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COURS DE GEOCHIMIE

Introduction :

La géochimie applique les outils et concepts de la chimie à l'étude de la Terre et des


sédiments. Dans une certaine mesure, des échantillons sont accessibles à l'investigation
chimique. En ce qui concerne la Terre, cette discipline a pour objectif la connaissance des
cycles par lesquels la plupart des éléments chimiques sont conduits alternativement en surface
et en profondeur au sein de la Terre. Liée à la cosmochimie, elle s'intéresse aux processus de
formation planétaires et interplanétaires, notamment par l'étude des météorites. S'agissant du
sédiment, la géochimie étudie les phénomènes chimiques qui se déroulent de l'interface eau-
sédiment à la profondeur du sédiment lui-même.

I. Chapitre I : Généralités
1. Définitions :

La géochimie s'occupe de l'étude de la répartition des éléments chimiques (et de leurs


isotopes), et des lois de leur comportement chimique dans les constituants de la Terre et du
Système solaire. Elle comporte l'étude des roches et des sédiments qui constituent la Terre
solide, les météorites et matériaux extra-terrestres (roches lunaires ....), ainsi que les fluides
des océans, des mers, des eaux souterraines et de l'atmosphère. La géochimie s'occupe donc
de l'étude du mouvement ou flux des éléments chimiques à travers les solides et fluides de la
Terre. En tant que Science, cette branche de la géologie comporte aussi bien un aspect
fondamental qu'appliqué. Certains géochimistes étudient les matériaux terrestres pour
comprendre le fonctionnement du système Terre et les principes qui régissent ce système. La
géochimie a ainsi contribué d'une manière remarquable à la compréhension de divers
processus tels que la convection mantellique, la formation des planètes ou l'origine des roches
magmatiques telles que les granites et basaltes.
D'autres géochimistes utilisent les principes et méthodes de la géochimie à des fins appliqués,
par exemple pour la recherche des substances minérales et énergétiques, ou pour la
décontamination des sols et des eaux pollués.

2. Historique :

La géochimie est une discipline relativement jeune. Le terme "géochimie" a été utilisé pour la
première fois par le chimiste suisse Christian Friedrich Schönbein (1799-1868) en 1838
(Schönbein est connu pour avoir découvert l'ozone). Schönbein avait notamment souligné que
l'étude des propriétés chimiques de la Terre était aussi importante que l’étude de l'âge des
strates et des fossiles qu'elles contiennent. La naissance de la géochimie moderne est
probablement due à la publication en 1908 du monumental ouvrage du minéralogiste et
chimiste américain Frank Wigglesworth Clarke (1847-1931) "les données de la géochimie".
L'école russe a ensuite eu une contribution majeure en géochimie, avec les travaux de
Vladimir Ivanovich Vernadsky (1863-1945) et Aleksandr Evgenievich Fresman (1883-1945).
Vernandsky publia en 1924 l'ouvrage "geochemistry" (en russe) et "biosphère" (en russe) en
1926. C'est le premier qui définit la notion de biosphère. Fresman publia 4 volumes
"geochemistry" entre 1934 et 1939. Mais ces travaux rédigés en russe n'ont eu qu'un faible
impact au niveau international. Celui qui est considéré comme le fondateur de la géochimie
moderne (avec Vernandsky) est le chimiste suisse Victor Moritz Goldschmidt (1888-1947). Il
établit une classification géochimique des éléments, et développa les bases théoriques
expliquant les affinités des éléments chimiques avec les différentes unités de la Terre. Il
établit les lois régissant la distribution des éléments chimiques dans les minéraux et les roches
et étudia la géochimie des terres rares. Il montra l'importance des rayons et charges ioniques,
ainsi que des liaisons chimiques dans la formation des minéraux. De 1923 à 1938, il publia
une série d'ouvrages en 8 volumes intitulée "Lois géochimiques de la distribution des
éléments". En 1933, il donna la définition suivante de la géochimie : " La tâche principale de
la géochimie est d'étudier la composition de la Terre dans son ensemble et de ses différentes
composantes et de découvrir les lois qui régissent la répartition des différents éléments. Pour
résoudre ces problèmes, le géochimiste a besoin de données analytiques des différents
matériaux terrestres, c'est à dire des roches, des eaux et de l'atmosphère. En outre, il utilise et
étudie les analyses de météorites, les données astrophysiques sur la composition des autres
corps célestes et les données géophysiques sur la nature de l'intérieur de la Terre. Beaucoup
d'informations utiles sont également obtenus de la synthèse de minéraux en laboratoire et de
l'observation de leur mode de formation et les domaines de leur stabilité".

3. Les différentes branches de la géochimie :


Les principales branches de la géochimie sont les suivantes :
- La géochimie isotopique : discipline fondée sur la mesure et l'interprétation des
compositions isotopiques des éléments chimiques constituant les divers milieux
naturels.
- Cosmochimie : Etude de la répartition, de l'origine et de l'histoire des éléments dans
l'Univers, et dans le Système solaire en particulier.
- Biogéochimie : Etude du rôle des systèmes biologiques sur les conditions physico-
chimiques régnant à la surface de notre planète.
- Géochimie organique : a pour but de reconstituer les caractères de la matière
biologique fossile et son origine, à déterminer les processus de diagenèse de celle-ci.
Elle est en grande partie axée sur la genèse des hydrocarbures.
- Géochimie des eaux : elle traite de l'abondance absolue et relative des éléments et des
isotopes dans l'eau, ainsi que de l'évolution de leur concentration en fonction des
conditions physico-chimiques rencontrées par l'eau pendant son cycle ou son
emmagasinement.
- Géochimie environnementale : utilise les données de la géochimie pour l'étude de
l'environnement.
- Géochimie appliquée (ou prospection géochimique) : utilise les données de la
géochimie fondamentale pour découvrir, recenser et estimer les ressources minérales.
- Géochimie marine : Etude des principes qui régissent la répartition des éléments,
isotopes et composants et les lois de leur comportement chimique dans le milieu
marin.

4. Les éléments chimiques : Le tableau périodique des éléments


4.1. Les atomes :
Un atome représente la subdivision la plus petite de la matière qui conserve les
caractéristiques de l'élément chimique. Un atome est composé de trois différentes particules :
- Protons – de charge positive, résident au centre de l’atome au sein du noyau.
- Electrons – de charge négative, « gravitent » autour du noyau.
- Neutrons – de charge nulle, résident dans le noyau.
Les isotopes sont des atomes d'un même élément mais qui possèdent un nombre différent de
neutrons. Certains isotopes sont instables et donc radioactifs.

Figure 1 : Structure d’un atome.

4.2. Les ions :

Les atomes possèdent le même nombre de protons et d'électrons. Cependant, les éléments
dans le tableau périodique peuvent être divisés en deux groupes: ceux qui ont tendance à
perdre des électrons et ceux qui sont capables de gagner des électrons. On appelle ion, un
atome qui possède soit une charge positive soit une charge négative.
Les éléments qui ont tendance à perdre des électrons sont appelés métaux, tandis que ceux
qui ont tendance à gagner des électrons sont dits non-métaux.
Les métaux ont donc tendance à former des ions positifs appelés cations, tandis que les non-
métaux ont tendance à former des ions négatifs appelés anions.

