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PLURILINGUISME, VARIATIONS, INSERTION SCOLAIRE ET SOCIALE

Jacqueline Billiez et Cyril Trimaille

Éditions de la Maison des sciences de l'homme | « Langage et société »

2001/4 n° 98 | pages 105 à 127


ISSN 0181-4095
ISBN 2735108953
Article disponible en ligne à l'adresse :
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https://www.cairn.info/revue-langage-et-societe-2001-4-page-105.htm
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Plurilinguisme, variations,
insertion scolaire et sociale

Jacqueline BILLIEZ et Cyril TRIMAILLE


Lidilem, Université Stendhal Grenoble III

Depuis plus de vingt-cinq ans, la majorité des travaux des équipes


du Centre de Didactique des Langues (Lidilem), portant sur les
situations plurilingues en relation à l’insertion sociale, est consa-
crée non pas au “contact de langues”, objet désincarné, mais au
« vaste laboratoire pour l’étude du bilinguisme » que représente la
migration (Lüdi et Py, 1986 : 26), objet socialement situé, dont les
enjeux politiques et éducatifs posent de véritables défis. Ces
années de recherche, les renouvellements et déplacements de la
problématique liée au plurilinguisme et à l’insertion, ont contri-
bué à construire un champ qui s’est avéré d’un accès difficile,
voire périlleux. En effet, ce terrain nécessite une certaine passion,
doublée d’une approche compréhensive (Kaufmann, 1996), et
oblige à sortir des cadres bien établis, tout en préservant un équi-
libre fragile entre engagement et distanciation.
C’est en suivant cette ligne que nous retracerons les actions qui,
avec plus ou moins de succès, ont eu pour but de prendre en compte
le plurilinguisme et la diversité langagière en vue de favoriser l’in-
sertion sociale d’une partie de la population française. Nous tente-
rons ensuite de montrer que la réflexion reste d’actualité, et que
prendre en compte l’hétérogénéité constitutive de la société passe

© Langage et société n° 98 – décembre 2001


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106 JACQUELINE BILLIEZ ET CYRIL TRIMAILLE

par une redéfinition de la diversité linguistique et culturelle et par


la mise en place de démarches didactiques favorisant l’ouverture et
la reconnaissance, dans un cadre dépassant celui des migrations.

CONTEXTE ET ITINÉRAIRE DES RECHERCHES


SOCIOLINGUISTIQUES ET DIDACTIQUES SUR LES MIGRATIONS

Tracer cet itinéraire implique de le situer dans le contexte historique


global des recherches portant sur les migrations.

Survol historique
Ayant pris leur élan dans la foulée des événements de 1968, les
travaux sur l’immigration ont mis quelque temps, en France, avant
de se dégager d’une perspective uniquement militante, pour conqué-
rir une certaine légitimité.
Pour les linguistes, sociolinguistes et didacticiens, cette période
correspond à une timide et lente émergence du thème dans le champ
de la recherche. Dans l’introduction de l’ouvrage collectif Langues
et Migrations (1981 : 9-11), Louise Dabène souligne que l’intérêt s’est
d’abord manifesté au sein de l’action sociale et notamment péda-
gogique, avec les cours d’alphabétisation dispensés aux hommes
célibataires, le plus souvent bénévolement et dans des cadres asso-
ciatifs. De cette période militante, il n’est d’ailleurs resté que très
peu de travaux de recherche et fort peu de méthodes 1.
Au sein des sciences du langage, ce n’est qu’à partir de 1975 que
la situation migratoire a fait son entrée comme sujet d’études, sous

1. On peut constater que trente ans plus tard, la situation sur le terrain est restée en l’état;
elle a même peut-être régressé, avec le militantisme en moins et des contradictions de
toutes sortes en supplément. Les méthodes utilisées ne semblent pas avoir bénéficié des
travaux réalisés sur l’apprentissage de la lecture-écriture, alors que les besoins d’al-
phabétisation demeurent, même si le public a changé en se féminisant. Il s’agirait
pourtant d’un domaine de recherches relevant typiquement de l’enseignement du
“français langue seconde”, mais le fait qu’il s’agisse d’un public essentiellement fémi-
nin explique peut-être le peu d’intérêt qu’il suscite.
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PLURILINGUISME, VARIATIONS 107

l’impulsion de la sociolinguistique nord-américaine, qui remettait


en cause les objectifs et les méthodes dominantes chez les linguistes
(Gardin, 1976). Et c’est encore dans les cadres associatifs ou publics
de l’intervention pédagogique, que s’est développée la réflexion sur
l’enseignement des langues et cultures dites d’origine, aux adultes
francophones en contact avec les populations migrantes (Billiez,
1979) puis aux enfants d’âge scolaire 2 issus de ces populations (ensei-
gnement de langues cultures d’origine ou ELCO) 3.
L’année 1978, date de la création par le CNRS du réseau de cher-
cheurs appelé “GRECO 13 Migrations Internationales” 4, marque
l’ouverture d’une période qui remplace la phase de recherche mili-
tante issue de 1968, et qui va représenter celle de la conquête d’une
légitimité de ce secteur de recherche en sciences sociales (Withol de
Wenden, 1995a).
On peut cependant se demander quel est l’intérêt scientifique de
faire porter un regard sociolinguistique et didactique sur des popu-
lations immigrées, leurs pratiques multilingues et leurs rapports
aux langues. Pour la sociolinguistique, c’est souvent aborder, dans

