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Edward T.

Welch

QUAND LES HOMMES


ONT PLUS D'IMPORTANCE
QUE DIEU

Surmonter la pression exercee par les pairs, la dependance affective et la


crainte des hommes.

p 4 Édition originale en anglais:


When People Are Big and God Is Small
Overcoming Peer Pressure, Codependency, and the Fear of Man

© 1997 par Edward T. Welch

Traduction par Shirley Asselin

Traduit et publié avec permission

© 2011: Publications chrétiennes inc.


230, rue Lupien
Trois-Rivières (Québec) G8T 6W4
CANADA
Tous droits réservés

Dépôt légal – 4e trimestre 2011

ISBN: 978-2-89082-143-9

Dépôt légal: Bibliothèque nationale du Québec


Bibliothèque nationale du Canada

p5 À mes filles,
Lindsay et Lisa

[TOC] p 7 Table des matières

Remerciements
1. Réservoirs affectifs percés
Partie 1: Le pourquoi et le comment de notre crainte des autres
2. « Les gens vont me découvrir »
3. « Les gens vont me rejeter »
4. « Les autres vont me faire du mal »
5. « Le monde veut que je craigne les gens »
Partie 2: Surmonter la crainte des autres
6. Apprendre la crainte du Seigneur
7. Croître dans la crainte du Seigneur
8. Vos besoins ressentis examinés à la lumière de la Bible
9. Connaître ses besoins réels
10. Prendre plaisir en ce Dieu qui nous remplit
11. Aimer ses ennemis et son prochain
12. Aimer ses frères et ses sœurs
13. « Crains Dieu et observe ses commandements »

[REM] p 8 Remerciements
Ce livre est le résultat d’un travail d’équipe. Je suis particulièrement reconnaissant envers le
personnel et les enseignants de la fondation d’assistance et d’éducation chrétiennes (Christian
Counseling and Educational Foundation ou CCEF) à Philadelphie, aux États-Unis. Je n’aurais pas
pu écrire ce livre sans leur dévouement, leurs prières et leurs mises au point spirituelles. Le
directeur, John Bettler, de même que le directeur des études, Paul Tripp, ont été
particulièrement coopérants en m’accordant un congé, mais l’ensemble de la communauté de
la CCEF a participé à la réalisation de cet ouvrage. David Powlison et Susan Lutz ont
généreusement offert leur temps et leurs talents en révisant minutieusement les premières
versions du livre. Leurs commentaires me furent précieux.
Quelques amis, notamment Beth Noble et Julie Vickers, ont révisé quelques parties du livre,
certaines de manière partielle, d’autres dans leur intégralité. Ces deux femmes, ainsi que
d’autres amis, ont beaucoup apporté à l’élaboration de mes conceptions bibliques.
Ma femme, Sheri, fut le catalyseur de métamorphoses dans ma vie. Je n’aurais jamais pu
expérimenter une grande partie de ces vérités bibliques sans son amour et sa patience. De plus,
tandis que je travaillais sur le manuscrit, elle fut toujours disposée à interrompre ses activités
pour lire ou m’aider à travailler une partie. Elle apporta des suggestions qui contribuèrent à
épurer la grammaire et les idées bibliques. Elle sut également quand il était temps de
m’emmener à la plage.

[CH1] p 9 CHAPITRE 1
Réservoirs affectifs percés
« J’ai longtemps vécu sans avoir une très haute opinion de moi- même, commente William. Le
seul moment où je me sentais à l’aise, c’était lorsque je portais des chaussures à 100 $ ou un
pull à 60 $. Faute de quoi, je ne voulais pas aller à l’école. »
Qui aurait cru que derrière cette façade dure, cette image « cool », se cachait un égo
susceptible d’être froissé par une simple paire de chaussures bon marché ou un pull de marque
anodine ? Dommage que certains de ses rivaux n’en aient rien su, ils auraient pu éviter
quelques ecchymoses, marques de libéralité des poings de William. Ils ignoraient que William
était un Samson des temps modernes: sa force lui venait de ses chaussures. Il suffisait de les lui
voler pour vaincre l’homme.
Bien entendu, le problème de William ne concernait pas vraiment ses chaussures, mais bien
sa réputation. C’était ce que les autres pensaient de ses chaussures et donc de lui. Appelez cela
comme vous le voulez: réputation, pression de groupe, conformisme, dépendance affective.
William était bel et bien p 10 contrôlé par le qu’en-dira-t-on, ce qui ne le différenciait pas
tellement de la plupart des gens.
J’ai moi-même pris conscience de ce problème au cours de ma dernière année au lycée.
J’avais toujours été plutôt timide et complexé, contrôlé par ce que mes camarades pensaient de
moi (ou auraient pu penser), mais je n’y avais jamais accordé beaucoup d’intérêt jusqu’au jour
de la remise des distinctions honorifiques. J’étais nominé pour une distinction et j’avais
terriblement peur de la recevoir !
Plus de deux mille lycéens étaient réunis dans l’auditorium. Du fond de la salle, où j’aimais
me tenir, j’avais l’impression qu’il y avait deux ou trois kilomètres jusqu’à l’estrade. La seule
chose que j’avais en tête était ce que mes camarades penseraient de moi tandis que je me
dirigerais vers l’avant de la salle. Aurais-je une démarche bizarre ? Manquerais-je de trébucher
en montant les marches ? Quelqu’un (je priais pour que ce ne soit pas une fille à mon goût)
allait-il me considérer comme un bon à rien ? Et que dire des autres nominés ou de ceux qui
pensaient mériter la distinction ? Comment me jugeraient-ils si je recevais cette distinction
honorifique ? Quel genre de discours pourrais-je prononcer en guise de remerciement ?
Dieu, je t’en prie, fais en sorte que je ne reçoive pas cette distinction ! Telle fut ma prière.
Après avoir remis d’autres distinctions moins importantes, le directeur adjoint est monté
sur l’estrade pour annoncer le gagnant. Au préalable, il a présenté un bref aperçu biographique
plutôt mystérieux. Sa description ne me ressemblait pas exactement, mais elle était assez
générale pour convenir à ma personne. J’ai commencé à transpirer, mais je n’ai pas bougé de
peur que l’on ne perçoive mon air intrigué. Finalement, l’annonce arriva: « Et le gagnant est…
Rick Wilson ! »
p 11 Rick Wilson ! Je n’en croyais pas mes oreilles ! Lui ! Personne n’était même au courant
qu’il était sur la liste des nominés !
Imaginez ma réaction. Soulagement ? Jamais de la vie. Je me sentais comme un moins que
rien. Qu’est-ce que les gens allaient penser de moi maintenant ? Ils savaient que j’étais sur la
liste des gagnants potentiels, et quelqu’un d’autre avait été choisi. Quel perdant je faisais !
Mon esprit n’a pas tardé à se mettre en mode « justification ». Il aurait suffi que je fasse un
peu d’effort pour gagner. J’en avais certainement la capacité, je n’avais tout simplement pas
envie de gagner. Il me faut un peu plus de temps que les autres pour décoller; une fois à
l’université, je leur montrerai bien de quoi je suis capable. J’avais honte de retourner en classe.
Pitoyable, n’est-ce pas ?
Plus tard, ce jour-là, je me suis remémoré l’événement. Quel beau gâchis ! Je me conduis
comme un enfant effrayé. Je me laisse tellement contrôler par ce que les autres pensent ou
pourraient penser de moi. Or, ce fut à peu près tout. J’ignorais vers où me tourner à partir de là.
Je ne possédais pas suffisamment de ressources bibliques pour remédier à ce que je venais de
découvrir à mon sujet. Pour autant que je sache, il n’y avait aucune issue à mon dilemme. Voilà
en quoi consistait ma vie. Le manque d’assurance personnelle, le fait d’être contrôlé par
l’opinion des autres, quel que soit le nom attribué à cette condition, on peut seulement la
gérer, on ne peut en guérir. Mes réussites futures pourraient éventuellement s’avérer utiles. Ou
(ce que je croyais plutôt intelligent) je pourrais sans doute enjoliver l’une des excuses qui
avaient traversé mon esprit plus tôt dans la journée: j’étais capable de bien travailler, mais
incapable de me dévouer totalement à une tâche particulière. Aussi, quand je ne réussissais pas
bien et que mon estime personnelle était au plus bas, je rationalisais en prétextant que j’aurais
pu faire mieux si j’avais travaillé plus dur. p 12 Ainsi, je pouvais me dire que j’étais acceptable,
pour peu que mon opinion vaille quelque chose.
Je n’avais certes pas de réponses, mais les événements de la journée m’avaient forcément
poussé à réfléchir. Du moins, ils m’avaient réveillé.
À l’université, j’ai bien essayé de combattre ce monstre avec quelques réussites partielles
dans les études et dans le sport. Je justifiais toujours mes échecs en me disant que « j’aurais pu
mieux faire si j’avais fourni plus d’efforts »; or cette chose était toujours présente. J’étais
chrétien, mais le combat n’était pas pour autant facilité. Je la ressentais toujours. Chaque rejet,
chaque échec perçu, chaque personne dont j’aurais aimé être remarqué et qui ne faisait aucun
cas de moi me rappelaient toujours le garçon que j’avais été au lycée, assis à l’arrière de
l’auditorium.

