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Dix reproches

adressés à

l’Église
d’aujourd’hui

Paul Washer
Dix reproches adressés
à l'Église d'aujourd'hui
Table des matières

1. Le rejet de la suffisance des Écritures .................................................... 6


2. L'ignorance au sujet de Dieu ................................................................... 8
3. On ne traite pas le mal dont souffre l'homme ...................................... 9
4. Notre ignorance de l'évangile de Jésus-Christ .................................... 12
5. Un système d'invitations contraire à la Bible...................................... 15
6. L'ignorance quant à la nature de l'église ............................................. 21
7. L'absence d'une discipline aimante
et compatissante dans l'église ........................................................... 26
8. Le silence au sujet de la séparation ...................................................... 28
9. La psychologie et la sociologie ont évincé
les écritures concernant la famille ................................................... 30
10. Des pasteurs spirituellement sous-alimentés ................................. 34
Publié aux États-Unis en 2008 (en anglais) sous le titre «Ten Indictments against the Modern Church»

©traduction française : Liliane Fleurian

Les citations des versets bibliques proviennent de la version


L. Segond, nouvelle édition de Genève, Société biblique de Genève

Imprimé en 2018 par

CHAPEL LIBRARY
2603 West Wright Street
Pensacola, Florida 32505 USA
chapel@mountzion.org • www.chapellibrary.org

2
Dix reproches adressés
à l'Église d'aujourd'hui

L'Esprit dit expressément que dans les derniers temps,


quelques-uns abandonneront la foi, pour s'attacher
à des esprits séducteurs et à des
doctrines de démons
(1 Tim. 4.1).

Approchons-nous du Seigneur dans la prière.


Père, je viens à toi dans le Nom de ton Fils Jésus-Christ. Seigneur, tu connais toutes
choses. Tout est devant toi comme un livre ouvert. Qui donc parmi nous pourrait dissimu-
ler l'état de son cœur en ta présence, sous ton regard ? Devant toi, les actions des hommes
les plus habiles sont à découvert : ton omniscience est sans limite.
Si ce n'était ta grâce, je serais de tous les hommes le plus terrorisé ; mais ta grâce est une
réalité abondante et glorieuse, et tu la déverses sur le plus faible des hommes. Tu fais
abonder ta grâce pour ta gloire. Père, je te loue et je t'adore. Je te rends grâces pour tout ce
que tu es, pour tout ce que tu as fait. Il n'y a personne comme toi, ni au ciel, ni sur la terre,
ni sous la terre. Tu es le Roi et il n'y en a pas d'autre. Tu es le Sauveur, et tu ne partages
cette gloire avec personne.
Père, tu me connais tel que je suis ; tu connais mon immense besoin de grâce. Pourquoi
suis-je ici, si ce n'est que tu appelles le plus faible des hommes, le plus vil des frères, et que
par ta grâce il est souvent donné au plus petit d'enseigner le plus grand ? C'est constam-
ment le cas pour moi, et je te loue. Je t'adore, toi et toi seul.
Père, viens maintenant à notre secours. À bas tout effet oratoire, et maudit soit le brio in-
tellectuel, Père. Que ta vérité seule soit exaltée. Que des hommes soient transformés pour
que ton Église devienne plus glorieuse. Je t'en prie, accorde-moi, accorde-nous grâce sur
grâce, miséricorde sur miséricorde. Secours-nous, et nous serons secourus ; et de ton se-
cours, nous nous glorifierons dans le Nom de Jésus, Amen.
C'est un immense privilège pour moi d'être là aujourd'hui, un privilège inouï de me tenir
devant vous pour parler de réveil, de réforme, de ce que Dieu fait parmi son peuple et parmi les
hommes. Le message que je vais partager avec vous contient des reproches, mais ce sont des
reproches pleins d'espérance.
Alors que je priais au sujet de ce que je devais vous apporter, je suis arrivé à une impor-
tante conclusion, et un lourd fardeau est venu sur mon cœur. Il nous faut un réveil. Nous
avons besoin d'être tirés de notre sommeil ; mais nous ne pouvons pas tout bonnement nous
attendre à ce que le Saint-Esprit descende et répare tout le gâchis que nous avons fait. La Pa-
role de Dieu nous donne des directives claires sur ce que Dieu a accompli en Christ, sur la fa-
çon dont nous devons conduire notre vie, et sur l'ordre qu'il veut nous voir maintenir dans
3
son Église. Il ne sert pas à grand-chose de demander des manifestations extraordinaires, alors
que tout autour de nous, les principes bibliques sont violés.
Vous le savez sûrement : le diable et les impies n'ont guère de raisons de contrer celui qui
prie pour le réveil, à moins qu'en même temps cet homme n'œuvre à une réforme. Dieu nous
a donné des vérités, et il est impossible de continuer à faire simplement ce qui nous paraît
bon, tout en nous attendant à ce que le Saint-Esprit vienne bénir notre travail.
L'étude de l'Ancien Testament montre que Moïse a reçu des directives extrêmement pré-
cises pour la construction du tabernacle. Cette minutie était-elle exclusivement réservée à
Moïse, ou bien concerne-t-elle aussi l'Église ? À mon avis, elle nous montre que Dieu a des vo-
lontés bien précises, et que nous ne devons pas avoir la présomption d'en considérer le
moindre détail comme insignifiant.
Je le sais, je suis un homme fragile, en proie à bien des faiblesses, mais j'ai sur le cœur des
reproches. Je ne peux pas affirmer que ce sont mes reproches, car qui suis-je pour reprocher
quoi que ce soit à quiconque ? Je n'oserais pas affirmer que ce sont les reproches de Dieu, de
crainte de pécher par présomption. J'affirmerai toutefois ceci : quand je considère l'Église et
que je la compare à l'Écriture, je vois certaines choses qui doivent changer.
1
Je ne me prends pas pour Martin Luther, et je n'arrive pas avec 95 thèses à afficher sur la
porte de l'église du château de Wittenberg, mais j'ai à cœur ce fardeau et il faut que je le par-
tage. Peut-être mes propos susciteront-ils la colère chez certains d'entre vous. Permettez-moi
néanmoins de vous avertir. Peut-être aurez-vous des raisons de me taxer d'arrogance. Peut-
être n'aimerez-vous pas ma façon de parler. Oui, il m'est souvent arrivé d'être arrogant ; et
plus d'une fois j'ai proclamé des vérités de façon critiquable. Toutefois, ne permettez pas à ces
défauts de vous servir de prétexte. La question véritable est la suivante : est-ce que ce que je
dis est vrai, malgré les défauts de celui qui s'adresse à vous ?
D'autres parmi vous se réjouiront de mes propos, auront envie de crier « Amen ! » et de
bomber le torse. Je vous en supplie, abstenez-vous de faire cela, car nous sommes tous cou-
pables dans une certaine mesure. Si vous êtes parvenu à une certaine maturité spirituelle,
alors je dirai comme mon frère : Qu'as-tu que tu n'aies reçu? Et si tu l'as reçu, pourquoi te
vantes-tu, comme si tu ne l'avais pas reçu ? (1 Cor. 4.7). Ne vaut-il pas mieux tout simplement
que nous adorions Dieu dans l'humilité ?
Si vous êtes un jeune pasteur, je ne veux pas que vous vous empariez avec enthousiasme de
ces vérités pour en bombarder votre église sans amour, dès que vous reviendrez chez vous.
Avant de vous lancer dans une réforme quelconque, assurez-vous d'abord que vos genoux
soient en sang. Si vous êtes un pasteur d'âge mûr, servant le Seigneur depuis longtemps, je
vous supplie de ne pas être arrogant, car un vieux roi insensé peut apprendre quelque chose du
plus faible de ses serviteurs.
Je vous supplie aussi de trouver le courage de changer tout ce qui doit être changé, même
dans le cas où il ne vous resterait qu'un seul jour à vivre. Au moins vous pourrez entrer dans la
gloire en sachant que vous avez essayé d'apporter une réforme biblique.

1
Luther afficha 95 thèses sur la porte de l'église du château à Wittenberg, (Allemagne) le 31 octobre 1517, ce
qui déclencha la Réforme protestante.
4
Aux plus âgés d'entre vous, je voudrais adresser un avertissement. Je vous en prie, écoutez-
moi avec attention. Je sais de quelle manière 1 Timothée 5 m'ordonne de m'adresser à vous, et
c'est bien ainsi que je vous parle 2. Sachez qu'il y en a beaucoup qui s'éveillent dans ce pays et
ailleurs, en Europe, en Amérique du Sud, et en bien d'autres lieux. Je vois des jeunes gens qui
reviennent vers le rocher duquel nous avons été coupés, lisant Spurgeon 3 et Whitefield 4, et
toujours à l'écoute de Leonard Ravenhill 5, de Martyn Lloyd-Jones 6, de Tozer 7 et de Wesley 8.
C'est un vaste mouvement, et c'est inouï ! Les médias populaires et le magazine « Christianity
Today 9 » ne se doutent même pas de ce qu'il se passe. J'avoue qu'il y a quinze ans, jamais je
n'aurais imaginé que cet éveil puisse se produire. Mon ministère n'y est pour rien. C'est Dieu
qui accomplit cela, indépendamment de tous nos ministères.
C'est le cas en Hollande, où mille jeunes hommes déclarent : « Il faut que cela change », et
pendant une nuit entière ils crient à Dieu pour qu'il manifeste sa puissance et la vérité des
Écritures. Cela se passe en Amérique du Sud, où ils reconnaissent qu'en matière d'évangélisa-
tion ils ont grandement subi l'influence de la psychologie et de toutes sortes de techniques su-
perficielles d'origine américaine ; à présent, dans les larmes et dans le brisement, ils se remet-
tent à évangéliser leurs églises. Je pourrais vous parler des milieux urbains aux États-Unis :
parfois j'y suis resté jusqu'à deux ou trois heures du matin à parler de théologie avec des
jeunes Afro-Américains que Dieu va faire lever, et qui prêcheront plus que personne ne peut
imaginer. Un éveil est en train de se produire.
C'est avec tendresse que je voudrais ajouter ceci : la plupart de ceux qui ont dépassé la qua-
rantaine ne savent strictement rien de cet éveil. De nombreux jeunes gens retournent vers les
grands enseignants des siècles précédents, vers les anciens sentiers, vers les vérités qui plus
d'une fois ont apporté le réveil au monde. Ils sont en général très jeunes. Ils vont vers leurs
responsables et s'exclament : Regardez donc ce que nous avons découvert ! Voyez ce qu'il s'est
passé au Pays de Galles 10 ! Voyez ce qui s'est produit en Afrique11 ! Voyez donc ceci ! Et cela ! Et

2
Ne réprimande pas rudement le vieillard, mais exhorte-le comme un père (1 Tim. 5.1).
3
Charles H. Spurgeon (1834-1892), pasteur anglais influent, qui prêchait chaque semaine à six mille
personnes au Metropolitan Tabernacle à Londres. Ses sermons réunis remplissent 63 volumes.
4
George Whitefield (1714-1770) L'évangéliste anglais le plus connu du 18e siècle, prédicateur itinérant
grandement utilisé par Dieu en Angleterre et en Amérique au cours du « Grand Réveil ».
5
Leonard Ravenhill (1907-1994) Prédicateur et auteur chrétien anglais, centré sur la prière et sur le réveil. Il
exhortait l'Église d'aujourd'hui à suivre l'exemple de celle du 1er siècle, selon les Actes des apôtres.
6
David Martyn Lloyd-Jones (1899-1981) Pasteur gallois bien connu, prédicateur et expositeur de la Bible.
Appelé par Dieu à prêcher l'Évangile, il quitta une carrière prometteuse dans le monde médical. Son
message consiste en une exposition des Écritures, centrée sur Christ.
7
Aiden W. Tozer (1897-1963) Pasteur, prédicateur et auteur américain, de l'Alliance Chrétienne
Missionnaire. Connu pour sa piété personnelle profonde, il interpella vigoureusement l'Église moderne
pour qu'elle se repente de sa superficialité et de ses compromis avec le monde.
8
John Wesley (1703-1791) Pasteur et théologien anglican, connu pour avoir fondé avec son frère Charles le
mouvement méthodiste anglais, lancé quand il se mit à prêcher en plein air, suivant l'exemple de George
Whitefield.
9
Christianity Today : magazine mensuel traitant de divers sujets évangéliques.
10
Allusion au grand réveil gallois (1904-1905), qui commença à l'automne de 1904 sous la conduite d'Evan
Roberts (1878-1951), ancien mineur suivant alors une formation de pasteur. Ce réveil dura moins d'un an
mais suscita cent mille conversions, et de nombreuses églises revinrent alors à la foi biblique.
11
Allusion à l'évangélisation de l'Afrique subsaharienne, commencée au cours de la période coloniale au début
5
tel enseignement, il est absolument inouï ! Pour l'instant, la plupart de leurs aînés se détour-
nent d'eux ou disent : « Cela ne diffère en rien de ce que je prêche depuis vingt-cinq ans. » En
réalité, cela diffère du tout au tout de ce que ces hommes prêchent depuis vingt-cinq ans.
Nous devons donc être extrêmement attentifs et comprendre que Dieu accomplit là une
grande œuvre ; et celui qui a commencé en vous cette bonne œuvre la rendra parfaite pour le
jour de Jésus-Christ (Ph. 1.6).
Beaucoup croient qu'ils vont amener un réveil à force de prier. D'autres affirment : « Le
réveil viendra, que vous priiez ou non. » Je ne suis d'accord ni avec les uns, ni avec les autres,
parce que je sais que quand des hommes, des femmes, et des jeunes de par le monde prient
pour un réveil, on est déjà en présence des prémices du réveil. Je peux compter sur celui qui
accorde les prémices pour qu'il accorde aussi toute la moisson.
Maintenant, je voudrais présenter dix reproches portant sur ce qui, à mon avis, doit chan-
ger dans l'Église aujourd'hui.

1. Le rejet de la suffisance des Écritures


Depuis ton enfance, tu connais les Écrits sacrés ; ils peuvent te donner la sagesse en vue du salut par
la foi en Christ Jésus. Toute l'Écriture est inspirée de Dieu et utile pour enseigner, pour convaincre,
pour redresser, pour éduquer dans la justice,
afin que l'homme de Dieu soit adapté et préparé à toute œuvre bonne
(2 Tim. 3.15-17).
Voici le premier point : sur le plan de la mise en pratique, il y a un refus de tenir l'Écriture
pour suffisante. Au cours de ces dernières décennies, de gros combats se sont livrés autour de
l'inspiration de l'Écriture. Certains parmi vous n'avez pas pris part à cette bataille, mais beau-
coup de membres des dénominations plus libérales ont été témoins de ce combat pour la
Bible.
Il y a un problème. Une fois que l'ensemble du peuple est parvenu à la conviction que la
Bible est inspirée, on n'a livré que la moitié de la bataille. La question n'est pas seulement :
« La Bible est-elle inspirée, c'est à dire exempte d'erreur ? » Il se pose une deuxième question
capitale qui est : « La Bible est-elle suffisante ? 12 » Autrement dit, pour conduire une église,
devons-nous faire appel à tout ce qui porte le nom de « sciences sociales », et aux études por-
tant sur la culture ? Voilà la question essentielle. À mon avis, les « sciences sociales » ont pris
le pas sur la Parole de Dieu à un tel point que nous ne nous n'en avons même plus conscience.
Ces « sciences » se sont immiscées dans notre église, dans notre évangélisation, et dans notre
missiologie, tant et si bien que nos activités n'ont plus grand-chose de chrétien. Psychologie,
anthropologie et sociologie sont à présent les influences dominantes dans nos églises.
Un jour, il y a bien longtemps, quand j'étais au séminaire, un professeur est entré dans la
salle de cours et s'est mis à dessiner des traces de pas sur le tableau noir, d'un bord à l'autre.
Arrivé au bord, il s'est retourné vers nous, disant : « Aristote arpente les salles de cette institu-