2. À propos des désignations des langues d’immigration comme “langues d’origine”,


le point de vue d’E. Témime, spécialiste de l’histoire des migrations (Témime, 1989 :
65), nous semble révélateur de l’enjeu de cette appellation : « Je n’aime pas que l’on
parle de l’enseignement en ”langue d’origine” ; d’abord parce que je ne sais pas trop
ce qu’est une langue d’origine, si ce n’est une référence obligée à des origines que je
ne veux pas renier, mais dans lesquelles il ne me paraît pas indispensable de me
draper éternellement ». Il dénonce ainsi le ghetto culturel dans lequel on risque de
maintenir les enfants issus de l’immigration, tout en insistant sur le fait que, à l’ins-
tar de tous les enfants, ils ont la même curiosité pour les langues et les cultures du
monde, avec un intérêt particulier « bien naturel » pour celles de leur famille.
3. En 1973, une première circulaire autorise, à titre expérimental, un enseignement facul-
tatif du portugais à l’intention des élèves d’origine portugaise scolarisés dans l’en-
seignement élémentaire. Au rythme des accords bilatéraux conclus avec les pays
d’origine, les années suivantes verront la même mesure étendue à d’autres langues
(Boulot et Boyzon-Fradet, 1987).
4. Le réseau a regroupé toutes les équipes, jusque-là dispersées, travaillant sur les phéno-
mènes migratoires. Initiative qui indique, d’ailleurs, que les phénomènes liés à l’im-
migration étaient, déjà à ce moment-là, au cœur des préoccupations de la société
(mais pas encore au cœur des débats politiques).
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108 JACQUELINE BILLIEZ ET CYRIL TRIMAILLE

le pays dit d’accueil, une situation de diglossie qui vient en quelque


sorte amplifier celle de certains pays d’origine, avec l’émergence –
au sein des familles une fois regroupées – d’un “parler bilingue”.
Quels sont alors les facteurs de maintien des langues doublement
minorisées en pays d’installation ? Les enfants vont-ils faire usage
d’un parler, socialement dévalorisé, hors de la famille, notamment
dans leurs réseaux de pairs ? Quel pourrait être alors l’impact de ce
parler, mis en circulation dans des réseaux ouverts à des jeunes de
toutes origines ? Quels sont les types de relations qui s’établissent
entre les usages des langues et la construction identitaire ? Autant
de questions qui ont conduit à décrire ces parlers vernaculaires, qui
s’affichent aujourd’hui dans l’espace public et suscitent l’intérêt de
nombreux journalistes et de quelques linguistes.
Pour la didactique, il s’agissait d’abord de s’intéresser à une situa-
tion exolingue durable, entraînant, du côté des professionnels, inter-
locuteurs réguliers des migrants de la première génération, la demande
d’apprentissage des langues de migration (principalement de l’arabe
maghrébin), pour des besoins communicatifs nouveaux. Demande
qui mènera au terrain médico-hospitalier, pour réaliser des analyses
de besoins langagiers, afin de définir les contenus d’un enseignement
d’arabe maghrébin aux agents hospitaliers inscrits dans des cours
dans le cadre de la formation continue de l’université (Billiez, 1979).
Puis, avec l’entrée des enfants de migrants dans le système éducatif,
ce sont des instituteurs en formation dans les écoles Normales qui
ont réclamé, à la place des cours d’anglais des cours d’arabe, ainsi
que des apports de connaissances générales (économiques, sociales,
linguistiques et culturelles) sur les situations migratoires.
Avec l’irruption d’enfants issus des migrations sur la scène scolaire,
des questions nouvelles sont également apparues, entre autres celles
de leur intégration linguistique et de l’introduction d’un enseigne-
ment/apprentissage des langues de migration.
Afin de dégager finalités et contenus d’un tel enseignement, il
s’est agi entre autres, de cerner quelles étaient les compétences acqui-
ses par les enfants dans ces langues d’origine, ce qui a conduit à
étudier les situations de bilinguisme de ces jeunes.
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PLURILINGUISME, VARIATIONS 109

LA PROBLÉMATIQUE DES ELCO :


QUELLE PRISE EN COMPTE DE LA DIVERSITÉ ?

La planification linguistique, au sein du système éducatif, représente


un lieu où diverses articulations se complexifient singulièrement :
entre les décisions politiques et, sur le terrain, les acteurs organisés ou
non en groupes de pression, entre les statuts formel et informel des
langues 5, entre curriculum réel et curriculum caché (les choix de
langues effectués par les consommateurs avertis d’école servent bien
d’autres objectifs que la maîtrise d’un autre système linguistique),
entre respect de droits fondamentaux (celui de pouvoir étudier sa
langue) et ses effets pervers, entre autonomie et ingérence pédago-
gique, entre la langue standardisée enseignée et les pratiques langa-
gières (ou entre l’écriture et l’oralité, ou encore entre mono-, bi- et
plurilinguisme), entre les résistances aux changements pédagogiques
et les progrès des recherches en sociolinguistique et didactique des
langues, entre pesanteurs et dynamiques, etc. C’est alors peu dire
que l’abord de ce type de problématique plonge parfois le chercheur
dans le désarroi, surtout lorsque aucune des mesures, successive-
ment envisagées par l’institution éducative, ne paraît construire et
favoriser le multilinguisme des enfants issus des migrations.
C’est en nous intéressant plus particulièrement à l’enseignement
de l’arabe, « langue un peu plus étrangère que les autres » (Falip et
Deslandes, 1989), que ces facteurs sont apparus dans toute leur com-
plexité. En effet, parmi les langues de migration présentes dans le
système éducatif français hexagonal, c’est la seule langue enseignée
à être “variété haute” d’une situation diglossique – selon la définition
restreinte du concept 6 – et langue officielle identique des trois États
5. Elles peuvent être placées, formellement, sur un pied d’égalité (par exemple, dans tel
établissement, le choix entre l’arabe et l’anglais comme première langue vivante (LV1)
peut être offert aux familles), tout en étant diamétralement à l’opposé, dans l’ordre
de la valorisation sociale.
6. Concept sociolinguistique développé par Ferguson (1959) pour décrire toute situa-
tion sociétale où deux variétés d’une “même” langue sont employées dans des
domaines et fonctions complémentaires, l’une, formelle (“haute”), étant de statut
socialement supérieur à l’autre, informelle (“basse”).
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110 JACQUELINE BILLIEZ ET CYRIL TRIMAILLE