[CH1.1] Approuvé en Christ


Quelques changements ont eu lieu au cours de ma première année à l’institut biblique. Je
dirigeais alors une étude biblique basée sur l’épître aux Romains. J’avais déjà étudié le thème
de la justification par la foi, abordé dans Romains, mais il me semblait désormais plus pertinent
que jamais parce que je faisais le lien entre ma dépendance aux opinions des autres et la
justification par la foi. J’ai compris, et cela ne venait pas uniquement de moi, que je n’avais pas
à me mesurer aux critères d’autrui étant donné que l’opinion de Dieu à mon sujet trouvait ses
racines dans l’œuvre accomplie de Christ. En d’autres mots, même si j’étais un pécheur, Dieu
m’aimait et m’avait justifié à ses yeux, alors, je n’avais pas à me soucier de ce que les autres
pensaient de moi.
C’était, à mon avis, la liberté dont j’avais besoin. Un genre de renaissance. Je n’avais plus à
me préoccuper de l’opinion des autres. Je devais seulement savoir quelle était l’opinion de Dieu
p 13 à mon sujet. Je suis un fils bien-aimé. Un saint. Approuvé en Christ. Une créature
merveilleuse !
Au cours des quelques années qui suivirent cet épisode, je me préoccupais encore trop des
opinions d’autrui, mais je me rappelais vite que je n’avais pas à me mesurer à ce qu’ils
pouvaient penser.
J’essayais de me persuader que l’opinion des autres à mon sujet m’était bien indifférente.
Qu’est-ce que ça peut bien faire qu’on ne me trouve pas génial ? Je suis déjà à la hauteur grâce
à ce que Jésus- Christ a accompli. Je me suis dit que si Jésus était d’avis que j’étais génial, cela
devrait suffire.
Je considérais ma façon de traiter ce problème plutôt efficace, les moments de doutes
étaient assez rares. Parfois, je me demandais: Est-ce que je m’appuie vraiment sur Christ ou sur
ce que je perçois comme étant des réussites et sur les opinions favorables d’autrui ? Après tout,
les gens étaient généralement très positifs. Peut-être mon estime personnelle tenait-elle au fait
qu’ils avaient une bonne estime de moi. Ou peut-être ma fierté personnelle venait-elle de ma
réussite dans les activités sportives et des bons résultats sur le plan académique, lesquels me
démarquaient des autres. Peut-être étais-je fier des projets que j’avais pour mon ministère,
dans la mesure où je me comparais à d’autres personnes et à leurs objectifs qui me semblaient
moins importants. Je m’étais peut-être forgé une identité de personne « aimable » ou, du
moins, plus aimable que la plupart des gens de ma connaissance. Mais ceux qui aiment plaire
aux gens ne sont-ils pas tous aimables ? En bref, il n’était pas impossible que je me laisse
encore diriger par les opinions d’autrui, mais étant donné que cela me convenait, je n’avais pas
vraiment envie de chercher plus loin. Il n’était surtout pas question que j’en parle à quelqu’un
d’autre; cela aurait été trop humiliant.
Puis, je me suis marié.

[CH1.2] p 14 Un grand réveil


Le mariage a été un privilège et une bénédiction pour moi. Il a également été le contexte
idéal pour une étonnante prise de conscience. J’ai découvert qu’être approuvé en Christ ne me
suffisait pas. Au début de mon mariage, je savais que Jésus m’aimait, mais je voulais aussi que
ma nouvelle femme soit absolument et à jamais follement amoureuse de moi. J’avais besoin
qu’elle m’aime. J’arrivais enfin à vivre avec les petites doses de rejet venant d’autres personnes,
mais j’étais comme paralysé si je n’obtenais pas d’elle l’amour dont j’avais besoin, c’est-à- dire
un amour inconditionnel. Si je n’étais pas pour elle un mari extraordinaire, j’étais anéanti (et,
vous le devinez sans doute, quelque peu irrité).
Cette découverte m’a conduit à un second réveil. Je me suis soudainement rendu compte
que je m’étais transformé en un réservoir d’amour ambulant, une personne vide qui avait
besoin d’une autre personne pour la remplir. Ma femme était très capable de m’aimer, mais
personne ne pouvait vraiment remplir ce vide en moi. Je crois que j’étais un réservoir affectif
percé.
J’ai essayé les vieilles méthodes bibliques qui m’avaient bien servi avant mon mariage, mais
elles s’avéraient inefficaces. Elles n’étaient pas suffisantes. En fait, elles n’étaient presque plus
pertinentes. Elles me rappelaient une époque où, lorsqu’une fille me laissait tomber, mes
parents me disaient: « Nous t’aimons quand même. » Leur désir de me consoler me touchait,
mais comme tous les parents et enfants le savent, cela n’arrangeait rien. Évidemment, c’était
bien que mes parents m’aiment, et la situation aurait été bien plus grave s’ils ne m’avaient pas
aimé, mais je voulais que quelqu’un d’autre m’aime aussi.
Depuis, j’ai parlé avec des centaines de personnes qui aboutissent à ce même constat: elles
sont assez sûres que Dieu les aime, mais elles veulent ou ont besoin de l’amour d’autres p 15
personnes (ou, elles ont au moins besoin de quelque chose qui vienne des autres). En
conséquence, elles sont esclaves, dépendantes des autres et se sentent vides. Elles sont
contrôlées par la personne ou la chose qui pourra leur donner ce dont elles croient avoir
besoin.
Il est vrai que la chose ou la personne dont vous avez besoin vous contrôlera.
[CH1.3] Affronter la « crainte des hommes »
J’ai parlé avec beaucoup de personnes qui ont également découvert le pouvoir qu’ont les
gens sur les autres. Elles ont pris conscience d’une épidémie affectant l’âme que la Bible
nomme communément la « crainte des hommes ». Ces personnes se disent adorateurs du Dieu
véritable, mais elles vivent pourtant avec la peur des gens. Cela ne signifie pas que les autres les
terrifient ou les effrayent (quoique ce soit parfois le cas). La « crainte », selon le sens biblique
du terme, a une signification beaucoup plus large. Elle signifie évidemment la crainte d’une
autre personne, mais sous-entend également le fait d’être en admiration devant quelqu’un
d’autre, d’être contrôlé ou dominé par autrui, d’adorer d’autres personnes, de faire confiance
aux autres ou d’avoir besoin des autres.
En outre, tout comme le mot « crainte », le terme « homme » a lui aussi un sens plus large.
Dans la Bible, il inclut les hommes, les femmes et les enfants. Lorsque j’utilise dans ce livre
l’expression « crainte des hommes », je ne vise pas nécessairement le genre masculin. Je sous-
entends, tout comme dans la Bible, que toute personne dans notre vie a le potentiel de nous
contrôler.
La crainte des hommes revient à remplacer Dieu par les hommes. Au lieu de craindre Dieu,
ainsi que la Bible nous l’enseigne, nous craignons les autres.
p 16 Bien entendu, la « crainte des hommes » se décrit de différentes façons. Quand on est
jeune, on veut faire partie du groupe, et quand on est adulte, on ne veut pas déplaire. C’est ce
que l’on appelle depuis peu la « codépendance » ou la dépendance affective. En gardant ces
diverses descriptions à l’esprit, on peut aisément déceler la crainte des hommes partout où elle
est présente.
► Avez-vous déjà désiré faire partie du groupe ? C’est une forme de crainte des hommes.
Si vous avez connu cela dans votre jeunesse, vous pouvez me croire si je vous dis que
cette crainte est toujours là. Elle peut être plus subtile et se manifester de façon plus
codifiée, ou elle peut se cacher dans votre impressionnant curriculum vitae (vos
supposées réussites).
► Avez-vous trop d’engagements ? Avez-vous de la difficulté à dire non, même quand le
bon sens vous le dicte ? Vous êtes une personne qui ne veut pas déplaire, ce qui est un
euphémisme pour la crainte des hommes.
► Avez-vous « besoin » de quelque chose de la part de votre conjoint ? Avez-vous « besoin
» que votre conjoint vous écoute ? Vous respecte ? Pensez-y bien. Nul doute que Dieu
se réjouit de la bonne communication et le respect mutuel entre époux. Toutefois, dans
la plupart des cas, la véritable raison cachée derrière nos désirs est enracinée dans
quelque chose qui s’éloigne du dessein de Dieu pour ceux qu’il a créés à son image. À
moins que vous ne compreniez les paramètres de l’engagement conjugal, votre conjoint
deviendra la personne que vous craindrez. Votre conjoint vous contrôlera. Votre
conjoint prendra doucement la place de Dieu dans votre existence.
p 17 ► Avez-vous des problèmes d’estime personnelle ? C’est l’expression la plus
répandue (du moins aux États-Unis) de la crainte des hommes. Si vous avez souvent des
problèmes d’estime personnelle, il est fort possible que votre vie soit centrée sur ce que
les autres pensent de vous. Vous respectez ou craignez leurs opinions. Vous avez besoin
d’eux pour renforcer votre sentiment de bien- être. Vous avez besoin d’eux pour vous
sentir bien.
► Vous arrive-t-il d’avoir peur que l’on découvre que vous êtes un imposteur ? Bon
nombre d’hommes et de femmes d’affaires ainsi que des personnes accomplies
craignent justement cela. Cette peur d’être exposé n’est qu’une expression de la crainte
des hommes. Cela signifie que les opinions des autres (surtout la possibilité qu’ils
puissent vous voir comme un échec) ont le pouvoir de vous contrôler.
► Avez-vous de la difficulté à prendre des décisions en raison de la crainte de ce que les
autres pourraient en penser ? Avez-vous peur de faire des erreurs qui risqueraient de
vous faire mal paraître aux yeux des autres ?
► Vous sentez-vous vide ou inutile ? Êtes-vous un « affamé d’amour » ? Encore une fois, si
vous avez besoin des autres pour vous remplir, c’est que vous êtes sous leur contrôle.
► Êtes-vous intimidé facilement ? Si c’est le cas, c’est probablement que les gens et leurs
opinions vous dirigent. Ou selon le langage biblique, vous élevez les autres et leurs
opinions au point où ils vous dominent.
► Vous arrive-t-il de mentir, de raconter de petits mensonges pieux, en l’occurrence ?
Qu’en est-il des occasions où vous cherchez à dissimuler quelque chose sans mentir p 18
de manière effrontée ? Mentir et vivre dans l’ombre sont habituellement des moyens de
paraître mieux que les autres et de dissimuler notre honte à leurs yeux.
► Êtes-vous jaloux des autres ? Vous êtes contrôlé par eux et par leurs possessions.
► Les autres vous fâchent-ils ou vous dépriment-ils souvent ? Est-ce qu’ils vous rendent
dingue ? Si oui, c’est qu’ils contrôlent probablement toute votre vie.
► Évitez-vous les gens ? Si c’est le cas, et si vous dites que vous n’avez besoin de personne,
vous êtes quand même sous leur contrôle. Un ermite n’est-il pas dominé par la peur des
hommes ?
► La plupart des régimes alimentaires, même ceux qui entrent dans la catégorie « santé »,
ne sont-ils pas destinés à impressionner les autres ? Le désir d’être « glorifié par les
hommes » n’est-il pas une façon d’exalter les êtres humains en les élevant au-dessus de
Dieu ?
► Ces descriptions ont-elles été révélatrices ? Lorsque vous vous comparez aux autres,
êtes-vous satisfait de vous- même ? La forme la plus pernicieuse de la « crainte des
hommes » est vraisemblablement le sentiment de réussite chez certaines personnes.
Ces gens-là ont une chose de plus que les autres: ils ont une bonne estime personnelle,
mais leur vie est tout de même centrée sur les autres plutôt que sur Dieu.
[CH1.4] Un problème universel
N’allez surtout pas croire que ce problème affecte seulement les gens timides et réservés.
La personne colérique et celle qui p 19 tente d’intimider les autres ne sont-elles pas, elles aussi,
contrôlées par les autres ? Tout ce qu’une personne fait pour essayer de paraître supérieure
aux autres tombe dans cette catégorie. Et que dire de l’homme d’affaires qui travaille dur pour
distancer un collègue en vue d’obtenir de l’avancement ? Les jeux de coudes incessants qui ont
lieu dans les salles de réunions ne sont qu’une version agressive de la crainte des hommes. Et
pensez-vous que la grande vedette sportive super confiante ne cherche pas à être approuvée
par ses admirateurs et les chroniqueurs sportifs ? Affirmer énergiquement que l’on n’a besoin
de personne est une preuve de la crainte des autres aussi réelle que les exemples plus réservés
que nous venons de voir. La crainte des hommes se manifeste de bien des façons.
Vous reconnaissez-vous dans l’une de ces descriptions ? Si votre réponse est non,
considérez seulement ce mot: évangélisation. Vous est-il déjà arrivé de ne pas vouloir parler de
votre foi en Christ parce que vous aviez peur de vous faire traiter d’imbécile irrationnel ?
Là, je vous ai eu.
La crainte des hommes fait tellement partie du genre humain que nous devrions soumettre
toute personne qui le nie à un détecteur de mensonges.
Aux États-Unis, nous sortons tout juste d’une révolution qui a produit un grand nombre de
livres traitant de la dépendance affective. Pendant de nombreuses années, tous les livres dont
le titre contenait le mot « codépendance » étaient assurés du succès au niveau des ventes.
Melody Beattie, par exemple, a gagné des millions avec son livre intitulé Vaincre la
codépendance, dans lequel elle a sans contredit touché un sujet d’une grande importance pour
beaucoup de personnes. Pourtant, il ne s’agissait essentiellement que de la crainte des hommes
en habit séculier. Dans cet ouvrage, Melody Beattie a dit qu’une personne p 20 codépendante
était contrôlée par les autres ou dépendante d’eux sur le plan affectif. Sa prescription pour
remédier à ce problème: s’aimer davantage.