du 19e siècle, et poursuivie actuellement par les missions et les églises autochtones.
12
Voir Geoff Thomas, Satisfied with the Scriptures ; C.H. Spurgeon, The Bible ; John Piper, Is the Bible
reliable ? [Peut-on se fier à la Bible?] Tous les titres mentionnés dans ces notes de bas de page sont
disponibles à CHAPEL LIBRARY
6
tion. Prenez bien garde, parce que l'écho de ses pas est plus fort que celui des pas de l'apôtre
Paul et de ses compagnons inspirés, plus fort que l'écho des pas du Seigneur Jésus lui-même. »
Nous en sommes arrivés à croire qu'un homme de Dieu n'est capable de s'occuper, dans la
vie de l'Église, que de certains domaines très restreints. Quand se présente une vraie difficulté,
nous croyons devoir recourir aux experts en « sciences sociales ». Il y a là un mensonge colos-
sal. La Bible déclare que les Écritures nous ont été données pour que l'homme de Dieu soit
adapté ... à toute œuvre bonne (2 Tim. 3.17).
Qu'y a-t-il de commun entre Jérusalem et Rome ? Qu'avons-nous de commun avec toutes
ces « sciences sociales » qui ont été créées, c'est un fait bien établi, pour contester la Parole de
Dieu ? Pourquoi l'évangélisation, les missions, et ce prétendu mouvement de « croissance de
l'Église » portent-ils le label des anthropologues, des sociologues, des courtiers en bourse, et
de toutes les dernières modes culturelles ? Toutes les activités de nos églises doivent être fon-
dées sur la Parole de Dieu. Toute activité missionnaire doit être fondée sur la Parole de Dieu.
Nos activités missionnaires, nos activités d'église, et tout ce que nous faisons doit émaner
du théologien et de l'exégète, de l'homme qui ouvre la Bible en posant une seule question : « O
Dieu, quelle est ta volonté ? » Nous ne devons en aucun cas envoyer de questionnaires à ceux
qui sont dans la chair pour leur demander quelle sorte d'église ils souhaiteraient fréquenter !
L'église doit être ouverte au chercheur, mais en reconnaissant qu'un seul est chercheur, Dieu !
Si vous voulez vous montrer favorable envers quelqu'un, répondre à la demande de quelqu'un,
répondez donc à la demande du Dieu de gloire, même si par ailleurs tout le monde vous re-
jette. Nous ne sommes pas appelés à bâtir des empires. Notre vocation n'est pas la recherche
du grandiose : elle est de glorifier Dieu. Si jamais vous voulez que l'Église soit autre chose
qu'un peuple appartenant en propre à Dieu (Ti. 2.14, et 1 Pierre 2.9), alors vous voulez ce que
Dieu ne veut pas.
J'aimerais que vous écoutiez pendant quelques instants le chapitre 8 d'Ésaïe (Es. 8.19) : Si
l'on vous dit : consultez ceux qui invoquent les esprits et les spirites, ceux qui chuchotent et
murmurent. Ce verset décrit parfaitement les gourous de la croissance de l'Église, car tous les
deux ou trois ans, tous leurs principes directeurs changent, et pas seulement au sujet de
l'homme et de la façon de traiter ses problèmes, mais aussi au sujet de l'Église et de la manière
de la faire croître. Tous les deux ou trois ans, une nouvelle mode se présente sur la manière de
rendre votre église impressionnante aux yeux du monde. Tout récemment, un des plus cé-
lèbres experts en croissance de l'Église a avoué qu'il reconnaissait que toutes ses théories
étaient complètement fausses ; mais au lieu d'encourager les gens à se tourner vers les Écri-
tures, à genoux dans les larmes et dans le brisement, le voilà reparti en quête d'une nouvelle
théorie !
Ces hommes ne déclarent rien de clair ; mais Ésaïe dit : Un peuple ne consultera-t-il pas
son Dieu ? S'adressera-t-il aux morts en faveur des vivants ? (És. 8.19b-20). Nous, membres
d'église et pasteurs, en tant que chrétiens, nous faut-il aller consulter des morts spirituels
pour apprendre à nous occuper de ceux dont le Saint-Esprit a fait des vivants ? À Dieu ne
plaise !

7
2. L'ignorance au sujet de Dieu
Dieu, sans tenir compte des temps d'ignorance, annonce maintenant
à tous les hommes en tous lieux qu'ils ont à se repentir
(Actes 17.30).
On me dit parfois :
- Frère Paul, viens donc passer toute une semaine à nous enseigner sur les attributs de
Dieu. Souvent, je réponds :
- Mon frère, est-ce que tu as bien réfléchi à tout ce que cela implique ? Je me rappelle une
conversation en particulier, où le pasteur a répliqué :
- Mais enfin, qu'est-ce que tu veux dire quand tu demandes si j'ai bien réfléchi à tout ce
que cela implique ?
- Eh bien, le thème que tu me proposes de traiter dans ton église est largement sujet à con-
troverse.
- Sujet à controverse ? Je te demande de parler de Dieu. Nous sommes une église. Nous
sommes chrétiens. Comment ce thème-là pourrait-il bien susciter des controverses ? Alors j'ai
répondu :
- Cher pasteur, quand je commencerai à enseigner ton assemblée sur la justice de Dieu,
sur la souveraineté de Dieu, sur la colère de Dieu et sur la suprématie de Dieu, quelques-uns
des meilleurs et des plus anciens membres de ton église vont se lever et déclarer :« Mon dieu
n'est pas comme cela. Jamais je ne pourrais aimer un Dieu comme celui-là. » Pourquoi ? Parce
qu'ils ont un dieu qui est le produit de leurs propres pensées, et qu'ils sont épris de ce qu'ils
ont eux-mêmes fabriqué.
Ainsi parle le Seigneur : Que le sage ne se glorifie pas de sa sagesse, que le fort ne se glori-
fie pas de sa force, que le riche ne se glorifie pas de sa richesse, mais que celui qui veut se
glorifier se glorifie d'avoir de l'intelligence et de me connaître, de savoir que je suis l'Éter-
nel, qui exerce la bonté, le droit et la justice sur la terre, car c'est à cela que je prends
plaisir, dit l'Éternel (Jérémie 9. 23-24).
Voilà ce que tu as fait, et je me suis tu. Tu t'es imaginé que je te ressemblais ; mais je
vais te reprendre et tout mettre sous tes yeux. Prenez-y donc garde, vous qui oubliez Dieu,
de peur que je ne déchire, sans que personne délivre (Ps. 50.21-22).
Où donc est le problème ? Il est dans le manque de connaissance de Dieu 13. Beaucoup
d'entre vous pensez peut-être : « Ah, les attributs de Dieu et la théologie, tout cela relève du
domaine de la tour d'ivoire, et cela n'a pas d'applications pratiques. » Savez-vous pourquoi
toutes vos librairies chrétiennes sont bourrées de manuels enseignant le développement per-
sonnel et les moyens de résoudre ses problèmes tout seul ? Cinq manières de faire ceci, les six
clés de la sanctification, et les dix moyens d'éviter la chute ? C'est parce qu'on ne connaît pas
Dieu ! Alors il faut fournir aux gens toutes sortes de petits trucs charnels pour qu'ils conti-
nuent à marcher comme il conviendrait à des brebis. Revenez à vous-mêmes, comme il est
convenable, et ne péchez point, car certains d'entre vous ne connaissez pas Dieu ; je le dis à
13
Voir l'ouvrage de J.I. Packer, Connaître Dieu, Éd. Grâce et Vérité ; et A.W. Pink , The Attributes of God.
8
votre honte (1 Cor. 15.34). Pourquoi le péché sévit-il à ce point, même au sein du peuple de
Dieu ? C'est parce que la connaissance de Dieu est absente !
Permettez-moi de vous poser une question. Quand, pour la dernière fois, avez-vous pris
part à un rassemblement qui avait pour thème les attributs de Dieu ? Pasteurs, quand pour la
dernière fois avez-vous passé toute une année à enseigner sur la nature de Dieu ? Combien
d'enseignements dispensés à longueur de semaine dans ce pays ont-ils l'ombre d'un rapport
avec la nature de Dieu ? Combien il est facile de nager dans le sens du courant, d'emboîter le
pas à tous les autres ! Puis un jour, vous entendez des propos comme ceux que je tiens, et vous
vous dites soudain : « Je ne me souviens pas d'avoir jamais entendu qui que ce soit enseigner
sur les attributs de Dieu. » Alors faut-il s'étonner de ce que nous soyons dans un état pareil ?
Connaître Dieu, voilà la base de tout. Connaître Dieu, c'est la vie éternelle. Or la vie éter-
nelle ne commencera pas au moment où vous franchirez les portes de la gloire : la vie éter-
nelle commence dès la conversion. La vie éternelle, c'est connaître Dieu. Croyez-vous vrai-
ment que vous trouverez du ravissement à jouer à la balançoire sur les portes de perle, et à
arpenter les rues d'or pour l'éternité ? Il y a là quelqu'un dont la gloire est infinie, et au bout
de multiples éternités vous n'aurez toujours pas entouré de vos bras la base de sa montagne !
Commencez donc dès maintenant. Il y a tant de choses que vous désirez savoir et faire,
tant de livres que vous voulez lire. Prenez donc un livre sur Dieu (celui-ci, la Bible) et étudiez-
le, afin de le connaître – le connaître, lui !
Pour toutes ces raisons, à mon avis, il vaudrait peut-être mieux dans certains cas ne pas
avoir de culte le dimanche matin. Le dimanche matin est le moment où il y a le plus d'idolâ-
trie dans tout le pays, car une vaste portion de la population ne rend pas de culte au seul vrai
Dieu. À la place, elle rend un culte à un dieu issu de son propre cœur, à un dieu qui est le fruit
de sa propre chair, le produit d'astuces sataniques, le dieu de l'intelligence selon ce monde.
Elle s'est fabriqué un dieu qui lui ressemble en tous points, et qui tient davantage du père Noël
que de Yahvé. On ne trouve chez nous aucune crainte de Dieu, car il n'y a pas de connaissance
de Dieu.

3. On ne traite pas le mal dont souffre l'homme


Comme il est écrit : il n'y a point de juste, pas même un seul ;
nul n'est intelligent, nul ne cherche Dieu ; tous sont
égarés, tous sont pervertis ; il n'en est aucun
qui fasse le bien, pas même un seul
(Rom. 3.10-12).
L'Épître aux Romains est l'un des livres que j'aime le plus dans la Bible. Ce n'est pas une
théologie systématique, mais c'est ce qui s'en approche le plus. N'est-il pas étonnant que tout
au long des trois premiers chapitres, Paul ne traite qu'un seul sujet ? Il commence par enfer-
mer tous les hommes sous la condamnation. Cependant, la condamnation n'est pas le souve-
rain bien de sa théologie ; ce n'est pas son but, son propos ultime. Pour Paul, c'est le moyen
d'amener ses lecteurs au salut, parce que les hommes doivent parvenir à se connaître eux-

9
mêmes 14 avant que leur moi puisse capituler devant Dieu. Les hommes sont tellement déchus
qu'il leur faut être dépouillés de toute espérance placée dans leur propre chair, avant qu'ils
puissent être amenés à Dieu.
Cette question-là est capitale dans tous les domaines, et tout particulièrement en matière
d'évangélisation. À 21 ans, je venais d'être appelé à prêcher. À Paducah dans le Kentucky, je
suis allé dans un magasin où l'on accordait aux prédicateurs une remise de 50% sur les com-
plets, et cela depuis 50 ou 60 ans. Soudain, la porte s'ouvre. Une sonnerie retentit, puis la
porte se referme. Un homme extrêmement âgé est là devant moi. Je n'arrive pas à saisir son
nom, mais il s'approche, me regarde et dit :
- Mon garçon, vous avez reçu un appel pour être prédicateur, n'est-ce pas ? Je réponds :
- Oui, Monsieur . C'est un évangéliste très, très âgé. Il dit :
- Vous voyez ce bâtiment, là, dehors ? Je dis :
- Oui, je le vois. Il poursuit alors :
- Autrefois, j'y prêchais. L'Esprit de Dieu descendait et des âmes étaient sauvées. Je de-
mande :
- S'il vous plaît, Monsieur, dites-moi comment cela se passait. Il répond :
- Cela ne ressemblait pas du tout à l'évangélisation actuelle. Nous prêchions pendant deux
ou trois semaines. La prédication terminée, nous n'appelions personne à prendre une décision.
Nous labourions simplement les cœurs sans discontinuer, jusqu'à ce que le Saint-Esprit se
mette à les travailler, à les briser. Je demande :
- À quoi reconnaissiez-vous, Monsieur, que le Saint-Esprit était présent pour briser les
cœurs ? Il répond :
- Je vous donne un exemple. Il y a bien des décennies, je suis entré dans ce magasin pour
acheter un complet. Quelqu'un m'avait remis 30 dollars en disant : « Pasteur, allez donc vous
acheter un complet demain. » Quand je suis arrivé dans le magasin, le jeune employé qui en
avait la charge s'est retourné et m'a fixé ; tout en me regardant, il est tombé à terre en
s'écriant : « Qui donc peut sauver un méchant de mon espèce ? » Alors j'ai compris que l'Es-
prit de Dieu était descendu ici.
De nos jours, nous nous contentons d'arriver, de parler aux gens ; nous posons deux ou
trois questions pour voir où ils en sont, puis nous leur demandons s'ils veulent répéter une
prière après nous, et demander à Jésus d'entrer dans leur cœur. Nous en faisons des fils de
l'enfer deux fois pires que nous, et ils ne seront plus jamais ouverts à l'Évangile à cause de ce
pieux mensonge qui est sorti de nos bouches « évangéliques ».
En traitant le péché aussi superficiellement, tout d'abord nous nous opposons au Saint-
Esprit. Quand il viendra, il convaincra le monde de péché (Jean 16.8). Il y a aujourd'hui des
prédicateurs très populaires qui se soucient davantage de vous promettre « le meilleur dès
maintenant » que de vous préparer à l'éternité. Ils se glorifient de ce que leurs prédications ne
contiennent jamais d'allusions au péché. Je suis en mesure d'affirmer ceci : le Saint-Esprit n'a
aucune part dans leur ministère, car sinon, il s'opposerait à lui-même. Pourquoi ? Si quel-
qu'un déclare que son ministère ne se soucie aucunement du péché de l'homme, en revanche

14
Voir A.W. Pink, Vile ; et J. Edwards, Entre les mains d'un Dieu en colère, Europresse (distribué par Excelsis).
10
le Saint-Esprit, lui, s'en soucie. Une des principales actions du Saint-Esprit est justement de
venir convaincre le monde de péché. Sachez-le donc bien : Quand vous négligez de traiter la
question de l'être humain et de sa nature dépravée, le Saint-Esprit est loin de vous.
Nous sommes des tricheurs, des trompeurs, quand nous traitons superficiellement le mal
dont souffrent les hommes, à la manière des bergers du temps de Jérémie. Ils pansent à la lé-
gère la plaie de la fille de mon peuple : Paix, paix, disent-ils, et il n'y a point de paix (Jér.
6.14).
Nous ne sommes pas seulement des tricheurs : nous sommes immoraux. Nous ressem-
blons à un médecin qui renie le serment d'Hippocrate parce qu'il ne veut annoncer de mau-
vaise nouvelle à personne, de peur que son patient ne se fâche contre lui ou ne soit attristé.
Alors ce médecin refuse de communiquer la nouvelle indispensable qui sauverait la vie du pa-
tient.
Certains prédicateurs actuels me disent : « Mais non, Paul, tu ne comprends pas. Nous ne
ressemblons pas aux contemporains de John et Charles Wesley. Notre culture n'est pas comme
celle que connaissaient Whitefield et Edwards 15. Nous n'avons pas leur robustesse ; nous
sommes brisés. Nous n'avons pas l'estime de soi qui était la leur. Nous sommes trop faibles
pour supporter d'entendre une pareille prédication. » Écoutez-moi, je vous prie. Avez-vous
jamais étudié les biographies de ces hommes-là ? Leur culture non plus ne pouvait pas suppor-
ter leur prédication ! Personne n'a jamais été capable de supporter la prédication de l'Évangile.
Ou bien on s'y opposera avec une férocité toute animale, ou bien on se convertira. Notre
monde est infesté d'un mal écœurant : la quête de « l'estime de soi » 16. Or notre problème
numéro un, c'est que nous estimons notre moi plus que nous n'estimons Dieu !
En refusant d'approfondir la question du péché, nous sommes aussi des voleurs. Oui, des
voleurs ! Où donc sont passées toutes les étoiles ce matin ? Quelque géant cosmique serait-il
venu avec un panier pour les cueillir toutes et les emporter ailleurs ? Où sont-elles passées,
toutes ces étoiles ? Elles sont toujours là, mais on ne les voit plus. Ce soir le ciel s'assombrira,
puis la nuit noire descendra. Alors les étoiles deviendront visibles dans toute leur gloire. Si
vous refusez d'enseigner sur la dépravation radicale de l'homme, il devient impossible de glori-
fier Dieu, son Christ, et l'œuvre de la croix, parce que la croix de Jésus-Christ et sa gloire ne
sont exaltées que lorsqu'on les présente sur la toile de fond de notre dépravation. Elle a beau-
coup aimé, parce qu'il lui a été beaucoup pardonné (Luc 7.47). Cette femme savait tout ce que
Christ lui avait pardonné, car elle savait combien elle était perverse.
Nous avons peur de dire aux hommes à quel point ils sont mauvais, et voilà pourquoi ils ne
pourront jamais aimer Dieu. Nous leur volons la possibilité de cesser de se glorifier eux-
mêmes, la possibilité d'obéir à l'injonction : Celui qui se glorifie, qu'il se glorifie dans le Sei-
gneur (1 Cor. 1.31).