du Maghreb. Mais, du fait d’accords bilatéraux entre pays d’origi-


nes et “d’accueil”, chacun de ces États gère son enseignement, de
façon séparée pour ses propres ressortissants, avec des enseignants
détachés de leur propre système scolaire ; ce qui rend encore plus
compliqué le panorama esquissé plus haut (Falip et Deslandes, op. cit.).
Les résultats d’une étude sur l’enseignement/apprentissage de
l’arabe au cours préparatoire (Billiez, 1989) ont mis en évidence,
mais uniquement “en creux”, quelques-unes des conditions idéales
à réunir pour qu’un enseignement et un apprentissage de l’arabe
puisse être favorable à l’intégration et à la réussite des enfants de
migrants dans le contexte scolaire. Parmi celles-ci, l’une des plus
importantes est de faire en sorte que ces enfants apprennent la langue
de leurs parents, « non comme un objet de singularité, mais comme
un objet qui appartient à tous, et qui revêt une égale dignité [...]. Il
convient au contraire qu’il (l’enfant) prenne conscience de ce qu’il
n’est pas “singulier”, de ce que son appartenance à tel ou tel groupe,
à telle ou telle communauté culturelle, à telle religion (à laquelle il
adhère ou non, mais qui lui est en tout cas “attribuée” par les autres)
ne le met pas en dehors de la communauté plus large dans laquelle
il vit, bref ne le marginalise pas » (Témime, 1989 : 65-66).
Il s’agissait donc d’œuvrer, sans désorganiser le système éduca-
tif, pour que ces enfants se découvrent dans leur universalité en
concevant un “enseignement d’égalité”. Ce constat dressé, il conve-
nait dès lors de rechercher des solutions, s’adressant évidemment à
l’ensemble des élèves – ce qui allait dans le sens des approches inter-
culturelles – compatibles avec l’ensemble des contraintes institu-
tionnelles et susceptibles d’installer des images positives des langues
ou de faire évoluer, au moment où elles ne sont pas encore enkystées,
les images majoritairement disqualifiantes attachées aux langues et
aux cultures minorisées dans la société.
Les interrogations soulevées à partir de là étaient donc
multiples et se posaient dans des directions diverses. Quelles
langues choisir pour éviter une concurrence fort déloyale ou
encore quelle variété choisir (dans le cas de l’arabe, la question est
particulièrement cruciale) ? Quels maîtres pour les enseigner ?
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PLURILINGUISME, VARIATIONS 111

Quelles finalités assigner à ce type d’enseignement/apprentissage,


avec quels contenus, quelles stratégies ?
À cet égard, d’autres travaux alimentent la réflexion sur les choix
éducatifs qu’il y aurait lieu d’effectuer, pour enrayer les déterminis-
mes sociaux, en montrant tout l’intérêt qu’il y a à considérer l’enfant
issu de l’immigration comme doté, face à l’apprentissage des langues,
d’atouts liés à sa socialisation bilingue. Ainsi, l’étude réalisée par Sylvie
Wharton (1996) a, entre autres, montré que ces enfants, en général
affublés de l’étiquette dépréciative d’“handicapés linguistiques”, pré-
sentaient au contraire, en regard de l’apprentissage d’autres langues
étrangères à forte valeur marchande comme l’anglais, tout un poten-
tiel largement ignoré et donc inexploité. Familiarisés dès leur plus
jeune âge avec la “migration linguistique”, ces enfants étaient « plus
confiants que leurs camarades de même origine socio-économique à
s’emparer de la parole en langue étrangère » (Wharton, 1996 : 29),
poursuivant ainsi une expérience cognitive et sociale, qui ne remettait
pas en cause leur identité, parce qu’ils avaient déjà pris conscience
que des langues différentes pouvaient organiser la réalité différemment.
Il apparaissait alors souhaitable de développer et d’expérimenter,
dans les établissements qui les scolarisent, des enseignements linguis-
tiques audacieux, intégrant non seulement les langues présentes dans
leur environnement familial mais aussi les langues étrangères. On a
alors cherché à relever un des nombreux défis posés plus particuliè-
rement au sociolinguiste et au didacticien, ayant pris conscience du
fait que l’on ne peut absolument pas calquer l’enseignement d’une
langue minoritaire et surtout minorisée sur celui des langues étran-
gères socialement valorisées. Ce défi peut être formulé de la manière
suivante : quel type d’enseignement/apprentissage linguistique et
culturel est susceptible de favoriser l’intégration scolaire de l’enfant
issu d’une population minorisée, pour qu’il sorte de ce contexte
grandi à ses propres yeux et à ceux de ses camarades ? Autrement
dit, il s’agit de trouver une formule curriculaire, non préjudiciable à
ses appartenances, apte à l’aider au contraire dans sa construction
identitaire originale, tout en ménageant des possibilités de choix de
langues qui ne le marginalisent pas.
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112 JACQUELINE BILLIEZ ET CYRIL TRIMAILLE