4.3. Potentiels d'ionisation :


Lorsqu’un électron est enlevé ou ajouté à un atome, il y’a un transfert d’énergie. Le potentiel
d’ionisation d’un élément est l’énergie qu’il faut fournir à un atome neutre d’un élément pour
lui arracher un électron. La version du tableau périodique montré ci-dessous donne la valeur
du potentiel de première ionisation. Notez que les éléments qui possèdent un potentiel
d’ionisation élevé ont tendance à ne pas céder d’électrons, alors que ceux qui possèdent un
faible potentiel d’ionisation, cèdent plus facilement des électrons, et ont tendance à devenir
des cations.

 Les gaz rares présentent le potentiel d’ionisation le plus élevé, ce qui traduit la stabilité
de ces éléments. L’observation du tableau périodique montre les couches saturées,
indiquant que les gaz rares ont tous en commun des orbitales p complètement saturées.
Le fait que ces sous-couches soient entièrement pleines explique que ces éléments ne
sont presque jamais à l’état d’ions et ne se combinent que rarement avec les autres
éléments chimiques.
 Les éléments du groupe IA (les alcalins), ont par contre un très faible potentiel
d’ionisation, et il est donc facile de leur arracher un électron. Etant donné que tous ces
éléments ont en commun une couche externe contenant un électron dans l’orbitale s,
ces éléments ont tendance à devenir des ions +1 (i.e. Li+1, Na+1, K+1, Rb+1, Cs+1,
etc.). Notons que la perte de cet électron confère à ces atomes une configuration
électronique des gaz rares (les couches électroniques externes sont complètement
remplies). Le second potentiel d’ionisation (l’énergie requise pour arracher un second
électron) est aussi très élevé pour ces éléments, ce qui indique aussi que dès qu’ils
deviennent des ions +1 ils auront une configuration électronique stable.

Figure 2 : Potentiel de première ionisation des éléments chimiques (en E.V).


5. Origine des éléments chimiques :

5.1. La nucléosynthèse :

On appelle nucléosynthèse l'ensemble des processus qui conduisent à la formation (ou


synthèse) des éléments chimiques (noyaux atomiques plus précisément) dans l'UniversLa
nucléosynthèse est un phénomène fondamental qui explique la répartition et l'abondance des
éléments chimiques dans l'Univers.

5.2. Les réactions nucléaires à l'origine de la nucléosynthèse :

 Fusion de noyaux :

La fusion de deux noyaux pères donnera un noyau fils. La masse totale des deux noyaux pères
est supérieure à la masse du noyau fils formé. L'excès de masse est libéré sous forme
d'énergie selon la loi d'Einstein : E = Δm.c2.
Δm = différence de masse
c = vitesse de la lumière dans le vide.
Les réactions de fusion sont donc exothermiques (elles libèrent de l'énergie).

 Capture de neutrons :

La capture neutronique est une réaction nucléaire dans laquelle un noyau atomique absorbe un
ou plusieurs neutrons ce qui conduit à la formation d'un noyau plus lourd. Etant donné que les
neutrons ne possèdent pas de charge électrique, ils peuvent plus facilement entrer dans un
noyau que les protons chargés positivement et qui subissent de ce fait la répulsion
électrostatique. La fusion des neutrons dans un noyau atomique émet un rayonnement gamma
et libère donc de l'énergie. Ces réactions sont exothermiques.
Etant donné que la durée de vie moyenne d'un neutron à l'extérieur d'un noyau atomique est
de 15 minutes, les réactions de capture neutronique ne peuvent se produire que dans des sites
de production de neutrons. Ces sites correspondent à des milieux denses et très chauds.

 Photodésintégration :

La photodésintégration est une réaction nucléaire dans laquelle des photons de très haute
énergie (cette énergie est acquise à très haute température) interagissent avec des noyaux
atomiques lourds en les brisant en noyaux plus légers. La photodésintégration absorbe
l'énergie des photons : elle est donc endothermique. Les températures requises pour le
déclenchement de ces réactions sont de l'ordre de 3 à 4 milliards de kelvins.
 Spallation :

La spallation (de l'anglais to spall, produire des éclats) est une réaction nucléaire au cours de
laquelle des particules de très grande énergie entrent en collision avec des noyaux lourds en
les brisant en noyaux plus légers.

5.3. Les différents types de nucléosynthèses dans l'Univers :

 La nucléosynthèse primordiale :

La théorie la plus largement acceptée concernant l’origine de l’Univers est la théorie du Big
Bang. Selon cette théorie, l’Univers est né d'une gigantesque explosion, le Big Bang, il y a
13,7 milliards d'années. Il est entré en expansion et a évolué (s'est refroidi et dilué) à partir
d’un état extrêmement chaud et dense.
Trois minutes après le Big Bang, quand la température de l’Univers aura baissé à 109 K, le
rayonnement de l'Univers n’aura plus assez d’énergie pour casser les noyaux atomiques.
Alors, protons et neutrons pourront se lier pour former les premiers noyaux légers de
l’Univers. C'est la nucléosynthèse primordiale. Les noyaux formés durant cette période sont
ceux du deutérium (isotope de l’hydrogène contenant 1 proton et 1 neutron), le tritium
(isotope de l’hydrogène contenant 1 proton et 2 neutrons), l’hélium 3 (isotope de l’hélium
contenant 2 proton et 1 neutron), l’hélium 4 (2 protons et 2 neutrons) et enfin le lithium 7 (3
protons et 4 neutrons). La réaction qui se produit le plus est celle de la transformation d’un
noyau d’hydrogène (1 proton) en noyau d’hélium 4.

Etant donné qu’au début de ce processus, l’Univers était composé de 2 neutrons pour 14
protons, avec la transformation du proton en noyau d’hélium, on aura 1 noyau d’hélium (2
neutrons + 2 protons) formé pour 12 protons. Etant donné que le nombre de masse de
l’hélium est de 4 alors que celui du proton est de 1, la proportion de l’hélium formé durant la
nucléosynthèse primordiale sera de 4/16, soit 25 %. Celle de l’hydrogène sera de 75 %. La
proportion actuelle de l’hélium dans l’Univers (25 %) ne peut s’expliquer que dans le cadre de
la nucléosynthèse primordiale. Aucun processus dans l’Univers ne peut former la quantité
actuelle d’hélium.

Figure 3 : Réactions lors de la nucléosynthèse primordiale.


La nucléosynthèse primordiale va durer 15’ car la température de l’Univers aura baissé et ne
sera plus suffisante pour permettre aux réactions de fusion de se produire. L’Univers sera
alors composé de 75 % d’hydrogène, 25 % d’hélium et des traces (0,01 %) d’autres éléments
légers formés durant cette étape (deutérium, tritium, hélium 3, lithium 7). C’est la
composition actuelle de l’Univers qui a donc été acquise durant cette courte étape qui a duré
entre 3’ et 15’ après le Big-Bang.