[CH1.5] Ce qu’en dit la Bible


Cette réponse semblait un peu superficielle pour le monde évangélique, c’est pourquoi de
nombreux chrétiens ont réagi en disant que le meilleur traitement contre la codépendance
était de savoir que Dieu nous aime plus que nous ne le croyons. Assurément, Dieu peut vous
remplir d’amour de sorte que vous n’avez plus besoin des autres pour vous combler.
Voilà qui est certainement mieux que l’exhortation à s’aimer soi-même davantage, mais
(cela peut vous sembler contradictoire) même cette réponse est incomplète. L’amour de Dieu
peut être la solution à pratiquement tous les problèmes humains, mais parfois, nous pouvons
nous en servir au point qu’il devient une version diluée d’une vérité profondément riche. Par
exemple, en raison de notre propre insuffisance et non celle de l’Écriture, il arrive parfois que
cette réponse passe à côté de ce passage qui nous dit de « regarder les autres comme étant au-
dessus de [nous]-mêmes » (Ph 2.3), ou elle ne tient aucun compte de la repentance
personnelle. Parfois, elle permet à notre personne et à nos intérêts de demeurer au centre de
l’univers, et Dieu devient alors notre serviteur psychique chargé d’augmenter notre estime
personnelle.
Nous devons aller plus loin dans notre étude de l’Écriture pour comprendre intégralement
l’expérience universelle de la crainte des hommes. C’est ce que nous ferons dans ce livre. En
cours de route, nous allons rencontrer des personnes telles que Abraham et Pierre, qui sont
tombés dans le gouffre de la crainte des hommes et en ont entraîné d’autres à leur suite. Nous
p 21 verrons par quels moyens subtils la crainte fait surface dans nos vies. Nous verrons que les
auteurs qui ont écrit sur le sujet de la codépendance avaient raison de dire qu’il s’agit d’une
épidémie nationale. Puis, nous allons considérer la solution de Dieu.
Voici quelques-uns des thèmes que nous allons explorer:
► Pour vraiment comprendre la source de la crainte des hommes, il faut commencer par
se poser les bonnes questions. Par exemple, au lieu de « Comment puis- je mieux me
sentir dans ma peau et ne pas me laisser contrôler par ce que pensent les autres ? » une
question plus appropriée serait: « Pourquoi suis-je tant préoccupé par mon estime
personnelle ? » ou « Pourquoi ai-je besoin que les gens, et même Jésus, aient une bonne
opinion de moi ? » Ce sont des sujets que nous allons considérer sous différents angles.
Une partie de la réponse comprend le fait que nous avons besoin de penser à nous
moins souvent. Nous expliquerons pour quelle raison et de quelle façon cela doit se
faire.
► Le meilleur traitement contre la crainte des hommes est la crainte du Seigneur. Dieu
doit être plus important pour vous que les êtres humains. Il vous faudra des années
pour saisir cet antidote; en fait, vous en aurez pour le restant de vos jours. J’ai quand
même espoir que ce processus pourra être accéléré et nourri par ce que nous allons
étudier dans ce livre.
► Concernant les autres, notre problème est que nous avons besoin d’eux (pour nous-
mêmes) plus que nous ne les aimons (pour glorifier Dieu). Ce que Dieu nous demande,
c’est d’avoir moins besoin d’eux et de les aimer davantage. Au lieu de tenter de
manipuler les autres, nous allons apprendre à demander à Dieu ce qu’il veut que p 22
nous fassions pour eux. Cette perspective n’apparaît de manière évidente à aucun
d’entre nous, et nous sommes plusieurs à devoir considérer cette vérité sous des angles
différents avant d’arriver à la cerner. Toutefois, la conviction de ce livre est que cette
vérité est un des paradoxes divins de l’Écriture: le chemin du service est la voie de la
liberté.

[PT1] p 23 PREMIÈRE PARTIE


Le pourquoi et le comment de notre crainte des autres
Cette partie explorera la perspective de la Bible au sujet de la crainte des hommes en vue
de vous aider à:
► 1re étape: Reconnaître que la crainte des hommes est un thème important autant dans
la Bible que dans votre vie.
► 2e étape: Déterminer les événements de votre passé au cours desquels votre crainte des
hommes a été intensifiée par votre entourage.
► 3e étape: Spécifier jusqu’à quel point les principes du monde ont renforcé votre crainte
des hommes.