15
Jonathan Edwards (1703-1758) Prédicateur américain, pasteur congrégationaliste et théologien
évangélique, bien connu pour ses prédications aux côtés de George Whitefield lors du « Grand Réveil ».
16
Voir Jay Adams, The Biblical view of self-esteem, Chapel Library.
11
4. Notre ignorance de l'évangile de Jésus-Christ
Mais voici comment Dieu prouve son amour envers nous : alors que nous
étions encore des pécheurs, Christ est mort pour nous. Puisque nous
sommes maintenant considérés comme justes à cause de son sang,
nous serons à bien plus forte raison sauvés par lui de la
colère de Dieu (Romains 5. 8-9).

Je soutiens que ce pays n'est pas endurci contre l'Évangile. Non, il ignore ce qu'est l'Évan-
gile, parce que la plupart des prédicateurs l'ignorent eux-mêmes. Permettez-moi de dire ce-
la autrement : le mal dont souffre notre pays n'est ni le libéralisme politique, ni le socialisme
qui s'y est enraciné, ni Hollywood, ni quoi que ce soit de ce genre. Ce mal, c'est le pasteur pré-
tendument évangélique, le prédicateur, l'évangéliste d'aujourd'hui. Là se trouve le mal. Nous
ne savons pas ce qu'est l'Évangile. 17 Nous nous sommes emparés du glorieux Évangile de notre
Dieu trois fois saint et nous l'avons réduit à quatre lois spirituelles, à cinq choses que Dieu
veut que vous sachiez, le tout se terminant par une petite prière superstitieuse. Si quelqu'un
répète cette prière après nous avec assez de sincérité, alors avec un aplomb auquel le pape
n'aurait rien à envier, nous lui annonçons qu'il est né de nouveau ! Nous avons remplacé la
18 19
régénération par le « décisionnisme ».
Tout d'abord, quand je parle de cette question, je suis stupéfait de voir des chrétiens sé-
rieux qui marchent dans la foi depuis trente ou quarante ans, et qui viennent me dire en pleu-
rant : « Frère Paul, c'est la première fois de ma vie que j'entends dire cela. » Pourtant, il n'est
question là que des doctrines historiques de la rédemption 20 et de la propitiation. 21
Tâchons de cerner le problème avec netteté. L'évangélisation commence par l'annonce de
la nature de Dieu. On traite ensuite de la nature de l'homme et de sa condition déchue. Ces
deux grands piliers de l'Évangile nous permettent alors de poser ce que tout chrétien devrait
appeler « le grand dilemme ». Quel est donc ce dilemme ? Le plus grand problème posé dans
toute l'Écriture peut se formuler ainsi : Si Dieu est parfaitement juste, alors il ne peut pas
vous pardonner votre péché. Alors comment Dieu peut-il être juste tout en déclarant justes
des impies, alors que toute l'Écriture proclame : Celui qui absout le coupable et celui qui
condamne le juste font tous deux horreur à l'Éternel (Proverbes 17.15) ? Je prends ce verset
des Proverbes pour principal exemple. Pourtant, tous nos chants chrétiens glorifient l'acquit-
tement du coupable par le Seigneur !

17
Voir Robert Hawker, The True Gospel, et Free Grace Broadcaster, n° 198, « The Gospel », Chapel Library.
18
Voir A.W. Pink, Regeneration, et Free Grace Broadcaster, n° 202, The New Birth, Chapel Library.
19
Décisionnisme : néologisme désignant la croyance selon laquelle une prise de décision (souvent exprimée
par le fait de s'avancer dans une assemblée, et/ou de prononcer « la prière du pécheur ») reviendrait à se
repentir de ses péchés et à mettre sa foi en Christ seul pour recevoir le pardon. Voir James Adams,
Decisional Regeneration.
20
Rédemption : le fait de délivrer les élus de Dieu de leur état de péché pour leur accorder le salut par les
mérites de Christ qui a versé leur rançon.
21
Propitiation : ce mot veut dire apaisement au moyen d'une offrande pour le péché, détournant la colère
divine.
12
Là est la question centrale, celle que Martyn Lloyd-Jones et Spurgeon appelaient « l'Acro-
pole 22 de la foi chrétienne ». Tout homme qui a lu Romains 3 en dira autant. Voyez-vous, il
faut faire comprendre ce problème à tous. Le grand dilemme, c'est que Dieu est absolument
juste, et tout homme est radicalement impie. Pour être juste, Dieu se doit de le condamner.
Alors pour sa propre gloire, et manifestant envers nous un immense amour, Dieu a envoyé son
Fils qui a marché sur la terre en homme parfait. Ensuite, conformément au projet éternel de
Dieu, le Fils a marché vers ce bois sur le Calvaire. Sur le bois de la croix il a porté notre péché.
Prenant, juridiquement parlant, la place de son peuple, et portant notre culpabilité, il a été fait
malédiction. Maudit est quiconque n'observe pas tout ce qui est écrit dans le livre de la loi
(Gal. 3.10). Christ nous a rachetés de la malédiction en devenant malédiction à notre place
(Gal. 3.13).
Tant de personnes ont de l'Évangile une vision romantique, vidée de toute puissance. Pour
ces personnes, Christ est là, supportant les blessures infligées par l'empire romain, et comme
le Père n'avait pas la fortitude morale de supporter la souffrance de son Fils, il s'est détourné
de lui. MAIS NON ! Le Père s'est détourné parce que son Fils avait été fait péché !
Quand Christ dans le jardin de Gethsémané s'écrie : Que cette coupe s'éloigne de moi
(Matt.26.39) on se livre à des spéculations comme celles-ci : « Qu'y avait-il dans la coupe ?
Oui, il y avait la croix romaine, le fouet, les clous, cette atroce souffrance physique. » Je ne
veux rien enlever à la souffrance physique de Christ sur le bois de la croix ; mais cette coupe
était celle de Dieu. Il fallait que la colère du Père fût déversée sur le Fils. Il fallait qu'un
homme meure, portant la culpabilité du peuple de Dieu, abandonné du Père à cause de sa jus-
tice, et broyé sous la colère divine, car il a plu à l'Éternel de le briser (És. 53.10).
Dernièrement, en visite dans un séminaire germanophone européen, j'ai aperçu un livre,
« The Cross of Christ » [La croix de Christ] ; pas celui de John Stott, un autre. Je l'ai pris et me
suis mis à le lire, et voici ce qu'il disait : « Le Père a regardé du haut du ciel la souffrance infli-
gée par les hommes à son Fils, et l'a comptée comme le paiement de notre dette. » Voilà une
déclaration hérétique ! Oui, cette souffrance physique, le fait d'être cloué sur la croix, tout cela
faisait partie de la colère de Dieu. Le sacrifice devait comporter une effusion de sang. Je n'ai
rien à redire à cela ; mais chers amis, si vous vous arrêtez là, vous n'avez pas l'Évangile. Quand
on prêche l'Évangile aujourd'hui, quand on le partage lors d'une évangélisation d'un à un, en-
tendez-vous jamais parler de la justice divine et de la colère divine ? Presque jamais. On ex-
plique rarement que Christ a pu nous racheter parce qu'il a été broyé par la justice de Dieu ; et
puisqu'il a satisfait cette justice divine par sa mort, à présent Dieu est à la fois juste et le justi-
ficateur des impies.
C'est ainsi qu'on rabaisse l'Évangile ! Ensuite on se demande pourquoi il n'a pas de puis-
sance. Que s'est-il passé ? Je vais vous le dire. Une fois l'Évangile mis de côté, ce qui passe pour
être le message d'évangélisation perd sa puissance, alors on doit se livrer à tous ces petits
tours de passe-passe qui servent si souvent aujourd'hui à « convertir » les gens. Nous connais-
sons tous la plupart de ces petits tours ; mais aucun n'est efficace !
Il y a plusieurs années, après avoir obtenu mon diplôme au séminaire, j'ai dû me décider
pour ou contre un doctorat de troisième cycle. Pour sauver ma vie spirituelle, Dieu m'a envoyé

22
Acropole signifie « ville haute » ; ici le mot veut dire « point culminant ».
13
en pleine jungle au Pérou, aussi loin que possible des milieux universitaires. Là, j'ai commen-
cé à prendre conscience de la réalité. Comme l'a dit Spurgeon : « Des hommes plus grands que
moi avec de plus grands intellects que le mien se sont penchés sur la doctrine du retour de
Christ, sans parvenir à un résultat : or c'est une doctrine magnifique et puissante. Pour ma
part, je m'attacherai à ceci : je chercherai à saisir quelque chose de Jésus-Christ, et de Jésus-
Christ crucifié. »
Cela me met dans une telle colère quand on traite le glorieux Évangile de Christ comme
s'il n'était que le tout premier petit pas dans la vie chrétienne, et comme si on pouvait en faire
le tour en une dizaine de minutes avant de passer à d'autres sujets plus importants. Faire cela,
c'est montrer que notre connaissance des choses de Dieu est lamentablement rabougrie.
Mes amis, au jour du retour de Christ nous comprendrons absolument tout sur le Second
Avènement, mais au bout d'une éternité d'éternités au ciel, nous n'aurons même pas com-
mencé à saisir toute la gloire divine du Calvaire. Le Calvaire : tout est là. Jeune homme, jeune
prédicateur, écoute-moi. Attache-toi à connaître la vérité sur ce bois, la vérité sur la croix et sa
signification. Tu n'auras plus jamais besoin d'aller chercher du feu étranger pour ton four,
(Lév. 10.1-3) pour peu que tu comprennes quelque chose de ce que Christ a accompli sur ce
bois.
J'aime parler de cette scène. J'ai dû l'évoquer des milliers de fois : Abraham gravit la mon-
tagne, emmenant son fils Isaac, son fils, son unique, son bien-aimé. Ne croyez-vous pas que là,
le Saint-Esprit cherche à nous parler d'un événement futur ? Ce fils ne résiste pas ; il se
couche sur l'autel. Le père remet sa volonté à la volonté de Dieu et lève son couteau de silex
pour transpercer le cœur de son propre fils. Mais alors Dieu arrête sa main et fait savoir au
vieil homme qu'il a donné un bélier pour le sacrifice. Beaucoup de chrétiens se disent : « Ah !
Comme cette histoire finit bien ! » Mais ce n'est pas la fin de l'histoire : ce n'est qu'un inter-
mède. Des milliers d'années plus tard, Dieu le Père pose sa main sur le front de son Fils, son
unique, son bien-aimé, reprend le couteau de silex de la main d'Abraham, et immole son Fils
unique avec toute la force de sa colère.
Savez-vous maintenant pourquoi l'Évangile que vous prêchez n'a pas de puissance ? Parce
que ce n'est pas l'Évangile ! Allez vers l'Évangile ; passez votre vie à genoux. Détournez-vous
des hommes : étudiez la croix !
Ce quatrième reproche concerne en fait la méconnaissance de la doctrine de la régénéra-
tion. Je sais qu'il y ici des calvinistes et des arminiens 23, et qu'entre les deux il y a toutes sortes
d'hybrides étranges. Mais je tiens à le dire : la question fondamentale n'est pas le calvinisme. Je
vais vous dire quelle est la question fondamentale : c'est la régénération. Voilà pourquoi je
suis en communion avec Wesley, Ravenhill, Tozer, et tant d'autres : peu importent leurs con-
victions sur d'autres points, car ils croyaient que le salut ne pouvait pas être manipulé par le
prédicateur, que ce salut était une œuvre puissante et magnifique du Dieu omnipotent. Alors
voilà pourquoi je me tiens à leur côté.

23
Jean Calvin (1509-1564) et ceux qu'on appelle calvinistes professent que la Bible enseigne l'autorité
suprême des Écritures, la souveraineté de Dieu, la prédestination, et les doctrines de la grâce. Les
arminiens, disciples du théologien hollandais Arminius (1560-1609) rejettent cette conception de la
prédestination, enseignant que celle-ci est fondée sur la pré-connaissance divine d'une acceptation ou d'un
rejet de Christ par le libre-arbitre humain.
14
Cette œuvre de régénération par le Saint-Esprit manifeste davantage de puissance divine
que ne le fit la création du monde, et même la création de l'univers. En effet, Dieu a crée l'uni-
vers « ex nihilo », à partir de rien ; mais là, il recrée un être humain à partir d'une masse de
corruption. C'est à mettre en parallèle avec la résurrection de notre Sauveur d'entre les morts.
Je le comprends : parmi les prédicateurs il y a des enseignants, des prêcheurs, et des expo-
siteurs. Tous sont indispensables à la santé de l'Église. Mais il vous faut saisir ceci : J'ai enten-
du dire que le vieux pasteur Campbell Morgan, quand il montait dans cette tour majestueuse
pour prêcher, se redisait ces paroles : Pareil à un agneau qu'on mène à l'abattoir, à une brebis
muette devant ceux qui la tondent... (És. 53.7). Il savait bien qu'en-dehors d'une œuvre régé-
nératrice magnifique du Saint-Esprit, tout ce qu'il dirait serait lettre morte. C'est l'Esprit qui
fait vivre (Jn 6.63).
En ce sens, nous tous qui proclamons la vérité de la Parole de Dieu devons le faire de ma-
nière prophétique. Ce que je veux dire par là, c'est que tous, nous sommes toujours comme
Ézéchiel dans cette vallée d'ossements desséchés, complètement secs (Éz. 37.1-2) ! Nous nous
tenons là, et que faisons-nous ? Nous prophétisons, disant : « Écoutez la Parole du Seigneur ».
Nous savons qu'il faut que le souffle de Dieu passe sur ces morts, sinon ils ne revivront pas.
Quand on a pleinement saisi cela, jusque dans le fond de son être, il devient impossible de se
livrer à ce genre de manipulation qu'on appelle si souvent « évangélisation ». Alors vous pro-
clamerez la Parole du Seigneur, la doctrine de la régénération.
Pensez aux Wesley, et à ce qu'ils ont dû affronter. Pensez aussi à mon cher Whitefield. Tout
le monde à leur époque se croyait chrétien, complètement chrétien. Pourquoi ? Parce que tous
avaient reçu le baptême à leur naissance et pensaient avoir été « introduits dans l'alliance »,
puis ils avaient été confirmés. Mais ils vivaient comme des diables ! On avait abandonné la ré-
génération au profit d'une sorte de formalisme, d'une foi dans le credo lui-même, cautionnée
par les autorités religieuses de ce temps-là.
Alors les Wesley parurent, disant : « Non, tout ne va pas bien pour vos âmes. Vous n'êtes
pas nés de nouveau. Examinez-vous vous-mêmes. » Mettez-vous vous-mêmes à l'épreuve pour
voir si vous êtes dans la foi (2 Cor. 13.5). Affermissez votre vocation et votre élection. (2 Pi.
1.10). Il vous faut naître de nouveau (Jean 3.7).
Aux États-Unis, à cause de l'évangélisation moderne pratiquée au cours de ces dernières
décennies, on ne sait plus du tout ce que signifie « naître de nouveau ». Cela veut simplement
dire qu'un jour, au cours d'une campagne d'évangélisation, quelqu'un a pris une décision qu'il
croyait sincère. Mais rien dans sa vie ne manifeste une œuvre surnaturelle de re-création par le
Saint-Esprit. Si quelqu'un est en Christ, il est une nouvelle création (2 Co 5.17) (Le texte ne
dit pas « certains de ceux qui sont en Christ »).

5. Un système d'invitations contraire à la Bible


Les temps sont accomplis, et le Royaume de Dieu s'est approché ;
repentez-vous et croyez à l'Évangile (Marc 1.15).

