denis, 52, avenue
du Docteur-Schaeffner, 93270 Sevran, France

Disponible en ligne sur ScienceDirect le 14


novembre 2017

es lésions cardiovasculaires de la syphilis lyonnaise, poursuivie par l'équipe de R. Fro-


L sont connues de longue date. Une large
étude anatomopathologique de 70 cas d'aor-
ment à la suite de Gallavardin, « au point de
vue anatomique, il est classique que les orifi-
tite syphilitique colligés en quatre ans au ces coronaires puissent être obstrués par une
Memorial Laboratory of City hospital de New plaque fibreuse qui les recouvre ou s'y
York décrit dès 1916 l'atteinte localisée ou engage. Sur 28 pièces anatomiques d'aortite
diffuse de la paroi aortique, épaissie, indurée, syphilitique recueillies en huit ans et que A.
fibreuse et sa tendance à la dilatation de Perrin vient d'étudier, il y avait 17 oblitérations
l'aorte ascendante. L'atteinte n'est en cause ostiales (soit deux tiers des cas environ)
dans le décès du malade que dans 11 cas, et comme c'est classique : 11 étaient unilatéra-
l'étude ne mentionne pas de lésions coronai- les, six bilatérales et presque toujours asymé-
res associées [1]. Cette extension aux orifices triques avec nette prédominance gauche. Sur
coronaires, longtemps connue ensuite sous le les 17 oblitérations ostiales, cinq avaient pré-
terme de coronarite ostiale, a été rapportée senté un syndrome angineux et il s'agissait
par Reid, qui la retrouve dans 12,8% des alors toujours d'oblitérations bilatérales très
autopsies de patients avec aortite syphilitique, poussées » [4].
par Saphir (33% des cas) et Clawson (19,9% Les travaux du service de cardiologie de
des cas) [2]. l'hôpital Boucicaut précisent les aspects clini-
Les relations liant l'infiltration des ostiums copathologiques de l'atteinte coronaire, en
coronaires et les douleurs angineuses ressen- soulignant sa sévérité. Sur 66 cas d'aortite
ties par certains malades avant leur décès ont syphilitique, Jean Lenègre (Fig. 1) retrouve
fait l'objet d'une longue polémique à la fin des ainsi 40 cas de sténose ou d'occlusion ostiale
années 30, que les corrélations anatomoclini- et 35 cas d'angine de poitrine certaine
ques de Pincoffs à Baltimore [2] et Gallavardin (58,8%), dont 27 sténoses serrées ou occlu-
à Lyon [3] ont pu lever. Dans la série de 69 sion. « Dans les caractères mêmes des dou-
malades décédés avec une aortite syphili- leurs angineuses, rien ne distingue celles qui
tique, Pincoffs rapporte le décès à la syphilis sont dues à la syphilis aortique de celles,
dans 20 cas, à son atteinte cardiaque chez 21 beaucoup plus fréquentes, qui sont dues
malades et à une autre cause dans 28 cas. à une athérosclérose coronarienne. . . sur
Parmi les 21 malades décédés d'une cause les 35 cas d'angine de poitrine. . . 12 cas
cardiaque, 15 ont des lésions coronaires d'effort, six cas d'angine de poitrine spontanée
ostiales très sténosantes ou occluses, le plus et 17 cas d'effort et spontanée. . . l'évolution
souvent symptomatiques (13/15), avec une est plus sévère, plus rebelle et plus rapide que
expression très proche de celles de malades celle de l'angine de poitrine commune » [5].
souffrant de lésions coronaires athéromateu- Ces considérations et l'expérience que le ser-
ses. Dix des 15 malades décèdent lors d'une vice a acquise de l'évolution inéluctable de ces Adresse e-mail :
douleur thoracique. Dans l'expérience syndromes coronaires particuliers malgré les jean-jacques.monsuez@aphp.fr

https://doi.org/10.1016/j.amcp.2017.10.010
© 2017 Publié par Elsevier Masson SAS.
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La coronarite ostiale syphilitique dans les débuts de la chirurgie
coronaire
Histoire de la médecine

Figure 1. Jean Lenègre.