[CH2] p 25 CHAPITRE 2
« LES GENS VONT ME DÉCOUVRIR »

La crainte des hommes tend un piège, mais celui qui se confie en l’Éternel est protégé.
(Proverbes 29.25)

Si le fait d’avoir besoin ou peur des hommes est un problème aussi universel qu’il semble l’être,
nous aurions raison de nous attendre à ce que l’Écriture contienne une grande quantité de
riches descriptions et d’enseignements détaillés sur le sujet. Et c’est précisément le cas. Une
des questions dominantes de la Bible est: De qui aurez-vous peur ou besoin (qui aura le
contrôle sur vous) ? Craindrez-vous Dieu ou les hommes ? L’Écriture explique qu’il y a trois
raisons fondamentales qui nous font craindre les autres, et nous allons toutes les étudier tour à
tour.
1. Nous craignons les autres parce qu’ils peuvent nous exposer et nous humilier.
p 262. Nous craignons les autres parce qu’ils peuvent nous rejeter, nous ridiculiser ou
nous mépriser.
3. Nous craignons les autres parce qu’ils peuvent nous attaquer, nous opprimer ou nous
menacer.
Ces trois raisons ont une chose en commun: elles considèrent les autres comme « plus
grands » (c’est-à-dire plus puissant et important) que Dieu, et la peur, que cela suscite alors,
nous amène à octroyer aux autres le pouvoir et le droit de nous dire ce que nous ressentons,
pensons et faisons.

1re étape Reconnaître que la crainte des hommes est un thème important
autant dans la Bible que dans notre vie.
[CH2.1] La crainte issue de la honte
Une des raisons pour laquelle nous craignons les hommes est qu’ils peuvent nous exposer
ou nous humilier. Cette réalité fut évidente dès le départ. Immédiatement après qu’Adam et
Ève eurent péché, « les yeux de l’un et de l’autre s’ouvrirent [et] ils connurent qu’ils étaient nus
» (Ge 3.7). C’est à partir de là que s’installe la crainte des autres: quand on commence à
connaître la honte. Quand on est exposé, vulnérable, et qu’on a désespérément besoin de
couverture ou de protection. Au regard du Dieu saint et d’autres personnes. Dieu voit notre
honte, et les autres deviennent une menace parce qu’ils peuvent la voir également. Les
opinions de ces derniers peuvent à présent dominer notre vie. Très rapidement, l’Écriture
devient une succession d’histoires d’individus qui cherchent désespérément à se cacher et à se
protéger des regards de Dieu et d’autrui.

[CH2.1.1] p 27 La honte qui résulte du péché


La honte apparaît premièrement dans le regard de l’autre. Puis, il y a le regard encore plus
pénétrant de Dieu. Les deux sont tellement troublants qu’Adam et Ève se cachent, et nous nous
cachons encore aujourd’hui. Adam et Ève savaient sûrement qu’ils étaient nus avant de pécher,
et il y a bonne raison de croire que, dans leur état d’innocence, ils admiraient l’apparence
physique de l’autre. Toutefois, ce regard était différent. Il pouvait voir une nudité encore plus
profonde, ou, du moins, la personne observée se sentait-elle davantage exposée. Or le regard
de l’autre est devenu telles des lumières perçantes, capables de voir le corps, l’âme, et même la
laideur du péché. Le sentiment d’être exposé, totalement inconnu, devient désormais le seul
ressenti. Ils sont découverts par l’autre, et ce qui se voit maintenant est honteux. Autrefois
admirables dans leur innocence et leur beauté, leurs âmes sont désormais grotesques.
Ils essaient tant bien que mal de se couvrir, mais même les peaux d’animaux n’arrivent pas
à effacer cette honte plus profonde. Ce qui jadis était une bénédiction (connaître et être connu)
devient à présent une malédiction. Ce qui autrefois était un échange de regards amoureux
devient impoli et indiscret.
Quand Adam a péché, la honte, à savoir: « Qu’est-ce qu’on va penser de moi ? » et « Qu’est-
ce que Dieu va penser de moi ? » est devenue une pierre angulaire de l’expérience humaine.
Depuis la Genèse, la nudité, ou la peur d’être exposé devant les autres, est devenue une des
grandes malédictions dans la culture hébraïque. C’est une grande malédiction parce qu’elle
symbolise la nudité spirituelle et la honte plus profondes qu’il faut couvrir. Elle signifie qu’à
défaut d’une couverture fournie par Dieu, nous sommes nus devant lui. Noé va maudire même
la progéniture de Cham après avoir été exposé dans sa nudité, et peut-être même ridiculisé.
Lorsque Job traversera les pires p 28 moments de sa vie, il va parler de ce qui lui fait peur et
s’écriera: « Je suis sorti nu du sein de ma mère, et nu je retournerai dans le sein de la terre »
(Job 1.21a). Il fera plus que se résigner à l’idée de la mort; il aura la vive sensation que sa honte
a été exposée et qu’il est maudit. Le prophète Amos utilisera cette même image pour annoncer
l’horrible jugement à venir sur Israël: « Le plus courageux des guerriers s’enfuira nu dans ce
jour-là » (Am 2.16).

[CH2.1.2] La honte qui résulte d’un péché commis contre nous


Dans l’histoire de la spiritualité humaine, une deuxième forme de honte fera son apparition.
La honte originelle était simplement la conséquence de notre propre péché. C’est le résultat de
notre impureté et de notre nudité devant le Dieu saint, et nous l’expérimentons habituellement
dans nos rapports avec les autres. Toutefois, une autre forme de honte s’est rapidement
superposée à la honte qui résulte du péché en intensifiant cette honte originelle. C’est ce qui
s’ensuit lorsqu’un péché est commis contre nous, qu’on nous victimise ou qu’on nous
déshonore.
Cette deuxième forme de honte s’« attrape » au contact de quelque chose d’impur. Par
exemple, quand Schichem violera Dina, elle sera « déshonorée » (Ge 34.5). Cela ne veut pas
dire que Dina sera responsable de ce qui lui arrivera. Le fait est que, même si elle n’a pas péché,
sa pureté sera dans un sens entachée.
Quand un homme commet l’adultère avec la femme d’un autre, ce dernier, qui est innocent
est littéralement déshonoré, sa nudité étant découverte par le péché d’un autre (voir Lé
20.11,17,19–21). Des enfants indisciplinés entachent la réputation de leurs parents et leur font
honte (Pr 19.26). Même le temple est souillé lorsque des hommes impurs y entrent (Ps 79).
C’est la même chose pour un Israélite qui touche la carcasse d’un animal qu’on a déclaré
impur. Ceux qui le touchent, p 29 même par accident, doivent laver leurs vêtements et sont
impurs jusqu’au soir (Lé 11.24).
Il y a donc deux façons de découvrir notre nudité. La première est la nudité que l’on
s’impose soi-même en raison de notre nature pécheresse et de notre péché personnel. La
seconde est la nudité que les autres nous imposent à cause de leurs péchés. Malheureusement,
cette honte, qui découle de notre victimisation, semble identique à celle que nous ressentons
lorsque nous commettons nous-mêmes un péché, même si la cause est très différente. Les
victimes éprouvent de la gêne, de l’humiliation et de la honte lorsqu’un péché est commis
contre eux. Elles se sentent sales, nues et incapables de se couvrir. Elles ont le sentiment que
les autres les observent et les jugent, et elles ont peur des gens. Pourtant, selon les principes de
la théologie, il y a une grande différence entre les deux formes de honte.
► La honte que l’on ressent après avoir péché est quelque chose que l’on s’impose; la
honte qui résulte de la victimisation est quelque chose que l’on nous fait subir.
► Tout le monde expérimente la honte qui résulte d’avoir péché, mais ce n’est pas tout le
monde qui expérimente également la honte d’avoir été victime du péché d’un autre.
La honte que ressent la victime d’un péché sexuel est l’exemple type de honte résultant de
la victimisation. Une femme qui a été violée peut se sentir accablée par le regard qu’elle
imagine que Dieu et les autres jettent sur elle.
Une femme a dit: « J’ai l’impression d’avoir une enseigne lumineuse sur le front qui dit: «J’ai
été violée par mon oncle «. » Elle pourrait être la porte-parole de milliers d’autres personnes.
p 30 « Je n’ose pas ouvrir la bouche en présence d’autres personnes », disait une autre
victime. « Si j’ouvre la bouche, j’ai l’impression qu’il en sortira une substance dégoûtante. »
Ces commentaires tragiques sont manifestement la conséquence d’une honte résultant de
la victimisation. Néanmoins, il ne faut pas oublier que ce genre d’expérience n’exclut pas la
honte qui résulte du péché, qui est une condition universelle. En général, la honte résultant de
la victimisation intensifie la honte engendrée par le péché. J’ai rencontré très peu de personnes
qui ressentaient uniquement de la honte pour avoir été victimes. Ces victimes ont plutôt besoin
de conseils bibliques pour apprendre à gérer la honte générée par leurs propres péchés outre
celle qui résulte d’un péché commis contre eux. Parfois, elles ont des péchés à confesser,
parfois, elles doivent apprendre à croire que Dieu pardonne les péchés. D’une manière ou
d’une autre, il serait cruel de négliger la honte causée par leurs propres péchés, car devant
Dieu, c’est quelque chose que nous expérimentons tous, et notre conscience le sait bien. Par
conséquent, dans l’étude qui suit, je combinerai les deux catégories de honte, à savoir celle du
pécheur et celle de la victime. Je les dissocierai plus tard, mais pour l’instant, considérons ce qui
suit comme des exemples de honte du pécheur qui, dans certains cas, est intensifiée par la
victimisation.