Aujourd'hui, notre situation ressemble à celle que connaissaient les Wesley et Whitefield. À
quoi sommes-nous confrontés ? Le plus souvent, ce n'est pas au baptême des nouveaux-nés, ni
à la confirmation par une autorité ecclésiastique de la « haute église » anglicane. Aujourd'hui
15
nous sommes confrontés à « la prière du pécheur ». Sachez que si je fais la guerre à quelque
chose, c'est bien à « la prière du pécheur ».
Oui, tout comme la dépendance envers le baptême des nouveaux-nés pour leur salut 24 fut
(à mon sens) le veau d'or de la Réforme, de même aujourd'hui la « prière du pécheur » est le
veau d'or 25 des baptistes, des évangéliques, et de tous ceux qui leur emboîtent le pas. Cette
« prière du pécheur » a envoyé plus de gens en enfer que toute autre pratique sur la face de la
terre !
Vous répondrez : « Mais comment peux-tu dire une chose pareille ? » Alors je vous dirai :
« Ouvrons les Écritures ensemble, et montrez-moi, je vous en supplie, où se trouve la « prière
du pécheur » ! J'aimerais tellement qu'on montre un exemple scripturaire de ce type d'évangé-
lisation, mais l'Écriture ne nous dit jamais que Jésus-Christ est allé vers la nation d'Israël en
annonçant : « Les temps sont accomplis, le Royaume de Dieu s'est approché, et qui parmi vous
veut me demander d'entrer dans son cœur ? Ah, une main se lève, là-bas. » Le Seigneur ne dit
pas cela. Il dit : Repentez-vous et croyez à l'Évangile (Marc 1.15) !
Beaucoup aujourd'hui placent leur foi dans le fait d'avoir prononcé une prière, au moins
une fois dans leur vie ; et quelqu'un leur a annoncé qu'ils étaient sauvés puisqu'ils étaient suf-
fisamment sincères. Si vous leur posez la question : « Êtes-vous sauvé ? » ils ne répondent
pas : « Oui, parce que je regarde à Christ seul, et ma vie a tellement changé que j'ai l'assu-
rance d'être né de nouveau. » Non, ils disent au contraire : « À telle époque de ma vie, j'ai fait
une prière. » Aujourd'hui leur vie ressemble à celle du diable, mais un jour, ils ont « fait une
prière » ! On m'a parlé d'un évangéliste qui tentait de persuader un homme de faire ce genre
de prière. Finalement, cet homme était tellement mal à l'aise que l'évangéliste a dit : « Bien,
écoutez ; je vais prier Dieu pour vous, et si ce que je dis correspond à ce que vous voulez dire à
Dieu, serrez mes mains dans les vôtres. » Ah, la puissance de Dieu !
Voilà « le décisionnisme », et c'est de l'idolâtrie. Des gens croient qu'ils vont aller au ciel
parce qu'ils ont évalué la sincérité de leur propre décision. Quand Paul a visité l'Église de Co-
rinthe, il n'a pas dit : « Vous ne vivez pas en chrétiens, alors revenons à ce point dans votre vie
où vous avez fait cette prière, et voyons si vous étiez sincères. » Non, il leur dit : Examinez-
vous vous-mêmes pour voir si vous êtes dans la foi, mettez-vous vous-mêmes à l'épreuve (2
Cor. 13.5).
Je veux que vous en soyez pleinement persuadés, mes amis : le salut est par la foi seule !
C'est une œuvre de Dieu : grâce sur grâce sur grâce. Mais la preuve de la conversion ne se
trouve pas dans une évaluation de notre sincérité au moment de la conversion. Elle se trouve
dans le fruit que notre vie porte constamment.
Mes chers amis, voyez ce que nous avons fait ! Est-ce qu'on ne reconnaît pas un arbre à son
fruit ? (Matt.7.20) Aujourd'hui 60 à 70% des Américains se croient convertis, nés de nouveau.
Mais combien de bébés tuons-nous chaque jour ? Et dans le monde entier on nous déteste à
cause de notre immoralité. Et nous nous croyons chrétiens !
Je dis carrément que ce sont les prédicateurs qui sont à blâmer pour cela. Je le vois par-
tout. Calvinistes et arminiens ont souvent beaucoup en commun, à savoir cette même invita-
24
Voir Baptismal Regeneration, de C.H. Spurgeon
25
Le veau d'or : allusion à l'idole du veau d'or fabriquée par Aaron au pied du Mont Sinaï, lorsque les
Israélites se rebellèrent contre le commandement de Dieu (Exode 32.1-30).
16
tion superficielle. Ils parlent de quantité de sujets, puis en arrivent à l'invitation, et là, appa-
remment, presque tout le monde perd la capacité de réfléchir.
Approchez-vous de quelqu'un et dites : « Monsieur, Dieu vous aime et il a un plan merveil-
leux pour votre vie. » « Que dites-vous là ? Dieu m'aime ? Eh bien, c'est super, parce que moi
aussi, je m'aime. Et Dieu a un plan merveilleux pour ma vie ? Moi aussi, j'ai un plan merveil-
leux pour ma vie. En acceptant Dieu dans ma vie, j'aurai tout ce qu'il y a de meilleur dès main-
tenant. C'est absolument fantastique. »
Ce n'est pas là une évangélisation biblique. Permettez-moi de mettre autre chose à la place.
Dieu s'approche de Moïse, passe devant lui, et dit : L'Éternel, l'Éternel est un Dieu de grâce et
de compassion, lent à la colère, riche en bonté et en vérité. Il garde son amour jusqu'à mille
générations, il pardonne la faute, la révolte et le péché, mais il ne traite pas le coupable en
innocent et il punit la faute des pères sur les enfants et les petits-enfants jusqu'à la troisième
et à la quatrième génération (Ex. 34.6-7). Comment Moïse réagit-il à ces paroles ? Aussitôt
Moïse s'inclina jusqu'à terre et adora (Ex. 34.8).
On commence l'évangélisation en expliquant la nature de Dieu. Qui donc est Dieu ?
L'homme peut-il reconnaître quoi que ce soit de son péché en l'absence d'un critère suprême
auquel se comparer ? Si nous chatouillons ses dispositions charnelles 26 en ne lui racontant que
des trivialités sur Dieu, comment parviendra-t-il jamais à une authentique repentance, à une
authentique foi ?
Premièrement, il ne faut pas commencer par lui dire : « Dieu vous aime et il a un plan
merveilleux pour votre vie. » Il faut commencer par expliquer, sans rien dissimuler, qui est
Dieu. Sans attendre, il faut dire à la personne que cela peut lui coûter la vie (voir Matt. 16.24) !
Deuxièmement, après avoir dit cela, on pose des questions pour savoir où la personne en
est. Pas en disant : « Au fait, tu sais que tu es pécheur, n'est-ce pas ? » (Cela me rappelle le
temps où ma mère était en train de mourir du cancer ; le docteur est entré et lui a lancé : « Au
fait, Barbara, vous savez que vous avez un cancer, n'est-ce pas ? ») Nous traitons la question si
superficiellement ; nos propos n'ont aucun poids, aucune solennité. Non, il faut dire : « Mon-
sieur, vous êtes affligé d'un mal terrible, et il y a un jugement qui vient. » Si vous vous conten-
tez de dire : « Monsieur, vous le savez, vous êtes pécheur, n'est-ce pas ? », aucune conviction
ne parviendra jusqu'au fond du cœur. Allez donc demander au diable s'il se sait pécheur. Il ré-
pondra, « Bien sûr que je le suis ; et expert en la matière, ou bien le pire en la matière, tout
dépend de votre point de vue ! Bien sûr, je sais que je suis pécheur. »
La question n'est pas : « Savez-vous que vous êtes pécheur ? » La question, c'est : « Le
Saint-Esprit est-il à l'œuvre dans votre cœur par la prédication de l'Évangile, au point de vous
transformer, si bien qu'à présent vous haïssez le péché que vous aimiez jadis, et que ce péché
auquel vous désiriez vous adonner autrefois, maintenant vous voulez le fuir comme si vous
vous sauviez devant un dragon ? »
Troisièmement, aujourd'hui on entend demander : « Voulez-vous aller au ciel ? » Voilà
pourquoi je ne laisserais pas mes enfants fréquenter 98% des « écoles du dimanche » et des

26
charnel : psychique ou sensuel, caractéristique de l'humanité déchue « en Adam » Le charnel s'oppose au
spirituel, à ce qui est « en Christ ».
17
écoles bibliques de vacances évangéliques, parce qu'une personne bien intentionnée se lève
après avoir montré le film sur Jésus, et dit :
- Est-ce que Jésus n'est pas merveilleux ?
- Oh, si ! répondent les enfants.
- Combien parmi vous aimez Jésus, mes enfants ? Ils répondent :
- Oh, moi !
- Et qui parmi vous veut accepter Jésus dans son petit cœur ?
- Oh, moi, moi !
Alors on les baptise. Peut-être se conduiront-ils comme des chrétiens pendant quelque
temps, parce qu'ils ont été bien enseignés. Ils baignent dans une culture chrétienne en
quelque sorte, ou au moins dans une culture ecclésiale. Mais quand ils atteignent 15 ou 16 ans
et que leur volonté se fortifie, ils se mettent à briser leurs liens. Ils commencent à marcher
selon le mal. Alors nous leur courons après en disant : « Arrêtez donc de rétrograder ! » Non,
il faut aller vers eux et leur parler de manière biblique : « Vous avez confessé votre foi en
Christ. Vous avez même professé Christ à votre baptême, mais à présent vous paraissez vous
être détournés de lui. Examinez-vous vous-mêmes, éprouvez-vous vous-mêmes, parce que
vous ne manifestez pas les signes d'une conversion réelle ! »
Puis quand ils ont terminé leurs études, à 24 ou 25 ans, ou peut-être à 30 ans, ils revien-
nent à l'église et consacrent à nouveau leur vie. Ils s'alignent parfaitement sur cette moralité
pseudo-chrétienne caractéristique de la culture religieuse du pays. Et au Dernier Jour, ils s'en-
tendront dire : Éloignez-vous de moi, vous qui commettez l'iniquité ; je ne vous ai jamais
connus (Matt. 7.23).
Vous direz : « Frère Paul, tu es tellement en colère. » N'ai-je pas le droit d'être en colère ?
Ne faut-il pas que quelqu'un élève la voix pour appeler au réveil ? Cependant, les fondements
ne sont même pas en place. Ah, que vienne le réveil, et que les fondements soient posés ! Tant
que nos yeux voient et que nos oreilles entendent, et que nous avons la Bible ouverte devant
nous, ne devrions-nous pas corriger ce travers qu'est le système des invitations évangéliques ?
Pourquoi demander aux gens : « Voulez-vous aller au ciel ? » Mes amis, tout le monde veut
aller au ciel : c'est simplement qu'ils ne veulent pas que Dieu y soit quand ils s'y trouveront !
La question n'est pas : « Voulez-vous aller au ciel ? », mais : « Voulez-vous Dieu ? Avez-vous
cessé de haïr Dieu ? Christ est-il devenu précieux pour vous ? Le désirez-vous ? »
Souvent, pour pousser une personne à faire cette prière du pécheur, on lui demande :
« Voulez-vous aller au ciel ? » « Eh bien, oui », répond-elle. « Alors voulez-vous prier pour
demander à Jésus d'entrer dans votre cœur ? » Chers amis, je reconnais que certains sont sau-
vés avec cette méthode ; cependant ils ne sont pas sauvés à cause d'elle, mais malgré elle !
Nous devons au contraire parler comme ceci :
- Monsieur, est-ce que vous désirez Christ ? Voyez-vous votre péché ?
- Oh oui, je le vois.
- Alors lisons ces quelques versets : ils nous montrent comment se manifeste la repentance
quand l'Esprit témoigne que c'est bien ce que vous êtes en train de vivre. Y a-t-il en vous du
brisement ? Voyez-vous se désintégrer toute votre ancienne façon de penser, et est-ce qu'à pré-

18
sent votre esprit est rempli de pensées nouvelles concernant Dieu, de désirs nouveaux, d'une
espérance nouvelle ?
- Oui, c'est bien ce que je vois.
- Monsieur, il peut s'agir là des premiers fruits de la repentance. À présent, jetez-vous dans
les bras de Christ. Confiez-vous en lui. Confiez-vous en lui seul !
Écoutez-moi. Vous avez l'autorité pour annoncer l'Évangile. Vous avez l'autorité pour an-
noncer aux hommes comment ils peuvent être sauvés, et pour leur enseigner les principes de
l'assurance selon la Bible. Vous n'avez aucune autorité pour leur dire qu'ils sont effectivement
sauvés. Cela, c'est l'œuvre du Saint-Esprit de Dieu !
À la place, vous les faites passer par ce petit protocole :
- Avez-vous demandé à Jésus d'entrer dans votre cœur ?
- Oui, » répondent-ils.
- Pensez-vous que vous étiez sincère ?
- Oui.
- Croyez-vous que Christ vous a sauvé ?
- Je ne sais pas.
- Mais bien sûr qu'il vous a sauvé, parce que vous étiez sincère, et il a promis que si vous
lui demandiez d'entrer, il entrerait. Vous êtes donc sauvé.
Au bout d'un entretien de cinq minutes, ils quittent les lieux, l'évangéliste va déjeuner, et
cet homme est perdu. Il est perdu ! Cette invitation n'est pas biblique. Si jamais ces gens dou-
tent de leur salut, on recommence le petit protocole. On dit :
- À un moment donné, avez-vous prié et demandé à Jésus d'entrer dans votre vie ?
- Oui.
- Étiez-vous sincère ?
- Je le pense.
- Alors aujourd'hui, c'est tout simplement le diable qui cherche à vous troubler !
Si on ne voit pas de croissance chez ces personnes, dans le contexte d'une église sans crois-
sance spirituelle, dans un contexte où l'on persiste à marcher selon la chair, cela ne dérange
personne. On attribue le problème à un manque de discipline personnelle, et on se réfugie
dans la doctrine du « chrétien charnel ».
Le mythe du « chrétien charnel »
La doctrine du « chrétien charnel 27 » a détruit davantage de vies et envoyé en enfer davan-
tage de gens que vous n'imaginez ! Les chrétiens ont-ils à lutter contre le péché ? Oui. Un
chrétien peut-il tomber dans le péché ? Absolument. Un chrétien peut-il marcher selon la
chair tous les jours de sa vie, sans porter de fruit, tout en étant véritablement chrétien ? Abso-
lument pas ! Sinon, toutes les promesses de l'Ancien Testament au sujet de l'alliance néo-
testamentaire de préservation auraient échoué, et tout ce que Dieu dit de la discipline dans