 La nucléosynthèse stellaire :

Les étoiles sont des boules de gaz composées essentiellement d’hydrogène et d’hélium au
coeur de lesquelles se produisent des réactions nucléaires qui en font une source de lumière et
de chaleur. Elles naissent de la contraction d’un nuage de gaz et de poussières (les nébuleuses
gazeuses). Lorsque la température au centre de la protoétoile devient suffisante (supérieure à
10 millions de degrés) les réactions thermonucléaires se déclenchent : quatre noyaux
d’hydrogène se combinent pour donner un noyau d’hélium. Cette réaction s’accompagne d’un
dégagement important d’énergie (dû à une perte de masse qui est transformée en énergie selon
la loi d’Einstein E = m.c2) qui fournit à l’étoile son rayonnement. Pendant la majeure partie
de leur vie, les étoiles tirent leur énergie de cette réaction de fusion. On dit que l’étoile est
dans la séquence principale, et connaît alors une longue période de stabilité qui peut durer de
quelques millions à plus de 10 milliards d’années.
Lorsqu’une une étoile de type solaire gagne la séquence principale les réactions
thermonucléaires qui se produisent au cœur de l’étoile sont appelées chaînes proton-proton,
ou chaîne p-p, et comprennent trois réactions principales : la fusion de deux noyaux
d’hydrogène (1 proton) produit un noyau de deutérium (1 proton et 1 neutron) : dans cette
réaction, un proton se transforme en neutron avec libération d’un électron. Le deutérium
synthétisé capture un autre proton et forme un noyau d’hélium 3 (2 protons et un neutron) ;
enfin, deux noyaux d’hélium 3 fusionnent en noyau d’hélium 4 (deux protons et deux
neutrons) ce qui libère en même temps deux protons.

 La nucléosynthèse interstellaire (réactions de spallation) :

Dans le milieu interstellaire, des particules de grande énergie (protons, noyaux d'hélium 4) qui
forment le rayonnement cosmique peuvent entrer en collision avec des noyaux de carbone,
d'oxygène et d'azote. Ces collisions engendrent des réactions de spallation qui conduisent à la
formation des éléments légers lithium, béryllium et bore. Ces éléments sont fragiles et sont
détruits à l'intérieur des étoiles à des températures de 1 million de kelvins. Les réactions de
spallation dans le milieu interstellaire sont les principales productrices de ces éléments dans
l'Univers.
6. Classification des éléments chimiques :

Les géochimistes ont leur propre classification des éléments chimiques du tableau
périodiques. Les différentes classifications sont résumées ci-dessous.

6.1. Classification basée sur l'abondance des éléments dans les minéraux et roches :

Selon l'abondance des éléments chimiques dans les minéraux et roches, on distingue :
 Les éléments majeurs :

Les principaux éléments chimiques qui constituent les roches et minéraux. Ces éléments sont
exprimés en oxydes. Il s'agit de : SiO2, TiO2, Al2O3, FeO, MgO, MnO, CaO, Na2O, K2O et
P2O5. La teneur de ces oxydes dans les minéraux et roches est supérieure à 1 %.

 Les éléments mineurs :

Les éléments dont la teneur dans les roches est située entre 0,1 et 1 %.

Il s'agit principalement de TiO2, MnO, K2O et P2O5. Ces éléments peuvent être majeurs dans
certains types de roches, et mineurs dans d'autres. Exemple : K2O est majeur dans les granites
et mineurs et même traces dans les basaltes.

 Les éléments en traces : éléments dont la teneur est inférieure à 0,1 %. Ils sont
exprimés en ppm (partie par million).

6.2.Classification des éléments en traces selon leur position dans le tableau


périodique :

Cette classification est importante en géochimie, car les éléments qui présentent des
similarités dans leurs caractéristiques chimiques présentent des similarités dans leur
comportement géochimique.
On distingue :
 Les gaz rares : Ne, Ar, Kr et Xe.
 Les lanthanides ou Terres rares (REE, rare earth elements) : les éléments du
numéro atomique 57 au numéro 71. La, Ce, Pr, Nd, (Pm), Sm, Eu, Gd, Tb, Dy, Ho, Er,
Tm, Yb, Lu.
 Eléments du groupe du platine (PGE) : Ru, Rh, Pd, Os, Ir, et Pt (parfois Au).
 Les métaux de transition : de la première série, éléments 21 à 30 (du Sc à Zn).

6.3. Classification géochimique des éléments en traces selon leur comportement lors
de la fusion partielle :
Durant la fusion partielle, certains éléments en traces auront tendance à se concentrer dans la
phase liquide et d'autres dans la phase solide.
Les éléments qui ont une préférence pour la phase liquide lors de la fusion partielle sont dits :
éléments incompatibles.
Ceux qui ont une préférence pour la phase solide sont dits : éléments compatibles.
Les degrés d'incompatibilité d'un élément dans une phase minérale est exprimé par le
coefficient de partition ou de partage minéral- liquide Kd.

Cs : concentration de l'élément dans la phase solide.


Cl : concentration de l'élément dans la phase liquide.

Les éléments dont Kd > 1 sont compatibles. Ils sont facilement incorporés dans le solide.
Exemple : le nickel est incorporé dans les minéraux ferro-magnésiens comme l'olivine. On dit
qu'il est compatible avec la structure de l'olivine.
Les éléments dont Kd < 1 sont incompatibles.
Les éléments dont Kd << 1 sont fortement incompatibles. On dit qu'ils sont
hygromagmaphiles.
Ils ne sont pas acceptés dans la structure des cristaux (à cause de leur taille et charge). Ils se
concentrent dans la phase liquide magmatique.

6.4.Classification géochimique des éléments en traces selon leur charge ionique et


leur rayon ionique :
Durant les processus géochimiques, les éléments ayant un faible rayon ionique et une forte
charge ont un comportement différent des éléments à fort rayon ionique et faible charge.
Les éléments à forte charge et à faible rayon ionique sont appelés : HFSE (High Field
Strenght Elements) : Ti, Hf, Nb et Zr. Ces éléments sont immobiles durant l'altération des
roches. Ils sont incompatibles. 3
Les éléments à fort rayon ionique et à faible charge sont appelés : LILE (Large Ion Lithophile
Elements). Ces éléments sont très mobiles lors de l'altération des roches. Ils sont
incompatibles (ils se concentrent préférentiellement dans le liquide lors de la fusion partielle).
Figure 4 : Classification chimique des éléments en fonction de la charge et du rayon ionique.

6.5. Classification géochimique basée sur l'électronégativité des éléments :

C'est la classification de Goldschmidt. Elle est basée sur le partitionnement des éléments dans
les météorites. On distingue :
 Les éléments chalcophiles : qui ont une affinité avec le soufre. Il s'agit de : As, Cu, Zn,
Cd,
 Les éléments sidérophiles : qui ont une affinité avec le fer métallique. Il s'agit de Ni, Cr,
 Les éléments lithophiles : qui ont une affinité avec les silicates. Il s'agit des éléments
alcalins, alcalino-terreux (Na, K, Ca ...).
 Les éléments atmophiles : c'est les éléments gazeux non combinés (H, N, gaz rares, C).