cures répétées de pénicilline et le traitement symptomatique


de l'angor, amènent à envisager, lorsque la circulation extra- Figure 2. Charles Dubost.
corporelle fait son apparition en chirurgie cardiovasculaire,
qu'une désobstruction des ostiums coronaires puisse être
tentée. Pour l'entreprendre, il faut être sûr de la nature syphi-
litique des lésions, qui puisse laisser supposer leur étendue restaurer un orifice coronarien de diamètre satisfaisant. La
limitée, ostiale, et leur accessibilité à la désobstruction. « En découverte de l'ostium coronaire gauche est plus facile. . .
pratique, l'identification d'une angine de poitrine syphilitique une résection identique est réalisée. . . Cette opération s'est
repose sur la détection de l'aortite, surtout de l'insuffisance prolongée pendant une heure trente d'arrêt cardiaque. L'aorte
aortique syphilitique dont le souffle diastolique (ou le double une fois suturée, la circulation artificielle est reprise en mode
souffle) est présent dans 80% des cas. La positivité des réchauffé. Le cœur est défibrillé lorsque sa température atteint
séroréactions classiques de la syphilis apporte une base 348 et cela sans difficulté. . . . Les suites opératoires sont très
solide au diagnostic » [5]. simples. . . Deux mois après l'opération cet homme naguère
À l'automne 1958, un homme de 39 ans souffrant de crises incapable de faire quelques mètres sans souffrir peut aujour-
angineuses répétées et de plus en plus sévères est hospitalisé d'hui sans gêne marcher rapidement dans les plus mauvaises
dans le service de cardiologie de Boucicaut où le diagnostic de conditions à savoir au froid et après déjeuner » [5].
coronarite ostiale syphilitique est porté en raison de la pré- Lorsqu'il présente l'observation à la séance du 17 janvier 1960
sence d'un souffle diastolique et d'un test de Nelson positif à la Société française de cardiologie, J. Lenègre conclut « que
à 100%. Lors des crises, « une lésion sous-endocardique la désobstruction chirurgicale des ostiums coronaires occlus
antéro-latérale est enregistrée à l'électrocardiogramme». Mal- peut amener la disparition saisissante d'une angine de poitrine
gré plusieurs cures de pénicilline au cours des séjours sui- sévère et rebelle à toute thérapeutique médicale ». R. Fro-
vants, la symptomatologie coronaire s'aggrave et amène ment, qui préside la session, débute la discussion. « Je ne
à proposer l'intervention. Le patient accepte. Il est confié pense pas qu'on puisse laisser passer ce magnifique succès
à Charles Dubost (Fig. 2) qui l'opère le 11 décembre 1959. chirurgical–d'un type que pour ma part je ne sais pas avoir été
« L'intervention est faite en combinant la circulation extra- réalisé encore – sans y applaudir particulièrement. La dés-
corporelle et une hypothermie profonde. Sternotomie verticale. obstruction coronarienne ostiale dans l'aortite syphilitique
Ouverture du péricarde. Après arrêt de toute circulation, l'aorte avec angor, représente actuellement l'indication la plus indis-
ascendante est largement ouverte. Sa paroi est épaissie, cutable de la chirurgie coronarienne directe » [5]. R. Froment
irrégulière, vallonnée et de prime abord, on ne reconnaît rappelle aussi à cette occasion les propos qu'il a tenus peu
pas l'ostium coronaire droit. On est conduit alors à disséquer avant, en septembre 1959, à la semaine de travail organisée
la coronaire droite sur deux ou trois centimètres de sorte par Ignacio Chavez à l'Institut de cardiologie de Mexico, sur
à repérer le siège approximatif de son ostium. Un explorateur l'apport potentiel de la chirurgie coronaire « directe » dans
est introduit à force en direction du tronc coronarien et pénètre cette indication spécifique. L'intervention réalisée par
dans l'artère. Il devient alors facile de dégager l'orifice, de C. Dubost est en effet novatrice. Son succès et l'amélioration
réséquer les structures fibreuses qui l'encombrent et de spectaculaire du patient montrent le bénéfice que l'on peut

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Histoire de la médecine J-J Monsuez

attendre de la revascularisation chirurgicale dans la maladie [2] Pincoffs MC, Lowe WS. Syphilis of the coronary arteries. Trans
coronaire. Am Clin Climatol Assoc 1933;49:122–31.
[3] Gallavardin L. L'angine de poitrine et ses lésions. D'après une
Déclaration de liens d'intérêts statistique de 44 observations de syndrome angineux avec autop-
L'auteur déclare ne pas avoir de liens d'intérêts. sie. J Med Lyon 1932;18:540–51.
[4] Michaud P, Froment R, Pont M, et al. Coronarite ostiale syphi-
litique bilatérale. Désobstruction sous circulation extracorporelle.
Arch Mal Cœur Vaiss 1963;56:286–91.
RÉFÉRENCES [5] Lenègre J, Dubost C, Maurice P. Un cas d'angine de poitrine
syphilitique traité par désobstruction chirurgicale des orifices coro-
[1] Larkin JH, Levy IJ. A pathological study of syphilitic aortitis and its
naires occlus. Arch Mal Cœur Vaiss 1960;53:241–9.
serology. J Exp Med 1916;23:25–38.

32
Arch Mal Coeur Vaiss Prat 2017;2017:33
Erratum

Erratum à « Stimulation cardiaque »


[Arch. Mal. Coeur Vaiss. Prat. 256
(2017) 36–38]

age 35 de l'article, il faut lire « Boucicaut » à la place de « Broussais » à la 7e ligne de la


P colonne gauche.
La rédaction remercie le Professeur Yves Grosgogeat d'avoir eu la gentillesse de signaler cette
inversion.
Nous prions les lecteurs de nous excuser pour cette erreur.

La rédaction

DOI des articles originaux :


https://doi.org/10.1016/j.
amcp.2017.01.006

https://doi.org/10.1016/j.amcp.2017.10.008

33
Erratum Arch Mal Coeur Vaiss Prat 2017;2017:34

Erratum à « L'angiocardiographie »
[Arch. Mal. Coeur Vaiss. Prat. 258
(2017) 36–38]

age 37 de l'article, il faut lire « Boucicaut » à la place de « Broussais » à la 9e ligne de la


P colonne gauche.
La rédaction remercie le Professeur Yves Grosgogeat d'avoir eu la gentillesse de signaler cette
inversion.
Nous prions les lecteurs de nous excuser pour cette erreur.

La rédaction

DOI des articles originaux :


https://doi.org/10.1016/j.
amcp.2017.03.010

https://doi.org/10.1016/j.amcp.2017.10.009

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