27
La doctrine du chrétien charnel : voir L.R. Shelton Jr., The True Gospel of Christ versus the False Gospel of
Carnal Christianity, Chapel Library.
19
l'Épître aux Hébreux serait un mensonge (Héb. 12.6) ! On reconnaît un arbre à son fruit (Luc
6.44).
J'ai vu des prédicateurs qui avaient une grande compréhension des choses de Dieu, mais
quand ils en venaient à une présentation de l'Évangile, ils retombaient une fois de plus dans
cette méthodologie anti-biblique.
Permettez-moi de vous raconter un des moments les plus précieux dans ma vie de chré-
tien. Cela se passait au Canada, à 30 kilomètres de l'Alaska, dans une ville qui comptait plus de
grizzlies que d'habitants. Dans une petite église d'environ 15 ou 20 personnes, je m'apprête à
prêcher. À l'instant où je me lève pour parler, un homme – un véritable colosse – entre dans la
salle. Il doit avoir 60, ou peut-être 70 ans. Il serait de taille à nous terrasser tous. Tout en prê-
chant, j'observe son visage ; alors je mets de côté tout ce que j'ai préparé, et j'annonce sim-
plement l'Évangile. Jamais je n'ai vu un être humain plus abattu que lui. Alors je prêche
l'Évangile, puis encore l'Évangile. À la fin, je quitte la chaire et vais directement vers lui.
Je demande : « Monsieur, dites-moi ce qui ne va pas. Qu'est-ce qui vous bouleverse ? De
toute ma vie je n'ai jamais vu personne de plus triste, de plus accablé que vous. » Il tire d'une
enveloppe de papier Kraft des clichés radiographiques que je ne comprends pas, et me dit : « Je
viens de voir le docteur. Je vais mourir dans trois semaines. » Voilà ce qu'il me dit. « Toute
ma vie, je me suis occupé du bétail sur un ranch. On n'y accède que par hydravion, ou bien à
cheval par les montagnes. » Il poursuit : « Je ne suis jamais allé à l'église. Je n'ai jamais lu la
Bible. Je crois que Dieu existe, et une fois j'ai entendu parler d'un type appelé Jésus. » Puis il
ajoute : « De toute ma vie, je n'ai jamais eu peur de rien, et maintenant je suis terrorisé. »
Je pose la question :
- Monsieur, avez-vous compris mon message sur l'Évangile ? »
- Oui », répond-il.
Qu'auraient fait, dans ce cas, la plupart des prédicateurs ? Ils auraient demandé : « Eh bien,
aimeriez-vous demander à Jésus d'entrer dans votre cœur ? » Voilà ce qu'ils auraient demandé.
Je dis :
- Monsieur, est-ce que vous comprenez bien le message ?
- Oui, je le comprends, rétorque-t-il, mais est-ce que ça suffit ? Un enfant aurait pu le
comprendre. Est-ce que ça suffit, de comprendre, de prier, ou bien... »
Je réponds :
- Monsieur, vous allez mourir dans trois semaines, et je dois repartir demain. Mais je vais
annuler mon billet d'avion, et vous et moi resterons ici à lire les Écritures, à lutter, à crier à
Dieu, jusqu'à ce que vous soyez converti ou bien jusqu'à ce que vous mouriez et alliez en en-
fer. »
Alors nous commençons. Je commence par l'Ancien Testament, je lis chaque verset conte-
nant des promesses de Dieu au sujet de la rédemption et du salut. Nous les lisons et les reli-
sons, encore et encore. Nous lisons Jean 3.16, puis nous prions et crions à Dieu. Je pose à cet
homme des questions sur la rédemption et le salut. Je l'interroge au sujet de la repentance, de
la foi, de l'assurance, œuvrant pour que Christ soit formé en lui. Le soir venu, je suis complè-
tement épuisé, et il n'y a eu aucune percée. Rien. Alors je dis :
- Prions ensemble, Monsieur. Puis : Relisez Jean 3.16 . Il réplique :
20
- On l'a déjà lu un million de fois . Je réponds :
- Je sais, mais c'est une des plus grandes promesses de salut : relisez ce verset.
Jamais je n'oublierai ce qu'il s'est passé alors. Ma Bible reposait sur ses genoux entre ses
grosses mains de montagnard. Il dit :
- D'accord. Car Dieu a tant aimé le monde qu'il a donné... Je suis sauvé, je suis sauvé !
Frère Paul, tous mes péchés sont partis ! J'ai la vie éternelle ! Je suis sauvé ! Je demande :
- À quoi le reconnaissez-vous ? Il répond :
- N'aviez-vous encore jamais lu ce verset ?
Que se passait-il donc ? L'Esprit de Dieu était à l'œuvre, sans aucun petit tour de passe-
passe. Et alors, vous voulez aller manger ? Mais enfin, croyez-vous que la prédication soit un
spectacle après lequel on rentre à l'hôtel ? En réalité, c'est après la prédication que le travail
commence. Ce sont des âmes qui sont en cause. Dans nos réunions, certains viennent deman-
der des entretiens. Ils voient des personnes auxquelles on ne devrait pas confier d'entretiens.
Au bout de cinq minutes, on leur demande de prononcer la « prière du pécheur » et on leur
fait signer une carte. Alors vite, on remet la carte au pasteur, qui dit alors : « Je veux vous pré-
senter un nouvel enfant de Dieu. Accueillez-le dans la famille de Dieu. » Mais comment osez-
vous faire une chose pareille ?
Si vous tenez à présenter la personne, dites ceci : « Ce soir, cet homme a confessé sa foi en
Jésus-Christ. Comme nous craignons Dieu et que nous aimons les âmes, nous allons l'accom-
pagner pour nous assurer que Christ a vraiment été formé en lui, qu'il a réellement une com-
préhension biblique de la repentance et de la foi avec une grande assurance et la joie dans le
Saint-Esprit. Voilà ce que nous nous proposons de faire. »
Considérez donc ce que nous avons fait du christianisme moderne. Je vous en supplie, con-
sidérez ce que nous faisons. Nous ne parlons pas de quelque secte bizarre : c'est de nous qu'il
s'agit. Je vous en supplie ! Je vous en prie, arrêtons !

6. L'ignorance quant à la nature de l'église


Tu sauras ainsi comment il faut se comporter dans la maison de Dieu
qui est l'Église du Dieu vivant, pilier et soutien de la vérité
(1 Tim. 3.15).

Dieu a une seule institution religieuse : l'Église. Le but ultime et l'aboutissement ultime
d'un réveil en ce monde sera l'implantation d'églises bibliques. Je crains vraiment qu'aujour-
d'hui on ne méprise l'église locale. Si vous dites que vous êtes prédicateur itinérant, et que
vous servez Dieu dans le monde entier, tout le monde s'inclinera devant vous. Si vous dites
que vous êtes le pasteur d'une assemblée de 30 membres, on vous fera asseoir au tout dernier
rang pendant une conférence. Or Jésus-Christ n'est pas le Prince des prédicateurs itinérants,
mais le Prince des pasteurs.

21
Il y a quelques années, Bill Clinton a lancé le slogan : « Le problème, c'est l'économie, gros
bêta ! » Mon pasteur, Jeff Noblit, un des anciens de notre église 28 et principal prédicateur et
enseignant, m'a dit un jour :
- Je voudrais commander des T-shirts.
- Ah, et qu'est-ce que tu veux y inscrire ?
- Le problème, c'est l'Église, gros bêta !
Jésus a donné sa vie pour l'Église ; pour une Église magnifique, pure et vierge. Si vous vou-
lez donner votre vie pour le ministère, donnez-la à l'Église ; à une église, à une assemblée de
chrétiens, à une congrégation locale. L'Église, c'est là que tout se passe.
S'il vous plaît, écoutez-moi bien maintenant. Il ne faut pas parler d'un reste de vrais chré-
tiens. Nous connaissons tous la théologie du reste : tout au long de l'histoire d'Israël il y a eu
un Israël de Dieu, un reste de vrais croyants. Cependant, il n'y a pas de reste de chrétiens, c'est
à dire de petit groupe de chrétiens au sein d'un groupe plus large qui serait l'Église. C'est
l'Église qui est le reste.
Si jamais des pasteurs ont frôlé le blasphème, c'est bien dans ce domaine. Des théologiens,
des enseignants itinérants, des pasteurs tiennent ce genre de propos : « Il y a autant de péché
au-dedans de l'Église qu'en-dehors. Le divorce est tout aussi fréquent dans l'Église qu'en-
dehors. Il y a tout autant d'immoralité et de pornographie dans l'Église qu'en-dehors. Des pré-
dicateurs affirment : « Oui, l'Église se conduit comme une prostituée ». Je vous en prie, pre-
nez bien garde à vos paroles avant de traiter l'épouse de Christ de prostituée.
Le problème est que les pasteurs et les prédicateurs ne savent pas ce qu'est l'Église. Je tiens
à vous dire que l'Église de Christ dans ce pays est belle. Elle est parfois fragile et faible. Elle est
ballottée. Elle n'est pas parfaite. Sachez toutefois qu'elle marche dans le brisement, qu'elle
marche humblement avec son Dieu. Le problème, c'est que nous ne savons pas ce qu'est
l'Église.
De nos jours, parce que la prédication biblique est si rare, la prétendue « église » est rem-
plie de gens charnels et méchants portant l'étiquette de « chrétiens ». Parce que tous ces
boucs ont envahi l'enclos des agneaux, on blâme les agneaux à cause du comportement des
boucs. Le nom de Dieu est blasphémé parmi les païens à cause de nous (Rom. 3.24).
Voici, les jours viennent, dit l'Éternel, où je ferai avec la maison d'Israël et la maison de
Juda une alliance nouvelle, non selon l'alliance que je traitai avec leurs pères, le jour où je
les saisis par la main pour les faire sortir du pays d'Égypte, alliance qu'ils ont violée
quoique je sois leur maître, dit l'Éternel. Mais voici l'alliance que je ferai avec la maison
d'Israël, après ces jours-là, dit l'Éternel : Je mettrai ma loi au-dedans d'eux, je l'écrirai
dans leur cœur ; et je serai leur Dieu, et ils seront mon peuple. Celui-ci n'enseignera plus
son prochain, ni celui-là son frère, en disant : Connaissez l'Éternel ! Car tous me connaî-
tront, depuis le plus petit jusqu'au plus grand, dit l'Éternel ; car je pardonnerai leur ini-
quité, et je ne me souviendrai plus de leur péché (Jér. 31. 31-34).

28
Notre église : Paul Washer fut pendant de nombreuses années membre de la First Baptist Church de
Muscle Shoals, Alabama, où Jeff Noblit poursuit son ministère. Au printemps de 2010, Paul et le personnel
de l'association missionnaire Heartcry déménagèrent en Virginie pour y implanter une nouvelle église.
22
Loin de moi la pensée d'ôter à Israël ce qui lui appartient, mais ce texte s'applique aussi à
l'Église. Comprenez-moi bien : je ne veux entrer dans aucune querelle concernant l'eschatolo-
gie, mais dans la Bible, dans le Nouveau Testament, ce texte s'applique au peuple de Dieu, mais
non selon l'alliance que je traitai avec leurs pères, le jour où je les saisis par la main pour les
faire sortir du pays d'Égypte (Jér. 31.32).
J'entends souvent dire à des prédicateurs : « Quand on considère Israël rétrospectivement,
on voit un groupe impie et idolâtre, au milieu duquel il y a un tout petit reste de vrais
croyants. » C'est exact ; mais n'appliquez pas cela à l'Église du Nouveau Testament, car Dieu
annonce qu'il va faire quelque chose de différent : non selon l'alliance que je traitai avec leurs
pères, le jour où je les saisis par la main pour les faire sortir du pays d'Égypte, alliance qu'ils
ont violée quoique je sois leur maître, dit l'Éternel. Mais voici l'alliance que je ferai avec la
maison d'Israël, après ces jours-là, dit l'Éternel : Je mettrai ma loi au-dedans d'eux, je l'écri-
rai dans leur cœur (v.33).
Si vous êtes converti, Dieu vous a donné bien plus que des lois gravées sur une table de
pierre. Surnaturellement, par la régénération, il a écrit ses lois dans votre cœur. Parce qu'il a
accompli cela, Dieu dit : Je serai leur Dieu, et ils seront mon peuple.
Voyez le verset 34 : Celui-ci n'enseignera plus son prochain, ni celui-là son frère, en di-
sant : Connaissez l'Éternel ! Car tous me connaîtront, depuis le plus petit jusqu'au plus
grand, dit l'Éternel ; car je pardonnerai leur iniquité, et je ne me souviendrai plus de leur pé-
ché.
Tout cela nous ramène à la doctrine de la régénération. Depuis 2000 ans, Dieu fait une
œuvre nouvelle. En Amérique, nous n'avons pas beaucoup d'églises ; en revanche, nous avons
des quantités de beaux édifices de briques entourés de pelouses impeccables ! Il ne suffit pas
que quelqu'un dise être membre de l'église, ou se donne le nom de chrétien pour qu'il le soit
effectivement . Considérez cette parole de Dieu : Celui-ci n'enseignera plus son prochain, ni
celui-là son frère. Cela ne veut pas dire qu'il n'y aura plus d'enseignants ni de prédicateurs,
mais que tous connaîtront Dieu d'une manière remarquable, surtout en ce qui concerne le
pardon de leurs péchés.
Écoutez Jérémie 32.38-40 :
Ils seront mon peuple, et je serai leur Dieu ; je leur donnerai un même cœur et une même
voie, afin qu'ils me craignent toujours, pour leur bonheur et celui de leurs enfants après
eux. Je traiterai avec eux une alliance éternelle, je ne me détournerai plus d'eux, je met-
trai ma crainte dans leur cœur, afin qu'ils ne s'éloignent pas de moi.
Ils seront mon peuple, et je serai leur Dieu . Dieu ne dit pas : « J'espère bien, et peut-être,
si j'ai de la chance, à condition que je trouve suffisamment d'évangélistes pour coopérer avec
moi, peut-être mon projet réussira-t-il. » Pas du tout ! Dieu dit au contraire : « Je vais attirer
à moi un peuple, un peuple que je donnerai à mon Fils ; et il ajoute : Ils seront mon peuple, et
je serai leur Dieu.
Considérons cette parole : je leur donnerai un même cœur et une même voie. Voyez-vous
le contraste ? Au cours des décennies 70 et 80, on a organisé quantité de « marches pour Jé-
sus » ; des milliers de gens s'affligeaient et s'écriaient : « Ah ! L'Église est tellement divisée !
Elle n'est pas une. » Chers amis, permettez-moi d'affirmer ceci : déclarer que l'Église n'est pas