Les éléments sidérophiles sont concentrés dans le noyau terrestre alors que les éléments
atmophiles se trouvent principalement dans l'atmosphère terrestre
Notons que certains éléments peuvent appartenir à deux, voire trois classes, selon leur charge
Exemple : le fer peut être lithophile, chalcophile et sidérophile.

Figure 5 : Classification géochimique basée sur l'électronégativité des éléments.


6.6. Classification géochimique basée sur la température de condensation des
éléments :
La condensation est le passage de l'état gazeux à l'état solide. Cette classification est basée sur
la condensation des éléments lors de la formation du Système solaire. On distingue :
 Les éléments réfractaires : dont la température de condensation est élevée (1850 -
1400 K). Il s'agit de Ca, Al, U, Th, les terres rares...
 Les éléments volatiles dont la température de condensation est inférieure à 640 K. Il
s'agit des éléments alcalins, du Pb... Les éléments chalcophiles et atmophiles sont très
volatiles.

II. Chapitre II : Éléments de planétologie

1. Formation du Système solaire :


1.2. La nébuleuse solaire :

Il y’a 4,56 milliards d’années, un nuage de gaz et de poussières appelé « nébuleuse solaire » et
animé d’une faible vitesse de rotation s’est contracté sous l’effet de sa propre gravité. Cette
contraction a été probablement déclenchée par l’explosion d’une ou plusieurs étoiles voisines
(supernovae). A un certain stade de la contraction, la nébuleuse prend la forme d’un disque
aplati épais perpendiculaire à l’axe de rotation de l’ensemble. Dans la zone centrale se forme
un noyau qui concentre l’essentiel de la masse du système. La température et la pression de
cette région centrale augmentent au fur et à mesure de la contraction jusqu’à ce que la
température dépasse 10 millions de degrés et permettent aux réactions de fusion nucléaire de
démarrer marquant ainsi la naissance du Soleil.

Les planètes se sont formées à partir du disque protoplanétaire de gaz et de poussière (98 %
d’hydrogène et d’hélium et 2 % d’éléments lourds) en rotation autour du jeune Soleil. Dans ce
disque la température et la densité décroissent à mesure que l’on s’éloigne du Soleil. Les
éléments chimiques se condensent en fonction de la température : près du Soleil, les métaux et
les éléments réfractaires à base d’aluminium, de magnésium et de silicium qui résistent aux
hautes températures. Plus loin se condense les glaces (principalement de la glace d’eau H2O,
du mono- et dioxydes de carbone CO et CO2 et du méthane CH4).

1.2. Phases d’accrétion et de différenciation. Formation des planétésimaux :

En rotation autour du jeune Soleil, les grains de poussières se rencontrent et forment de plus
gros agrégats. Ces agrégats continuent de s’agglomérer jusqu’à former des corps rocheux
(près du Soleil) ou de glace (loin du Soleil) de taille kilométrique : c’est le processus
d’accrétion. On appelle ces objets de taille kilométrique les planétésimaux.
La rencontre entre planétisimaux permet de former des objets encore plus gros qui attirent
encore plus de matière à cause de l’augmentation de leur force de gravitation : c’est
l’emballement de l’accrétion. Ainsi, quand un gros objet se forme par le hasard des rencontres
et des collisions, il augmente son attraction par gravité et grandit encore plus en attirant de
plus en plus la matière environnante : c’est la naissance d’une proto-planète.
Le Système solaire est alors composé d’une multitude de proto-planétes d’une centaine de km
de diamètre qui tournent autour du jeune Soleil. Le phénomène d’accrétion qui a conduit à la
formation des planétésimaux et des proto-planètes dégage une grande quantité de chaleur qui
fait fondre la roche. Plus un corps est gros, plus l’énergie d’accrétion est importante. A cette
source d’énergie s’ajoute celle dégagée par la désintégration des éléments radioactifs. Ainsi
cette grande quantité de chaleur dégagée fait fondre les gros corps formés (dont le diamètre
est supérieur à une centaine de km) : lors de cette fusion, les matériaux les plus lourds
dominés par le fer vont se concentrer vers le centre de l’objet pour former un noyau
métallique, tandis que les plus légers vont rester en surface format une croûte riche en
aluminium, calcium, sodium et potassium (éléments légers). Entre les deux couches demeure
les éléments intermédiaires qui forment le manteau silicaté riche en fer et en magnésium. Ce
processus est appelé la différenciation.

1.3. Formation des planètes et satellites :

L’accrétion des proto-planètes et des planétésimaux a ensuite conduit à la formation des huit
planètes du Système solaire et d’une trentaine de corps dont le diamètre est supérieur à 500
km (satellites principaux des planètes et les gros objets de la ceinture de Kuiper). On estime à
100 millions d’années le temps qui s’est écoulé entre le début de l’accrétion et la formation
des planètes du Système solaire telles que nous les connaissons actuellement.

Le Système solaire actuel est composé de huit planètes : quatre telluriques, les plus proches
du Soleil, et au-delà d’une ceinture d’astéroïdes, quatre planètes géantes entourées de
satellites de glaces. Cette répartition est liée au fait que la température à proximité du Soleil
était très élevée, et que les gaz légers ont été soufflés par le Soleil au cours de la phase T-
Tauri. À faible distance (moins de 3 UA du Soleil), seules ont pu demeurer des planètes
composées de matériaux réfractaires. À plus grande distance du Soleil, la température restée
basse a permis l’accrétion des glaces qui avec les matériaux réfractaires ont formé les noyaux
des planètes géantes dont la masse est de plusieurs dizaines de masses terrestres. Ces noyaux
massifs ont pu accrété gravitationnellement les volatiles de la nébuleuse qui les entoure
(hydrogène et hélium) et ainsi de former les planètes géantes. La distribution de la taille des
planètes du Système solaire s’explique de la manière suivante : à faible distance du Soleil, la
matière disponible pour faire croître la planète en formation est moins abondante qu’à grande
distance, d’où formation de planètes de petite taille près du Soleil.
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Figure 6 : Différentes étapes de la formation du système solaire.