En tenant compte des résultats des différentes recherches réali-


sées, des solutions “en positif” nous sont apparues, en portant notre
regard vers des expériences, menées et généralisées Outre Manche,
regroupées dans un courant appelé Language Awareness. Nous avons
alors tenté de mettre en place un programme expérimental forte-
ment inspiré de ce courant, que nous avons appelé “éveil au langage”
(Caporale, 1989).
Cette démarche, qu’une recherche-innovation 7 a pour but d’éva-
luer, vise (par des activités mettant en jeu des langues diverses,
proches et lointaines et de tous statuts, sans avoir nécessairement
l’ambition de les enseigner), à favoriser le développement, chez les
élèves :
– de compétences d’observation et de raisonnement métalin-
guistiques et métacommunicatifs (discrimination auditive, mémo-
risation de sons non-familiers) ;
– d’attitudes d’ouverture à la diversité linguistique et culturelle.
Outre une dimension favorisant une objectivation du langage et
une décentration ethno-sociolinguistique, ces savoir-faire et savoir-
être sont de nature à engendrer un désir de connaître/reconnaître les
langues et cultures autres, ainsi qu’une motivation à apprendre des
langues diverses et en particulier des langues minorisées.
Si des pistes semblaient se dessiner pour l’intégration des langues
dites d’origine, il fallait encore s’interroger sur l’appropriation de la
langue de l’école, en relation notamment avec d’autres composan-
tes des répertoires langagiers. En d’autres termes, cet élargissement
de la problématique consistait à considérer les pratiques bi-
multilingues et les parlers interstitiels (Calvet, 1994), ainsi que d’au-
tres éléments de variation qui en résultent, comme ressortissant de
plein droit de la diversité linguistique et, à ce titre, à intégrer dans les
politiques et la planification linguistiques.

7. Il s’agit du programme “EVLANG - éveil aux langues à l’école primaire”, qui a été
retenu en 1997 dans le cadre du programme Socrates (Lingua, actions D), dont le
terme est fixé à juin 2001. Une publication proposera en 2002 un bilan approfondi
de l’évaluation de cette démarche.
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PLURILINGUISME, VARIATIONS 113

DES PARLERS BILINGUES À LA LANGUE DES PAIRS, SOCIOLECTE


INTERSTITIEL OU “PARLER IDENTITAIRE” ?

Les pratiques bilingues ou multilingues des enfants d’immigrés


ont donc fait l’objet d’études qui ont mis à jour des tendances dif-
férentes dans leur gestion in vivo. Ainsi, en fonction de leur(s) lan-
gue(s), de leur insertion à des réseaux sociaux et professionnels, les
jeunes issus de l’immigration ont établi des rapports contrastés aux
langues de leur répertoire verbal. Des enquêtes ont montré que si
les Ibériques maintenaient généralement l’usage des langues de
leurs parents en contexte bilingue, ils exposaient peu leur bilin-
guisme hors de la communauté bilingue. À l’inverse, les Français
nés de parents maghrébins ont tendance à abandonner plus facile-
ment les langues de leurs parents (surtout lorsqu’il s’agit d’un
arabe maghrébin), au moins en production. En famille, ce sont
donc les pratiques réceptrices qui constituent la modalité d’actua-
lisation privilégiée du bilinguisme des enfants. En contexte urbain
dit “défavorisé”, les usages identitaires des “langues d’apparte-
nance” (Dabène, 1994), à la fois emblématiques et stigmatisants,
ont, pour de nombreux jeunes, été reportés sur des sociolectes
urbains, qui ont pour caractéristique fondamentale, d’intégrer des
éléments de ces langues d’appartenance à une base de français,
que l’on pourrait qualifier de “populaire”.
Dans les interactions au sein des groupes de pairs (à l’école,
dans le quartier), les jeunes “arabophones” (Billiez et Merabti,
1990) utilisent certaines unités arabes, qu’ils arborent comme des
emblèmes linguistiques, notamment sous formes de “marques
transcodiques” (alternances, mélanges, emprunts, calques et trans-
ferts, notamment des éléments phonologiques) ; leurs pratiques
langagières ont une influence certaine sur les pratiques de pairs
non-arabophones, comme l’illustrent ces propos d’adolescents
bilingues 8, qui montrent aussi combien les représentations et les

8. Scolarisés en classe de 4e dans un collège du centre de Grenoble (F = fille, G = garçon,


E = enquêteur).
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114 JACQUELINE BILLIEZ ET CYRIL TRIMAILLE

attitudes jouent un rôle dans l’appropriation linguistique – dans ce


cas en contexte informel non scolaire – dans l’adoption ou le rejet
de formes :

E entre amis vous utilisez que le français

F et G ouais ouais

F des fois aussi de l’arabe (rires)