23
une revient à s'inscrire en faux contre cette promesse concernant la nouvelle alliance. C'est
aussi affirmer que le Père n'a pas exaucé la prière de son Fils :
Père saint, garde en ton nom ceux que tu m'as donnés, afin qu'ils soient un comme nous...
Ce n'est pas pour eux seulement que je prie, mais encore pour tous ceux qui croiront en
moi par leur parole, afin que tous soient un, comme toi, Père, tu es en moi, et comme je
suis en toi, afin qu'eux aussi soient un en nous, pour que le monde croie que tu m'as en-
voyé (Jean 17.11 et 20-22).
Je tiens donc à soutenir que l'Église est une, et qu'elle a toujours été une. Vous est-il ja-
mais arrivé de prendre place dans un avion, ou peut-être sur un marché, et d'y rencontrer un
inconnu ? Vous qui êtes un vrai chrétien évangélique, au bout de quelques minutes de conver-
sation avec lui, vous découvrez qu'il est chrétien, vraiment chrétien. À ce moment-là, vous sa-
vez que s'il le fallait, vous donneriez votre vie pour lui. Oui, vous donneriez votre vie !
Je me rappelle le jour où, au Pérou, un ami et moi avons passé 22 heures à l'arrière d'un
camion transportant du grain, cachés sous une bâche noire. Vers minuit, le camion s'arrête,
nous sortons de notre cachette et nous nous glissons dans la jungle. Cette nuit-là, nous res-
tons près de la lisière, tout en marchant vers une petite ville de montagne. À mi-chemin, mon
cher ami Paco et moi comprenons que nous nous sommes égarés dans l'obscurité. Nous
prions : « O Dieu, dirige-nous. Nous voilà égarés sur le territoire des terroristes. Jamais les mi-
litaires ne se risqueront à venir nous chercher ici. Conduis-nous, viens à notre secours. » Le
son d'une clochette se fait entendre, puis une voix humaine. La conversation nous semble
d'abord un peu étrange, puis nous comprenons qu'il s'agit d'un petit garçon qui rentre des
champs avec son âne : il parle à son âne. Passant derrière lui, nous le suivons et nous nous re-
trouvons aux abords d'un petit village, où il y a des cabanes et des maisons d'adobe. Je dis :
« Paco, si les terroristes sont chez eux ici, nous sommes morts. » « Oui, dit-il, mais il faut
bien arriver quelque part ! »
Alors, à découvert mais dans l'ombre, nous nous approchons d'un homme ivre auquel nous
demandons : « Y a-t-il des frères ici ? » Dans les montagnes tous le savent, ce mot désigne les
vrais chrétiens. Cet homme répond : « La vieille femme, là-bas. » Nous y allons et trouvons
une Nazaréenne âgée. Je frappe à sa porte et dis : « Je suis un pasteur évangélique ; je vous en
prie, aidez-nous ! » Elle approche de nous sa lanterne, me saisit, me tire à l'intérieur, et fait de
même pour Paco. Sa maison est creusée dans une sorte de falaise de terre. Elle nous conduit
au sous-sol, où se trouvent entre autres choses du foin et quelques poulets. Un petit garçon se
montre. « Va chercher les autres frères ! » lui dit-elle. Alors des hommes commencent à arri-
ver d'on ne sait où, apportant des poulets, du yucca, et quantité d'autres choses, risquant leur
vie pour nous ! Pourquoi ? Parce que l'Église est une !
Arrêtez donc de dire ces inepties, de répéter que l'Église est divisée, en piteux état, et
pleine de péchés. À votre place je ne parlerais pas en ces termes de l'épouse de Christ.
En fait, ce qu'on trouve actuellement dans de nombreuses assemblées, c'est une troupe de
boucs, un amas d'ivraie parmi les brebis (Matt. 25.31-46 et 13.24-30). Comme il est extrême-
ment rare qu'on exerce avec compassion la discipline biblique, ces boucs vivent au milieu des
brebis, se nourrissent d'elles et les détruisent. Les responsables d'église parmi vous recevrez
une sanction sévère quand vous comparaîtrez devant Celui qui aime les brebis, pour ne pas
avoir eu le courage de vous lever et de confronter les méchants.
24
Je vous en supplie, écoutez-moi. La plupart du temps chez nous, on présuppose que
l'Église est une démocratie. Je n'aborderai pas la question du pour et du contre dans ce do-
maine. Mais voici ce qui se produit : puisque la prédication de l'Évangile tient si peu de place,
l'église est majoritairement composée de gens charnels et perdus ; et comme on est en démo-
cratie, ce sont eux qui impriment sa direction à l'église. Comme le pasteur ne veut pas perdre
la majorité de ses fidèles, et qu'il a une mauvaise conception de l'évangélisation et une fausse
idée de la conversion, il cherche à satisfaire les méchants dans son église. Le petit troupeau de
vraies brebis reste là au beau milieu de tout ce théâtre, de cette mondanité, de l 'équipement
multimédia, et crie : « Mais nous voulons simplement adorer Jésus. Nous voulons simplement
qu'on nous enseigne la Bible ! » Mes amis, cette situation terrible de leurs églises coûtera cher
à ces pasteurs.
Tant de pasteurs s'efforcent de maintenir l'unité du groupe, alors qu'au milieu de tout cela
un petit troupeau meurt de faim et se trouve contraint d'aller dans une direction dont il ne
veut pas. On le force à aller dans le sens de la majorité charnelle !
Écoutez-moi. Si jamais ma femme faisait ses courses tard le soir, et si vous, un homme
passant par là, vous aperceviez plusieurs individus en train de la malmener, et si vous détour-
niez les yeux et passiez votre chemin en ne pensant qu'à votre propre sécurité, sachez-le bien,
chers amis : non seulement je m'en prendrais à ces individus, mais je m'en prendrais aussi à
vous.
L'Église est l'épouse de Christ et elle a du prix à ses yeux. Cela vous coûtera de servir Jésus.
Cela pourrait vous coûter votre église, votre réputation, votre dénomination ; cela pourrait
vous coûter absolument tout 29. Mais l'épouse de Christ en vaut la peine ! Voyez ce que dit Jé-
rémie, je trouve que c'est magnifique : Je leur donnerai un même cœur et une même voie. De
quelle voie s'agit-il ? De Christ et de sa sainteté. Tous les vrais chrétiens que je connais
parlent souvent de Christ et ont un ardent désir d'être mieux sanctifiés, rendus plus conformes
à Christ.
Je leur donnerai un même cœur et une même voie, afin qu'ils me craignent toujours, pour
leur bonheur et celui de leurs enfants après eux. Je traiterai avec eux une alliance éter-
nelle, je ne me détournerai plus d'eux, je leur ferai du bien.
Tant de gens perdus vont à l'église le dimanche : ils entendent ce verset et se disent : « Oui,
Dieu a fait avec moi une alliance éternelle. Jamais il ne se détournera de moi, jamais, jamais !
Je suis en sécurité par la grâce de Dieu. Ils oublient simplement de lire le verset suivant. Écou-
tez-le : Je traiterai avec eux une alliance éternelle, je ne me détournerai plus d'eux, je leur
ferai du bien,et je mettrai ma crainte dans leur cœur, afin qu'ils ne s'éloignent pas de moi. La
preuve que Dieu a fait avec vous une alliance éternelle, cher ami, c'est qu'il a mis en vous la
crainte de son nom afin que vous ne vous éloigniez pas de lui. Si vous vous détourniez de lui
sans qu'il vous discipline, et si vous persistiez à vous détourner de lui, ce serait la preuve qu'il
n'a pas mis en vous la crainte de son nom. Cela prouverait que vous n'avez pas été régénéré, et
que vous n'avez pas d'alliance avec Dieu. Cela, mes amis, c'est la vérité biblique.

29
Voir A.W. Pink, The Cross and Self, et Horatius Bonar, Christ or the World, Chapel Library
25
7. L'absence d'une discipline aimante et compatissante dans l'église
Frères, si un homme vient à être surpris en faute, vous qui êtes spirituels,
redressez-le avec un esprit de douceur. Prends garde à toi-même,
de peur que tu ne sois aussi tenté (Gal. 6.1)

Aujourd'hui, la plupart des pasteurs évangéliques de ce pays devraient prendre le chapitre


18 de Matthieu 30 et l'arracher de leur Bible, mais il est impossible de faire cela. Il faut prendre
la Bible dans son entièreté, ou bien n'en rien prendre du tout. Beaucoup de pasteurs laissent
leur théologie au vestiaire en quittant leur bureau. Leurs propos tiennent la route, théologi-
quement, et leur théologie tient bon tant qu'ils sont dans leur bureau ; mais ils recourent en-
suite à des moyens charnels pour diriger l'église.
Comme je ne fais pas partie des anciens de mon église, je peux aborder cette question sans
risquer de me vanter. Notre assemblée pratique la discipline d'église 31. C'est une assemblée
nombreuse, d'environ 1000 participants. Au cours de ces dernières années, les pasteurs esti-
ment qu'ils ont sauvé une trentaine de mariages grâce à une discipline d'église aimante et
compatissante. Cette discipline ne commence pas par l'excommunication ! Elle commence
par : Vous qui êtes spirituels, redressez... avec un esprit de douceur.
Peut-être direz-vous : « Chez nous, on ne peut pas exercer la discipline : nous sommes trop
aimants pour cela. » Seriez-vous plus aimants que Jésus ? C'est lui qui ordonne de pratiquer la
discipline !
« Ah, mais cela soulèverait des problèmes à n'en plus finir. » Oui, en effet. C'est peut-être
la raison pour laquelle il n'y a guère de conflits aujourd'hui entre l'église et la culture du
monde, car nous évitons toute confrontation avec la culture ambiante. Confronter la culture
ambiante, cela ne veut pas dire organiser une manifestation à Hollywood. Pour confronter la
culture, il suffit d'obéir à Dieu ! Par la construction de l'arche, Noé a condamné le monde. Il
n'est pas nécessaire d'aller manifester en portant des banderoles : il suffit de marcher dans
l'obéissance, et le monde vous haïra.
Si ton frère a péché contre toi, va et reprends-le entre toi et lui seul. S'il t'écoute, tu as ga-
gné ton frère (Matthieu 18.15). Combien c'est merveilleux dans ce cas ! Mais s'il ne t'écoute
pas, prends avec toi une ou deux personnes, afin que toute l'affaire se règle sur la déclaration
de deux ou trois témoins (Matthieu 18.16). Mes amis, ces témoins ne sont pas là pour prendre
parti en votre faveur. Ils sont là, au contraire, pour écouter objectivement et pour prononcer
un jugement. Il se peut que le tort soit de votre côté. Peut-être le frère n'a-t-il pas péché. Peut-
être est-ce vous qui êtes trop enclin à la critique, ou qui êtes légaliste. Qui sait ?
S'il refuse de les écouter, dites-le à l'église, et s'il refuse aussi d'écouter l'église, qu'il soit
pour toi comme un païen et un publicain. C'est à dire qu'il soit comme un non-chrétien, ou
un collecteur d'impôts. Chers amis, je suis persuadé que l'heure est venue d'entendre ces pa-

30
Matthieu 18.15-17 : Si ton frère a péché, va et reprends-le entre toi et lui seul. S'il t'écoute, tu as gagné ton frère.
Mais s'il ne t'écoute pas, prends avec toi une ou deux personnes, afin que toute l'affaire se règle sur la déclaration de
deux ou trois témoins. S'il refuse de les écouter, dis-le à l'Église ; et s'il refuse aussi d'écouter l'Église, qu'il soit pour toi
comme un païen et un publicain.
31
Sur la discipline dans l'Église, voir John Owen, Church Discipline, et Alexander Strauch, Biblical Eldership,
Chapel Library.
26
roles-là ; ou bien nous commencerons à obéir à Dieu et à nous discipliner nous-mêmes, ou
bien Dieu nous appliquera la discipline. Peut-être l'heure est-elle venue pour cela.
Je ne parle pas ici d'hommes adonnés à la critique, légalistes, et haineux ; ceux-là seront
toujours de trop. Je parle d'un pasteur et d'un groupe d'anciens suffisamment aimants pour
mettre leur vie en cause, et qui savent qu'il ne s'agit pas d'un jeu. La discipline ne concerne
pas cette vie seulement : c'est de l'éternité qu'il s'agit, c'est du salut des âmes. Considérez les
livres émanant d'hommes comme Spurgeon et Whitefield, des Puritains et des Réformateurs.
La plupart de ces écrits traitent de l'Évangile, de la manière de le prêcher, de la manière de
conduire quelqu'un à Christ, de discerner si une conversion est authentique, de la manière de
devenir un médecin des âmes.
Dans ce domaine, nous faisons comme Rome. Dans l'Église catholique romaine, on bap-
tise un bébé et on le déclare « chrétien ». Désormais, ce bébé appartient à Rome. Plus jamais
on ne lui parlera de conversion au sens biblique ; on inventera simplement toutes sortes de
moyens à la manière du monde pour essayer de retenir les fidèles dans l'église !
Écoutez bien : les évangéliques font la même chose ! Après un entretien de quelques mi-
nutes et une demi-heure de prédication (dont vingt-cinq minutes de bonnes histoires), en cinq
minutes on « ramène le filet » à la fin. Après un petit entretien, on déclare que quelqu'un est
« sauvé » ! Ensuite on passe le restant de ses jours à essayer de faire de lui un disciple, en se
demandant pourquoi il ne grandit pas !
Je crois à la formation de disciples dans une relation de personne à personne. Cependant,
cher ami, l'Église a vécu pendant plus de mille années sans pratiquer cette méthode, sans ce
que nous appelons « la formation individuelle » ou « le discipulat personnel », sans les innom-
brables livres et outils dont nous disposons actuellement. S'il vous plaît, réfléchissez là-dessus.
Le « discipulat personnel » s'est énormément développé au cours de la décennie 1970 et con-
serve aujourd'hui toute son importance. On clame : « il sort autant de personnes par la porte
de derrière qu'il en arrive par la porte d'entrée, parce qu'on ne leur dispense pas une formation
de disciples. » Pas du tout ! La raison, c'est que les gens ne sont pas convertis. Ils montrent ce
qu'ils sont réellement, car les brebis de Christ, elles, entendent sa voix et le suivent (Jean
10.3), que nous leur dispensions cette formation-là ou non.
D'accord, il nous faut former des disciples, mais le manque de formation n'explique pas
tous ces départs. Ils sont sortis du milieu de nous, mais ils n'étaient pas des nôtres, car s'ils
avaient été des nôtres, ils seraient restés avec nous (1 Jean 2.19). Ils n'ont guère eu l'occasion
de se montrer « des nôtres » car ils n'ont jamais entendu le véritable Évangile. Nous dépen-
sons des fortunes pour faire des boucs des disciples, dans l'espoir qu'ils se changeront en bre-
bis. Mais par l'enseignement, on ne transforme pas un bouc en brebis. Un bouc n'est changé
en brebis que par une œuvre surnaturelle de l'Esprit du Dieu Tout-puissant.
J'ai amené ma famille dans l'église où nous sommes parce qu'elle exerce la discipline
d'église, et que j'ai besoin de me soumettre à cette discipline. Je parle là des soins vigilants des
anciens et des autres membres qui prennent la discipline au sérieux. Si mes enfants, qui sont
encore très jeunes, font un jour une profession de foi, puis s'écartent du bon chemin, je sais
qu'au besoin ils devront rendre compte à l'église, pour le salut de leurs âmes.
Certains d'entre vous seriez furieux si jamais un pasteur venait vous dire : « Pour te parler
franchement, j'ai prié pour ton enfant et je crains qu'il soit inconverti ». Vous seriez tellement
27
furieux que vous rassembleriez un groupe pour réclamer la démission de ce pasteur, au lieu de
vous dire : « Loué soit le Seigneur, nous avons ici un homme de Dieu. »

8. Le silence au sujet de la séparation


Ne vous mettez pas avec les infidèles sous un joug étranger. Car quel
rapport y a-t-il entre la justice et l'iniquité ? (2 Cor. 6.14).
Il y a aujourd'hui un manque d'enseignement sérieux sur la manière de mener une vie
sainte 32. Bien sûr, on enseigne des généralités sur la sainteté, et là-dessus, tout le monde est
d'accord. « Soyons saints », dit-on. « Il nous faut plus de sainteté. Organisons une conférence
sur la sanctification. » Cependant, dès qu'on précise ce que cela implique concrètement, tout
se gâte.
Recherchez la paix avec tous, nous dit Hébreux 12.14, et la sanctification sans laquelle
personne ne verra le Seigneur. Y a-t-il encore quelqu'un qui croie ce verset ? Un pasteur m'a
confié : « Frère Paul, on m'a si souvent accusé d'enseigner « une religion des œuvres. » Écou-
tez-moi bien, je vous prie. Tout ici nous ramène à la régénération et à la Providence de Dieu.
Si Dieu convertit vraiment un homme, il continuera d'œuvrer en lui par l'enseignement, en le
bénissant, en l'admonestant, et en le disciplinant. Dieu veillera à achever l'œuvre qu'il a com-
mencée. Voilà pourquoi l'auteur parle de la sanctification sans laquelle personne ne verra le
Seigneur. Pourquoi ? Parce que s'il n'y a pas de croissance dans la sanctification, c'est que
Dieu n'est pas à l'œuvre dans votre vie. Et s'il n'est pas à l'œuvre dans votre vie, c'est que vous
n'êtes pas son enfant !
Voyez la différence entre Jacob et Esaü. J'ai aimé Jacob et j'ai haï Esaü (Rom. 9.13), dit le
Seigneur. Pourtant, Dieu a accompli toutes ses promesses envers l'un et envers l'autre. Jacob a
été béni ; et Esaü a été béni. Comment Dieu a-t-il manifesté ses jugements et sa colère envers
Esaü, et son amour envers Jacob ? Pour commencer, il les a laissés l'un et l'autre faire tout ce
qu'ils voulaient, mais chez Esaü, il n'y a eu aucune œuvre de discipline, aucune correction di-
vine, rien : et cela, à cause de la colère de Dieu qui était sur lui ! En revanche, Dieu a sévère-
ment corrigé Jacob presque tous les jours de sa vie, et cela, à cause de son amour pour lui !
Cette discipline aimante, ces corrections divines étaient destinées à l'amener à la sainteté. Il en
va de même pour tous les chrétiens authentiques d'aujourd'hui.
Je vous exhorte donc, frères, par les compassions de Dieu, à offrir vos corps comme un sa-
crifice vivant, saint, agréable à Dieu, ce qui sera de votre part un culte raisonnable. Ne
vous conformez pas au siècle présent, mais soyez transformés par le renouvellement de
l'intelligence, afin que vous discerniez la volonté de Dieu, ce qui est bon, agréable et par-
fait (Rom. 12.1-2).
Pourquoi nous est-il demandé d'offrir nos corps ? Je crois que c'est pour éviter toute cette
« super-spiritualité » qu'on voit aujourd'hui. Certains déclarent : « J'ai donné mon cœur à Jé-
sus, et au vu de l'extérieur, personne ne peut juger de ce qui est à l'intérieur. Vous ne pouvez
pas juger de ce qui est en moi au vu de mon comportement. » En réalité, on peut juger de ce