2. Composition chimique de la terre :


2.1.Principe des méthodes d’étude :

La composition chimique et minéralogique des matériaux à l’intérieur de la Terre est bien


connue pour les premiers 250 km de profondeur de la Terre grâce à l’étude directe :
 des péridotites qui sont des roches autrefois profondes, mais maintenant visibles à la
surface à la suite de leur soulèvement (par le mécanisme d’obduction) et de l’érosion
des terrains qui les cachaient;
 des basaltes et de ses enclaves de péridotites dont le magma est située dans le manteau
à différentes profondeurs.
Au-delà de 250 km la composition chimique et minéralogique est actuellement connue
indirectement par l’étude :
 des matériaux en comprimant par exemple les péridotites entre deux cellules de
diamant avec des pressions et des températures équivalentes à celles des différentes
zones du manteau.
 des vitesses de transmission des ondes sismiques dans différents matériaux en
comparant les résultats avec les vitesses obtenues lors d’un séisme.
L’étude des météorites différenciées ainsi que la sismologie expérimentale ont permis de
donner une idée sur la composition chimique du noyau.
2.2.Résultats :
 La croûte :
Les constituants principaux de la croûte sont la silice SiO 2 (50 à 60% en moyenne) et
d’Alumine (Al2 O3 ) (15 à 16% en moyenne). Pour cela on désigne la croûte sous le nom de
SIAL. Parmi les autres constituants qu’on a déterminés sous forme d’oxydes - lesquels sont en
beaucoup plus faible pourcentage; on peut citer principalement CaO, MgO, FeO. Ces trois
derniers sont plus abondants dans la croûte océanique et dans la partie inférieure de la croûte
continentale que dans la croûte continentale supérieure.
Parce que la proportion de silice y dépasse un certain pourcentage la croûte continentale
supérieure est dite "acide". Et elle constituée principalement de Quartz + Feldspaths +
Pyroxènes. Parce que la proportion de silice y est inférieure à un certain pourcentage de
croûte continentale inférieure et la croûte océanique dont dites "basiques". Quartz +
Pyroxènes + Oxydes. La partie superficielle de la croûte continentale supérieure (quelques
milliers de mètres) est constituée principalement de sédiments et de roches sédimentaires
métamorphisées à la base de cette partie mais l’essentiel est formé de roches magmatiques
granitiques, d’où parfois le nom de croûte "granitique" et de roches métamorphiques.
 Le manteau :
Le manteau a moins de silice (40% seulement de sa composition) que dans la croûte; il est
donc très "basique". Il contient une forte proportion de magnésium; d’où l’attribution du nom
SIMA au manteau. Sa partie supérieure est constituée de péridotites et sa partie inférieure a,
probablement, la même composition que le manteau supérieur mais les atomes sont assemblés
selon des structures plus denses (plus compactes) du fait de l’augmentation de la pression.
Du point de vue minéralogie :
- Le sommet du manteau supérieur est constitué d’Olivine + Pyroxènes + Oxydes
- La base du manteau supérieur est constituée de Spinelle (Olivine très dense) + Pyroxènes +
Oxydes
Le manteau inférieur est constitué de Pérovskite (Olivine très très dense) + Oxydes
 Le noyau :
Le noyau interne serait constitué d’élément sidérophiles : beaucoup de fer, nickel, cobalt, or,
platine, etc…;
Le noyau externe ("liquide") serait constitué d’une forte proportion de fer associé à des
éléments légers tels que l’oxygène, le soufre; et un peu de silice.
Figure 7 : Composition chimique de la terre.

3. Géochronologie : Age de la terre et ses constituants

La géochronologie (ou géologie historique) est une discipline basée sur la stratigraphie.
Elle s’applique en se basant sur deux types de datation : datation relative et absolue.
Pour ce cours, nous nous intéresserons uniquement à la datation absolue reposée sur les
techniques de la géochimie isotopique.
La chronologie absolue permet de mesurer des durées des phénomènes géologiques et des
objets géologiques (roche, minéral) grâce à des techniques qui s’appuient sur la
désintégration radioactive d’isotopes de certains éléments chimiques. La radioactivité
correspond à des changements naturels ou artificiels du nombre de protons et de neutrons de
noyaux dits instables.
On appelle isotopes, les atomes d'un élément qui contiennent des nombres différents de
neutrons. On identifie un isotope par son nombre de masse, qui représente la somme des
neutrons plus protons.

3.1. Principe de datation radiométrique :

La loi de la désintégration est la même pour chaque élément radioactif même si le taux de
désintégration varie d'un élément à un autre.
Un élément P radioactif se désintègre progressivement en élément F. Cette désintégration est
beaucoup plus abondante qu'il s'est écoulé plus de temps.
La désintégration de l'élément P suit une loi exponentielle exprimée par une équation qui
décrit le changement (dP) du nombre d'atomes pères (P) par intervalle de temps (dt):
dP/dt = -λ.P0 où : P0 est le nombre initial d'atomes pères et P le nombre d'atome à l'instant
-1
t et λ est la constante de désintégration de l'élément radioactif et elle s'exprime en an .
- λt λt
Cette équation s'intègre en fonction du temps : P = P 0 e ou bien P0 = P e .

Comme P0 = P + F, l'intégration de cette équation donne t = 1/λ.log n (1 + (F/P)) (I)


Chaque élément radioactif, est également,caractérisé par sa période ou demi-vie T au bout de
laquelle la moitié de l'élément père P s'est désintégré. P0/2 = P 0 e -λt -------> λ = log n 2/T.
En général, nous ne connaissons pas la valeur de P0 , mais nous pouvons mesurer le nombre
d'atomes pères P et celui de fils F dans un échantillon. On détermine alors le rapport F/P; ce
qui suppose que l'élément F n'est pas lui-même radioactif.
Dans la pratique on utilise la formule t= 1/λ.logn (1 + (F/P))
Dans beaucoup de cas il faut tenir compte du fait que des isotopes F peuvent exister au départ
(F0) dans la roche indépendamment de la radioactivité de P. On a alors : F = F0 + F*
F* est le produit de désintégration de P, on a : F* = P0 - P
λt
Comme P = P0 e - .. ou bien P0 = P e λt..
λt λt
On aura : F* = P (e ..-1) et donc F mesuré = F0 initial + P mesuré (e -1) (II)

3.2. Méthodes de datation des périodes anciennes :

 La méthode Rb (rubidium) / Sr (strontium) :

Lors de la formation d'une roche magmatique, du rubidium et du strontium sont intégrés dans
les réseaux cristallins de certains minéraux (micas, feldspaths). Chacun de ces éléments se
présente sous plusieurs formes isotopiques : 85 Rb et 87 Rb d'une part, 88 Sr, 87 Sr, 86 Sr et 84 Sr
d'autre part. L'isotope 87Rb, radioactif, se désintègre en donnant 87Sr : (T = 48,8 milliards
d'années et λ = 1,42.10-11 an-1 ).

 La méthode K (potassium) / Ar (argon) :

Le 40 K se désintègre en 40 Ar: (T = 1,31 milliards d'années et λ = 5,81.10-11 an-1 ).