[CH2.1.3] La honte dans le monde d’aujourd’hui


Où trouve-t-on la honte dans la culture sécularisée dans laquelle nous vivons ? Il suffit de
regarder dans nos étagères à livres. La honte est si présente dans la littérature moderne qu’elle
est presque la tendance et peut-être même, sans vouloir faire de jeu de mots, surexposée. The
Mask of Shame (Le masque de la honte) de Léon Wurmser, Shame and Pride (Honte et orgueil)
de p 31 Donald Nathanson, et No Place to Hide (Nulle part où se cacher) de Michael Nichols
sont des exemples d’études plus techniques sur la honte.
Peut-être n’avez-vous jamais entendu parler de ces livres, mais vous connaissez
probablement la forme moins technique de la honte, qui est l’estime de soi. La honte, avec son
sentiment de disgrâce éprouvée devant Dieu et les autres, se manifeste dans notre culture par
un manque de confiance en soi, qui va de pair avec le sentiment d’être inutile. La honte et le
manque de confiance en soi découlent tous deux du péché d’Adam. Les deux sont régis par les
opinions supposées des autres à notre égard, et les deux nous donnent l’impression d’être des
bons à rien. La seule différence est que notre mot « honte » retient toujours la signification que
nous sommes honteux devant Dieu et devant les hommes, tandis que la confiance en soi est
perçue tel un problème inhérent à l’être humain ou purement personnel. Le manque de
confiance en soi est une version populaire de la honte ou de la nudité biblique. C’est une honte
sécularisée.
Quand on réalise que les expressions « honte » et « manque de confiance en soi » sont
pratiquement interchangeables, il devient difficile de trouver un livre qui n’en parle pas. De
l’ouvrage de Gloria Steinem, Revolution from Within: A Book of Self-Esteem (La révolution
intérieure: un livre sur l’estime de soi) aux manuels pédagogiques utilisés dans les écoles
primaires aux États-Unis, l’Amérique semble avoir conclu que le manque de confiance en soi est
la racine de tous les maux. À ma première rencontre parents-professeurs, j’ai appris que
l’objectif principal de l’école primaire de ma fille était de rehausser son estime personnelle, ce
qui a donné lieu à une vibrante ovation de la part des parents. Tous croyaient qu’on venait
d’adresser le cœur du problème de l’enfance.
p 32 Je n’ai pas applaudi. En revanche, ma femme et moi avons dû décider si nous allions
laisser notre fille dans cette école. L’enseignement sur la confiance en soi, avec son importance
accordée au moi, n’aggrave-t-il pas justement le problème ? En ce qui me concerne, c’était
certainement le cas. Chaque fois que je voulais travailler sur mon estime personnelle, je
finissais toujours par manquer encore plus d’assurance en moi-même et devenais plus
individualiste encore. Même d’un point de vue séculier, l’enseignement sur l’estime
personnelle semble douteux. Ne rendons-nous pas un mauvais service aux enfants lorsque nous
leur offrons toutes sortes d’applaudissements non mérités ? Le respect de soi que l’on tente de
transmettre dans les écoles est ce qu’une personne acquiert uniquement en développant la
capacité de s’acquitter de tâches difficiles, en risquant l’échec et en surmontant les obstacles.
On ne peut pas simplement conférer la confiance en soi à quelqu’un. Présumer que d’autres
peuvent contrôler l’opinion qu’une personne a d’elle-même suscite justement le manque de
confiance en soi !
Néanmoins, toutes les propositions démentielles que les livres populaires nous proposent
pour gonfler l’estime personnelle renferment néanmoins un message biblique. L’énorme
intérêt porté sur l’estime de soi ou l’amour-propre existe pour nous aider avec un problème
bien réel. Le problème est que nous n’allons pas très bien en réalité. Nous n’avons aucune
raison de nous sentir bien dans notre peau. Nous sommes réellement déficients. Les
fondements fragiles de l’enseignement sur l’estime personnelle finissent par s’effondrer à
mesure que les gens réalisent que leur mal est beaucoup plus profond. Notre problème est, en
partie, que nous sommes nus devant Dieu.
► Même avec toute la pornographie et la nudité qui font partie de la culture occidentale,
la nudité est toujours un sujet tabou. Pourquoi ? Parce qu’elle signifie que nous p 33
avons besoin d’une couverture spirituelle en profondeur. Les vêtements que nous
portons corroborent presque indéniablement cette doctrine biblique.
► Je peux chanter à gorge déployée avec le volume de la radio au maximum quand je me
rends seul au travail, mais il suffit que quelqu’un me voie, et je suis mal à l’aise. Même si
cette personne est totalement anonyme et que je ne la reverrai jamais, le fait qu’elle
m’ait vu, même furtivement, cela a suffi à ramener à mon esprit la crainte plus profonde
d’être exposé.
► Nous avons des règles tacites quant au temps permis pour fixer du regard une
personne. Un regard bref est courtois, mais dévisager quelqu’un est considéré comme
impoli et peut provoquer l’embarras ou même l’hostilité. Les femmes se plaignent que
les hommes les traitent comme des objets quand ils les regardent trop longtemps; elles
ont l’impression de se faire déshabiller des yeux.
► Même les personnes en proie à des hallucinations parlent d’être « sous le regard » de
quelqu’un. Il est commun que la personne qui hallucine ait l’impression d’avoir des yeux
fixés sur elle, des yeux qui la suivent, des yeux pénétrants, dangereux.
► Avez-vous remarqué à quel point l’Église évangélique met l’accent sur l’honnêteté et
l’ouverture ? Ce refrain doit être continuellement répété parce que nous n’aimons pas
nous ouvrir aux autres. Même en tant que chrétiens, nous préférons nous cacher
derrière des murs de protection.