E genre quoi tu peux y aller (il) y a pas de censure

F euh [Sepa] moi euh nardinemuk euh (…)

E d’accord et (il) y a d’autres mots aussi arabes que vous utilisez

F ouais des fois on jure aussi en arabe La Mecque

F le Coran

F ouais le Coran

F et G wallah

F et G wallah ouais voilà tout ça (…)

F normalement c’est que les musulmans mais tout le monde a pris


l’habitude (…)

E et comment ça se fait comme ça que vous leur piquez leurs trucs

F parce qu’ils nous disent ça

F ça fait mieux que de dire je jure la Bible hein franchement (rires)

F je jure la Bible (…)

F La Mecque c’est mieux

E La Mecque c’est mieux pourquoi

F c’est mieux parce que [Sepa] je jure la Bible euh pff (…)

F La Mecque ça fait plus insulte


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PLURILINGUISME, VARIATIONS 115

Outre ces composantes allogènes ou perçues comme telles (cf. “Le


Coran”), les sociolectes urbains se caractérisent par l’emploi de codes
cryptiques (verlan, veul, javanais…), par une abondante et incessante
activité néologique, grâce à l’application de procédés formels (tels
que troncation à l’initiale et à la finale, ou la (re) suffixation) ou séman-
tiques (métaphores, métonymie et glissements de sens principale-
ment), ou encore par certaines variations syntaxiques (antéposition
de trop dans les énoncés du type « trop j’arrive pas à mentir »).
Louis-Jean Calvet (1994) a montré que ces we code, au sens défini par
J. J. Gumperz, étaient construits à partir d’un they code. Mais comme
nous l’avons souligné, les locuteurs des we code, sociologiques et inter-
ethniques, les alimentent d’éléments empruntés aux vernaculaires
familiaux. Il y a donc un double mouvement : utilisation de la langue
de référence (français, they code) comme base (notamment de néolo-
gie) et emprunt d’éléments vernaculaires qui sont en quelque sorte
véhicularisés, mis dans un “pot commun langagier”.
L’une des premières fonctions est donc de manifester son appar-
tenance au groupe, d’une façon qui apparaîtra plus ou moins polé-
mique aux yeux des non-pairs, et de délimiter les contours de cette
communauté d’usages : il s’agit bien là d’une démarche d’insertion
dans un groupe social. Mais converger vers un pôle grégaire a le
plus souvent pour corollaire de diverger par rapport à un autre pôle,
par rapport à un autre groupe. Si l’on se réfère à la théorie de l’ac-
commodation (Giles et Smith, 1979), c’est bien aussi à une logique
divergente qu’obéissent les sociolectes urbains de jeunes. Toutefois,
tous les travaux sociolinguistiques convergent pour constater que
les fonctions premières de cet argot sociologique sont identitaires,
contrairement aux argots dits “de métier”, qui ont pour but de cryp-
ter avant de manifester une appartenance à un groupe (Goudaillier,
1997). Mais le cryptage, qui trace nettement les frontières de l’inter-
locution, n’est pas absent – loin s’en faut – des préoccupations langa-
gières des adolescents, de quelque milieu qu’ils proviennent, et la
présentation de soi passe également par des usages ludiques et jubi-
latoires. C’est la conjugaison de ces fonctions et leur mise en concur-
rence avec la récupération transgressive ou codificatrice d’autres
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116 JACQUELINE BILLIEZ ET CYRIL TRIMAILLE

groupes, qui permettent d’expliquer le processus permanent de redif-


férenciation à l’œuvre dans les groupes ou réseaux de pairs. En effet,
comme le note H. Boyer (1997), les sociolectes urbains tendent à être
diffusés hors de leurs sphères d’émergence, intégrant, comme par
capillarité, à des nœuds de réseaux, les répertoires verbaux “bran-
chés” de personnes dont la légitimité sociale n’est nullement remise
en question par leur usage distinctif de tels éléments.
À la faveur de la médiatisation dont les “jeunes des cités”, et plus
largement les “banlieues”, sont l’objet depuis les années quatre-
vingt, ces parlers ont rapidement acquis une visibilité importante
dans la société française, devenant, comme l’écrit Henri Boyer, un
“objet linguistique médiatiquement identifié”. Quels qu’en soient
les vecteurs : médias, musique rap, cinéma, littérature, humoris-
tes…, la diffusion/propagation d’éléments des sociolectes urbains est
aujourd’hui un fait bien établi. Il n’est pas inutile de s’arrêter sur
cette focalisation médiatique et sur les représentations des variétés
et de leurs locuteurs qui en résultent. Souvent amalgamés en un
groupe à géométrie variable, les descendants d’immigrés ont été ou
sont, tour à tour et au gré de l’actualité, les victimes du racisme ou
de la crise économique, des “sauvageons” “sans foi ni loi”, des jeunes
“en échec scolaire” ou “déchirés entre deux identités”, ou encore
des habitants de quartiers dans lesquels nul ne souhaiterait vivre.
Mais ce florilège d’attributions serait incomplet s’il n’était associé à
un sociolecte fonctionnant comme un ensemble d’« indice[s] signa-
létique[s] catégoriel [s] » (Chauvin, 1985 : 58) qui se substituent à
d’autres indices d’appartenance dont le pouvoir distinctif tendrait à
s’estomper (comme la consommation ostentatoire de certains biens).
Bien que peu d’enquêtes aient été réalisées sur les représentations
sociales de sujets sociaux n’appartenant pas aux groupes de locu-
teurs des “parlers urbains de jeunes”, une étude exploratoire
(Trimaille et Billiez, 2000) permet d’avancer quelques hypothèses,
sur la diversité des “positionnements épilinguistiques” (Canut, 1998)
face aux variations linguistiques, particulièrement par rapport aux
sociolectes urbains. Les sentiments à leur égard seraient en quelque
sorte situés sur un continuum, qui aurait pour pôles, d’une part,
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PLURILINGUISME, VARIATIONS 117