Dans cette méthode, c'est la quantité 40 Ar (F) formé au cours du temps que l'on va mesurer,
car avant la fermeture du système l'argon formé par désintégration de 40 K est éliminé dans le
milieu (dégazage du magma au cours de sa progression vers la surface, par exemple). Lorsque
la température est devenue assez basse pour que la cristallisation soit achevée, le système se
ferme et le chronomètre isotopique est remis à zéro. L'âge de la roche est donc l'âge de la fin
de son refroidissement. Cet âge est donné par la formule de l'équation I:

t= 1/λ.logn (1 + (F/P)). >>>>>>>>>>t= 1/λ.logn (1 + (40Ar /40K ))


3.3. Une méthode de datation des périodes récentes :

 La méthode au 14 C :
C'est une méthode adaptée aux temps récents, car la période du 14C est courte.
Le 14C se désintègre en 14N: (T = 5.730 années et λ = 1,245.10-4 an-1).
Le carbone existe dans la nature sous forme de 3 isotopes : 12C, 13C et un isotope radioactif
le 14C, rare et formé dans la haute atmosphère. Rapidement intégré au CO2 ambiant, ce
dernier est mélangé au CO2 non radioactif de l'atmosphère et les plantes l'incorporent lors de
la photosynthèse.
On le retrouve dans les chaînes alimentaires : tout être vivant contient donc dans ses tissus
une proportion de 14C qui reste constante au cours de sa vie, car le carbone est renouvelé en
permanence.
La production de 14C étant supposée régulière, on considère que le rapport 14C / 12C est
constant chez tous les êtres vivants qui échangent du CO2 avec l'atmosphère.
A la mort d'un organisme ou lors de la précipitation d'un carbonate isolé de l'atmosphère, le
carbone n'est plus renouvelé et le 14C se désintègre. Le système se ferme et l'élément-fils 14N
s'échappe et ne sera pas pris en compte dans la mesure. Le dosage du 14C résiduel dans un
échantillon permettra d'estimer son âge. Mais sa teneur très faible nécessite d'utiliser un
spectromètre de masse (couplé à un accélérateur de particule), pour mesurer 14C / 12C.

On admet que la valeur de ce rapport au moment de la fermeture du système était la même


que dans un organisme vivant actuel. 14 C C étant stable, le rapport 14 C initial / 12 Cinitial connu
et 14 C actuel / 12 C actuel mesuré donne la valeur du rapport 14 C initial / 14 C actuel.
L'âge de l'échantillon est donné par la formule :
t = logn (14C initial / 14C actuel.) x T / logn2
Figure 8 : Principe de la désintégration radioactive.
III. Chapitre III : Géodynamique chimique et cycle géochimique
 Les réservoirs et cycle géochimiques :
Du point de vue géochimique, les principaux réservoirs de la lithosphère sont (figure 9):
 Les roches ignées ou endogènes (basalte, granite, gabbro, …) : issues des processus
magmatiques : la fusion partielle et la cristallisation fractionnée.
 Les roches sédimentaires (pélite, calcaire, grès, …): se forment suite à l’accumulation
de particules détritiques et biologiques ou par précipitation chimique majoritairement
au fond des océans mais également à la surface des continents.
 les roches métamorphiques (schiste, marbre, gneiss, …): résultent de la transformation
des deux types de roches précédentes. Il s’agit d'une « recuisson » à haute température,
sous pression et en présence de fluides aqueux.
Trois (3) processus géologiques majeurs ont permis de constituer ces réservoirs terrestres
(dans l’ancien) et contrôlent leur évolution (actuelle):
i) Fusion des roches (magmatisme mantellique et métamorphis me) ;
ii) Cristallisation des magmas (magmatisme et métamorphisme) ;
iii) Erosion et sédimentation.
Sur la durée des temps géologiques, les conséquences sont:
- le manteau montre un enrichissement en éléments réfractaires (Mg et Cr), et un
appauvrissement en éléments fusibles (Na, K, Al, Ca, et Si) , le manteau est un réservoir à
caractère résiduel ;
- la croûte continentale montre un enrichissement en éléments fusibles ou volatils,
présents dans les feldspaths, le quartz et les minéraux micacés ; Les océans sont enrichis
en cations solubles (Na, K, Ca) et en anions solubles (Cl, SO4) ;
- Les roches sédimentaires détritiques concentrent les éléments insolubles et fusibles (Si,
Fe et Al) représentés par le quartz et les minéraux argileux.

Les lois du fractionnement géochimique conduisent à l’apparition des différents réservoirs


terrestres dans lesquels les éléments chimiques se répartissent différemment. Les éléments
chimiques ayant des comportements différents tendent lentement à se séparer l’un de l’autre
pour rejoindre un milieu géochimique stable.

Exemples: le plomb (Pb) reste dans la croûte terrestre (lithophile comme Si, Al, Fe, Mn, …) ;
le carbone (C) rejoint l’état gazeux (atmophile comme N, O, Cl, ...).
Figure 9 : Réservoirs du système terrestre et processus d’échange d’éléments entre eux.
IV. Chapitre IV : Prospection géochimique

1. Définition :
La géochimie appliquée ou prospection géochimique correspond à l’utilisation des données de
la géochimie fondamentale pour découvrir, recenser et estimer les ressources minérales.
Même si les éléments recherchés existent en faible quantité, ils peuvent quand même
indiquer la présence d’une concentration anomale à un endroit donné.
2. But :
La géochimie d’exploration consiste ainsi à étudier la distribution des éléments à la surface
de la lithosphère en analysant les matériaux accessibles à l’échantillonnage direct (roches,
sols, sédiments de ruisseau, végétaux, eaux) en vue de détecter des « anomalies » liées à la
proximité d’un corps minéralisé.

3. Types de prospection géochimique :

Selon la nature géochimique des éléments, la disponibilité du matériel pour


l’échantillonnage, les conditions climatiques et d’altération, Les caractéristiques de
dispersion dans un terrain, on distingue :

 Sols - Pédogéochimie
 Roches - Lithogéochimie
 Sédiments de ruisseau ou Stream sediment
 Eaux - Hydrogéochimie
 Végétation - Biogéochimie
 Air - Atmochimie

4. Principe :

Les gisements affleurant, faciles à découvrir, deviennent de plus en plus rares. En relation
avec les méthodes géologiques, les techniques de prospection géochimique et géophysique
sont nécessaires afin de découvrir des gisements en profondeur. La profondeur des cibles
augmente et leurs réponses géochimiques et géophysiques sont réduites considérablement.
Elles deviennent alors plus difficiles à détecter.

5. Notions d’environne ments géochimiques :


5.1.Environnement primaire :
Cet environnement englobe les zones en bas des niveaux de circulation des eaux
météoriques, jusqu’au niveau où ont lieu les processus profonds de différentiation
métamorphique et ignée. L’environnement primaire est caractérisé par une température et une
pression élevées, une faible fugacité d’oxygène libre et un mouvement limité de fluide.

C’est en tenant compte de ce processus de transportation et de redistribution que les


méthodes et techniques géochimiques peuvent être appliquées pour trouver la source primaire
des éléments altérés ou découvrir de nouveaux gisements résultant de cette redistribution.
Figure 9 : Cycle géochimique mettant en évidence les environnements primaires et
secondaires.