[CH2.2] p 34 Se cacher et espionner


Aux États-Unis, les gens ont recours à une métaphore pour se décrire qui est une variante
de se couvrir le visage de honte: nous sommes des gens derrière des murs. « Les murs font trois
mètres d’épaisseur. Personne ne peut pénétrer de mon côté, et je ne peux en sortir non plus. »
Ces misérables couvertures isolent, certes, tout en nous protégeant également des regards des
autres. En pratique, ces murs peuvent être construits à partir de milliers de matériaux
différents: argent, renommée, réussites sportives, emplois, horaires chargés. Cependant,
aucune fabrication humaine ne peut vraiment couvrir la honte.
Un élément étrange de ces murs est la façon dont ils nous permettent de voir les autres. Les
murs épais ont apparemment de petites fissures ou des fenêtres qui permettent de voir le
monde extérieur. Nous voulons nous cacher, mais nous voulons aussi espionner. L’espionnage
pourrait nous révéler la vulnérabilité des autres et nous faire croire qu’ils ne sont pas différents
de nous (ou peut-être même pas aussi bons que nous). La honte aime la compagnie. D’un autre
côté, le mur pourrait nous donner de voir une personne forte qui pourrait devenir notre héros.
Avec un héros, on se sent moins isolé étant donné que l’on entre dans une relation imaginée où
l’on se croit en sécurité.
Le rêve est un passe-temps favori derrière ces murs. Par exemple, Paula gère son monde
par l’illusion, mais vous ne vous en douteriez jamais. Cette chrétienne célibataire a réussi dans
la vie. Elle a un travail extraordinaire avec beaucoup de responsabilités et un patron qui vante
continuellement ses mérites. Femme active dans l’Église, elle est aimée de tous. Mais le soir
venu, Paula vit avec son mari et ses enfants imaginés. Une des raisons pour lesquelles elle a
inventé son monde de pure illusion est qu’il lui offre ce qu’elle veut. L’autre raison, c’est qu’elle
a ainsi des relations sans risquer de se dévoiler.
p 35 William vit sensiblement la même chose. « Je veux que mes besoins soient comblés,
mais je ne veux pas être exposé. Je ne tiens pas à ce qu’une seule personne me connaisse
vraiment. » Aussi s’est-il imaginé un monde dans lequel il se croit en sécurité, en s’adonnant à
la pornographie et à la masturbation.
Je dois confesser que l’imaginaire a également fait partie de mon univers. Un exemple
récent: je suis plutôt bien coordonné de la taille en montant, mais j’ai deux pieds gauches. C’est
sans doute dû à trop d’années de natation. Ma femme, Sharon, quant à elle, a un corps
parfaitement coordonné et elle aime bien danser. Je crois que Dieu a fait les choses ainsi afin de
me garder humble.
Savez-vous ce qui s’est passé la dernière fois que nous sommes rentrés d’une soirée où j’ai
essayé de danser avec ma femme ? Mon esprit s’est mis à vagabonder; j’ai commencé à
m’imaginer que j’étais un danseur fantastique. J’ai rêvé que je me présentais sur la piste de
danse en homme ordinaire et que, tout à coup, je me transformais en John Travolta. Les gens
étaient émerveillés, ma femme me trouvait formidable… Vous imaginez un peu la scène.
C’était drôle ou pitoyable, tout dépend de la manière dont on considère la situation. Ce à
quoi je veux en venir, c’est que cet innocent rêve était plein de crainte des hommes, de honte
et d’orgueil. De crainte des hommes à raison de la peur de ce que les autres pourraient penser
de mon manque d’habileté. De la honte, particulièrement la plus sécularisée, parce que je
n’avais pas une trop haute opinion de moi-même. Je me sentais exposé devant les autres, car, à
mon avis, seul un idiot comme moi pouvait être aussi pitoyable sur une piste de danse. De
l’orgueil, car je voulais que les autres croient que j’étais fantastique, du moins dans ce domaine.
p 36 C’est là tout le paradoxe de l’estime personnelle: habituellement, le manque de
confiance en soi signifie que j’ai une trop haute opinion de moi-même. Je suis trop centré sur
ma personne et je pense que je mérite beaucoup mieux que ce que j’ai. La raison pour laquelle
je suis mal dans ma peau est que j’aspire à quelque chose de mieux. Je souhaite avoir ne serait-
ce que quelques instants de gloire. Je suis un paysan qui désire être un roi. Quand on est aux
prises avec une piètre image de soi, cela fait mal, et on ne ressent surtout pas de l’orgueil. À
mon avis, c’est le côté plus sombre et dissimulé de l’orgueil, un orgueil déguisé.
Nos cœurs sont certainement très occupés lorsque nous nous cachons et jouons les espions.
Vous êtes-vous déjà demandé pourquoi certaines revues ou émissions de télévision sont si
populaires ? Ne serait-ce pas parce qu’elles nous permettent d’épier les autres de l’autre côté
de nos murs de honte ? Elles nous donnent de voir la honte des autres, et normalisent ainsi la
nôtre. Ou, elles nous permettent de nous identifier à nos héros afin que nous puissions nous
sentir mieux brièvement.
C’est une sorte de version moderne du voyeur. Pendant que le voyeur observe quelqu’un à
travers un trou de serrure, il est également observé par un autre voyeur qui, lui, est surveillé
par un autre, qui est épié, à son tour, par un autre.

[CH2.3] Quand vient la nuit


Au début des années 1800, le philosophe danois, Soren Kierkegaard, a observé des gens qui
passaient leur temps à se cacher et à espionner. Ils utilisaient des masques plutôt que des murs.
p 37 Ne savez-vous pas qu’il y a une heure de la nuit où tous enlèvent leur masque ? Croyez-
vous que l’on puisse se moquer indéfiniment de la vie ? Croyez-vous que vous arriverez à vous
esquiver un peu avant minuit pour éviter d’avoir à enlever votre masque ? Ou n’êtes-vous pas
terrifié par cette heure ? J’ai vu, dans la vraie vie, des hommes qui avaient trompé les autres
tellement longtemps qu’ils n’étaient plus capables de révéler leur vraie nature; des hommes qui
avaient joué à cache-cache si longtemps que, dans un accès de folie, ils ont fini par révéler de
façon répugnante les pensées secrètes qu’ils avaient fièrement gardé dissimulées jusque-là1.

Le philosophe a raison. C’est tous les jours Carnaval. Mettre son masque fait partie du rituel
matinal, tout comme se brosser les dents et prendre le petit-déjeuner. La mascarade, en
revanche, n’a rien de festif. Sous les masques se cachent des personnes terrifiées à l’idée que
l’on puisse assister à un dévoilement. Car un jour, les masques et les couvertures seront bel et
bien soulevés. Il y aura un dévoilement éternel. Cependant, ce n’est pas le regard des autres
que nous devrions craindre. Après tout, ils ne sont pas différents de nous. Kierkegaard nous fait
savoir qu’il existe un autre regard que nous devrions craindre: celui de Dieu. Si le regard des
hommes éveille de la crainte en nous, à combien plus forte raison le regard de Dieu devrait-il
l’éveiller ? Si nous avons le sentiment d’être exposés par d’autres personnes, combien serons-
nous anéantis devant Dieu ?

1
Tiré de « Either/Or » (L’un ou l’autre), dans A Kierkegaard Anthology, Éd. Robert Bretall, Princeton, N.
J., Princeton University Press, 1946, p. 99.
Le seul fait de songer à ces choses est saisissant. Nos cœurs tremblent à cette idée, et nous
faisons tout ce que nous pouvons pour l’éviter. Afin d’éviter le regard de Dieu, il nous arrive de
vivre comme si la crainte des autres était notre plus grand problème, comme si c’était eux qui
étaient grands, pas Dieu. p 38 Cela est faux, bien sûr. La crainte des hommes est souvent une
forme plus consciente de la crainte de Dieu. Nous sommes plus conscients de notre peur des
autres que de notre peur de Dieu. Il est vrai que la peur des hommes est un véritable
phénomène. Nous avons réellement peur des pensées, des opinions et des actions des autres.
Or, ainsi faisant, c’est notre peur de Dieu que nous cherchons à enfouir de notre mieux. Voici la
version biblique de la mascarade selon Kierkegaard.
Jésus se tourna vers elles, et dit: Filles de Jérusalem, ne pleurez pas sur moi; mais pleurez sur
vous et sur vos enfants. Car voici, des jours viendront où l’on dira: Heureuses les stériles,
heureuses les entrailles qui n’ont point enfanté, et les mamelles qui n’ont point allaité ! Alors ils
se mettront à dire aux montagnes: Tombez sur nous ! Et aux collines: Couvrez-nous ! (Luc 23.28–
30.)

Quand Christ reviendra, ceux qui seront nus préféreront être couverts par les pierres des
collines de Jérusalem que d’être exposés au regard saint de Dieu.

[CH2.4] La solution de Dieu


Évidemment, Dieu a une solution pour contrer cette peur, et nous allons bientôt l’étudier
en détail. L’Évangile est l’histoire de Dieu qui, au lieu d’anéantir ses ennemis nus, les couvre, les
conduit aux noces de l’Agneau et les épouse. Le roi David, connaissant cette bonne nouvelle, a
dit: « Éternel ! tu me sondes et tu me connais » (Ps 139.1). Le regard de Dieu, malédiction pour
ceux qui étaient nus était pour lui une bénédiction. Il est une protection pour ceux dont les
péchés ont été couverts et la culpabilité expiée.
Néanmoins, ces personnes peuvent encore avoir peur de Dieu, et avec raison. Ceux qui ont
été couverts par la justice de p 39 Jésus n’ont pas peur de périr. Ils ont plutôt la même crainte
que David (Ps 119.120) ou Ésaïe (És 6) qui, sachant qu’ils étaient pécheurs, tremblaient devant
le Dieu très haut. Il est possible que cette crainte soit associée à un péché non confessé. Il se
pourrait qu’elle soit associée à un manque de confiance dans les promesses de Dieu. Il peut
également s’agir d’un sentiment d’« impureté » résultant d’un péché dont on a été victime.
Tant que nous serons des pécheurs, nous connaîtrons la honte. Nous savons tous ce que c’est
que de vivre derrière des murs et des masques.
La solution semble élémentaire: souvenez-vous que, par la foi dans la mort, la résurrection
et l’ascension de Jésus, il nous a revêtus de robes de justice. Il a effacé votre honte. Cette vérité
pourrait être la seule chose susceptible de libérer une personne craintive. Toutefois, autant sur
le plan personnel que sur le plan professionnel en tant que conseiller, mon expérience suggère
que, très souvent, cela ne suffit pas de se rappeler que Jésus est mort pour nous. N’est-ce pas
évident que Paula, William et moi avons besoin d’autre chose ? En disant cela, je n’insinue pas
que l’Évangile de Jésus ne soit pas suffisant. Ce que je veux dire, c’est qu’il y a des
enseignements implicites dans l’Évangile qui requièrent notre attention. Par exemple, de quoi
devons-nous nous repentir ? Est-ce que j’aime les autres au nom de Jésus, ou suis-je plus
intéressé à me protéger d’eux ? Comment puis-je penser moins (c’est-à-dire moins souvent) à
moi-même ?
Il y en a bien plus à dire au sujet de la solution biblique à la honte. J’aimerais néanmoins
résumer ce que nous avons vu jusqu’ici. La première perspective biblique concernant la crainte
des hommes est qu’elle provient de la nudité issue du péché. À cause du péché qui est encore
présent dans nos vies, nous expérimentons la gêne, la honte et le sentiment d’être exposé et
vulnérable. Par conséquent, nous essayons de nous protéger et nous évitons le regard des
autres. Il semble que le problème p 40 est le regard des autres, alors qu’en réalité, le problème
existe en nous et entre Dieu et nous. La pression des pairs n’a rien à y voir. Le grand problème
n’est pas tant le regard des autres. Nous le classons dans la catégorie plus générale de la «
crainte des autres » seulement parce qu’il est beaucoup plus évident lorsque nous sommes en
leur présence. Par exemple, si l’auditorium du lycée avait été vide ou si le directeur adjoint
m’avait annoncé par téléphone que j’avais gagné un prix, je n’aurais ressenti nulle gêne. La
présence des autres nous donne l’impression d’être exposés. Cependant, même si nous croyons
que ce sont les autres qui nous exposent, le fait est que nous portons cette honte sur nous en
tout temps. Les autres ne font qu’appuyer sur la gâchette.
Les racines de la crainte inhérente à l’être humain se situent dans notre relation avec Dieu.
En conclusion, nous sommes sous son regard saint et pénétrant. Lorsque nous violons sa
justice, ce regard nous condamne, à moins que nous ne confessions nos péchés et affirmions
par la foi « que nous sommes sanctifiés, par l’offrande du corps de Jésus-Christ, une fois pour
toutes » (Hé 10.10).
Les péchés d’autrui peuvent nous rendre impurs également. Dans ces circonstances, sans
être directement coupables de notre impureté, nous sommes quand même nus et avons besoin
d’une couverture pour le péché que Dieu seul peut nous procurer.