une attitude apologétique dont les tenants ne tarissent pas d’éloges


sur la “créativité” et la “poésie” de “la langue des cités” 9, d’autre
part, un rejet vigoureux et offusqué, se fondant sur un respect obses-
sionnel de la norme dite légitime. Dépassant la consigne 10, l’étu-
diante citée ci-dessous (bilingue français-arabe) se fait l’écho des
amalgames médiatiques, déroulant un point de vue se voulant
descriptif, étayé et légitimé par l’emploi de quelques termes consa-
crés, tant en linguistique qu’en “sociologie de journal télévisé” :
Argot qui a dépassé la limite du vulgaire. C’est un mélange de type de lan-
gage (arabe “wula”, verlan “reum”) > langage typique des cités ou quartiers
sensibles > violence qui est transcrite. Nervosité des personnages > visé : plu-
tôt jeune. Délinquant 11 ?

S’il y a bien identification et intégration d’une variété langagière,


« affirmation d’une contre-légitimité linguistique » (Bourdieu, 1983 :
103), à un système de représentations dominé par une idéologie
monolingue, ce processus ne contribue guère à la légitimation des
sociolectes urbains.
Connaissance n’est donc pas reconnaissance et, si l’emblème
dont se dotent les locuteurs des sociolectes urbains assume bien
le rôle de bannière à laquelle ils témoignent allégeance, il fonc-
tionne aussi comme stigmate 12. Ainsi, sans caricaturer une infinie

9. Comme pour les cultures dites “exotiques” et/ou “primitives”, la connaissance


superficielle conduit souvent à un “émerveillement” dont le corollaire est imman-
quablement un discours différentialiste et une folklorisation.
10. La consigne était : « Que pensez-vous de ces énoncés et des personnes qui les ont
prononcés ? ».
11. Cet énoncé évaluatif, produit par une étudiante de première année en Sciences du
langage, donne une idée de l’expression verbale d’un positionnement épilinguis-
tique, à l’égard d’un énoncé stéréotypique proposé à l’évaluation « wula, si i (l) vient
pas ce narvalo, j(e) lui nique sa reum ». On y observe, à la fois, une dimension descrip-
tive (désignation) et une dimension évaluative de la représentation sociale (attitude
de rejet disqualifiant), ainsi que des attributions portant sur les locuteurs.
12. Selon Goffman, cité par J.-P. Durand et R. Weil (1997 : 250) « dans le cadre de contacts-
mixtes, le stigmate traduit le désaccord entre l’identité sociale virtuelle prêtée à la
personne, et son identité sociale réelle. Le stigmate est constitué par la mise en rela-
tion des deux dans le cadre de l’interaction ».
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118 JACQUELINE BILLIEZ ET CYRIL TRIMAILLE

variété de positionnements, force est de constater qu’identifica-


tion de la variation rime souvent avec stigmatisation, notamment
dans les écoles.
Or, sous peine de favoriser l’exclusion de nombreux élèves, il ne
semble pas qu’on puisse faire longtemps l’économie d’une réflexion
sur les implications de « l’idéologie sociolinguistique [française] (…)
qui ne tolère ni concurrence ni déviance » (Boyer, 1997). En effet, par
le rôle qu’elles jouent dans le réglage des rapports sociaux, les repré-
sentations sociales d’objets linguistiques – et les jugements à l’égard
de leurs locuteurs, quand ils sont produits et/ou reproduits par les
institutions – ne peuvent être sans conséquences sur l’insertion sociale
et scolaire des locuteurs. Quelle que soit la perception que l’on s’en
fait, prohiber à l’école les éléments contre-normés de répertoires
verbaux (outre le fait que cela renforce leur potentiel transgressif),
équivaut généralement, comme le soulignent B. Seguin et F. Teillard
(1996), à une privation de parole et souvent à un déni d’identité.
Les élèves concernés vivent cette situation comme autant de violen-
ces symboliques (au sens de Bourdieu), qu’ils n’ont dès lors de cesse
de vouloir retourner aux agents ou objets emblématiques de la domi-
nation, les plus accessibles étant leurs enseignants et les camarades
qui n’appartiennent pas au groupe. Ce processus ne manque pas de
défrayer la chronique et d’alimenter abondamment les opinions sur
“les jeunes”, de plus en plus “incivils”, voire “violents” de plus en
plus jeunes 13…
La prise de conscience de tels phénomènes nous a amenés à nous
interroger sur les facteurs, notamment représentationnels et attitu-
dinaux, susceptibles de rompre ce cercle vicieux, amorcé par l’assi-
gnation d’identités négatives et entretenu par le fait que celles-ci
sont endossées par les sujets.