5.2. Facteurs de redistribution des éléments chimiques :


5.2.1. Série de Bowen et stabilité des roches ignées :
La plupart des roches ignées sont formées par le processus de différentiation. Nous avons
donc des minéraux précoces et des minéraux tardifs différenciés. Du point de vue chimique, la
différentiation commence par un magma parental de composition basaltique le plus souvent.
Au cours du refroidissement, les minéraux décantent et forment des roches cumulats. Le
liquide résiduel change alors de composition. Il a perdu des éléments incorporés dans les
premiers minéraux formés. Par ce processus, le magma passe à travers une série différenciée
comme : gabbro-diorite-granodiorite-granite-pegmatites et un changement parallèle dans
l’abondance des éléments majeurs (>1% poids) et mineurs (0.1-1.0% poids). La séquence de
différentiation peut être aussi discutée minéralogiquement en termes de séries réactionnelles
de Bowen.
 L’olivine qui représente la première phase minéralogique formée réagit avec le liquide
résiduel pour former du pyroxène. Si aucune fractionation ne prend place, le liquide
avec le pyroxène et le plagioclase calcique (série continue) cristallise et forme un
basalte ou un gabbro. Si on a une fractionation de l’olivine, la composition du liquide
change, les réactions vont continuer et le liquide va réagir avec le pyroxène pour
former la hornblende.
 Les premiers minéraux formés sont riches en Fe et Mg avec un rapport élevé
MgO/FeO. Ces minéraux sont pauvres en Si et contiennent peu de K2O.
Le liquide final va être riche en Si, H2O, Ru, Césium, et volatiles.

Figure 10 : Série de Bowen et stabilité des roches ignées.

5.2.2. Distributions des éléments traces (<0.1%) :


Comme la composition en éléments majeurs et mineurs change avec la différentiation
magmatique, celle des éléments traces (ex. métaux) aussi.

À l’exception du zircon qui peut être une source économique pour le hafnium (Terres Rares),
la plupart des minéraux, surtout silicatés, ne représentent pas un gisement potentiel pour les
éléments mineurs et traces. Un autre minéral, non silicaté, est l’apatite, minerai de phosphate
qui peut être aussi une source pour l’U et ± les Terres Rares. On a aussi, la magnétite, pour le
V et Sn.
L’occurrence des éléments traces dans les minéraux n’est pas encore bien comprise, mais on
estime qu’elle est due à une combinaison de trois critères :
 Rayon ionique,
 Valence chimique,
 Type de liaison chimique.

5.2.3. Fluides hydrothermaux post-magmatiques :

Plusieurs études ont essayé de confirmer l’origine post-magmatique des gisements


hydrothermaux.
Holland (1972) a noté les trois points suivants :
1. les magmas contiennent entre 1 et 5% d’eau, dont la plupart est extraite durant la
cristallisation est forme des solutions hydrothermales
2. les solutions ainsi produites contiennent suffisamment de métaux pour former un dépôt.
3. la baisse de la température et de la pression et l’interaction eau-roche vont permettre la
précipitation des métaux

Holland (1972) suggère également que : H2O, Cl, S et métaux de base, sont les principaux
composants des fluides post-magmatiques et aussi des gisements. Le chlore en particulier
forme des complexes chimiques avec les métaux, qui assistent leur transport: ClPb++, AuCl-4

Ex : la biotite dans les gisements des métaux de base contient 0.3 à 0.5% poids de Cl alors
que la teneur moyenne dans les granites en Cl par exemple est de 0.1% (Stollery et al. 1971).

5.2.4. Formation de complexes :

Plusieurs éléments chimiques ne sont ni mobiles ni solubles sous forme ionique et ce, aussi
bien dans les magmas que dans les fluides post-magmatiques. Ces éléments forment des
complexes chimiques avec d’autres éléments.
 Exemple, les halogènes (Cl,F) et S, sont parmi les éléments les plus abondants dans
les magmas et dans les fluides hydrothermaux.
 Les complexes chloridés; PbCl+, AuCl-4, et les complexes sulfurés; AsS-2, HgS2-2
sont très communs dans les gisements métallifères et sont responsables du transport
des métaux (Seward, 1983).
En conclusion, dans le milieu primaire, les complexes chloridés et sulfurés sont les principaux
moniteurs de la mobilité des éléments chimiques.

5.2.5. Résultat de la distribution des éléments : Halo primaire et dispersion primaire

a. Définitions :

Un halo primaire dit aussi "auréole primaire de dispersion" peut être définit comme la zone
dans laquelle les teneurs diminuent depuis le gisement jusqu’au bruit de fond.
La dispersion primaire est la distribution des éléments dans les roches non altérées, donc c’est
la géochimie des roches au sens large. Elle se localise en profondeur et résulte de processus
ignés, plutoniques ou métamorphiques. Cette dispersion doit être utilisée pour décrire la
distribution des éléments chimiques autour du gisement.

b. Caractéristiques générales :

- En effet, plusieurs gisements, d’origine magmatique ou hydrothermale sont caractérisés par


une zone centrale, telle qu’une veine dans laquelle les métaux sont concentrés en pourcentage
économique. Le degré de concentration peut être très élevé comme le cas du minerai de
barytine ou de fluorine (60-70%),
c. Types de halos primaires :
- Les halos primaires sont produits en même temps ou juste après la mise en place de
l’encaissant. On distingue généralement deux types de halos primaires :
* Un halo syngénétique, formé en même temps que l’encaissant;
Exemple : halo associé aux pegmatites.
Halo associé aux roches ultramafiques ségréguées.
Les gisements de sulfures massifs volcanogènes
* Un halo épigénétique, formé après la cristallisation des roches encaissantes, est due à la
circulation des solutions le long de zones perméables
Exemple : halos des gisements d’or filonien.
Cu-Zn dans les carbonates

Figure 10 : Halo primaire syngénétique de quelques éléments.


6. Elément indicateur :

6.1. Définition :

Ce sont des éléments relativement mobiles, intimement associés au métal recherché, leur
importance ne réside pas dans leur profit économique, mais comme critère d’exploration
géochimique. Ces éléments sont généralement plus faciles à détecter que le métal recherché.

6.2. Caractéristiques et sélection d’un élément indicateur :

Les éléments indicateurs sont utilisables aussi bien dans les milieux primaires que
secondaires.
 Milieu primaire, exemple, Hg, Cr, Pd, ..etc.
 Milieu secondaire, exemple: U, Zn, SO4, As...etc
Dans certains cas, ce sont des éléments de la gangue, dans d’autres, ce sont des substituants.

a) Exemples : Au-As, dans les gisements d’or filoniens.

Figure 11 : Au-As, dans les gisements d’or filoniens.