[CH2.5] Matière à réflexion


1. Si vous avez encore de la difficulté à voir que vous craignez les autres, songez aux
différences entre votre vie privée et votre vie publique. Avez-vous des péchés que vous
confessez facilement à Dieu, mais que vous auriez de la difficulté à avouer à une autre
personne ? Y a-t-il des choses que vous ne voulez pas que d’autres sachent sur p 41
votre compte ? Ces questions pourraient révéler quelques racines de la crainte des
hommes provoquée par la honte.
2. Considérez les moyens par lesquels vous tentez de vous couvrir, et rappelez-vous que la
plupart des gens en portent plusieurs épaisseurs.
3. Avez-vous déjà entendu l’anecdote des cinq hommes qui avaient reçu un appel
téléphonique disant: « Ils savent ce que vous avez fait. Quittez la ville immédiatement. »
Le soir venu, quatre d’entre eux avaient quitté la ville ! Si ces personnes se sont laissé
contrôler par l’appel, c’est qu’elles n’avaient pas la conscience tranquille. Avez-vous la
conscience tranquille ? Si la réponse est non, confessez votre péché devant Dieu et
demandez-lui de vous aider à changer. Une conscience tranquille est une grande
bénédiction et un bon moyen pour commencer à se libérer de la crainte des hommes.
[CH3] p 43 CHAPITRE 3
« LES GENS VONT ME REJETER »
Étroitement liée à la peur d’être exposé (la peur issue de la honte) est sans doute la raison
majeure pour laquelle nous sommes contrôlés par les autres: ils pourraient nous rejeter, nous
ridiculiser ou nous mépriser (la peur du rejet). On ne nous invite pas à la fête. On nous ignore.
On est déçu à notre sujet. On ne nous accorde pas la reconnaissance, l’amour ou l’importance
dont nous aimerions faire l’objet. En conséquence, nous nous sentons comme des moins que
rien.
Cela vous encouragera peut-être un peu de savoir que, quoique la peur du rejet puisse
sembler très moderne, elle a été un problème pour un grand nombre de personnes célèbres à
travers l’histoire. Par exemple, Moïse a justement mis en garde les chefs et les juges d’Israël à
l’égard de ce problème (De 1.17). Moïse savait que les gens respectaient énormément l’opinion
des autres, faisaient preuve de favoritisme ou honoraient certaines personnes plus que d’autres
par crainte d’être rejetés par les personnes considérées comme plus importantes. Cette
tendance humaine devait être considérée comme très grave aux yeux des p 44 juges d’Israël.
Par exemple, si un Israélite avait à juger un cas impliquant un artisan très connu, il n’était pas
impossible qu’on lui fasse subir des pressions pour que la peine soit allégée ou même
entièrement remise. Sans cela, l’artisan pouvait rejeter le juge la prochaine fois qu’il souhaitera
faire réparer sa charrue. Vous saisissez le problème ? Un juge pouvait être contrôlé dans la
mesure où l’accusé représentait quelque chose d’utile au juge. Dans de pareilles circonstances,
les gens prenaient de l’importance tandis que la justice de Dieu diminuait à leurs yeux.
Je me demande combien d’entre nous craignent (respectent ou vénèrent) ceux qui
possèdent plus d’argent, de pouvoir, d’éducation ou d’attrait. En tant que conseiller, j’ai
remarqué, dans mon propre ministère et dans celui d’autrui, une approche plus amicale et
prudente quand il s’agit de conseiller des donateurs potentiels que lorsqu’on le fait
bénévolement pour des indigents.
Le roi Saül est un exemple biblique d’un homme qui a expérimenté la peur du rejet. Dans 1
Samuel 15, il reçoit l’ordre d’exterminer totalement les Amalécites. Dieu avait accordé à toutes
les armées d’Israël la grâce nécessaire pour vaincre ce peuple, « mais Saül et le peuple
épargnèrent Agag [roi des Amalécites], et les meilleures brebis, les meilleurs bœufs, les
meilleures bêtes de la seconde portée, les agneaux gras, et tout ce qu’il y avait de bon » (1 Sa
15.9). Lorsque Samuel affronte Saül au sujet de sa désobéissance, ce dernier confesse son
péché, mais se justifie en disant: « Je craignais le peuple, et j’ai écouté sa voix » (1 Sa 15.24).
Il y a deux explications possibles à la justification de Saül. Il se peut que ses généraux aient
vraiment insisté pour qu’il rapporte du butin à la maison, ce qui, dans son cas, serait
inexcusable à la lumière du nombre de fois où Dieu l’avait mis en garde de ne pas craindre le
peuple. Dans un autre cas de figure, Saül p 45 s’est peut-être dit que la crainte des hommes
était une chose si répandue que Samuel accepterait son excuse en raison du caractère
purement humain de ce comportement. Après tout, si cela fait partie de notre nature,
comment pourrait-on nous reprocher ce genre d’actes ? Quel qu’en soit le motif de Saül, la
peur des hommes a produit des résultats catastrophiques: c’est ce qui lui a causé la perte de
son royaume.
Les pharisiens du Nouveau Testament, pareillement au roi Saül, auront peur du rejet. Ils
seront affamés d’acceptation et d’approbation du peuple, et ils auront peur de ne pas l’obtenir.
Beaucoup de pharisiens se vanteront de ne pas croire en Jésus. Ils accuseront même ceux qui y
croient de vivre dans la naïveté (Jn 8.45–50). Toutefois, certains chefs, ne pouvant rester
indifférents aux enseignements dignes de foi et aux miracles de Jésus, placeront secrètement
leur foi en lui. Dit clairement, ils croiront que Jésus a été envoyé par Dieu, qu’il est le Messie
tant attendu pour lequel ils priaient. Avec une telle conviction, ils auraient dû devenir aussitôt
des disciples de Christ et entreprendre de persuader le peuple d’y croire à son tour, n’est-ce pas
? Or, cela ne se produira pas. Leur foi s’évanouira très vite. Pourquoi ? Ils auront peur de
confesser leur foi à cause d’éventuelles réactions de la part des gens dans la synagogue, « car ils
[aimeront] la gloire des hommes plus que la gloire de Dieu » (Jn 12.42,43). Pour eux, il sera
essentiel d’être loué par le peuple. Ils craindront le rejet plus qu’ils ne craindront le Seigneur.
Tout cela semble bien familier. Parfois, nous aimerions mieux mourir pour Jésus que vivre
pour lui. Si quelqu’un avait le pouvoir de nous tuer pour notre foi, j’imagine que la plupart des
chrétiens diraient: « Oui, je crois en Jésus-Christ », même au péril de leur vie. La menace de
torture pourrait inciter certaines personnes à y réfléchir à deux fois, mais je crois que la plupart
des chrétiens confesseraient leur foi en Christ. En p 46 revanche, si le fait de prendre une
décision pour Jésus signifie que l’on sera impopulaire, ignoré, pauvre ou critiqué pendant
plusieurs années, un très grand nombre de chrétiens mettront temporairement leur foi en
sourdine. « Je ne suis pas sur le point de mourir, alors, pourquoi prendre une décision hâtive ? »
« J’aurai l’occasion de régler mes comptes avec Dieu plus tard. »
En d’autres termes, tuez-moi, mais ne m’empêchez pas d’être aimé, estimé ou respecté.
Ces paroles vous semblent-elles trop dures ? Souvenez- vous de ce mot: évangélisation. Je
suis certain que beaucoup d’adolescents préféreraient mourir plutôt que d’être vus par leurs
amis en compagnie du groupe des jeunes de l’Église ou dans une pièce de théâtre chrétienne.
Les voyages missionnaires les plus populaires ne sont-ils pas ceux qui nous amènent loin de
notre quartier ? Ce n’est pas difficile en Russie, tandis que dans notre propre quartier, le défi
est constant. Connaissez-vous quelqu’un qui a toujours témoigné pour l’Évangile avec l’audace
et la clarté de Jésus ? Non. Y a-t-il quelqu’un qui a continuellement échappé à la crainte des
hommes dans l’évangélisation ? Certainement pas. Il y a une certaine « folie » inhérente au
message de la croix. La proclamation de l’Évangile ne nous fait pas bonne presse. Elle ne fait pas
de nous des personnes populaires.