13. Pour une analyse synthétique des phénomènes de délinquance juvénile et une
déconstruction du discours dominant sur « l’escalade des violences urbaines »,
voirL. Mucchielli, « Quand la jeunesse fait peur », Sciences Humaines n°116,
mai 2001.
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PLURILINGUISME, VARIATIONS 119

FAIRE ÉVOLUER LES REPRÉSENTATIONS,


CHANGER LES ATTITUDES

Il semble que l’on soit face à une situation de “choc culturel 14”. Une
pluralité de pratiques et de représentations, des valeurs et des nor-
mes diverses, fondent des groupes sociaux et en balisent les limites.
Cette plurinormativité est également à l’origine d’incompréhensions
et de malentendus, qui génèrent des attitudes de repli et peuvent
aboutir à des conflits ou à des violences (symboliques et/ou physiques)
entre ces groupes.
En amont d’un travail sur “le linguistique”, d’un apprentissage
de savoir-faire, se pose donc la question cruciale de l’apprentissage
de savoir-être ensemble. Partant, il paraît indispensable d’apprendre
et d’enseigner (ou mieux, d’apprendre ensemble) à appréhender
des écarts objectifs de pratiques, dans un mouvement de décentra-
tion, comme une hétérogénéité constitutive et fondamentale, plutôt
que, dans un immobilisme socio-ethno-centré, comme une somme
de différences à réduire.
Bon nombre d’actions se donnent explicitement pour but de rappro-
cher, à un niveau local, les personnes et les groupes socio-ethno-
culturels, en favorisant la (re) connaissance mutuelle, et parfois même
le métissage culturel. La prise en charge, de ce qui apparaît comme un
véritable “travail social”, est assumée non seulement par l’institution
scolaire mais également par des associations ou structures sociales.
Ainsi, MJC (Maisons des Jeunes et de la Culture) et centres sociaux
développent des activités, destinées à divers publics et promouvant
la découverte et la reconnaissance de la diversité culturelle. Outre les
traditionnels conférences-débats, repas et fêtes de quartiers, qui
peuvent contribuer à rendre le “non-familier” moins “étrange”, on
peut évoquer d’autres types d’actions visant plus spécifiquement la
maitrise de langages par les adolescents.

14. Ce choc peut apparaître d’autant plus violent qu’historiquement, les politiques linguis-
tiques françaises ont été intriquées avec l’établissement d’un pouvoir étatique centra-
lisé et déconcentré, autant qu’avec la constitution d’une “nation une et indivisible”,
dont on connaît le caractère fantasmatique et homogénéisant (cf. Agulhon, 1989).
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120 JACQUELINE BILLIEZ ET CYRIL TRIMAILLE

C’est le cas par exemple des ateliers d’écriture, qui peuvent per-
mettre de développer d’autres représentations du monde scriptural
et de favoriser une réconciliation avec l’écrit, dont on sait le caractère
indispensable pour l’insertion scolaire et sociale. Par rapport à l’oralité,
la sphère de l’écrit impose aussi une prise de distance, un désinves-
tissement affectif du langage. Outre ces composantes “instrumentales”
(complémentaires des enseignements scolaires), les ateliers d’écriture
sont aussi un lieu d’expression propre, où chacun peut apprendre à
écouter ou lire l’Autre, mais aussi se dire et entreprendre de se (re)
construire une identité positive. Le statut des animateurs et éduca-
teurs, leur proximité culturelle et expérientielle, y sont souvent vécus
par les adolescents comme une source de légitimité, tout aussi valable
que la légitimité scolaire. C’est la représentation d’un parcours remar-
quable qui confère, par exemple, aux animateurs d’ateliers d’écriture
rap, une légitimité centrée, non seulement sur les valeurs du groupe
(compétences et dextérité verbales, talent artistique, réussite sociale
évaluée selon d’autres critères que le capital économique obtenu – en
termes de loyauté et de probité par exemple –, mais aussi sur l’inser-
tion sur le marché du travail. Ils deviennent, pour les jeunes adolescents,
des “autorités” (De Certeau, 1974), détenteurs de ce qui est “croya-
ble”. Les propos d’un animateur d’atelier rap, outre le fait qu’ils
actualisent verbalement un des traits constitutifs de la représentation
sociale de l’institution scolaire chez de nombreux jeunes (définie en
termes d’autorité/obéissance et de discipline/obligation), attestent
de sa conscience d’un positionnement interstitiel :
Un professeur c’est autoritaire ça a de l’autorité donc du moment où il t’o-
blige à faire quelque chose puisque c’est de l’obéissance de la discipline il va te
discipliner à faire quelque chose. Moi à la MJ je les discipline pas. On va dire
qu’on est ni à l’école ni dans la rue on va dire qu’on est entre les deux ça veut
dire que ce que t’as appris à l’école c’est bien mais ce que t’as appris à la rue
c’est aussi bien que l’école (Hichem, 23ans) 15.