7. Environnements secondaires :
7.1.Définition :

Les environnements secondaires correspondent aux milieux superficiels où les conditions de


température et de pression sont faibles comparées aux milieux primaires.
Les environnements secondaires sont extrêmement importants en exploration et
historiquement, la plus grande emphase a toujours été placée ou mise sur l’échantillonnage de
matériaux dans ces milieux.
Par plusieurs processus, principalement l’altération météorique, les éléments sont mobilisés
ou extrait des sols et des eaux, de même que les volatiles de l’atmosphère et résulte en un halo
de dispersion secondaire.
Les processus par lesquelles les éléments se déplacent dans les environnements secondaires
sont distinctement différents de ceux des environnements primaires et les halos de dispersion
secondaires sont plus larges et plus étendues que les halos primaires.
Les géologues reconnaissent généralement deux types d’altérations superficielles : chimique
et mécanique. La première implique une destruction des roches et des minéraux par des
moyens chimiques et la dispersion par l’eau (H2O, CO2, O2), souvent pour de longues
distances. La seconde, plus importante dans les milieux où l’eau est manquante, implique une
désagrégation des roches par des processus physiques (érosion, gel-dégel, etc).

7.2.Altération chimique :
a) Définition :
L’intempérie chimique est l’ensemble des réactions chimiques des roches et des minéraux
avec les constituants de l’eau, de l’air, en surface ou proche de la surface.
 Plusieurs minéraux comme les silicates, les sulfures, etc., qui étaient stables dans les
milieux primaires deviennent instables dans l’environnement secondaire. Les réactions
chimiques qui s’annoncent dans ce cas, ont pour raison de créer de nouveaux
équilibres chimiques.
 Les éléments qui sont restés associer durant toute l’histoire de cristallisation
magmatique, exemple. Li, Rb, Cs, Be, Nb, Ta, Sn, peuvent se séparer dans
l’environnement secondaire.
 L’ordre de résistance des minéraux à l’intempérie chimiq ue est comme suit:
Oxydes > silicates > carbonates et sulfures
b) Réactions :
La plupart des réactions chimiques observées en surface ont été reproduites au laboratoire
avec les mêmes paramètres, T°, P, O2, CO2, H2O.
Krauskopf (1967) a noté que l’ensemble des réactions chimiques reliées à l’altération
chimique superficielle se résument à des processus relativement simples:
 Ionisation,
 Hydratation et déshydratation
 Décarbonatation
 Carbonatation
 Hydrolyse
 Silicification
 Oxydation et chapeau de fer

7.3. Altération mécanique :

Les principes fondamentaux des environnements secondaires ont été présentés dans les
dernières sections. Dans cette section, nous allons étudier la migration et la dispersion des
éléments dans ces environnements. La dispersion secondaire dépend des facteurs superficiels
et météoriques, de l’érosion et de la sédimentation. Elle est soit d’origine chimique, gazeuse
ou mécanique.
Figure 12 : Modalités d’altération dans les environnements secondaires.

8. Mobilité des éléments :

8.1.Définition :

La mobilité des éléments est la facilité avec laquelle un élément chimique va bouger dans un
milieu donné. Elle peut être quantifiée en terme de Potentiel Ionique (PI), qui est le rapport de
la charge Z, sur le rayon ionique r (Z/r = PI). Dans les milieux primaires, les éléments avec un
faible PI sont plus mobiles que ceux avec un potentiel intermédiaire, exemple "HFSE" (High
Field Strenght Elements) ont des PI plus forts que les terre rares alcalins, ou subalcalins, mais
plus faibles que les terres rares non-métalliques (Lesher et al., 1989). Les "HFSE" sont
généralement immobiles et peu affectés par les altérations hydrothermales (ex. Th, Nb, Ta, Zr
et Ti)
La mobilité des éléments, particulièrement les métaux, dans les environnements secondaires
est à la base de la formation des halos dispersion. Les éléments peuvent avoir une mobilité
chimique, mécanique ou les deux.

Exemple : Or, mobilité mécanique forte, chimique faible


Zinc, mobilité chimique forte, mécanique faible

La mobilité des éléments est une matière très complexe, car plusieurs facteurs, internes et
externes peuvent l’influencer.
8.2. Facteurs externes :
Le changement du type de roche change la chimie du milieu, c’est-à-dire, le Eh et le pH.
 Si le milieu est acide ou très acide, la mobilité des éléments augmente (les acides
rompent les liens chimiques.
 Si le milieu est superficiel, très oxydant, la mobilité des éléments augmente aussi.

Donc, la mobilité chimique des éléments est conditionnée par les conditions chimiques
locales.
Les pentes fortes favorisent un bon drainage et donc une plus grande oxydation des éléments
ce qui augmente en général la mobilité chimiques des éléments. Contrairement, les pentes
faibles ou les creux topographiques favorisent la formation de milieux plus alcalins où les
éléments chimiques sont plus concentrés que dispersés.
Dans les milieux humides, la mobilité chimique des éléments est dominante, contrairement
aux milieux arides où la mobilité mécanique est plus importante.
8.3. Facteurs Internes :
Ces facteurs concernent les champs de stabilité ou conditions Eh-pH des éléments chimiques.

Figure 13 : Mobilité des éléments en fonction du pH et du Eh.

9. Anomalie géochimique :

9.1. Définition : C’est une concentration anormale d’un élément en surface.


On distingue deux types d’anomalies :

 Anomalie hydromorphique, formée suite à une mise en solution des ions dans le
milieu secondaire.
 Anomalie clastique, formée suite à un phénomène mécanique.

9.2. Types d’anomalie :


Selon la forme de l’anomalie (en termes de teneur), on distingue :
 Une anomalie de Surimposition = anomalie Centrale due à un gisement.
 Une anomalie de répartition = anomalie due à une répartition locale.
Figure 14 : Une anomalie de Surimposition.

Figure 15 : Une anomalie de répartition

9.3. Paramètres physico- chimiques d’une anomalie :


9.3.1. Forme :
La forme d’une anomalie peut renseigner sur plusieurs points
- Nature de l’anomalie -------- clastique vs. Hydromorphique
- Type de gisement ------------- filonien vs. Stratiforme
- Agent de remobilisation ----- chimique ou mécanique
9.3.2. Échelle et taille de l’anomalie :

En prospection géochimique, l’échelle est très importante dans l’identification d’une


anomalie.
1 :20 000 ou 1 :50 000 est beaucoup plus importante
qu’une anomalie visible à l’échelle 1 :1000 ou 1 :5000
-estime pas l’anomalie
(et le gisement) est qu’on ne sur estime pas non plus le gisement (Échelle trop grande).

9.3.3. Facteur Temps :

Les anomalies bio-géochimiques peuvent être exagérées durant le printemps où la circulation


d’eau est plus importante.

9.4. Fausses anomalies :


Ce sont des anomalies qui ne sont pas causées par la présence d’un gisement.

9.4.1. Causes des fausses anomalies :

• Pente Topographique
• Contexte lithologique déjà anomal
• Contamination
• Mauvais échantillonnage
• Erreurs d’analyses au laboratoire

9.5. Anomalies déplacées :

Les patrons de dispersion secondaires sont communément déplacés de leur source de


Minéralisations. Dans le cas par exemples des sédiments de rivières ou de l’eau) ces
déplacements sont très utiles pour la reconnaissance régionale des anomalies.

Figure 16 : Exemples d’anomalies déplacées


9.6. Distribution statistique des éléments (se référer au TD & TP)

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