32
Voir Free Grace Broadcaster, n°163, Love not the World.
28
qui est au-dedans d'après ce qui se voit au-dehors. Jésus n'a jamais dit le contraire ; il dit jus-
tement que c'est possible, et qu'on reconnaît un arbre à son fruit (Matthieu 12.33).
Si vous estimez avoir donné votre cœur à Jésus-Christ, alors il est aussi le maître de votre
corps, et voici pourquoi. Au sens biblique, mes amis, le cœur n'est ni ce muscle qui pompe le
sang, ni une notion issue de l'imagination d'un poète. D'après la Bible, le cœur est l'essence
véritable de votre être et ce qu'il y a de plus central en vous. Ne venez pas me dire que Jésus
possède l'essence véritable de votre être et ce qu'il y a de plus central en vous sans que cela ait
d'incidences sur tout votre corps et sur toute votre vie. Ce n'est tout simplement pas possible !
Il nous faut donc examiner l'Écriture, pas de façon légaliste, et pas seulement pour tirer
des conclusions. Non, il nous faut l'examiner pour pouvoir tenir ferme sur ce qu'elle com-
mande clairement. Que commande-t-elle ? Quels sont les commandements qui nous guident
dans notre vie de famille ? Je ne suis pas d'accord avec la totalité de ce qu'affirment les Puri-
tains, mais je les aime, et une des raisons pour lesquelles je les aime, c'est qu'en toute droiture
ils ont cherché à soumettre leur vie entière à la seigneurie de Christ. Leur vie entière ! Tout,
par exemple toutes leur pensées ! Ils écrivaient des ouvrages de 800 pages sur ce qui doit faire
l'objet de nos pensées, selon les Écritures, et sur ce qui doit être banni de nos pensées, selon
les Écritures. Sur la manière de nous servir de nos yeux. Sur ce que nous devons laisser entrer
dans nos oreilles, et ce qu'il faut en bannir. Sur la manière de maîtriser notre langue. Sur la
conduite de notre vie.
Ils parlent aussi – et là, je vais vous faire peur, je le sais – de la manière de nous vêtir. Je
serai très prudent ici et m'abstiendrai de toute spéculation. Chers amis, permettez-moi sim-
plement de répéter ce que dit ma femme : « Si vos vêtements forment un décor pour votre vi-
sage où brille la gloire de Dieu, alors ils sont de Dieu. S'ils attirent l'attention sur votre corps,
alors ils sont sensuels, et Dieu les a en horreur. » C'est la nature de Dieu qui doit guider nos
décisions quant à chaque détail de notre comportement.
Je ne peux pas traiter de tous les aspects de la sainteté, et elle est loin de se limiter à l'ex-
pression extérieure ; mais nous en sommes arrivés à prendre prétexte de l'œuvre intérieure de
l'Esprit pour déclarer que rien ne doit nécessairement être visible au-dehors. Cela n'est pas
vrai ! Certains jeunes hommes parmi vous criez sans doute à Dieu plus que moi pour que son
Esprit vous remplisse et œuvre en vous, mais pour attrister cet Esprit, une demi-heure de té-
lévision suffit, et il sera alors bien loin de vous. Une eau peut être pure à 99% et contenir seu-
lement 1% d'eau d'égout, mais dans ce cas, ne comptez pas sur moi pour la boire !
À une époque où j'étais en lutte, un de mes amis en a fait part à Leonard Ravenhill, qui m'a
envoyé un traité. J'ai encore ce traité et ne m'en séparerai jamais. Il dit : « D'autres peuvent
peut-être, mais toi, tu ne peux pas. » Jeune homme, écoutez-moi : je ne fréquente pas les gale-
ries marchandes. Ce n'est pas que je me croie plus saint que vous : c'est simplement que je me
connais !
On raconte qu'un des meilleurs violonistes d'Europe, un des plus grands, donnait dans sa
vieillesse son dernier concert public. Un jeune violoniste est allé lui dire : Monsieur, je donne-
rais ma vie pour pouvoir jouer comme vous. Le maestro répondit : « En effet, mon garçon, j'ai
donné ma vie pour pouvoir jouer comme je le fais. »

29
Vous dites : « Je veux que la puissance de Dieu se manifeste dans ma vie ». Dans ce cas, il
faudra lâcher quelque chose. Vous dites : « Je veux connaître Dieu ». Alors d'une manière ou
d'une autre, une séparation d'avec le monde devra intervenir !
Jeune homme, il faut que je vous le dise. Quand tout le monde autour de vous s'activera
continuellement, courant de retraite en conférence, passant le temps à faire de grosses bises à
tout un chacun, à chanter « Kumbaya 33 » et tout le reste, ce sera peut-être le moment pour
vous de vous retrouver seul au désert avec Dieu, de jeûner pendant une semaine en étudiant le
Livre des Psaumes à genoux, de rester seul avec Dieu en vous consacrant à lui.
Pour que vous soyez un homme de Dieu, il faut parfois, en un certain sens, que votre
épouse qui est une seule chair avec vous puisse plonger son regard dans le vôtre, sachant que
là où vous allez, elle ne peut pas vous accompagner.
Aujourd'hui dans nos églises, c'est le grand silence au sujet de la séparation d'avec ce
monde. Ne vous mettez pas avec les infidèles sous un joug étranger. Car quel rapport y a-t-il
entre la justice et l'iniquité ? (2 Cor. 6.14) De cela, on ne parle plus jamais. Qu'y a-t-il de
commun entre la lumière et les ténèbres? (v.14) Rien ! Les ténèbres sont l'opposé de la révéla-
tion divine. Quel accord y a-t-il entre Christ et Bélial? (v.15) Aucun ! Quelle part le fidèle a-t-il
avec l'infidèle ? (v.15) Aucune ! Le Seigneur dit : Sortez du milieu d'eux (v. 17). Du milieu de
quoi ? Du milieu de l'anarchie, des ténèbres, des ruses sataniques, de la manière mondaine de
vivre des impies. Sortez !

9. La psychologie et la sociologie ont évincé les écritures concernant la famille


Prenez garde que personne ne fasse de vous sa proie par la philosophie et
une vaine tromperie, s'appuyant sur la tradition des hommes, sur
les principes élémentaires du monde, et non sur Christ
(Col.2.8).
J'ai un neuvième reproche à faire, dans un domaine qui compte beaucoup pour moi, car je
suis un homme mûr qui a une jeune famille. Je ne me suis marié qu'à trente ans. Pendant les
huit premières années de notre mariage, ma femme souffrait d'une sorte de petite tumeur au
cerveau. Nous ne pouvions pas avoir d'enfants, puis, loué soit Dieu, un enfant est né, puis un
autre, et encore un autre, et à l'avenir, qui sait ?
Chers amis, pasteurs et responsables, réfléchissez à ceci : nos cultes du dimanche matin
sont tellement « cosmétiques ». L'adoration paraît belle, la prédication se passe bien, et les fi-
dèles semblent émus ; mais ce n'est pas une preuve d'authentique spiritualité. Je vais vous dire
où réside cette preuve : elle est dans le foyer, dans la vie du couple, dans la famille. 34
En ce temps-là il n'y avait point de roi en Israël. Chacun faisait ce qui lui semblait bon
(Juges 17.6). Quand je voyage, je rencontre toutes sortes de personnes ; j'essaie de trouver un
homme selon Dieu, qui a élevé des enfants selon Dieu, et je recherche le contact avec lui. Tou-

33
Kumbaya : chant africain des années 1930, rendu populaire par les chanteurs « folk », et chanté dans les
rassemblements de jeunes. Il est cité ici comme exemple de manifestation religieuse superficielle, propre à
stimuler les émotions.
34
Voir J.C. Ryle, Duties of parents, et Free Grace Broadcaster n° 170, The Godly Home, n° 200, Le mariage, et n°
204, Biblical Parenthood, Chapel Libary.
30
tefois, dans la plupart des cas, savez-vous ce que je découvre ? La plupart des membres de
l'assemblée veulent parler de fables, de sociologie, et de sujets de ce genre. Il est toujours
question de ce qui semble bon à leurs yeux, et ils sont incapables de me citer un seul verset
biblique. Occasionnellement, je découvre un homme et une femme qui se sont efforcés d'éle-
ver leurs enfants selon les Écritures, et la différence est absolument énorme !
Quand je prends l'avion, j'aime bien avoir des conversations comme celle-ci, quand un
homme vient s'asseoir à côté de moi et demande : « Qu'est-ce que vous faites dans la vie ? » Je
réponds : « Ah, je suis un mari. » « Et que faites-vous d'autre ? » « Ah, je suis père ». « Mais
encore ? « Eh bien, quand il me reste du temps, je prêche un peu. »
À quoi sert-il à un homme de gagner le monde entier s'il perd sa propre famille ? Autre-
ment dit, sur quoi vous fondez-vous pour élever vos enfants et pour aimer votre femme ? Où
est-il, votre fondement ? Si vous n'êtes pas en mesure, là, tout de suite, d'ouvrir les Écritures
et de me montrer comment votre famille est fondée sur elles, je vous le dis, vous êtes captif de
la psychologie, de la sociologie, des caprices et des mensonges de notre temps. 35 Vous n'avez
pas le droit de suivre ces voies-là, parce que vous n'avez aucune autorité en-dehors de la Parole
de Dieu.
Regardez Genèse 18.19 : Car je l'ai choisi, afin qu'il ordonne à ses fils et à sa maison après
lui de garder la voie de l'Éternel, en pratiquant la droiture et la justice, et qu'ainsi l'Éternel
accomplisse envers Abraham les promesses qu'il lui a faites. Qu'elle est belle, cette voie !
Je vous exhorte donc, frères, par les compassions de Dieu, à offrir vos corps comme un sa-
crifice vivant, saint, agréable à Dieu, ce qui sera de votre part un culte raisonnable. Ne vous
conformez pas au siècle présent, mais soyez transformés par le renouvellement de l'intelli-
gence, afin que vous discerniez quelle est la volonté de Dieu, ce qui est bon, agréable, parfait
(Rom.12.1-2). Le verset 2 nous dit que la volonté de Dieu est parfaite. Alors si jamais un
homme de Dieu parle de « sacrifier sa famille au profit du ministère », je lui réponds qu'il est
un fieffé menteur. Je lui dis qu'en fait il sacrifie sa famille au profit du petit royaume qu'il es-
saie de se construire. Je peux affirmer cela parce que la volonté de Dieu est parfaite. Cela veut
dire que je n'ai pas à violer la volonté de Dieu concernant ma famille pour accomplir la volonté
de Dieu concernant mon ministère. Dieu n'a pas besoin de vous ! Cependant, il exige que vous
soyez obéissant.
Cela me rappelle le jour où on m'a posé la question : « Frère Paul, est-ce que vous êtes op-
posé à l'évangélisation ? » J'ai répondu : « Oui et non. Je ne suis pas du tout opposé à l'évangé-
lisation si elle est biblique ; je suis seulement opposé à la manière dont vous la pratiquez. »
J'aimerais vous expliquer cela au moyen de deux exemples. Certains ne me trouveront pas
assez sévère, et d'autres diront que je le suis trop. Je prends ces deux exemples seulement pour
montrer ce qui ne va pas chez nous.
L'École du dimanche : quelle que soit votre dénomination, pour peu que cette dernière
soit structurée, je peux vous assurer qu'elle dépense des millions pour acheter du matériel,
pour organiser des conférences, pour former les enseignants chargés de ces cours dominicaux,
et pour faire tout ce qui est possible et imaginable pour promouvoir cette École du dimanche.
C'est un fait.

35
À ce propos, voir Errol Hulse, Postmodernism, Chapel Library.
31
Permettez-moi de poser la question suivante : Combien votre dénomination dépense-t-elle,
combien de rassemblements organise-t-elle, combien d'heures de travail investit-elle afin d'en-
seigner aux pères à enseigner leurs enfants ? Dieu n'a pas de plan B, il a seulement un plan A.
On écarte ce plan A, puis on s'aperçoit que notre plan B ne marche pas.
Je ne suis pas en train de dire que les enfants ne peuvent pas être réunis en groupes pour
être catéchisés, ou pour recevoir un enseignement ; mais si jamais vos activités commencent à
supplanter le ministère du père à la maison 36, alors il faut les casser, les supprimer ! Compre-
nez-vous ce que je dis ? Considérez ce point seulement : nous avons des quantités de matériel
pour l'École du dimanche, mais il n'y a pratiquement pas la moindre conférence dans tout le
pays pour enseigner aux hommes à enseigner leurs enfants. Dans la plupart des cas, l'École du
dimanche est un simple divertissement, parce que les moniteurs n'ont pas autorité pour disci-
pliner votre enfant. Si on leur déléguait cette autorité, la plupart ne l'exerceraient pas, parce
qu'il ne croient pas que la discipline soit nécessaire. C'est là un simple petit exemple.
Considérons maintenant les groupes de jeunes. On entend dire : « Les jeunes doivent se
retrouver entre eux. Mais oui, ils ont simplement besoin d'être ensemble. » Ah oui, vraiment ?
Que dit l'Écriture à ce sujet ? Celui qui fréquente les sages devient sage, mais celui qui se plaît
avec les insensés s'en trouve mal (Proverbes 13.20). Qui donc vous dit que les jeunes doivent
rester entre eux ? Je vais vous le dire : ce sont les psychologues des années 1960, ceux-là même
qui ont inventé « le fossé des générations ». Non ! Les jeunes ont besoin de fréquenter des
adultes, pour pouvoir cesser de se conduire comme des insensés et des naïfs, pour accéder eux-
mêmes à la condition d'adulte et renoncer aux inepties qui mènent à leur destruction. Je ne
dis pas de ne pas réunir les jeunes, mais je maintiens que si on les réunit, il faut que tous leurs
parents soient présents aussi.
Vous direz : « Mais ce gamin perdu qui débarque dans notre église ? » Eh bien, que voit-il
en ce moment ? Ce gamin qui vient rejoindre le groupe de jeunes de votre église voit presque
le même scénario que celui qu'il trouve chez lui : pas de parents, et des enfants qui entraînent
d'autres enfants avec eux. Il y a parfois un jeune légèrement plus âgé que les autres. Il a une
coupe de cheveux à la dernière mode, et il enseigne les autres jeunes. Mais que se passerait-il
si des gamins perdus arrivant dans votre église y voyaient des jeunes qui ont une relation mer-
veilleuse et aimante avec leurs parents ? Ils diraient, « Eh bien ça alors, c'est nouveau ! Je n'ai
jamais rien vu comme ça ! Regarde-moi ce père ! Il aime son fils ! Et ce fils, il aime son père !
Mais regardez-moi cet amour ! Alors c'est ça, le christianisme ? »
Dans nos églises, nous sommes vraiment indigents à cet égard, et nous sommes souvent
aveugles à notre indigence. C'est la même situation que celle de cet homme qui vient vers
moi, le front tout en sang. Il dit : « Frère Paul, je suis allé partout, et je ne trouve personne
qui puisse diagnostiquer mon mal. » Je réponds : « Je ne suis pas médecin, mais je vais vous
suivre pendant 24 heures pour essayer de comprendre. » Je remarque que chaque fois que
l'heure sonne, il se donne un coup de brique sur la tête. À une heure, il se donne un coup. Si
l'horloge sonne deux heures, il se donne deux coups. À minuit, il se donne douze coups de
brique sur la tête. Alors après avoir observé la situation pendant 24 heures avec beaucoup d'at-

36
Sur le ministère du père de famille, voir Free Grace Broadcaster n° 188, Family Worship, et n° 192, Godly
Manhood, et J.C. Ryle, Duties of Parents, CHAPEL LIBRARY.
32
tention et en prenant des notes, je vais le trouver, et je lui dis : « C'est vrai, je ne suis pas mé-
decin, mais je crois voir quel est votre problème. »
Or notre situation dans l'Église n'est pas moins pathétique que celle-là. Pourquoi nos en-
fants se conduisent-ils comme ils le font ? Pourquoi est-ce que tout le monde marche sur la
tête ? Je pense à un cher chrétien qui refusait de permettre à son fils adolescent de partir dans
un lieu isolé, seul avec une jeune fille. Quelqu'un lui demanda : « Est-ce que vous ne faites pas
confiance à votre fils ? » Il répondit : « Non, je ne fais pas confiance à mon fils. Lui faire con-
fiance ? Vous n'y pensez pas ! Je ne fais même pas confiance à son père ! Je ne laisserais pas ce
père seul avec une autre femme que son épouse, et pourtant, la moindre inconvenance me
coûterait beaucoup plus cher qu'à mon fils, et je contrôle mieux ma volonté que ne peut le
faire un adolescent dont les hormones sont en pleine effervescence. Vous ne pensez quand
même pas que je ferais confiance à mon fils ? »
Nous n'arrêtons pas de violer les principes bibliques, puis nous nous demandons pourquoi
tout va si mal.

33
10. Des pasteurs spirituellement sous-alimentés
Efforce-toi de te présenter devant Dieu comme un homme éprouvé,
un ouvrier qui n'a point à rougir, qui dispense droitement
la parole de vérité (2 Tim. 2.15).