15. Ces propos, recueillis par entretiens semi-directifs, dans le cadre de la recherche « Une
semaine dans la vie plurilingue à Grenoble » (Billiez et al., 2000), ont été transcrits litté-
ralement, puis transposés, afin de ne pas risquer de déprécier les dires, du fait des
écarts entre normes de l’oralité et de la scripturalité.
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PLURILINGUISME, VARIATIONS 121

Il semble, par conséquent, nécessaire d’articuler les actions asso-


ciatives, et plus généralement les actions ou expériences extra-scolaires,
avec celles menées en contexte scolaire, afin que les instances de socia-
lisation forment un continuum, que les adolescents puissent percevoir
comme un tout cohérent. Cela implique que le travail de décentra-
tion ethno-sociolinguistique soit mené, en contexte scolaire, par les
différentes parties en présence et impulsé par la partie “légitime”,
investie du pouvoir de produire les règles du jeu.
De nombreuses initiatives pédagogiques ont en commun, de tenter
de s’appuyer sur les compétences et le vécu culturel et langagier des
élèves et de sensibiliser enseignants (formation initiale et continue)
et élèves à la diversité et à la variation. On peut citer, entre autres, les
activités mises en œuvre au collège par B. Seguin et F. Teillard (1996),
et publiées sous forme d’un petit dictionnaire, intitulé Les Céfrans
parlent aux Français. Mentionnons encore les initiatives de N. Baggioli-
Bilous (1999), s’appuyant sur la “production métissée” qu’est le rap
et sur les actions menées au primaire en matière d’écriture créative
(Raynal, 1997). Toutefois, ces actions restent relativement margina-
les, et pâtissent souvent de jugements assez normatifs.
Cependant, la politique de l’Éducation Nationale semble
montrer des infléchissements vers une plus grande ouverture à la
diversité 16, puisqu’on peut lire dans le Guide pratique des actions
pour la réforme, que développer et diversifier les pratiques de l’oral
« implique d’accueillir la parole de chaque élève dans sa spécificité,
avec attention et bienveillance, et ce quels que soient les écarts par

16. Concernant la promotion de la diversité linguistique et notamment l’enseignement


des langues de France, plusieurs discours du Ministre de l’Éducation nationale
esquissent des éléments d’une politique linguistique novatrice et semblent être suivis
de prémisses de planification. Ainsi, on peut lire, dans les récentes propositions de
programmes pour le cycle 3, que l’enseignement d’une langue étrangère ou régio-
nale, outre l’acquisition de compétences linguistiques, « vise aussi à faire découvrir
[…] l’enrichissement qui peut naître de la confrontation à d’autres langues, d’autres
cultures et d’autres peuples, y compris lorsqu’ils sont liés à l’histoire personnelle ou
familiale de certains élèves de la classe » (Direction de l’enseignement scolaire, 2001,
La consultation sur les nouveaux programmes de l’école primaire, p.14, disponible sur
www.eduscol.education.fr).
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122 JACQUELINE BILLIEZ ET CYRIL TRIMAILLE

rapport à la norme scolaire ». Le texte poursuit, en affirmant que «


c’est à cette condition qu’il est possible d’amener les élèves à
prendre conscience de la nécessité d’entrer dans la “langue de
l’école”, pour élargir son champ de connaissance, pour être
compris par tous ».
En s’appuyant sur les principes énoncés plus haut et en faisant
siennes les orientations européennes en la matière, le programme
européen “JA-LING/La porte des langues”, promu par le Centre
Européen des Langues Vivantes de Graz, sous l’égide du Conseil
de l’Europe, a pour objectif de diffuser et de “curriculariser” l’ap-
proche “éveil aux langues et au langage” 17.

CONCLUSION

Il ne s’agit, par conséquent, ni d’encenser démagogiquement et


béatement des pratiques transgressives, ni de renoncer au principe
d’égalité des citoyens devant les services publics, en vertu duquel
chaque élève a droit à un enseignement de la langue officielle, néces-
saire à toute insertion sociale, tant scolaire que professionnelle. Il en
va de même pour le droit de chaque enfant de pouvoir suivre un
enseignement de la langue de son choix (fût-ce une langue minori-
sée, qu’elle soit dite d’origine ou régionale). Il s’agit, bien au contraire,
de favoriser les appropriations linguistiques, en envisageant les fina-
lités des actions en plusieurs temps :
– la découverte et la prise de conscience de la diversité et des varia-
tions inter- et intralinguistiques, grâce, par exemple, à des repérages
dans des documents (textes, publicités, littérature, chansons…),
offrant des supports à une approche interdisciplinaire (français,

17. Coordonné par M. Candelier (Université du Maine), ce programme est également


subventionné par la DGLF (Délégation Générale de la Langue Française) et devrait,
à partir de 2001, bénéficier du soutien financier de l’Union Européenne. Il réunit des
équipes d’enseignants et de chercheurs, qui conçoivent, adaptent et mettent en
œuvre, des activités d’éveil aux langages et aux langues pour des classes allant de
la maternelle au collège.
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PLURILINGUISME, VARIATIONS 123

langues diverses, sémiotique de l’image, notamment télévisée,


histoire-géographie, éducation civique, musique…).
— La “légitimation” de phénomènes de variations et de diversité
linguistiques présents dans la classe, par leur étude dans un cadre
légitime. Des élèves généralement marginalisés par le rejet de leurs
pratiques, peuvent ponctuellement devenir “personne-ressource”
à l’occasion d’une discussion ou d’une activité portant sur l’usage de
telle ou telle langue ou variété de langue.
— L’objectivation par la mise en perspective, l’identification et la
manipulation des formes, ainsi que des fonctions des langues et de
leurs variations. C’est cette phase qui permet de prendre conscience
des effets (pragmatiques, sociaux) de tel ou tel usage et qui favorise
une distanciation, notamment par un travail de comparaison multi-
latérale.
Il s’agit donc, au total, tout en fixant un degré d’exigence réel, de
s’appuyer sur des “compétences interstitielles” (Zongo, à paraître),
pour développer des compétences linguistiques, métalinguistiques
et métacommunicatives, ainsi que des attitudes d’ouverture mutuelle.

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