La « pression exercée par les autres » et la gloire qui vient de


[CH3.1]

Dieu
Le péché qui réside dans le cœur humain (la crainte des hommes) exerce un pouvoir
redoutable. Les éloges qui viennent des autres (la douce brise momentanée) peuvent nous
paraître plus glorieux que les éloges qui viennent de Dieu. Jésus lui-même a dit aux dirigeants
juifs: « Comment pouvez-vous croire, vous p 47 qui tirez votre gloire les uns des autres, et qui
ne cherchez point la gloire qui vient de Dieu seul ? » (Jn 5.44.)
De nos jours, pour être cléments, nous disons plutôt que les pharisiens cherchent
simplement à plaire aux gens, qu’ils subissent la « pression des autres ». Étant donné que nous
sommes tous affectés à un moment ou à un autre, nous sommes presque compatissants devant
un tel comportement. Toutefois, il s’agit sans doute de la pire forme de crainte des hommes qui
soit. C’est ce qui pousse les adolescents à faire de mauvais choix. Les adultes aussi comptent
sur les autres pour savoir que faire. Nous attendons que les autres nous témoignent de
l’affection en premier. Nous perdons tellement de temps à nous demander ce que les autres
ont pu penser de notre tenue vestimentaire ou du commentaire que nous avons émis à la
réunion de groupe. Nous voyons des occasions de témoigner de l’amour de Christ, mais nous
les évitons. Nous avons plus peur d’avoir l’air stupide (la crainte des hommes) que nous avons
peur de pécher (la crainte de Dieu).
Jésus est très différent de ces pharisiens. Il ne fait pas de favoritisme; au contraire, il tend la
main aux femmes et aux hommes, aux riches et aux pauvres, aux personnes de toutes races et
de tous âges. Il ne fait pas de sondage avant d’enseigner pour connaître le sujet qui est à la
mode; il enseigne la vérité en demeurant souvent impopulaire, mais susceptible de pénétrer les
cœurs. « Je ne cherche pas la gloire qui vient des hommes », dit-il. Même ses adversaires
savent que cela est vrai.
Ils envoyèrent auprès de lui leurs disciples avec les hérodiens, qui dirent: Maître, nous savons que
tu es vrai, et que tu enseignes la voie de Dieu selon la vérité, sans t’inquiéter de personne, car tu
ne regardes pas à l’apparence des hommes (Mt 22.16).

p 48 Ces remarques sont, bien entendu, de la flatterie destinée à piéger Jésus, mais elles
sont tout de même exactes. Jésus enseigne avec autorité, et c’est l’une des caractéristiques qui
distinguent son ministère de ceux de tous les autres dirigeants juifs.
C’est également une particularité du ministère de Paul. Il exhorte ses Églises à être ses
imitateurs comme il est lui-même un imitateur de Christ (1 Co 4.16; 1 Th 1.6). En cela, il
encourage ses disciples à imiter sa vie et sa doctrine, une imitation qui exige certainement la
recherche de la gloire qui vient de Dieu, non pas celle qui vient des hommes (1 Th 2.4). Paul ne
cherche pas à plaire aux hommes. Il aime les hommes, c’est pourquoi il ne changera pas son
message pour l’adapter à ce que peuvent penser les autres. Seules les personnes qui aiment les
autres n’ont pas peur de la confrontation. Seules les personnes qui aiment les autres ne se
laissent pas contrôler par eux. Paul a même dit aux Galates que s’il cherchait encore à plaire
aux hommes, il ne serait pas un serviteur de Dieu (Ga 1.10). Voilà à quel point il prend au
sérieux la crainte des hommes.
Ce n’est pas que cela lui vienne naturellement. Paul a les mêmes instincts charnels que
nous, et il le sait. En conséquence, il supplie les Églises de prier pour lui.
Priez pour moi, afin qu’il me soit donné, quand j’ouvre la bouche, de faire connaître hardiment et
librement le mystère de l’Évangile *…+ et que j’en parle avec assurance comme je dois en parler
(Ép 6.19,20).

[CH3.2] Pierre pris au piège


Et maintenant, passons à un autre exemple de la crainte des autres.
Pierre est connu pour son tempérament impétueux. De tous les disciples, il semble être le
plus audacieux. Nous ne nous p 49 attendrions certainement pas à ce que celui-ci soit en proie
à la crainte des hommes. Toutefois, ce mal se retrouve dans le cœur des audacieux et des
timides.
Comment peut-il nier le Seigneur ? Il a vu les miracles. Le Saint- Esprit lui a révélé que Jésus
était le Christ. Il était un roc. Il a été témoin de la transfiguration ! Il aime Jésus. Comment le
renier ? Pierre est tellement semblable à nous: pécheur, spirituellement incompétent sans
l’assistance constante du Saint-Esprit. Il est, lui aussi, capable d’accorder aux gens de
l’importance au point où ils deviennent plus grands que Jésus lui-même.
Par une nuit froide, Pierre se tient à l’extérieur de la maison du grand sacrificateur tandis
que Jésus subit un interrogatoire à l’intérieur. Il se tient près d’un feu avec un groupe d’officiers
et de serviteurs. Lorsque quelqu’un lui dit qu’il a été vu avec Jésus, il répond: « Je ne sais ce que
tu veux dire. »
Pour que Pierre nie ainsi le fait de connaître Jésus, on présume seulement que celui qui
l’affronte est un centenier, un pharisien ou quelqu’un doté du pouvoir de le faire exécuter sur-
le-champ. Sa vie est sûrement en danger. Mais il n’en est rien. La personne qui lui parle est une
femme. Il ne s’agit pas d’une femme très influente, mais d’une simple servante. Certes, c’est
une servante du souverain sacrificateur, mais ce dernier est occupé à interroger Jésus. Il n’a pas
vraiment le temps de s’occuper de Pierre. Un autre disciple, probablement Jean, est même
dans la maison pendant que l’on interroge Jésus. Si l’on voulait absolument pendre un disciple,
celui qui est à l’intérieur serait tout indiqué.
Penser que la vie de Pierre était en péril nous arrangerait presque, mais ce ne serait pas la
vérité. Il lui a fallu très peu de provocation pour renier le Christ.
Lorsqu’une seconde question lui est adressée, peut-être par la même servante, il rétorque
la même chose. Il n’y a aucune p 50 timidité en lui lorsqu’il répond à la question de la femme. Il
nie catégoriquement en prêtant serment. Pierre connaît sûrement le sérieux d’un serment. Il
sait ce que Jésus a enseigné dans son sermon sur la montagne: « Que votre oui soit oui, et que
votre non soit non. » Pourtant, le péché lui masque la valeur de la vérité. La peur des hommes
fait toujours partie d’une triade comprenant aussi l’incrédulité et la désobéissance.
Son troisième reniement est plus grave encore. « Il se [met] à faire des imprécations et à
jurer: Je ne connais pas cet homme » (Mt 26.74). En d’autres mots: « Que le Dieu tout-puissant
me maudisse, ainsi que ma famille, si je ne dis pas la vérité. » La crainte des hommes est
vraiment un piège dangereux.
Il n’aurait pas pu choisir un pire moment, car c’est alors que Jésus peut le voir,
probablement parce qu’on l’amène de la maison du souverain sacrificateur au sanhédrin. Jésus
« regarda Pierre. »
Pour Pierre, c’est comme s’il était le premier Adam. Il sent le regard du Dieu saint se poser
sur lui et à cet instant, il ne s’est jamais senti aussi nu. Nul endroit où se cacher. Quant à Jésus,
nous ne pouvons que deviner ce qu’il est en train de penser.
Nous savons toutefois que lorsque Jésus apparaît à ses disciples, il est très heureux de
pardonner à Pierre. « Allez dire à ses disciples et à Pierre », annonce l’ange après la
résurrection. Puis, peut-être par une autre nuit froide autour d’un feu, Jésus fait écho aux trois
reniements de Pierre en l’invitant par trois fois à paître son troupeau. Il finit en lui disant: «
Suis-moi » (Jn 21.15–19).
Après avoir expérimenté la malédiction de la crainte des hommes, senti le regard du Dieu
saint et connu un pardon riche en amour, assurément Pierre a appris sa leçon. Ou du moins,
c’est ce qu’il croit, j’en suis sûr. En dépit de sa foi solide et du don de l’Esprit, cet homme
remarquable recevra une autre leçon d’humilité à cause de sa peur des autres. Cette fois-ci,
l’occasion p 51 de satisfaire aux exigences des autres se présente lors d’un

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