Il y a quelques mois, j'écoutais un rapport sur toutes les horreurs qui se passent dans notre
pays. Je ne sais plus comment l'appeler : une république, une démocratie, un pays, un état so-
cialiste ? Tout en écoutant, je disais : O Dieu, qu'est-ce que je peux faire ? Franchement, Sei-
gneur, je voudrais me jeter de toutes mes forces au beau milieu de tout ce déchaînement. Je
t'en prie, dis-moi ce que je dois faire. Si tu m'envoies faire face un rhinocéros en train de char-
ger, j'irai. Veux-tu que j'aille à Washington, que je me tienne devant la Maison Blanche et que
là, je prêche jusqu'à ce qu'on me jette en prison ? Je suis las de prêcher seulement à des chré-
tiens, dans des églises et dans des conférences. Seigneur, ce pays court tout droit vers l'enfer !
Que veux-tu que je fasse ? Mets-moi dans quelque collision frontale.
Écoutez donc 1 Timothée 4.1-16 :
Mais l'Esprit dit expressément que, dans les derniers temps, quelques-uns abandonneront
la foi, pour s'attacher à des esprits séducteurs et à des doctrines de démons, par l'hypocri-
sie de faux docteurs portant la marque de la flétrissure dans leur propre conscience ; ils
prescrivent de ne pas se marier, et de s'abstenir d'aliments que Dieu a créés pour qu'ils
soient pris avec actions de grâces par ceux qui sont fidèles et qui ont connu la vérité. Car
tout ce que Dieu a créé est bon, et rien ne doit être rejeté, pourvu qu'on le prenne avec ac-
tions de grâces, parce que tout est sanctifié par la parole de Dieu et par la prière.
En exposant ces choses aux frères, tu seras un bon ministre de Jésus-Christ, nourri des
paroles de la foi et de la bonne doctrine que tu as exactement suivie. Repousse les contes
profanes de vieilles femmes. Exerce-toi à la piété ; car l'exercice corporel est utile à peu de
chose, tandis que la piété est utile à tout : elle a la promesse de la vie présente et de celle
qui est à venir. C'est là une parole certaine et entièrement digne d'être reçue. Nous tra-
vaillons, en effet, et nous combattons, parce que nous mettons notre espérance dans le
Dieu vivant, qui est le Sauveur de tous les hommes, surtout des croyants.
Déclare ces choses, et enseigne-les. Que personne ne méprise ta jeunesse, mais sois un
modèle pour les fidèles, en parole, en conduite, en foi, en pureté.
Jusqu'à ce que je vienne, applique-toi à la lecture, à l'exhortation, à l'enseignement. Ne
néglige pas le don qui est en toi, et qui t'a été donné par prophétie avec l'imposition des
mains de l'assemblée des anciens. Occupe-toi de ces choses, donne-toi tout entier à elles,
afin que tes progrès soient évidents pour tous. Veille sur toi-même et sur ton enseigne-
ment, persévère dans ces choses, car en agissant ainsi, tu te sauveras toi-même, et tu sau-
veras ceux qui t'écoutent.
1 Timothée 4.1 dit : L'Esprit dit expressément que, dans les derniers temps, quelques-uns
abandonneront la foi, pour s'attacher à des esprits séducteurs et à des doctrines de démons.
Paul poursuit en disant au jeune Timothée qu'en fait, dans la culture, tout l'enfer va se dé-
chaîner, que ce sera à devenir fou, et que les hommes se conduiront comme des bêtes ! Il y a
quelques mois, j'étais avec Conrad Mbewe, et je l'ai écouté prêcher. Il a dit : En Afrique, nous

34
ne craignons plus les bêtes. Nous ne décampons pas quand nous en voyons une. Ce sont les
hommes qui nous effraient, et nous fuyons devant eux. Il faisait allusion, là, aux effets de la
dépravation radicale 37 chez l'être humain. Paul nous dit de manière semblable : « Le monde va
se désintégrer, Timothée. »
Que dit Paul, encore ? En exposant ces choses aux frères, tu seras un bon ministre de Jé-
sus-Christ, nourri des paroles de la foi et de la bonne doctrine que tu as exactement suivie.
C'est là que j'ai commencé à comprendre ce passage. Oui, le monde est devenu fou. Toutes
sortes de choses affreuses vont se produire. Dieu nous dit : « Tout cela est soumis à ma Provi-
dence, mais écoutez-moi ! Voici comment vous devez réagir au milieu de tout ce déchaîne-
ment infernal, au milieu de l'apostasie et des persécutions. Ce que vous devez faire, c'est être
constamment nourris et remplis des paroles de la foi. »
Au lieu de cela, nous avons constamment envie d'aller galoper et de faire quelque chose.
Nous voulons régler les situations. Mais Dieu cherche des hommes vraiment intègres qui
soient comme des épées bien polies et bien affûtées. Tout d'abord, mon fils, sois constamment
nourri des paroles de la foi et de la bonne doctrine que tu as exactement suivie. Il est essentiel
de l'avoir exactement suivie. Je crois que Dieu nous fait comprendre, là, qu'un simple travail
intellectuel sur les Écritures ne nous mènera jamais au but qu'il veut nous voir atteindre. Il
faut obéir aux Écritures. Il faut commencer à les mettre en pratique. Il est impossible de bien
apprendre la doctrine, à moins qu'on n'obéisse à la doctrine qu'on apprend !
Dieu dit encore, au verset 7 : Repousse les contes profanes de vieilles femmes. Chers amis,
laissez-moi vous dire encore ceci. La totalité de l'apport de l'église dite « émergente », une
bonne partie de ce qu'on entend sur « la croissance de l'Église », et la totalité de ce qu'on
nous raconte sur « la nécessité de faire place à la culture de notre temps », tout cela ne sert
qu'à détruire la véritable sensibilité biblique. Cela nous vient d'un groupe de petits garçons qui
ont envie de jouer à l'église, mais sans la puissance de Dieu dans leur vie. (Ce que je dis là, je le
maintiens.) C'est comme si quelqu'un d'encore plus petit que David essayait de revêtir l'ar-
mure de Saül. Alors je dis : jetons tout cela aux orties ! Plus vous ferez confiance à la chair,
moins vous verrez la puissance de Dieu.
Ensuite Paul dit : Exerce-toi à la piété (v. 7). D'autre part, il dit : soumets-toi à la disci-
pline pour parvenir à la piété. Homme de Dieu, veux-tu voir le réveil ? Moi aussi. Mais il nous
faut une armée. Si pour combattre nous voulons recevoir du ciel des épées puissantes, des
clairons au son perçant et d'autres armes, alors il nous faut avoir le calibre d'hommes capables
de manier ces armes en toute intégrité. Il nous faut nous discipliner pour l'amour de la vraie
piété.
Jeunes hommes, disciplinez-vous pour devenir des hommes de prière. Disciplinez-vous et
pratiquez la lecture systématique des Écritures de la Genèse à l'Apocalypse, encore, encore,
encore et toujours. Disciplinez votre langue. Disciplinez-vous quant à vos fréquentations. Dis-
ciplinez-vous pour aller vous coucher et pour vous lever. Nous sommes en guerre ! Discipli-
nez-vous !
Jeunes hommes, écoutez-moi encore. Étant nés à l'époque qui est la vôtre (à moins que
vous ne soyez des êtres d'exception) et ayant moins de trente ou de quarante ans, vous man-

37
Voir à ce sujet A.W. Pink, The Doctrine of Human Depravity.
35
quez sans doute de discipline parce que jamais personne n'a exigé de votre part un travail
vraiment dur. Jamais vous n'avez eu besoin de trimer pour manger à votre faim, et vos pères
ne vous ont probablement jamais fait travailler jusqu'à ce que vos os même soient endoloris.
Les hommes qui ont accompli de grandes choses dans le ministère et dont Dieu s'est servi sont
ceux qui se sont donné de la peine dans leur service. Un ministère efficace demande qu'on se
donne du mal, et cela vous coûtera tout ! Quand vous serez âgé, vous serez brisé, mais vous
serez robuste dans les choses de Dieu.
Exerce-toi à la piété ; car l'exercice corporel est utile à peu de chose, tandis que la piété
est utile à tout : elle a la promesse de la vie présente et de celle qui est à venir (v. 7-8). Et nous
nous soucierions encore, chers amis, de jouir « du meilleur dès maintenant ? » C'est de
l'éternité qu'il s'agit ! Un jour vous vous tiendrez dans ces salles de granit en présence du Sei-
gneur de gloire ; les rois et tous les grands de la terre seront répartis en deux groupes, et ce
sera l'élimination : les uns seront jetés dans l'enfer éternel, et d'autres seront invités à entrer
dans la gloire afin d'y vivre éternellement. Ces champions olympiques que nous trouvons si
majestueux, leur majesté est éphémère. Ils commencent leur entraînement à quatre ou cinq
ans. Ils se donnent entièrement à leur entraînement jusqu'à l'âge de 22 ans. Ils gagnent une
course en neuf secondes, reçoivent une médaille qui ira décorer leur mur, et ensuite c'est fini.
Leur moment de gloire, et tout ce qu'ils ont vécu est derrière eux. Ne pouvez-vous pas faire un
effort semblable pour ce qui est éternel ?
Certains des hommes de Dieu les plus remarquables étaient sérieusement limités sur le
plan physique. Leurs capacités étaient si limitées qu'ils ont dû se focaliser exclusivement sur
leur ministère : car l'exercice corporel est utile à peu de chose... C'est là une parole certaine
et entièrement digne d'être reçue. Nous travaillons, en effet, et nous combattons, parce que
nous mettons notre espérance dans le Dieu vivant (v.8-10). Nous ne parlons pas d'un martyre
dans lequel nous donnerions inutilement notre vie pour une seule chose, pour être pulvérisés
sans espérance. Loin de là. Nous servons Dieu, et Dieu nous honorera. Nous mettons notre
espérance en lui, et il nous fortifie.
Oui, cette vie est semblable à une buée. J'ai à présent 47 ans, et il me semble que hier en-
core, j'en avais 21. Où sont parties toutes ces années ? Tant que vous en avez la force, prêchez.
Je loue Dieu de ce que par sa Providence, quand j'étais jeune, j'ai pu me dépenser dans les
montagnes des Andes et dans la jungle péruvienne, faisant ce qu'aujourd'hui je n'ai plus la
force de faire.
Tant que vous êtes jeunes, tant que vous en avez les capacités, travaillez de toutes vos
forces. Prenez ces jeux vidéo idiots que vous possédez, et écrasez-les sous vos pieds. Jetez votre
téléviseur par la fenêtre. Vous avez été créés en vue de choses bien plus grandes que cela. Si
vous êtes un enfant du Roi, rien de ce qu'offre ce monde ne vous comblera, rien ! Occupe-toi
de ces choses, donne-toi tout entier à elles (v.11).
Ce passage est tellement riche, mais arrêtons-nous sur le verset 15 : Occupe-toi de ces
choses, donne-toi tout entier à elles, afin que tes progrès soient évidents pour tous. Imaginez
que sur une table de bois mon fils renverse un verre d'eau. À cause des lois que Dieu a placées
dans la nature, l'eau s'accumule en quelque sorte et forme une flaque sur la table. Tout le
monde peut la voir. Alors j'arrive, j'étale une serviette sur la table, et elle absorbe la flaque.
Vous dites : « Je ne vois plus d'eau. » Où est-elle passée? Dans la serviette qui l'a absorbée.
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Messieurs, méditez sur tout ce qui concerne la piété et l'intégrité personnelle. Soyez absorbés
par ces choses. Pasteurs, je vous en supplie, écoutez-moi, ce que je dis est important : Vous
n'êtes pas des garçons de courses. Il ne faut pas passer tout votre temps à décrotter les gens
charnels qui viennent à l'église. Enfermez-vous dans votre bureau. Abreuvez-vous longuement
de la Parole. Soyez tellement absorbés dans la connaissance de Dieu que les gens diront de
vous : « Où donc est-il passé ? Autrefois on le voyait partout ; il était l'ami de tout le monde, et
si agréable à fréquenter ! Où est-il passé ? » Eh bien, tout comme l'eau a été absorbée par la
serviette, il est absorbé par les choses de Dieu !
Nous sommes des hommes de Dieu, des serviteurs du Très-Haut. Il devrait y avoir chez
nous comme une différence. Il faudrait que notre regard s'attache à ce que certains disent être
une étoile lointaine. La plus grande chose que nous puissions faire pour les fidèles, c'est d'être
des hommes de Dieu, absorbés par les choses de Dieu, si bien que quand nous ouvrons la
bouche, c'est la Parole de Dieu qui sort de nous.
Là où je vais au culte, le pasteur et prédicateur principal est Jeff Noblit. Il s'est toujours
adonné à l'étude, mais à mon arrivée, j'ai parlé avec lui et avec les autres responsables. Toutes
les fois qu'on me demandait mon avis, je disais : « S'il vous plaît, attachons-nous à une seule
chose. Déchargeons au maximum le frère Noblit de ses fardeaux, pour qu'il reste dans ce bu-
reau avec Dieu. Vous comprenez, j'ai des enfants dans cette église. Le meilleur cadeau qu'un
homme puisse me faire, c'est de s'efforcer de se présenter devant Dieu comme un homme
éprouvé, afin de se tenir dans cette chaire dans la puissance du Saint-Esprit pour déclarer :
Ainsi parle le Seigneur, pour corriger, pour reprendre, pour proclamer de grandes promesses,
et pour donner des avertissements. Je vous en prie, faites cela pour moi. »
Pasteurs, je vous supplie de faire cela pour votre église, parce que Dieu dit : Veille sur toi-
même et sur ton enseignement, persévère dans ces choses, car en agissant ainsi, tu te sauve-
ras toi-même, et tu sauveras ceux qui t'écoutent. Un tel verset ne signifie pratiquement plus
rien dans le milieu évangélique actuel. À votre avis, combien de pasteurs et de prédicateurs le
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prennent au sérieux ? Combien se disent : « Il me faut veiller attentivement sur moi-même ,
pour me sauver moi-même et sauver ceux qui m'écoutent » ?
Pasteurs, permettez-moi de vous poser une question : Quand, pour la dernière fois, avez-
vous réellement examiné votre vie pour voir si vous étiez dans la foi, pour voir si vous connais-
sez vraiment le Seigneur ? Voyez, chers amis, quand j'examine ma propre conversion, quand
j'en discute avec d'autres hommes, elle me donne beaucoup d'assurance lorsque je passe en
revue mes vingt-cinq ans de pèlerinage avec Christ ; j'ai une profonde assurance d'avoir appris
à le connaître. Pourtant, même aujourd'hui, si jamais il m'arrivait de m'écarter de la foi, de
m'éloigner et de persister à m'éloigner, tombant dans l'hérésie ou dans la mondanité, ce serait
là une preuve flagrante que je n'ai jamais connu Dieu et que tout ce que j'ai fait était une
œuvre de la chair.
J'ai conscience de tenir des propos que vous trouvez inhabituels. Vous vous dites : « Ça
alors, je n'ai jamais entendu personne parler de la sorte». Cependant ce sont des vérités bi-
bliques anciennes et éternelles, et il faut les entendre. Lisez donc « Le voyage du pèlerin » 39.

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Voir C.H. Spurgeon, The Minister's Self-Watch, et Horatius Bonar, Words to Winners of Souls, Chapel Library.
39
Classique de la littérature chrétienne, cette allégorie de John Bunyan (1628-1688) montre comment le
personnage central, Chrétien, est libéré du fardeau de culpabilité imposé par la Loi de Dieu, grâce au
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Veille sur toi-même et sur ton enseignement, persévère dans ces choses, car en agissant
ainsi, tu te sauveras toi-même, et tu sauveras ceux qui t'écoutent.
Puisse Dieu bénir son Église !

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pardon reçu à la croix de Christ. Il affronte ensuite en ce monde bien des épreuves sur le chemin vers la vie
éternelle dans la Cité Céleste. À tout moment, il découvre la nécessité de s'appuyer sur la Parole de Dieu
pour être gardé sur le sentier resserré que Dieu a tracé pour lui. En chemin, il rencontre de nombreux faux
chrétiens qui au premier abord donnent l'impression d'être d'authentiques pèlerins ; mais tous se
détournent de lui, sauf Fidèle et Plein-d'espoir. Édition française : CLC.
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